jean-louis guntz

Transcription

jean-louis guntz
JEAN-LOUIS GUNTZ
pour faire une balade à cheval et retrouver
ainsi l’enthousiasme de leur jeunesse.
Pour la première fois j’ai découvert cet
animal. Ainsi, ce jour-là, ils avaient projeté
d’aller d’Eygalières jusqu’à Aureille, un
village distant d’une douzaine de
kilomètres, et de fêter les retrouvailles au
restaurant des chasseurs. Une fois que tout
fut prêt, je me suis trouvé embarqué sur le
dos de « quelque chose » de tout à fait
nouveau
pour
moi,
difficilement
maîtrisable et répondant au nom sans
équivoque de « ZEUS ». J’ai donc fait ce
long « voyage » aller-retour après avoir
honoré quelques bons mets de Provence
qui ont contribué à perturber mon équilibre
plutôt renversant du parfait débutant.
Pour une première, se fût une grande
première, aux trois allures en traversant les
routes communales ou départementales
(peu fréquentées, il est vrai) à plat ventre
sur ma monture. La pédagogie de la
découverte par l’instinct fut appliquée
pleinement…
Pour commencer : le baptême « de
cheval »
J’ai commencé à monter à cheval à l’âge
de 14 ans chez Henri Roques à Eygalières.
Il a été le promoteur du tourisme équestre.
En effet c’est lui qui a été à l’origine des
randonnées équestres longues durées. Il a
par ailleurs, ouvert la voie de Saint Jacques
de Compostelle depuis Eygalières. Pour
cela, il s’est déplacé à cheval depuis son
village de Provence jusqu’à Paris pour
attirer l’attention de la Fédération Équestre
dans le but de faire reconnaître
officiellement cette nouvelle discipline. Le
tourisme équestre était né.
C’est à l’âge de 14 ans que je suis arrivé
chez lui par hasard. Mon père qui avait fait
son service militaire à cheval devait
retrouver un de ses amis qu’il avait connu
à cette occasion au Maroc. Ils se sont
donnés rendez-vous chez Henri Roques
Le soir, je suis rentré au collège
enthousiaste, euphorique, imprégné de
mille sensations confuses et exaltantes. Ce
fut le détonateur de ma carrière ; étant
donné mes origines provençales, j’ai
poursuivi ce loisir par la suite en
Camargue, en participant de près ou de
loin aux ferrades dans les manades du delta
du Rhône.
Maître Couillaud : le début de la
formation professionnelle
Quelque temps plus tard, la question de
mon avenir se posa, qu’est-ce que je
voulais faire ?
Une ouverture nouvelle vers les sports
équestres se présentait.
1
Une information venant du Haras du Pin
m’a orienté vers un établissement
professionnel, chez maître Couillaud, près
de Saint-Rémy-lès-Chevreuse, à ChoiselRambouillet ; Je suis donc arrivé au
château de Breteuil vers 17 ou 18 ans.
C’est là que j’ai rencontré Patrick Le
Rolland1.
Maître Couillaud nous préparait aux
examens pour devenir moniteur afin
d’enseigner dans les clubs et pour certains
d’entre nous entrer au Cadre Noir.
Chaque année, il mettait un point
d’honneur à présenter à Saumur un
cavalier ou deux. Maître Couillaud était un
ancien militaire, il n’avait jamais était au
Cadre Noir. Il a toujours fréquenté ce
milieu civilo-militaire sur les terrains de
concours ou bien en société.
La flexion de cheville !
L’enseignement était plus rigoureux
qu’aujourd’hui. Il fallait être beau à cheval
et efficace. On nous encourageait à monter
les escaliers les talons plus bas que la
pointe des pieds, et à marcher ainsi.
Dans la position du cavalier à cheval
l’action des jambes commençait par la
fermeture des mollets et ce n’est qu’après
que venait l’action de l’éperon qui
renforçait
l’action
de
la
jambe.
Aujourd’hui dans l’équitation moderne, de
masse, on voit l’éperon qui prime sur toute
autre action.
Lorsque je suis sorti de cet établissement,
j’avais acquis une certaine assurance.
Le Maître exigeait de nous dans bien des
domaines, une grande rigueur de propreté,
de discipline et de travail fini. Il nous a
tanné les fesses sur les selles d’arme pour
obtenir la belle silhouette adaptée aux trois
disciplines. Il nous considérait comme de
futurs professionnels et nous parlait
comme à des hommes responsables. En
sortant de chez lui nous devions tous être
moniteurs.
Sous les drapeaux
J’ai appris que pour entrer au Cadre Noir,
il fallait être de carrière. S’engager en
1962, voulait probablement dire partir en
Algérie. J’ai tout simplement devancé
l’appel afin de rejoindre Saumur.
Par la suite, j’ai obtenu mes galons de
Maréchal-des-Logis et j’ai servi au peloton
de Spahis à Saumur avec la tenue
appropriée.
Certains dimanches, en été, nous partions
nous produire dans des villages pour faire,
parait-il, des fantasias. Cette aventure
haute en couleur était partagée avec mon
camarade Patrick le Rolland et je n’ose pas
le dire mais, avec à peine nos 20 ans, nous
avons aimé ça.
Saumur, l’entrée au Cadre Noir
J’ai fait mon cours d’élève Sous-Maître en
même temps que le Lieutenant Carde
faisait le CPE (cours de perfectionnement
équestre), c’était en 1964-1965.
42
1
Patrick Le Rolland : Ancien cavalier de dressage de haut
niveau (quatre fois champion de France), il est entraîneur de
dressage et consultant pour des cavaliers de haut niveau. Il a été
écuyer du Cadre Noir de Saumur de 1964 à 1980 et entraîneur de
l'équipe de France de dressage de 1981 à 1985. À ce titre, il a
travaillé avec Margit Otto-Crépin et Dominique d’Esmé. Il est
un des rares cavaliers au monde à avoir obtenu la note de 10 sur
10 en position en concours international de dressage.
À la fin de l’année, j’étais retenu pour
rester à Saumur. Ma taille, mon poids,
l’aptitude d’aller dans toutes les disciplines
2
Le colonel Christian Carde : écuyer en chef du Cadre noir de
1991 à 1999.
2
et l’intérêt que je portais aux Sauteurs ont
contribué à cette décision.
Lorsque je me suis présenté à l’Écuyer en
Chef, le Colonel de Saint-André , celui-ci
a souhaité me voir travailler sur le plat et à
l’obstacle. À l’issue de cette évaluation, il
m’a dit : « je vous garde ».
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Aller dans cette voie me plaisait
grandement, bien que j’avais un moment
été tenté de faire une vraie carrière
purement militaire. L’armée m’a beaucoup
plu par le côté sérieux des choses et des
rapports humains, tout le monde avait sa
chance. Il fallait tout simplement travailler.
Le cours d’élève Sous-Maître
La mise en route, le matin, commençait par
une séance sans étriers avec les vieux
chevaux réformés de courses ou divers. Ils
n’étaient pas les plus dociles ni les plus
confortables et avaient de temps à autre
l’obsession du point fixe en voyant la ligne
droite… Très souvent, l’après midi, une
autre séance sans étriers facilitait les
digestions difficiles des repas pris au
mess...
Certains
de ces chevaux étaient
fantasques, peu soumis et devaient, paraîtil, contribuer à nous donner de l’assiette,
de l’assurance et développer chez nous
l’instinct de conservation…! Ces séances
se pratiquaient au manège ou à l’extérieur,
sur route ou terrain varié (l’hippodrome du
Breil).
Le vendredi avait une particularité bien
définie, celle d’aller à Verrie. Les étriers
restaient aux écuries. L’itinéraire était
Saumur-Verrie, tour de Verrie sur les
obstacles et retour Saumur4.
L’instructeur montait sans étriers, se
plaçait en tête de reprise, en général sur un
cheval franc et confortable. Le départ était
prévu à 13 heures 15 et le retour vers 17
heures. Selon l’humeur du jour, ou
l’emploi du temps, nous le suivions sur les
obstacles les plus variés du cross de Verrie,
les uns derrière les autres ou parfois
individuellement. Il y avait une grande
émulation.
Plus tard, comme instructeur, dans le
travail journalier de mise en selle, avec nos
élèves et lorsque le temps le permettait, il
était toléré de tomber la tunique
essentiellement à l’hippodrome du Breil où
il y avait à l’entrée un porte- manteau
prévu à cet effet. Il faut savoir qu’autrefois
l’instructeur était en tenue de tradition
toute la journée et rien ne devait déroger à
la règle.
C’est très couramment que les élèves SousMaîtres sautaient sans étriers en position
« Danloux », ou dans une position qui
laisse la jambe tomber naturellement de
son propre poids avec des variantes
comme : mains derrière le dos, képis
devant les yeux, etc. Les obstacles
s’ajoutaient aux autres obstacles, à fausses
foulées ou pas, hauteurs et largeurs
variables. Les séances au Manège étaient,
pour les élèves Sous-Maîtres, agrémentées
du travail aux piliers dirigé par la Maître
de Manège.
Les mains derrière le dos, les cuisses sur
leur plat, la jambe descendue, il fallait, en
levant la tête, fixer la rosace qui laissait
passer la lumière, celle de l’inspiration !
Et là, si le cavalier ne la trouvait pas pour
se placer dans la selle, le cheval Mimosa
par une poussée énergique des postérieurs
vous envoyait faire un soleil… !
3
Le colonel Jean de Saint-André († 1996) : écuyer en chef du
Cadre noir de 1964 à 1972.
4
L'hippodrome de Verrie situé sur les communes de Verrie et
Rou-Marson. Propriété de l’École Nationale d’Équitation, le
champ de courses de Verrie propose l’un des plus grands parcs
d’obstacles de course et de cross de France.
3
Équitation, Enseignement, Formation
résultats. Tout ce qu’on apprend sur la
méthode quand on est élève est un peu
livresque et puis viennent les expériences
du terrain qui nous amènent à d’autres
ouvertures. Ce sont celles-là qu’il faut
aussi enseigner, tout en restant classique et
dans le domaine du raisonnable. Pour
toutes ces raisons, je rends hommage au
Colonel de Saint André et aux autres
Écuyers en Chef qui m’ont fait confiance.
Par la suite ce fut le Commandant Boyot
chef de cours du CFI qui clarifia la
pédagogie appliquée.
J’ai beaucoup monté en course, en
complet, le Cadre Noir m’a aussi procuré
la possibilité de monter en concours
hippique et en dressage, et de pratiquer les
Sauteurs pendant 30 ans. J’ai aimé
profondément avec passion, enthousiasme
et sincérité Tout, absolument Tout ce que
je faisais, quelque soit la discipline et ma
volonté était de servir le Cadre Noir qui
avait bien voulu m’accepter.
J’ai puisé un grand intérêt aux Sauteurs
qui, je crois, sont formateurs. Cependant
on ne se forme pas uniquement en montant
à cheval
mais aussi en faisant de
l’instruction. Aussi, j’ai bien apprécié
lorsque le Colonel de Saint-André m’a
demandé de bien vouloir être enseignant au
cours de formation des instructeurs (CFI)
la mise en selle et plus tard l’école des
aides, et par la suite le concours complet.
J’ai prodigué
l’enseignement avec
beaucoup de plaisir en m’investissant
spontanément dans cette voie.
Cette expérience a duré 6 ou 7 ans. La
pratique que je commençais à avoir, puisée
sur le terrain m’a beaucoup apporté, m’a
fait réfléchir sur moi-même, sur ce que je
prodiguais, sur la qualité de mon
instruction, de mon savoir équestre.
L’enseignement m’a aidé à me remettre en
question sur mes possibilités et sur les
moyens employés afin de parvenir à des
Précis de
l’équitation
pédagogie
appliquée
à
Le commandant Boyot a écrit un fascicule
qui s’appelle : « Précis de pédagogie
appliquée à l’équitation ». Ce précis de
pédagogie a trouvé son inspiration à
travers ce que nous faisions tous depuis des
années mais sans doute d’une façon
désordonnée. Il était basé sur les principes
d’instruction militaire de l’École de
Cavalerie. Il y avait une façon d’être, une
façon de faire, une façon de faire faire, qui
s’est perpétuée quelque peu. Cette logique
a trouvé, je pense, son complet
épanouissement à une certaine époque et
fait ses preuves à travers les différentes
disciplines enseignées au Cadre Noir qui
était militaire.
C’était très concis, très clair, même si
l’auteur était un peu « pinailleur ». Il avait
la prétention d’être cohérent dans le but
d’uniformiser la façon d’enseigner et de
donner une trame à son discours. Cette
méthode a été un excellent recours pour un
jeune enseignant et évitait toute dispersion
et égarement. Du récapitulatif de la leçon
précédente en passant par la leçon du jour
et ouverture sur la prochaine séance, rien
n’était laissé au hasard. L’enseignant
préparait à l’avance son cours ; il était à
cheval avec une monture capable de
4
montrer et démontrer en détail à l’élève la
leçon proprement dite.
Si toutefois il en était besoin, l’instructeur
cédait son cheval à l’élève en difficulté. Le
responsable du CFI assistait d’une façon
impromptue à notre cours. Il se faisait une
idée de notre enseignement et évaluait
discrètement les élèves.
Tout le monde parlait le même langage
équestre, de la même chose et de la même
façon. Ainsi les professeurs pouvaient
facilement être interchangeables et chacun
avait à cœur de passer les consignes de ce
qui devait être fait si un remplacement
devait s’opérer inopinément. À titre
d’exemple : l’exercice était montré en
silence - puis celui-ci était commenté avec
explications - puis application individuelle
avec corrections – et après exécution
collective - et enfin arrivait la conclusion
sur le travail fait et une ouverture vers la
leçon qui allait suivre.
Cette méthode
simple m’a aidé un peu tout le long de ma
carrière, aujourd’hui elle est appelée la
méthode Boyot.
L’Adjudant-Chef Wattier, mon premier
Maître de Manège
Souvent, je prends cet « ancien » comme
référence. À l’époque, il brillait en
concours de dressage (national et
international). Il connaissait à fond la
méthode à laquelle il nous conviait à nous
référer. De nature bourrue il était peu
enclin à philosopher ou à discuter.
On puisait cependant à travers notre
observation (l’école du regard) sa façon de
faire que l’on adoptait et personnalisait.
Cela avait une très grande importance. Le
respect de la hiérarchie due au grade nous
empêchait très souvent de communiquer.
On ne s’en plaignait pas, c’était ainsi. Cela
nous permettait de faire nos propres
expériences et les rappels à l’ordre dont le
ton était cinglant, péremptoire, sans
discussion, nous remettaient sur la route
que nous n’aurions pas du quitter.
À l’époque où je suis arrivé, chaque cheval
était sorti de l’écurie par son soigneur. Il
était placé sur un rang et aligné. Au
commandement du Maître de Manège :
« Messieurs à cheval » nous donnions la
jambe gauche pour que l’on nous mette à
cheval. Un coup de chiffon ensuite sur les
bottes nous était donné pour enlever les
dernières poussières ramassées dans les
écuries. Au commandement face à droite,
en rang par deux directions le Manège
Margueritte, la reprise s’élançait vers le
lieu de travail. Arrivé au Manège nous
recevions l’ordre de prendre la piste à
main droite ou gauche, etc., et tout le
travail se faisait en reprise à distance
déterminée ou indéterminée selon les
exercices annoncés. Il en était ainsi pour
tous les chevaux y compris les chevaux de
sport qui lors des trottings se déplaçaient
sous les ordres du responsable en colonne
par deux au pas au trot dans la campagne
saumuroise. Ceci a duré plusieurs années.
Au retour il nous était commandé « face à
droite sur un rang et halte. À terre ». À ce
moment là, les soigneurs qui se tenaient
devant la porte attendaient l’ordre de se
saisir des chevaux et au commandement
« Rentrez les chevaux » ils se précipitaient
en ordre pour les conduire à leur place
dans les stalles et prodiguer les soins.
Pour en revenir au travail il n’était pas
question concernant les jeunes arrivés
5
comme je l’ai vu récemment de dire au
Maître de Manège: « attendez, moi, je vais
vous montrer comment je fais », à tous les
coups vous auriez pris la direction de la
porte et une nouvelle affectation aurait pu
être envisagée.
Le mimétisme : l’école du regard
Provoqué probablement par une ambiance
un peu austère, l’observation permanente
de ce qui se passait autour de nous,
amenait cependant de l’eau à notre moulin.
La recherche du résultat à travers une
méthode nous incitait à calquer notre façon
de faire sur celle du professeur jusqu’au
résultat escompté. À partir de cet instant,
on avait senti et compris, on pouvait alors
transcrire, reproduire à nouveau sur
d’autres chevaux et le résultat arrivait. Ce
comportement
allait
au-delà
de
l’équitation.
La rigueur dans la tenue à pied trouvait
dans l’exemplarité le modèle à imiter.
C’était aussi vrai dans la façon d’être de
l’enseignant vis-à-vis de ses élèves que
dans le comportement à cheval dans le
travail journalier. C’était un tout et non un
presque tout. Les déplacements à pied à
travers l’École de Cavalerie, en ville ou
tout simplement au sein des Écuries du
Manège se faisaient en tenue de tradition
réglementaire, gants fauve (pas troués),
boutons reluisants, éperons brillants, bottes
cirées, petite cravache tenue dans la main
gauche astiquée, képi sur la tête…Tous les
sous-lieutenants de l’École de Cavalerie en
tenue kaki, étaient également en bottes,
gants, cravate, éperons et cravache
(appelée perpignan). Tous les élèves civils
étaient en cravate, gants, veste et bombe,
cravache.
Cette époque était une époque de transition
entre le passé militaire et l’École Nationale
d’Équitation. Tout n’était pas forcement
« rose » et les conseils individualisés
probablement manquaient. Cependant le
fait de travailler tous ensemble était très
enrichissant. Le fait de se retrouver par
petits
groupes
dans
les
mêmes
compétitions, saut d’obstacles, concours
complet, courses, resserrait les liens et
créait une émulation au profit de la
cohésion. Le respect de l’uniforme, appris
par le passé militaire et sa mise à
l’honneur, nous imposait une qualité de
travail pour être digne de la tenue et rester
à Saumur.
La mise en main, le garde à vous,
l’obstacle
L’Adjudant Chef Wattier parlait toujours
de la mise en main. Il disait toujours :
« mise en main, mise en main, c’est
insuffisamment en main ». Il ne supportait
pas que les chevaux « battent à la main ».
De la même manière que le Colonel
Durand5 alors Écuyer en Chef exigeait
qu’au commandement « à vos rênes »,
cheval et cavalier redressent leur position.
5
Le général Pierre Durand a achevé sa carrière militaire comme
écuyer en chef du Cadre Noir, puis comme directeur de l'École
Nationale d'Équitation.
6
Il n’était pas pensable à ce moment-là
d’avoir un cheval qui se promène « le nez
au vent » et un cavalier qui ne rectifie pas
sa posture. Nous mettions le bras droit
derrière la cuisse tout en prenant les rênes
dans l’autre main. Le cheval devait être
dans une attitude qui correspondait à son
niveau de dressage. Ceci était devenu un
réflexe. Au travail c’était tout autrement.
Les chevaux prenaient des positions soit
vers le bas soit vers le haut en fonction de
ce qu’on voulait obtenir. Ainsi pour le
travail à l’obstacle, et notamment sur les
cavalettis, les chevaux qui tirent leur dos
sur des attitudes basses, étaient à
rechercher.
Les habitudes professionnelles de JeanLouis Guntz : « je commence tôt parce
que j’aime avoir la paix et avoir cette
sérénité pour travailler »
J’aime bien avoir la paix et savoir que les
chevaux m’appartiennent. Évidemment,
s’il y avait du monde dans le manège, mes
chevaux auraient toujours une oreille vers
ceux qui travaillent, vers le spectateur qui
entre, vers tout ce qui bouge et distrait….,
arrive le tracteur qui herse, le garde
manège qui arrose, les élèves qui ne savent
pas où ils vont et les cavaliers qui arrivent
avec la première histoire drôle de la
journée…
Il m’est arrivé pendant de longues années
de faire sonner le réveil à 4 heures et quart
pour être à cheval à 5 heures. À 5 heures,
je préparais mes chevaux et montais tout
de suite après. J’étais très heureux ainsi !
Plus tard, j’ai senti que « ça coinçait un
peu » avec certains responsables moins
matinaux que moi. Alors, j’ai accepté de
monter plus tard à 5 heures 30. Mais bon,
je sentais bien là aussi que cela
occasionnait des problèmes. On s’est mis à
me parler d’économie d’énergie, de
sécurité, etc., j’ai abondé dans leur sens et
n’ai rien changé à mes habitudes et ainsi
jusqu’au dernier cheval du dernier jour de
ma vie active.
Les revues de chevaux par l’Écuyer en
Chef
À l’époque du Colonel Lair, puis du
Colonel de Saint-André, tous les chevaux
étaient vus par l’Ecuyer en Chef au départ
et au retour d’une compétition. Ils étaient
présentés au pas et au trot dans l’allée sous
le balcon de l’Ecuyer en Chef, par le
cavalier
de
manège
responsable
(palefrenier-soigneur) et en tenue de sortie.
Chaque soigneur mettait un point
d’honneur à voir leurs chevaux sortir à la
reprise des Ecuyers ou à la reprise des
Sauteurs et gagner sur les terrains de
compétition.
Je me souviens avoir eu une jument civile
appartenant à Mr D.G. avec laquelle j’ai
dû faire deux ou trois championnats de
France
de
CCE.
Afin
d’obtenir
l’autorisation de l’Ecuyer en Chef de
participer au concours, il me fallait la lui
présenter sur le rectangle de dressage. À la
suite de cela, j’obtenais ou pas la
possibilité de l’embarquer dans le van.
Ces points de rendez-vous donnaient à
l’Écuyer en Chef la possibilité d’avoir un
dialogue avec le cavalier de manège,
l’entraîneur, le vétérinaire, le cavalier. Et si
les
chevaux
ne paraissaient pas
suffisamment prêts, ils restaient à la
maison et s’ils avaient été très éprouvés par
la compétition le vétérinaire s’entretenait
avec chacun d’entre nous et indiquait la
solution à adopter.
Aujourd’hui l’École est devenue trop
importante pour perpétuer ces rencontres
et les concours sont très nombreux. Les
Écuyers en Chefs sont sollicités de toutes
parts et surtout par des tâches
administratives. C’est l’évolution !
7
Du Cadre Noir militaire à l’École
Nationale d’Équitation
Lorsque je suis rentré au Cadre Noir, celuici était militaire. Nous étions douze
officiers, douze sous-officiers et un Écuyer
en Chef. Une grande famille en quelque
sorte.
Bordé d’un côté par la Loire et de l’autre
par la ville et aussi par l’École de
Cavalerie, le Manège en gardant ses
habitudes, maintenait la culture et le
prestige de l’Ecole française. C’est sous
l’instigation du ministre Debré6 qu’en 1972
le Cadre Noir devient l’École Nationale
d’Équitation. C’est sur les hauts de SaintHilaire Saint-Florent
au lieu dit de
Terrefort qu’a été implanté un grand
établissement concernant essentiellement
les professionnels et enseignants de ce
sport.
Dès ce moment-là, nous reçûmes des
élèves de tous les horizons, militaires ou
civils, français ou étrangers en vu d’être
formés et diplômés à l’École pour exercer
cette profession. À leur tour, par la suite,
de former de nouveaux élèves, d’enseigner
à une clientèle diverse, de gérer leur centre
équestre et de monter en compétition.
Organisation au Cadre Noir, les Écuyers
Il faut bien savoir qu’à cette époque la
reprise des Ecuyers et celle des Sauteurs
en liberté étaient deux choses bien
distinctes. La reprise des Écuyers était
essentiellement réservée à ceux qui avaient
l’appellation Écuyer, c’est-à-dire aux
officiers. À partir du grade de capitaine on
devenait Écuyer, en deçà du grade de
capitaine, étaient les Sous-Écuyers.
6
Michel Debré, ministre de l'Économie et des Finances (8
janvier 1966 - 30 mai 1968).
La transformation de l’appellation se
faisait militairement parlant à partir du
moment où on changeait de grade. Seul le
Maître de Manège, l’Adjudant Chef
Wattier, était invité et avait le privilège de
fermer la marche de la reprise de Manège.
Il n’y avait pas de civil. Lors des spectacles
à Saumur seulement ces deux reprises était
présentées, il en était de même pendant le
Carrousel et à l’extérieur de Saumur. C’est
sous le commandement du Colonel Durand
que les présentations didactiques et
diverses ont pris forme durablement.
On devenait Sous-Maître au grade de
Maréchal-des-Logis
jusqu’au
grade
d’Adjudant puis Maître de Manège au
grade d’Adjudant-chef et par la suite, à
l’issue de l’obtention d’un diplôme
militaire qui donnait le titre de Maître de
Manège. Mais il n’y avait qu’un Maître de
Manège en place, en pied, qui était
responsable du travail des Sauteurs.
Lorsque je suis arrivé, c’était l’Adjudant
Chef Wattier. L’ensemble de cette
corporation réservée aux sous-officiers
s’appelait les « Sous-Maîtres ».
Il faut savoir aussi que la reprise des
Sauteurs était conduite par un Capitaine
suivi d’un Lieutenant, les Sous-Maîtres
venaient ensuite. Plus tard, le recrutement
devint progressivement civil par la force
des choses, l’armée fournissant moins
d’officiers et de sous-officiers. C’est sous
le commandement du colonel Durand que
l’on vit participer à la reprise des Écuyers
douze cavaliers de diverses origines,
militaires et civils, masculins et féminins.
À présent, nous devenons Écuyer en ayant
le diplôme d’Instructeur et après avoir
dressé un cheval à la reprise avec aussi des
résultats en compétition. Ceux qui ne sont
pas encore Écuyers sont les derniers
arrivés. Après avoir fait leurs preuves, ils
deviendront Écuyer grâce à leurs résultats
en compétition, le dressage des chevaux
qui leur sont confiés et l’enseignement
qu’ils prodiguent.
8
L’appellation de Maître-Écuyer est une
distinction qui revient aux plus anciens
pour les résultats et le travail accompli au
sein de la Maison.
Une des fonctions : coordinateur du
Cadre Noir
Mes fonctions ont été très simples. Lorsque
nous étions militaires, sur le Chardonnet
près de l’École de Cavalerie, mon travail
consistait à coordonner tout ce qui était
fonctionnement au sein du Cadre Noir.
Tant dans les missions extérieures (les
déplacements) qu’à l’intérieur du Cadre
Noir, afin que chacun puisse être au même
endroit au bon moment pour faire la même
chose. Pour cela, je recevais des ordres de
l’Écuyer en Chef pour exécution. Très
souvent aussi, tout se passait à mon
initiative. Le rôle de coordinateur
s’étendait également à tout ce qui concerne
le
personnel,
les
chevaux,
les
infrastructures, etc. J’ai pris cette fonction
quelques mois sous les ordres du Colonel
Durand ce qui était formateur… puis plus
tard du Colonel de Beauregard plusieurs
années.
me donnèrent ma chance pour concourir au
plus haut niveau avec le cheval Jerk.
L’École Nationale d’Équitation était en
train de se construire. Ce nouveau cheval
était devenu mon cheval de « pointe », il
avait de l’anglo-arabe plein la tête et
sautait comme un chat avec une bonne
classe de galop. Alors que l’entraîneur
avait bien des difficultés à former d’autres
couples, il avait sans hésitation établi ma
sélection. Fort de ce choix et de sa
confiance mon enthousiasme s’est accru.
Il pensait que j’avais tout à fait ma place en
individuel aux J. O. Nous étions par le
« gabarit » cheval cavalier » le couple
homogène qui devait tenter sa chance, les
concours antérieurs et l’entraînement
l’avaient prouvé. Montréal se rapprochait
chaque jour un peu plus et l’Écuyer en
Chef, le Colonel Bouchet, m’avait fait part
de ses encouragements en me détachant
l’après-midi de mes autres activités afin de
me consacrer essentiellement à cette
discipline. J’étais confiant.
Malheureusement, à quelques temps de
l’échéance cet Écuyer en chef s’est tué
dans un accident de la route. En ce qui me
concerne, cette histoire s’arrête un peu
après.
« Et pour Atlanta ? »
« Monsieur Guntz, il semblerait que
vous ayez été présélectionné pour les
jeux olympique de Montréal »
À l’époque du colonel Bouchet, Écuyer en
Chef, il y avait une section concours
complet basée au « Petit Souper » ayant
pour entraîneur national le Commandant
Lefranc. À cette époque, je montais très
souvent dans cette discipline ainsi qu’en
course et en concours hippique.
97
C’est d’un commun accord que
l’entraîneur national et l’Écuyer en Chef
Il y aurait de quoi écrire un roman. Cette
sélection a été de rebondissements en
rebondissements jusqu’à la fin et trop
longue à expliquer par écrit. Le cheval
« Rubis du Ruyer », selle français, acheté
dans un lot de mauvais chevaux, s’est
progressivement domestiqué pour devenir
par la suite un cheval représentatif. C’est
bien là où se situe la difficulté. Après avoir
honoré à l’École toutes les manifestations
dans lesquelles il se présentait plusieurs
fois et tous les déplacements du Cadre
Noir, il lui fallait aussi être performant en
concours. Ce qu’il fit au mieux de ses
possibilités
grâce
à
son
énergie
exceptionnelle.
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Centre équestre situé à 150 mètres de l'École Nationale
d'Équitation.
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Afin, paraît-il, de lui donner toutes ses
chances pour la sélection olympique,
l’Écuyer en Chef, le Colonel Carde, a
obtenu un stage en Allemagne. Cette
intention était très louable. La date avait
été arrêtée en plein mois de février car,
évidemment, il fallait tenir compte de
toutes les manifestations à l’École où nous
devions ensemble participer dés le début
de la saison. Outre le froid glacial (-16°c)
je ne retiens rien de positif de ce
déplacement car personne ne s’est occupé
de nous. Je ne veux surtout pas en dire plus
long. Il y eut d’autres aventures périlleuses
en ce qui concerne la sélection obtenue en
concours et confirmée, puis annulée puis
reportée pour laisser la chance à d’autres,
et c’est enfin à l’issue d’un ultime autre
Concours de Dressage Officiel que notre
sélection fut définitivement retenue etc.,
etc… Jusqu’au dernier moment nous avons
été tracassés. Bonjour la sérénité !
À présent, l’École a changé. Les derniers
Écuyers en Chef qui l’on servie, animés
d’une politique et organisation nouvelle et
impliqués dans l’achat de nouveaux
chevaux de nationalités diverses ont établi
un esprit de confiance et donnent une
chance aux couples qui peuvent prétendre
porter dignement les couleurs à l’extérieur
de la Maison en leur épargnant les
présentations. À présent, les chevaux
prometteurs sont privilégiés en ne se
consacrant qu’à la discipline à laquelle ils
ont des aptitudes. La sérénité qui en
découle, est devenue non seulement un
gage de succès mais crée aussi un climat
de travail prometteur.
La mise sur la main, le Colonel de SaintAndré
Lorsque je suis arrivé au Cadre Noir, nous
étions militaires. On savait que notre
avenir dépendait de notre façon de servir.
Pour un jeune nouvellement arrivé, on ne
mettait pas trop de forme et de temps pour
l’accueillir, l’orienter, l’aider, lui expliquer
comment la « Maison » fonctionne. C’était
un peu à chacun, selon son interprétation,
de se débrouiller. L’enseignement reçu
lors du cours d’élèves Sous-Maîtres était le
sésame qui devait ouvrir les portes de la
connaissance pour peu que l’on sache
observer. C’est alors qu’un certain
mimétisme nous amenait à s’inspirer du
travail des plus anciens. Il fallait voir,
comprendre et prendre les idées à travers
tout ce qui gravitait autour de nous. Aussi,
voir des chevaux bien avancés dans leur
dressage m’a conforté dans ce que je
pensais pouvoir faire et plus tard obtenir
rapidement
comme
résultats.
Très
certainement à maintes reprises je me suis
fourvoyé… J’ai fait beaucoup de choses
sans me rendre compte où était l’essentiel.
Mais il faut faire aussi ses propres erreurs
et sa propre expérience. Grâce à la
compétition, à travers les critiques, aux
démonstrations convaincantes du Colonel
de Saint-André, à une remise sans cesse en
question, aux évaluations et échanges
divers j’ai cherché à me rapprocher de la
méthode classique.
« J’ai plus appris par mes yeux et par mon
expérience que par mes oreilles » (colonel
L’Hotte)
Le Colonel de Saint-André aimait la clarté,
la simplicité. Il lui arrivait assez souvent de
montrer à cheval devant la majorité de ses
cadres de tous grades et d’expliquer ses
actions, ses sensations, ses interventions. Il
nous a fait prendre conscience de la mise
en place du cavalier, de l’importance des
aides discrètes, et de la nécessité de
recommencer si on n’a pas été bien
compris.
Il aimait les relations franches mais
respectueuses (chacun à sa place) avec sa
monture, sans détours, ni faux-semblant. Il
a contribué ainsi à clarifier bien des
égarements
provenant
des
aides
approximatives. Il a de cette façon ouvert
l’esprit et la voie à bon nombre d’entre
nous. Il a mis de l’ordre dans la « Maison »
afin d’avoir un langage commun dans
l’enseignement et dans notre pratique. Ceci
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est vrai dans la « la mise sur la main, la
mise en main, le rassembler ».
À ce moment là, il faut bien imaginer que
chaque membre du Cadre Noir avait la
possibilité de monter en course, concours
hippique, concours complet et par la suite
en concours de dressage. Chaque discipline
imposait une position du cavalier conforme
aux efforts à fournir et aux résultats à
obtenir. De l’entraînement de course on
passait à la reprise des Sauteurs, ou du
concours hippique au dressage des chevaux
de la reprise de Manège. Nous étions
polyvalents et devions devenir compétents
pour être crédibles. Cependant, l’âge
venant les cavaliers se spécialisaient
progressivement au dressage ou bien ils
étaient mutés avant de devenir spécialistes
de cette discipline.
au Sauteur, il faut qu’il tienne sur les
postérieurs, donc il faut arriver à
développer les muscles de la croupe, des
jarrets, fortifier, affermir toute la ligne du
dessus pour qu’il étaye sa masse, qu’il
puisse rester en l’air en équilibre pour la
Courbette, et aussi, fléchir, pousser, et se
détendre dans la Cabriole et que la main
qui reçoit et qui tient et qui maintient,
puisse céder. Le rassembler est la
conséquence de la poussée des postérieurs
dans un équilibre qui permet une plus
grande mobilité.
Le travail à pied, passage, piaffer
……………………………………………
……………………………………………
………
Pour en venir à ce que je faisais, ce n’est
rien de plus simple que ce que font mes
autres camarades. On essaie toujours de
solliciter les postérieurs pour que le cheval
vienne tendre sa ligne du dessus. À partir
du garrot, l’encolure, puis la nuque (qui est
toujours le point le plus haut), le bout du
devant, viennent s’arrondir sur la main.
Fort de çà, on peut contrôler plus
efficacement la vitesse, l’équilibre et
distribuer l’impulsion aux différentes
parties du corps qui sont sollicitées. Le
travail des Sauteurs a été très formateur car
c’est un travail de rassembler utile, poussé
au maximum et de mise en main qui
résulte de la poussée des postérieurs. Elle
s’obtient de plusieurs façon : du travail
monté et du travail à pied. L’un comme
l’autre sont complémentaires et avec les
Sauteurs on ne peut pas faire l’un sans
l’autre. Brièvement, il faut se servir de la
poussée des postérieurs et développer les
muscles vers ce à quoi on les destine ; si
c’est sauter vers le haut, il faut faire un
travail de compression. Je pense également
Le travail à pied a longtemps été considéré
comme étant essentiellement une spécialité
réservée aux Sauteurs. Mais aujourd’hui,
nous
savons
qu’il
peut-être
complémentaire au travail monté et venir
parfois au secours de celui-ci.
Il est vrai qu’aujourd’hui dans les sports
équestres en général on veut aller vite, les
éperons nouvelle norme contraignent plus
par la douleur qu’ils ne persuadent en
renforçant tout simplement l’effet de la
jambe. Ces éperons droits sont employés
par une majorité de cavaliers dont la jambe
mobile se promène de la sangle jusqu’au
grasset et remonte jusqu’au tapis de selle.
Ils rentrent dans les côtes pour inciter par
la douleur l’animal à se mobiliser. La
discrétion des aides disparait au profit du
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résultat vite obtenu et les juges en concours
ne sanctionnent jamais.
À l’École, les races de chevaux mises à
notre disposition n’ont pas toujours eu les
prédispositions nécessaires pour arriver
aux « passage, piaffer ». Soit parce qu’ils
sont raides, soit parce qu’ils ont un mental
un peu déficient ou parce que les origines
n’ont pas contribué à donner les qualités
nécessaires pour cette fonction. Ceci étant,
nous devons avec sérieux prodiguer la
même qualité de travail sans savoir si,
après trois ans d’effort, il sera couronné de
succès.
En ce qui me concerne, je suis toujours
parti du principe et me répète volontiers
qu’il faut « développer les muscles pour ce
à quoi on les destine » et les exercices
préparatoires sont là POUR CELA. Toute
ma préoccupation est axée et tend vers ce
but et ma volonté ne doit pas être bercée
par le doute mais bien se convaincre que le
résultat se trouve à l’issue. Construire mine
de rien, méthodiquement et durablement
son édifice et le mental ainsi protégé
viendra vous mettre à l’abri de déceptions
profondes.
L’ENE, une École exceptionnelle
Cette École est exceptionnelle parce qu’on
y fait de l’enseignement et que les cadres
montrent leur savoir faire à travers la
compétition et les différentes présentations.
Elle est exceptionnelle aussi par ses
infrastructures adaptées et la compétence
de ses personnels.
Tous les cadres ont leur chance pour
arriver au sommet, dans la mesure où il
leur échoit un cheval de qualité et qu’euxmêmes se sont préparés sérieusement
pendant des années afin que cette
opportunité ne leur échappe pas.
L’environnement est adapté à la fonction,
chacun peut et doit y trouver sa place.
L’École est une grande famille dans
laquelle il faut apprendre à vivre ensemble
et mérite bien qu’on y consacre toute sa
jeunesse et son enthousiasme.
L’Écuyer doit être curieux de tout, de telle
sorte que son esprit se nourrisse
d’observations, de lectures, ou de
l’expérience des autres, pour amener à son
moulin des idées nouvelles ou qui le
confortent dans ce qu’il connaît. Savoir
s’arrêter dans le Manège pour suivre du
regard le fonctionnement des autres
chevaux, leur locomotion, leurs progrès
sans porter de jugement péremptoire sur le
cavalier. Tout ceci amènera l’Écuyer à être
mieux perçu et aussi plus performant par la
suite. L’étude de chaque cheval dans sa
locomotion donnera à son dresseur la
marche à suivre pour finir le travail
commencé quelques années auparavant.
Decarpentry, Jousseaume et d’autres
auteurs anciens proposeront des voies déjà
explorées qui ont amené des résultats
reconnus.
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Voici un paragraphe que Maître Couillaud
nous avait fait apprendre par cœur ; c’était
dans les années 1960. Cela donne un bon
aperçu de l’esprit de cette époque.
Qualités de l’Instructeur
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Être homme de cheval.
Avoir du caractère, de la patience,
du calme, du sang froid.
Rester toujours un exemple de
correction de tenue et d’exactitude.
Se montrer méthodique, n’entreprendre un travail d’instruction
qu’après en avoir pensé la
progression.
Être sobre de paroles et concis dans
ses explications.
Être autant que possible capable de
démontrer à ses élèves ce qu’il
attend d’eux.
Commander
et
faire
ses
observations de telle façon et en
telle place que chaque cavalier les
entende.
Éviter avant tout la monotonie dans
le travail.
Prodiguer son enseignement d’une
façon originale tout en restant dans
le cadre des principes classiques.
Profiter des temps de repos pour
grouper ses élèves autour de lui et
leur donner d’une façon vivante
l’instruction théorique.
Trouver dans la fertilité de son
esprit et l’amour de son métier, les
idées à introduire, les expressions à
employer
pour
frapper
l’imagination, amuser, persuader,
entrainer, et communiquer à tous
son zèle, son abnégation et sa foi.
Exemple vivant, l’instructeur qui a
su s’imposer, marque ses élèves.
L’empreinte personnelle exagérée
peut cependant devenir un danger.
L’instructeur pour si excellent qu’il
soit a, comme tout un chacun, ses
qualités et ses défauts ; il a sa façon
de faire qui
découle de son
physique, de son moral, de sa
personnalité; il ne doit pas
succomber à la tentation de faire
d’autres soi-même mais s’efforcer
dans le cadre des grands principes à
instruire et perfectionner ses
disciples, en tenant compte de leur
conformation, de leur moral, de
leur personnalité.
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Réflexions
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Comme tous les arts, l’équitation
est surtout faite de pratique et
d’exécution exploitant les dons
naturels.
Le cavalier qui ne sent pas ce dont
on lui parle ne peut pas comprendre.
En équitation comprendre c’est
sentir.
La théorie, la saine doctrine, ne doit
venir que lorsque le cavalier a déjà
un certain sentiment du cheval.
L’étude des principes et leur
application raisonnable fait gagner
beaucoup de temps.
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