Sur quels textes juridiques repose la lutte antidopage américaine ?

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Sur quels textes juridiques repose la lutte antidopage américaine ?
Sur quels textes juridiques repose la lutte antidopage
américaine ?
William BOCK
III General councel de l’US Anti-Doping Agency (USADA)
Je suis très heureux d’être parmi vous aujourd’hui, dans le pays où les Jeux olympiques ont
été créés.
Vous savez qu’il existe un lien politique fort entre la France et les Etats-Unis, et nos deux
pays sont également alliés dans la lutte contre le dopage.
Je vais vous présenter le cas ARMSTRONG en commençant par vous parler de David
ZABRISKIE, son ancien coéquipier.
David ZABRISKIE
Avec Travis TYGART, nous avons longuement interrogé ce coureur américain. Il nous a
expliqué s’être investi dans le cyclisme après le décès de son père, mort des suites de
consommation de drogues.
David ZABRISKIE, qui s’était promis de ne jamais prendre de drogue, reçut en 2003 un
appel de son Directeur sportif. Celui-ci lui déclara que son avenir dans l’équipe nécessitait la
prise d’EPO. David ZABRISKIE fit le choix d’accepter, contraint et forcé par son équipe, et
vécut douloureusement cette décision.
Le dopage est un monde de rêves brisés et de promesses détruites. Aucun être humain ne
devrait être contraint de se doper pour réaliser son rêve de devenir un sportif professionnel.
Il s’agit d’un vrai challenge pour nous tous. Nous devons combattre le dopage avec beaucoup
de ténacité et de vigilance.
A travers cet exemple, il est important de comprendre que le cas ARMSTRONG ne concerne
pas qu’un coureur, mais toute une équipe (coureurs et encadrants).
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Il n’existe pas de loi antidopage aux Etats-Unis ; se doper n’est pas un crime chez nous. Mais,
comme en France, nous avons néanmoins le code mondial antidopage sur lequel nous nous
appuyons et sur lequel la lutte antidopage est basée.
Les règles basées sur ce code ont été mises en procès devant les Cours fédérales américaines
par ARMSTRONG et ses avocats. Ceux-ci indiquaient n’avoir aucun compte à rendre devant
l’USADA, mais uniquement devant l’UCI. Or, les juges ont déclaré qu’ARMSTRONG
faisant partie de l’équipe américaine de cyclisme, il devait se soumettre à la juridiction de
l’USADA. De ce fait, les juges ont reconnu que le code mondial antidopage était la base
légale.
Suite à cet événement, ARMSTRONG a finalement abandonné le combat. Après cette
décision du coureur américain, l’USADA a publié un document décrivant le système de
dopage massif au sein de l’équipe US Postal.
L’UCI, qui nous a donné beaucoup de fil à retordre au cours de ces dernières années, a
accepté de retirer les résultats sportifs d’ARMSTRONG, suite à la publication de ce
document.
Il convient de rappeler qu’ARMSTRONG, appuyé par l’UCI, a longtemps déclaré s’être
soumis à de nombreux contrôles antidopage négatifs et n’avoir rien à se reprocher. Il a
finalement récemment avoué s’être dopé.
Que pouvons-nous apprendre de ce cas ?
L’UCI déclarait en 2005 que tous les coureurs étaient propres. Or, 14 des 17 derniers
vainqueurs du Tour de France ont été inquiétés voire condamnés dans des affaires de dopage.
En couleur, les vainqueurs du Tour de France officiellement non concernés par le dopage….
Notre rapport montre que l’UCI connaissait l’existence d’un processus de dopage massif.
Ainsi, ARMSTRONG a été contrôlé positif à l’EPO lors du Tour de Suisse 2001. Alors qu’il
s’agissait pour l’UCI d’un « résultat surprenant », l’analyse de l’échantillon a montré la
présence d’EPO synthétique. D’autres cas positifs sont avérés en 1999 et en 2002. Je rappelle
également que Lance ARMSTRONG a travaillé avec le Docteur Michele FERRARI,
condamné dans des affaires de dopage.
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Que fit l’UCI après la divulgation dans le journal « L’Equipe » en aout 2005 de la présence
d’Epo dans les prélèvements urinaires d’ARMSTRONG des Tours de France 1999 et 2000?
Ses responsables n’ont pas réussi à engager un procès à partir des échantillons de 1999 et ont
admis qu’ils avaient accepté de l’argent d’ARMSTRONG après ces cas positifs. En 2008,
l’UCI a autorisé ARMSTRONG à revenir dans le monde du cyclisme sans le soumettre aux
contrôles d’usage.
Par ailleurs, nous savons que l’UCI a refusé d’envoyer les échantillons de sang
d’ARMSTRONG en mai 2009 au panel indépendant qui établit le passeport biologique.
En 2011, Henri VERBRUGGEN déclarait qu’ARMSTRONG ne s’était jamais dopé et l’UCI
indiquait que le monde du cyclisme pouvait remercier le coureur texan pour sa carrière.
Dans l’enregistrement vidéo que je vous présente, Pat MCQUAID déclare que le cas
ARMSTRONG ne concerne pas l’UCI mais uniquement l’USADA. Deux jours après cette
déclaration, une fois que les avocats d’ARMSTONG eurent plaidé leur cause, Pat MCQUAID
m’a envoyé un courrier indiquant que la gestion de cette affaire ne concernait que l’UCI, et en
aucun cas l’USADA.
Vous pouvez comprendre pourquoi l’UCI ne nous inspire pas confiance.
En outre, il est frappant d’observer les réponses de l’UCI aux coureurs ayant admis d’être
dopé.
Par exemple, l’UCI déclare que les aveux de Frankie ANDREU « n’engagent que lui ».
Lorsque Jörg JAKSCHE révèle un dopage généralisé au sein du peloton, Pat MCQUAID
indique qu’il aurait aimé que le coureur allemand « gère les choses différemment ». Enfin, le
témoignage de Floyd LANDIS, décisif dans l’avancement de l’affaire ARMSTRONG, a été
jugé non crédible par Pat MCQUAID.
Devant les accusations, l’UCI a décidé de porter plainte contre les athlètes et journalistes qui
émettaient des doutes.
Finalement, en octobre 2012, l’UCI a enfin décidé d’annuler l’ensemble des résultats
d’ARMSTRONG depuis 1998, suivant les demandes de l’USADA.
La vérité a éclaté grâce au courage de 11 anciens coéquipiers d’ARMSTRONG ayant accepté
de témoigner. Pat MCQUAID a déclaré que ces repentis n’étaient pas des héros et qu’ils
avaient fait du mal au sport.
Il me semble fondamental de rassurer et garantir une protection à ces sportifs courageux sans
qui la vérité ne saurait voir le jour.
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