EXPLICATION DE TEXTES ET PERSPECTIVE - portail-du

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EXPLICATION DE TEXTES ET PERSPECTIVE - portail-du
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Associ
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ançai
sedesPr
of
esseur
sFr
ançai
sdeLanguesVivantes,http://www.aplv-languesmodernes.org/) le 8 octobre 2006.
EXPLICATION DE TEXTES ET PERSPECTIVE ACTIONNELLE :
LA LITTÉRATURE ENTRE LE DIRE SCOLAIRE ET LE FAIRE SOCIAL
Christian PUREN
Université de Tallinn (Estonie), [email protected]
Université Jean Monnet de Saint-Étienne (France), [email protected]
CELEC-CEDICLEC, www.dlc.sup.fr
Introduction
Cetar
t
i
cl
es’
i
nscr
i
tdansl
epr
ol
ongementde ceuxquej
’
aipr
écédemmentpubl
i
éssurl
a question de la littérature dans la revue Les Langues modernes en 1989, 1990, 2000 et 2002.1 Il
reprend par ailleurs presque textuellement les pages 29-33 d’
une conférence de 2006 publiée
surcemêmesi
t
edel
’
APLV.On se reportera à la bibliographie finale.
La thèse que je vais défendre ici est que la « perspective actionnelle » ébauchée dans le Cadre
européen commun de référence pour les langues (CECR) de 2001 amorce une sortie de
l
’
appr
ochecommuni
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i
veetannonceunenouvel
l
econcept
i
on d’
ensembl
edel
’
enseignementapprentissage des langues qui permettent de « revisiter » historiquement la méthodologie active et de repenser la didactique du texte littéraire en classe de langue. La perspective actionnelle et la méthodologie active, en effet, ont en commun de se fonder sur l
’
agi
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ve,surune seul
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forme très particulière d’
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i
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é, celle de la communication langagière interindividuelle.
La méthodologie active est la mét
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ci
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l
epourl
’
ensei
gnementdet
out
esl
esl
angues
vivantes dans les instructions ministérielles françaises des années 1920 aux années 1960, et
son activité de référence,l
’« explication de textes », est encore actuellement le modèle des
épr
euvest
antor
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écr
i
t
esau baccal
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éatfrançais, avec tous les effets connus de modélisation en amont (au moins pendant les années du lycée) sur les attentes, demandes et objectifs des apprenants et des enseignants. L’
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extes a été étendue dans
la méthodologie active, au cours de son histoire, àd’
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types de supports (cela est particulièrement visible dans la tradition hispanique en ce qui
concerne les documents photographiques et filmiques), mais cette activité a été élaborée à
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usadapt
ée.Pour une
histoire détaillée de cette méthodologie constituée, je renvoie à mon ouvrage de 1988, chapitre 4.
1
Je remercie vivement Pascale Catoire et Sylvie Marc, enseignantes et formatrices interlangues, pour
leur rel
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ur
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ssuggest
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ait
enucompt
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a
rédaction finale de cet article. Je reste cependant entièrement responsable des idées exposées dans ce
texte, et de ses éventuelles erreurs ou imperfections.
1
Je tiens d’
emblée àmet
t
r
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de,en cequiconcer
nel
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contre leur instrumentalisation possible auser
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i
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mien, tout au contraire. J
’
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à suffisamment critiqué –dans Les Langues modernes et ailleurs –les effets négatifs mécaniquement provoqués par une « entrée » exclusive par les documents, par une intégration didactique maximale aut
ourd’
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queou encore par
une utilisation conjointe du texte littéraire comme à la fois document informatif et prétexte à
entraînement linguistique ;j
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r
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hispanique, qui amai
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ésentun privilège irraisonné et irréaliste aux documents
littéraires et à un unique modèle de référence d’
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i
cat
i
onde ces textes, pour pouvoir espérer
que mon di
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e tradition qui les aideraient à en prolonger de quelques années encore l
’
interminable agonie, au motif que cette explication det
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un ravalement de façade.J
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ectivement possible de « revisiter » cette activité, mais ce terme implique très précisément,
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é sinon exclusive, du moins de référence, je ne peux que
conseiller d’
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edès à présent la lecture de cet article, et de passer leur chemin en allant découvrir ceux de l
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langues étrangères. J
’
ai commencé ma car
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i
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enseignant comme stagiaire agrégé
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espagnolen 1972, mais j
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, et la visite que j
’
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tout de ma part un retour nostalgique à un quelconque bercail : elle est simplement une nouvelle occasion de me dégourdir les neurones en me déplaçant à nouveau. La seule vérité de la
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i
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même de chemin tout tracé, seulement le déplacement, qui dessine après coup un imprévisible
parcours. C’
est ce qu’
expr
i
me magni
f
i
quement Antonio Machado dans son plus célèbre
poème :
Caminante, son tus huellas
el camino, y nada más;
caminante, no hay camino,
se hace camino al andar.
Al andar se hace camino,
y al volver la vista atrás
se ve la senda que nunca
se ha de volver a pisar.
Caminante, no hay camino,
sino estelas en la mar.
Marcheur, ce sont tes traces
Ce chemin, et rien de plus ;
Marcheur, il n'y a pas de chemin,
Le chemin se construit en marchant.
En marchant se construit le chemin,
Et en regardant en arrière
On voit la sente que jamais
On ne foulera à nouveau.
Marcheur, il n'y a pas de chemin,
Seulement des sillages sur la mer.
Proverbios y cantares, Chant XXIX,
Éd. Campos de Castilla, 1917.
Traduction de José Parets-LLorca.
C’
est assurément le grand intérêt actuel du CECR qued’
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f
r
i
runeoccasion de se remettre en
route, mais il faut espérer qu’
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nspect
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or
mat
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nouvelle fois, comme trop d’
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opsouventdans le passé, la destination avec
le voyage. Leur rôle n’
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êt
r
e desgar
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eurt
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oupeau ver
sun nouvelenclos, ou des déménageurs transportant et empilant des colis dans un nouvel appartement2, il
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êt
r
e,comme l
esensei
gnant
savecl
eur
sél
èves, des accompagnateurs. Mais il faut pour
cela connaître parfaitement le territoire, ce qui supposequ’
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’
ai
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-même parcouru en tous
2
On me par
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l
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ennentà l
’
espr
i
ten ce moment :j
’
aif
ai
t
cet été deux déménagements dans les Pyrénées Ariégeoises…
2
sens, de manière à ne pas se perdre ni perdre ses voyageurs quand ceux-ci forcément voudront aller leur propre chemin en dehors des sentiers balisés.
Le parcours de la didactique des langues-cultures nous a amenés en trois quarts de siècle depui
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asemblé que le moment était propice pour organiser un petite randonnée d’
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r
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’
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’
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enous fera repasser un instant
par l
’
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ochecommuni
cat
i
ve, et nous aurons mêmel
’
occasi
ond’
aper
cevoi
raupassagel
améthodologie traditionnelle et la méthodologie audiovisuelle. Alors, sivous en êt
es d’
accor
d,
« suivez le guide »…
1. Lamét
hodol
ogi
eact
i
ve,ouquandf
ai
r
el
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asse,c’
est«faire dire »
Lacl
assedel
angueestunespaceoù,depui
spl
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unsi
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emai
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enant
,est en principe privilégié un usage maximal de la langue étrangère parce que celle-ci y est conçue à la fois comme
l
’
obj
ect
i
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e moyen de l
’
ensei
gnement
-apprentissage. La déclaration fondatrice de la discipline « langue vivante » dansl
’
ensei
gnementscol
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’
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icielle du 13 septembre 1890 : « Une langue s’
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l
e-même et pour elle-même, et
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estdansl
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angue,pr
i
seen el
l
e-même,qu’
i
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cherl
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améthode. » Cette
petite phrase pose le grand pr
i
nci
pedel
’
ensei
gnementmoder
nedes langues quin’
aj
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sét
é
remis en cause depuis, au-delà de toutes les ruptures méthodologiques et de la diversité des
objectifs et des environnements d’
ensei
gnement
-apprentissage, cel
uide l
’« homologie finmoyen » : l
af
i
n assi
gnée à l
’
enseignement-apprentissage est la langue (cf. « pour la langue) », qui est en même temps le moyen privilégié de l
’
ensei
gnement
-apprentissage (cf. « par
la langue »).En d’
aut
r
est
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mes,pourappl
i
querce pr
i
nci
pe à l
’
expr
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on orale (mais il vaut
aussi bien sûr pour les trois autres habilités langagières), c’
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abor
d en par
l
antquel
’
on apprend à parler, c’
estd’
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den faisant parler que l
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hodol
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es confondues là encore, a placé
depuis lors au centre de la « leçon » (
ou,en d’
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est
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nes,comme principe
d’
uni
t
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’« unité didactique ») un document de langue − qu’
i
lsoi
taut
hent
i
que comme l
e
texte littéraire ou journalistique, ou fabriqué comme le « dialogue de base » audiovisuel −
dont on fait reproduire la langue et sur lequel on fait produire de la langue par les élèves jusqu’
à ce qu’
i
l
ssoi
entcapabl
esde r
éal
i
serl
eur
spr
opr
espr
oduct
i
onsen r
ecombi
nantpoureuxmêmes les formes linguistiques fournies par le document. Dans le modèle « standard », celui
de l
’« intégration didactique maximale » où la plupart des tâches langagières proposées aux
él
èvesser
éal
i
sentàpar
t
i
retàpr
oposd’
unsuppor
tuni
que3,c’
estàpar
t
i
rdeceseul document
initial que se construit la cohérence de toute l
’
uni
t
é di
dact
i
que.Ce dispositif apparaît dans la
méthodologie active, mais il est repris dans la méthodologie audiovisuelle, où le texte littéraire
est simplement remplacé par un dialogue. Dans cette tradition didactique transméthodologique, on peut dire,pourr
epr
endr
el
af
or
mul
ebi
enconnuedel
’
Anci
enTest
ament
,qu’
« au début
est le Verbe », celui du document langagier de base sur lequel (à propos duquel/à partir duquel) les élèves sont invités à parler en en reprenant ses formes linguistiques pour se les approprier.L’
i
mpor
t
ance qu’
a conser
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hode i
nt
er
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i
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i
que
principalement par cette volonté, en « soumet
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antl
’
él
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aquest
i
on», de le « faire parler »
à tout prix sur le document imposé.
Dans la méthodologie active des années 1920-1960 –quis’
estmai
nt
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àpr
ésentseulement dansl
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i
ci
el
l
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’
ensei
gnementscol
ai
r
edel
’
espagnolen France –ce
dispositif didactique a été systématiquement appliqué à un enseignement conjoint de la langue
et de la culture étrangères à partir/à propos d’
unsuppor
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i
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et
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t
,d’
extraire du texte de nouvelles connaissances culturelles et de mobiliser des connaissances culturelles antérieures ou fournies en
t
emps r
éelparl
’
ensei
gnant
,ou encore recherchées par les apprenants : ce sont les tâches
d’
«extrapolation » etd’« interprétation » dont reparlerai dans le modèle d’« analyse actionnel
l
edel
’
expl
i
cat
i
ondet
ext
es» présenté plus avant. Mais ce dispositif didactique reste encore
3
Ce modèl
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or
mal
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sé dansl
’
i
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uct
i
on du 1er décembre 1950, qui est théoriquement restée en
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gueur j
usqu’
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af
i
n des années 70 (
el
l
e est r
epubl
i
ée encor
e en 1978 dans une compi
l
at
i
on
d’
i
nst
r
uct
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onsenvi
gueurdu CNDP).
3
de nos jours le modèle des épreuves du baccalauréat français pour toutes les langues, tant à
l
’
or
alqu’
àl
’
écr
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t
, l
’
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uat
i
on des capacités des candidats y portant sur leur capacité à parler
sur un document littéraire.
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ochecommuni
cat
i
ve,ou«quanddi
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ai
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’
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i
l
s
apprennent ainsi à communiquer en société : on continue doncà y appl
i
querl
’
homol
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i
nmoyen, mais cette fois à l
al
angue en t
antqu’
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umentde communi
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i
di
enne.
Le document littéraire n’
estpasadapt
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assedel
angue,par
cequedèsl
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i
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on conçueà l
af
oi
s
comme objectif etcomme moyen,i
lne peutdonnerl
i
eu qu’
à un comment
ai
r
e «scolaire »
puisque les élèves vont naturellement par
l
eren t
antqu’
él
èvesau professeur en tant que professeur. Contrair
ementen ef
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età ce quise passe dans l
es mul
t
i
pl
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i
ons d’
i
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er
act
i
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orale de la vie quotidienne qu’
ut
i
l
i
sel
’
appr
ochecommuni
cat
i
ve,onnepeuti
maginer en dehors
de la situation scolaire une homologie fin-moyen appliquée à la communication sur un texte
l
i
t
t
ér
ai
r
e en t
antque t
el(
c’
est
-à-dire dans ses dimensions à la fois langagière, esthétique et
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eur
sl
or
sd’
une
table ronde, des critiques littéraires à la radio ou des passionnés de littérature à une terrasse
de café, par exemple. On conviendr
aqu’
en contexte scolaire, ces situations simulées de communication ne pourront intéresser qu’
un très faible pourcentage des élèves, même parmi ceux
achevant leur cursus dans une filière littéraire…
Les candidats, en tout cas, ne se trouvent dans aucune de ces situations authentiques lors des
épreuves du baccalauréat, et les enseignants du coup forment en classe des commentateurs et
non des communicateurs :i
lestévi
dentquece n’
estpasl
a mêmechosedesavoi
rparler sur
des textes dans le cadre très culturellement normé et ritualisé des échanges langagiers en
classe de langue ou devant un examinateur au baccalauréat, que de savoir parler avec des natifs inconnus dans des situations variées de la vie quotidienne.
En déf
i
ni
t
i
ve,c’
estt
out
el
’
appr
oche communicative qui se révèle inadaptée à la situation scol
ai
r
e(
t
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ant que l
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, pui
sque dans l
a mi
se en œuvr
e de cet
t
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oche
l
’
ensei
gnantdemandeàl
’
él
ève,pour bien apprendre la langue en classe, sur
t
outdes’
i
magi
ner
qu’
i
lestailleurs, dans une situation « authentique » de communication, en faisant comme si
son dire en classe était un faire social. L’
ut
i
l
i
sat
i
on du courrier électronique, du chat ou de la
visioconférence ne réconcilie pas approche communicative et situation scolaire, les TICE, en
l
’
occur
r
ence,ét
antà j
ust
et
i
t
r
er
essent
i
scommeun moyen d’
échapperau face à face élèvesenseignant. On voit mal dans ces conditions comment on pourrait motiver les élèves à
l
’
appr
ent
i
ssage scol
ai
r
e desl
anguesvivantes, et particulièrement à l’
expl
i
cat
i
on collective des
textes littéraires en classe !
L’
approche communicative, cependant, n’
apas changé fondamentalement la logique antérieure
du « faire dire » ; mêmesil
essour
cesd’
i
nci
t
at
i
on sesontdi
ver
si
f
i
ées− ce sont aussi les autres apprenants, comme dans le pair work, ou les besoins et enjeux communicatifs euxmêmes,commedansl
’
exer
ci
ced’
information gap − ; même si au texte prétexte à production
l
angagi
èr
es’
estaj
out
éel
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uat
i
on pr
ét
ext
e(
dansl
asi
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i
on); et même si encore, à côté
du faire dire tradi
t
i
onnelàl
achar
gedel
’
ensei
gnant
,aémer
gé,avecl
anot
i
ond’
acte de parole,
un « faire par le dire » assumé parl
’
él
ève.Mai
sen der
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al
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ondament
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ementestt
ouj
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e,etl
’
act
i
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en secondaire, qui reste purement verbale. On sait
qu’
i
lestdanger
euxdepr
endr
esesmot
spourdesact
i
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outaut
antquesesdési
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spourdes
r
éal
i
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hét
or
i
quepol
i
t
i
quenousmont
r
antàl
’
enviquel
enombr
edesperformatifs dans les
discours des princes qui nous gouvernent ne constitue pas en soi un indice de leur performance sur le terrain…
Les quelques exemples types de formules très ritualisées constamment ressassés par les linguistes pragmatistes ne changentr
i
en à l
’
af
f
ai
r
e.Qu’
un Secr
ét
ai
r
e génér
aldi
se publiquement
« Je déclare clos le XXIIIe Congrès de notre Parti » ne le termine pas pour autant si un puissant gr
ouped’
opposant
sréclame à ce moment-là à cor et à cri la poursuite du débat, et par4
Pourr
epr
endr
el
et
i
t
r
ed’
un ouvr
agebi
en connu deJ
ohn Langshaw AUSTI
N,l
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unedesgr
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encesdel
apr
agmat
i
quel
i
ngui
st
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quedonts’
estr
écl
améel
’
appr
ochecommunicative.
4
vient à l
’
i
mposer. L’
act
edepar
ol
en’
ader
éal
i
t
éent
antqu’
act
i
on sociale que si et dans la mesure où il parvient à produire un effet en dehors de son domaine purement langagier. Pour
qu’
i
ly ai
tpassage du dire individuel au faire social, il faut par exemple un rapport de forces
(comme l
’
exempl
e ci
-dessusd’
un Congrès politique), un pouvoir symbolique accepté par les
parties en présence (« Je vous déclare unis par les liens du mariage » ; « Je vous nomme
Chevalier des Palmes Académiques »), ou encore –dernier exemple –le poids accordé à une
promesse (« Je vous promets que… »). Mais on sait que « lespr
omessesn’
engagentqueceux
qui y croient », sans parler de la possibilité qu’
atoujours l
’
énonci
at
eurdedi
stinguer dans son
dire ent
r
el
’
act
equ’
i
lr
éal
i
sepourl
uietcel
uiqu’
i
lr
éal
i
sepourl
esaut
r
es: « Le roid’
Épire promit de ne rester en Italie que juste le temps nécessaire ; sous la réserve mentale, sans nul
doute, de fixer lui-même combien de temps durerait cette nécessité », raconte ainsi Théodore
Mommsen dans son Histoire romaine. Bref les « actes de parole », comme l
eurnom l
’
i
ndi
que
assez bien, ne sont en tant que tels que des mots, et il leur faut bien autre chose que les simples conventions sociolinguistiques pour provoquer de véritables actions sociales.
Sur ce point, les lignes suivantes du CECR, dans le chapitre consacré à « Une perspective actionnelle » (pp. 14-19)5, sont importantes : « Si les actes de parole se réalisent dans des activités langagières, celles-cis’
i
nscr
i
ventel
l
es-mêmesàl
’
i
nt
ér
i
eurd’
act
i
onsencont
ext
esoci
alqui
seules leur donnent leur pleine signification. » (2001, Paris : Didier, p. 15) Elles marquent en
ef
f
etune r
upt
ur
e avecl
’
appr
oche communi
cat
i
ve,même si le terme de « signification » (qui
renvoie au langagier, contrairement par exemple au terme « effet »,quin’
estpascelui que les
auteurs du CECR ont utilisé) laisse penser que le découplage entre acte de parole et action soci
al
en’
estpasencor
epl
ei
nementassuré ni assumé par les auteurs.
Une seconde rupture significative d’
avecl
’
appr
oche communi
cat
i
ve est opérée dans le même
paragraphe, juste avant la citation ci-dessus, même si les auteurs ne peuvent pas en tirer les
conséquencesdi
dact
i
quespar
ce qu’
i
l
smai
nt
i
ennentparai
l
l
eur
sl
af
i
ct
i
on d’
une cont
i
nui
t
é de
leurs proposi
t
i
ons avec l
’
appr
oche communi
cat
i
ve pr
oposée dans les textes antérieurs du
Consei
ldel
’
Eur
ope,àsavoir les Niveaux Seuils des années 1970 :
Un cadr
ede r
éf
ér
ence pourl
’
appr
ent
i
ssage,l
’
ensei
gnementetl
’
éval
uat
i
on desl
angues
vivantes, transparent, cohérent et aussi exhaustif que possible, doit se situer par rappor
tà une r
epr
ésent
at
i
on d’
ensembl
et
r
èsgénér
al
e de l
’
usage etde l
’
apprentissage
des langues. La perspective privilégiée ici est, très généralement aussi, de type actionnelencequ’
el
l
econsi
dèr
eavantt
outl
’
usager etl
’
apprenant d’
unelangue comme des
acteurs sociaux ayant à accomplir des tâches (qui ne sont pas seulement langagières)
dansdesci
r
const
ancesetun envi
r
onnementdonné,àl
’
i
nt
ér
i
eurd’
un domai
ned’
act
i
on
particulier. (je souligne)
Tout
el
’
approche communicative, en effet, s’
ét
ai
tef
f
or
céedeneut
r
al
i
sercette distinction entre
l
’
agi
rd’
appr
ent
i
ssage (
ou scol
ai
r
e)etl
’
agi
rd’
usage (
ou soci
al
)
,son activité de référence, la
simulation, consistant pourl
’
él
èveàpar
l
eren t
antqu’
appr
enantcommes’
i
lét
ai
tun usager
,à
y réaliser en classe des actes de parole commes’
i
lagi
ssai
tainsi en société.
Étant donné la nécessité, pour beaucoup des élèves actuels, que leur soit proposé un sens à
leur apprentissage en dehors des seuls enjeux scolaires,mai
sà l
’
i
nver
se,et tout autant, que
les activités purement scolaires ai
entpoureuxunsensent
er
mesd’
appr
ent
i
ssage, il est indispensable de revenir à une distinction et à une articulation pour eux compréhensibles et acceptables entre activité d’
usage (ou sociale) et activité d’
appr
entissage (ou scolaire). Cela suppose
d’
abor
d que l
esenseignants se réapproprient eux-mêmes cette distinction et revendiquent la
légitimité etl
’
i
nt
ér
êtdes activités « scolaires » en tant que telles. Il est quand même paradoxal, quand on y pense, que le qualificatif de « scolaire » appliqué à un élève ait fini par
prendre une connotation négative dans la bouche des enseignants eux-mêmes ; tout comme
« artificiel » appliqué à un exercice, alors que le seul avantage spécifique de l
’
ensei
gnement
scolaire est précisémentquel
epr
ocessusd’
apprentissage peut y être dosé, guidé et aidé par
des dispositifs construits à cet effet. L’
ensei
gnant est un concept
eur de di
sposi
t
i
f
s
d’
ensei
gnement
-appr
ent
i
ssage, c’
est
-à-dire que sa pratique consiste en partie en de
l
’
i
ngéni
er
i
e, act
i
vi
t
é pr
of
essi
onnel
l
e qu’
Her
ber
t A. Si
mon consi
dèr
e comme r
el
evant des
« sciencesde l
’
ar
t
i
f
i
ci
el» (Sciences des systèmes, sciences de l'artificiel, trad. Paris : Dunod,
coll. « afcet Système », 1991).
5
Surl
’
anal
ysedi
dact
i
quequej
ef
ai
sdecet
t
eper
spect
i
ve,j
erenvoie à mes articles de 2002 et 2006.
5
Il faut donc disposer de concepts différents pour désigner l
’
agi
rsoci
aletl
’
agi
rscolaire, et je
propose à cet effet, contrairement aux auteurs du CECR quiut
i
l
i
sentl
esdeux mot
sl
’
un pour
l
’
aut
r
e,de parler d’« action » commeuni
t
édesensau sei
ndel
’
agi
rsocial (ou d’
usage), et de
« tâche »commeuni
t
édesensausei
ndel
’
agi
rscolaire (ou d’
apprentissage). Sans considération de qui conduit l
’
act
i
vi
t
é,nide ce qui donne sens à cette unité, ni de sa dimension : ce
peut être, pour prendre trois exemples contrastés, un point de grammaire travaillé en cinq minutes dans un exercice structural proposé dansl
e cahi
erd’
exer
ci
ces, un thème de civilisation
traité en quinze jours sousl
econt
r
ôl
ede l
’
ensei
gnantavec des recherches personnelles de la
par
td’
un gr
oupe d’
élèves, ou encore un projet conduit de manière autonome par toute la
classe surl
’
ensembl
edel
’
annéescolaire.
Les relations possibles en classe de langue entre actions et tâches ainsi définies peuvent être
modélisées a priori de la manière suivante6 :
RELATIONS TÂCHES-ACTIONS EN CLASSE DE LANGUE
a1
1
A
a2
a3
B
2
C
D
1
La société comme domaine de réalisation des actions.
2
La classe comme domaine de réalisation des tâches.
A
La classe comme lieu d’
ét
ayage,del
apar
tdel
’
ensei
gnant
,quant aux
savoirs et savoir-faire langagiers, culturels et méthodologiques nécessai
r
es à l
’
él
ève pournon seulement réaliser les tâches demandées,
mai
s en t
i
r
erl
e maxi
mum de pr
of
i
ten t
er
me d’
appr
ent
i
ssage.7 Cet
étayage peut se faire avant (a1, préparation), pendant (a2, soutien),
après (a3, reprise) leur réalisation.
B La classe comme lieu de conception d’
act
i
ons
C
La classe comme lieu de simulation d’
act
i
ons
D Lacl
assecommel
i
eud’
action
6
Je reprends ici, en le complétant et en le développant, un modèle initialement présenté dans mon article de 2003, puis dans ma conférence de 2006.
7
L’
«étayage », concept désormais courant en pédagogie générale, dési
gnecequef
ai
tl
’
ensei
gnantpour
quel
’
appr
enantpar
vi
enneàf
ai
r
ecequ’
i
lnepour
r
ai
tencor
ef
ai
r
edemani
èr
et
ot
al
ementaut
onome: aides,gui
dages,consei
l
s,
… Cet
t
ef
onct
i
ondel
’
ensei
gnantpeutêt
r
epr
i
seenchar
get
ot
al
ementouenpar
t
i
e
pard’
aut
res agents tels que le manuel (lexique final, précis grammatical, consignes, fiches méthodologiques…)
,l
e mat
ér
i
eldi
sponi
bl
e(
di
ct
i
onnai
r
es,gr
ammai
r
es,r
essour
cessurInternet,
…)
,l
esaut
r
esmembres du groupe de travai
l
,
… Dansl
’
ensei
gnement
-apprentissage des langues, tout au moins, cet étayage
ne s’
ar
r
êt
e pasà l
ar
éal
i
sat
i
on cor
r
ect
e de l
at
âche:l
’
ensei
gnantva demanderparexempl
e auxél
èves
d’
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i
querpour
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l
sconsi
dèr
entt
el
l
eou t
el
l
ephr
asecor
r
ect
e,s’
i
lpensequ’
i
l
sontsi
mpl
ementr
epr
oduit mécaniquement un modèle structural ;ouencor
ei
lval
eurdemanderendébutd’
heur
eder
epr
endr
e
quelquesphr
asescl
ésde comment
ai
r
e du t
ext
e ét
udi
éàl
’
heur
e pr
écédent
e,pourassur
erun nouveau
rebrassage de telle ou telle forme linguistique introduite parce t
ext
e(
on par
l
e d’
ai
l
l
eur
spourdési
gner
ces débuts de cours de « phases de reprise »).
6
Cette modélisation permet des comparaisons nouvelles entre les grandes méthodologies historiques. Je ferai à ce sujet trois développements.
1. Comme l
’
act
i
on r
el
ève desobj
ect
i
f
s(
ce que l
’
on veutque l
’
appr
enantsoi
tcapabl
e de f
ai
r
e
en langue-culture étrangère en société) et que la tâche relève des moyens(
ce que l
’
on f
ai
t
f
ai
r
een cl
asseauxappr
enant
spourqu’
i
l
ssoi
entcapables de réaliser en société les actions visées), il est logi
quequel
epr
i
nci
ped’
homol
ogi
ef
i
n-moyen s’
appl
i
queaussi à la relation tâcheact
i
on.En d’
aut
r
est
ermes,on at
ouj
our
spr
i
vi
l
égi
écommet
âched’
appr
ent
i
ssageen cl
assede
langue l
’
act
i
vi
t
équi s’
approchai
tl
epl
usdel
’
act
i
onvisée :
–Dans la méthodologie traditionnelle, on se proposait de former des gens capables de continueràl
i
r
el
esgr
andsœuvr
esdel
al
i
t
t
ér
at
ur
ecl
assi
que. On les entraînait pour cela à traduire,
parce que dans le paradigme cognitif alors dominant, dit « indirect », on considérait que la lecture était une traduction mentale instantanée de la langue étrangère à la langue maternelle
(parler avec un étranger était donc considéré comme une alternance entre versions orales et
thèmes oraux en temps réel), et elle ét
ai
td’
ai
l
l
eur
st
r
avai
l
l
ée, en enseignement aux adultes,
dans un exercice spécial dit « de phraséologie »,dans l
equell
’
enseignant choisissait au hasard, dans des colonnes de phrases avec leur traduction proposées dans le manuel, de lire la
phrase en L1 ou L2, et demandait immédiatement à un élève de la tradui
r
e dansl
’
aut
r
el
angue.
–Dans la méthodologie active, on se propose de former des gens capables de maintenir plus
tard un contact à distance avec la langue-culture étrangère par documents authentiques interposés (textes littéraires, mais aussi tous types de documents authentiques : journaux, revues,
disques, émissions de r
adi
o etde t
él
évi
si
on,
…)
.L’
obj
ect
i
fde l
’
explication de textes littéraires
correspond précisément à cette capacité à établir et exploiter ce contact à distance, le « parler
sur le texte » f
our
ni
ssantà l
af
oi
sl
e pr
ét
ext
e de l
’
ent
r
aî
nementl
i
ngui
st
i
que etl
’
occasi
on de
mobiliser des connaissances culturelles antérieures et parallèlement d’
ext
r
ai
r
edu document de
nouvelles connaissances culturelles.
–Dansl
’
appr
ochecommuni
cat
i
ve,on sepr
oposed’
apprendre aux élèves à communiquer plus
tard ensoci
ét
éenl
eurdemandantdecommuni
querencl
asseent
r
eeuxcommes’
i
l
sét
ai
enten
société (activité de simulation).
–Sil
’
onpr
ol
ongel
ef
onct
i
onnementdecepr
i
nci
ped’
homol
ogi
ef
i
n-moyen à la perspective actionnelle (et on ne voit paspourl
’
i
nst
antcomment ce principe pourrait être abandonné), on
formera désormais les élèves à agir socialement en langue-culture étrangère d’
abor
d en les
faisant agir socialement en langue-culture étrangère en classe : ce moyen a déjà un nom en
pédagogie générale, et c’
estl
a« pédagogie du projet ».
2. La distinction entre « conception » (B) et « préparation » (a1) n’
estpascourante en didactique scolaire des langues, mais il mesembl
ed’
aut
antpl
usnécessai
r
edel
adéf
i
ni
rcl
airement
qu’
el
l
eset
r
ouveêt
r
ecent
r
ale dans cette pédagogie du projet :
− Un projet implique toujours un processus de conception assumé par ses responsables (en
l
’
occur
r
ence,l
esél
èveseux-mêmes) qui par définition est susceptible de transformer le projet
lui-même,c’
est
-à-dire de modifier les actions dont il se composera finalement et, récursivement, ses obj
ect
i
f
s.La concept
i
on estdonc parnat
ur
e une act
i
on por
t
antsurl
’
act
i
on el
l
emême. Exempl
edet
r
avai
ldeconcept
i
on dansl
ecasd’
un pr
oj
etdevoyageàl
’
ét
r
anger: « Où
irons-nous cette année ? Combien de temps ? Par quels moyens ? Quels en seront les objectifs
(linguistiques, culturels, touristiques,
…)etparconséquentl
esact
i
vi
t
ésque nouspr
évoi
r
ons?
Où logera-t-on(
chezl
’
habi
t
ant
,enr
ésidence,
… ?). Etc. » Les réponses à ces questions ne sont
pasf
i
xéesà l
’
avanceparl
’
ensei
gnant
,etl
esr
éponsesi
ni
t
i
al
esdesél
èvespeuventêt
r
emodifiées par eux au cours même de la réalisation du projet.
− Le processus de préparation (a1) ne vise que la mise à disposition des ressources et des
moyens linguistiques et culturels dontonpr
évoi
tqu’
i
l
sser
ontnécessai
r
esau cour
sdel
’
act
i
on.
Exemple de travail de préparation (culturelle et linguistique) pour le même projet de voyage à
l
’
ét
r
anger: « Nous avons décidé que le logement serait en famille. Alors, le matin suivant votre arrivée, vos hôtes vous attendent a priori à quelle heure pour prendre votre petit déjeuner ? Pouvez-vous descendre en pyjama ? Si vous trouvez la table mise, pouvez-vous commencer à déjeuner ou devez-vous attendre que votre correspondant ou la maîtresse de maison
7
arrive ? Comment allez-vous saluer ceux-ci pour la première fois de la journée ? Et les fois suivantes ? Etc. » Le soutien (a2),en l
’
occur
r
ence,ser
a donné parl
’
ensei
gnantau cour
sdu séjour en réponse à des questions soulevées et des problèmes exposés par les élèves lors de ses
rencont
r
esaveceux,etl
’
expl
oi
t
at
i
on l
angagi
èr
e etcul
t
ur
el
l
e ser
a assur
é au r
et
ouren cl
asse
(a3).
Chaque méthodologie constituée (qui correspond par nature à une certaine conception globale
de l
’
ensei
gnement
-apprentissage, et donc en particulier de la relation fondamentale tâchesact
i
ons) él
ar
gi
t ou au cont
r
ai
r
e r
est
r
ei
nt l
’
ai
r
e de r
ecoupement ent
r
e l
’
ensembl
e 1 et
l
’
ensembl
e2 (
cf
.l
adoubl
ef
l
èchehor
i
zont
al
e)
,etaccor
depl
usou moi
nsd’
i
mpor
t
ancer
el
at
i
ve
aux différ
ent
st
ypesd’
i
nt
er
sect
i
onA, B, C et D (cf. les quatre doubles flèches verticales) :
− Dans la « méthodologie traditionnelle »,l
’
ai
r
epr
i
vi
l
égi
éeestl
aA, et plus précisément a1 (la
préparation) : les récitations de règles de grammaire, de listes lexicales et de textes appris par
cœur
,ou encore les exercices de grammaire et de vocabulaire sont autant de tâches qui ne
correspondent pas directement à ce que les élèves devront être capables de faire plus tard en
langue étrangère (lire des textes littéraires), mais qui sont censées les y préparer indirectement. La tâche de référence de la méthodologie traditionnelle –la traduction des textes littéraires – estbi
en en homol
ogi
e avec l
’
act
i
on de r
éf
érence : on entraîne les élèves à traduire
(= lire) en cl
asse pourqu’
i
lpui
ssentcont
i
nuerà l
i
r
e (= traduire) pl
ust
ar
d.Mai
sl
’
i
mportance
prise par la grammaire ainsi que le recours systématique à la combinaison des méthodes
transmissive, analytique et déductive (caractéristique de la pédagogie traditionnelle) dans
l
’
ensei
gnementscol
ai
r
e, y donnent à la préparation un poids finalement plus important que la
tâche elle-même de traduction-lecture des textes, ceux-ci devenant des prétextes à une présentation i
ni
t
i
al
eparl
’
ensei
gnantde contenus grammaticaux et culturels (a1), et à des activités de reprise (a3) collective àl
’
occasi
on del
acor
r
ect
i
ondes traductions écrites individuelles.
Le soutien quant à lui (a2) est assuré excl
usi
vement(
etdi
f
f
i
ci
l
ement
,sij
’
en cr
oi
smessouvenirs personnel
sde pot
ache en l
at
i
n eten gr
ec…)par le livre de grammaire et le dictionnaire,
dont les élèves disposent lors de leurs tâches individuelles de version ou de thème en étude ou
à la maison.
–La méthodologie active –pl
uspr
éci
sémentson act
i
vi
t
é de r
éf
ér
ence,l
’
expl
i
cat
i
on de t
ext
es
littéraires –est conçue selon une relation très particulière entre l'aire 1 et l'aire 2. Cette relation n'est pas de l'ordre de l'intersection, comme les aires A, B, C et D dans cette modélisation,
mais de l'ordre de l'assimilation entre l'activité scolaire de l'explication de textes littéraires
(l'ensemble des tâches d'apprentissage qui le constituent) et l'activité sociale attendue des
gens cultivés lors de leur contact avec des documents authentiques en langue-culture étrangère : on consi
dèr
eal
or
s,en ef
f
et
,que c’
estl'école qui doit former selon ses propres normes
les futurs lecteurs en société, et non à l
’
i
nver
se, comme maintenant, que ce sont les normes
non scolaires (« authentiques », « naturelles ») qui doi
vents’
i
mposerà l
alecture en salle de
classe. Cette hypothèse d’
i
nver
si
on hi
st
or
i
que de l
ar
el
at
i
on modélisatrice école-société (et
donc tâches-actions) me semble intuitivement correcte à partir de ma longue pratique des
écrits des méthodologues actifs, et elle est en outre cohérente, si j
’
en cr
oi
sl
eshi
st
or
i
ensde
l
’
éducat
i
on,avecl
’
i
déol
ogi
e formative très volontariste qui prévalait dans toute la pédagogie
scolaire :l
’
écol
e devai
tà l
’
époque f
or
merl
el
ect
eurcomme elle doit encore de nos jours former le citoyen.
Le gros problème structurel auquel se heurte concrètement cette assimilation, c’
est que les
élèves sont loi
nd’
avoi
rles moyens linguistiques et culturels dont disposent des adultes « cultivés »,etc’
estce quiexpl
i
que l
’
i
mpor
t
ance énorme de toutes les activit
ésd’
ét
ayage(a1, a2,
a3) dans la méthodologie active.8 La conséquence est très semblable à celle que j
’
aisi
gnal
ée
pour la méthodologie traditionnelle :l
et
ext
el
i
t
t
ér
ai
r
et
endàn’
êt
r
equ’
unpr
ét
ext
eàdécouvertes et apports langagiers et culturels sous le contrôle étroit del
’
ensei
gnant
, ce qui justifie les
critiques actuelles de certains didacticiens (au nombre desquels je me compte), qui considèrent qu’
en y ét
antà ce point instrumentalisé pourl
’
ensei
gnementappr
ent
i
ssage de l
al
angue
et de la culture, le document littéraire tend à perdre toute littérarité aux yeux des élèves.
Comme dans la méthodologie traditionnelle aussi, on aboutit paradoxalement dans la méthodologie active à cequel
’
obj
ect
i
fdef
or
mat
i
on d’
un l
ect
euraut
onomene soit poursuivi que par
8
Même si, au cours de l'histoire et selon les traditions de chaque langue, l'équilibre interne entre les tâches de ces différents types (a1, a2 et a3 »), et leur positionnement à l’
intérieur de l’
unité didactique, ont
beaucoup varié.
8
des moyens très direct
i
f
s,etàcequel
’
obj
ect
i
fdef
or
mat
i
onaugoûtl
i
t
t
ér
ai
r
esoi
tpour
suivi au
sei
n d’
un di
sposi
t
i
fdi
dact
i
quequit
end à gommer la spécificité du texte littéraire et de la lecture littéraire.
− Dans l
’
appr
oche communi
cat
i
ve,l
’
ai
r
e pr
i
vi
l
égi
ée est l
a C (l
a si
mul
at
i
on d’
act
i
ons,sous
forme de présentati
on d’
un sket
ch oujeu de rôles par les élèves eux-mêmes), l
’
ét
ayageétant
réduit (du moins dans les manuels qui systématisent cette approche) au strict minimum, que
ce soit en termes de préparation (a1), soutien (a2) ou reprise (a3). La page du manuel Tandem (Didier, 2003) présentée ci-après me semble en fournir un bon exemple9 :
C. Bergeron, M. Albero et M. Bidault : Tandem, niveau 2, Didier, 2003, page 23.
On voit que les formes linguistiques sont données de manière très ponctuelle sur le support
photographique (a2,sout
i
en)
,l
’
obj
ect
i
fét
antquel
esél
èvespui
ssenti
mmédiatement produire
des phrases en simulation de visite (« Voilà la bibliothèque où je travaille. Des élèves lisent
des livres. D’
aut
r
esf
ontl
eur
sdevoi
r
s», « C’
estl
àquej
evi
enspar
f
oi
sempr
unt
erdesl
ivres »,
etc.). On peut supposer que dans la partie antérieure de la leçon ces formes ont été déjà introduites et travaillées (a1, prépar
at
i
on)
,mai
si
lestévi
dentparcont
r
e qu’
i
ln’
y a pasi
cide
conception (B) de la part des élèves, ce qui supposer
ai
tqu’
i
l
sseposentpar exemple les questions suivantes, et décident des réponses collectives à y apporter : Doit-on demander une autorisation pour cette visi
t
e,etàqui
?Quivas’
en char
ger
?Commentva-t-on se renseigner sur
l
escent
r
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i
nt
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êtdececor
r
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-cequ’
on val
uienvoyerpr
éal
abl
ementdel
adocumentation sur le collège? Laquel
l
e?Sioui
,quival
’
él
abor
eret la lui envoyer? Que va-t-on lui
faire visiter? Qui se charge de la visite? Quelles personnes va-t-on avertir de cette visite? Qui
se charge de préparer cette visite avec ces personnes? Etc., etc. Les auteurs eux-mêmes ne
sont pas entrés dans cette logiquedel
aconcept
i
on del
’
act
i
on soci
al
e: les deux cas de figure
qu’
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s pr
oposenti
ci–l
a vi
si
t
e or
gani
sée pourun nouvelél
ève etcel
l
e d’
un cor
r
espondant –
9
Je reprends, avec les mêmes commentaires, un document déjà proposé dans mon article de 2006.
9
sont en effet traités de la même manière au niveau de l
a communi
cat
i
on,al
or
squ’
i
l est évident que ces deux visites devraient être conçues au départ de manières très différentes, en
tenant compte en particulier des attentes prévisibles des deux visiteurs. Même en tenant
compte de tous les paramètres possibles, les objectifs de chaque visite ne pourront pas être
déterminés entièrement a priori, pas plus que les moyens pour les atteindre : ils devront tenir
compte en temps réel des réactions de chaque visiteur au cours de la visite, et ce sont ces
ajustements en cours de projet opérés par les élèves eux-mêmes qui constituent le premier
critère pourj
ugerapr
èscoups’
i
ls’
estagid’
unvér
i
t
abl
epr
ojet.
− Dans la dite « pédagogie du projet », les aires privilégiées sont la B (
concept
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ond’
unvoyage
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un exposédegr
oupe,t
abl
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ondesur un sujet de société, entrevue
avecuni
nvi
t
éext
ér
i
eur
,
…)
, même si les moyens langagiers et culturels devront aussi être traités en classe (aire A)
,etquel
’
on peuti
magi
nerdes simulations plus ou moins partielles préalables (aire C) de manière à faire apparaître des besoins langagiers et culturels qui seront ensuite repris (a3) de manière, récursivement, à fournir une préparation (a1) au projet. On
connaît aussi dans la pédagogie Freinet le « fichier autocorrectif » de grammaire à la disposition constante des élèves l
or
sdel
eur
sact
i
vi
t
ésd’
écr
i
t
ur
e(a2, soutien) : la pédagogie du projet se révèle un dispositif permettant de varier les relations tâches-actions et de donner un
sens à toutes les tâches scolaires en les mettant constamment en relation directe avec des actions sociales.
3. Nous pouvons maintenant développer une nouvelle comparaison entre la méthodologie active et l
’
approche communicative, et elle fait apparaître des similitudes didactiques surprenantes. Elle sont surprenantes dans le sens où el
l
esn’
appar
ai
ssentpas à première vue (quelle relation a priori entre un commentaire scolaire de texte littéraire et un jeu de rôles ?)etqu’
el
l
es
n’
ontpasét
é à ma connai
ssance signalées auparavant. Mais elles permettent sans doute de
comprendre pourquoi ces deux méthodologies peuvent actuellement cohabiter dans
l
’
ensei
gnementscol
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i
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a) Dans les deux méthodologies, « di
r
e,c’
estf
ai
r
e» : aux micro-actes de paroles dans la simulation communicative correspond le macro-acte de parole en situation scolaire que constitue
l’
expl
i
cat
i
on de t
extes, dans laquelle dire ses commentaires sur le texte c’
est en faire
l
’
expl
i
cat
i
on.
b) Dans la simulation − exer
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enant
,commenousl
’
avonsvu,defaire commes’
i
lét
ai
tun usageren disant ce que celui-ci dirait dans cette situation. Dans la méthodologie active, on forme à l
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nver
sel
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lcont
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nueàfaire en société commes’
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n dedire en classe.L’
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scolaire des supports littéraires se voulait en ef
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époque le modèle social de la compétence del
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vé. Ce n’
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ai
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’
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’
ait
ouj
our
seu la forte impression que les commentaires
entre Français « cultivés » sur les ouvr
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l
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us − ou, plus fréquemment de nos
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l
uencésparl
e modèl
e de l
’
explication sco10
laire des textes littéraires. Mais dans les deux méthodologies, même si la relation est inverse,
la distinction entre actions et tâches est neutralisée dans le champ didactique.
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t
eneut
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on ent
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’
ef
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acement de la distinction entre conception et préparation, que nous avons vue plus haut. Dans la méthodologie act
i
ve, c’
est
l
’
ensei
gnantquiconçoi
tl
’
expl
i
cat
i
on de textes, et cette conception consiste à préparer cette
explication de telle manière que les élèves, grâce à son aide et à son guidage étroits (en parti10
Ceser
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tunsuj
etder
echer
chei
nt
ér
essantqued’
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i
dercet
t
ehypot
hèseparuner
echerche
linguistique sur des enregistrements de conversations authentiques, pour laquelle on pourrait entre aut
r
ess’
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edesact
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enduesdanscet
yped’
expl
i
cat
i
on (
voir « Analyse actionnelle de l'explication de textes littéraires », plus bas)
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ur
ed’
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du,dansl
asociété française,
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ai
l
l
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saux
diplômes attestant de la formation correspondante.
10
culier sous forme de questions relativement fermées) puissent la commencer immédiatement
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or
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l
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i
onl
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ngui
st
i
queet culturelle limitée au strict minimum et sans aucun travail antérieur de conception, lequel impliquerait une
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l
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ai
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er
l
ocut
eur
senf
onction de leurs objectifs, de leurs enjeux communicatifs, de leurs statuts et autres paramètres
d’
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t
uat
i
on r
éel
l
e d’
act
i
on soci
al
e (cf. supra à ce sujet mon commentaire à propos de la
page 23 du manuel Tandem).
d) De sorte que dans les deux méthodologies, la tendance est forte à une mécanisation de
l
’
agi
r
,au moins dansl
esdébut
sdel
’
appr
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i
ssage.Dansl
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i
vesousf
or
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questions types (qui ?, où ?, quand ?, comment ?, pourquoi ?, avec quels résultats ?) appliquées à des documents types (des récits) ;dansl
’
appr
ochecommuni
cat
i
vesousf
or
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l
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sal
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,s’
excuser
,demander, puis
remercier et enfin pr
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une f
or
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el
i
ai
son l
angue-culture (caractéristique des
deux méthodologies, autre similitude) : la nécessité premièred’
un r
ebr
assagei
nt
ensi
fdes formes linguistiques de base tend à provoquer mécaniquement une simplification des contenus
culturels et une ritualisation de leur traitement.
3. L’
appr
ocheactionnelle, ou le faire social
On sait que le CECR ébauche une « perspective actionnelle » dontl
’
obj
ect
i
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or
mat
i
on
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un «acteur social ». Sil
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’
homol
ogie fin-moyen, on
peut prévoir dans les années à venir, commenousl
’
avonsdéj
àsi
gnal
épl
ushaut
,la forte réactivation d’
un modèle pédagogique déjà di
sponi
bl
ef
ai
santde l
’
appr
enanten classe un acteur
social de plein droit, à savoir la « pédagogie du projet ».
3.1 Explication de textes littéraires et « faire social réel-authentique »
Je parle ici de « faire social réel-authentique » pour opposer le « réel » au « virtuel » de la simulation (3.2), et l
’« authentique » à l
’« artificiel » de l’
environnement scolaire (3.3), sans
mettre sous « virtuel » ni sous « artificiel » la moindre connotation péjorative : la seule supériorité de l
’
apprentissage scolaire sur le bain linguistique11, mais elle est grande, est justement
de pouvoi
rj
ouersurt
out
ecet
t
epal
et
t
ed’
act
i
vi
t
és(réelles ou virtuelles, authentiques ou artificielles) et de les combiner et articuler les unes aux autres selon les besoins des apprenants.
Les enseignants utilisent depuis longtemps ces f
or
mes d’
act
i
on soci
al
e par la littérature que
sont les représentations de pièces de théâtre ou les lectures publiques de poèmes. On connaît
bien par ailleurs le « dossier de civilisation » const
i
t
ué d’
un ensembl
e de document
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i
f
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que(hist
or
i
que,soci
ol
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que,économi
que,
…)
, médiatique ou de témoignage personnel, des documents
littéraires introduisant la perspective artistique.J
usqu’
àpr
ésent
,cesdossi
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sét
ai
entpr
oposés
tout faits par les auteurs de matériels didactiques : Internet
,avecl
’
accèsi
mmédi
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amasse
de document
saut
hent
i
quesqu’
i
laut
or
i
se,permet désormais que de tels dossiers soient conçus
et réalisés dans le cadre de projets par les élèves eux-mêmes (avec éventuellement des collabor
at
i
onsd’
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r
esél
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aut
r
espays)
, et qu’
i
l
sdonnentlieu à exposé en classe et publication sur le Web.
Dans la pédagogie Freinet, la notion de production écrite collective à dimension sociale effective est importante, telle que le « journal de classe » destiné à être diffusédansl
’
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eethor
s
del
’
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e–elle aussi bien connue et bénéfici
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encedesensei
gnant
s–des « at
el
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sd’
écr
i
t
ur
e», dans lesquels les élèves produisent et publient collectivement des recueils de nouvelles ou de poèmes.
I
nt
er
netper
metdésor
mai
s d’
assur
erun él
ar
gi
ssement des collaborations au-delà des seuls
élèves de la classe, et la diffusion des productions des élèves au moyen de la publication sur le
Web.
11
Tout
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antégal
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l
l
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s,bi
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,enpar
t
i
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i
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’
i
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ensi
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adur
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actavecl
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langue étrangère.
11
Mais on peut concevoir des projets sociaux réels plus originaux faisant appel à la littérature, la
limite étant celle de l
’
i
magi
nat
i
on del
’
ensei
gnant
,desoppor
t
uni
t
ésdet
er
r
ai
n etde la motivation de ses élèves (dans cet ordre chronologique, à mon avis).J
emesouvi
ensd’
unpr
oj
etpr
ésenté il y a quelques années dans un colloque international12 par un enseignant guatémaltèque
de français langue étrangère, et dontl
’
obj
ect
i
favait consisté, pour ses élèves, à aller faire en
f
i
n d’
année des lectures de leurs traductions en espagnol de poèmes françai
s dans d’
aut
r
es
classes de la banlieue défavorisée de Guatemala City. Ce qui avait impliqué qu’
ensembl
e ils
lisent des recueils, sélectionnent des poèmes et en travaillent la traduction : autant
d’
occasi
ons de donner du sens –etl
esensét
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cicl
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i
ssagel
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i
que et culturel.
3.2 Explication de textes littéraires et faire social simulé
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ouj
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s ai
sé nipossi
bl
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t
eren permanence la littérature dans le cadre
d’
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esréelles, mai
sr
i
en n’
empêche etper
sonnene devr
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tempêcherde combi
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pédagogie du projet et simulation.Pr
enonsl
’
exempl
ed’
un pr
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et
, supposé être présenté à un
éditeur, d’
édi
t
i
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l
l
ust
r
éed’
un nouvelle : les élèves devraient pour cela chercher et sélectionner les différentes illustrations,etse met
t
r
e d’
accor
d ent
r
e eux pourr
éal
iser le montage correspondant. Danscetexempl
e,commesansdout
edansbeaucoupd’
aut
r
esquipourraient être
imaginés en simulation, la dimension interdisciplinaire pourrait être envisagée (avec le professeur d’
Ar
t
spl
ast
i
quesdansl
’
exempl
edonné). Là aussi, la publication finale sur Internet donne
désormais potentiellement à toute production des élèves une certaine dimension de « réalité
sociale » qui peut certainement aider à leur motivation, dans la mesure où c’
estl
’
i
magequ’
i
l
s
ontetqu’
i
l
sdonnent d’
eux-mêmes en dehor
sdel
’
espace scolaire qui se trouve ainsi mise en
jeu.
Enfin, commec’
estdéj
àl
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’
exempl
edu pr
oj
eti
magi
néparl
’
ensei
gnantguat
émal
t
èque, la « compétence de médiation » etl
’
obj
ect
i
fde «compétence plurilingue et pluriculturelle » introduits dans le CECR ouvr
entsurdespossi
bi
l
i
t
ésd’
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santappelsi
mul
t
anément à la langue-culture/li
t
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èves età d’
aut
r
es l
angues-cultures/littératures étrangères. Les travaux existants de littérature comparée offrent dès à présent une
mi
ned’
i
déesàexpl
oi
t
erendi
dact
i
quedesl
angues-cultures.13
3.3 Explication de textes littéraires et faire scolaire
Mais dans l
’
aveni
r actuellement envisageable de l
’
ensei
gnement
-apprentissage scolaire des
langues, l
’
expl
i
cation « traditionnelle » de textes littéraires gardera une certaine place pour au
moins les quatre bonnes raisons suivantes :
1) La si
t
uat
i
on d’
él
oi
gnementavecl
al
angue-culture étrangère est la situation naturelle de la
classe, et elle est (et restera pour longtemps encore sans doute) cel
l
edebeaucoupd’
élèves en
dehors de la classe : il est donc toujours utile « de former des gens capables de maintenir plus
tard un contact à distance avec la langue-culture étrangère par documents authentiques interposés (textes littéraires, mais aussi tous types de documents authentiques : journaux, revues,
di
sques,émi
ssi
onsde r
adi
o etde t
él
évi
si
on,
…)», pour reprendre textuellement ce que je disais plus haut à propos des objectifs sociaux de la méthodologie active.
2) Ce t
ype d’
act
i
vi
t
é estpeu coût
euxen moyens, en organisation (elle se fait en classe ordinaire avec le manuel ou quelques photocopies, et le tableau) et, last but not least, en temps
depr
épar
at
i
onparl
’
ensei
gnant
.
3) Cet
yped’
activité constitue un modèle puissant et maniable de conception de tâches scolair
esà par
t
i
retà pr
oposd’
un t
ext
e littéraire en enseignement simultané de la langue et de la
culture :l
er
appor
tt
empsde pr
épar
at
i
on /ef
f
i
caci
t
éen t
er
mesd’
appr
ent
i
ssage est potentiellement très élevé.
12
XIIe CEDIFRALES, Rio de Janeiro, 3-6 juin 2001.
Ce n’
estcer
t
ai
nementpas un hasar
d sil
es deux t
hèses que j
’
aidi
r
i
gées surdes pr
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ensei
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t
t
ér
at
ur
e dans l
eur
s cur
sus de f
or
mat
i
on,se sontor
i
entées
spontanément vers une approche comparatiste de textes : Parvine MOVASSAT, Méthodologies de l'enseignement/apprentissage de la littérature en français langue étrangère. Le cas de l'université iranienne.
Université Paris-III, mai 1999. Wassim AL CHAAR, Pour une nouvelle approche du texte littéraire dans les
universités syriennes, Université Paris-III, octobre 2001.
13
12
4) Il est toujours nécessaire de former de futurs professionnels et des citoyens capables
d’
abor
dersous des perspectives différentes des documents non immédiatement transparents
et ouvert à des interprétations multiples, et qui soient capables de se concentrer pendant un
certain temps sur leur étude approfondie.
Ces arguments ne valent toutefois que sil
’
on assi
gneà cette explication de textes littéraires
des fonctions spécifiques à côté des autres types activités sur d’
aut
r
estypes de supports, et
qu’
on la revisite à la lumière des orientations didactiques contemporaines.C’
estcequeje me
propose de faire dans la suite de cet article, avec ce que l
’
on peutappel
erune «analyse actionnelle » de cette explication de textes littéraires,c’
est
-à-dire une analyse de ce type de textes en termes de tâches (scolaires) à réaliser par les élèves.
ANALYSE ACTIONNELLE DEL’
EXPLICATION DETEXTES LITTÉRAIRES
1. Paraphraser
14
 Définition : on « explique »l
esensl
i
t
t
ér
ald’
unepar
t
i
edut
ext
eenl
ar
ef
or
mul
ant
.
 Obj
ect
i
f
sdel
’
ensei
gnant: 1) faire manipuler les structures (entraînement grammatical en situation de
commentaire de textes) ; 2) expliquer le sens littéral d'un passage difficile, d'une partie du texte, de
l'ensemble du texte ; 3) introduire d'autres tâches (analyser, interpréter, extrapoler, etc.: cf. cidessous) sur le texte.
 Obj
ect
i
f
sdel
’
él
ève/
ducandi
dat:1)mont
r
erqu’
i
lmaî
t
r
i
sel
esst
r
uct
ur
esdel
al
angue(
exempl
e: passage au style indirect) ;2)mont
r
erqu’
i
la compr
i
sl
e sensl
i
t
t
ér
al; 3) per
met
t
r
ed’
enchaî
nerensui
t
e
avecd’
aut
r
estâches.
 Exemples de consignes correspondantes : [À propos de « –Pas de courrier ? » dans un dialogue de
base] 1) « Qu’
est
-ce qu’
i
ldemande au f
act
eurt
ousl
esmat
i
ns? » . 2) « Qu’
est
-ce que ça veut dire
que‘
Tousl
esmat
i
ns,i
lt
r
ouvai
tsaboî
t
eàl
et
t
r
esvi
de’? »–3) « Vousvoussouvenezdecequ’
i
lconstate tous les matins ? » [Reformulation possible : « … queper
sonnenel
uiaécr
i
t»]  « Pourquoi estce que personne ne lui écrit ? / Que peut-il en penser ? » ( : enchaînement avec une tâche
d’
i
nt
er
pr
ét
at
i
on)
.
2. Analyser
 Définition : on « explique » le texte par lui-même au moyen d’
une mi
se en r
appor
t ent
r
e eux
d’
él
ément
sdi
f
f
ér
ent
sdut
ext
e.
 Obj
ect
i
fdel
’
ensei
gnant: entraîner chez ses élèves les capacitésd’
anal
yseetdesynt
hèse(
l
asynt
hèse
cor
r
espondantaur
ésul
t
atd’
ensembl
edesanal
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t
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.
 Obj
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unt
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eà
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t
i
rd’
uneseul
eexpl
oi
t
at
i
onr
at
i
onnelle de sa construction interne.
 Exemples de consignes correspondantes15 : « Résumez les étapes de cette anecdote. » « Faites la liste
desdi
f
f
ér
ent
essi
t
uat
i
onsabsur
desquiappar
ai
ssentdanscet
t
ehi
st
oi
r
e,etmont
r
ezqu’
i
lyapr
ogr
ession. »
3. Interpréter
 Définition : on « explique » le texte en faisant appel à des données extratextuelles soit déjà connues
des élèves, soit apportées par le manueloul
’
ensei
gnant
.
 Obj
ect
i
f
sdel
’
ensei
gnant: faire mobiliser par les élèves des connaissances extratextuelles déjà acquises, ou apporter des connaissances extratextuelles au moment où les élèves en ont besoin.
14
La par
aphr
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r
èsmauvai
se pr
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sl
a pr
at
i
quentconst
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,al
or
squ’
i
l
syontét
é
formés pendant tout leur cursus scolaire : « Sehr gutt! », « Very well! » ou « ¡Muy bien !, ont-ils entendu
souventdel
eur
spr
of
esseur
sdecol
l
ègeoudel
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esf
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i
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ef
or
mul
éd’
unebel
l
ephr
ase
unedesi
déesdut
ext
e… Etcesderniers enseignants ont raison : la capacité à paraphraser est une composant
ei
mpor
t
ant
edel
acompét
encedecommuni
cat
i
on (
quand on nes’
estpasf
ai
tcompr
endr
e,on r
eformule ; quand on cherche à comprendre, on se reformule pour soi-même), et elle a même accru son
importance en devenant une composante de la « compétence de médiation » introduite dans le CECR.
15
L’explication de textes se termine généralement par des tâches de synthèse, comme celles-ci, qui sont
des demandes finales d’
anal
yse gl
obal
e. (Elle commence de même par des tâches globales, de compréhension littérale, donnant lieu à paraphrases.)
13
 Obj
ect
i
f
sdel
’
él
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dat:mont
r
erqu’
i
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saucour
sdesesét
udesdel
anguedesconnai
ssances sur la ou les cultures correspondant
es,etqu’
i
lsai
tles mobiliser pour mieux comprendre un
t
ext
eetl
’
expl
i
queràquel
qu’
und’
aut
r
e.
 Exemples de consignes correspondantes : « Relevez dans ce texte toutes les caractéristiques du Romantisme et du Fantastique. » « Montrez en quoi ce texte reflète-t-il les clivages politiques de cette
période ? »
4. Extrapoler
 Définition : on « explique » le texte en explicitant comment et dans quelle mesure ses éléments sont
représentatifs de réalités extratextuelles.
 Obj
ect
i
fdel
’
ensei
gnant: utiliser le texte comme support d’
ensei
gnement et de découverte culturels.
 Obj
ect
i
fdel
’
él
ève/
du candi
dat:mont
r
erqu’
i
lestcapabl
ed'
enr
i
chi
rsesconnai
ssancesetsacompr
éhension de la culture étrangère grâce à la lecture de ce texte.
 Exemples de consignes correspondantes : « Caractérisez la psychologie de chacune de ces trois décennies (60, 70 et 80). » « Montrez comment ces mots sont révélateurs de la géographie et de
l
’
hi
st
oi
r
edupays.»
5. Comparer

Définition : on « explique » le texte en tant que lecteur, en établissant explicitement des correspondances entre des données étrangères extratextuelles interprétées ou extrapolées à partir du texte, et
des données dont on dispose déjà par ailleurs dans la même culture étrangère, dans une autre
culture étrangère, dans sa culture maternelle, dans son expér
i
enceper
sonnel
l
e,
…

Obj
ect
i
fde l
’
ensei
gnant: faire appel aux connaissances et compétences des élèves pour leur faire
mi
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econsci
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éal
i
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’
i
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econsci
ence
de leur propre culture.

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l
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f
i
ci
t
ésdel
acul
t
ur
eét
r
angère.

Exemples de consignes correspondantes : « À partir des documents que vous avez analysés, discutez
en groupe sur les ressemblances ou les différences qui existent entre la façon de fêter le Carnaval à
Nice et en Italie. » « Pourquoi une publicité de ce genre ne serait pas possible chez nous ? »
6. Réagir
 Définition : on « explique » le texte en tant que lecteur, en explicitant ses réactions, impressions, jugements vis-à-vis du texte, du hors-texte correspondant, ou de la manière dont celui-ci est en correspondance avec celui-là ; ces réactions, impressions et jugements peuvent être à la fois subjectifs (les
élèves réagissent en tant que lecteurs) et objectifs (ils se basent sur une connaissance du vécu des
personnages).
 Obj
ect
i
fdel
’
ensei
gnant: faire appel à la subjectivité des élèves en tant que lecteurs réagissant personnellement sur les réalités textuelles ou extratextuelles correspondantes en fonction de leur personnalité, sensibilité, expérience, culture (point de vue externe), mais en même temps en fonction de leur
connaissance de ces mêmesr
éal
i
t
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l
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l
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 Obj
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ér
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éal
i
t
ést
ext
uel
l
esou ext
r
at
extuelles correspondantes parce que ces réalités ont provoqué chez lui des réactions, fait naître des impressions, suscité des réflexions.
 Exemples de consigne correspondante : « En fonction de sa situation, les remarques de ce personnage
vous paraissent-elles mesurées, excessives, passéistes, modernes ? »
7. Transposer
 Définition : on « explique » sa propre lecture du texte en transposant texte et hors-texte correspondant dans son propre référentiel culturel.
 Obj
ect
i
fdel
’
ensei
gnant: motiver la prise de parole des élèves en les faisant parler de réalités qui leur
sont proches.
 Obj
ect
i
fde l
’
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r
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i
la ét
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nt
ér
essé parl
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éal
i
t
ést
ext
uel
l
esou ext
r
at
extuelles correspondantes parce que ces réalités ont provoqué chez lui des réactions directement en liaison avec sa culture ou son expérience personnelle.
14
 Exemples de consignes correspondantes : –La même aventure vous serait arrivée dans votre pays,
comment auriez-vous réagi ? –Avez-vous vécu vous aussi des situations insolites ? Racontez. –
Pourrait-on imaginer une scène semblable dans votre pays ? Pourquoi ?
J
’
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t
et
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outsi
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ementàpar
t
i
rd’
un cl
assementinductif des consignes proposées par des auteurs de manuels sur leurs documents de base. Les exemples sont empruntés à des manuels de français langue étrangère dits « de niveau 2 » et « de niveau 3 » (B1 à
C1, approximativement), mais ils correspondent tout à fait à ceux que l
’
on peutrencontrer
dans des manuels scolaires de second cycle pour les langues étrangères en France. Les contenus,bi
en sûr
,mai
saussil
’
or
gani
sat
i
on et même la méthodologie des explications de textes
littérair
esdi
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f
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’
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r
e16 ; leur seul point commun, ce qui définit
le mieux cette activité danssapl
usgr
andegénér
al
i
t
é,c’
estprécisément l
’
ensembl
edeces différentes tâches attendues des élèves en classe et des candidats au baccalauréat, même si –et
c’
estl
àla di
f
f
i
cul
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r
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ur
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l
e de l
’
expl
i
cat
i
on de t
ext
es– ces différentes tâches vont devoir
être sélectionnées, combinées et articulées différemment en fonction de la spécificité de chaque document.
On notera que les consignes de tâches, ici, ne prennent pas généralement la forme de questions, mais de demandesà l
’
i
mpér
at
i
fou à l
’
i
nf
i
ni
t
i
f
. On peut certes donner à la plupart des
consignesde t
âchesl
’
une ou l
’
aut
r
ef
or
me : « Caractérisez la psychologie de chacune de ces
trois décennies » / « Quelle est la psychologie de ces trois décennies ? » ; « Montrez comment
cesmot
ssontr
évél
at
eur
sdel
agéogr
aphi
eetdel
’
hi
st
oi
r
edupays./Commentcesmot
ssont
ils révélateurs… ? », mais le choix entre l
’
uneetl
’
aut
r
ef
or
mul
at
i
onn’
estpasneutre du tout. La
question produit en effet une situation de commentaire oral immédiat en enseignement collectif mais où les réponses attendues sont individuelles ; l
’
i
mpér
at
i
fetl
’
i
nf
i
ni
t
if créent au contraire
une situation de communication qualitativement différente où un temps est laissé aux élèves
pourr
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i
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r
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ldemandé,cequiouvr
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l
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’
act
i
vi
t
é(
pr
i
se denot
esi
nt
er
médi
ai
r
es,
par exemple) et à la fin (remise du travail sous forme écrite). La prise en compte effective de
la perspective actionnelle dans le traitement des textes littéraires (et autres) s’
obser
ver
adans
les salles de classes et les manuels lorsque les consignes ne se donneront plus systématiquement
,comme c’
estl
e caspar exemple j
usqu’
à pr
ésenten espagnol
, sous la forme de questions, qui sont des demandes de dire,mai
ssousl
af
or
me d’
i
nf
i
ni
t
i
f
sou d’
i
mpér
at
i
f
s,qui sont
des demandes de faire.17 Et aussi lorsque certains textes ne donneront plus lieu à réalisation
de la totalité des tâches possibles, mais seulement de cer
t
ai
nesd’
ent
r
e el
l
es,celles qui leur
seront le plus adaptées et/ou celles qui seront le plus utiles au projet global dans lequel
s’
i
nscr
i
r
al
’
act
i
vi
t
ésurl
et
ext
e.
La typologie del
’« analyse actionnelle des textes littéraires » proposée ci-dessus devrait permettre en effet non seulement d’
expl
i
ci
t
erl
esobj
ect
i
f
sdel
’
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i
cat
i
on det
ext
esen t
ermes de
compétences (« être capable de paraphraser », « êt
r
e capabl
e d’
anal
yser», etc.) et donc de
concevoir pour cette activité aussi des échelles de compétences semblables à celles proposées
dans le CECR18 ; cette typologie devrait permettre aussi d’
i
maginer une grande variété
d’
exer
ci
cesvisant à faire prendre conscience aux élèves de chacune de ces tâches, et de les
16
D’
où l
’
i
ndi
gence,en génér
al
,de l
a «fiche méthodologique » unique proposée dans certains manuels
pourgui
derl
’
act
i
vi
t
édesél
èvessur tout type de texte, sans parler des effets pervers que provoque son
applicat
i
onmécani
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ext
esquines’
ypr
êt
entpas.
17
L’
expér
i
ence hi
st
or
i
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ndr
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i
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act
el
ast
r
uct
ur
edel
’
édi
f
i
ce(impératifs dans les manuels systématiquement transformés en questions
en classe, par exemple). Bel exemple de récupération de ce type, celui réalisé dans ce manueld’
espagnol
qui proposait il y a quelques années, dans la partie d’
aut
oéval
uat
i
ondescompét
encesàl
af
i
nd’
uneunité : « Maintenant je suis capable de… conj
uguerl
ever
beser àl
’
i
ndi
cat
i
fpr
ésent
. » : il y a dans cet énoncé une confusion, consciente ou inconsciente, entre une compétence et une connaissance, ou du moins
entre une compétence langagière et une compétence méthodologique.
18
Ces grilles devront intégrer pour cela des descripteurs précisant le degré de difficulté et le degré de
réussite, comme dans les échelles de compétence du CECR, et se différencier sans doute, au moins en
partie, selon les types des textes : narratifs, argumentatifs, descriptifs, informatifs, explicatifs et injonctifs, par exemple, pour reprendre une typologi
equej
’
avai
sut
i
l
i
sée,dansl
emanueld’
espagnol¿Qué pasa? Terminales (Nathan, 1995), pour une fiche méthodologique intitulée « Prendre en compte la typologie
des textes » (p. 172).
15
entraîner à leur utilisation de manière fractionnée et progressive, comme le veut tout bon entraînement sportif : l
’
un des ef
f
et
s per
ver
s des explications de textes « complètes » lorsqu’
el
l
essontr
epr
oduit
esàl
’
i
dent
i
que,enef
f
et
,estqu’
el
l
essontde ce fait complexes et que la
plupart des élèves ne parviennent pas à s’
appr
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i
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obal
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’
ensembl
edescompétences
en jeu, quel que soi
tl
enombr
ed’
annéesd’
ent
r
aî
nement
.
Voici quelques exemples concrets de ces exercices19 :
DISPOSITIF
(CONDITION DE RÉALISATION DES TÂCHES)
CONSIGNES
(INDICATION DES TÂCHES À RÉALISER)
1. On reproduit dans une colonne un texte avec
des parties surlignées et des flèches renvoyant à
des cases vides dans une seconde colonne, où est
seulement précisé pour chacune le type de tâche à
réaliser (« paraphraser », « analyser », etc.).
Rédigez dans les cases vides les phrases de commentaire attendues.
2. On reproduit dans deux colonnes en vis-à-vis le
texte et son commentaire écrit.20
(Différentes consignes possibles : i
lne s’
agi
tpas
ci-dessous d’
unensemble cohérent ordonné)
–Identifiez, pour chaque phrase de commentaire,
le type de la tâche réalisée sur le texte (paraphr
ase,anal
yse,
…)
–Remettez les phrases de commentaire dans leur
ordre logique.
–Éliminez les phrases de commentaire erronées/superflues (cf. le « j
eudel
’
i
nt
r
us»).
–Avec des flèches et des surlignés, indiquez sur
quelle(s) partie(s) du texte se base telle ou telle
phrase de commentaire.
3. On reproduit seulement le commentaire écrit du
texte.
4. On entoure une partie de texte, ou on reproduit
un extrait très court de texte.
5. On reproduit dans une colonne un texte, et dans
l
’
autre on fournit des informations extratextuelles,
par exemple sur le fait historique mis en scène, ou
des caractéristiques de la culture sociale de
l
’
aut
eur
.
6. On entoure une partie de texte, ou on reproduit
un extrait très court de texte.
7. On entoure une partie de texte, ou on reproduit
un extrait très court de texte. On donne en face
des caractéristiques de la culture ou de
l
’
expér
i
enceper
sonnel
l
edul
ecteur.
Etc.
Reconstituez le texte à partir de son commentaire.
Sur cet extrait, produi
sez1,2,
… phr
asesde par
aphr
ase,oud’
anal
yse,et
c.
Reliez des parties du texte avec des parties
d’
i
nf
or
mat
i
on, et pr
odui
sez l
es phrases
d’
interprétation /d’
ext
r
apol
ation correspondantes.
Réagissez subjectivement à cette partie du texte
en manifestant successivement vis-à-vis de
l
’
aut
eur/desper
sonnages:
a) votre surprise
b) votre enthousiasme
c) votre indignation
d)…
Proposez les phrases de transposition correspondantes.
Etc.
19
J
’
avai
si
nt
r
odui
tun cer
t
ai
n nombr
edecesexer
ci
ces,quej
’
avai
sappelés « ejercicios metodológicos »,
dans le ¿Qué pasa? Terminales.
20
J
en’
ent
r
epasi
cidansl
adi
st
i
nct
i
onsouventf
ai
t
eent
r
el
’
expl
i
cat
i
onor
al
e,génér
al
ementl
inéaire, et le
commentaire écrit, ou « composé », qui ne suit pas (ou du moins pas systématiquement) la linéarité du
texte. Dans les exercices proposés ici, le texte écrit devrait être très proche de la forme orale de
l
’
expl
i
cat
i
on de t
ext
es,pui
sque c’
està cet
t
e act
i
vi
t
é qu’
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opose d’
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r
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èves.Mai
s on
pour
r
ai
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magi
ner
,dansdescl
assesdel
i
t
t
ér
ai
r
es,d’
i
nt
égr
erdanscesexer
ci
cesdesalternances entre les
deux formes, voire de passagedel
’
uneàl
’
aut
r
ef
or
me.
16
Conclusion
Cet
t
eappr
oche del
’
expl
i
cat
i
on det
ext
esparl
est
âches(
scol
ai
r
es)estt
r
èsdi
f
f
ér
ent
e de celle
parl
’
act
i
on (
soci
al
e)
,mai
snon seul
ementtâches et actions peuvent légitimement toutes deux
alterner dans les classes, elles peuvent aussi y être combinées sur un même document ou à
l
’
i
nt
ér
i
eurd’
unmêmepr
oj
et
.
L’
ensei
gnantguat
émal
t
èque,pour préparer la traduction littéraire en espagnol des poèmes
français choisis par ses élèves, etl
’
ensei
gnantf
r
ançai
s,pour le choix et le montage des illust
r
at
i
onsd’
une nouvel
l
e,pourront bien sûr proposer à leurs élèves une explication de ces documents qui leur permette d’
abor
d de bien comprendre (je reprends dansl
’
or
dr
eles objectifs
des différentes tâches proposées dans mon « analyse actionnelle ») le sens de ces documents,
leur cohésion et leur progression internes, leurs implicites et connotations, leur représentativité sociale, enfin lesr
éact
i
onsqu’
i
l
speuventpr
ovoquer et leséchosqu’
i
l
speuventévei
l
l
erchez
des lecteurs de leur pays, mais la « logique projet » voudraitqu’
i
l
snepr
oposent qu’
uneexplication partielle limitée aux seules tâches indispensables par rapport au projet en cours.
C’
estde toutes manières àl
’
ensei
gnantd’
endéci
deren f
onct
i
ondesesobj
ectifs et de ses élèves,demêmequ’
i
ll
uir
evi
entdevoi
rsi/quand/comment il introduit des outils de critique textuelle accessibles aux élèves (étude du lexique, des marqueurs de cohésion et de progression
textuelles, des marques énonciatives,
…)
, dans la mesure où ces outils per
met
t
r
ai
entd’
étayer
(préparation, soutien, reprise) la réalisation de ces tâches et leur autoévaluation.
Cet « outillage » devrait s’
ut
i
l
i
sernon seulement pour l
apar
aphr
aseetl
’
anal
ysedu t
ext
e(
t
âches pour lesquelles elles sont le plus adaptées, sans doute, et le plus souvent utilisées), mais
aussi pour les tâches elles-mêmes d’
explication réalisées par les élèves, ce qui me paraît tout
aussi intéressant mais qui est généralement négligé : les outils de la grammaire énonciative
peuvent ai
nsiêt
r
eut
i
l
i
séspourét
ayerl
’
expr
essi
on del
asubj
ect
i
vi
t
é,f
or
t
ementsol
l
i
ci
t
éedans
la tâche orale « réagir » (voir exercice n° 6 dans le tableau ci-dessus) ; les outils de la grammaire textuelle pour étayer l
’
ar
gument
at
i
on, particulièrement mobilisée par exemple dans les
reprises écrites centrées sur la tâche « comparer » ou surl
’
ar
t
i
cul
at
i
on dest
âches«interpréter-extrapoler » ; toutes les explications de textes, enfin, qu’
el
l
essoi
entor
al
esou écr
i
t
es,font
massivement appel au discours rapporté (pensons par exemple aux productions attendues des
él
èves à l
’
exer
ci
ce n°6 dans le tableau ci-dessus). Dans les niveaux de compétences
d’
expl
i
cat
i
ondet
ext
esauxquel
sj
ef
ai
sai
sal
l
usi
onpl
ushaut
,l
esdescripteurs devraient intégrer
ces compétences linguistiques correspondantes, qui sont celles de la production langagière des
élèves sur les textes.
J
’
aipr
oposé,dansmon ar
t
i
cl
e de 2000, que la préparation des explications de textes ne soit
pl
usf
ai
t
esparl
’
ensei
gnantavantsoncour
s,mai
sparsesél
èveseux-mêmes pendant le cours,
seul
e mani
èr
e poureux d’
acquér
i
rune véritable autonomie dans cette activité. Les exercices
d’
ent
r
aînement aux tâches scolaires sur les textes littéraires que je propose ici pourraient venir
appuyer cette préparation autonome.
Etpui
squel
adi
dact
i
queestaussi
,commeon l
’
avuj’
espèr
e,uneaf
f
ai
r
ed’
i
magi
nat
i
on–autre
manière, et très efficace, de sedépl
acer
… –, rêvons un peu pour terminer. Comment faire en
sor
t
equ’
i
lnes’
agi
ssepasseul
ementdepréparation, mais qu’
i
lyai
tpr
éal
abl
ementunevéritable conception (pour reprendre la distinction proposée plus haut) prise en charge par les élèves eux-mêmes ? C’
est
-à-dire, concrètement, comment faire en sorte que les élèves aient à se
demander d’
abor
d: « Pourquoi allons-nous maintenant faire une explication de textes ? Quel
texte allons-nous choisir, et sur quels critères ? Quelles tâches allons réaliser sur ce texte, et
pourquoi ? Quels moyens allons-nous nous donner pour le faire ? Combien de temps nous
donnons-nous ? Qui se charge de quoi ? », etc. Autrement dit, imaginons comment faire pour
que cette activité fatalement très directive, normée et ennuyeuse l
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eestimposée, collective et habituelle, se fasse plus rarement mais en tant que mini-projet autonome, original et
mobilisateur.
On aura alors pleinement r
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on traditionnelle avec la nouvelle perspective actionnelle, en parvenant à faire en sorte que le dire scolaire sur le texte littéraire soit, dans
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espacemême de la classe, un véritable faire social.
Tallinn, octobre 2006
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