Note transfert de personnel dans le cadre de l

Transcription

Note transfert de personnel dans le cadre de l
Evolution statutaire des communautés
et devenir des personnels
◆ Rappels juridiques ◆
Novembre 2009
Entre le 1er janvier 2001 et le 31 décembre 2006, les effectifs des communautés et des syndicats ont
augmenté de plus de 50% et leurs dépenses de personnel de 10,6% entre 2007 et 2008, pour atteindre
1
4 782 millions d’euros en 2008 . Dans ce contexte, nombre d’entre elles tentent de rationaliser ce
poste, en restructurant leurs services.
L’évolution rapide de l’intercommunalité de projet a entrainé une mutation de la gestion des
ressources humaines. La modification régulière du périmètre des communautés, la disparition
progressive des syndicats ainsi que l’évolution du choix du mode de gestion des services publics,
entraînent de nombreux et réguliers transferts de personnel.
La présente note a pour objet de rappeler aux décideurs des communautés en matière de ressources
humaines, l’ensemble des possibilités d’adaptation des services qui s’offrent à eux, face à l’évolution
de leur structure.
Floriane Boulay
Service juridique de l’AdCF
1
Rapport public annuel de la Cour des Comptes 2009, p.245
1
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◆ Sommaire ◆
Première partie : Les conséquences de l’évolution de la communauté sur le personnel
I. En cas d’évolution du périmètre de la communauté
A. L’hypothèse de l’élargissement du périmètre ou de la fusion de communautés
B. L’hypothèse du retrait de communes
II. Les conséquences de la suppression d’un syndicat sur le personnel communautaire
Deuxième partie : L’impact du choix du mode de gestion d’un service public sur le
personnel
I. La reprise en régie d’un service public
A. L’obligation de reprise du personnel du délégataire ou du prestataire
1. Un revirement de jurisprudence relativement récent pour les SPA
a. La position novatrice de la CJCE
b. L’adaptation de la jurisprudence nationale
2. Une application ancienne pour les SPIC
B. La répartition du contentieux entre les différentes juridictions
II. Contractualisation et reprise de personnel
A Lors de la première externalisation du service public
B. En cas de renouvellement d’un contrat
Annexe : Procédure à suivre en cas d’application de l’article L1224-3 du Code du travail
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◆ Les conséquences de l’évolution de la communauté sur le personnel ◆
◆
I. En cas d’évolution du périmètre de la communauté
L’évolution du périmètre des communautés a un effet majeur sur la gestion des ressources humaines.
Les agents devront être intégrés ou réintégrés dans un nouveau service, nécessitant par la même, le
respect d’une procédure relativement stricte.
A. L’hypothèse de l’élargissement du périmètre ou de la fusion de communautés
S’agissant des fusions intercommunautaires, l’article L. 5211-41-3 III alinéa 9 du CGCT prévoit que
« l’ensemble des personnels des établissements publics de coopération intercommunale fusionnés est
réputé relever de l’établissement public issu de la fusion dans les conditions de statuts et d’emploi qui
sont les siennes ». En outre, « Les agents conservent, s’ils y ont intérêt, le bénéfice du régime
indemnitaire qui leur était applicable ainsi que, à titre individuel, les avantages acquis en application
du 3ème alinéa de l’article 111 de la loi n°84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires
relatives à la fonction publique territoriale ».
En cas d’élargissement des périmètres intercommunaux, aucun article n’est consacré aux modalités de
transfert du personnel. Selon la doctrine et la jurisprudence, il convient d’appliquer dans ce cas, les
dispositions de l’article L. 5211-4-1 I du même code relatives au transfert de compétences à un
établissement public de coopération intercommunale.
Article L5211-4-1 I du CGCT :
Le transfert de compétences d'une commune à un établissement public de coopération intercommunale
entraîne le transfert du service ou de la partie de service chargé de sa mise en œuvre.
Les fonctionnaires territoriaux et agents territoriaux non titulaires qui remplissent en totalité leurs
fonctions dans un service ou une partie de service transféré en application de l'alinéa précédent sont
transférés dans l'établissement public de coopération intercommunale. Ils relèvent de cet
établissement dans les conditions de statut et d'emploi qui sont les leurs.
Les modalités du transfert prévu aux alinéas précédents font l'objet d'une décision conjointe de la
commune et de l'établissement public de coopération intercommunale, prise respectivement après avis
du comité technique paritaire compétent pour la commune et, s'il existe, du comité technique paritaire
compétent pour l'établissement public.
Les questions relatives à la situation des fonctionnaires territoriaux exerçant pour partie seulement
dans un service ou une partie de service transféré sont réglées par convention entre les communes et
l'établissement public de coopération intercommunale après avis des commissions administratives
paritaires concernées, dans le respect des conditions de statut et d'emploi fixées par la loi n° 84-53 du
26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale.
Les agents transférés en vertu des alinéas précédents conservent, s'ils y ont intérêt, le bénéfice du
régime indemnitaire qui leur était applicable.
Il en est de même lorsqu'à l'inverse, par suite de modifications des statuts de la communauté, des
personnels de celle-ci sont transférés à des communes.
Le principe est donc un transfert obligatoire et automatique du personnel à compter de la date de
signature de l’arrêté d’extension du périmètre des communautés, par le représentant de l’Etat.
Néanmoins, le juge administratif a accepté que la procédure de transfert du personnel soit mise en
œuvre en aval de cet arrêté2. En l’espèce, le Conseil d’Etat a considéré « qu'il ne résulte pas de ces
dispositions (article L5211-4-1) que la décision conjointe de la commune et de l'établissement public
2
CE, 10 octobre 2003, Commune des Angles, req. n°250116
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de coopération intercommunale concernant les modalités du transfert de plein droit des personnels
nécessaires à l'exercice des compétences transférées, d'une part, ou la consultation des comités
techniques paritaires concernés exigée avant l'intervention de cette décision conjointe, d'autre part,
doivent nécessairement intervenir préalablement à l'entrée en vigueur de l'arrêté étendant le
périmètre de la communauté d'agglomération ; que par suite, contrairement à ce que soutient la
commune requérante, l'extension de la COGA aux communes des Angles et de Rochefort-du-Gard a
pu être légalement prononcée avant qu'une telle décision ait été prise et que les comités techniques
paritaires concernés aient formulé leur avis ».
Dans ce cas, les agents concernés sont placés sous l’autorité exclusive du président de la communauté.
Le caractère obligatoire et automatique du transfert du personnel doit tout de même être nuancé en
fonction des activités réelles de l’agent :
Dispositif applicable pour les agents communaux
dont les fonctions ont trait exclusivement aux
nouvelles compétences de la communauté
Dispositif applicable pour les agents communaux
dont les fonctions ont trait partiellement aux
nouvelles compétences de la communauté
- agents concernés : fonctionnaires, contractuels
de droit public et de droit privé (sous réserve du
transfert de la convention conclue pour pouvoir
signer ce type de contrat aidé)
- avis du CTP de la commune concernée
- agents concernés : fonctionnaires territoriaux
(stagiaires et titulaires). Dans le silence des
textes, on peut penser que les agents contractuels
pourront être affectés sur d’autres services
communaux ou recrutés a posteriori par la
communauté.
- avis du CTP de la communauté
- demande écrite de l’agent
- décision conjointe de transfert de la commune - avis de la CAP de la commune concernée
et de la communauté (elle doit être renouvelée
pour chaque agent)
- avis de la CAP de la communauté
- l’agent conserve son régime indemnitaire - convention entre la commune et la communauté
antérieur s’il y a intérêt (si l’accord de l’agent
n’est pas obligatoire, il semble être recommandé - l’agent est muté (et éventuellement remis à
afin d’éviter tout conflit)
disposition pour le reste de son temps de travail),
détaché ou bien mis à la disposition de la
communauté, dans le cadre de la loi n°84-53 du
26 janvier 1984
- l’agent conserve son régime indemnitaire
antérieur s’il y a intérêt (si l’accord de l’agent
n’est pas obligatoire, il semble être recommandé
afin d’éviter tout conflit)
Afin de déterminer si un agent est concerné ou non, il ne convient donc pas de vérifier que son service
de rattachement relève dorénavant de la compétence de la communauté, mais de regarder si
l’ensemble des missions de l’agent relève ou non de la compétence de cette dernière : cette analyse
devra être renouvelée pour chaque agent.
Si la procédure peut donc sembler claire en cas d’adhésion d’une nouvelle commune ou de fusion de
communautés, en cas de retrait d’un membre d’une communauté, une réponse ministérielle a du venir
éclairer le débat.
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B. L’hypothèse du retrait de communes
L’article L. 5211-25-1 du CGCT régit la répartition des biens meubles et immeubles, l’exécution des
contrats et la dette contractée, entre la communauté et la commune souhaitant la quitter. L’absence de
précisions au sein de cet article sur le personnel a donné lieu à un débat entre l’application du droit
commun de la fonction publique territoriale (l’ensemble du personnel continu à relever de la
communauté, sous réserve de mutations, de mises à disposition ou de détachements classiques) et la
possibilité pour les élus de conclure une convention de répartition du personnel (application du
principe du parallélisme des formes).
Selon une première réponse de 20073, le ministère a affirmé « qu'il s'agisse de communautés de
communes ou de communautés d'agglomération, les conditions de liquidations de l'EPCI sont
précisées dans l'arrêté ou le décret de dissolution, et la répartition des personnels transférés de
l'EPCI aux communes doit être soumise à l'avis des commissions administratives paritaires
concernées ». Une application a contrario de l’article L. 5211-4-1 du CGCT étudié précédemment,
semblait donc être favorisée. Puis, dans une seconde réponse du 19 février 2009, le ministère a
clairement confirmé cette position.
Réponse du Secrétariat d’Etat à l’intérieur et aux collectivités territoriales, publiée au JO du
Sénat le 19 février 2009, à la question écrite n°05649, du Sénateur Hugues Portelli
Les modalités de retrait d'une commune d'un établissement public de coopération intercommunale
(EPCI) sont fixées par l'article L. 5211-19 du code général des collectivités territoriales. La loi ne
prévoit pas d'obligation de réintégration dans les services de la commune des personnels transférés de
la commune à l'EPCI en application de l'article L. 5211-4-1. Néanmoins, il convient de signaler que
les modalités de retrait d'une commune d'un EPCI prévoient la nécessité du « consentement de
l'organe délibérant de l'établissement » et que le retrait est également subordonné à « l'accord des
conseils municipaux exprimé dans les conditions de majorité requises pour la création de
l'établissement ». Dès lors, les conditions d'emploi de certains personnels de l'EPCI, qu'ils soient
transférés de la commune qui envisage ultérieurement son retrait ou qu'il s'agisse d'agents recrutés
par l'EPCI avant la demande de retrait de la commune, peuvent faire l'objet d'une discussion entre,
d'une part, la commune envisageant son retrait et, d'autre part, l'EPCI et les autres communes
membres. Cette discussion peut ainsi porter, selon l'importance prise par la compétence en question,
sur le transfert d'une partie ou de la totalité des personnels précédemment employés par la commune
ainsi que sur le devenir des agents recrutés avant l'annonce du souhait de retrait par une des
communes membres de l'EPCI. Enfin, dans l'hypothèse où un EPCI conserverait un nombre d'agents
trop important au regard d'une activité plus limitée, il convient de signaler que l'article 97 de la loi
n°84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique
territoriale prévoit les modalités selon lesquelles les collectivités territoriales peuvent être amenées à
supprimer des emplois ainsi que les conditions de reclassement des fonctionnaires territoriaux
occupant ces emplois.
Ainsi, en cas de retrait d’une commune, une décision préalable doit être prise par les conseils
municipaux et le conseil communautaire afin de statuer sur le devenir des agents qui pourraient être en
surnombre par rapport à la réduction d’activité induite par le départ d’une commune. En outre, le
conseil communautaire pourrait également supprimer les emplois qui ne seraient plus opportuns de
conserver.
3
Réponse du Ministère de l’intérieur et de l’aménagement du territoire, publiée au JO du Sénat le 14 mai 2007, à la question
écrite n°22240, du Sénateur Michel Charasse
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II. Les conséquences humaines de la suppression d’un syndicat
Dans l’hypothèse d’un transfert de compétence, le dispositif de transfert de personnel est semblable à
celui décrit dans le IA relatif à l’hypothèse d’une extension du périmètre d’une communauté. Or, la
communauté peut également décider, dans le cadre de la rationalisation de la carte intercommunale, de
reprendre les compétences exercées par un syndicat, entrainant par là même la disparition. Dans ce
cas, le législateur a clairement souhaité répartir le personnel du syndicat qui sera dissout, entre ses
membres.
Article L. 5212-33 du CGCT
« (…) La répartition des personnels concernés entre les communes membres est soumise, pour avis,
aux commissions administratives paritaires compétentes. Elle ne peut donner lieu à un dégagement
des cadres. Les personnels concernés sont nommés dans un emploi de même niveau et en tenant
compte de leurs droits acquis. Les communes attributaires supportent les charges financières
correspondantes ».
L’article L. 5711-1 du même code rend cet article applicable aux syndicats mixtes ouverts. De ce fait,
les communautés membres d’un syndicat mixte ouvert devront participer au partage du personnel, en
cas de dissolution de ce dernier.
Dans ce cas, l’avis préalable de la CAP est obligatoire. En outre, le droit commun de la fonction
publique territoriale s’applique, nécessitant dans certains cas, une réorganisation en profondeur, et
probablement sur le long terme des services de la communauté. En effet :
- aucun cadre ne pourra être dégagé (reclassement ou indemnisation)
- les agents devront être nommés sur des emplois de même niveau, en tenant compte de leurs
droits acquis. A défaut, les fonctionnaires concernés seront placés en surnombre pendant une
durée d’un an, puis placé auprès du CNFPT ou du centre de gestion concerné. Les contractuels
recrutés par le syndicat n’étant pas soumis au Statut, ils pourront être affectés à n’importe quel
service communautaire.
En plus de cette gestion complexe du personnel, la communauté membre devra assumer
financièrement son impossibilité de proposer un emploi de même niveau à ces agents fonctionnaires4.
Enfin, conformément à l’article L. 5211-4-1 précédemment cité, les agents concernés conserveront,
s’ils y ont un intérêt le bénéfice du régime indemnitaire qui leur était applicable.
4
Réponse du Ministère de la fonction publique, publiée au JO de l’Assemblée Nationale le 18 août 2005, à la question écrite
n°64595, du Député Jean-Louis Idiart
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◆ L’impact du choix du mode de gestion
d’un service public sur le personnel ◆
◆
Pour exploiter les différents services publics dont elle a la charge, la communauté a le choix entre
l’assurer en régie directe (I), ou conclure une délégation de service public ou un marché public (II).
Dans les deux cas, la gestion du personnel sera soumise à un régime juridique rigoureux.
I. La reprise en régie d’un service public
Lors du transfert d’une nouvelle compétence ou dans le cadre d’une réorganisation des services
communautaires, la communauté peut décider de reprendre en régie un service public. Dans ce cas,
une directive communautaire de 2001 a rendu obligatoire, sous conditions, la reprise du personnel de
l’ancien gestionnaire par la collectivité. Sont potentiellement concernés par ce texte, les délégations de
services publics passées sous la forme de concession ou d’affermage, ainsi que les marchés publics de
services et certains marchés publics de travaux (aucune obligation pour les marchés relatifs à la simple
construction d’un ouvrage). En outre, les conventions collectives qui auraient pu traiter des modalités
de transfert de personnel ne s’applique pas lorsque l’activité est reprise par la collectivité territoriale,
dans le cadre d’un SPA.
A. L’obligation de reprise du personnel du délégataire ou du prestataire
Dans cette hypothèse, la distinction entre les services publics administratifs (SPA) et les services
publics industriels et commerciaux (SPIC) demeure pertinente. En l’absence de précisions légales, le
juge doit utiliser un faisceau d’indice pour qualifier la nature de chaque service public, même si, sauf
preuve contraire, un service public est toujours qualifié de SPA.
Sont par exemple concernés par cette obligation de reprise du personnel, les contrats relatifs au
nettoyage industriel, à la restauration collective, à la collecte et au traitement des déchets, aux
transports publics, à l’eau et à l’assainissement, etc. …
1. Un revirement de jurisprudence relativement récent pour les SPA
Classiquement, le juge refusait d’appliquer l’article L122-12 al.2 du Code du travail lorsque l’activité
en cause était reprise par une collectivité publique sous la forme d’un SPA5.
Article L. 122-12 du Code du Travail (abrogé par l’ordonnance n°2007-329 du 12 mars 2007 - art.
12 et remplacé par l’article L1224-3 du même code, détaillés ci-après)
« La cessation de l'entreprise, sauf cas de force majeure, ne libère pas l'employeur de l'obligation de
respecter le délai-congé et de verser, s'il y a lieu, l'indemnité prévue à l'article L. 122-9.
S'il survient une modification dans la situation juridique de l'employeur, notamment par succession,
vente, fusion, transformation du fonds, mise en société, tous les contrats de travail en cours au jour de
la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l'entreprise ».
5
Cass. Soc. 10 juillet 1995, Commune de Soulac, pourvoi n°93-46569
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a. La position novatrice de la CJCE
Le revirement de jurisprudence a été enclenché par la Cour de Justice des Communautés Européennes,
en se basant sur la directive n°2001/23/CEE6. Ainsi, lors d’un arrêt du 26 septembre 20007, elle a
affirmé qu’est « applicable en cas de reprise par une commune, personne morale de droit public
agissant dans le cadre des règles spécifiques du droit administratif, des activités de publicité et
d’information sur les services qu’elle offre au public, exercées jusqu’alors, dans l’intérêt de cette
commune, par une association sans but lucratif, personne morale de droit privé, pour autant que
l’entité cédée conserve son identité ».
De ce fait, pour que la communauté ait l’obligation de reprendre le personnel de l’ancien gestionnaire,
en cas de reprise de l’activité sous la forme d’un SPA, la jurisprudence européenne exige que :
- l’ancien gestionnaire ou prestataire exerçait une activité économique organisée de manière
stable, c’est-à-dire qu’elle corresponde à « un ensemble structuré de personnes et d’éléments
permettant l’exercice d’une activité économique qui poursuit un objectif propre »8.
- l’entité cédée a du conserver son identité : cet élément doit être apprécié par le juge
national, selon un faisceau d’indices pouvant comprendre « le type d’entreprise, le transfert ou
non d’élément corporel, la reprise ou non de l’essentiel des effectifs par les nouveaux chefs
d’entreprises, le transfert ou non de la clientèle, le degré de similarité des activités exercées ».
- « l’éventuelle obligation, prescrite par le droit national, de résilier les contrats de travail de
droit privé en cas de transfert d'une activité à une personne morale de droit public (…)
constitue, conformément à l'article 4, paragraphe 2, de la directive 77/187, une modification
substantielle des conditions de travail au détriment du travailleur ». Aussi, l’accord du
salarié est indispensable pour faire muter son contrat de travail. En outre, en cas de refus, la
collectivité devra assumer financièrement les conséquences de cette résiliation qui sera
« considérée comme intervenue du fait de l’employeur ». Il n’en demeure pas moins que,
conformément à la jurisprudence de la CJCE9, la collectivité pourra diminuer la rémunération
du futur agent, aux fins de se conformer aux règles nationales en vigueur relatives aux agents
publics.
b. L’adaptation de la jurisprudence nationale
La Cour de Cassation a adapté, la première, ses décisions à cette évolution10. Le Conseil d’Etat l’a
suivi en 200411, puis a confirmé sa position l’année suivante, en affirmant que l’article L. 122-12 du
Code du travail était bien applicable aux activités reprises sous la forme d’un SPA et qu’il impliquait
pour la collectivité « soit de maintenir le contrat de droit privé des intéressés, soit de leur proposer un
contrat de droit public reprenant les clauses substantielles de leur ancien contrat, dans la mesure où
des dispositions législatives ou réglementaires n’y font pas obstacle »12.
6
7
8
9
Directive n°2001/23/CEE, du Conseil du 12 mars 2001, JOCE n°LO82, du 22 mars 2001
CJCE, 26 septembre 2000, Mayeur contre APIM, req. n°C-175/99
CJCE, 2 décembre 1999, req. n°C-234/98
CJCE, 11 novembre 2004, Mme Delahaye contre Ministre de la fonction publique et de la réforme administrative, req. n°C425-02
10
Cass. 25 juin 2002, AGS de Paris et a contre Hamon, pourvoi n°01-43467, 01-43477, 01-43499 ; Cass. 14 janvier 2003,
Commune de Théoule sur Mer contre Hermann, pourvoi n°01-43676
11
CE, 22 octobre 2004, Département du Nord, req. n°245154
12
CE, 4 avril 2005, Commune de Reichshoffen, req. n°258542, 528543, 258544, 258545
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Afin de se conformer à l’évolution de la jurisprudence et du droit européen, le Code du travail a été
modifié comme suit :
Article L. 1224-3 du Code du travail :
« Lorsque l'activité d'une entité économique employant des salariés de droit privé est, par transfert de
cette entité, reprise par une personne publique dans le cadre d'un service public administratif, il
appartient à cette personne publique de proposer à ces salariés un contrat de droit public, à durée
déterminée ou indéterminée selon la nature du contrat dont ils sont titulaires.
Sauf disposition légale ou conditions générales de rémunération et d'emploi des agents non titulaires
de la personne publique contraires, le contrat qu'elle propose reprend les clauses substantielles du
contrat dont les salariés sont titulaires, en particulier celles qui concernent la rémunération.
En cas de refus des salariés d'accepter les modifications de leur contrat, la personne publique procède
à leur licenciement, dans les conditions prévues par le présent code et par leur contrat ».
Dans ce cadre, les juridictions administratives du second degré ont développé une jurisprudence assez
stricte sur les conséquences de l’application de l’article L. 122-12 du Code du travail. D’abord, l’agent
qui accepte d’être recruté sous la forme d’un contrat à durée déterminé doit être regardé comme ayant
accepté ce type de contrat et ne pourra demander au juge d’annuler la décision de refus du
renouvellement de son contrat13. Ensuite, la durée du préavis de rupture du contrat est fonction de la
durée des contrats conclus avec le nouvel employeur14. Enfin, dans ce même arrêt, la Cour rappelle
que si la collectivité a l’obligation de proposer aux salariés un contrat, celui-ci ne peut néanmoins pas
déroger à la durée des contrats prévus par les dispositions régissant la fonction publique territoriale.
2. Une application ancienne pour les SPIC
Selon une jurisprudence traditionnelle, les agents des SPIC sont soumis à un régime de droit privé.
Dans sa jurisprudence de 2002, la Cour de cassation a accepté d’appliquer aux travailleurs d’un
abattoir public les dispositions de l’article L. 122-12 al. 2 du Code du travail, en indiquant que « les
contrats de travail en cours sont maintenus entre le nouvel employeur et le personnel de l'entreprise
en cas de transfert d'une entité économique autonome conservant son identité, dont l'activité est
poursuivie »15.
Le nouvel article L. 1224-1 du Code du travail reprend ce dispositif, en disposant que « Lorsque
survient une modification dans la situation juridique de l'employeur, notamment par succession, vente,
fusion, transformation du fonds, mise en société de l'entreprise, tous les contrats de travail en cours
au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l'entreprise ».
Ce principe est tout de même nuancé par les deux exceptions que sont le directeur et le comptable
gèrent le SPIC, qui sont soumis au droit de la fonction publique16. Par conséquent, lorsqu’une
communauté reprenait en régie un service public, seuls ces deux personnels ne se voyaient
classiquement pas appliquer l’article L. 122-12 du Code du travail17. Aujourd’hui, on peut supposer
que la jurisprudence appliquerait le même raisonnement qu’au personnel affecté à un SPA.
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CAA Marseille, 26 avril 2005, req. n°00MA00341
CAA Marseille, 22 mars 2005, Ville de Nice, req. n°01MA01289
Cass. Soc. 22 janvier 2002, Commune de Pamiers, pourvoi n°00-40756
CE 8 mars 1957 Jalenques de Labeau, Rec. CE 1957, page 158
CE 14 mai 2003, CCI de Nîmes-Uzès-Bagnol-Le Vignan, req. n°245628
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B. La répartition du contentieux entre les différentes juridictions
Pour les SPIC (hormis le directeur et le comptable de l’ancienne entreprise), la question de la
juridiction compétente n’a jamais posé d’interrogations particulières et relève par nature, du juge
judiciaire. S’agissant du contentieux impliquant le personnel repris par une collectivité pour gérer un
SPA, ainsi que le directeur ou le comptable d’un SPIC, la jurisprudence a du clarifier la situation.
Ainsi, le Tribunal des Conflits a jugé, en 2004, que le juge judiciaire était seul compétent pour statuer
sur un contentieux né du refus de la collectivité de reprendre le personnel qui avait été affecté par
l’entreprise gérant le service public18. De même, dans son arrêt précédemment cité du 4 avril 2005, le
Conseil d’Etat s’est déclaré incompétent pour statuer sur les conséquences du refus du salarié de
l’offre formulée par la collectivité. Cette position n’a fait que confirmer celle du Tribunal des Conflits,
du 29 décembre 200419.
En réalité, ces différentes décisions sous tendent que tant que la collectivité n’a pas pris d’acte
juridique prononçant le recrutement du salarié alors, aucune relation de droit public n’existe entre
ceux-ci. Le Tribunal des Conflits a confirmé ce raisonnement, par un arrêt du 14 février 2005, en
affirmant que « elles (les dispositions de l’article L122-12 du Code du travail) n’ont pas pour effet de
transformer la nature juridique des contrats de droit privé tant que n’a pas été établi entre
l’employeur public et le salarié un rapport de droit public »20.
II. Contractualisation et reprise de personnel
A contrario, la communauté peut décider de réorganiser ses services et de passer une délégation de
services publics ou un marché public. Dans ce cas, quid du personnel lorsque la communauté
externalise pour la première fois l’exercice du service public dont elle a la charge et lors du
renouvellement de ces contrats ?
A Lors de la première externalisation du service public
Selon la CJCE, les agents déjà soumis au régime protecteur de droit public de l’Etat membre ne
peuvent se voir protéger par la directive susvisée du 12 mars 2001. En effet, le statut étant plus
protecteur que la directive, les agents n’y trouveraient aucun avantage. Néanmoins, si le service est
géré par un EPIC ou une SEM, la directive trouverait à s’appliquer21, exception faite du directeur et du
comptable.
Dans notre cas, si une communauté décide de déléguer l’une de ses activités, les fonctionnaires
conserveront leur statut. La communauté aura tout de même l’obligation de supprimer les emplois
afférant, après avis du CTP, puis de réaffecter les agents sur des emplois correspondant à leur grade.
Si cette réaffectation se révèle impossible, ils devront être maintenus en surnombre, pendant une durée
maximale d’un an, puis pris en charge par le Centre de gestion concerné ou le CNFPT. En outre, selon
l’article 97 II al.2, de la loi du 26 janvier 198422, « la prise en charge d'un fonctionnaire dont l'emploi
a été supprimé à la suite d'une délégation de service et qui a refusé, antérieurement à sa prise en
charge, une proposition de détachement auprès du bénéficiaire de cette délégation pour y occuper un
emploi similaire à celui qu'il occupait au sein de ce service, d'une société concessionnaire ou fermière
cesse après deux refus d'offre d'emploi. Le fonctionnaire est alors licencié ou admis à faire valoir ses
droits à la retraite dans les conditions fixées au III ci-dessous ».
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TC, 19 janvier 2004, Commune de Saint Chamond, req. n°C3393
TC, 29 décembre 2004, Préfet de la Moselle, req. n°C3435
TC, 14 février 2005, Préfet des Alpes Maritimes, req. n°C3441
CJCE, 14 septembre 2000, Collino et a. contre Telecom Italia Spa, req. n°C-343/98
Loi n°84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale
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S’agissant des agents non titulaires de droit public, le nouvel article L1224-3-1 du Code du travail
prévoit que « Sous réserve de l'application de dispositions législatives ou réglementaires spéciales,
lorsque l'activité d'une personne morale de droit public employant des agents non titulaires de droit
public est reprise par une personne morale de droit privé ou par un organisme de droit public gérant
un service public industriel et commercial, cette personne morale ou cet organisme propose à ces
agents un contrat régi par le présent code. Le contrat proposé reprend les clauses substantielles du
contrat dont les agents sont titulaires, en particulier celles qui concernent la rémunération. En cas de
refus des agents d'accepter le contrat proposé, leur contrat prend fin de plein droit. La personne
morale ou l'organisme qui reprend l'activité applique les dispositions de droit public relatives aux
agents licenciés. »
Si les agents ont donné leurs accords, la communauté pourra tout de même imposer à son
cocontractant de les prendre à sa charge via soit, une embauche directe, soit un détachement. L’accord
des agents étant indispensable, la collectivité ne pourra faire condamner le repreneur, si celui-ci a bien
proposé des postes aux agents concernés, mais que ces derniers ne les ont pas acceptés23.
B. En cas de renouvellement d’un contrat
Le juge a d’abord refusé d’appliquer l’article L.122-12 du Code du travail en cas de perte d’un
marché24, considérant que cela ne constituait pas une modification de la situation juridique de
l’employeur. Puis, en 1991, la Cour de Cassation a admis qu’en cas de « transfert d'une entité
économique ayant conservé son identité et dont l'activité est poursuivie ou reprise », l’article L. 12212 du Code du travail25 pouvait trouver à s’appliquer.
Or, on peut légitimement se demander comment, dans cette dernière hypothèse, une communauté peut
prendre en compte les dispositions de l’article L. 1224-1 du Code du travail, dans la rédaction de son
cahier des charges, lorsqu’elle souhaite renouveler sa délégation de services publics ou son marché
public. Ainsi, dans un arrêt du 26 novembre 2008, le Conseil d’Etat a jugé illégale une clause
contractuelle insérée dans un cahier des charges de délégation de services publics, imposant la reprise
du personnel de l’ancien titulaire du contrat, au nouveau. Ce dernier devait reprendre les anciens
agents de droit public de l’ancien titulaire, en leur offrant des « garanties équivalentes à leur ancien
statut ou contrat ». Le juge a considéré que cette disposition pouvait être source d’une atteinte au
principe d’égalité des candidats, si l’un d’eux était sous un régime de droit privé alors que les autres
étaient des structures publiques26, soumises au droit de la fonction publique territoriale.
A contrario, cette même juridiction a admis que le fait qu’une société n'ait « pu avoir communication
des informations qu'elle sollicitait sur le kilométrage du réseau et sur la masse salariale des
personnels à reprendre en application des dispositions du code du travail », empêchait que « tous les
candidats (aient) été mis à même de prendre connaissance des éléments essentiels de la convention
leur permettant d'apprécier les charges du cocontractant et d'élaborer une offre satisfaisante ; que,
par suite, dans les circonstances de l'espèce, la (dite société) est fondée à soutenir que le principe
d'égalité entre les candidats a été méconnu »27. Il considère en outre, que ce défaut d’information,
« élément essentiel du marché », peut constituer une violation du principe d’égalité de la commande
publique, lorsque l’ancien titulaire se porte également candidat28.
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CE, 1er juillet 2005, Commune de Saint Paul, req. n°269342, 269343
Cass., 15 novembre 1985, Sté Nova-services, req. n° 82-40301
Cass, 6 novembre 1991, Société Sonevie, pourvoi n°90-21437
CE 26 novembre 2008, Région Lorraine, req. n°308053
CE 13 mars 1998, Société « Transports Galiero », req. n°165238
CE 6 juin 1997 Société SIN, req. n°129437
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Annexe
Procédure à suivre en cas d’application de l’article L. 1224-3 du Code du travail
Saisine du CTP, pour avis
Proposition aux salariés d’un recrutement par la communauté, en application
de l’article L1224-3 du Code du travail. Ce courrier envoyé en lettre recommandé
avec accusé de réception doit informer le salarié sur les conséquences de
l’acceptation par ses soins d’une telle proposition :
- nature du contrat proposé : un CDI (en application du droit de la fonction
publique territoriale), un CDD (dont il ne lui est pas garanti qu’il sera renouvelé),
nomination stagiaire sur un emploi accessible sans concours, au premier échelon
- affiliation à l’IRCANTEC (hormis les CDI)
- droit à la formation
- avantages propres à la communauté …
Accord exprès du salarié :
Silence du salarié :
Refus exprès du salarié :
L’autorité territoriale devra
mettre en œuvre la procédure
de recrutement.
Il est recommandé de relancer
dans les mêmes conditions le
salarié et :
- de le mettre en demeure de
formuler sa réponse avant une
date fixe
- de l’informer des
conséquences de son silence
Application des dispositions du
Code du travail relatives au
licenciement, et de son contrat
de travail, le cas échéant.
La communauté devra assumer
toutes les conséquences
financières de ce licenciement.
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