Les EU dans les années 20 : La prospérité et ses limites

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Les EU dans les années 20 : La prospérité et ses limites
Cycle préparatoire au DAEU – Cned Toulouse - Cours d’Histoire N°14 – page 1/4
Les EU dans les années 20 : La prospérité et
ses limites
Introduction :
Les États-Unis, au lendemain de la guerre, apparaissent comme la première puissance
économique mondiale. Leur intervention dans la première guerre mondiale au côté de
l’Entente et le rôle joué par le président Wilson dans la recherche d’une paix durable auraient
pu accroître leur poids dans les relations internationales. Mais la crise de reconversion de
1919-1921 et la tradition américaine de repli sur soi, entraînent la défaite électorale des
démocrates aux élections présidentielles et l’installation au pouvoir des républicains pour 12
ans. Le pays connaît alors une période dorée appelée «prosperity » qui se traduit par une
croissance économique sans précédent. Cependant cette dernière demeure sélective et ne
profite pas à tous les américains.
1 L’Amérique et la prospérité
1.1 Le grand vainqueur de la guerre
Les États-Unis ont participé tardivement à la guerre et n’ont pas eu de batailles sur leur
territoire. Néanmoins, ils sortent transformés du conflit : ils se sont enrichis (le PNB est
passé de 40 milliards de dollars en 1914 à 79 milliards en 1919) et ils se détournent de
l’Europe, reprochant au président Wilson d’entraîner à brève échéance les États-Unis dans de
multiples interventions qui découleront des décisions de la SDN. Le Sénat américain refuse
d’ailleurs de ratifier le traité de Versailles. Aux élections de 1919, les démocrates (la gauche
américaine) sont battus aux élections présidentielles et les républicains (la droite
américaine) sont élus jusqu’en 1932.
1.2 Pourquoi la prospérité ?
Les États-Unis ont été l’arsenal des démocraties, ce qui leur a permis de doubler leur
production d’acier et de quadrupler leur flotte marchande. Ils sont devenus la première
puissance industrielle mondiale. Ils ont développé leur commerce avec le reste du continent
américain. Ils disposent de presque la moitié du stock d’or mondial et sont les créanciers de
l’Europe. Les républicains au pouvoir se mettent au service de la croissance économique.
Les trois républicains qui se succèdent, Harding, Coolidge et Hoover, pensent tous que « la
grande affaire de l’Amérique, ce sont les affaires». Ils défendent le « laisser-faire » en
matière économique, l’initiative individuelle et l’optimisme que justifie la croissance du
PNB qui atteint 104 milliards en 1929 et une croissance du revenu par tête de 20 % en 10
ans.
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1.3 Quels sont les aspects de la prospérité ?
- L’industrie connaît un essor remarquable et prend des caractères originaux. La fabrication
des automobiles, des postes de radio et de téléphone, l’industrie cinématographique et
l’aéronautique sont en plein essor. La productivité est à l’ordre du jour grâce au travail à la
chaîne mis au point par l’ingénieur Frederick W. Taylor. La productivité d’un Américain est
alors presque le triple de celle d’un Allemand, le quadruple d’un Français et trente fois
supérieure à celle d’un Chinois.
- Les États-Unis entrent alors dans l’ère de la production de masse. Celle-ci favorise la
concentratio n industrielle sous forme de trusts, comme General Motors Corporation qui
produit un tiers des automobiles, et U.S Steel un quart de l’acier américain. L’industrie
automobile illustre cet essor industriel. 1,5 million de véhicules sont produits en 1921 ; 4,7
millions en 1929. À la fin des années vingt, un Américain sur 6 possède une voiture, un
Français sur 44, un Allemand sur 196, un Chinois sur 29 000. En effet, la consommation de
masse accompagne la production de masse. Cette démocratisation est liée à la standardisation
qui permet de baisser les coûts, mais aussi à l’essor de la publicité et du crédit. La société de
consommation se traduit par l’augmentation du confort des maisons : réfrigérateurs,
téléphone, machines à laver, cuisinières électriques se répandent en zone urbaine où
l’électricité a été installée partout.
- Par contre, certains secteurs ont une croissance faible ou stagnent comme les industries
textiles et les constructions navales. Le chômage n’a pas disparu : 1,5 million en 1926 et
certaines régions sont exclues de la prospérité comme les zones textiles de NouvelleAngleterre ou certains secteurs agricoles du Vieux Sud. Les salaires connaissent de fortes
disparités : 630 dollars pour 60 heures hebdomadaires en Géorgie mais 1600 dollars dans
l’automobile pour 48 heures hebdomadaires. En outre, l’agriculture souffre de surproduction,
liée en partie à la baisse des importations européennes, qui provoque une baisse des cours du
blé, du coton et du maïs. Le monde agricole est donc particulièreme nt insatisfait d’autant
plus que le revenu moyen d’un fermier est nettement inférieur à celui d’un ouvrier non
qualifié.
-La spéculation boursière est encouragée par l’optimisme ambiant. Les cours, constamment
à la hausse, encouragent les placements en bourse, pour une rentabilité immédiate.
2 La société entre libération des mœurs et réactions
puritaines
2.1 Une Amérique ouverte aux changements
2.1.1 L’émancipation des femmes
Dans les années vingt, les Américains sont devenus en majorité des citadins, avec une
progression plus nette pour les villes moyennes, les plus grandes villes perdant des habitants
au profit des banlieues. Cette urbanisation s’accompagne d’une libéralisation des mœurs, en
particulier pour les femmes. Les femmes qui ont les cheveux courts, les jupes moins longues
et exercent de plus en plus une activité professionnelle, ont obtenu le droit de vote en 1920,
24 ans avant les Françaises. Les plus à la mode dansent le charleston, fument, boivent des
cocktails.
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2.1.2 la démocratisation des pratiques culturelles
Les pratiques culturelles de masse se développent. En 1929, un ménage sur trois possède un
poste de radio qui permet d’écouter de la musique classique, des reportages, du jazz qui
devient une musique populaire... Les Américains lisent de plus en plus de journaux et de
revues, mais vont aussi au cinéma qui connaît un véritable engouement avec 23 000 salles en
1930. Hollywood domine l’industrie du cinéma avec 5 grands studios : la Metro-GoldwynMayer, la Warner, la Paramount, la Fox et RKO.
2.2 Une Amérique plus inquiétante
2.2.1 Les lois sur l’immigration
Mais cette Amérique prospère se referme sur elle-même. Les lois de 1921 et 1924 limitent
le nombre d’immigrants autorisés à s’installer aux États-Unis. Elles s’appliquent en particulier
à l’immigration des Slaves et des Italiens jugée plus difficile à assimiler que celle des
Scandinaves et des Anglo-Saxons. Les entrées annuelles tombent de 800 000 à 310 000, puis
150 000 à partir de 1929.
2.2.2 La peur du communisme
La méfiance de l’étranger se double de la « peur des rouges », c’est-à-dire des communistes,
des socialistes et des anarchistes qui sont presque toujours des étrangers. La majorité des
Américains pense que c’est eux qui sont à l’origine de la vague de grèves de 1919-1920 liée
aux revendications ouvrières en faveur de l’augmentation des salaires et de l’amélioration des
conditions de travail. Des États adoptent une législation spéciale qui interdit l’utilisation du
drapeau rouge et l’adhésion à des organisations qui réclament le renversement des institutions.
Le secrétaire d’État à la justice (ministre) A. Mitchel Palmer utilise l’explosion de bombes en
1919, qui font des blessés et des morts, pour accuser les anarchistes et arrêter 4000 personnes
(étrangers et Américains) et en expulser plus de 500. C’est dans ce contexte que sont arrêtés
des Italiens, Sacco et Vanzetti, accusés d’avoir assassiné deux hommes pour s’emparer de
l’argent qu’ils transportaient. Sans que leur culpabilité soit démontrée et malgré les
protestations aux États-Unis et à l’étranger, ils sont exécutés le 23 août 1927.
2.2.3 La prohibition
À cette peur des idées révolutionnaires, s’ajoute une réaction puritaine dont la manifestation
la plus connue est la loi de 1919 sur la prohibition de la fabrication et la vente de l’alcool.
Mais la loi est très difficile à appliquer et un marché noir particulièrement fructueux se
développe, pour le plus grand profit des gangsters comme Al Capone. Finalement la loi est
abolie en 1933.
2.2.4 Le poids du fondamentalisme religieux
Les protestants conservateurs, opposés à l’Amérique des mœurs libérées des années vingt,
montrent leur hostilité aux changements. Ainsi, dans une petite ville du Tennessee, un procès
est fait à un professeur de sciences qui a enseigné à ses élèves que l’homme descend du singe,
que l’évolution des espèces est une donnée scientifique et donc que la création du monde
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racontée par la Bible est une légende. Il gagne finalement son procès en appel, mais cette
histoire montre le poids du fondamentalisme religieux qui fait de l’interprétation littérale de
la Bible la source de toute vérité.
2.2.5 La naissance d’une secte raciste
Plus inquiétante est la naissance du Ku Klux Klan, fondé en 1915 par W. J. Simmons. Cette
secte d’extrême droite, qui rassemble 2 à 3 millions d’Américains en 1926, prône la haine des
Noirs, des juifs, des catholiques, des communistes et des étrangers. Ses rassemblements
débouchent souvent sur des manifestations racistes et des lynchages. Certains journaux du
Nord en particulier protestent. Mais, ce qui nuit le plus au KKK, ce sont les scandales
financiers qui l’éclaboussent et qui montrent que ceux qui se font les chantres de la morale
puritaine ont détourné des fonds pour leur enrichissement personnel.
C’est donc à un repli de la société américaine sur elle- même auquel l’on assiste. Les WASP
(White Anglo-Saxon Protestants) veulent préserver le caractère anglosaxon du pays. Ils sont
pour un retour à l’isolationnisme et au protectionnisme douanier, aux quotas à
l’immigration pour empêcher l’arrivée d’ouvriers étrangers accusés d’accepter des salaires
très bas et de propager le bolchevisme. Dans l’Amérique profonde, le maintien des traditions
religieuses et la fidélité à la Bible s’opposent à la libéralisation des mœurs urbaines.
Conclusion :
L’Amérique connaît une prospérité économique sans précédent au lendemain de la première
guerre mondiale. L’optimisme est de rigueur dans un pays « qui ne connaîtra plus jamais la
crise » comme l’annonce certains hommes politiques. Pourtant les premiers signes
annonciateurs d’un essoufflement de l’économie apparaissent dès le milieu des années 20.
Cette Amérique insouciante se prépare à vivre l’une des périodes les plus difficiles de sa jeune
histoire : la crise de 1929.
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