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Le mercredi 24 novembre 2004 20 h 00 (HNE)
Le jeudi 25 novembre 2004 19 h 00 (TUC)
SALLE WILFRID-PELLETIER DE LA PLACE DES ARTS
ORCHESTRE SYMPHONIQUE DE MONTRÉAL
Louis Lortie, piano - Chantal Juillet, violon - Antonio Lysy, violoncelle - Directeur : Jacques Lacombe
NOTES DE PROGRAMME
Veuillez noter qu’il y a eu changement au programme. Le concert s’est déroulé comme suit :
Bedrich Smetana
La Moldau
Denys Bouliane
Tetrapharmakos, quatre remèdes d'après Épicure, triple
concerto pour violon, violoncelle et piano (création)
I - « Chute des atomes et froissements du clinamen »
II - « Ronde des dieux qui n'ont qu'à aller leur
chemin »
III - « Une douleur qui s'abolit... au Jardin du
clinamen »
IV - « Cette mort qui ne nous concerne guère :
marches, dé-marches et vrilles de vie »
ENTRACTE
Leos Janacek
(arr. Talich/Smetacek)
Igor Stravinski
La Petite Renarde rusée (The Cunning Little Vixen), suite
I - Andante
II - Andante
L’Oiseau de feu (The Firebird), suite no 2 (1919)
Introduction
The Firebird and Her Dance
Variation of theFirebird
The Princesses’ Round Dance
Infernal dance ofKing Kastchei
Lullaby
Finale
OSM : www.osm.ca
Jacques Lacombe : www.colbertartists.com
Denys Bouliane : http://composers21.com
Louis Lortie : www.cramermarderartists.com
Chantal Juillet : www.c7m.co.uk
Antonio Lysy : www.antoniolysy.com
Denys Bouliane
Grand-Mère (près de Trois-Rivières), le 8 mai 1955
Vit à Montréal et Cologne
Tetrapharmakos, quatre remèdes d'après Épicure, triple concerto pour violon, violoncelle
et piano
L’un des compositeurs canadiens les plus en vue sur la scène internationale, Denys Bouliane est
également très actif comme pédagogue, chef d’orchestre et organisateur d’événements
consacrés à la musique nouvelle. Largement diffusées, ses œuvres sont jouées et commandées
par de nombreux ensembles européens et canadiens. Formé notamment auprès de Ligeti (19801985, Hambourg), il a vécu principalement à Cologne entre 1980 et 1991. Il a été en résidence à
l’Orchestre symphonique de Québec, à l’Orchestre de Heidelberg, à la Radio ouest-allemande et
récemment au Festival de Salzburg. Depuis 1995, il est professeur de composition et directeur
musical de l'Ensemble de Musique Contemporaine à l'Université McGill. Il est actuellement
compositeur en résidence à l’Orchestre du Centre national des Arts à Ottawa, de même que
coordonnateur artistique de MusiMars, co-directeur artistique avec Walter Boudreau de la
biennale internationale Montréal/Nouvelles Musiques et co-directeur des Rencontres de musique
nouvelle du Domaine Forget.
Denys Bouliane a remporté de nombreux prix, dont le Grand Prix du Concours des jeunes
compositeurs de Radio-Canada (1982), le « Förderpreis » de la ville de Cologne (1985), le prix
Serge-Garant de la fondation Émile Nelligan (1991), les prix Opus de la « personnalité de
l’année » (1999) et « directeur musical de l’année » (2003) décernés par le Conseil québécois de
la musique.
Commande de l’Orchestre symphonique de Montréal et du Conseil des Arts du Canada,
Tetrapharmakos est dédiée à Chantal Juillet, Antonio Lysy et Louis Lortie, ainsi qu'au philosophe
français Michel Onfray. Denys Bouliane explique la teneur de son œuvre d’une durée d’environ
25 minutes en ces termes :
Notre millénaire débute dans un climat plutôt trouble. Les conflits idéologiques du XXe siècle
semblent maintenant réalimenter une ancienne forme de radicalisation, celle des conflits de
religion. Il serait vain de s'imaginer qu'une œuvre musicale puisse y changer quelque chose,
mais disons simplement que ce terrible sentiment d’impuissance nous conduit à chercher dans
l’histoire les sources de nos conflits présents, et peut-être même d’y entrevoir des réflexions
porteuses d’espoir.
Au cœur de la philosophie occidentale, se larve un symptôme singulier : celui du refoulement du
corps au profit des idées (Platon) ou d’une faculté « divine » nous permettant de passer de la
sensation au raisonnement (Aristote). Des anciens Grecs aux religions monothéistes, le corps
refoulé pourrait bien être à la source de la difficulté qu’ont ces religions à accepter notre finitude
et partant, à s’accorder sur la valeur d’une vie humaine…
Dans la tradition philosophique, la réputation d’Épicure a été régulièrement « assombrie » : on en
a fait un pourceau se vautrant dans la fange des plaisirs faciles. Pourtant, la réalité est tout autre
: Épicure propose une véritable éthique humaine du plaisir comme jauge de nos sensations et
mode de connaissance. De son enseignement, le concept de Tetrapharmakos (le quadruple
remède) est le plus connu. Il s’agit de quatre énoncés riches d’interprétation : « Il n’y a rien à
craindre des dieux » (ils ne sont pas le principe de toute chose mais bien la projection de notre
réalité ; on se rappelera Voltaire…), « La mort ne nous concerne pas » (elle dépasse notre nature
et entendement; rien ne sert de spéculer plus avant), « On peut supporter la douleur » (si on lui
donne un sens), « On peut atteindre le bonheur » (si nous acceptons notre nature finie et
l’espace de liberté et de responsabilité qui nous échoit).
Épicure suggère également une physique d’inspiration discontinuiste qui prend corps dans
l’extraordinaire et poétique concept du clinamen : « Les atomes choient tout droit par le vide,
emportés par leur poids propre : à des instants indéterminés et en des points indéterminés, ils
manifestent une quasi-déviation infime, tout juste suffisante pour qu'on puisse parler d'une
modification d'équilibre » (Lucrèce). C’est par cette infime déviation, le clinamen, que la matière
peut se former. Dans ce « caprice des atomes », le peintre Paul Klee, les écrivains Alfred Jarry,
Georges Perec et Jacques Roubaud et bien d’autres ont vu une source inépuisable
d’enchantement et d’inspiration.
C’est dans cet esprit que je me suis mis à la composition du triple concerto Tetrapharmakos.
L’idée du clinamen m’a suggéré des poussières de sons qui s’abîment de l’aigu au grave et
desquelles surgissent de brèves envolées (souvent par les trois solistes). Le premier mouvement,
très bref, énonce cette idée. Elle est reprise dans le troisième auquel se superposent de grandes
pointes douloureuses qui s’évanouiront dans la pluie du clinamen. Le deuxième mouvement est
pour moi une sorte de « musique-tourbillon », très cinétique, un peu irrévérencieuse, comme une
danse « dé-mesurée » qui pourrait peut-être accompagner les pas des « dieux » que nous nous
plaisons à créer…Le quatrième mouvement est résolument plus sombre. Il met en présence deux
« musiques » contrastantes. D’une part l’orchestre réalise une sorte de marche funèbre un peu
obtuse et obstinée (qui n’est pas sans rappeler Beethoven et Chopin). Les solistes pour leur part
semblent jouer dans un autre monde, ils proposent de grands élans presque "lisztiens",
exacerbés mais teintés de nostalgie. Ces pulsions des trois solistes tendront à gagner
graduellement l’orchestre qui se fera moins oppressant et en viendra à participer à leurs
élans. La fin reste ouverte, je ne savais faire autrement…
Leoš Janáček
Hukvaldy, Moravie, le 3 juillet 1854
Ostrava, le 12 août 1928
La Petite Renarde rusée, suite (arr. Talích / Smetáček)
Composé en 1922 et 1923, le septième opéra de Janáček, La Petite Renarde rusée (Příhody
Lišky Bystroušky), s’appuie sur un livret du compositeur, d'après la nouvelle Liška Bystrouška du
poète morave Rudolf Těsnohlídek. Publiée en feuilleton pour accompagner des dessins
humoristiques de Stanislav Lolek, cette nouvelle raconte les aventures d’une petite renarde bien
futée.
Arrangée en 1936 par le chef d’orchestre Václav Talích et révisée par Václav Smetáček (1965),
la suite d’une vingtaine de minutes (qui compte deux grandes sections débutant toutes les deux
par un Andante) correspond à peu de choses près au premier acte tout entier qui réunit deux
tableaux : « Une forêt par une chaude journée » et « Dans la basse-cour du garde-chasse ». Le
premier évoque d’abord la forêt bruissante et mystérieuse. Le garde-chasse s’y endort, alors
qu’un grillon et une sauterelle s’amusent au son d’une tendre valse. Mais un crapaud poursuivi
par la renarde aboutit sur son nez. Le garde-chasse se réveille, attrape la renarde et l’emmène
chez lui. La libellule attristée par la disparition de son amie entreprend alors une petite danse
funèbre. Au deuxième tableau, entre autres péripéties, le fils du garde-chasse tourmente la
renarde, puis, à la tombée de la nuit, elle s’endort. Elle pleure dans son sommeil où, au son d’une
musique aux accents mélancoliques, elle semble se transformer en jeune fille. Puis c’est le lever
du jour et la basse-cour s’anime. Après avoir tenu un discours à saveur révolutionnaire et
féministe aux poules qui ne l’écoutent pas, elle les croquent et parvient à s’échapper.
Ces pages témoignent sans conteste de l’invention mélodique et harmonique de Janáček qui use
ici d’un langage vaguement impressionnisme résultant notamment de sa découverte récente des
partitions de Debussy. Loin d’un réalisme qui serait purement descriptif, les évocations de bruits
d’insectes et d’animaux de la forêt s’y insèrent comme autant d’allusions fugitives.
Igor Stravinski
Oranienbaum (près de Saint-Pétersbourg), le 17 juin 1882
New York, le 6 avril 1971
L’Oiseau de feu, suite no 2 (1919)
Première partition élaborée de Stravinski destinée au ballet, L’Oiseau de feu, créé le 25 juin 1910
à l’Opéra de Paris, propulsa d’emblée son compositeur au rang de célébrité internationale. Il était
donc inévitable que, moins d’un an plus tard, le compositeur songe à en tirer une suite
d’orchestre. Publié en 1912, cette première suite reprend la partition originale qu’elle modifie
légèrement. Une deuxième suite, quelque peu différente de la première et recourant à un
orchestre sensiblement plus réduit, sera préparée en 1919. Cette deuxième version — celle que
nous entendrons ce soir — est la plus populaire des trois suites que Stravinski tirera de la
partition de son ballet. Il s’agit également d’une des suites les plus fréquemment jouées de tout le
répertoire orchestral.
Le compositeur déploie ici le meilleur de son talent créateur en offrant une musique empreinte
d’exotisme et de nuances somptueusement enchanteresses. Le pouvoir stravinskien de saisir et
de fixer une atmosphère se manifeste de part en part. Ainsi, l’ostinato vaguement hypnotique des
contrebasses que l’on entend au cours des premières mesures installe un climat nocturne,
funeste et mystérieux. Les vents, le célesta et les percussions dépeignent les couleurs
scintillantes de l’Oiseau de feu qui exécute sa danse. Le Finale glorieux, marqué par les accords
massifs et brillants des cuivres, ne laisse aucun doute quant à l’issue heureuse de l’histoire.
Inspiré d’une légende russe, ce conte de fée met en scène le chasseur Ivan, la princesse qu’il
sauve des griffes du redoutable monstre Katscheï et le merveilleux Oiseau de feu, mi-oiseau, mifemme.
Source : OSM