à l`occasion de la cérémonie du souvenir commémorant le
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à l`occasion de la cérémonie du souvenir commémorant le
C ABINET DU M AIRE DISCOURS Discours de Monsieur David LISNARD Maire de Cannes Vice-Président du Conseil départemental des Alpes-Maritimes à l’occasion de la cérémonie du souvenir commémorant le 70e anniversaire de la libération des Camps de concentration et d’extérmination nazis Journée Nationale du Souvenir des Victimes et Héros de la Déportation * * * Dimanche 26 avril 2015 à 17 heures * * * Monument aux Morts Hôtel de Ville -2- Madame la Présidente du Comité d’Entente de la Déportation de Cannes, Mesdames et messieurs les élus, Madame le Délégué Militaire Départemental adjoint, mon Colonel, (?) Mesdames et messieurs les Officiers et Sous-Officiers, Mesdames et messieurs les représentants des autorités civiles, militaires et religieuses, Monsieur le Président du Consistoire Israélite de Cannes, Messieurs les Présidents des Associations de Membres des Ordres Nationaux, Mesdames et messieurs les Présidents d’associations patriotiques, Mesdames et messieurs les Porte-drapeau, Mesdames et messieurs, Chers amis, Je vous remercie d’être venus nombreux cet après-midi rendre hommage aux victimes de la déportation dans les camps de concentration et d’extermination nazis. Permettez-moi de saluer tout particulièrement la présence parmi nous de Bernard de Gaulle, neveu du Général de Gaulle, combattant résistant à l’âge de 17 ans, qui achève sa participation à une conférence « Autour de Jean Moulin » organisée dans le cadre des activités du GIP Cannes Bel Âge. Cher Monsieur, permettez-moi de vous dire combien votre présence à notre cérémonie, devant notre monument aux morts, honore notre ville qui sait ce que la France doit à votre famille, à son courage, à son dévouement. Je pense à votre oncle bien sûr, l’illustre général qui a rendu à notre pays son honneur et sa dignité ; je pense aussi à Geneviève Anthonioz - de Gaulle, résistante elle aussi, déportée à Ravensbrück en 1944. Votre famille, la famille de Gaulle m’inspire le plus grand respect et je tenais à vous le dire. Soyez donc le bienvenu à Cannes aujourd’hui et merci de nous accompagner dans notre hommage. Mes chers amis, il est des dates historiques dont on se passerait des anniversaires. Ce sont celles des tragédies de l’âme humaine. Pourtant, honorer la mémoire de nos morts est plus qu’un devoir envers le passé, c’est une nécessité du présent et une exigence pour l’avenir. Cet après-midi, nous avons rendez-vous avec l’Histoire. Nous avons rendez-vous avec la mémoire. Nous avons rendez-vous avec nous-même. Nous avons rendez-vous avec notre devoir. Notre devoir, à nous tous ici aujourd’hui, mais au-delà à tous ceux qui croient en une certaine idée de l’homme, démocrate, républicain, est d’affirmer et de traduire dans notre vie quotidienne qu’il vaut mieux être démocrate précisément que totalitaire, libre qu’asservi, tolérant que sectaire, forts de l’amour que faible dans la haine. Notre devoir est d’honorer la mémoire de nos morts, des victimes de l’holocauste, de la barbarie nazie qui a imaginé et mis en œuvre l’extermination à la fois abjecte et industrielle, d’autant plus abjecte qu’industrielle, avec des usines d’humiliation, de négation de l’individu, d’extermination. L’histoire, nous le voyons bien est souvent un cycle répétitif. L’homme qui n’apprend pas de ses erreurs se condamne à les revivre sans cesse. C’est pourquoi, la lecture régulière devant ce monument aux morts des pages tourmentées et douloureuses de notre histoire nationale est un acte de fidélité à vocation pédagogique. Nous ne sommes pas seulement réunis dans le souvenir, mais à travers le témoignage des survivants, à travers le témoignage des associations de déportés que nous venons d’entendre, nous sommes réunis dans la connaissance, nous sommes là pour apprendre, pour comprendre, pour assimiler, pour résister au risque de la récidive que nous voyons surgir ici et là à travers le monde, sous les mêmes oripeaux idéologiques, racistes, antisémites et xénophobes. Que nous apprennent la tragédie de la déportation, le drame de la Shoah, l’inconcevable projet d’Hitler ? Que nous évoquent les noms d’Auschwitz, Birkenau, Dachau, Buchenwald, Treblinka, Sobidor et tant d’autres encore ? Que nous enseignent les archives désormais ouvertes, mais si incomplètes, de cette période terrifiante ? Que nous disent les yeux clos désormais des innocents sacrifiés, gazés, tués, pour leur origine comme les Tziganes, leurs convictions, leur orientation philosophique, religieuse, politique, sexuelle. Tous ces -3- hommes, toutes ces femmes, tous ces enfants exterminés pour ce qu’ils étaient et que le régime nazi, soutenu en France par celui de Vichy, leur interdisait d’être. 11 millions d’êtres humains, 11 millions de personnes faites de chair et d’os, de cœur et d’esprit, comme vous et moi, ont péri, sous le poids de la folie nazie. 6 millions de juifs, les deux-tiers des juifs d’Europe, dont un million et demi d’enfants, ont été broyés par cette infernale machine d’extermination, froide, mécanique, implacable. Tous reposent désormais sans sépulture, et les cendres échappées des fours crématoires crient à la conscience universelle : « Plus jamais ça ! ». Ce cri, qui fut aussi celui des survivants libérés des camps, nous devons l’entendre, ce cri ne sera jamais un détail de l’histoire, ce cri nous devons nous en saisir, nous devons le faire nôtre, aujourd’hui, pour ne pas succomber aux instincts contemporains, pour ne pas périr à notre tour. L’occupation, la déportation, l’Holocauste ont été les conséquences directes d’abord du laisser dire, puis du laisser-faire des démocraties qui ont tardé à saisir le danger que constituait Hitler pour l’humanité. Soyons donc vigilants et combatifs en cette période marquée par l’émergence de nouvelles doctrines barbares qui entendent réduire l’humanité pensante tout comme les minorités religieuses, dans une approche chaque jour de plus en plus génocidaire. Notre devoir aux victimes de la Shoah, c’est non seulement celui de la mémoire et de l’hommage, mais aussi celui de l’engagement contre les répliques du monstre antisémite. Oui, notre devoir est là : de lutter contre les résurgences de la bête immonde, celle qui a atteint son degré le plus absurde et cruel, dans le cœur de l’Europe, dans ce grand pays qu’est l’Allemagne de Goethe, cette bête immonde du nazisme, dont la concrétisation absolue et répugnante se fit dans la Shoah. Aujourd’hui, le germe de l’antisémitisme est plus que jamais vivace, y compris chez nous en France. Aujourd’hui, la bête immonde, sorte d’Alien qui renvoie à la face noire de la condition humaine, est dans un islam dont l’idéal de paix est dévoyé par le radicalisme djihadiste, raciste, antisémite, anti-occidental, anti-chrétien, anti-humanité. Aujourd’hui, la bête immonde, elle frappe par des attentats en France, en Belgique, au Danemark, au MoyenOrient. Etre tué en allant faire ses courses dans un Hyper Cacher parce qu’on est juif, être tué dans la rédaction d’un journal satirique qui revendique sa liberté d’expression, être tué dans un musée ou une école juive, être tué parce qu’on porte un uniforme de policier de la République relève de la même négation d’humanité. Aujourd’hui la bête immonde, elle s’attaque aux Chrétiens d’Orient et aux minorités ethniques et culturelles d’Irak, de Lybie, de Syrie, d’Afrique. Cela fait plus d’un an que j’évoque régulièrement devant vous, au fil de nos rencontres et cérémonies, la situation des Chrétiens d’Orient, parce qu’elle est dramatique, parce qu’elle est insupportable, parce qu’elle est nous atteint tous dans ce que nous sommes, dans notre nature d’homme, dans notre humanité. Nous avons le devoir de combattre l’obscurantisme religieux, racial et social. Nous avons le devoir de promouvoir la vie comme un droit universel inaliénable. Nous avons le devoir de défendre la Liberté, l’Egalité et la Fraternité qui nous rassemblent en France mais aussi partout où des minorités sont menacées. Telle est la vocation de la France et de chaque Français. Ce qui se passe aujourd’hui à travers le monde nous regarde et nous concerne tous, d’une part au plan moral, d’autre part au plan de notre propre sécurité. Le monde libre, les Nations Unies, ne peuvent pas se contenter de discours, sauf à signifier leur inutilité par impuissance, lorsque aujourd’hui, au XXIe siècle, à moins de trois heures d’avion de nous, des hommes sont massacrés, des femmes vendues sur le marché comme des bêtes et violées, des enfants réduits en esclavage et formés à tuer. Les Nations Unies - et la France a un rôle moral à tenir en la matière - doivent éradiquer l’Etat Islamique et toutes ses ramifications pour permettre aux minorités de se maintenir sur leur terre et construire une nouvelle société où chacun pourra vivre libre et dans le respect de la liberté de l’autre. Cette bête immonde, elle est aussi chez nous, en France, chez ces radicaux islamistes terroristes qui veulent s’attaquer aux juifs, aux églises, à tous les Français. Cette bête immonde, c’est celle dont parle l’intellectuel -4- musulman Abdennour Bidar dans sa Lettre ouverte au monde musulman lorsqu’il écrit : « Cher monde musulman, je te vois en train d’enfanter un monstre qui prétend se nommer Etat Islamique et auquel certains préfèrent donner un nom de démon : Daesh. Et cela m’inspire une question, LA grande question : pourquoi ce monstre ignoble a-t-il choisi ton visage et pas un autre ? Ce problème est celui des racines du mal. Car ce monstre en réalité est sorti de tes propres entrailles, et il n’est que le symptôme le plus radical de ta propre crise de civilisation. Crise d’une religion incapable de se régénérer, crise d’une culture qui éprouve toutes les peines du monde à se défaire des liens de cette religion qui l’étrangle. Et en face de toi, l’Occident connaît une étrange crise en miroir : lui, c’est au contraire une déliaison généralisée qui le frappe, une rupture de tant de liens – à commencer par celui qui peut relier l’existence humaine à une signification sacrée ! Chacun renvoie ainsi à l’autre l’image inversée de lui-même : la fossilisation du rapport au sacré d’un côté, contre sa disparition de l’autre ; un sacré devenu totalitaire contre un sacré devenu introuvable. » Ces paroles sont fortes. Elles nous renvoient à notre responsabilité d’afficher la fierté d’être Républicains, d’être Français, la responsabilité d’avoir ou de développer de la spiritualité et non seulement du matérialisme à offrir à nos enfants. Donnons du sens à l’histoire d’aujourd’hui, un sens différent de l’histoire d’hier, pour que cette génération, la nôtre, celle de nos enfants, n’ait jamais à connaître les souffrances du siècle passé. Pour cela, il y a urgence à promouvoir sur le terrain politique comme sur le terrain religieux et philosophique une éthique de l’homme moderne, une éthique de l’homme vivant, une éthique de l’homme debout. Ne manquons pas au devoir que nous impose l’histoire. Ne manquons au souvenir que réclament nos morts, tous nos morts en déportation. Ne manquons pas à l’honneur, à la gloire, des combattants et résistants. Soyons solides dans notre mémoire, soyons fermes dans notre devoir. Donnons du sens à notre présence cet après-midi, donnons du sens à notre avenir. Vive la République ! Vive la France !