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Les SPL ne peuvent pas être « à la carte » Les collectivités territoriales et leurs groupements peuvent, depuis la loi du 28 mai 2010, constituer des sociétés publiques locales « dans le cadre des compétences qui leur sont attribuées par la loi ». Ces SPL, au capital exclusivement public, soumises pour l’essentiel aux règles du droit commercial, doivent exercer leurs activités uniquement pour le compte de leurs actionnaires et sur le territoire de leurs membres. Depuis le vote de la loi, la formule a connu un succès croissant. Cependant, la possibilité pour des collectivités et leurs groupements de constituer des SPL dont l’objet serait multiple et ne correspondant pas intégralement aux compétences de chacun d’entre eux a été contestée par plusieurs Préfets. La cour administrative d’appel de Nantes vient de prendre position en faveur de cette lecture restrictive de la loi. La cour administrative d’appel de Nantes (19 septembre 2014, n° 13NT01683, 13NT01684, 13NT01685, 13NT 01686, 13NT01687, 13NT01697) vient de prendre position dans le débat relatif aux conditions de constitution d’une SPL : elle affirme que pour être membre d’une SPL dont l’objet est pluriel, toutes les collectivités et groupements adhérents doivent exercer toutes les compétences entrant dans cet objet. En l’espèce, la SPL avait été constituée avec pour objet la réalisation de prestations liées aux services publics d'eau et d'assainissement, comprenant notamment : -‐ -‐ -‐ la production, le traitement, le transport, le stockage et la distribution d'eau potable, la protection de la ressource en eau, le contrôle et la mise en conformité des branchements du réseau d'assainissement collectif, la collecte, le transport et l'épuration des eaux usées ainsi que l'élimination des boues produites SELARL Cabinet Coudray, Layla ASSOULINE, Avocat à la Cour Extrait de la NL n° 4 Octobre 2014 www.cabinet-‐coudray.fr Les membres fondateurs ne disposaient pas de toutes les compétences correspondant à cet objet : -‐ -‐ -‐ une communauté d’agglomération était compétente pour la protection de la ressource en eau et l’assainissement mais pas la production et la distribution d’eau ; deux communes étaient compétentes en matière de production et de distribution d’eau, mais ne l’étaient plus en matière d’assainissement, la compétence ayant été transférée à la communauté d’agglomération ; de la même manière, les deux syndicats intercommunaux adhérents n’étaient compétents qu’en matière de production et de distribution d’eau, mais pas en matière d’assainissement, les communes les constituant, par ailleurs membres de la communauté d’agglomération lui ayant transféré cette compétence. La Cour administrative d’appel pose donc pour principe que la constitution de la SPL était dès lors impossible entre ces membres pour cet objet. 1) Les débats en première instance Cette position, défendue par le Préfet des Côtes d’Armor, était justifiée par le postulat selon lequel, en dehors de l’hypothèse où tous les membres de la SPL sont compétents dans le domaine confié à la société, seule « la participation concomitante d’un EPCI et d’une ou plusieurs de ses communes membres au capital d’une même SPL peut être admise » et à condition « que l’objet social de la société concerne une compétence susceptible d’être partagée entre un EPCI et ses communes membres ». Cette affirmation reposait sur une lecture stricte de la formule figurant à l’article L. 1531-1 du CGCT disposant que les collectivités ne pouvaient constituer des SPL que dans le cadre des « compétences qui leur sont attribuées par la loi ». Une telle interprétation s’appuyait donc exclusivement sur la lettre de l’article L. 1531-1 du CGCT. Les parties à l’instance ont fait valoir que les SPL relevaient de la même logique que les SEML pour lesquelles la doctrine (voir notamment Guy DURAND, Encyclopédie des collectivités locales –chapitre 2 (folio n° 6230) – les sociétés locales - 2010-4) considérait que des communes et leurs groupements pouvaient adhérer sans détenir l’intégralité des compétences. SELARL Cabinet Coudray, Layla ASSOULINE, Avocat à la Cour Extrait de la NL n° 4 Octobre 2014 www.cabinet-‐coudray.fr Elles ont défendue définition partie de également souligné le caractère contradictoire de l’interprétation par le Préfet puisque lorsqu’une compétence est subordonnée à la de l’intérêt communautaire, il y a tout de même transfert d’une cette compétence à l’EPCI (ce qui est défini comme relevant de l’intérêt communautaire) tandis que le reste de la compétence continue à être exercé par les communes. La désignation de compétences « partagées » ne signifie donc nullement qu’il s’agit de compétences exercées à la fois par l’EPCI et ses communes membres, mais seulement de compétences dont une partie est exercée par l’EPCI (par exemple pour ce qui concerne la voirie désignée comme d’intérêt communautaire) et pour partie par les communes (par exemple, les voies restées communales). Admettre que ces communes et leur EPCI soient membres de la même SPL revient donc à permettre leur participation pour une partie de compétence qu’elles ne détiennent pas. Le tribunal administratif de Rennes (TA Rennes 11 avril 2013) a entériné la position de la Préfecture mais au prix d’une analyse quelque peu différente : « 2. Considérant qu’aux termes de l’article L. 1531-1 du CGCG : « Les collectivités territoriales et leurs groupements peuvent créer, dans le cadre des compétences qui leur sont attribuées par la loi, des sociétés publiques locales dont ils détiennent la totalité du capital. Ces sociétés sont compétentes pour réaliser des opérations d’aménagement au sens de l’article L. 300-1 du code de l’urbanisme, des opérations de construction ou pour exploiter des services publics à caractère industriel ou commercial ou toutes autres activités d’intérêt général. Ces sociétés exercent leurs activités exclusivement pour le compte de leurs actionnaires et sur le territoire des collectivités territoriales et des groupements de collectivités territoriales qui en sont membres. Ces sociétés revêtent la forme de société anonyme régie par le livre II du code de commerce et sont composées, par dérogation à l’article L .225 1 du même code, d’au moins deux actionnaires. Sous réserve des dispositions du présent article, elles sont soumises au titre II du présent livre. (…) SELARL Cabinet Coudray, Layla ASSOULINE, Avocat à la Cour Extrait de la NL n° 4 Octobre 2014 www.cabinet-‐coudray.fr 4. Considérant qu’il ressort des pièces des dossiers que, depuis le 1er janvier 2011, les collectivités membres de la communauté d’agglomération LTA, dont les communes de Ploubezre, de PleumeurBodou et de Ploumiliau et les communes membres des syndicats du Léguer et de la Baie, ont intégralement transféré à cet établissement public de coopération intercommunale la compétence « assainissement collectif et non collectif » ; que ce transfert de compétence fait ainsi obstacle à ce que les collectivités concernées puissent entrer au capital d’une société publique locale, dont l’objet social s’inscrit dans le cadre de cette compétence transférée, dès lors que cela aurait pour effet de les faire participer, en leur qualité d’actionnaires, aux décisions de la société publique locale concernant la mise en œuvre de cette compétence en méconnaissance des principes de spécialité et d’exclusivité régissant les transferts de compétences ; que, de même , la communauté d’agglomération LTA, qui ne dispose que de la seule compétence relative à la protection de la ressource en eau, notamment dans le cadre d’actions de restauration et d’entretien des cours d’eau et des zones humides ne peut, pour les mêmes motifs, être actionnaire d’une société publique locale compétente en matière de gestion de l’eau potable, demeurée de la compétence des communes de PleumeurBodou, Ploubezre, Ploumilliau et des Syndicats du Léguer et de la Baie ; » 2) La solution de la Cour Les parties ont fait appel du jugement en faisant valoir que la nature de la participation à une SPL ne pouvait être assimilée à un transfert de compétences, les membres de la SPL n’en étant nullement dessaisies. Ils faisaient valoir qu’en conséquence, la participation aux organes dirigeants d’une telle société ne constituait pas l’exercice de compétences dévolues à cette structure mais seulement la participation à la gestion de la société. Elles soutenaient que dès lors, rien n’interdisait à une collectivité ou un groupement d’être membre d’une SPL dont l’objet ne correspondait pas à toutes les compétences qu’elles détenaient ; cette circonstance ayant pour seule conséquence que les contrats que la SPL pourrait passer avec la collectivité ne pourraient porter que sur les domaines pour lesquels elle était compétente. La cour administrative d’appel a écarté cette analyse et confirmé le jugement mais au terme d’une interprétation différente de celle retenue par les premiers juges. SELARL Cabinet Coudray, Layla ASSOULINE, Avocat à la Cour Extrait de la NL n° 4 Octobre 2014 www.cabinet-‐coudray.fr La Cour administrative d’appel de Nantes a retenu est la motivation suivante : « 3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 1531-1 du code général des collectivités territoriales : " Les collectivités territoriales et leurs groupements peuvent créer, dans le cadre des compétences qui leur sont attribuées par la loi, des sociétés publiques locales dont ils détiennent la totalité du capital. (...)/ Ces sociétés revêtent la forme de société anonyme régie par le livre II du code de commerce et sont composées, par dérogation à l'article L. 225-1 du même code, d'au moins deux actionnaires. / Sous réserve des dispositions du présent article, elles sont soumises au titre II du présent livre. " ; qu'aux termes de l'article L. 1521-1 du même code, applicable aux sociétés publiques locales : " (...) La commune actionnaire d'une société d'économie mixte locale dont l'objet social s'inscrit dans le cadre d'une compétence qu'elle a intégralement transférée à un établissement public de coopération intercommunale peut continuer à participer au capital de cette société à condition qu'elle cède à l'établissement public de coopération intercommunale plus des deux tiers des actions qu'elle détenait antérieurement au transfert de compétences. (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 1524-5 du même code, également applicable aux sociétés publiques locales : " Toute collectivité territoriale ou groupement de collectivités territoriales actionnaire a droit au moins à un représentant au conseil d'administration ou au conseil de surveillance (...). / (...) Les sièges sont attribués en proportion du capital détenu respectivement par chaque collectivité ou groupement. (...) " ; qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions que, hors le cas, prévu par l'article L. 1521-1, où l'objet social de la société s'inscrit dans le cadre d'une compétence que la commune n'exerce plus du fait de son transfert, après la création de la société, à un établissement public de coopération intercommunale, la participation d'une commune et d'un établissement public de coopération intercommunale à une société publique locale, qui a d'ailleurs nécessairement pour effet de leur conférer la qualité d'actionnaire et de leur ouvrir droit à participer au vote des décisions prises par le conseil de surveillance ou le conseil d'administration de la société, n'est possible que lorsque l'objet social de celle-ci se rapporte à une compétence partagée ; que dans l'hypothèse où une commune ou un établissement public de coopération intercommunale n'exerçait pas l'une des compétences sur laquelle porte l'objet social de la société lorsque cette dernière a été créée, les mêmes dispositions font obstacle à ce qu'il en soit actionnaire ; qu'il en va de même pour l'établissement public de coopération intercommunale lorsque l'objet social de la société porte, notamment, sur des compétences qui ne lui ont pas été transférées ou ne sont pas susceptibles de l'être ;(…) » SELARL Cabinet Coudray, Layla ASSOULINE, Avocat à la Cour Extrait de la NL n° 4 Octobre 2014 www.cabinet-‐coudray.fr La cour, tout en acceptant de faire le parallèle entre les règles applicables aux SPL et celles applicables aux SEM, s’appuie sur l’exception figurant à l’article L. 1521-1 du CGCT, qui permet à une commune membre d’une SEML - en cas de transfert intégral de la compétence correspondant à l’objet social de celle-ci à un EPCI - de demeurer actionnaire de la société, pour en déduire qu’hormis cette exception toute collectivité membre d’une SEML ou d’une SPL doit exercer la compétence ou toutes les compétences correspondant à l’objet social. Elle admet une exception subsidiaire, toujours en prenant appui sur le libellé de l’article L. 1521-1 du CGCT : en effet, cet article ne mentionne que l’hypothèse d’un transfert intégral de la compétence. La cour admet néanmoins – implicitement – qu’en cas de compétence partagée entre une commune et un EPCI, c’est-à-dire en cas de transfert partiel, tant la commune que l’EPCI peuvent être membres de la SPL. La cour paraît toutefois assez peu certaine de son analyse puisqu’elle vise aussi l’hypothèse où les compétences sont seulement «susceptibles d’être partagées » entre un EPCI et ses communes membres, ce qui signifie qu’au moment de la constitution de la SPL, précisément, ces compétences ne seraient, par hypothèse, pas partagées… 3) Cette solution ne réussit pas totalement à convaincre L’interprétation retenue par la Cour va certainement très au-delà de la volonté du législateur. En effet, l’article L. 1521-1 du CGCT était initialement rédigé comme suit : « Les communes, les départements, les régions et leurs groupements peuvent, dans le cadre des compétences qui leur sont reconnues par la loi, créer des sociétés d'économie mixte locales qui les associent à une ou plusieurs personnes privées et, éventuellement, à d'autres personnes publiques pour réaliser des opérations d'aménagement, de construction, pour exploiter des services publics à caractère industriel ou commercial, ou pour toute autre activité d'intérêt général ; lorsque l'objet de sociétés d'économie mixte locales inclut plusieurs activités, celles-ci doivent être complémentaires. » SELARL Cabinet Coudray, Layla ASSOULINE, Avocat à la Cour Extrait de la NL n° 4 Octobre 2014 www.cabinet-‐coudray.fr La loi n° 2002-1 du 2 janvier 2002 a modifié une première fois cet article ajoutant un deuxième alinéa rédigé de la manière suivante : « La commune actionnaire d'une société d'économie mixte locale dont l'objet social s'inscrit dans le cadre d'une compétence qu'elle a transférée à un établissement public de coopération intercommunale peut continuer à participer au capital de cette société à condition qu'elle cède à l'établissement public de coopération intercommunale plus des deux tiers des actions qu'elle détenait antérieurement au transfert de compétences. » Le transfert intégral de la compétence n’empêchait donc pas une collectivité de rester membre de la SEML. La raison de cette solution était présentée lors des travaux parlementaires comme la nécessité de répondre à des divergences de jurisprudence entre les juridictions administratives et commerciales : « Article 10 (art. L. 1521-1 du code général des collectivités territoriales) Possibilité pour une commune de rester actionnaire d'une société d'économie mixte dont l'objet social correspond à une compétence transférée à un établissement public de coopération intercommunale. Le présent article, ajouté par l'Assemblée nationale sur la proposition de sa commission des Lois et avec l'accord du Gouvernement, vise à permettre à une commune de rester actionnaire d'une société d'économie mixte locale dont l'objet social s'inscrit dans le cadre d'une compétence qu'elle a transférée à un établissement public de coopération intercommunale. » L'article L. 1521-1 du code général des collectivités territoriales permet aux communes et à leurs groupements, dans le cadre des compétences qui leur sont reconnues par la loi, de créer des sociétés d'économie mixte les associant à une ou plusieurs personnes privées et, éventuellement, à d'autres personnes publiques pour réaliser des opérations d'aménagement, de construction, exploiter des services publics à caractère industriel ou commercial, ou pour toute autre activité d'intérêt général. Dès lors qu'une collectivité adhère à un établissement public de coopération intercommunale et lui transfère sa compétence dans le domaine où elle avait créé une société d'économie mixte pour lui confier l'exercice de cette compétence, elle ne devrait conserver, semble-t-il, ni ses actions ni la direction de la société. SELARL Cabinet Coudray, Layla ASSOULINE, Avocat à la Cour Extrait de la NL n° 4 Octobre 2014 www.cabinet-‐coudray.fr D'une part, en effet, en application de la loi n° 99-586 du 12 juillet 1999 relative au renforcement et à la simplification de la coopération intercommunale, les transferts de compétences des communes aux établissements publics de coopération intercommunale entraînent de plein droit la mise à disposition de ces derniers des biens, équipements et services publics nécessaires à leur exercice. De plus, les établissements publics de coopération intercommunale sont substitués de plein droit aux communes qui les créent dans toutes leurs délibérations et tous leurs actes 42(*). D'autre part, comme on l'a vu, l'objet social des sociétés d'économie mixte locales doit être rattaché aux compétences des collectivités et groupements actionnaires. En l'état actuel du droit, il appartiendrait donc aux communes membres de se retirer du capital d'une société d'économie mixte locale dont l'objet social correspond à une compétence transférée à un établissement public de coopération intercommunale, non pas en mettant à disposition, mais en lui cédant leurs actions, de sorte que celui-ci puisse intégrer à leur place les organes de direction de la société. En effet, la notion de mise à disposition des biens nécessaires à l'exercice des compétences transférées ne semble pouvoir s'appliquer au cas particulier de l'actionnariat social : une simple mise à disposition d'actions conduirait à dissocier totalement le droit de vote de la propriété du capital, alors que les sociétés d'économie mixte locales sont des sociétés anonymes dans lesquelles les droits de vote sont liés et proportionnels au montant du capital détenu et que seuls les actionnaires peuvent siéger dans les organes de direction. Toutefois, il est à noter qu'au regard du code de commerce, la substitution de l'établissement public de coopération intercommunale aux communes n'est pas de droit. Autrement dit, dans l'hypothèse où les communes ne souhaiteraient pas lui vendre leurs actions, aucune disposition ne pourrait les contraindre à une substitution d'office. Par ailleurs, dans un arrêt de 1993, le tribunal administratif de Versailles a jugé que la commune membre d'un établissement public de coopération intercommunale -en l'espèce un syndicat d'agglomération nouvelle- pouvait être actionnaire d'une société d'économie mixte locale dont l'objet s'inscrit dans le cadre de compétences transférées au groupement, à la condition que ce dernier soit associé au capital et à la gestion de la société. » (Tribunal administratif de Versailles, 12 octobre 1993, Commune de Reau c/ SAN de Sénart et préfet de Seine-et-Marne.) SELARL Cabinet Coudray, Layla ASSOULINE, Avocat à la Cour Extrait de la NL n° 4 Octobre 2014 www.cabinet-‐coudray.fr Pour mettre fin aux incertitudes nées de la jurisprudence administrative et des difficultés d'articulation entre droit administratif et droit des sociétés, le présent article tend à compléter l'article L. 1521-1 du code général des collectivités territoriales afin de préciser que la commune actionnaire d'une société d'économie mixte dont l'objet social s'inscrit dans le cadre de la compétence transférée peut continuer à participer au capital de cette société, à condition qu'elle cède à l'établissement public de coopération intercommunale plus des deux tiers des actions qu'elle détenait avant le transfert de compétence. Selon les indications fournies à votre rapporteur, la cession des actions devrait être réalisée selon les modalités du droit commun des sociétés. Le prix d'achat sera fixé d'accord entre les parties, à défaut par un expert qu'elles auront désigné. L'obligation faite aux communes de céder plus des deux tiers des actions qu'elles détenaient antérieurement au transfert de compétences aura pour effet de les empêcher de conserver une minorité de blocage au sein des organes de direction de la société. On rappellera qu'une disposition ayant un objet similaire mais un champ beaucoup plus large figurait à l'article 15 de la proposition de loi initiale. Elle tendait à autoriser l'ensemble des collectivités territoriales et leurs groupements -et non les seules communes- à participer au capital de sociétés d'économie mixte locales lorsque la mission qu'ils leur confient présente pour eux un caractère d'intérêt général. Il n'était fait aucune référence au transfert de compétences à un établissement public de coopération intercommunale, même si la rédaction proposée semblait inclure cette situation. Compte tenu de l'absence de règle de répartition du capital entre la collectivité et l'établissement public de coopération intercommunale mais aussi de l'imprécision de la notion de « missions présentant un caractère d'intérêt général pour les collectivités territoriales », cette disposition n'avait pas été retenue par votre commission des Lois dans ses conclusions. Plus précis, le texte adopté par l'Assemblée nationale permettra de clarifier le droit actuel. (Rapport Sénat n° 6 (2001-2002) de M. Paul GIROD, fait au nom de la commission des lois, déposé le 10 octobre 2001) On ne peut que relever la manière très hésitante de décrire l’état du droit avant cette modification. Le rapporteur se borne à indiquer « qu’il semble » que le transfert de compétences devrait entraîner la substitution de personne morale au sein de la société… Le jugement du tribunal administratif de Versailles cité par le rapport est d’ailleurs publié aux tables du recueil Lebon et résumé comme suit « dans l’hypothèse où cet objet concernerait des compétences transférées au syndicat communautaire la commune se trouve alors dans l’obligation d’associer ce syndicat à l’institution et à la gestion de la société d’économie mixte ainsi créée. » : il n’est pas question d’un transfert ou d’une substitution de la personne publique à laquelle la compétence est transférée. SELARL Cabinet Coudray, Layla ASSOULINE, Avocat à la Cour Extrait de la NL n° 4 Octobre 2014 www.cabinet-‐coudray.fr En outre, il résulte des termes du rapport que le législateur a clairement entendu autoriser le maintien dans une SEML des collectivités membres alors même qu’elles ne détiendraient plus les compétences correspondant à l’objet social de la SEML : il y a donc incontestablement reconnaissance d’une déconnexion au moins partielle entre l’exercice de la compétence et la qualité de membre de la SPL. Le deuxième alinéa de l’article L.1521-1 du CGCT a été modifié une seconde fois pour parvenir au libellé du texte actuel issu de la loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 : « La commune actionnaire d'une société d'économie mixte locale dont l'objet social s'inscrit dans le cadre d'une compétence qu'elle a intégralement transférée à un établissement public de coopération intercommunale peut continuer à participer au capital de cette société à condition qu'elle cède à l'établissement public de coopération intercommunale plus des deux tiers des actions qu'elle détenait antérieurement au transfert de compétences. Le deuxième alinéa est applicable au groupement de collectivités actionnaire d'une société d'économie mixte. » L’objet de cette modification était présenté par l’auteur de l’amendement, M. Vincent CAPO-CANNELLAS : « La loi du 2 janvier 2002 tendant à moderniser le statut des sociétés d’économie mixte locales comprenait une disposition permettant d’organiser les évolutions de l’actionnariat des SEM, les sociétés d’économie mixte, résultant des transferts de compétences. Cette évolution a ainsi pu être faite sans soulever de difficultés particulières. Il s'agit maintenant d’examiner cette question au regard des dispositions de ce projet de loi. S’inscrivant dans le même esprit que la loi de 2002, cet amendement vise à sécuriser le sort des actions qu’une collectivité locale détient dans une entreprise publique locale, EPL, lorsque la compétence justifiant cette participation au capital a été intégralement transférée à un EPCI. Cette situation comprend le cas des transferts de compétences qui interviendront au profit des futures métropoles. Il permettrait de clarifier l’état du droit, qui ne permet pas d’appréhender des situations complexes, et pourtant bien réelles, dans lesquelles une compétence n’a pas été intégralement transférée à un EPCI, ou encore lorsque la société d’économie mixte exerce plusieurs activités en dehors de celle transférée à l’EPCI. SELARL Cabinet Coudray, Layla ASSOULINE, Avocat à la Cour Extrait de la NL n° 4 Octobre 2014 www.cabinet-‐coudray.fr Au travers de cet amendement, nous entendons aussi clarifier les conditions dans lesquelles les dispositions du deuxième alinéa de l’article L. 1521-1 du code général des collectivités territoriales peuvent être appliquées lors du transfert d’une compétence d’un EPCI vers un autre EPCI, toutes les fois où la disparition du premier ne sera pas légalement requise. » (Sénat, Séance du 5 juin 2013) Cet exposé des motifs un peu laconique est explicité par le rapport parlementaire présenté à l’Assemblée Nationale par M. DUSSOPT au nom de la Commission des Lois : « Le présent article organise la possibilité, pour une commune ou un groupement de collectivités territoriales, de conserver toutes ses parts au sein d’une société d’économie mixte dont l’objet social correspond à une compétence non intégralement transférée à un EPCI. L’article L. 1521-1 du code général des collectivités territoriales permet aux communes et à leurs groupements, dans le cadre des compétences qui leur sont reconnues par la loi, de créer des sociétés d’économie mixte les associant à une ou plusieurs personnes privées et, éventuellement, à d’autres personnes publiques pour réaliser des opérations d’aménagement, de construction, exploiter des services publics à caractère industriel ou commercial, ou pour toute autre activité d’intérêt général. Dès lors qu’une collectivité adhère à un établissement public de coopération intercommunale et lui transfère sa compétence dans le domaine où elle avait créé une société d’économie mixte pour lui confier l’exercice de cette compétence, elle devrait transférer ses actions et la direction de la société, en application de l’article L. 5211-17 qui prévoit que le transfert « entraîne de plein droit l’application à l’ensemble des biens, équipements et services publics nécessaires à leur exercice, ainsi qu’à l’ensemble des droits et obligations qui leur sont attachés à la date du transfert, des dispositions des trois premiers alinéas de l’article L. 1321-1 », soit « la mise à la disposition de la collectivité bénéficiaire des biens meubles et immeubles utilisés, à la date de ce transfert, pour l’exercice de cette compétence ». Aussi une disposition introduite à l’article L. 1521-1 du code général des collectivités territoriales par la loi n° 2002-1 du 2 janvier 2002 tendant à moderniser le statut des sociétés d’économie mixte locales prévoit que la commune actionnaire d’une société d’économie mixte dont l’objet social s’inscrit dans le cadre de la compétence transférée peut continuer à participer au capital de cette société, à condition qu’elle cède à l’établissement public de coopération intercommunale plus des deux tiers des actions qu’elle détenait avant le transfert de compétence et donc le contrôle de la société mixte. Le présent article est issu de l’adoption en séance publique par le Sénat d’un amendement présenté par les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants-UC. SELARL Cabinet Coudray, Layla ASSOULINE, Avocat à la Cour Extrait de la NL n° 4 Octobre 2014 www.cabinet-‐coudray.fr Le 1° prévoit que l’obligation de transfert d’au moins deux tiers des titres ne trouverait à s’appliquer qu’au cas où la compétence a été intégralement transférée à l’EPCI à fiscalité propre, afin de prévoir les « situations complexes, et pourtant bien réelles, dans lesquelles une compétence n’a pas été intégralement transférée à un EPCI, ou encore lorsque la société d’économie mixte exerce plusieurs activités en dehors de celle transférée à l’EPCI ». Le 2° prévoit étend cette même faculté de conserver des actions aux groupements de collectivités actionnaires d’une société d’économie mixte, afin qu’un tel groupement (essentiellement un syndicat) puisse rester actionnaire minoritaire après le transfert intégral d’une de ses compétences à un EPCI, ou rester actionnaire prépondérant en cas de transfert partiel de cette compétence. » L’objectif ainsi poursuivi par le législateur consiste donc à permettre : -‐ -‐ la conservation par une commune ou un groupement de l’intégralité de ses actions alors même qu’une compétence a été partiellement transférée à un EPCI ; la conservation d’un tiers de ces actions par la commune ou le groupement en cas de transfert intégral de la compétence. Ainsi, le législateur admet bien que la présence d’une collectivité ou d’un groupement dans une SEML est possible alors même qu’ils ne détiendraient plus toutes ou même plus aucune des compétences de la société. Il résulte des précisions données par le rapporteur de la commission des Lois que l’objectif était bien de permettre qu’une SEML ne soit pas démantelée au prétexte qu’elle serait devenue « à la carte » du fait de l’évolution des compétences de ces membres. Les conclusions que tire la cour administrative d’appel de ce dispositif en estimant que cette exception ne vaut qu’en cas d’évolution des compétences des collectivités membres au sein de la société va donc manifestement très audelà de la volonté du législateur qui n’a pas entendu interdire les SEML – ou les SPL – à la carte ab initio. Force est de constater que si cette situation est possible en cours de vie de la SEML – ou de la SPL -, il devient particulièrement incompréhensible de l’interdire lors de sa constitution initiale et le fondement théorique d’une telle interdiction resterait à construire. A l’inverse, si on prend en considération le fait que l’adhésion à une SEML ou à une SPL ne constitue pas un transfert de compétence au profit de cette société mais bien seulement une habilitation à conclure avec les communes membres des contrats dans les domaines – seulement ceux-là – pour lesquels chaque membre est compétent, les solutions de l’article L.1521-1 sont alors tout à fait cohérentes et compatibles avec la constitution de SPL « à la carte ». SELARL Cabinet Coudray, Layla ASSOULINE, Avocat à la Cour Extrait de la NL n° 4 Octobre 2014 www.cabinet-‐coudray.fr Cette analyse a été retenue récemment, tant par le juge des référés du TA de Lille qui a admis la création d’une SPL entre un syndicat mixte de transports et une communauté d’agglomération membre SPL (TA Lille, Ord., 29 mars 2012, CCSA, er n° 1201729) que par, le TA de Clermont dans un jugement du 1 juillet 2014 (n°1301728, Préfet du Puy-de-Dôme contre SEMERAP). L’arrêt de la Cour Administrative d’Appel prend le contre-pied de cette interprétation. Une nouvelle clarification législative paraît donc indispensable. Layla ASSOULINE Avocat à la Cour SELARL Cabinet Coudray, Layla ASSOULINE, Avocat à la Cour Extrait de la NL n° 4 Octobre 2014 www.cabinet-‐coudray.fr