telerama-etienne-jaumet - Concerts et Spectacles à PAU
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telerama-etienne-jaumet - Concerts et Spectacles à PAU
James Holden et Etienne Jaumet, une connexion cosmique L'improvisation est reine pour le producteur électro anglais et le saxophoniste français. A Villette sonique (Paris), on attend un show éruptif... Une belle musique, à la fois rocailleuse et fluide, synthétique et organique, où la techno emporte le free jazz et la new wave dans un torrent de sonorités étranges... A la Machine du Moulin-Rouge, ce 7 décembre 2013, l'Anglais James Holden, 34 ans, l'un des musiciens les plus talentueux et respectés de la sphère électro, fondateur du label Border Community, présente son live, The Inheritors (« Les Héritiers »). Il est au centre de la scène, entouré d'une batterie d'ordinateurs, de synthés, et de ce qui — de loin — pourrait ressembler à un antique transmetteur radio... Légèrement en retrait derrière lui, à sa droite, on reconnaît le batteur britannique Tom Page, vu dernièrement en tournée aux côtés de Neneh Cherry. Et, à sa gauche, au saxophone, une « vieille » connaissance. Etienne Jaumet, 43 ans, a participé ces dernières années à quelques-uns des plus excitants projets musicaux made in France. A commencer par Zombie Zombie, le duo qu'il a formé avec le batteur Cosmic Neman, naviguant entre jazz cosmique, BO de films d'épouvante et krautrock. Jaumet a aussi publié un album solo de techno planante, en collaboration avec l'Américain Carl Craig, joué sur scène avec le groupe pop The Married Monk, et il apparaît sur les nouveaux disques de François and The Atlas Mountains, Joakim, Richard Pinhas (liste non exhaustive !)... Mais tout cela n'explique pas pourquoi James Holden a fait appel à lui. Ne trouve-t-on pas de bons saxophonistes de l'autre côté du Channel ? Pour percer ce mystère, rendez-vous est pris chez Etienne Jaumet, aux Abbesses. Au mur du salon, trois pochettes de disques de Sun Ra encadrées. Etalés sur le parquet, des vinyles de The Cure, de John Coltrane et d'artistes issus de la scène free jazz ou krautrock, comme l'Américain Charles Cohen ou l'Allemand Michael Bundt... « C'est étrange,réfléchit à voix haute le musicien français. Avec James, on ne peut pas dire que nous jouons une musique pour faire sauter les gens au plafond. Et pourtant, ils sautent au plafond ! A la Machine, j'ai été très surpris par la ferveur du public... »Jaumet se souvient de sa première rencontre avec Holden, en 2009. Le Français jouait son album solo à Soho, au centre de Londres, dans une petite salle baptisée Madame Jojo's. A la fin du concert, l'Anglais à l'air juvénile s'est avancé timidement, quelques vinyles de son label sous le bras : « Bonjour, je m'appelle James Holden. Nous t'avions commandé par mail un remix de Luke Abbot, le voici... » Avant de jouer The Inheritors en Suisse, en Hollande ou en Allemagne, en attendant le Japon, les deux musiciens ont pris le temps de se connaître, de s'apprivoiser... Ils ont partagé une première scène en mars 2013, au prestigieux Théâtre Barbican de Londres, lors... d'une expérience sur le cerveau, à l'invitation de Marcus Du Sautoy, journaliste scientifique à la BBC et professeur de mathématiques à l'université d'Oxford. « On sait finalement peu de chose sur le cerveau, reconnaît Etienne Jaumet. Du Sautoy voulait démontrer que deux personnes peuvent se connecter, se comprendre, sans se parler. C'est ainsi que fonctionnent les improvisations musicales. » Mais pourquoi James Holden l'a-t-il appelé pour ce premier concert ? « S'il avait voulu le meilleur saxophoniste, il ne m'aurait pas choisi. Je ne suis pas un bon technicien : j'ai l'impression que je n'apprends rien. En revanche, j'adore expérimenter. Avec James, nous improvisons beaucoup. Au risque parfois de faire de mauvais concerts. Mais c'est justement ça le live ! Cela dit, tout ne dépend pas de nous. L'interaction avec le public est essentielle. Il nous donne l'énergie... » Pourquoi un saxo ? Pourquoi un français ? Lorsqu'on joint James Holden, chez lui en Angleterre, on s'amuse d'abord à le taquiner. Pourquoi faire appel à un saxophone qu'on entend si peu sur The Inheritors, l'album, d'autant que cet instrument est encore considéré comme ringard sur les scènes rock et électro ? « Parlez-moi plutôt de "spiritual jazz" (1) , ça me branche davantage... J'ai longtemps pensé qu'il m'était impossible de donner des concerts. Car je n'envisageais absolument pas de "jouer", ou plutôt de faire semblant, en lançant des samples à partir d'un ordinateur. Mais quand Thom Yorke (Radiohead) m'a proposé d'assurer les premières parties de son groupe Atoms For Peace, aux Etats-Unis, j'ai décidé de relever le défi. J'ai donc inventé un logiciel qui me permet d'émuler les vieux synthétiseurs analogiques utilisés pour l'album. Nous avons commencé à deux, avec Tom Page, puis Etienne nous a rejoints. » On insiste : pourquoi diable partager la scène avec un « bloody French », geste plutôt rare chez les musiciens anglais ? « Bien sûr, il y a d'excellents musiciens en GrandeBretagne. Mais la plupart m'apparaissent trop conservateurs. Etienne partage mes références musicales, le krautrock, le jazz "cosmique", et, surtout, il comprend vers où je veux aller. Avec son saxo, il sait exactement quand se mettre en avant ou au contraire s'effacer, se fondre dans la musique. Moi qui suis de nature plutôt inquiète et stressée, j'apprends beaucoup à ses côtés. Sur scène comme à la ville, il dégage un tel calme, une telle gentillesse, une telle sérénité ! Etienne est mon maître zen, mon bouddha français. » (1) Style à l'esthétique souvent inspirée par les cultures orientales ou africaines et au message empreint de... spiritualité. Porté par des musiciens aventureux, curieux d'explorer d'autres gammes, le jazz spirituel a déployé ses ailes aux Etats-Unis avant de trouver un écho en Europe dans les années 60. James Holden et Etienne Jaumet en concert, dans le cadre de la nuit RBMA de festival Villette Sonique. Le 6 juin au Cabaret Sauvage, à Paris.