Mise en page 1 - Ville du Blanc Mesnil
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140157 4 pages Flash_Mise en page 1 18/02/14 15:44 Page1 CINÉ CLUB Un mardi par mois, venez découvrir sur grand écran un film de répertoire, connu ou inconnu. Ce second semestre de ciné-club sera animé par Hélène Frappat, qui invitera le public à échanger autour du film. écrivain et critique de cinéma, son cinquième roman, Lady Hunt, est paru chez Actes Sud à l'automne 2013. Elle est également l'auteure de Jacques Rivette, secret compris et Roberto Rossellini aux éditions des Cahiers du cinéma et intervient régulièrement dans Mauvais genres sur France Culture. MARS DIMANCHE 16 • 14H30 LA porte du pArAdis de Michael Cimino AVRIL JEUDI 3 • 20H Les ContrebAndiers de MoonfLeet de fritz Lang MAI MARDI 13 • 20H viLLe HAute, viLLe bAsse de Mervyn Leroy JUIN JEUDI 12 • 20H boudu sAuvé des eAux de Jean renoir LA porte du pArAdis (HeAven’s GAte) 140157 4 pages Flash_Mise en page 1 18/02/14 15:44 Page2 DIMANCHE 16 MARS • 14H30 LA porte du pArAdis de Michel Cimino (Heaven’s Gate), E.U., 1980, réal. Michael Cimino. Avec Kris Kristofferson, isabelle Huppert, John Hurt, Christopher Walken et Jeff bridges Sur quoi La Porte du Paradis, troisième des sept longs métrages réalisés entre 1974 et 1996 par Michael Cimino, ouvre-t-elle ? Dans la carrière d’un des derniers grands metteurs en scène américains classiques, elle ouvre sur l’enfer d’une défaite commerciale : on lui attribue la faillite d’United Artists qui a produit le film. Pourtant “La Porte du Paradis”, nom de la salle de bal où les danseurs s’envolent sur patins à roulettes, n’est pas seulement un titre ironique, démasquant la misère économique et morale refoulée par la domination du mythe américain. Le film, sorti en 1980, au crépuscule d’une décennie hantée par les mouvements de libération, est aussi le plus beau portrait contemporain de l’ouverture libertaire au désir – désir sexuel, mais plus profondément désir qui, en son sens psychanalytique, constitue la vérité singulière de chaque être humain. C’est le cœur bouleversant du film, où rayonne, dans des paysages à ciel ouvert que n’entrave aucune porte, le trio amoureux interprété par Kris Kristofferson, Isabelle Huppert et Christopher Walken. Deux ans auparavant, en 1978, dans un film au titre pareillement hanté par la promesse du paradis américain, Days of Heaven (Les Moissons du Ciel), Terrence Malick filmait la nudité d’un trio amoureux (une femme et deux hommes) dans les rivières de l’Ouest. Là où les personnages de Malick dérobaient quelques miettes d’un paradis déjà nostalgique à l’enfer du travail agricole, le trio de Cimino restitue la plénitude joyeuse, subversive et déchirante, du sentiment amoureux. Mais l’instauration d’un ordre réactionnaire et raciste brûle le rêve des amants ; le viol et le meurtre anéantissent la liberté éphémère des esclaves du paradis américain (l’immigré, la femme). Dans l’épilogue, la porte ouverte sur l’utopie d’une citoyenneté américaine égalitaire et accueillante, sans rapports de domination et de soumission, se referme sur un mariage sans amour, une ascension sociale sans joie, une victoire amnésique et amère. Le grand bourgeois WASP achève sa trajectoire victorieuse sous une lune mélancolique. Pour prix de sa “réussite”, il a perdu son lien télépathique avec les éléments et le ciel.* 140157 4 pages Flash_Mise en page 1 18/02/14 15:44 Page3 JEUDI 3 AVRIL • 20H Les ContrebAndiers de MoonfLeet de fritz Lang 1955, USA, Prod. MGM (John Houseman). Scénario : Jan Lustig, Margaret fitts, d’après le roman de John Meade falkner. Image : robert planck (eastmancolor, Cinémascope). Musique : Miklos rosza. Avec : stewart Granger (Jeremy fox), George sanders (Lord Ashwood), Joan Greenwood (Lady Ashwood) et Jon Whiteley (John Mohune) MARDI 13 MAI • 20H En 1757, sur la côte anglaise, John Mohune, un petit garçon qui vient de perdre sa mère, débarque aux environs du village de Moonfleet, avec pour seule richesse une lettre que lui a laissée la défunte. Elle lui demande de quêter la protection du contrebandier Jeremy Fox, qu’elle a aimé autrefois, malgré l’opposition de sa noble famille. Celui-ci est à la tête d’une bande de pirates patibulaires, qui voient d’un mauvais œil l’arrivée de l’enfant. Tel un petit animal refusant de quitter le giron de sa mère, John Mohune, désormais seul au monde, ne cesse de réclamer l’amitié de Jeremy Fox, homme à la morale ambiguë. Fasciné par les secrets, les spectres et les sortilèges du village de Moonfleet, berceau de sa famille maternelle, l’enfant va peu à peu apprivoiser un homme qui est peut-être son père, et partir à la recherche des trésors enfouis de ses ancêtres, affrontant, dans sa quête de sagesse et de vérité, le cynisme et la corruption des adultes, sans jamais se départir de sa bouleversante ingénuité. Pour son retour à la MGM (après Fury en 1936), et son premier film en Cinémascope, qui est aussi l’un des rares films en costumes de sa carrière, Fritz Lang, 24 ans après M le maudit, laisse à l’enfance une chance de ne pas se laisser écraser par la violence des relations adultes. Cette chance, aussi frêle que la petite chanson que murmure John Mohune, tient à l’obstination héroïque avec laquelle un enfant protège son cœur, et son désir, contre l’adversité –qu’elle se nomme avidité, mépris de classe, vulgarité, laideur…* viLLe HAute, viLLe bAsse (eAst side, West side) de Mervyn Leroy Metro-Goldwyn-Mayer, États-Unis, noir et blanc, 1949. Scénario : isobel Lennart d'après le roman de Marcia davenport. Photographie : Charles rosher. Montage : Harold f. Kress, Costumes : Helen rose. Musique : Miklós rózsa, 108 minutes. Avec : barbara stanwyck (Jessie bourne), James Mason (brandon bourne), van Heflin (Mark dwyer), Ava Gardner (isabel Lorrison), Cyd Charisse (rosa senta) et nancy davis (Helen Lee) à New York, dans les beaux quartiers, Jessie et Brandon Bourne, mariés depuis quelques années, mènent l'existence aisée de la haute société, entre réceptions et essayages de haute couture. à la suite d'une violente bagarre à laquelle son mari a été mêlé, Jessie découvre que Brandon n’a pas cessé de fréquenter Isabel Lorrison, son ancienne ... 140157 4 pages Flash_Mise en page 1 18/02/14 15:44 Page4 ... maîtresse. Peu de temps après, Isabel, qui harcelait Brandon Bourne, est retrouvée assassinée. Les soupçons se portent très vite sur les Bourne. L’enquête est confiée à un policier nommé Mark Dwyer. Au fur et à mesure que l’enquête avance, Mark et Jessie tombent amoureux... Mervyn LeRoy, cinéaste devenu célèbre grâce au Petit César (1930) et à Je suis un évadé (1933), deux films mettant en scène la question des inégalités et des rapports de classe, creuse ici la dimension existentielle de cet arrière-plan social et politique, devenu presque un décor géographique : l’opposition entre les quartiers ouest et est de New York, autrement dit la violence des oppositions de classe qui structurent jusqu’aux rapports amoureux. Le film de Mervyn LeRoy choisit de s’intéresser principalement à ses personnages féminins, en orchestrant la rivalité de Barbara Stanwyck qui, loin de ses rôles de femme libre et rebelle dans les films produits par la Warner dans les années 30, incarne ici une épouse coincée dans un mariage conventionnel, et Ava Gardner, flamboyante en amante illégitime jalouse et sans scrupules.* * textes Hélène Frappat JEUDI 12 JUIN • 20H boudu sAuvé des eAux de Jean renoir 1932, France, 85’ Scénario : Jean renoir, Albert valentin, d’après p. de rené fauchois. Image : Marcel Lucien. Musique : raphaël, Johann strauss. Avec Michel simon (boudu), Charles Granval (edouard Lestingois), Marcelle Hainia (sa femme, emma), Jean dasté (l’étudiant) Désespéré à la suite de la mort de la mort de son chien, le clochard Boudu se jette dans la Seine depuis le Pont des Arts. Il est repêché par le libraire libre-penseur Lestingois, qui le ramène chez lui et l’héberge. Son bienfaiteur lui donne des vêtements et à manger, mais Boudu, d’un tempérament râleur, est incapable de la moindre reconnaissance. Dès lors, les ennuis de la famille Lestingois commencent. “Quel scandale dans une famille bourgeoise !” Sans aucune gêne, Boudu drague la bonne, crache dans la bible du couple (Physiologie du mariage de Balzac), et finit par séduire la maîtresse de maison qui, d’abord revêche, s’amourache sans aucune retenue du clochard ! à l’issue d’un arrangement bourgeois censé sauver les apparences, Boudu profite d’une promenade en barque pour s’enfuir et retourner à son ancienne vie. Art poétique et politique, Boudu sauvé des eaux, cette fable anarchiste qui, à l’instar du Fleuve, s’ouvre et s’achève sur l’ambivalence symbolique de l’eau (puissance de vie et de mort, de liberté et de prison), résume, à travers l’interprétation génialement déchaînée de Michel Simon, la puissance et l’ambiguïté de l’œuvre renoirienne. Tout se joue dans un face-à-face entre l’idée et sa mise en pratique, la théorie (libertaire) et son incarnation concrète. Ainsi la puissance de vie et de rébellion de Boudu finira-t-elle par saper la philosophie de la vie et de la rébellion que professe son sauveur… Cette croyance en l’instant, et en la manière dont un corps (celui de Michel Simon, mi-Dieu, mi-monstre) est capable de faire dévier toute pensée, n’est rien d’autre qu’un des plus beaux actes de foi en l’essence même du cinéma.*