Volume 6 - Sentiers de foi

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Volume 6 - Sentiers de foi
Un monde en évolution
La foi en mouvement
de
foi.info
Sentiers
www.
Vol. 6 no 1 / 15 septembre 2010
Comité éditorial
Rédacteur en chef
Gérard Laverdure
Secrétaire de rédaction
Ghislain Bédard
Représentant du C.A.
Michel-M. Campbell
Collaboration
Lise Baroni Dansereau
Lucie Brousseau
Jocelyne Hudon
8 Lucie Brousseau, 2010 : Ensemble
Journal Web
bimensuel
indépendant
qui vise à faire
connaître
des parcours
et des lieux
où se vivent
des expériences
humaines
et spirituelles
novatrices.
Itinéraire
Au diocèse de Chicoutimi, depuis plusieurs années, le travail d’équipe est devenu
la priorité en paroisse. Deux femmes s’occupent de la formation et du coaching
d’une équipe diocésaine de prêtres, qui en sont très satisfaits. [ p. 2 ]
par Jocelyne Hudon
Perspectives
Intériorité
Pour nous joindre
[email protected]
Pour vous abonner
www.sentiersdefoi.info
Abonnement gratuit.
ISSN 1715-8370
8 2010 Sentiers de foi
Tous droits réservés
Surprenantes, ces pratiques de femmes!
Des déplacements de pratiques prophétiques par des femmes d’Église,
audacieuses et fidèles au Souffle de Vatican II... La « libération féministe »
poursuit sa route. [ p. 3 ]
par Lise Baroni Dansereau
Photographie
Lucie Brousseau
Conception graphique
Ghislain Bédard
Ce journal Web existe
uniquement grâce
à votre générosité.
Faites parvenir votre don
à Sentiers de foi,
4785, rue Messier, app. 101
Montréal (Qc) H2H 2J2.
Un reçu de charité
sera émis.
Des prêtres comme des coachs d’équipe
Un coach nommé Jésus
Pour Suzanne Dionne et France Fortin, les textes présentés ici sont stimulants
et éclairants. Ils traduisent bien comment le message de Jésus les met au défi
dans leur quotidien. [ p. 5 ]
présenté par Suzanne Dionne et France Fortin
Actualités
La caravane de la paix
Des rencontres interreligieuses, il s’en fait depuis longtemps. La caravane de
la paix en fait la promotion pour la deuxième fois en deux ans à Montréal. Une
expérience unique. [ p. 6 ]
par Gérard Laverdure
Ressources
Pour aller plus loin ou pour satisfaire votre curiosité
Des activités diverses et des ressources pertinentes. [ p. 7 ]
sdf.info • 15 septembre 2010 • 2
Itinéraire
Des prêtres comme des coachs d’équipe
Au diocèse de Chicoutimi, depuis plusieurs années, le travail d’équipe est devenu la priorité en paroisse. Deux femmes
s’occupent de la formation et du coaching d’une équipe diocésaine de prêtres, qui en sont très satisfaits.
par
Jocelyne Hudon
sdf.info
Institut de formation
théologique et pastorale
574, Jacques Cartier Est
Chicoutimi G7H 1Z5
418 543-2006
1 866 990-2006
[email protected]
www.iftp.org
Lectures suggérées
Simard Serge,
« Le leadership
presbytéral dans le
contexte des équipes
pastorales »,
in Prêtre et pasteur,
revue des agents de
pastorale, Vol. 113, no 5,
Mai 2010, p. 274-280.
Sophie Soria,
Un coach nommé Jésus,
Dunod-InterÉditions,
2005, 272 p.
1. Au début du projet,
M. Simard était directeur
du Service de formation
pastorale du diocèse de
Chicoutimi. Ce Service
est devenu ensuite
l’Institut de formation
théologique et pastorale
(IFTP) dont il est
maintenant le directeur
des Études.
2. Mmes Suzanne
Dionne et France Fortin,
agentes laïques de
pastorales, sont
accompagnatrices
(coaches) de ce
programme de
formation.
Dans toutes les institutions, même l’Église, le travail d’équipe ne va pas de soi. En 2002, Mgr JeanGuy Couture promulguait la politique diocésaine pour un travail d’équipe, politique réaffirmée en
2007 par son successeur, Mgr André Rivest. En 2008, ce dernier présentait aux prêtres œuvrant en
paroisse une nouvelle orientation du programme de formation en travail d’équipe et sollicitait leur
adhésion. Le programme vise à ce que chaque équipe réfléchisse aux enjeux pastoraux fondamentaux, identifie une vision commune et un projet pastoral, établisse des priorités et un plan
d’action en fonction des ressources disponibles et de l’Église qu’on souhaite voir advenir. La
formation comprend divers ateliers comme « Leadership et communication ouverte », « Feedback de reconnaissance », « Feed-back d’amélioration », « Résolution de problèmes », « Gestion
de conflits », « Communication interpersonnelle » et « Consolidation d’équipe ». M. Serge
Simard1 explique : « Les ateliers visent la consolidation des compétences que le prêtre-leader
possède déjà et le développement d’autres habiletés nécessaires pour exercer son rôle. Il est invité
à retransmettre le contenu de ces formations à son équipe afin que tous exercent leur leadership
avec plus de compétences. »
La plupart des milieux paroissiaux comptent un seul prêtre entouré de diacres ou de laïcs
mandatés, chacun étant responsable (leader) d’un champ de responsabilités animé avec des
équipes de bénévoles. La grille conçue pour le projet comprend six champs : modérateur,
coordination de l’équipe, éducation de la foi, liturgie et vie communautaire, initiation chrétienne,
solidarité sociale. Chacun est détaillé très précisément. La personne responsable d’un champ le
porte particulièrement, mais il ne lui « appartient pas ». Chaque membre de l’équipe a son mot à
dire quant à l’orientation d’un champ. « Le modérateur doit y croire, accepter et favoriser l’idée
de faire équipe, sans quoi rien ne bougera », dit Mme Suzanne Dionne2. M. Simard complète :
« Certains prêtres étaient de beaux parleurs du travail d’équipe et disaient : "Nous voulons faire
équipe, c’est très important..." sans s’investir dans le processus, sans prendre conscience qu’ils
sont le pivot de l’équipe. S’ils ne jouent pas leur rôle, l’équipe s’en va partout. L’idée est vraiment
de former les modérateurs comme leaders pour qu’ils assument la prise en charge de la
construction de leur équipe. »
Une particularité novatrice de cette formation est sans contredit la formule « coaching ». Mme
Dionne résume : « En groupe, les prêtres participent à un atelier théorique suivi d’un atelier
d’intégration. Ensuite, nous accompagnons chaque prêtre individuellement à partir des
événements de son milieu. Nous le soutenons dans les capacités qu’il maîtrise et dans le
développement de nouvelles manières de faire. » Mme France Fortin précise : « Dans les
rencontres individuelles, nous abordons ce qui pose problème. Ensuite, nous reprenons ensemble
les éléments de la formation et cherchons comment les intégrer dans leur travail. »
Mme Dionne poursuit : « L’un d’eux n’était pas intéressé, mais il s’est révélé l’un des plus
motivés! » Et aussi : « Lors d’une formation, un prêtre était absent. À la suite de l’appel d’un
confrère, il est arrivé rapidement, en disant : "Erreur d’agenda! Merci! Je ne voulais vraiment pas
manquer l’atelier!" » Mme Fortin ajoute : « Ils se disent libres de parler, surpris de la profondeur
de leurs partages. Un même groupe se retrouvant régulièrement permet un climat de confiance, de
confidence, de parole authentique. » M. Serge Simard renchérit : « Unanimement, dès la fin de la
première année, les confrères ont dit : "De tout ce que le diocèse propose de rencontres, de
formations, de ressourcement, c’est de loin la plus importante, la plus utile! Ça répond au vrai!" »
L’idée, tout à fait originale, d’avoir deux femmes coachs est très bien reçue. Selon M. Simard,
« l’accompagnement par des femmes est un atout. Il y a là une altérité non seulement hommefemme, mais aussi ministérielle. Un confrère risquerait d’être perçu comme "ayant une longueur
Lire la suite, page 3
sdf.info • 15 septembre 2010 • 3
Itinéraire (suite)
d’avance" sur eux, alors que sa réalité est la même que la leur ». Certains envoient des courriels
ou téléphonent pour éclaircir une situation. Par exemple, ils demandent : « Peut-on regarder quoi
faire devant tel événement? Peux-tu m’aider à préparer une rencontre de feed-back
d’amélioration? » Parfois, c’est plus personnel : « Continue, ramène-moi, je reviens vite dans mes
vieux souliers », rappelle Suzanne.
Le projet a connu diverses phases avant d’arriver à sa forme actuelle. Comme cela constitue un
changement majeur dans la manière d’exercer l’autorité, voire le pouvoir dans l’Église, il est trop
tôt pour dégager les impacts réels de son implantation. À l’Institut de formation théologique et
pastorale (IFTP), on estime qu’une dizaine d’années sont nécessaires pour évaluer adéquatement
les résultats. Mais on estime aussi que l’enjeu en vaut l’investissement.
Perspectives
Surprenantes, ces pratiques de femmes!
Des déplacements de pratiques prophétiques par des femmes d’Église, audacieuses et fidèles au Souffle de Vatican II...
La « libération féministe » poursuit sa route.
Parmi les dernières vagues de fond qui ont traversé la société et l’Église, la libération féministe est
sans doute celle qui a le plus viscéralement marqué l’identité socioreligieuse québécoise. Une
nouvelle manière de voir, de comprendre, de créer est apparue avec elle. Depuis la Révolution
tranquille surtout, chaque génération de femmes a opéré une étape singulière dans l’évolution de
la révolution féministe. Jusqu’à aujourd’hui, je perçois quatre grandes étapes : les années 19501960, celles du « non, ça suffit! »; les années 1970-1980, celles des grandes batailles
sociopolitiques; celles de 1990-2000 qui ont réinterprété les notions de sujet, de genre, de
corporalité, de sororité, de divinité. Quant à la décennie 2010, elle semble amorcer un mouvement
Lise Baroni Dansereau
est théologienne, qui va du social (axé sur les revendications politiques) au culturel (axé sur une nouvelle façon
féministe et militante. d’être, de penser, d’agir). Cette évolution n’est pas sans atteindre la pastorale ecclésiale.
par
Lise Baroni
Dansereau
collaboration spéciale
À l’évidence, la qualité et l’ingéniosité de certaines pratiques exercées par des travailleuses de
l’institution s’avèrent remarquables. L’itinéraire relaté ici est à cet effet particulièrement
significatif... presque incompréhensible, à première vue. Car, on l’observe aussi bien au Québec
que partout ailleurs, l’ouverture suscitée par Vatican II s’est hermétiquement refermée. L’idéologie
romaine donne une telle prédominance au déjà-dit, au déjà-écrit, au déjà-proclamé par les papes et
les déclarations officielles précédant le dernier Concile que l’Église en vient à ne plus être en
contact avec la nouveauté de l’expérience, les pratiques concrètes des communautés et le
dynamisme de leurs projets. Sorte de corps sans âme, l’organisation cléricale sèche et se dégrade.
La création de voies prophétiques se butte souvent à un système figé qui s’acharne à mettre au pas
une Église devenue, paraît-il, un peu trop délinquante. Tout se passe comme si la tête (l’autorité
magistérielle) avait perdu son corps (le peuple de Dieu)... et croyait pouvoir continuer à aimer et
à se reproduire sans sa chair, sans ses membres pour toucher, embrasser et mettre au monde les
Bonnes Nouvelles réelles, effectives et salutaires qui nourrissent la vie de tous les jours.
Or, au beau milieu de ce contexte démobilisant, en relation avec des confrères prêtres et laïcs, des
femmes tentent de redonner naissance à leur Église. Certes, leur positionnement suscite de
l’étonnement; il n’en demeure pas moins clair, déterminé et en prise sur le dernier tournant
féministe où la défense d’une cause politique objective n’occupe plus la première place. Il ne s’agit
nullement d’indifférence, ou pire, d’inconscience, mais d’un déplacement devant le type de
Lire la suite, page 4
Perspectives (suite)
sdf.info • 15 septembre 2010 • 4
réactions auquel la première génération d’agentes de pastorale nous avait habitués... un
déplacement des sensibilités, des énergies, des intérêts, et donc des analyses et des priorités.
Être considérées, par l’idéologie cléricale, comme des chrétiennes de seconde zone, des substituts
temporaires ou des bouche-trous, ne semble absolument pas décourager leurs actions. Non pas
qu’elles soient stupides, bornées ou apeurées; bien au contraire, elles sont ancrées dans une
liberté intérieure têtue et n’entendent plus se laisser définir par l’institution, mais par ellesmêmes, par leurs communautés et par leur Dieu/e.
Autant, il n’y a pas si longtemps, on reprochait aux femmes d’être trop dociles devant les discours
et les exigences des clercs, autant l’audace des femmes qui, avec leurs partenaires masculins, sont
fortement parties prenantes de l’initiation, de l’organisation et de l’animation de cette expérience
au diocèse de Chicoutimi, démontre un entêtement, une débrouillardise, un non-conformisme que
d’aucuns qualifieraient d’insolents. En fait, une seule chose préoccupe véritablement la majorité
des travailleuses en Église, et ce ne sont pas les structures en lesquelles elles n’espèrent plus rien,
mais uniquement et essentiellement la transmission d’un Évangile qui fait vivre. Ces femmes sont
des accoucheuses de vie : l’écoute attentive de chaque personne prend le dessus sur le préjugé
facile... l’appel qui conduit à l’engagement prévaut sur les codes institutionnels... l’arrimage avec
les valeurs contemporaines, la famille, le couple, les enjeux sociaux sont pris en compte...
l’accompagnement et le discernement prennent la place du jugement et de l’exclusion... Bref, il
ne m’apparaît pas exagéré d’affirmer que, si la révolution ecclésiale ardemment souhaitée par tant
de catholiques à travers le monde voit enfin le jour au Québec, elle aura commencé dans le
quotidien, dans la proximité, dans d’humbles communautés de croyantes et de croyants, et des
femmes en auront été les pionnières.
sdf.info • 15 septembre 2010 • 5
Intériorité
UN COACH
NOMMÉ JÉSUS
Pour Suzanne Dionne et France Fortin, le texte suivant, tiré de l’Évangile, est stimulant et éclairant. Et celui de Sophie Soria
traduit bien comment ce message de Jésus les met au défi dans leur quotidien.
Vous êtes la lumière du monde
Une ville ne peut se cacher, qui est sise au sommet d’un mont. Et l’on n’allume pas une lampe pour la mettre sous le
boisseau, mais bien sur le lampadaire où elle brille pour tous ceux qui sont dans la maison. Ainsi votre lumière doit-elle
briller devant les hommes afin qu’ils voient vos bonnes œuvres et glorifient votre Père qui est dans les Cieux.
Matthieu 5, 14-16
Un coach nommé Jésus
Être la lumière du monde, c’est d’abord avoir la lumière en nous-mêmes pour pouvoir ensuite briller dans le monde,
vers les autres. Cette lumière est celle de notre identité, de notre personnalité, de notre vérité intérieure. C’est aussi
la lumière de l’Amour. Oser être nous-mêmes, avoir le courage d’affirmer notre identité, nous donner aux autres dans
l’Amour, c’est vivre en vérité, vivre dans la vérité de ce que nous sommes et de ce que nous voulons, dans la vérité
de nos valeurs.
Sophie Soria, Un coach nommé Jésus, p. 213
Une expérience du cœur
Elles définissent leur mission comme une expérience du cœur, une présence infiniment respectueuse de l’identité des personnes
avec qui elles marchent, sans se perdre de vue elles-mêmes. Expérience d’accueil inconditionnel, d’émerveillement devant les
chemins que l’autre ose entreprendre. Folie apparente dans le monde ecclésial si contesté et ébréché! Leur engagement pourrait
se résumer ainsi :
Accompagner
sans intervenir à la place de celui avec qui nous marchons.
Accepter
de se sentir responsable du devenir de l’Église.
Consentir
à ne pas changer l’autre dans ce qu’il est, dans ses idées ou dans ses manières de faire, s’il ne le
veut pas. Bâtir au fur et à mesure.
Garder
les yeux fixés sur une Église par en avant... qui se construira d’abord et avant tout dans l’amour
qui éclairera le cœur et l’âme.
S’incliner
humblement quand ils révèlent leur désir profond et leur engagement envers leur Église.
Demeurer
profondément touchée de leur ouverture d’âme quand ils vont au cœur des raisons pour
lesquelles ils se sont engagés comme prêtres et comment ils ont à cœur le devenir de leur
communauté.
Espérer
qu’ils recevront à leur tour de ces feed-back de reconnaissance qu’ils s’exercent à offrir.
sdf.info • 15 septembre 2010 • 6
Actualités
La caravane de la paix
Des rencontres interreligieuses, il s’en fait depuis longtemps. La caravane de la paix en fait la promotion pour la deuxième
fois en deux ans à Montréal. Une expérience unique.
par
Gérard Laverdure
sdf.info
On pourrait rester chacun chez soi, bien assis dans le confort de sa vérité. Qu’avons-nous besoin
des autres? Convertissons-les plutôt à notre Vérité. C’est dans un tout autre esprit, soit celui de se
rencontrer dans le respect et le dialogue, qu’est né le projet « La caravane de la paix » dont la
première marche s’est tenue à l’été 2008. De simples citoyens et citoyennes de diverses
confessions religieuses, soucieux de rapprocher les diverses communautés culturelles de Montréal,
en ont pris l’initiative, appuyés par la communauté franciscaine1.
Par un beau samedi matin ensoleillé de juillet, une centaine de marcheuses et de marcheurs, soutenus
par huit franciscains en bure brune, a déambulé dans quelques rues du quartier Parc-Extension à
Montréal et visité quatre temples. Plusieurs jeunes étudiantes du cégep Maisonneuve et une de
l’UQÀM y étaient. Le point de départ fut le petit temple hindou srilankais Sri Durkai Amman.
Tous assis, pieds nus sur le grand tapis, dans une petite salle aux murs recouverts des photos des
divinités hindoues, nous avons écouté le responsable nous parler du rôle des diverses divinités dans
les besoins quotidiens de leur vie. Un jeune prêtre a chanté une prière en langue hindoue.
De là, nous sommes partis pour la mosquée Assuna Annabawiyah devant la sortie de métro Parc.
Par une entrée discrète, nous accédons, au deuxième étage, à une salle immense, très dépouillée,
invitant au recueillement. Aucune image, seulement une chaise surélevée dans un coin,
accompagnée d’une petite à sa droite. Tout le reste est couvert d’un grand tapis aux motifs en
arche. Une atmosphère de grand dépouillement et de silence règne ici. L’imam responsable nous a
présenté les trois grands volets de l’Islam et ses cinq piliers : la proclamation de sa foi en Allah,
les cinq prières quotidiennes, le jeune du Ramadan, l’aumône et le pèlerinage à la Mecque.
De cette escale, nous avons marché vers l’église grecque orthodoxe Annonciation de la Théotokos.
Changement spectaculaire dans l’environnement. Une abondance d’icônes très grandes aux couleurs
vives et une multitude de chandelles nous accueille. Je reconnais, du côté gauche, un immense tableau
représentant la transfiguration et, à la droite, l’ascension. Une multitude de saints multicolores nous
font face le long d’un mur qui ferme le chœur. Marie trône au sommet. Le prêtre nous accueille et ira
faire des prières pour la paix retiré dans le saint des saints en avant. Puis, il nous donne quelques
informations sur les différences entre les Églises orthodoxe et catholique, et on repart.
Dernière étape, le temple sikh2 Gurdwara Shri Ravidass, où de nombreux membres de la
communauté, en turban et avec leur longue barbe, nous accueillent. Au centre, sur une petite
estrade recouverte de tissu blanc et surmontée d’un baldaquin à quatre colonnes, un jeune homme
lit le texte sacré, un poème mystique : le Jap Ji. Le fondateur du sikhisme, Gurû Nanak (14691539), est né au Pakistan. Constatant les interminables querelles et violences entre hindous et
musulmans, il voulut rapprocher ces communautés dans le dialogue et le respect, en plus de
chercher à intégrer les sans-caste à la société. D’où le respect de toutes les croyances chez les
sikhs. Monothéistes, ils croient en « une seule conscience créatrice manifestée ».
Pendant les présentations et tout au long du repas qui nous fut servi dans le temple, des hommes
et des femmes en sari, avec quelques enfants, venaient se prosterner quelques minutes devant
1. Représentée par l’estrade centrale et laisser là leurs offrandes comme des sacs de nourriture. Entre-temps
Estelle Drouvin, – surprise! –, une femme avait remplacé le lecteur du livre sacré.
Pierre Charland, ofm,
Mohamed Bounegta,
Suzy Tremblay et
André Racine, ofm.
Au sortir de ce temple, je croise des centaines de femmes toutes « endimanchées » dans leur sari
aux couleurs vives, des enfants et beaucoup d’hommes sur leur trente-six. Impressionnant. Ils sont
à l’entrée d’un magnifique temple hindou qui voisine le temple sikh sur la rue Durocher. Que se
passe-t-il? Un jeune homme m’informe que c’est un mariage. Je reste un bon moment à les
2. Le mot sikh vient du
sanskrit et signifie contempler et, lorsque je repars vers le métro, leur musique joyeuse et inhabituelle se perd dans le
« disciple ou étudiant ». vent. J’ai encore le cœur tout joyeux et l’esprit plus ouvert à la suite de ces rencontres.
sdf.info • 15 septembre 2010 • 7
Ressources
Pour aller plus loin ou pour satisfaire votre curiosité
[ Participer ]
Méditation chrétienne
Dialogue entre Laurence
Freeman et Karim Ben Driss
Vous êtes invités à une rencontre avec
Laurence Freeman, moine bénédictin
et accompagnateur spirituel de la
Communauté mondiale de la Méditation chrétienne, et Karim Ben Driss,
auteur, enseignant et fondateur de
l’Institut soufi de Montréal. Cette
soirée bénéfice est organisée par la
Méditation chrétienne du Québec.
Elle aura lieu le jeudi 23 septembre à
19 h 30 à la librairie Paulines, 2653,
rue Masson, à Montréal. Coût : 20 $.
Pour s’inscrire : 514 849-3585.
www.librairies.paulines.qc.ca
[ Participer ]
Réception du concile Vatican II
Rencontre échange avec
Christoph Theobald, s.j.
Près de 50 ans après sa clôture,
Vatican II demeure au centre des
débats ecclésiaux. Pour certains, ce
concile sonne la fin de la ContreRéforme; pour d’autres, il représente
un reniement de l’identité chrétienne
qui se définissait par l’opposition à la
modernité et aux Réformateurs. Dans
son ouvrage magistral La réception du
concile Vatican II (Cerf, 2009),
Christoph Theobald situe Vatican II
dans le temps long de l’Église et nous
en fait découvrir le caractère original.
La rencontre, organisée par la Province
jésuite du Canada français, aura lieu le
lundi 20 septembre de 19 h à 21 h à la
maison Bellarmin, 25 rue Jarry Ouest,
à Montréal. Pour information : Marco
Veilleux au 514 387-2541
[ Participer ]
Méditation en cinq temps
Journée méditative interreligieuse
Cette journée aura lieu le dimanche 3
octobre de 9 h 30 à 15 h 30. Seront
présents : Yvon Théroux (christianisme), Lily Gozlan (boudhisme),
Roger Marc-Aurelle (hindouisme),
Karim Ben Driss (soufisme), Rabbi
Schachar Orenstein (judaïsme).
Vécue dans un climat de silence, cette
journée comprendra une courte introduction pour chacune des traditions
religieuses suivie de 15 minutes de
méditation. Un temps de partage est
prévu le matin ainsi que l’après-midi.
Apportez votre lunch. Inscription sur
réception de votre paiement en
appelant au 514 849 3585. Date limite
d'inscription : 27 septembre. Remboursement pour annulation jusqu’au
25 septembre. Cette journée aura lieu
à la librairie Paulines, 2653, rue
Masson, à Montréal. Coût : 25 $.
Pour information : 514 849-3585.
www.librairies.paulines.qc.ca
[ Lire ]
Femmes et ministères
Du nouveau sur leur site Web
expérience d’Église, Annine Parent
nous trace un portrait des acquis et du
long chemin qui reste à parcourir.
Textes d’une conférence (2009). Et :
« Sans les femmes prêtres, les
catholiques se privent de ressources
ministérielles » de Bill Tammeus,
presbytérien et chroniqueur pour The
Kansas City Star.
www.femmes-ministeres.org
[ Lire ]
Pédophilie chez les prêtres
Article de Pierre Pelletier
Dans le numéro de juin-août 2010 de la
revue Présence Magazine (Vol. 19, no
147), Pierre Pelletier, philosophe et
psychanalyste, traite de la « Pédophilie
chez les prêtres et les religieux – Un
mal profond et exacerbé ». Après avoir
parlé des séquelles chez les victimes, il
parle de la dynamique du pédophile et
particulièrement du prêtre pédophile.
Comment travailler à modifier ces
comportements malsains?
www.presencemag.qc.ca
À consulter, les articles suivants :
« L’écho de Vatican II chez les laïcs »
d’Annine Parent. « L’annonce du
Concile a été pour nous comme un
vent d’espérance en même temps
qu’un appel à la participation et à la
coresponsabilité... Il apportait des
réponses aux questions modernes de
notre temps... Aujourd’hui, où en
sommes-nous? » Avec sa grande
[ Célébrer ]
Le journal Sentiersdefoi.info
fêtera 5 ans de parution
en octobre 2010
Surveillez les prochains numéros pour
en savoir plus sur les activités qui
souligneront l’événement. Bonne
rentrée à tous et à toutes!
;
Prochaine parution du journal : 6 octobre 2010
Le journal Sentiersdefoi.info est une publication de Sentiers de foi, OSBL autonome et indépendant d’inspiration chrétienne fondé en 1984,
qui a pour mission d’être un espace favorisant la connaissance, la reconnaissance et la collaboration des sentiers de foi au Québec,
dans une perspective chrétienne inscrite dans le pluralisme actuel.
ISSN 1715-8370 | 8 2010 Sentiers de foi | Tous droits réservés
Ce journal, publié uniquement sur le Web, est de ce fait entièrement écologique. Imprimez-le et diffusez-le en pensant à l’environnement.
Un monde en évolution
La foi en mouvement
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foi.info
Sentiers
www.
Vol. 6 no 2 / 6 octobre 2010
Comité éditorial
Rédacteur en chef
Gérard Laverdure
Secrétaire de rédaction
Ghislain Bédard
Représentant du C.A.
Michel-M. Campbell
Collaboration
Nicole Hamel
8 Lucie Brousseau, 2010 : Les liens de l’esprit
Journal Web
bimensuel
indépendant
qui vise à faire
connaître
des parcours
et des lieux
où se vivent
des expériences
humaines
et spirituelles
novatrices.
Itinéraire
Attentive aux nouveaux lieux de rencontre sociale, l’Église Unie a désormais
pignon sur rue dans le monde virtuel. Son site Internet Caféchange rassemble
une communauté de chercheurs de sens de tout âge et de tout horizon. [ p. 2 ]
par Gérard Laverdure
Perspectives
Conception graphique
Ghislain Bédard
Intériorité
Confession de foi
Nous vous invitons à prendre connaissance de la Confession de foi de l’Église
Unie du Canada : une parole inspirante, un souffle sacré, un élan plein
d’espérance pour notre monde et vers ce Dieu qui nous unit. [ p. 5 ]
présenté par l’Église Unie du Canada
Pour nous joindre
[email protected]
Pour vous abonner
www.sentiersdefoi.info
Abonnement gratuit.
ISSN 1715-8370
8 2010 Sentiers de foi
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Libres associations chrétiennes
L’éclosion des réseaux sociaux et des lieux de rencontre virtuels sera-t-elle à
l’origine du renouvellement des communautés d’individus? Stimulera-t-elle la
liberté d’association et la quête de nouveaux réseaux de sens? [ p. 3 ]
par Michel-M. Campbell
Photographie
Lucie Brousseau
Ce journal Web existe
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à Sentiers de foi,
97, rue de l’Aqueduc
Repentigny (Qc) J6A 4E2.
Un reçu de charité
sera émis.
Une « p’tite jase » bien réelle dans un café virtuel
Actualités
L’inclusivité des personnes homosexuelles fait son chemin
Les fêtes de la Fierté, à Montréal et à Québec, ont été l’occasion pour quelques
Églises inclusives de tisser des liens œcuméniques de fraternité. [ p. 6 ]
par Nicole Hamel
Ressources
Pour aller plus loin ou pour satisfaire votre curiosité
Des activités diverses et des ressources pertinentes. [ p. 7 ]
Annexe A
La Fondation Béati
Une ressource méconnue à votre disposition. [ p. A ]
sdf.info • 6 octobre 2010 • 2
Itinéraire
Une « p’tite jase » bien réelle dans un café virtuel
Attentive aux nouveaux lieux de rencontre sociale, l’Église Unie a désormais pignon sur rue dans le monde virtuel. Son
site Internet Caféchange rassemble depuis 2007 une communauté de chercheurs de sens de tout âge et de tout horizon.
par
Gérard Laverdure
sdf.info
Site Web Caféchange
cafechange.ca
Discussions animées sur
des thématiques d’ordre
spirituel et moral, ainsi
que sur les questions
fondamentales de
l’existence.
La question se pose à toutes les grandes organisations religieuses : comment rejoindre les
générations plus jeunes? Comment tenir compte de leurs préoccupations, de leur langage, de leur
culture? C’est ce chemin de rencontre avec les adultes de 30 à 45 ans que cherchaient les
responsables de l’Église Unie en 2005. Et la question clé fut : comment communiquent-ils entre
eux? Par le biais d’Internet, bien sûr! Messages textes sur les cellulaires de tout acabit, Facebook,
Twitter et compagnie. Au début de 2007, appuyé par des publicités dans les journaux et Internet,
le train part : le site Wondercafe est mis en ligne pour le Canada anglais et, à l’automne, c’est le
Caféchange pour les francophones qui déploie son espace. Le site anglophone (tout le Canada)
marche à plein et compte de 8 000 à 9 000 abonnés dont une centaine de réguliers qui écrivent. Le
site francophone, quant à lui, compte environ 270 abonnés, dont 8 réguliers, et de 300 à 400 visites
mensuelles. « Le Québec est plus allergique au religieux », me confie mon interlocuteur, M. Denis
Fortin, webmestre actuel du site. Ce qui est surprenant, c’est que la fréquentation du Café s’est
finalement répartie assez également entre trois tranches d’âge : ados et jeunes adultes, âge moyen
et plus vieux. Les interventions sont anonymes (par pseudonyme, pour la plupart); donc, ce n’est
pas trop compromettant ni trop engageant, mais le contact se fait, et le dialogue est amorcé.
M. Fortin présente ainsi l’approche du projet : « L’angle choisi fut celui du dialogue en toute
liberté, comme dans une conversation amicale autour d’un café. L’Église Unie veut être à l’écoute
des opinions avec respect. Pas de réponses toutes faites ni de leçons de morale. On partage notre
foi, nos questions et nos trouvailles entre adultes. » C’est d’ailleurs le ton qui est donné dès qu’on
met le pied dans la porte : « Bienvenue dans cet espace favorisant l’exploration et la discussion
sur des thématiques d’ordre spirituel et moral, ainsi que sur les questions fondamentales de
l’existence, dans un climat d’ouverture d’esprit. » Le discours sur Dieu y est en effet très varié et
instructif à propos des courants actuels de pensée.
« Nous avons réussi à créer une communauté de questionnement à l’esprit ouvert » dit M. Fortin.
En effet, s’il y a des contributions sous forme d’éditorial par des rédacteurs invités, les usagères et
usagers déterminent eux-mêmes les sujets en plaçant leurs opinions dans l’une des quatre sections
au choix : forums, blogues, éditorialistes et groupes. Voici, en date de la mi-septembre, le résultat
de la fréquentation des forums par catégorie :
Choisir un FORUM
Nombre de sujets
Nombre de messages
Culture populaire
35
204
Famille
22
177
Placotage
43
260
Politique
33
165
Questions mondiales
36
215
Relations
17
150
Religion et foi
104
879
Santé à tout âge
12
53
Échange d’idées
88
368
Campagne publique
5
56
Plusieurs des membres inscrits, dont la modératrice de l’Église Unie du Canada, Mardi Tindal (qui
a fait plusieurs vidéos intéressantes), tiennent des blogues qui présentent des informations, des
Lire la suite, page 3
sdf.info • 6 octobre 2010 • 3
Itinéraire (suite)
suggestions et des opinions sur divers sujets comme « les Chemins protestants », sur Radio-VilleMarie; « Les psaumes, vous aimez ça? » (81 lectures); « L’avortement plus grave que le viol »
(1 617 lectures), « Comment vous priez »; « Marie, ce qu’en disent les théologiennes »; « Taizé et
frère Roger »; « Le cardinal Ouellet »; etc. Des mots-clés ou tags permettent de s’y retrouver grâce
à un engin de recherche interne. On compte des centaines de visites.
Les éditoriaux, très populaires, présentent des réflexions plus élaborées par des auteurs invités sur des
sujets de l’actualité comme la catastrophe survenue en Haïti, l’œcuménisme au Québec, amour de
couple amour de Dieu, les temps forts liturgiques, la politique, la sagesse amérindienne, etc. auxquels
les passantes et passants au café peuvent réagir. Finalement, le Café se retrouve avec une « banque de
conversations » très riche et très variée, selon l’expression du webmestre qui la compare aux dazibaos,
ces murs d’expression populaire libre en Chine, mais sans le contrôle de l’orthodoxie des propos.
Caféchange est un « lieu de rencontre » simple et accueillant, une communauté de partage riche
des réflexions et des expériences de vie et de foi de ses participants et participantes. « Ce Café,
c’est la grâce de l’Évangile partagé gratuitement où tous ont leur place en toute liberté », confie
M. Fortin. En passant, le café y est très bon, œcuménique et équitable. Je le sais pour l’avoir goûté
plusieurs fois.
Perspectives
Libres associations chrétiennes
L’éclosion des réseaux sociaux et des lieux de rencontre virtuels sera-t-elle à l’origine du renouvellement des
communautés d’individus? Stimulera-t-elle la liberté d’association et la quête de nouveaux réseaux de sens?
par
Michel-M. Campbell
sdf.info
Il y a dix millénaires, l’invention de l’agriculture amène la sédentarisation. Les communautés
humaines se mesurent à la capacité de l’aller-retour aux champs cultivés. Le pays d’alors, c’est
moins le territoire national que la communauté locale, répartie autour du temple païen ou, plus tard
en chrétienté, de l’église paroissiale. Faute de pouvoir se déplacer beaucoup plus loin, on se trouve
nécessairement associés au clocher et aux rituels qui se déroulent sous son ombre. Dans cette
culture largement orale, le clerc (celui qui a accès au livre) fait autorité. Les rencontres
hebdomadaires obligatoires lui réservent exclusivement une parole largement inaccessible au
peuple : la messe en latin laisse peu de place à la parole vive du sermon.
L’invention de l’imprimerie au XVe siècle et l’accès à la lecture entraînent une liberté
d’interprétation, c’est-à-dire d’association d’idées, qui échappe au contrôle clérical. D’où la
création d’Églises réformées qui, il faut l’avouer, si elles se distinguaient des autres, gardaient
souvent un fort esprit de contrôle.
Bref, dans le même village, on pouvait avoir plusieurs communautés fortement liées à l’esprit de
leur clocher, avec toutes les inimitiés que cela pouvait entraîner.
L’électrification du monde (des transports à Internet) et ses corollaires (voyages, éducation,
mondialisation et mélange des cultures) font éclater le tricot serré qui liait l’individu au lieu et au
langage de sa tradition. Il pourra désormais être auteur, assumer ses propres associations
(interpersonnelles ou interprétatives) et se donner des lieux où il pourra faire sens.
Ainsi, on peut lire la Révolution tranquille comme le passage rapide, voire brutal, d’un monde
paysan à la postmodernité et le refus québécois du religieux comme l’impossibilité de concilier la
liberté nouvelle avec la rigidité des structures de la religion dominante. Il est toujours difficile de
Lire la suite, page 4
Perspectives (suite)
sdf.info • 6 octobre 2010 • 4
renoncer à l’autoritarisme, et les chrétiennes et chrétiens actuels, même à l’intérieur d’une même
confession, se définiront souvent par opposition les uns aux autres. Il y aura l’intégrisme, la
pastorale sociale, la spiritualité, etc. comme autant de réalités qui s’opposent plus ou moins.
L’aventure œcuménique qu’est l’Église Unie du Canada est un long effort pour dépasser les
querelles de clochers et permettre aux communautés comme aux individus chrétiens de célébrer la
richesse et l’actualité de la foi en Jésus Christ. La création de Caféchange s’inscrit d’ailleurs dans
ce mouvement.
Site Web Caféchange
cafechange.ca
Osons visiter ce site. Excepté un code d’éthique qui, comme pour tous ces genres de plateforme
informatique, assure la civilité des échanges et un cadre général qui permet de distinguer les niveaux
d’intervention (blogues, groupes, éditoriaux, forums), la structure n’a pas d’a priori autoritaire. Ni
position dogmatique ni demande d’appartenance confessionnelle ou d’identification. Même pas de
thématique imposée. Comme dans le meilleur de l’auberge espagnole, chacun et chacune y porte ses
préoccupations ou ses trésors, et on se met à la table commune ou par table d’affinités.
Voilà que le mystère de la foi se révèle dans la complexité de son incarnation : des relations
pratiques entre deux communautés à la discussion sur un ecclésiastique qui provoque, en passant
par les questions de la prière, de Marie, de la Bible ou du besoin de changer le monde. Et cela,
affranchi de l’impérialisme du littéraire qui caractérise jusqu’à présent la réflexion sur la foi,
s’exprime avec toute la richesse technique que permet le Web. Brisées les limites de l’encyclique
ou du traité de théologie pris dans l’abstraction de l’imprimé, de la langue de bois ou du
theologically correct. On peut y mettre sa photo ou son symbole. Qui vous parle d’un morceau de
musique vous permet de l’écouter aussitôt. Que la modératrice de l’Église Unie (l’homologue du
primat anglican) vous parle de la création, elle le fait en se promenant dans la beauté d’un jardin.
Mais toute personne de bonne volonté peut y mettre son grain de sel.
Jeunes et moins jeunes acculturés aux médias qui structurent notre monde peuvent réaliser que la
foi chrétienne n’est pas figée « hors du temps », mais peut s’incarner dans la culture actuelle.
D’aucuns protesteront que parler de communauté virtuelle représente un abus de langage et qu’il
y manque la proximité du corps. Pour leur donner complètement raison, il faudrait vérifier si les
communautés dominicales où le seul contact reste la poignée de main de l’échange de la paix
constituent vraiment une communauté d’incarnés.
De toute façon, il ne s’agit pas de substituer une forme de communauté à une autre. Plutôt de se
réjouir de ce que ce genre de lieux permet à des gens d’aujourd’hui un lieu d’échange réel sur les
multiples sentiers de la foi.
sdf.info • 6 octobre 2010 • 5
Intériorité
Confession
de
foi
DE L’ÉGLISE UNIE DU CANADA
Nous ne sommes pas seuls,
nous vivons dans le monde
que Dieu a créé.
Nous croyons en Dieu
qui a créé et qui continue à créer,
qui est venu en Jésus,
Parole faite chair,
pour réconcilier et renouveler,
qui travaille en nous et parmi nous
par son esprit.
Nous avons confiance en Dieu.
Nous sommes appelés à constituer l’Église :
pour célébrer la présence de Dieu,
pour vivre avec respect dans la création,
pour aimer et servir les autres,
pour rechercher la justice et résister au mal,
pour proclamer Jésus, crucifié et ressuscité,
notre juge et notre espérance.
Dans la vie, dans la mort,
et dans la vie au-delà de la mort,
Dieu est avec nous.
Nous ne sommes pas seuls.
Grâces soient rendues à Dieu.
sdf.info • 6 octobre 2010 • 6
Actualités
L’inclusivité des personnes homosexuelles fait son chemin
Les fêtes de la Fierté, à Montréal et Québec, ont été l’occasion pour quelques Églises inclusives de tisser des liens
œcuméniques de fraternité.
Pendant les fêtes de la Fierté des 14 et 15 août 2010 à Montréal et lors de la fête Arc-en-ciel à
Québec, du 3 au 5 septembre, deux paroisses francophones inclusives1 de l’Église Unie du Canada
au Québec ont affiché leur présence à ces journées communautaires. Les animateurs du groupe
chrétien Foi et fierté2 (Église Unie Saint-Jean de Montréal) et les animatrices du groupe
interspirituel Spiritualité Entre-nous3 de Québec s’étaient rencontrés d’abord pour planifier une
Nicole Hamel retraite œcuménique, comme cela se fait en Europe. Ils ont plutôt décidé de s’intégrer à des
est agente de pastoral événements liés à la Fierté afin de créer des liens et de mettre en œuvre des alliances.
par
Nicole Hamel
collaboration spéciale
laïque pour le ministère
lié à l'inclusivité à l'Église
Unie Saint-Pierre à
Québec et est
coprésidente du
mouvement Affirm
United/S'affirmer
ensemble. Aussi, elle est
auteure des livres :
L'amour entre femmes
dans l'Église catholique,
Éd. AdA, 2002 et
Du caillou au séquoïa,
quand serrent les maux,
Éd. Mécène, 2007.
Fierté à Montréal
Depuis 7 ans, l’église catholique Saint-Pierre Apôtre assure une présence pastorale pendant la
journée communautaire de la Fierté. Pour une première fois, un membre de l’Église Unie SaintJean a partagé un stand avec la contact francophone de S’Affimer ensemble/Affirm United4 pour
rendre enfin visible l’accueil inclusif de leur Église protestante. Nous avons eu toutes sortes de
réactions. Au début de la journée, une femme, la croix au cou, s’est présentée au kiosque en disant
qu’elle s’en allait à l’église « prier pour nous ». D’autres passants repartaient tout joyeux avec des
feuillets d’information sur les réalités des orientations sexuelles et des identités de genre minoritaires. Une ex-religieuse m’a partagé ses déceptions en lien avec son Église. Comme les blessures
prennent du temps à se cicatriser! Le groupe Foi et fierté de l’Église Unie a réuni au parc
Lafontaine des gens de Québec, autant catholiques que sympathisants de l’Église Unie. Fait à
noter, quelques personnes de la confession évangélique, soucieuses d’un accueil plus inclusif dans
Pour information : leur confession chrétienne ont aussi répondu à l’invitation.
www3.sympatico.ca/
La paroisse Saint-Pierre Apôtre a été la seule Église francophone à avoir invité d’une façon
rejnic et
www.affirmunited.ca spéciale et publique les gens à célébrer la diversité. Des centaines de personnes avaient accepté
l’invitation à célébrer les couleurs de l’arc-en-ciel bien en vue dans le chœur de l’église. J’ai été
touchée lorsque l’animateur a souligné la présence de quelques membres de l’Église Unie. Malgré
un discours catholique officiel homophobe, la paroisse Saint-Pierre-Apôtre, soutenue par les
Oblats et les autorités diocésaines, est reconnue pour son accueil inconditionnel.
1. Sur une possibilité de
3000 paroisses,
seulement 70 ont
officialisé leur
engagement en ce sens.
Grâce au Réseau des croyants et croyantes pour l’inclusivité (RéCI)5, le groupe Beleive6 de St. James
United Church invitait les gens à marcher avec eux lors du défilé de la Fierté. Les gens de Believe
offraient des « câlins gratuits ». Plusieurs ont fait des gestes d’approbation en voyant notre bannière.
Fierté à Québec
2. www.egliseunie
saintjean.org/
activit%C3%A9s/groupefoi-et-fiert%C3%A9/
Pendant la fête Arc-en-ciel à Québec, plusieurs liens de réseaux et d’amitié se sont tissés. Un pasteur
de la région de Montréal a partagé l’accueil à la table de Spiritualité entre-nous. Une travailleuse
sociale de Toronto m’a parlé en français et un projet de rencontre s’est dessiné. Aussi, pour une
3e année, nous avons célébré les avancées en lien avec l’inclusivité. J’ai été très touchée par les propos
3. www.egliseunie.org/
du pasteur disant que la table du stand au carré d’Youville où nous avons accueilli les gens était au
paroisses/st-pierre/
entre_nous.html moins aussi importante que celle autour de laquelle nous nous apprêtions à partager le pain et le vin...
4. www.facebook.com/
saffirmer.ensemble
5. Un réseau
œcuménique et
interreligieux ouvert
aux croyants et
croyantes LGBT :
http://reseaucroyants
inclusivite.blogspot.com/
6. www.facebook.com/
ST.JAMESBELIEVE
Après avoir participé au repas organisé par GLBT Lutte à l’homophobie, nous nous sommes
rassemblés pour une rencontre œcuménique. Grâce à l’accueil chaleureux du curé Pierre Gingras
de la paroisse catholique Saint-Jean-Baptiste, une vingtaine de personnes se sont réunies pour
échanger sur le thème : « Comment je nourris ma spiritualité dans un esprit œcuménique ». Un
participant a raconté comment, tout en fréquentant l’Église catholique, il enrichit sa spiritualité
avec des méditations orientales. Même si quelques personnes ont ouvertement exprimé leurs
souffrances passées en lien avec l’Église catholique, la rencontre n’a pas bifurqué vers une critique
stérile. L’accueil du groupe et la libération par l’expression franche ont semblé être apaisant pour
ces personnes. Pour ma part, les lieux de collaboration avec l’Église catholique, pendant ces temps
de réjouissance et de sensibilisation, furent un baume apaisant sur mes cicatrices.
sdf.info • 6 octobre 2010 • 7
Ressources
Pour aller plus loin ou pour satisfaire votre curiosité
[ Lire ]
Mourir dans la dignité
Mémoire de l’AECQ
[ Participer ]
Développement et paix
Campagne d’automne 2010
[ Participer ]
Veillée spirituelle pour la paix
Une célébration interreligieuse
Un mémoire a été récemment déposé
par l’Assemblée des évêques catholiques du Québec à la Commission sur
la question de mourir dans la dignité
(qui poursuit présentement ses travaux
au Québec). La lecture de ce mémoire
est suggérée par M. Marco Veilleux,
chargé de projet au Centre Justice et
foi. Pour ce faire, consulter le site :
http://www.eveques.qc.ca/documents/
2010/20100930.html
L’EAU pour tous,
une question de justice.
Zone libre d’eau embouteillée.
À l’occasion du 24e anniversaire de la
rencontre interreligieuse d’Assise,
des représentants et représentantes
des communautés spirituelles autochtone, bahaïe, bouddhiste, chrétienne,
hindoue, juive, musulmane et sikhe se
réunissent dans un esprit d’ouverture
et d’amitié afin d’exprimer leur
attachement aux valeurs de paix et de
solidarité. Les membres de chaque
communauté partageront des prières
et des chants sacrés propres à leur
tradition. Le tout sera ponctué de
silence et de recueillement. La
célébration aura lieu le samedi 23
octobre 2010 de 19 h à 21 h (accueil à
partir de 18 h 30) à l’église Holy
Family Parish, 7355, rue Lajeunesse,
à Montréal (métro Jean-Talon).
[ Lire ]
Tenir deux lampes allumées
Texte de Claude Lacaille, pmé
« On me demande souvent d’expliquer
la démarche que je fais, à savoir de lire
la Bible à la lumière de l’actualité, ou
encore de lire l’actualité à la lumière de
la Bible. Je vous propose ce mois-ci
une réflexion sur les deux lampes qui
éclairent mon sentier : l’analyse sociale
et la méditation de la Bible. »
Ce texte éclairant de M. Claude
Lacaille, pmé, est disponible sur le site
d’Interbible, le portail biblique
francophone.
www.interbible.org
Agissez pour créer des zones libres
d’eau embouteillée! Dans le monde
entier, les compagnies d’eau embouteillée privatisent des sources d’eau
d’une importance vitale. À cause de
cette situation, les petits agriculteurs et
la population locale en sont privés.
Luttez pour le droit à l’eau en
contribuant à créer des zones libres
d’eau embouteillée.
Encouragez les villes, les provinces et
les institutions fédérales à devenir des
zones libres d’eau embouteillée.
Invitez votre député, votre membre
du Parlement provincial ou votre
membre de l’Assemblée législative,
votre municipalité, votre commission
scolaire ou votre diocèse à créer des
zones libres d’eau embouteillée dans
toutes les institutions publiques où on
trouve de l’eau du robinet potable.
Pour information, visitez le site :
http://www.devp.org/devpme/fr/
education/educationcampaign-fr.html
Pour signer la pétition, visitez :
http://www.devp.org/devpme/fr/
education/takeaction-fr.html
Cet événement est présenté par le
Centre de paix de Montréal, Religions
pour la paix et la Famille franciscaine. Pour information, joignez le
514 933-4243. Ou visitez le site :
www.veillees-spirituelles.ca
[ Célébrer ]
Le journal Sentiersdefoi.info
fêtera 5 ans de parution
le 12 octobre 2010
Surveillez le prochain numéro du 20
octobre pour en savoir plus sur les
activités qui souligneront l’événement. Bon automne!
Prochaine parution du journal : 20 octobre 2010
Le journal Sentiersdefoi.info est une publication de Sentiers de foi, OSBL autonome et indépendant d’inspiration chrétienne fondé en 1984,
qui a pour mission d’être un espace favorisant la connaissance, la reconnaissance et la collaboration des sentiers de foi au Québec,
dans une perspective chrétienne inscrite dans le pluralisme actuel.
ISSN 1715-8370 | 8 2010 Sentiers de foi | Tous droits réservés
Ce journal, publié uniquement sur le Web, est de ce fait entièrement écologique. Imprimez-le et diffusez-le en pensant à l’environnement.
sdf.info • 6 octobre 2010 • A
Annexe
La Fondation Béati
Une ressource méconnue à votre disposition pour soutenir les projets pastoraux de votre communautés, de votre réseau,
de votre groupe qui privilégient la dimension sociale et la recherche contemporaine de sens.
Fondation privée, active depuis près de 20 ans au Québec, Béati a soutenu plusieurs centaines de
groupes au cours des années. Sa mission : contribuer à la construction d’un monde plus juste en offrant
soutien financier et accompagnement aux organismes préoccupés de répondre de façon audacieuse aux
enjeux sociaux et pastoraux de leur milieu.
Le journal Sentiersdefoi.info partage avec la Fondation Béati une complicité de fond. C’est
pourquoi nous avons établi un partenariat pour présenter des groupes soutenus par Béati et annoncer son
échéancier de présentation de projets. Comme le programme pastoral est celui qui est le moins sollicité,
la Fondation Béati veut le porter à votre attention.
Visée du programme pastoral
À la lumière de l’analyse que nous faisons de la situation pastorale au Québec et :
• considérant la fragilisation des initiatives pastorales témoignant d’une foi socialement engagée;
• considérant le défi de nommer, chez de nombreux groupes d’inspiration chrétienne, la dimension
sociale de leur foi;
• considérant l’importance de favoriser le maintien d’un courant d’Église au Québec qui témoigne
d’un souci pour le développement d’une société plus juste et solidaire;
la Fondation, pour les années 2006-2010, se donne comme visée :
de contribuer au développement et à la consolidation de communautés, de réseaux et de groupes
impliqués, au nom de l’évangile, dans les enjeux sociaux de leurs milieux, incluant la recherche
contemporaine de sens.
PRIORITÉ P1 – Béati soutient des initiatives qui permettent le développement et/ou la consolidation
d’espaces communautaires alliant interventions sociales et spirituelles.
PRIORITÉ P2 – Béati soutient des initiatives qui permettent à des communautés chrétiennes (paroissiales ou autres) de se solidariser et de s’impliquer activement dans les enjeux
sociaux de leur milieu.
PRIORITÉ P3 – Béati soutient des initiatives qui permettent de développer de nouveaux espaces
d’intériorité (rassemblements, célébrations, espaces de réflexion, d’échanges, etc.)
contribuant à s’approprier et à nommer une spiritualité de l’engagement social.
PRIORITÉ P4 – Béati soutient des démarches de recherche de sens qui intègrent l’ouverture à la
dimension sociale de la foi.
De plus amples informations sur les quatre priorités du programme social et les formulaires sont
disponibles sur le site Web : www.fondationbeati.org Ou encore, téléphonez au 450 651-8444.
• Dates de dépôt des projets à la Fondation Béati •
le 31 mars, le 31 août et le 15 décembre
2005-2010
5
ans de marche
dans les pas du vent
de
foi.info
Sentiers
www.
Vol. 6 no 3 / 20 octobre 2010
8 Lucie Brousseau, 2010 : La lumière se laisse trouver
Journal Web
bimensuel
indépendant
qui vise à faire
connaître
des parcours
et des lieux
où se vivent
des expériences
humaines
et spirituelles
novatrices.
Comité éditorial
Rédacteur en chef
Gérard Laverdure
Secrétaire de rédaction
Ghislain Bédard
Représentant du C.A.
Michel-M. Campbell
Itinéraire
Collaboration
David Fines
Perspectives
Pendant 38 ans « derrière les barreaux », André Patry, alias le père Jean, a été,
en tant qu’aumônier à la prison de Bordeaux, un témoin de l’amour
inconditionnel du Christ. [ p. 2 ]
par David Fines
Pour nous joindre
[email protected]
Pour vous abonner
www.sentiersdefoi.info
Abonnement gratuit.
Intériorité
Le quotidien fait prière
Un message sur le répondeur... qui en dit long. Et un texte de Matthieu qui en
dit tout autant : « J’étais au cachot. Vous êtes venus me voir. » [ p. 4 ]
présenté par Michel-M. Campbell
Actualités
Il élève les humbles
Le succès des fêtes autour de la canonisation du frère André à l’oratoire SaintJoseph : n’était-ce là qu’une simple expression folklorique de la foi? [ p. 5 ]
par Gérard Laverdure
Ce journal Web existe
uniquement grâce
à votre générosité.
Faites parvenir votre don
à Sentiers de foi,
97, rue de l’Aqueduc
Repentigny (Qc) J6A 4E2.
Un reçu de charité
sera émis.
ISSN 1715-8370
8 2010 Sentiers de foi
Tous droits réservés
Dieu fait chair dans le pauvre corps banal
Le regard d’amour de Dieu se fait sentir dans les réalités les plus quotidiennes
de notre vie humaine : par le message d’un répondeur téléphonique jusqu’au
trou d’un établissement de détention. [ p. 3 ]
par Michel-M. Campbell
Photographie
Lucie Brousseau
Conception graphique
Ghislain Bédard
« Dieu t’attendait en prison! »
Vigile au parc de l’Espoir
Des jeunes font mémoire de la trop brève vie de seize de leurs semblables qui
se sont suicidés, victimes de moqueries, de harcèlement et d’agressions. [ p. 6 ]
par Gérard Laverdure
Fêtons 5 ans
Cinq ans, ça se fête!
Il y a 5 ans, le 12 octobre 2005, paraissait le premier numéro de notre journal
Web. Nous voulons célébrer cet anniversaire en explorant de nouveaux moyens
d’interagir ensemble... [ p. 7 ]
sdf.info • 20 octobre 2010 • 2
Itinéraire
« Dieu t’attendait en prison! »
Pendant 38 ans « derrière les barreaux », André Patry, alias le père Jean, a été, en tant qu’aumônier à la prison de
Bordeaux, un témoin de l’amour inconditionnel du Christ.
par
David Fines
collaboration spéciale
Le rév. David Fines est
pasteur de l’Église Unie
du Canada, président du
Synode MontréalOttawa. Il a été
rédacteur en chef de la
revue Aujourd’hui Credo,
le mensuel francophone
de l’Église Unie du
Canada.
D’aussi loin qu’il se souvienne, M. André Patry a toujours voulu servir les marginaux, et c’est
auprès de détenus qu’il répondra à cet appel. « Je suis entré chez les Trinitaires... pour aller en
prison! confesse-t-il. C’est une communauté qui allie la dimension contemplative et l’action
auprès des rejetés, des paumés; ça m’a fasciné! Jeune, j’avais un attrait pour le monde marginal.
Au collège, comme responsable du journal étudiant, j’interviewais des prostituées, des gars de
gang. » André entre donc en communauté en 1962. « Comme je voulais aller en prison, j’ai fait
des études en pastorale spécialisée, j’ai suivi des cours en criminologie. » Peu de temps après son
ordination comme prêtre, un poste d’aumônier s’ouvre à la prison de Bordeaux, le lieu de détention
le plus dur au Québec. « C’était en janvier 1969; j’avais 26 ans. Comme prêtre, j’avais fait des
remplacements au Mont Saint-Antoine [maison d’accueil pour les jeunes délinquants] et, parfois,
j’allais en prison faire des animations catéchétiques. »
Qui est Dieu pour les personnes en-dedans? « C’est un Dieu punitif, terrible; ils se disent : "Dieu
m’a puni parce que j’ai fait du mal." Moi, je répondais : "Dieu ne t’a pas puni, mais t’attendait
en prison." Parler de l’infinie miséricorde d’un Dieu, leur dire que le pardon de Dieu est un don
gratuit, les surprenait toujours. Ils avaient une soif d’entendre parler d’un Dieu présent, qui est
essentiellement amour, qui ne vient pas nous guetter, mais cherche la brebis perdue jusqu’à ce
qu’il la retrouve. Des détenus disaient : "Je suis cette brebis!" »
On ne peut passer 38 ans derrière les barreaux1 et ne perdre ni la foi en Dieu ni l’espoir en
l’humain sans des convictions profondes. « La première chose sur laquelle j’ai basé toute mon
intervention, ça a été la dignité de la personne humaine. J’ai toujours essayé que soit respectée la
personne que j’avais devant moi. Ce sont des êtres qui n’ont pas d’apparence, qui ne sont rien, qui
n’ont rien, et en même temps qui sont d’une richesse infinie. On ne perd jamais sa dignité, c’est
une partie ontologique de l’humain. La deuxième chose, c’est qu’être aumônier en prison a été une
véritable grâce dans ma vie, un cadeau de Dieu d’une rare valeur, un Dieu dont j’ai entendu
l’appel dans chaque prisonnier rencontré, un Dieu lui-même prisonnier de nos églises par les
règles et les rituels. »
Et bien sûr le fameux chapitre 25 de l’Évangile de Matthieu – le jugement dernier – est un vibrant
appel à accueillir l’autre. « L’autre, c’est le Christ; c’est ce dont il faut prendre conscience : que
chaque personne qui se présente à moi est la personne du Christ. "Aimez-vous les uns les autres"
se vit dans l’amour de Dieu, avec le cœur de Dieu. Combien de fois j’ai connu la grâce de voir
l’œuvre de l’amour de Dieu dans une personne! Les principes de l’amour inconditionnel, c’est de
ne pas juger les personnes qui ont tellement déjà été jugées; de ne jamais poser de questions, de
respecter le droit au secret, ils ont déjà tellement subi d’interrogatoires et, souvent, c’est ce respect
qui permet le véritable partage; de ne jamais cautionner le mal, mais de chercher le bien dans la
personne; et de garder les liens au cas où ils pourraient avoir envie de changer. » Et André Patry
2. L’organisme est situé ajoute qu’à l’amour, il faut ajouter un bon sens de l’humour.
au 7535 A, rue SaintEt même à la retraite, M. André Patry n’en a pas fini avec les détenus. Il a ouvert Oasis-liberté2.
Hubert, à Montréal. Il
loge au-dessus de « Nous y avons des activités, des célébrations eucharistiques, des groupes de discussion, des
l’ancien café des Trois soirées d’échanges, des repas communautaires. Ce sont des détenus qui l’ont demandé; ils avaient
colombes, transformé en vécu des expériences spirituelles et, une fois sortis, n’avaient pas de lieu pour poursuivre leur
café chrétien. cheminement dans la foi. Plusieurs anciens viennent y faire de l’animation. On fait des visites dans
514 272-4046 les hôpitaux, de l’accompagnement des mourants, des messes aussi. »
1. Titre du livre que lui a
consacré France
Paradis, paru aux
éditions Novalis, 2008,
152 p. Vient de sortir
aussi une troisième
impression du livre en
version de poche
(octobre 2010) chez le
même éditeur.
sdf.info • 20 octobre 2010 • 3
Perspectives
Dieu fait chair dans le pauvre corps banal
Le regard d’amour de Dieu se fait sentir dans les réalités les plus quotidiennes de notre vie humaine : par le message d’un
répondeur téléphonique jusqu’au trou d’un établissement de détention.
par
Michel-M. Campbell
sdf.info
Quoi de plus banal et parfois de plus frustrant qu’un message enregistré de répondeur
téléphonique? Pourtant, les quelques mots qu’André Patry ajoute aux propos fonctionnels
habituels (« pas là, laissez message, répondrai ») valent la peine qu’on les relise généreusement
en donnant à chacun tout son sens1.
D’un ton calme, presque solennel, il vous fait un vœu qui vous renvoie, comme toute personne, à
notre condition humaine. Tout d’abord, pour aujourd’hui, il vous souhaite la paix. Mieux : de goûter
la paix, d’en jouir. Ainsi, il précise que la paix n’est ni chose ni abstraction, mais un bien qu’appelle
notre corps violenté dans les tourbillons des tensions personnelles ou politico-sociales. Ensuite, il
reconnaît notre identité de marcheurs et marcheuses et nous souhaite de rencontrer un regard
d’amour, sans lequel la route risque d’être vouée à la solitude, pis, au non-sens et à l’indifférence.
Que 17 mots. Rien d’autre. Mais ici, la réponse mécanique, la situation banale, voire frustrante, de
buter à l’absent débouche sur d’autres dimensions. Comme un mandala, un résumé d’un monde
précaire et violent, mais aussi porteur d’une anthropologie du salut. Le message s’élève presque
en prière : l’espérance qu’un regard aimant nous encouragera à continuer la marche. Notons
qu’André Patry ignore, mais respecte, les convictions profondes de la personne qui lui téléphone.
Il s’abstient de références religieuses autres que des valeurs partagées : le goût, la route, la paix,
l’expérience du regard significatif.
Pourtant, qui fréquente l’écriture y trouvera l’écho des Béatitudes2. Même structure : un monde en
creux, en quête et, aussi, en bosse; une possibilité d’être sauvé par l’autre; un monde ouvert dont
les acteurs se définissent avant tout par leur humanité (avoir faim, chaud, froid; pleurer... être
capable de vêtir le corps nu ou de visiter en prison).
Voilà l’articulation de base de la spiritualité, de l’approche d’André Patry, à la ville comme à la
prison. On est loin du fonctionnaire de Dieu qui s’épuise à mesurer les péchés ou à maintenir le
conformisme liturgique. Loin du discours autoritaire paranoïaque qui défend les principes sans se
soucier des blessures qu’il inflige alors aux pauvres gens. L’approche de Patry se veut incarnée,
respectueuse de la liberté de l’autre, consciente de la complexité douloureuse de la situation. « Ne
pas juger, ils ont tellement été jugés... ne jamais poser de questions, respecter le droit au secret,
ils ont déjà tellement subi d’interrogatoires3. »
1. Le texte du message
téléphonique est
présenté dans la
chronique Intériorité,
p. 4.
Chez lui, le don gratuit de l’infinie miséricorde de Dieu pour chacun et chacune précède
éminemment la loi morale. Par exemple, le dialogue suivant4 :
Détenu : « Père Jean5, pourquoi vous ne me parlez jamais d’amender ma vie? » Réponse :
« Est-ce que tu en changerais si je t’en parlais? » Riposte immédiate : « Pour sûr que
non! » Conclusion du père : « Alors à quoi ça servirait d’en parler? »
Pour le père Jean/André Patry, ce qui compte, ce qu’il faut préserver, c’est d’abord le lien, car c’est à
partir de lui – de ce regard d’amour – qu’on pourra accompagner l’autre quand, dans sa liberté, il
entreprendra le difficile changement de vie. Qu’on est loin de certaines logiques d’« ex-communion »
où le prodigue affamé doit montrer sa carte de conformité pour avoir accès à la table du Père. Pour
3. Voir p. 2. Patry, Dieu n’attend pas qu’au ciel, mais souvent, au cœur ou au fond de la prison. Il faut savoir le soin
4. Adapté du livre 38 ans tout particulier qu’il prenait, malgré la fatigue des lourdes cérémonies de Noël ou de Pâques, à visiter
derrière les barreaux les gars au trou, c’est-à-dire la prison dans la prison, pour les cas de crises graves.
2. Matthieu 5, 3-12;
Luc 6, 20-23; ou le
jugement dernier en
Matthieu 25, 31-46.
de France Paradis,
Novalis, 2008.
5. Les détenus
s’adressaient souvent à
André Patry sous son
nom de religieux.
Jean Patry s’alimente à la méditation et à l’eucharistie quotidienne. Il fréquente aussi
régulièrement les sœurs de mère Teresa, les Petites Sœurs de Jésus (Foucault) ou les Carmélites (la
petite Thérèse, Edith Stein, comme celles du Carmel de Montréal). Des femmes qui trouvent Dieu
chez les plus pauvres ou derrière les barreaux du cloître. Car notre Dieu se fait aussi chair dans le
corps banal des plus pauvres comme des prisonniers.
Intériorité
Le quotidien
fait prière
Bonjour,
Je regrette de ne pouvoir répondre
à votre appel.
Laissez-moi vos coordonnées
et je vous rappellerai.
Je vous souhaite,
aujourd’hui,
de goûter la paix
et de rencontrer sur votre route
un regard d’amour.
Message enregistré
sur le répondeur d’André Patry
sdf.info • 20 octobre 2010 • 4
Alors viendra
le Fils de l’homme
Alors viendra le Fils de l’homme dans sa gloire.
Les messagers du Seigneur feront cercle autour de lui,
et il prendra place sur son siège de gloire.
Les peuples se rassembleront devant lui.
Et, comme le berger sépare brebis et chèvres,
il les départagera.
Les brebis iront à sa droite, les chèvres à sa gauche.
Aux brebis qui sont à sa droite, le roi dira :
« Vous voici, vous que mon Père a reconnus.
Recevez l’héritage du Règne qui vous est réservé
depuis la fondation du monde.
J’avais faim. Vous m’avez nourri.
J’avais soif. Vous m’avez donné à boire.
J’étais un étranger. Vous m’avez ouvert votre porte.
J’étais sans vêtements. Vous m’avez vêtu.
J’étais malade. Vous avez veillé sur moi.
J’étais au cachot. Vous êtes venus me voir. »
Et les justes lui diront :
« Maître, quand cela?
Nous t’aurions vu affamé, et nous t’aurions nourri?
Nous t’aurions vu assoiffé, et t’aurions donné à boire?
Mais quand?
Nous t’aurions vu étranger,
et t’aurions ouvert notre porte?
Sans vêtements, et nous t’aurions vêtu?
Mais quand?
Nous t’aurions vu malade ou dans un cachot,
et serions allés te rendre visite? »
Le roi répondra :
« Croyez-en ma parole,
chaque fois que vous avez agi de la sorte
avec le plus petit de mes frères,
c’est à moi que vous l’avez fait. »
Mt 25, 31-40
La Nouvelle Traduction de la Bible, Bayard, 2001
sdf.info • 20 octobre 2010 • 5
Actualités
Il élève les humbles
Le succès des fêtes autour de la canonisation du frère André à l’oratoire Saint-Joseph : n’était-ce là qu’une simple
expression folklorique de la foi?
par
Gérard Laverdure
sdf.info
Son humilité et sa bonté illuminent son visage et déterminent même son attitude corporelle.
Comme si l’Amour avait moulé son corps. Les photos d’époque en sont témoins et la petite statue
qui le représente dans la basilique de l’oratoire Saint-Joseph est éloquente à propos de ces qualités
intérieures. Notre cher saint frère André me rappelle Marie et son magnificat, les humbles et
courageuses fondatrices de notre pays et le « service inlassable des pauvres dans l’Amour » qui a
marqué leur vie. Le frère André nous rappelle aussi tous ces humbles travailleurs et toutes ces
vaillantes travailleuses qui, de la campagne à la ville, ont défriché, labouré, semé tout en portant
des brassées d’enfants pour les uns, bâti routes, ponts et usines et se sont éreintés à suivre le rythme
des chaînes de montage jusqu’à y laisser leur santé pour les autres. Tous les « Canadiens français »
de l’époque avaient une grande dévotion, une grande confiance au frère André et à saint Joseph,
sans oublier à la Vierge Marie, à la bonne sainte Anne et à quelques autres. Ils y puisaient force,
courage et espérance dans une vie de durs labeurs, d’insécurités et d’humiliations. La foi comme
le royaume de Dieu, c’est une affaire de famille, et en famille on se tient et on s’entraide.
Il est heureux que les autorités ecclésiales reconnaissent les œuvres de Dieu et la sainteté dans
la vie de cet humble serviteur. Nuit de prière à la crypte de l’Oratoire, le 17 octobre, où il
manquait de place, grande fête à Rome le même jour et au stade olympique le samedi 30 octobre
prochain. Il y a longtemps que la foi populaire, le sensus fidei avait tranché la question. On
reconnait un arbre à ses fruits et ils furent abondants dans la vie du frère André : prière confiante
à saint Joseph, accueil, adoration nocturne, écoute des souffrances et des angoisses de tous ses
concitoyens et concitoyennes, visites des pauvres et des malades; une vie comblée de grâces. On
croirait lire des pages d’Évangile. Espérons que de remettre ainsi le bon frère André sur la carte
ou à l’ordre du jour nous redonne le sens des priorités dans nos vies, sinon le vrai sens de nos
vies tout simplement.
Voici ce qu’en dit M. Marco Veilleux, qui a passé la nuit à l’oratoire Saint-Joseph : « C’était un
beau moment d’Église "populaire" et d’Église "multiculturelle". Tous ces nouveaux arrivants qui
se sont approprié le personnage du frère André : c’est quand même extraordinaire!
J’ai donc passé cette nuit assis par terre (faute de places assises, tellement il y avait de monde),
entouré d’une foule de gens de tous les horizons, de toutes les générations. Beaucoup de gens
simples, de pauvres, de petits : ceux que le frère André a toujours attirés. L’ambiance était
extraordinaire : la paix, la ferveur, la solidarité... Une lumière dans la "Grande Noirceur" ecclésiale actuelle où l’on entend parler seulement de déclin, de pédophilie et d’autres crises! Enfin,
une vraie fête de la foi, simple et humble, autour d’un homme du peuple, aimé par le peuple. Et la
joie d’être ensemble, tout simplement, en Église. Tous rassemblés dans la diversité, pour prier une
nuit entière, chanter et fêter, finalement, ce qu’affirme le magnificat : "Il élève les humbles..."
Dans une société où ces "humbles" sont trop souvent méprisés et ignorés, c’était aussi un beau
témoignage évangélique... Non, si nous savons "voir", ce n’était pas là que du "folklore"... »
sdf.info • 20 octobre 2010 • 6
Actualités
Vigile au parc de l’Espoir
Des jeunes font mémoire de la trop brève vie de seize de leurs semblables qui se sont suicidés, victimes de moqueries,
de harcèlement et d’agressions...
Nous étions une cinquantaine ce soir-là, le mercredi 6 octobre dernier, sous la pluie battante, avec
nos chandelles, au parc de l’Espoir dédié aux personnes décédées du VIH/sida, à l’angle des rues
Sainte-Catherine et Panet à Montréal. Nous y étions pour faire mémoire particulièrement de 16
jeunes gars et filles – leur photo était affichée – qui se sont suicidés cette année, au Canada et aux
États-Unis, à la suite de moqueries, de harcèlement et d’agressions dont ils ont été victimes à cause
Gai Écoute de leur orientation sexuelle principalement, en plus de leur apparence et de leur habillement. Des
1 888 505-1010
jeunes en bas de 21 ans dont trois de 13 ans et quatre de 15 ans.
514-866-0103
par
Gérard Laverdure
sdf.info
www.gai-ecoute.qc.ca
À lire
« L’homosexualité nous
interpelle »,
revue Prêtre et pasteur,
juillet-août 2010.
Revue disponible à :
[email protected].
Coût : 5 $ poste incluse.
1. « Le GRIS-Montréal
(Groupe de recherche et
d’intervention sociale)
est un organisme
communautaire sans but
lucratif dont la mission
générale est de favoriser
une meilleure
connaissance, en milieu
scolaire, des réalités
homosexuelles et de
faciliter l’intégration des
gais, des lesbiennes et
des bisexuels dans la
société. Comme pour la
lutte contre le racisme,
l’intégration d’une
minorité dans la société
ne peut se faire qu’en
s’efforçant d’éliminer
l’ignorance et
les préjugés. »
www.gris.ca
Quelque 16 chandelles plantées dans un carré de sable, disposées sous un chapiteau blanc au
centre de la place, vacillaient au vent, fragiles comme nos vies. Fait émouvant : une grande
majorité de jeunes composait ce rassemblement. L’organisateur de ce rassemblement, Jean-Pierre
Roussain, ami de la Maison Plein Cœur, et Pierre-Olivier Laliberté, représentant de GRISMontréal1, nous firent comprendre qu’il y avait encore beaucoup à faire pour contrer
l’homophobie. La moitié des écoles du Québec refuse de placer dans l’agenda des étudiants et
étudiantes le numéro de téléphone de la ressource Gai Écoute. Après avoir nommé chacun des
jeunes disparus et évoqué les circonstances ayant conduit à leur suicide, nous avons gardé
quelques minutes de silence. Nos chandelles s’éteignaient souvent sous le vent comme pour nous
rappeler qu’il est facile de perdre la motivation ou d’oublier et qu’il faut se rallumer sans cesse
les uns aux autres. Ce que fit cette rencontre.
J’étais très fier de faire partie de la paroisse inclusive Saint-Pierre-Apôtre qui travaille
intelligemment à l’élimination de cette arme mortelle qu’est l’homophobie, et d’autres formes
d’exclusion sociale. Chacun et chacune peut faire sa part dans son milieu en informant les gens,
en étant à l’écoute des jeunes en détresse, en intervenant auprès d’eux, en s’affirmant contre les
blagues et les insultes homophobes qu’on laisse trop souvent passer par négligence ou manque de
courage. Les religions sont généralement productrices d’homophobie, mais depuis quelques
décennies, les recherches des sciences humaines et les relectures contextuelles de la Bible ont
conduit plusieurs Églises chrétiennes à développer un autre discours et d’autres pratiques au nom
même de l’Évangile.
La paroisse Saint-Pierre-Apôtre a produit des articles sur la question en lien avec la foi chrétienne
pour aider les plus vieux et les plus vieilles qui ont des « références morales religieuses anciennes
fortes » à se resituer quant à cette question controversée. Pour ces communautés, être homosexuel
n’est pas une tare, ni une maladie, ni un péché. Le cœur de la pratique chrétienne est l’amour des
autres et de soi. Jésus ne passait pas à la loupe la vie sexuelle de ses interlocuteurs. Il allait droit à
l’essentiel : la personne. Il a accueilli à bras ouverts tous les marginalisés, exclus et blessés par les
jugements et les condamnations des hommes religieux de son temps.
sdf.info • 20 octobre 2010 • 7
Fêtons 5 ans
Cinq ans, ça se fête!
Il y a 5 ans, le 12 octobre 2005, paraissait le premier numéro de notre journal Web (ou webzine). Nous voulons célébrer
cet anniversaire en explorant de nouveaux moyens d’interagir ensemble pour nous soutenir mutuellement sur les sentiers.
par
Michel-M. Campbell
président de
Sentiers de foi
Que de chemin parcouru. 5 volumes. 78 numéros. Grâce au clavier-à-écran, pour ne plus dire
au bouche-à-oreille, nous comptons maintenant plus de 1050 abonnés. Même si chacun et chacune
ne lit pas chaque journal, nous avons des numéros qui sont fréquentés par plus de 1300 personnes.
Certains de nos abonnés, en effet, font parvenir certains numéros à des gens de leur réseau
intéressés par le sujet. D’autres l’impriment et le mettent à la disposition de leur entourage.
Les caractéristiques du journal se précisent : rendre compte de pratiques ou d’expériences de foi
chrétienne qui se vivent comme sur des sentiers, dans une certaine précarité et hors des voies toutes
tracées ou des mouvements majoritaires. En quelques mots, saisir la foi, là où choisit de souffler le
Vent annoncé par Jésus-Christ. Ce qui peut avoir quelque chose de rafraîchissant. L’équipe éditoriale
maîtrise de plus en plus la spécificité des chroniques : la présentation d’une pratique individuelle ou
collective sous forme d’itinéraire. Un temps d’intériorité qui l’illustre. Et la perspective, notre
éditorial, qui juge moins du contenu qu’elle essaie de marquer et de comprendre l’écart entre le
sentier et les voies communes. Sans compter les actualités et les ressources.
Le webzine Sentiersdefoi.info se révèle écologique, et donc économique, dans la mesure où
l’usage du papier est réduite au maximum. Son style aussi se précise. Sur la Toile, il faut être bref
et coloré. Il faudrait cependant profiter des virtualités de la Toile et être plus interactifs...
Des expériences de relations interactives. Pour les célébrations de nos cinq ans, nous
voulons donc nous rapprocher de nos lecteurs et lectrices, et de toute personne intéressée, en
développant différents moyens d’interaction avec eux. Nous proposerons, en particulier, une série
d’expériences interactives sur la Toile en nous servant de divers médias accessibles actuellement.
Nous pensons en particulier aux réseaux sociaux, à un possible blogue, à des sondages en ligne, à
des forums qui pourront permettre des discussions générales ou en groupe fermé sur la vie en
sentiers de foi. Il s’agira bien sûr d’un work in progress, dont le programme se déploiera au fur et
à mesure que l’année avancera, selon le poids des différentes opérations.
Gratitude. On ne peut célébrer ces années sans remercier les artisans qui ont fait exister notre
webzine : M. Jean-Phillippe Perreault, qui avait rédigé le document d’orientation de Sentiers de
foi et qui, comme premier rédacteur en chef, a conçu le journal très largement; M. Ghislain Bédard
qui, depuis le début, assure les tâches de secrétaire de rédaction, révise les textes et les met en
forme dans une belle présentation; Mme Lucie Brousseau dont l’éditorial photographique, depuis
le début aussi, donne tout son relief à la page couverture; enfin, M. Gérard Laverdure qui, depuis
trois ans, a pris la relève comme rédacteur en chef, multiplié les contacts avec les différents
organismes et recruté plusieurs collaborateurs et collaboratrices.
Il faut aussi remercier la trentaine de personnes qui collaborent à la rédaction des différentes
chroniques et souligner que plusieurs le font bénévolement. On ne doit pas oublier la participation
des membres de la corporation et, particulièrement, de son conseil d’administration. Notre
organisme produit 14 numéros annuellement avec une équipe réduite et à des coûts minimums, et
ses officiers abattent bénévolement un travail considérable. Enfin, toute notre reconnaissance à
ceux et celles qui nous soutiennent par leurs réactions ou leurs dons.
Vœux. Puisse le souffle du Vent inspirer le journal Web Sentiersdefoi.info dans son travail de
sensibilisation aux richesses moins connues du mystère de l’Église, et le pousser à explorer
toujours plus les médias de pointe.
sdf.info • 20 octobre 2010 • 8
Ressources
Pour aller plus loin ou pour satisfaire votre curiosité
[ Participer ]
Le Centre Victor-Lelièvre
Un lieu de découverte
[ Lire ]
Revue Relations, oct.-nov. 2010
Violence et religion
[ Participer ]
Soirée Relations
Violence et religion
Le Centre Victor-Lelièvre, sis au 475,
boul. Père-Lelièvre, à Québec, « est
un lieu de découverte et de proposition des valeurs évangéliques en
lien avec les grands question-nements
de notre temps. »
« Le pouvoir politique instrumentalise
souvent le religieux pour arriver à ses
fins et justifier la violence de l’État.
Mais la religion, comprise dans une
perspective sacrificielle, est aussi
source de violence. Une lecture littérale
et fondamentaliste des textes sacrés
amène également certains groupes
religieux à promouvoir la violence. Au
nom de la religion, les femmes ont subi
et continuent de subir des atrocités. Ce
dossier est l’occasion de scruter ces
questions complexes, à une époque où
la globalisation, avec sa violence
structurelle, s’apparente elle aussi à
une nouvelle religion. »
Dans la foulée de notre dossier
« Violence et religion », nous vous
convions à une soirée sur le thème :
« La religion : une voix dans la lutte
contre la violence », avec Guy Côté,
Raymond Lemieux et Marie-Andrée
Roy. La soirée aura lieu le lundi 8
novembre 2010 de 19 h à 21 h 30 à la
Maison Bellarmin, 25, rue Jarry
Ouest, à Montréal (métro Jarry ou De
Castelnau). Contribution suggérée :
5 $. Pour plus d’information, visitez :
www.cjf.qc.ca
Parmi les activités à venir, on peut
noter celles-ci : la conférence « Apprivoisez son ombre » avec Gaston
Poulin, c.j.m, le samedi 30 octobre, de
9 h à 16 h et l’activité Cinéma-témoin
avec Les invasions barbares, le
samedi 6 novembre, de 13 h 30 à 17 h.
Pour y découvrir de nombreuses
autres activités et les ressources
proposées, voir leur site Internet ou
joignez le 418 683-2371.
www.centrevictorlelievre.org
[ Participer ]
Comprends-tu ce que tu lis?
Librairie Paulines (Montréal)
Une série de sept rencontres intitulées
« Comprends-tu ce que tu lis? » et
ayant pour but de favoriser une
meilleure compréhension de la
littérature biblique aura lieu à la
Librairie Paulines, au 2253, rue
Masson, à Montréal. La prochaine
année se déroulera sous le thème des
Actes des apôtres. Le thème de la
deuxième rencontre, qui se tiendra le
1er novembre prochain, de 17 h 30 à 19
h 30, sera : « Un roman historique?
Un livre au service d’une idée »
Biblistes : Odette Mainville et André
Myre. Contribution suggérée : 10 $.
www.librairespaulines.qc.ca
Voici quelques titres de ce numéro :
« Violence et religion », Jean-Claude
Ravet; « La foi et l’ordre », Robert
Mager; « La sacralisation du pouvoir
mâle », Marie-Andrée Roy; « Luttes
féministes en islam », Azadeh Kian;
« Revenir à l’expérience libératrice de
l’Évangile », Luiz Carlos Susin; « Un
prophète en trop », Jean-Michel Hirt;
« Le messianisme politico-religieux »,
Guy Côté; « Le dieu Marché et son
culte », Michel Beaudin.
Pour plus d’information sur ce numéro,
visitez : www.revuerelations.qc.ca
Pour nous signaler
des ressources pertinentes
ou nous faire vos commentaires,
écrivez à :
[email protected]
[ Participer ]
Le frère André : un virage
évangélique
Conférence avec Benoît Fortin
« En ce temps de fin d’une certaine
Église, les disciples de Jésus sont
acculés à un virage évangélique pour
retrouver le feu primitif et passer
l’héritage aux jeunes générations. Le
saint n’est pas une boîte à miracles,
mais d’abord un modèle qui nous est
donné pour suivre le Christ... L’Église
doit sortir de la sacristie, aller dans la
rue et renaître à partir des pauvres.
Elle doit se situer dans le mouvement
de résistances et d’alternatives pour
faire arriver le monde nouveau. »
Cette soirée aura lieu le jeudi 28
octobre 2010, de 19 h à 21 h au
Carrefour Foi et Spiritualité, au
12075, rue Valmont, à Montréal.
Entrée : 5 $ ou carte de membre. Pour
information, joignez le 514 336-2420.
www.foi-spiritualite.ca
Prochaine parution du journal : 3 novembre 2010
Le journal Sentiersdefoi.info est une publication de Sentiers de foi, OSBL autonome et indépendant d’inspiration chrétienne fondé en 1984,
qui a pour mission d’être un espace favorisant la connaissance, la reconnaissance et la collaboration des sentiers de foi au Québec,
dans une perspective chrétienne inscrite dans le pluralisme actuel.
ISSN 1715-8370 | 8 2010 Sentiers de foi | Tous droits réservés
Ce journal, publié uniquement sur le Web, est de ce fait entièrement écologique. Imprimez-le et diffusez-le en pensant à l’environnement.
2005-2010
5
ans de marche
dans les pas du vent
de
foi.info
Sentiers
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Vol. 6 no 4 / 3 novembre 2010
8 Lucie Brousseau, 2010 : Moment de communion
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bimensuel
indépendant
qui vise à faire
connaître
des parcours
et des lieux
où se vivent
des expériences
humaines
et spirituelles
novatrices.
Comité éditorial
Rédacteur en chef
Gérard Laverdure
Secrétaire de rédaction
Ghislain Bédard
Représentant du C.A.
Michel-M. Campbell
Itinéraire
Collaboration
Jean-Pierre Contant
Lucie Gravel
Perspectives
À la recherche d’un chemin qui mène au cœur de soi pour être disponible
totalement à la Présence qui s’y trouve, le moine cistercien John Main découvre
le sentier de la méditation chrétienne, offert depuis 1977 au Québec. [ p. 2 ]
par Jean-Pierre Contant
Pour nous joindre
[email protected]
Pour vous abonner
www.sentiersdefoi.info
Abonnement gratuit.
Intériorité
Quitter la surface
Quelques pensées de John Main, o.s.b., et de Laurence Freeman, o.s.b., nous
convient à abandonner la superficialité et à pénétrer les profondeurs. [ p. 4 ]
présenté par la Méditation chrétienne
Actualités
Accueille chez toi l’étranger
Lors de la Veillée spirituelle pour la paix, en l’église Holy Family, toute la
« sainte famille » humaine a été invitée à célébrer dans la communion. [ p. 5 ]
par Gérard Laverdure
Ce journal Web existe
uniquement grâce
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à Sentiers de foi,
97, rue de l’Aqueduc
Repentigny (Qc) J6A 4E2.
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ISSN 1715-8370
8 2010 Sentiers de foi
Tous droits réservés
La rencontre intérieure avec le Christ maître
Comme chrétiens et chrétiennes, nous avons reçu beaucoup d’enseignements
et d’informations. L’expérience fondamentale n’est-elle pas la rencontre du
Tout-Autre dans le silence de notre cœur? [ p. 3 ]
par Lucie Gravel
Photographie
Lucie Brousseau
Conception graphique
Ghislain Bédard
La méditation chrétienne : retour d’un vieux sentier de foi
Méditation chrétienne et soufisme
Deux maîtres de traditions différentes se rencontrent pour partager leur vision
de la méditation. Quelques paroles glanées lors de ce moment unique... [ p. 6 ]
par Gérard Laverdure
Fêtons 5 ans
La parole est à vous
Des réactions de lecteurs et de lectrices nous sont parvenues et confortent notre
équipe dans son intention d’explorer des moyens d’interaction divers. [ p. 7 ]
par Michel-M. Campbell
Itinéraire
sdf.info • 3 novembre 2010 • 2
La méditation chrétienne : retour d’un vieux sentier de foi
À la recherche d’un chemin qui mène au cœur de soi pour être disponible totalement à la Présence qui s’y trouve, le moine
cistercien John Main découvre le sentier de la méditation chrétienne, offert depuis 1977 au Québec.
par
Jean-Pierre Contant
collaboration spéciale
Jean-Pierre Contant est
retraité du secteur des
services sociaux,
méditant depuis près de
30 ans. Il anime depuis
1994 un groupe de
méditation chrétienne
dans la région de
St-Jérôme. Il est
président de
l'Association Emmanuel
qui regroupe des parents
d'enfants handicapés au
Québec, président de la
division santé et services
sociaux à Centraide
Laurentides, père de 3
enfants et grand-père de
6 petits enfants.
Pour bien comprendre l’origine de la Méditation chrétienne, il nous faut rencontrer John Main,
o.s.b., principal artisan de la mise à jour de cette forme de prière dans le monde chrétien contemporain. Entre 1954 et 1956, alors qu’il était diplomate en Angleterre, il fut affecté en Malaisie.
C’est dans le cadre de ses fonctions qu’il y rencontra un swami hindou. Impressionné par l’engagement de ce dernier, il se met à méditer avec lui. En 1959, bousculé par la mort d’un jeune neveu,
John Main entre chez les moines bénédictins. Dix ans plus tard, il devient directeur d’une école
reliée à un monastère aux États-Unis. C’est à ce moment qu’il découvre l’enracinement chrétien
de cette forme de prière qui utilise un mantra.
En accompagnant un jeune étudiant, féru d’informations sur la prière, il découvre en effet des
écrits du IVe siècle de Jean Cassien relatant que des moines se retiraient dans le désert pour prier
à l’aide d’un seul mot ou d’une seule phrase tirée de la Bible. On trouve aussi un retour à cette
forme de prière au XIVe siècle dans les écrits d’un auteur anonyme anglais : Le nuage d’inconnaissance. Plus près de nous, au XVIIIe siècle, Le récit du pèlerin russe fait état de la Prière de
Jésus qui consiste à répéter la phrase suivante : « Jésus, fils de Dieu vivant, prends pitié de nous. »
Fier de cette découverte, John Main décide donc de rendre accessible cette forme de prière au
monde contemporain. Il fonde, en 1974, le Centre de méditation chrétienne à Londres. C’est en
1977, à la demande d’un évêque anglophone de Montréal, qu’il vient y fonder un prieuré
bénédictin, où il se donne comme mission d’enseigner la méditation chrétienne. Une fois par
semaine, des personnes viennent le rencontrer pour recevoir des instructions et méditer avec lui.
Décédé en1982, Laurence Freeman, o.s.b., continue actuellement son œuvre.
Il n’y a rien de plus simple que de méditer. Dans notre monde où tout devient souvent compliqué,
il apparaît même un peu simpliste d’apprendre ainsi à ne rien faire. Juste être là en présence de
Celui qui nous habite. Pour en connaître la méthode, je vous invite à aller sur le site Web de la
Médiation chrétienne1.
1. Visitez
www.meditation
chretienne.ca.
Depuis le passage de John Main à Montréal dans les années 1980, plusieurs groupes de méditants
se sont formés au Québec et dans le monde entier. Le groupe sert à aider le méditant à maintenir
la discipline. En effet, se retrouver une fois par semaine autour d’un petit texte sur la méditation
et méditer ensemble aide le méditant à rester fidèle à ses deux périodes de prière par jour. Ayant
fréquenté assidûment le prieuré de 1979 à 1983 et animant un groupe depuis 10 ans à Lachute, le
père Michel Boyer, franciscain, assume la coordination pour le Québec et les régions francophones
du Canada depuis 7 ans.
Nous rencontrons, dans ces groupes, plusieurs personnes qui ont renoué avec la foi chrétienne à
l’aide de la méditation chrétienne. Ils y retrouvent une relation plus personnelle à Dieu. Ces
groupes comprennent des hommes, des femmes, des jeunes et des moins jeunes. Plusieurs
personnes qui ont mis cette forme de prière dans leur vie témoignent comment leur quotidien en
fut changé. Engagée dans la mise sur pied d’une coopérative de logement, une participante nous
dit comment elle prend maintenant le dossier avec beaucoup plus de sérénité et de confiance. Un
homme et une femme en couple, engagés dans le domaine de l’aide humanitaire en Afrique,
méditent maintenant ensemble chaque jour quand ils sont au loin.
Cette forme de prière trouve sa pertinence dans notre monde actuel où la performance, l’obligation
de résultats, le bruit envahissant des radios, de la télé et d’Internet, et le souci de rentabilité font la
loi. Quand on médite, on ne fait qu’être. Être en présence de cet Esprit qui nous habite dans le
silence et la sérénité. De plus, la naissance de petits groupes constitue des cellules d’Église réelle,
non institutionnelle. Dans ses débuts, la Méditation chrétienne a dû affronter certaines réticences,
car elle était associée au bouddhisme, mais dans ces temps d’ouverture, elle est de plus en plus
considérée comme un nouveau sentier de foi.
sdf.info • 3 novembre 2010 • 3
Perspectives
La rencontre intérieure avec le Christ maître
Comme chrétiens et chrétiennes, nous avons reçu beaucoup d’enseignements et d’informations. L’expérience
fondamentale n’est-elle pas la rencontre du Tout-Autre dans le silence de notre cœur?
par
Lucie Gravel
collaboration spéciale
Lucie Gravel est
coordonnatrice à
l’animation à la Librairie
Paulines de Montréal.
Cette présentation de la méditation chrétienne suscite l’espérance : il y a toujours dans l’Histoire des
audacieux et des audacieuses qui renouent avec les sources du christianisme ou d’autres traditions
religieuses. Ils se risquent à écouter le Souffle. Ce Souffle, on le cherche. On le trouve par
l’initiation progressive à l’exigeant exercice spirituel qui est de « décélérer », d’écouter, de faire
silence, de se re-cueillir. À chacun et chacune de trouver son sentier pour y arriver, car ils sont
multiples. Ce chemin comporte sa part de solitude et son besoin de communauté. Méditation
chrétienne offre cette possibilité de méditer seul et avec d’autres. Allez fureter sur leur site Web, un
outil d’accompagnement extraordinaire, une véritable nourriture pour tous les âges, vous verrez.
Méditation chrétienne est né d’un dialogue entre John Main et le swami Satyananda. Ce dialogue
interreligieux et œcuménique est une préoccupation de ce réseau qui a aussi l’avantage d’être
mondial. Ce ne sont souvent pas les discussions théologiques sur Dieu qui créent l’harmonie entre
les religions! L’expérience de la méditation facilite la rencontre avec l’autre, car il y a rencontre
sur le fond, le cœur. Laurence Freeman, accompagnateur mondial, dit : « L’expérience
contemplative est essentielle si l’on veut que mûrisse le dialogue interreligieux. »
J’ai organisé en 2006 une série de rencontres sur la méditation dans cinq grandes traditions
religieuses. Intriguée par ce réseau de méditantes et méditants chrétiens, j’ai invité Yvon Théroux
de Méditation chrétienne du Québec à parler de cette méditation. Il a aussi proposé la thématique
de la méditation dans l’ensemble des religions. Il en est sorti un ouvrage écrit par les cinq
intervenants et intervenantes1. Lors d’une soirée publique autour de ce livre, une femme nous a dit :
1. En quête de l’absolu. « Je n’en crois pas mes oreilles d’entendre qu’il existe une pratique de la méditation chez les
La méditation selon cinq chrétiens! » Cela en dit beaucoup sur la manière de transmettre l’héritage spirituel du
traditions religieuses, christianisme : nous avons dérapé par moments, mais le chemin est toujours là, possible!
Paulines, 2007, 124 p.
Le 3 octobre dernier a
eu lieu une journée
entière de méditation
interreligieuse avec 60
personnes, les
enseignements des
auteurs et cinq temps de
méditation. Expérience
qui sera renouvelée l’an
prochain à la demande
générale.
2. Ignace de Loyola,
Récit écrit par le Père
Louis Gonçalves aussitôt
qu’il l’eut recueilli de la
bouche même du Père
Ignace, (Christus 65),
Paris, DDB; Montréal,
Bellarmin, 1088, p. 78.
3. Ignace de Loyola,
Exercices spirituels.
Traduction du texte
Autographe par Édouard
Guydan, Paris,
Collection Christus 61,
DDB, 1986, p. 28,
annotation 2.
4. Ibid., p. 30,
annotation 15.
Nous avons été peu éduqués, dans les célébrations religieuses où on parle tant et trop, à prier, à méditer
par nous-mêmes, à goûter et à ruminer une Parole qui parle en nous. Nous avons reçu beaucoup
d’enseignements qui nous sont sortis par les oreilles et qui en ont fait fuir plusieurs! On a trop « parlé »
de Dieu! John Main et son successeur ont persévéré à mettre en valeur l’importance de laisser Dieu
être Dieu, le Tout-Autre, en nous. Ils ont su rendre accessible à tous et à toutes, avec liberté et
profondeur, l’expérience de la méditation contemplative. Avec Méditation chrétienne, je crois
comprendre que le Christ est maître intérieur, et on le laisse agir, tout simplement : Maranatha! Viens
Seigneur! Il y a quelque chose de subversif dans cette approche, quelque chose d’évangélique donc.
John Main évoque un autre témoin pour l’ignacienne que je suis : Ignace de Loyola, qui a vécu à
une époque de renouveau spirituel aux XVe et XVIe siècles. L’expérience fondamentale d’Ignace
est sa rencontre du Christ par la pratique d’exercices spirituels variés et de méditations. Préoccupé
par les enjeux de son époque, Ignace a remanié les méthodes de méditation pour mettre en place
une démarche pédagogique permettant aux personnes de découvrir qui elles sont et de discerner
quel appel du Christ les habite de façon originale. Méditation chrétienne met également les
personnes en état d’expérience de Dieu et de disponibilité personnelle à celui qui enseigne de
l’intérieur. Je pense à Ignace de Loyola qui a cherché avec anxiété des guides (personnes) spirituels
pour l’aider. Il écrit, à la fin de sa vie, qu’il n’y eut qu’une femme, une béate, « qui l’aida
vraiment ». Elle a dit à Ignace « qu’elle priait Dieu que Jésus-Christ lui apparaisse2 ». Quand
Ignace eut fait cette rencontre intérieure du Christ, il perdit son anxiété : il avait trouvé son Maître.
Ignace dit que « ce n’est pas d’en savoir beaucoup qui rassasie et satisfait l’âme, mais de sentir
et de goûter les choses intérieurement3 ». Il insiste : « que le Créateur et Seigneur se communique
lui-même à l’âme fidèle, l’enveloppant dans son amour... que la personne qui accompagne laisse
le Créateur agir immédiatement avec sa créature et la créature avec son Créateur et Seigneur4. »
Longue vie au réseau mondial de Méditation chrétienne, artisan de paix et de liberté intérieure!
sdf.info • 3 novembre 2010 • 4
Intériorité
Quitter la surface
John Main nous dit :
« Méditer, c’est abandonner le superficiel,
quitter la surface, pour entrer dans les
profondeurs de notre être. La raison pour
laquelle nous méditons, dans la tradition
chrétienne, est que nous croyons que Jésus a
envoyé son Esprit dans ces profondeurs pour
habiter dans notre cœur. En d’autres mots,
l’Esprit de Dieu, l’Esprit du Créateur de
l’univers habite en nos cœurs et, dans le silence,
nous aime tous. Dans la tradition chrétienne,
méditer, c’est simplement être ouvert à l’Esprit
d’amour, à l’Esprit de Dieu. »
« Nombreux sont ceux,
aujourd’hui, dans le monde moderne,
qui ont soif de spirituel et soif de silence,
d’intériorité et de prière. En un sens, l’urgence
de cette soif et de cette faim est aussi impérieuse
que celle de pallier les besoins matériels des
pays en voie de développement. En effet,
à moins que ceux qui vivent dans l’abondance
ne recouvrent la santé de l’âme grâce à
l’expérience spirituelle, ils seront incapables de
ressentir la véritable compassion d’où émerge
l’amour de la paix et de la justice.
L’homme moderne doit trouver
un moyen de recouvrer cette santé,
un moyen à la fois nouveau et séculaire :
une voie traditionnelle qui l’atteint là où il est. »
Laurence Freeman, o.s.b.
La parole du silence,
Éd. Le jour, 1995, p. 9 et 10.
« Quand on médite,
l’intention n’est pas d’avoir des pensées sur
Dieu, sur son Fils Jésus, ou sur l’Esprit saint. En
méditant, on cherche à réaliser quelque chose
d’infiniment plus grand. En nous détournant de
tout ce qui est éphémère et sans importance,
nous ne cherchons pas seulement à penser
à Dieu, mais à être avec lui,
à expérimenter sa personne
comme fondement de notre être. »
John Main, o.s.b.
Un mot dans le silence, un mot pour méditer,
Éd. Le jour, 1995, p 20.
Père du ciel
Ouvre mon cœur
À la prière silencieuse
De l’Esprit de ton Fils.
Conduis-moi dans ce mystérieux silence
Où ton Amour est révélé
À tous ceux et celles
Qui appellent :
« Viens, Seigneur Jésus,
Maranatha. »
John Main, o.s.b.
sdf.info • 3 novembre 2010 • 5
Actualités
Accueille chez toi l’étranger
Lors de la Veillée spirituelle pour la paix, en l’église Holy Family, toute la « sainte famille » humaine a été invitée à célébrer
dans la communion.
par
Gérard Laverdure
sdf.info
Ce samedi soir 23 octobre, l’église Holy Family à Montréal est pleine à craquer. En entrant, mon
regard est attiré par la peinture d’un immense personnage qui couvre tout le haut du chœur avec
ses grands bras ouverts et son visage ombragé par le capuchon qui couvre sa tête. On se croirait
sur une route de campagne à la tombée du jour alors qu’un étranger vient croiser notre route. On
ne voit pas bien ses traits, mais il semble amical. Sur le mur de gauche, un immense soleil lance
ses rayons de tous côtés. Plusieurs personnes représentées en ombre chinoise marchent vers sa
lumière. Sur chacune d’elles, on aperçoit le signe d’une des nombreuses religions du monde. Dès
son mot d’accueil, le curé John Baxter nous dit que ces visuels sont permanents et que, pour lui,
Holy Family signifie toute la grande famille humaine à rassembler dans la communion.
Ici se tient la Veillée spirituelle pour la paix1, soulignant le 24e anniversaire de la rencontre d’Assise
convoquée par Jean-Paul II en 1986. Ce soir, huit sentiers religieux sont représentés : les Premières
Nations avec Mme Nicole O’Bomsawin, Abénakise d’Odanak; l’hindouisme avec Swami Sudhan
Sharma du Temple Sri Durkai Amman Koyil; l’islam avec M. Karim Ben Driss de l’Institut soufi
de Montréal; le christianisme par M. Stéphane Vaillancourt du Centre Emmaüs de Montréal; le
sikhisme par Mme Jesseema Kaur du Temple Gurdwara Guru Nanak Darbar; le bouddhisme avec
la Vénérable Man-Quan, venue expressément de Boston pour l’événement, de l’International
Buddhist Progress Society of Montreal; le judaïsme avec le rabbin Jacob Lévy de la Synagogue
1. Événement organisé sépharade Beth Rambam, de Côte Saint-Luc; la foi Baha’ie avec M. Alden Penner et Mme Mariepar le Centre de paix de Claire Saindon de la Communauté baha’ie de Montréal.
Montréal, Religions pour
la Paix-Québec et la
Famille franciscaine du
Québec.
Pour information :
www.veilleesspirituelles.ca
514 933-4243
Nous avons pu goûter des temps de prière dans la langue, la tonalité, la gestuelle et les couleurs de
chacun et chacune, en alternance avec des moments de silence. Une chorégraphie présentée par une
trentaine de membres accompagnait le chant des communautés bouddhistes et sikhes. Le représentant
du Centre Emmaüs nous a fait entrer dans un kyrie eleison très touchant. Les jeunes de foi Baha’ie ont
clos cette soirée avec guitare et violon et un rythme plus dansant, plus enlevant. Malgré les différences
de forme, nous avons senti une grande communion sur le fond : notre désir de paix pour notre monde,
de fraternité, et un immense respect pour l’Esprit, l’Être bienveillant à la Source de tout.
sdf.info • 3 novembre 2010 • 6
Actualités
Méditation chrétienne et soufisme
Deux maîtres de traditions différentes se rencontrent pour partager leur vision de la méditation. Quelques paroles
glanées lors de ce moment unique...
par
Gérard Laverdure
sdf.info
Ce 23 septembre, à la Librairie Paulines de Montréal, un moine catholique, Laurence Freeman,
o.s.b., animateur mondial de la Méditation chrétienne, et Karim Ben Driss, fondateur de l’Institut
soufi de Montréal, entrent en dialogue à propos de leur pratique et de leur conception de la
méditation. Dès le départ, l’animateur, Michel Boyer, demande quelle est la contribution de
chacune des spiritualités à notre époque :
Laurence Freeman – Le besoin de notre temps est la simplicité, l’authenticité et l’expérience
personnelle. Comme c’est difficile! On a besoin du soutien des autres, d’une communauté. La
méditation crée la communauté. Notre communauté comprend l’importance d’avoir une discipline
intégrée à notre quotidien, la méditation. Enseignement et groupe de soutien entraînent nos
concitoyens et concitoyennes à vivre la dimension contemplative au quotidien.
Karim Ben Driss1 – Il y a en nous un élan, une aspiration vers l’être. Le soufisme, c’est le rapport
à l’être. Mais nous sommes malades du cœur. Alors, ce qui prime, c’est la transformation
1. Karim Ben Driss est intérieure, individuelle, pour réaliser la guérison du cœur et retrouver ses potentialités. Se
sociologue de formation, manifestent alors des conséquences extérieures dans le contexte politique et social, soit
directeur du département
révolutionner les choses.
des études autochtones
de l’Institut culturel
Avataq. D’origine
marocaine, spécialiste
du monde arabe et de la
spiritualité musulmane,
il est aussi fondateur de
l’Institut soufi de
Montréal où il anime
chaque semaine des
ateliers portant sur
l’enseignement et la
pratique soufis.
Une autre question concernait le sens de la compassion :
Karim Ben Driss – La compassion, c’est la réalité vivante. Par compassion, il y a la lune, les
marées, l’attirance entre les gens. La compassion fait partie des graines spirituelles que nous
portons ensemble. Tous et toutes, nous portons le Souffle divin avec sa compassion.
Laurence Freeman – La compassion, c’est se sentir en unité avec les gens qui souffrent. Si nous
sommes ouverts en nous-mêmes, on va sentir cette force d’union. Ce n’est pas de la pitié où la
personne souffrante « devient objet » en dehors de nous. Avec la compassion, on est dans
l’expérience de l’autre. C’est aussi la capacité de sentir la joie avec les joyeux, pas juste la
souffrance.
sdf.info • 3 novembre 2010 • 7
Fêtons 5 ans
La parole est à vous
Des réactions de lecteurs et de lectrices nous sont parvenues et confortent l’équipe du journal dans son intention
d’explorer des moyens d’interaction divers.
par
Michel-M. Campbell
président de
Sentiers de foi
Dans le dernier numéro, pour célébrer notre cinquième anniversaire, j’annonçais une série
d’expériences d’interaction entre le webzine Sentiersdefoi.info et les personnes qui le lisent. Voici
que cinq d’entre vous se sont spontanément manifestés, la plupart (4 sur 5) pour souligner
l’anniversaire : « Bravo pour ces 5 ans à toute l’équipe et longue vie à ce projet! » Et aussi pour
commenter le journal ou sa dernière édition1 qui portait sur l’itinéraire d’André Patry :
• « Un très bon numéro, qui approfondit encore plus la mission unique de Sentiersdefoi.info qui
est de donner une visibilité à des initiatives de croyants et qui offre une réflexion courte, mais
percutante, de ce dont elles sont porteuses... »
• « Sentiersdefoi.info apporte toujours de belles trouvailles qui font réfléchir, entre autres le
message du répondeur d’André Patry... »
• « ... ma profonde gratitude à la suite de la lecture de la dernière édition du journal
Sentiersdefoi.info. Je lis avec plaisir chacun des numéros, mais celui-ci, qui porte sur les
humbles de notre société, m’a particulièrement interpellée. » Cette personne continue en se
référant à des textes précis : « D’abord, l’article de David Fines... L’œuvre du père Jean en
prison2 qu’il entrevoit d’ailleurs lui-même comme une véritable grâce, lui permet de rencontrer
le Christ dans les yeux des autres. Ces autres qu’on méprise pour leurs actes, mais qui ne
perdent jamais leur dignité, "car c’est une partie ontologique de l’humain". Tout cela est fort
inspirant – et mon humble expérience auprès d’itinérants et des plus poqués le confirme.
L’article de Michel M. Campbell m’a également interpellée, particulièrement lorsqu’il rappelle
que pour le père Jean, Dieu est au fond du trou. Ici encore, je ne peux que témoigner de la
justesse et de la force de cette parole : je n’ai jamais vu autant la grandeur du Christ que chez
les humbles, dont l’abandon total à Dieu est nécessaire pour rebondir. Enfin, [...] j’abonde dans
le sens de Marco Veilleux lorsqu’il nous dit que le succès de la canonisation du frère André n’est
pas "que du folklore, si nous savons voir"... J’étais heureuse de voir plusieurs générations de
divers horizons partager cette célébration... de voir tous ces gens exprimer leur reconnaissance
collective à cet homme d’une profonde humilité. »
• Une autre correspondante remercie pour les personnes homosexuelles Gérard Laverdure pour
son article « La vigile du parc de l’Espoir ».
• Enfin, une correspondante ajoute : « Y aurait-il une place dans un prochain numéro pour
introduire notre première annonce du 35e anniversaire de la collective L’autre Parole?3 »
Notons que ces commentaires, généraux ou particuliers – ceux-ci touchaient plusieurs chroniques du
dernier numéro – confortent les membres de l’équipe dans une démarche inédite qui semble de plus
1. Vol. 6 no 3,
20 octobre 2010. en plus pertinente. Quant à la demande de publicité, elle amène à réfléchir sur notre offre de service.
2. Rappelons qu’en
prison, on appelait
souvent André Patry de
son nom de religieux : le
père Jean.
3. La fête aura lieu
le 20 août 2011,
de 13 h à 21 h 30,
au 7400, boul. SaintLaurent, Montréal. Nous
aurons l’occasion d’en
reparler.
Voilà qui lance bien une première expérience d’interaction. Continuez à nous écrire vos
commentaires sur les différents articles ou numéros, voire à faire des suggestions. Pour notre part,
nous en goûterons l’énergie et nous essaierons d’en tenir compte le plus possible. Nous chercherons
aussi la meilleure façon de les partager avec l’ensemble de notre lectorat. Ce qui n’est pas toujours
évident. Une des vertus de notre journal, si on en croit les échos, c’est la brièveté de ses articles, ce
qui semble une caractéristique de la communication Internet. Une chronique – « La parole est à
vous » – devrait donc être relativement courte. Comment faire alors? Le journal peut synthétiser les
commentaires – comme aujourd’hui – ou encore explorer d’autres possibilités de la Toile comme
présenter les articles dans un blogue ou peut-être utiliser les réseaux sociaux (comme Facebook).
Prenez la parole. Écrivez-nous à : [email protected]. Expérimentons ensemble.
sdf.info • 3 novembre 2010 • 8
Ressources
Pour aller plus loin ou pour satisfaire votre curiosité
[ Participer ]
Nouvelle campagne de
Développement et Paix
L’eau ne devrait pas être
embouteillée
Développement et Paix constate que la
vente d’eau embouteillée est en
augmentation dans les pays du Sud. Et
que les plus pauvres ont de la difficulté
à se procurer cette ressource vitale.
« Les entreprises d’eau embouteillée
représentent une menace grandissante
pour les sources d’eau des populations rurales dans les pays du Sud »,
déclare Claire Doran, directrice du
Service de l’éducation de Développement et Paix. Elle donne en exemple
la ville de Sukabumi, en Indonésie, où
l’industrie de l’eau en bouteille
accapare les terres où se trouvent les
sources qui approvisionnaient les
petits agriculteurs.
« L’embouteillage et la vente de l’eau
font que cette ressource est considérée de plus en plus comme une
marchandise ou un bien privé
accessible seulement à ceux et celles
qui en ont les moyens », déplore-t-elle.
Développement et Paix est l’organisme officiel de solidarité internationale de l’Église catholique au
Canada et le membre canadien de
Caritas Internationalis.
Pour information, joindre François
Gloutnay au 514 257-8711 ou au 514
257-8710, poste 318.
www.devp.org
[ Participer ]
Carrefour de participation,
ressourcement et formation
Sessions et formations
Vous avez besoin d’un moment de
ressourcement, d’une pause dans la vie
trépidante de votre organisation?
Offrez-vous une session du CPRF!
Nos sessions de formation sont
conçues pour dynamiser la vie de votre
organisme et s’adressent à toute
personne travailleuse, membre ou
administratrice, qui s’y implique.
Nous privilégions les échanges en
petits et grands groupes, l’interaction
avec les participants et participantes
(jeu, théâtre, atelier, etc.) et de brefs
exposés de l’équipe d’animation
comme méthode d’apprentissage.
D’une durée d’une journée, les
sessions du CPRF sont conçues pour
répondre à vos besoins, et c’est
pourquoi nous nous déplaçons partout
au Québec. Les sessions offertes sont :
« Marcher à contre-courant, une
question de sens »; « D’hier à demain,
changer le monde ».
Le CPRF vous offre également six
formations pour mieux comprendre
les enjeux sociaux et politiques visant
à éclairer l’analyse des membres et
des intervenants et intervenantes :
« Écologie et justice sociale »; « Des
droits et des luttes »; « Le bien
commun n’est pas d’intérêt privé »;
« Le droit à la santé n’est pas une
marchandise »; « Analyse sociale »;
« Pour un monde de justice et
d’égalité : choisir l’éducation populaire autonome ».
;
Il n’est pas trop tôt pour réserver votre
journée de formation pour les sessions
d’hiver et du printemps 2011. Joignez
alors Marie-Iris Légaré, répondante à
la formation au 514 526-2673.
www.cprf.biz
[ Participer ]
Écologie et justice sociale
Session offerte par le CPRF
Session offerte par le CPRF en
collaboration avec le Centre SaintPierre au Centre même, situé au 1212,
rue Panet, à Montréal, le mardi 23
novembre prochain, de 9 h à 16 h.
Pour réserver votre place, joignez le
Centre au 514 524-3561 ou visitez le
site Web. Le coût proposé par le Centre
Saint-Pierre est de 85 $ par personne,
plus frais d’inscription de 20 $.
www.centresaintpierre.org
[ Lire ]
Le chemin de la méditation
de John Main
« Dans cet ouvrage rédigé peu de
temps avant sa mort, John Main
reprend l’essentiel de son enseignement sur la méditation en 35 courts
chapitres (189 pages) où sont abordés
les multiples aspects de cette forme
de prière : l’usage du mantra, le
détachement des distractions, le
dépassement des techniques de prière,
l’initiation au silence, à l’immobilité,
etc. John Main nous rappelle surtout
que, pour lui, c’est une démarche
d’une absolue simplicité qui ne
requiert qu’une qualité : vouloir
sérieusement apprendre à méditer. »
Bellarmin, 2001
Prochaine parution du journal : 24 novembre 2010
Le journal Sentiersdefoi.info est une publication de Sentiers de foi, OSBL autonome et indépendant d’inspiration chrétienne fondé en 1984,
qui a pour mission d’être un espace favorisant la connaissance, la reconnaissance et la collaboration des sentiers de foi au Québec,
dans une perspective chrétienne inscrite dans le pluralisme actuel.
ISSN 1715-8370 | 8 2010 Sentiers de foi | Tous droits réservés
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Vol. 6 no 5 / 24 novembre 2010
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Gérard Laverdure
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Représentant du C.A.
Michel-M. Campbell
Collaboration
Yves Côté
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8 Lucie Brousseau, 2010 : Une issue
Journal Web
bimensuel
indépendant
qui vise à faire
connaître
des parcours
et des lieux
où se vivent
des expériences
humaines
et spirituelles
novatrices.
Itinéraire
Dieu ne regarde pas comme les humains : il choisit selon le cœur. Voici le parcours de M. Yves Côté, un homme rejeté à cause de son orientation sexuelle
que Dieu ramasse en chemin pour en faire un artisan de réconciliation. [ p. 2 ]
par Gérard Laverdure
Perspectives
Conception graphique
Ghislain Bédard
Intériorité
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Pour vous abonner
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ISSN 1715-8370
8 2010 Sentiers de foi
Tous droits réservés
De la priorité de la venue de Jésus
Que font l’Église et ses ministres des Samaritaines de notre monde? Il en reste
encore qui s’inspirent de l’audace et de la compassion de Jésus, et qui opèrent
des renversements... [ p. 4 ]
par Michel-M. Campbell
Photographie
Lucie Brousseau
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97, rue de l’Aqueduc
Repentigny (Qc) J6A 4E2.
Un reçu de charité
sera émis.
« Je ferai de toi un ami précieux dans ma maison »
La p’tite fleur mauve
« Aussitôt arrivé à la campagne, mon premier souci est d’arroser mes fleurs,
mon jardin. Enfin, tout ce que j’ai semé et que je me plais à voir pousser sur
mon terrain. Arrivé devant la jardinière, c’est l’étonnement! » [ p. 5 ]
Un texte d’Yves Côté
Actualités
L’option préférentielle pour les pauvres ou le marché?
Développement et Paix s’inquiète des effets du virage conservateur politique
et religieux sur les organismes canadiens de justice sociale et de défense des
droits humains. [ p. 6 ]
par Jonathan Blais
Ressources
Pour aller plus loin ou pour satisfaire votre curiosité
Des activités diverses et des ressources pertinentes. [ p. 7 ]
sdf.info • 24 novembre 2010 • 2
Itinéraire
« Je ferai de toi un ami précieux dans ma maison »
Dieu ne regarde pas comme les humains : il choisit selon le cœur. Voici le parcours étonnant de M. Yves Côté, un homme
rejeté à cause de son orientation sexuelle que Dieu ramasse en chemin pour en faire un artisan de réconciliation.
par
Gérard Laverdure
sdf.info
C’est quand on entend son rire contagieux qu’on sait qu’il est dans les parages à la paroisse SaintPierre-Apôtre. Un rire franc et direct comme sa parole, comme l’homme de chaleur humaine et de
foi qu’il est. Sa formation, il l’a prise dans la vie, soit directement dans ses amours, dans la rue ou
comme serveur dans les grands restaurants. Puis, dans ses lectures et ses nombreuses rencontres
pastorales et oblates. Il sait donc repérer les besoins des gens et les écouter attentivement. Il y a 15
ans cette année qu’Yves Côté est fidèle au poste de pastorale sociale depuis qu’un oblat audacieux,
Claude St-Laurent, lui a fait confiance en l’appelant comme Jésus faisait : « J’ai besoin de toi!
Veux-tu travailler avec moi? » Yves de rétorquer : « Es-tu fou? As-tu bien entendu toute mon
histoire? – Je ne suis pas fou, de répondre le père Claude, tu ne pourras jamais juger personne,
car tu l’auras vécu toi-même. » Et du vécu, Yves en avait en effet beaucoup...
Retraçons donc ce long sentier de vie. Il est né à la maison, en novembre 1952, dans le lit de ses
parents, dans un bled perdu, en pleine tempête de neige. Parce qu’il avait les oreilles très décollées,
il a été le souffre-douleur de ses frères et sœurs et de ses camarades d’école. Il y avait peut-être une
autre raison à ces mauvais traitements. En effet, Yves affirme : « J’ai toujours su, depuis l’âge de 10
ans, hors de tout doute, que j’étais "fifi" et un de mes frères, très homophobe, s’en doutait. Ce fut
mon secret jusqu’à 14 ans. » Ses parents le savaient et, bien que très catholiques, ils l’ont respecté
sans jamais poser de questions. Mais son père lui confiait les tâches les plus dures en lui disant
chaque fois : « Je vais réussir à faire un homme de toi! » Pour Yves, son père agissait selon la
mentalité de l’époque qui voulait que l’homosexualité soit un « choix vicieux ». « J’aurais bien aimé
suivre le troupeau, être comme la majorité. Qui choisirait volontairement de se faire rejeter? », de
confier Yves. Trois semaines avant la mort de son père, Yves est allé le voir à l’hôpital pour lui dire
qu’il l’aimait et lui demander de laisser sa part d’héritage et les meubles de la maison paternelle à
son frère plus jeune qui en avait grand besoin. Voilà son cœur. Tout le petit héritage est donc allé au
plus jeune et Yves s’est alors mis à dos le reste de la famille qui, pourtant, n’en avait pas besoin.
Au tournant de ses 14 ans, Yves va confier son secret au vicaire de sa paroisse, qui trouve en lui
une proie facile. Yves refuse ses avances et va en avertir le curé. Ce dernier lui répond : « Je n’ai
rien entendu. Je te donne l’absolution et je prie pour que tu guérisses de ta maladie. » Yves est
assommé : « J’étais donc pécheur et malade! Je me suis juré alors que je ne retournerais jamais
plus dans une église. » Mais sa grande foi restait intacte : « J’ai toujours su que j’étais habité par
une foi inébranlable. C’est à cause de cette foi que j’ai passé à travers plein d’épreuves. Et ce qui
m’a le plus manqué pendant ces trente années de distance, c’est de partager avec des gens qui ont
la même foi que moi. »
Un soir d’été 1995 dans le Village gai, il était dans un restaurant sur la rue Ste-Catherine avec deux
copains à qui il confiait que cela lui manquait de pratiquer sa foi en Église. Ils ont ri de lui. En
sortant de là, il entend des cloches sonner, celles de l’église Saint-Pierre-Apôtre. Il s’y rend aussitôt
en se disant : « L’Esprit nous guide là où on doit aller. » Il est accueilli à l’entrée par Claude StLaurent, o.m.i., qui lui dit : « Bienvenue! J’ai décidé d’ouvrir l’église à toute personne, peu
importe son orientation sexuelle. » Yves a pleuré pendant toute la messe sans trop savoir pourquoi.
Il demande alors au curé de le rencontrer. Il passera la soirée, de 7 h à minuit, à lui raconter sa vie :
beaucoup de plaisirs, de drogue et de prostitution, mais aussi des grands bouts de bonheur avec
trois compagnons de vie dont un pendant 19 ans. C’est là qu’il passera de serveur de table à
serveur, à l’auberge Église, de ses sœurs et frères blessés en chemin et qu’il marchera avec eux en
toute solidarité.
Il n’est pas étonnant qu’il aide à se réconcilier tous ceux et celles qui ont été blessés et ne veulent
plus rien savoir de l’Église. Il leur dira : « Ce n’est pas l’Église ou la religion qui t’a blessé, mais des
hommes d’Église. » Combien de jeunes vont-ils le voir avec la certitude d’être compris et accueillis
Lire la suite, page 3
sdf.info • 24 novembre 2010 • 3
Itinéraire (suite)
comme par un père aimant; des jeunes parfois réduits à la prostitution et à la drogue pour survivre
parce que rejetés par leurs parents et la famille à cause de leur homosexualité?
S’il n’a jamais douté de l’importance de sa « mission » de guérison-réconciliation, il a eu toute une
confirmation en avril 2000. Pas d’apparition céleste... mais la mauvaise nouvelle qu’il avait un cancer
avancé du système lympathique : un lymphome de type T. Dans son style d’humour, il demande à
l’oncologue : « T comme t’es mort ou presque mort? » Réponse : « Ce cancer ne se guérit pas et il
est pris trop tard dans votre cas. » Oups! Il est suivi par une femme médecin qui est un ange pour lui
et qui, en plus, est une grande croyante. Le curé St-Laurent demande à la communauté de prier pour
lui. Un participant à la messe vient lui porter, un peu craintif de sa réaction, un bénitier et deux
bouteilles d’huile de saint Joseph. Yves, très touché, lui répond : « Ma mère a tout guéri avec ça! »
Ayant des nodules durs sur tout le corps, il s’en mettra partout en disant à Dieu : « Seigneur! Tu viens
me chercher quand t’es prêt, mais épargne-moi la douleur. Et le lendemain, je n’avais plus rien sur
le corps. Rien. » L’intérieur, les voies respiratoires, est guéri de la même façon la nuit suivante. Il va
voir son oncologue qui lui passe tous les tests pour être bien sûre. Complètement guéri. Plus rien.
Viens alors la grande question : « Pourquoi moi? », demandera Yves.
Le bon père Félix Vallée, o.m.i., lui dira plus tard : « Tu as été choisi. Reste à l’écoute pour savoir
pourquoi. Et si c’était parce qu’Il a besoin de toi, de ton témoignage de foi pour tes frères et sœurs
homosexuels! » C’est d’ailleurs ce qu’Yves fait très bien à longueur de journée, à la paroisse, dans
le quartier, aux rencontres de pastorale, en conférence à l’université Saint-Paul, au Grand
Séminaire de Montréal, en interview à Radio-Canada, à Bons baisers de France, ou avec Patrick
Lagacé de La Presse, devenu son ami. Toujours aussi convaincu de l’Amour inconditionnel de
Dieu pour toutes ses créatures, dans la joie et la simplicité du cœur.
LA PAROLE EST À VOUS
N’hésitez pas à nous faire part de vos commentaires à propos des différents articles ou sujets
abordés. Pour ce faire, vous pouvez nous écrire un court message à : [email protected].
Nous sommes vivement intéressés à connaître vos opinions et vos suggestions et nous vous en
donnerons quelques échos à l’occasion. Merci beaucoup!
sdf.info • 24 novembre 2010 • 4
Perspectives
De la priorité de la venue de Jésus
Que font l’Église et ses ministres des Samaritaines de notre monde? Il en reste encore qui s’inspirent de l’audace et de
la compassion de Jésus, et qui opèrent des renversements...
par
Michel-M. Campbell
sdf.info
Il n’est pas dans le mandat de Sentiersdefoi.info de canoniser les gens ou de reconnaître la validité
d’un miracle. À d’autres qui en ont le charisme – ou ce qui est plus dangereux, le goût – de juger,
en vertu de la Loi, un discours qui ne tient pas nécessairement compte de la complexité des
parcours de vie. Notre journal Web cherche plutôt à saisir la foi dans ses expressions inédites,
minoritaires, voire marginales. En sentier, tout n’est pas clair. La marche est souvent confuse,
douloureuse, solitaire. Il n’est pourtant pas dit que le Vent ne peut pas y souffler la compassion
révélée par Jésus le Sauveur.
L’expérience de M. Yves Coté s’avère riche à cet égard. Tout jeune adolescent, Yves connaît le poids
de la différence. Certes, ses parents qui s’en aperçoivent le respectent, même si son père ne peut
résister à lui mettre une pression. Sa stratégie pour en faire un homme s’avère limitée. Reste qu’Yves
perçoit l’affection parentale. C’est peut-être cette expérience d’accueil qui lui permet d’aller vers
d’autres figures d’autorité. Par définition, les gens d’Église ont des charismes qui manquent à son père.
Mal lui en prend. La réalité se révèle plus complexe que les définitions. Yves doit se défendre
contre l’agression sexuelle du vicaire. Son recours au curé empire la situation. Réaction de
panique : une certaine solidarité cléricale, qui dure jusqu’à aujourd’hui1, l’empêche de reconnaître
le désarroi de l’adolescent. Confusion des genres : la théologie fort peu pratique du curé lui permet
de pardonner sans plus de dialogue et, du même coup, de se poser en spécialiste (médecin ou
psychologue). Il déclare Yves atteint d’une grave maladie2. Comment peut-on pardonner une
maladie? Ce genre d’attitude renvoie Yves à la solitude. On comprendra qu’il évite désormais les
voies de l’Église.
Commencent alors les cheminements tortueux que connaissent tant de gens aujourd’hui, et ce,
indépendamment de leur orientation sexuelle : essais de vie de couple non concluants, promiscuité,
drogue, etc. Malgré la tourmente, Yves garde la foi. Ce qui lui vaut une autre part de solitude. Par
exemple, lorsque ses amis éclatent de rire quand il leur confie que la pratique de sa foi religieuse
lui manque. Plus tard, la sonnerie des cloches l’amène à entrer dans l’église Saint-Pierre-Apôtre,
une des rarissimes églises de Montréal dont les portes restent ouvertes toute la journée. Le curé qui
l’accueille personnellement lui explique qu’ici les personnes sont bienvenues, quelle que soit leur
orientation sexuelle. Yves pleure durant toute l’Eucharistie et, ensuite, il raconte sa vie au curé. La
longue soirée se termine par une offre d’engagement en pastorale.
La conclusion de cet entretien apparaît comme quelque chose de merveilleux, de presque miraculeux.
Yves lui même, comme ceux à qui il raconte la chose, ne s’y attendent pas. La logique de sa démarche
devait ouvrir sur une conversion, une confession, la promesse d’un conformisme moral. Mais, dans
ce récit, le pasteur semble avoir une autre priorité. Ce n’est pas le fonctionnaire qui vérifie si son visà-vis est en règle avec le modèle institutionnel; ce qui importe, c’est le drame de souffrance et de
1. Certains évêques se réconciliation qui se joue chez Yves et l’intuition que, fort d’une telle expérience, celui-ci pourra en
demandent maintenant aider d’autres qui connaissent l’aridité de son genre de cheminement.
si elle ne résulte pas
d’une certaine
ecclésiologie courante
dans l’Institution.
2. Notons qu’encore
aujourd’hui, les journaux
nous rapportent
régulièrement les propos
d’éminents cardinaux qui
vont dans le même sens.
Cette rencontre fait penser à celle de Jésus et de la Samaritaine3. D’abord, même sentiment
d’infériorité identitaire, car, selon les lieux communs, elle ne prie pas au bon endroit et ne mène
pas une vie régulière; et Yves, lui, se trouve exclu de la communion. Puis, une rencontre
renversante : celle de religieux qui reconnaissent chez elle comme chez lui une soif qui s’enracine
dans une expérience difficile. Même réponse d’engagement dans l’action; sauf que c’est sans
attendre de mandat que la Samaritaine court annoncer que le Messie est peut-être là.
Renversement des apôtres : Jésus s’entretient avec une femme! C’est le monde à l’envers, et ça ne
s’arrête pas là. Quand ils l’incitent à manger, Jésus refuse. Il s’est déjà nourri, dit-il, en faisant la
3. Jean 4, 1-43. volonté de qui l’a envoyé. Paradoxales priorités du Sauveur : l’adoration n’est pas affaire de lieu,
4. Marc 2, 17. mais d’esprit et de vérité; puis, il n’est « pas venu appeler les justes, mais les réprouvés4 ».
sdf.info • 24 novembre 2010 • 5
Intériorité
La p’tite fleur
C
et été, un ami m’offrait une jardinière à suspendre
sous la pergola. Toute garnie de belles petites
fleurs jaunes. En arrivant à la maison, je
m’empresse de la faire voir à mon copain. « Tiens, je fais
partie de ta jardinière! », me dit-il. Devant mon
étonnement, me faisant voir une toute petite fleur mauve
dissimulée sous le feuillage, il me dit : « J’ai tellement été
longtemps la p’tite fleur mauve dans la corbeille jaune. »
Petite phrase anodine, mais qui en dit tellement long.
J’allais l’arracher, mais tout mon être me l’interdisait. Je
me suis revu enfant, tentant de me dissimuler dans la
foule. Je me suis aussi revu demandant une fille en
mariage, espérant ainsi cacher mon identité, sachant très
bien que je ne pourrais jamais la rendre heureuse. Juste
pour être comme tout le monde. Presque toute ma vie,
j’ai été moi aussi la petite fleur mauve dans cette grande
jardinière qu’est la terre. J’ai, moi aussi, espéré ne pas être
découvert, afin que l’on me laisse vivre.
La semaine suivante, aussitôt arrivé à la campagne,
comme d’habitude, mon premier souci est d’arroser mes
fleurs, mon jardin. Enfin, tout ce que j’ai semé et que je
me plais à voir pousser sur mon terrain. Arrivé devant la
jardinière, c’est l’étonnement! Il y a une centaine de
fleurs mauves! Il y en a partout. Toutes dissimulées à
travers les jaunes. Et voilà la jardinière encore plus belle.
Je me revois, l’arrosoir à la main, les yeux béants
d’admiration et la bouche grande ouverte. En acceptant
de laisser vivre cette petite fleur mauve, j’ai permis à
toutes les autres d’éclore. Encore mieux, j’ai agrémenté
ce qui s’offrait à ma vue. J’ai été à même de constater
que la différence est encore plus belle que la monotonie
d’une seule et même couleur. C’est la vie dans ce qu’elle
nous offre de plus beau.
Et en poussant ma réflexion, me revoyant adolescent
tentant de me fondre dans la foule, je me suis trouvé laid.
En effet, je ne vivais pas, je me contentais de survivre.
Alors qu’en acceptant que la p’tite fleur mauve que j’étais
ait elle aussi le droit de fleurir, je me suis soudainement
mis à vivre. Je me suis épanoui. Puis, j’ai regardé le monde
qui m’entoure. Et j’ai vu non seulement des fleurs jaunes
et mauves, mais des fleurs de toutes les couleurs. Aucune
ne se ressemble. Même chez les fleurs de la même
espèce. Chacune a une forme différente, chacune a une
couleur qui lui est propre. Ça, c’est Dieu qui, dans son
infinie bonté, l’a voulu, comme Il a voulu que chacun et
chacune de nous ait son identité et sa propre couleur.
Tant et aussi longtemps que je vivrai, je refuserai
désormais de me fondre dans la foule. Bien au contraire,
mauve
comme je le fais avec les fleurs qui ornent mon jardin, je
cultiverai mon jardin intérieur jusqu’à ce que tout ce qui
demande de vivre puisse le faire. J’essaie autant que faire
se peut d’enlever les orties et d’arracher les mauvaises
herbes, afin de laisser la place à tout ce qui pourrait y
fleurir de plus beau. Mais ça, ça prend plus qu’une saison.
Mon jardin, je commence à le préparer dès l’automne, en
prélevant les graines de mes plus belles fleurs, que je mets
à sécher durant l’hiver, les préservant du froid et de
l’humidité afin que, lorsque le printemps revient, je sois
en mesure de les mettre en terre. Bien sûr, il y a les
vivaces, celles qui reviennent d’année en année : les plus
belles. Elles sont ce que j’ai de plus merveilleux dans mon
jardin. C’est l’essence de ma vie. C’est ce qui fait que mon
jardin ne ressemble pas à celui de mon voisin.
Tout comme ma cour arrière d’ailleurs. Mais ça, c’est
parce que j’ai écouté Louis, mon copain. Alors que je
m’apprêtais à vouloir mettre droit ce qui est tout croche
sur mon terrain, il m’a demandé pourquoi je tenais
tellement à faire comme tout le monde. « Vois comme
c’est beau! », m’a-t-il dit. C’est justement parce que tout
est croche chez nous que c’est beau. Et encore là, j’ai du
me rendre à l’évidence. Mon passé me suit. Il y a encore
un peu du caméléon en moi. Je me suis donc contenté de
suspendre des lanternes ça et là dans les arbres, ce qui fait
que, même dans l’obscurité, ma différence est devenue
visible. Alors que, partout, il y a de beaux lampadaires
électriques, chez nous, de simples bougies suspendues
sous les arbres. Je suis un être à part entière. Pourquoi?
Parce que j’ai enfin accepté que je sois différent, comme
chacun et chacune d’entre vous. J’ai enfin reconnu
qu’une corbeille de fleurs n’est belle à mes yeux que
lorsqu’elle est remplie de plusieurs espèces différentes.
Différentes oui, mais chacune porte le même nom. Fleur.
Seules les espèces sont différentes. Tout comme nous
d’ailleurs. Tous et toutes, nous sommes humains, mais
tous et toutes nous avons ce petit quelque chose qui fait
de nous des êtres différents. Mais il suffit de tourner la tête
de chaque côté de nous pour nous rendre compte que
nous formons la plus belle jardinière que Dieu a créée.
Ive
Actualités
sdf.info • 24 novembre 2010 • 6
L’option préférentielle pour les pauvres ou le marché?
Développement et Paix s’inquiète des effets du virage conservateur politique et religieux sur les organismes canadiens de
justice sociale et de défense des droits humains.
par
Jonathan Blais
collaboration spéciale
Jonathan Blais est agent
de pastorale sociale au
diocèse de Montréal
(quartier Petite-Patrie),
membre du conseil
diocésain de
Développement et Paix
et étudiant à la maîtrise
en politique et droit
international à l’UQÀM.
Les membres de Développement et Paix du diocèse de Montréal, engagés dans les enjeux de
justice sociale et de coopération internationale, ont tenu, le 23 octobre dernier, une journée de
réflexion sur leur mouvement, ses options, le contexte ecclésial et sociétal actuel et les défis posés.
Depuis quelque temps, certains gestes et certaines prises de positions du gouvernement Harper ont
vivement interpellé non seulement les membres de Développement et Paix mais également un
grand nombre de personnes œuvrant dans le domaine de la coopération internationale. Ainsi, les
décisions du gouvernement conservateur de couper les subventions d’ONG telles que Kairos et
Alternatives ainsi que d’effectuer des changements d’orientation au sein de l’Agence canadienne
de développement international (ACDI) font en sorte que les enjeux de justice sociale et de droits
de la personne ne sont plus prioritaires. À cela s’ajoutent les attaques virulentes qu’a subies
Développement et Paix par un certain courant ecclésial proche des conservateurs, minoritaire, mais
qui a su se faire très présent dans la dernière année.
La première partie de la matinée portait sur l’option préférentielle pour les pauvres et s’ouvrait par
une présentation de Gregory Baum, expert au concile Vatican II. Ce dernier a notamment fait
référence au courant prophétique qui animait cette période qui a également vu naître
Développement et Paix (1965). Mentionnant qu’aujourd’hui l’Église est davantage dans un courant
sacerdotal, il a souligné que les évêques, lors du Concile, ont entériné l’option préférentielle pour
les pauvres et qu’il importe de le rappeler. Par la suite, M. Baum a précisé deux exigences de cette
option : être capable de regarder avec les yeux des exclus et être des veilleurs et veilleuses en luttant
avec détermination pour plus de justice. Rappelant que le mot préférentiel est ici entendu comme
étant « en solidarité avec toute la société, mais d’abord avec les exclus », M. Baum a ajouté que
cette option demande donc de se questionner continuellement pour savoir qui sont les pauvres de
nos sociétés, les exclus, les marginalisés? L’option préférentielle pour les pauvres est également une
option politique qui questionne le système en place, soit les structures qui engendrent les inégalités.
Ensuite, Paul Cliche, expert de l’organisme sur les questions de développement touchant
l’Amérique latine, a dressé un portrait de la pauvreté en nous rappelant qu’elle est massive,
complexe, relative et inhérente au système économique. Soulignant la nécessité primordiale de
penser et de mettre en place des mécanismes de redistribution de la richesse, il a rappelé que les
principales structures néolibérales de réduction de la pauvreté n’ont toujours pas répondu à leurs
promesses. Au contraire, la situation actuelle concernant cette lutte s’est dégradée. Alors qu’il n’y a
pas si longtemps, il était question d’éradiquer la pauvreté, il est maintenant davantage question de
réduire la pauvreté de 50 %, et ce, en se concentrant sur une partie de la population : les personnes
vivant avec moins de un dollar par jour. D’après M. Cliche, dans tous les programmes mis en place,
il n’est jamais question des racines qui causent la pauvreté, si bien que les solutions envisagées
partagent le même visage que les mesures qui ont causé la pauvreté, soit les lois du marché. Tout
est centré sur le marché qui est vu comme un dogme de base non discutable. Voilà bien le cœur du
problème! Et pourtant, les chiffres de la crise financière frappent l’imaginaire : 1 800 milliards de
dollars ont été mobilisés pour sauver le système financier alors qu’une somme de 90 milliards est
dirigée vers l’aide au développement. De plus, cette aide prend souvent la forme de prêts, et « il
1. Brian Tomlinson,
existe des preuves indiquant que l’aide continue d’être utilisée comme instrument pour favoriser les
« L’agence canadienne
politiques
stratégiques des donateurs reliées à leurs intérêts en matière de mondialisation1. »
de développement
Développement et Paix
www.devp.org
international : bilan et
perspective »
dans L’aide canadienne
au développement,
2008, p. 75.
Finalement, la question des acteurs de changement a été abordée. Prenant exemple sur les luttes
autochtones qui ont eu lieu au Pérou, M. Cliche a souligné que la réintégration du concept de sujet
dans l’Histoire est une révolution dans les sciences humaines. Considérer les pauvres et les exclus
comme étant acteurs de changement, et non plus seulement bénéficiaires dans une position de
2. Citation de subordination à un système, est un changement majeur. « Personne ne libère autrui, personne ne
Paolo Freire. se libère seul, les hommes et les femmes se libèrent ensemble2. »
sdf.info • 24 novembre 2010 • 7
Ressources
Pour aller plus loin ou pour satisfaire votre curiosité
[ Participer ]
Noël et les inégalités à l’année
Mettre tête et cœur ensemble
pour que ça change
[ Participer ]
Y a-t-il une éthique chrétienne?
Centre culturel chrétien de
Montréal
[ Participer ]
Prière des veilleurs de l’ACAT
62e anniversaire de la Déclaration
universelle des droits de l’Homme
Dans la foulée de son dossier « Vivre
à crédit » paru dans le numéro 745
(Décembre 2010), Relations s’associe
au Centre Victor-Lelièvre dans le
cadre de l’activité « Cartes blanches
aux reBelles ». Mme Vivian Labrie
nous invitera à nous demander ce que
nous pouvons faire au fil des jours, et
non seulement à l’approche de Noël,
pour faire preuve de solidarité et
combattre les inégalités.
« Pas besoin de croire en Jésus-Christ
pour être charitable! La nature humaine
est fondamentalement bonne! C’est là
une idée à la mode. Qu’en est-il
vraiment? Le fait d’être chrétien exiget-il un comportement particulier?
Qu’est-ce que cela signifie au
quotidien? Trois personnes, trois
chrétiens engagés, abordent cette
question par un témoignage personnel :
Denise Couture, théologienne féministe, Robert Dutton, homme d’affaires
bien connu et pdg de la firme Rona, et
Michel Rioux, syndicaliste et journaliste à Radio Ville-Marie. »
Soirée de prière et de réflexion de
l’Action des chrétiens et chrétiennes
pour l’abolition de la torture (ACAT) le
vendredi 10 décembre à 19 h 30 en
l’église Notre-Dame-des-Neiges, au
5366, chemin Côte-des-Neiges (métro
Côte-des-Neiges), à Montréal. Pour
information, joindre l’ACAT au 514
890-6169.
www.acatcanada.org
Ce soirée aura lieu le jeudi 25
novembre 2010 à 19 h 30 au Centre
Victor-Lelièvre, 475, boul. PèreLelièvre, à Québec. Contribution
suggérée : 5 $. Réservations : 418 6832371, poste 221. Pour information :
514 387-2541, poste 241.
www.cjf.qc.ca
Vous aimez lire le journal?
Alors, faites-le connaître à vos
parents, collègues et amis.
Et invitez-les à s’abonner
en allant directement
sur notre site Web. Merci.
La soirée aura lieu le jeudi 25
novembre à 19 h 30 en l’église des
Dominicains, 2715, chemin de la
Côte-Sainte-Catherine. Pour information, joindre Guy Lapointe au 514
739-1665.
http://centreculturel
chretiendemontreal.org
[ Voir ]
Spéciale câlins
« Pour un moment,
nos vies se rencontrent,
nos âmes se touchent. »
« Oui, des câlins gratuits sur une
magnifique chanson de Leonard
Cohen. Une façon d’humaniser son
environnement. Quoi de mieux pour
finir une dure semaine de travail? »
Gracieuseté d’une lectrice membre de
notre CA, Louise Deschamps. Visitez
ce lien : http://www.youtube.com/
watch_popup?v=hN8CKwdosjE
ou cherchez « Free Hugs in Sondrio,
Italy » sur YouTube.com
Prochaine parution du journal : 15 décembre 2010
Le journal Sentiersdefoi.info est une publication de Sentiers de foi, OSBL autonome et indépendant d’inspiration chrétienne fondé en 1984,
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ISSN 1715-8370 | 8 2010 Sentiers de foi | Tous droits réservés
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Vol. 6 no 6 / 15 décembre 2010
8 Lucie Brousseau, 2010 : Sensations
Journal Web
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indépendant
qui vise à faire
connaître
des parcours
et des lieux
où se vivent
des expériences
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Comité éditorial
Rédacteur en chef
Gérard Laverdure
Secrétaire de rédaction
Ghislain Bédard
Représentant du C.A.
Michel-M. Campbell
Itinéraire
Collaboration
Marie-Hélène Carette
Perspectives
Depuis 30 ans, Sr Blanche Dionne fait œuvre de pionnière en enseignant une
technique simple pour nous aider à arrêter la roue folle des pensées et à
réapprendre « à vivre tel que la nature nous a bâtis ». [ p. 2 ]
par Ghislain Bédard
Conception graphique
Ghislain Bédard
Intériorité
Notes et pensées du Dr Vittoz
Voici quelques citations de ce médecin suisse, glanées ici et là dans ses notes
et pensées, publiées dans le livre Angoisse ou contrôle. Une occasion de saisir
un peu mieux l’essence de cette technique porteuse d’équilibre. [ p. 6 ]
Présenté par Sr Blanche Dionne
Pour nous joindre
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ISSN 1715-8370
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L’instant présent, lieu de guérison et de présence réelle
L’approche mise en œuvre par Roger Vittoz, en Suisse, il y a plus d’un siècle,
ne nous ouvre-t-elle pas plusieurs perspectives pour aller de l’avant dans notre
propre expérience de réceptivité et d’ouverture à l’instant présent? [ p. 4 ]
par Marie-Hélène Carette
Photographie
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La technique Vittoz : apprendre à vivre et à penser
Actualités
Noël sur de nouveaux sentiers
Au lieu de sauter par-dessus Noël, pourquoi ne pas en profiter pour dire notre
affection, notre reconnaissance dans notre entourage et stimuler l’espérance
en signalant les signes des temps du règne de Dieu à l’œuvre? [ p. 7 ]
par Gérard Laverdure
Fêtons 5 ans
Le journal Web Sentiersdefoi.info passe à l’ère Facebook
Une tout autre dimension s’ouvre à nous, à la veille d’une nouvelle année. Une
ère nouvelle, pleine de défis... Espérons qu’elle sera porteuse des plus belles
initiatives et des plus beaux échanges. [ p. 8 ]
par Michel-M. Campbell et Ghislain Bédard
sdf.info • 15 décembre 2010 • 2
Itinéraire
La technique Vittoz : apprendre à vivre et à penser
Depuis 30 ans, Sr Blanche Dionne fait œuvre de pionnière en enseignant une technique simple pour nous aider à arrêter
la roue folle des pensées et à réapprendre « à vivre tel que la nature nous a bâtis ».
par
Ghislain Bédard
sdf.info
Au moment où vous lisez ces lignes, votre esprit est-il distrait? Vogue-t-il sans arrêt parmi les
nombreuses préoccupations qui vous assaillent? Ou alors êtes-vous totalement présent à ce que
vous faites et bien connecté à votre respiration? Dans le premier cas, vous souffrez probablement
d’une maladie bien répandue aujourd’hui : le vagabondage mental! Mais ne vous en faites pas, ce
mal moderne atteint la majorité des gens de nos sociétés grouillantes d'activités...
Pour remédier à ce problème, sœur Blanche Dionne1 est la femme qu’il vous faut! Cette femme
dynamique, solide sur pieds, bien ancrée dans le réel, l’esprit des plus alertes pour ses 85 ans bien
sonnés, se dévoue depuis 30 ans à la transmission de la technique Vittoz, une méthode simple,
514 381-1867 naturelle, de « rééducation du contrôle cérébral » développée par un médecin lausannais, le Dr Roger
Vittoz (1863-1925) à la suite de ses observations du fonctionnement du cerveau. Une technique qui
mériterait d’être mieux connue, compte tenu du stress et de l’anxiété qui accaparent de plus en plus
nos esprits agités. « Le cerveau a besoin de sa nourriture, affirme Sr Dionne, et la nourriture du
cerveau, c’est la sensation. C’est la sensation qui doit toujours être première au cerveau et qui
équilibre la pensée. L’hémisphère droit reçoit les sensations, l’hémisphère gauche émet des pensées.
Le Vittoz, c’est la rééducation du contrôle cérébral par la réceptivité de la sensation. »
Sr Blanche Dionne
665, boul. Gouin Est
Montréal (Québec)
Sœur Dionne était à une session de formation pour les animateurs du PRH2, au début des années
1970, quand elle a découvert cette technique. M. André Rochais, l’animateur, a alors proposé au
groupe de faire un exercice Vittoz. « Il a dit : "Vous allez aller dans la nature puis essayer autant
que possible de rendre tous vos sens réceptifs. Nourrissez votre cerveau de sensations, ne laissez
pas votre pensée tourner en rond. Ne pensez pas à la beauté de la fleur, mais voyez-la simplement.
Votre œil reçoit, le cerveau accueille la sensation." » Sr Dionne s’en rappelle comme si c’était hier :
« J’ai vraiment obéi à ce qu’il nous a dit de faire et l’ai fait avec goût. Après, quand je suis rentrée,
mes idées étaient claires, je me sentais tellement bien. J’ai saisi qu’il y avait quelque chose là. Après
la session. j’ai continué à l’appliquer pour moi-même, en m’amusant. Je ne pensais pas une
1. Sr Blanche Dionne est seconde à le transmettre. » Quelques années plus tard, par hasard, elle rencontrera le Dr Paul
une religieuse de la
Chauchard3, un enseignant reconnu du Vittoz, qui la convaincra de le faire...
Congrégation NotreDame du Bon-Conseil
de Montréal.
2. Organisme de
formation et de
recherche Personnalité
et Relations humaines.
3. Le Dr Paul Chauchard
(1912-2003) était un
éminent médecin,
chercheur, philosophe et
enseignant français. Il
est l’auteur de plus de
80 livres. Il a été un
praticien du Vittoz
reconnu. Il a d’ailleurs
écrit avec sa femme
Jacqueline un guide
pratique intitulé
Apprendre à vivre et à
penser, qui est encore
un document de
référence important pour
l’enseignement de la
technique Vittoz.
Ainsi, au début des années 1980, Sr Dionne clôt son dossier d’animatrice PRH et commence son
vrai travail de pionnière en enseignant la technique Vittoz, inconnue alors au Québec. Elle offre des
rencontres individuelles, mais se concentre surtout sur les rencontres de groupe, qu’elle donne
plusieurs fois par semaine. Progressivement, les participantes et participants « réapprennent à bien
vivre et à bien penser » en reprenant contact avec leur corps. « La première chose à faire est de les
amener à prendre conscience de leur respiration. J’ai été souvent surprise de voir que la plupart
des personnes n’ont pas une respiration ventrale, mais une respiration rapide et haute. Je les invite
alors à observer leur respiration et à prendre conscience de ce qu’ils sont en train de vivre. Bien
souvent alors, les questions se mettent à surgir! Ainsi, ils voient que l’hémisphère gauche tourne en
rond sur lui-même. Le cerveau, en premier, doit recevoir la sensation. Bien sentir pour mieux
penser. Alors, si la pensée s’agite, chose certaine, on ne comprendra pas grand-chose à la soirée
qu’on va vivre. Ensuite, je les invite à se lever, à prendre conscience de leur état. Se sentent-ils bien
campés sur leurs pieds ou est-ce encore leur tête qui s’emballe? Alors, tout doucement, je les amène
à rétablir contact avec leur corps. Ensuite, à rendre leurs sens réceptifs. Prendre le temps de goûter,
de sentir, de voir, d’entendre, de toucher. Si tu respires mal au départ, tu ne réussiras aucun des
exercices. » Des exercices aussi simples que sentir la fraîcheur du verre d’eau dans sa main, les
aspérités d’une roche, l’odeur d’un fruit ou goûter un bonbon ou sentir ses fesses sur la chaise, etc.
Sr Dionne a d’ailleurs tout un assortiment d’outils pour faire faire les exercices : des balles dures
et molles, des roches froides ou rugueuses, des objets colorés, de petits tableaux noirs et des craies.
Des exercices qui mènent de plus en plus vers un état physique et mental sain et équilibré. Au fil
Lire la suite, page 3
Itinéraire (suite)
sdf.info • 15 décembre 2010 • 3
des dix rencontres prévues, « on prend d’abord le temps de se concentrer, sans forcer, sur les
sensations. Ensuite, on va plus loin, en se concentrant sur une pensée ou une idée à la fois. Ça
Vittoz IRDC peut être des chiffres, des graphiques. Ensuite, on s’amuse par des exercices concrets à éliminer
www.vittoz-irdc.net ces images. On les écrit sur le tableau, ensuite on efface tout. Puis, on refait l’exercice
mentalement. Concentration, puis élimination. Ce qui nous amène, avec la pratique, à sortir de sa
tête des idées qui risquent de nous la faire perdre. (Rires) C’est important que le cerveau en soit
capable; il y a des personnes qui brassent toujours la même idée...
Association Roger Vittoz
www.therapie-vittoz.org
4. Si vous avez le goût
de vous y mettre,
Sr Dionne vous propose
ces petits devoirs
quotidiens tout simples
que chacun peut
pratiquer pour soi pour
commencer, devoirs
qu’elle donne bien sûr
aux participants de la
session sur la technique
Vittoz : au sortir du lit,
bien sentir ses pieds sur
le sol; chaque matin au
lever, s’étirer en sentant
bien tout son tonus
musculaire; marcher 30
minutes par jour en étant
attentif à toutes les
sensations de son corps
(pas en remuant les
idées dans sa tête);
bâiller quand l’envie
nous en prend pour bien
installer la détente en
nous; s’arrêter une ou
deux minutes deux ou
trois fois par jour pour
observer sa respiration
et l’approfondir, etc.
« Ensuite, on pratique l’acte volontaire, en faisant des actes aussi simples que choisir de prendre
un objet entre deux. L’important, c’est d’avoir une idée claire : qu’est-ce que je veux? Ensuite,
d’être lucide : est-ce possible? Enfin, il importe de sentir vraiment son "je veux". Alors, quand une
personne passe dans l’acte volontaire, son idée est claire, elle sait ce qu’elle veut, puis elle veut
ce qu’elle fait. Elle ne marche pas de la même façon que quand elle fait une chose parce que tout
le monde le fait. Il y a une énergie tout autre en elle, car la personne établit vraiment contact avec
son centre vital. L’acte volontaire n’est pas fatigant! » Puis, on passe aux appels d’état : sentir le
calme, la paix, l’amour, la vie circuler en soi... Bref, il y aurait long à dire encore. Mais comme Sr
Dionne le mentionne souvent : « Vittoz, il vaut mieux le vivre que de tenter de le comprendre, pour
en saisir tous les bienfaits pour la santé physique et mentale4. »
Le docteur Vittoz, en grand chrétien dévoué, a soigné avec sa technique des milliers de patients atteints
des troubles d’anxiété les plus communs aux névroses les plus complexes. Sr Dionne, qui a initié pour
sa part tout autant de personnes à cette approche au Québec, a entendu souvent cette affirmation dans
la bouche de ses élèves : « Vittoz a sauvé ma vie. » Pour elle, la technique Vittoz est véritablement un
instrument de liberté intérieure et de guérison. « La vie doit circuler librement en nous, du bout des
orteils au cuir chevelu. Et il faut prendre le temps de la sentir. La liberté intérieure commence quand
il n’y a pas de blocages dans la circulation des sensations en nous. Et cela rejaillit sur notre vie
spirituelle. Si je ne sens pas mes sensations physiques, comment pourrais-je être capable d’accueillir
les sensations plus ténues qui viennent de mon centre vital. On ne peut être en contact avec sa
dimension spirituelle si on ne l’est pas d’abord avec son corps. Si tu te fais des idées de Dieu, tu es à
côté de la réalité de Dieu. Vaut mieux sentir Dieu que d’avoir une idée de Dieu. »
Le technique Vittoz, conclut-elle, c’est « réapprendre à vivre tel que la nature nous a bâtis ». Ce
ne peut pas être plus simple.
Perspectives
sdf.info • 15 décembre 2010 • 4
L’instant présent, lieu de guérison et de présence réelle
L’approche mise en œuvre par Roger Vittoz, en Suisse, il y a plus d’un siècle, ne nous ouvre-t-elle pas plusieurs
perspectives pour aller de l’avant dans notre propre expérience de réceptivité et d’ouverture à l’instant présent?
par
Marie-Hélène Carette
collaboration spéciale
L’intuition fondamentale du médecin suisse a jailli de sa propre expérience d’accompagnement de
malades en déficit de présence à l’instant présent. Son intuition portait sur la réalité des troubles
nerveux qui surgissent du fait de l’émissivité surpassant la réceptivité, au point de créer un
déséquilibre non seulement sur le plan cérébral mais aussi dans l’attitude globale du sujet dans la
vie quotidienne. Vittoz a ouvert le chemin d’un rééquilibre passant directement par l’expérience
sensorielle de rétablissement de la réceptivité au moment présent. Les exercices qu’il proposait
visaient essentiellement le rétablissement dans la vie consciente; les moyens simples le favorisant
donnèrent des résultats concrets dans la vie de ses patients. Qu’en est-il pour nous aujourd’hui?
Marie-Hélène Carette
est tout récemment
retraitée de la Faculté de
théologie et de sciences
religieuses de
l’Université Laval,
à Québec.
Elle collabore à la
formation pratique des
membres de différents
groupes en les guidant
dans une démarche de
croissance spirituelle.
La technique Vittoz est
au fondement de toute
son approche.
Il semble que l’héritage vittozien puisse avoir de l’impact sur notre expérience de vie en partant du
même principe, à savoir que nous émettons souvent plus que nous ne recevons du réel; que ce soit sous
forme de jugements de valeur, d’émotions désagréables ou de présupposés. D’où un déséquilibre,
comme un survoltage du faux-moi en quête de sécurité, de reconnaissance et de pouvoir.
1. Le Nuage
d’inconnaissance est un
ouvrage anonyme
du 14e siècle, en langue
anglaise, dont la
spiritualité s’inspire
immédiatement de
l’œuvre de Denys
l’Aréopagite.
2. KEATING, Thomas,
Open mind, open heart,
Rockport, Mass: Element
Books, 2000; voir aussi
le mouvement
Contemplative Outreach
qu’il a fondé:
www.contemplative
outreach.org
L’espace intérieur du sujet est occulté, tout comme sa présence à lui-même dans l’accueil du réel,
ici/maintenant. Ainsi, l’inconscient prend le pas sur le conscient chez le sujet : une dilution de son
visage d’humanité est repérable sur les plans de l’action, de la relation et de la réflexion. La
personne devient malade ou robotisée, absente d’elle-même.
Un premier regard sur l’action nous apprend à reconnaître à quel point notre monde présent est dominé
par une logique de l’urgence, et que sans rétablissement conscient, le sujet court vers sa perte dans un
épuisement sans fin : combien sommes-nous en réalité bien plus portés à réagir qu’à agir? Ici, la
réceptivité du sujet opère un espace où la volonté se situe et « respire », si l’on peut dire : cet espace
salutaire en est un de réceptivité et de présence réelle à soi, d’où résulte non pas une réaction mais
plutôt un acte volontaire de l’ordre de « que ton oui soit oui et ton non soit non »; on pourrait même
affirmer qu’un tel acte issu de la réceptivité du sujet en est un de création plutôt que de réaction;
ultimement, de contemplation, puisque le passage de la réaction à la création peut y conduire.
Un second regard sur la dimension relationnelle nous apprend qu’une véritable relation à l’autre
ne va pas de soi : il y a tant de préoccupations qui souvent parasitent la présence à l’autre du sujet
dans l’ici/maintenant et occultent son ressenti, au point qu’il lui devient difficile de se re-situer en
mode « réceptivité », non seulement de l’autre personne, mais aussi de soi-même. S’accueillir « tel
quel » avec ce que l’on porte dans l’ici/maintenant devient un acte conscient et nettoie l’espace
intérieur tout comme l’espace relationnel, au sens où la vérité sur soi rétablit une relation
authentique à l’autre. S’accueillir soi-même comme étant fatigué, dépassé ou même dans un état
de fermeture devient lieu conscient où il est possible à un sujet d’être avec l’autre en vérité. Tout
comme il est possible d’accueillir en soi la joie et la paix dans l’ici/maintenant avec l’autre.
Loin de refermer sur soi, la vérité de son être accueilli « tel quel » dans l’ici/maintenant ouvre un
espace insoupçonné de relation vraie à l’autre : c’est ainsi qu’il devient possible de se situer dans la
relation, plutôt que de l’éviter et de vivre sous un mode « émissivité » qui a tôt fait d’épuiser le sujet.
Se pourrait-il alors que les fondements de l’approche vittozienne rejoignent en leur essence, les
grands courants de spiritualité? À titre d’exemple, un moine trappiste, Thomas Keating, reprenant
avec ses frères moines (Basil Pennington et William Meninger, o.c.s.o.) les fondements de la
spiritualité des Pères et Mères du Désert, et s’inspirant du Nuage d’inconnaissance1, propose une
approche spirituelle de même qu’une démarche concrète de prière qu’il nomme Centering Prayer
que nous pouvons traduire par « prière de consentement »; la démarche proposée2 rejoint en son
essence l’approche vittozienne, au sens où elle privilégie aux méditations discursives une attitude de
réceptivité et d’accueil dans l’ici/maintenant comme chemin privilégié d’union aux autres et à Dieu.
Lire la suite, page 5
sdf.info • 15 décembre 2010 • 5
Perspectives (suite)
Enfin, un troisième regard nous porte vers la dimension réflexive de notre visage d’humanité. En
effet, redonnant au malade sa place de sujet, en choisissant d’inverser l’émissivité cérébrale et de
se placer en mode « réceptivité », Vittoz, du coup, redonne son pouvoir à la personne; au sens où
celle-ci, grâce à une présence accrue à elle-même à la suite d’exercices fort simples mais efficaces,
du même ordre que ceux des sages du Désert des premiers siècles du christianisme, retrouve son
espace intérieur désencombré; dès lors, il devient disponible à recevoir ce qui jaillit de ses
profondeurs, et qui est de l’ordre de son identité profonde.
3. JUNG, C. G.,
La réalité de l’âme,
I. Structure et
dynamique de
l’inconscient;
et II. Manifestations de
l’inconscient, Éd. Livre
de Poche, 2007.
4. « Une joie que nul ne
pourra vous ravir »
(Jn 16, 22),
repris par Lytta Basset;
voir son livre
La Joie imprenable,
Labor et Fides, 1990.
Ainsi, le sujet « rendu à lui-même », passant de l’émissivité à la réceptivité, devient de plus en plus
en mesure d’accueillir ce qui l’entrave et qui est de l’ordre de l’ombre; Jung sur ce point ouvre
avantageusement la voie3 : accueillir ce qui monte des profondeurs et semble effrayant à première
vue ne tue pas le sujet, mais au contraire, lui donne de passer à des niveaux de conscience
(awareness) qui le rendent apte à s’intérioriser, s’accueillant avec ses limites, et se découvrant
habité non seulement de lui-même, mais de la réalité ultime qui le constitue.
De ce lieu de son intériorité, la personne, au lieu de se diluer dans l’insignifiance du temps qui
passe au point d’en devenir désorientée ou malade, devient capable de liberté et de dépassement.
Pouvons-nous ici risquer de parler d’ouverture à l’interdépendance, dans la ligne de l’amour des
ennemis et des artisans de paix? Et si l’ici/maintenant, accueilli en toute conscience, devenait lieu
de guérison, mais aussi de découverte et de joie imprenable4? N’est-ce pas vers ce lieu du
« Royaume au milieu de nous » que nous convie Jésus, le Maître intérieur de l’Évangile, comme
aussi les sages tels Bouddha, Gandhi ou Krishnamurti qui ont privilégié la voie de l’intériorité?
LA PAROLE EST À VOUS
N’hésitez pas à nous faire part de vos commentaires à propos des différents articles ou sujets
abordés. Pour ce faire, vous pouvez nous écrire un court message à : [email protected]
ou nous laisser désormais vos commentaires sur Facebook (voir p. 8). Nous sommes vivement
intéressés à connaître vos opinions et vos suggestions. Merci beaucoup!
sdf.info • 15 décembre 2010 • 6
Intériorité
Notes et pensées
du Dr Roger Vittoz
Avoir conscience d’un acte, ce n’est pas le penser, mais le sentir.
Tirées du livre Angoisse ou contrôle Notes et pensées du Dr Roger Vittoz,
Paris, Éditions du Levain, 1976.
La réceptivité absolue, c’est être en contact avec tout ce qui nous entoure.
C’est à la justesse de la sensation que l’on reconnaît que l’idée est juste.
(À un malade qui laissait tomber un gant :) Vous laissez tomber votre conscience.
Il faut nous mettre tout entier dans ce que nous faisons, c’est le moyen de
perfectionner nos moindres actes. Pour cela, il faut acquérir l’unité, qui concentre
toutes nos forces, au lieu de les gaspiller en pure perte.
Une seule idée fixe peut créer un état de déséquilibre.
La dépression provient d’une fatigue excessive, de la surexcitation et de la tension.
Vivez consciemment, et non pas en révolte.
La tension provient d’une chose mal acceptée. Découvrez la cause et puis agissez
consciemment.
Il faut choisir entre accepter la vie ou s’y heurter.
Notre paix ne doit pas dépendre des choses extérieures mais d’un principe intérieur
de liberté qui nous permet de dominer toujours tout ce qui est déprimant et pénible.
Toute idée qui déprime est une idée fausse : le vrai ne déprime pas.
Mieux vaut sentir Dieu que l’idée de Dieu.
Il faut prier avec le cœur et non avec la tête.
Pourquoi craindre et nous inquiéter, puisque l’avenir est dans les mains de Dieu?
Il faut savoir faire le silence en soi, s’ouvrir pour recevoir. C’est bien là que nous
avons tout à recevoir. Mais il faut savoir attendre, nous mettre simplement dans la
disposition de recevoir ce que nous ne pouvons nous donner nous-même.
sdf.info • 15 décembre 2010 • 7
Actualités
Noël sur de nouveaux sentiers
Au lieu de sauter par-dessus Noël, pourquoi ne pas en profiter pour dire notre affection, notre reconnaissance dans notre
entourage et stimuler l’espérance en signalant les signes des temps du règne de Dieu à l’œuvre?
par
Gérard Laverdure
sdf.info
1. Je porte aussi à votre
attention une initiative
française dont nous
pourrions nous inspirer
au Québec :
la campagne
Noël autrement du
Collectif chrétien Vivre
Autrement
www.noel-autrement.org
De même que cette
proposition du Réseau
québécois de la
simplicité volontaire dans
son Bulletin Simpli-Cité
de l’hiver 2004
dont le thème est
« Noël autrement »
www.simplicite
volontaire.info
(page Documentation)
2. Mes amis Ghislain et
Lucie vendent justement
des cartes originales et
écologiques. Voir le site
de Carrément poétique :
www.carrement
poetique.com
Qu’est-ce donc qui nous énerve tant à l’approche du temps des fêtes de Noël? Magasinage en foule,
choix de cadeaux, budget minuscule ou déjà dans le rouge... et des attentes irréalistes de cadeaux
dans l’entourage, des rencontres familiales non désirées ou l’isolement dans un petit studio? Dur,
dur de résister aux routes de la consommation toutes tracées par la publicité et aux habitudes du
passé1. Y aurait-il de petits sentiers de travers, moins encombrés, plus authentiques et joyeux?
Jadis... dans un cégep du Québec, un trio d’animateurs (agent de pastorale, psychologue et infirmière)
décida de profiter de la Saint-Valentin pour susciter un vent d’expression de reconnaissance et
d’affection entre étudiants d’abord et membres du personnel ensuite dans ce gros village qu’est un
cégep. L’amour, ce n’est pas juste en couple! Alors, sous forme de mémos téléphoniques colorés
servant de « pigeons voyageurs », les messages se retrouvèrent collés sur les portes des cases et des
bureaux, sur les écrans d’ordi, les sacs à dos, les pare-brise d’auto, les agendas, les tableaux. La magie
de l’amour s’était emparée des habitants du village. Nous avons reçu beaucoup de témoignages des
bienfaits dans le cœur, l’âme, le corps et les espaces de travail de cette opération inattendue. Alors,
pourquoi ne pas profiter des rencontres du temps des fêtes ou de celles qui surgissent à l’improviste
pour se dire mutuellement notre estime et notre affection? Pour se redire ce qu’on apprécie de l’autre,
ses qualités, sa beauté, sa simple présence, pendant qu’il ou elle est encore parmi nous. Une carte
bien choisie...2 une note, un mot en personne ou au téléphone, une main sur l’épaule. « J’apprécie
vraiment que tu sois mon ami, que tu sois présent dans ma vie! » La terre de la soif, en communauté
comme en famille, attend cette bordée d’affection et de joie. L’Amour est inventif, surtout quand le
Christ habite chez nous; alors tracons-lui de nouveaux sentiers pour qu’Il puisse circuler.
Qui a des yeux pour voir et des oreilles pour entendre se rend compte que les signes des temps sont
nombreux à stimuler nos engagements et notre persévérance. Notre monde est en ébullition
d’initiatives sur tous les fronts. Dans l’enfer haïtien, des milliers de personnes se dévouent pour le
bien-être et la sécurité de leurs concitoyens. Des milliers de personnes se manifestent à toutes les
conférences internationales des puissants de ce monde pour éveiller leur conscience et les rappeler
à leurs responsabilités planétaires. Au Québec, des milliers de citoyens et citoyennes ont pris la rue
pour protester contre les augmentations de frais et les coupures dans les services publics, car cela
touche surtout les pauvres et les laissés-pour-compte. L’Église du Québec démontre sa solidarité
avec les gens dans des milliers d’initiatives locales, nationales et internationales.
Des sentiers-signes-des-temps, nous en avons déjà relevés 75 dans nos pages depuis 5 ans. Des
personnes inspirantes : Laurette Lepage, femme libre et mère des jetés à la rue; André « père Jean »
Patry, envoyé aux prisonniers; Yves Côté, frère des homosexuels et des lesbiennes; Guy Paiement,
l’éveilleur de conscience; Alexandra L’Heureux Bilodeau, jeune coureuse des bois de la Côte-Nord;
des initiatives comme la bénédiction des animaux, le Caféchange de l’Église Unie, les Églises
vertes, etc. Et tant d’autres disponibles sur notre site Web. On n’arrive pas à tout répertorier. Des
étincelles visibles du grand feu qui se répand dans les racines de toute la Terre. Des frémissements
d’arbres, signes du passage du Souffle divin chez nous. Des signes partout, j’vous dis!
Nouvelle brève
par
Michel-M. Campbell
Président de
Sentiers de foi
À la suite des réunions de l’Assemblée générale et du Conseil d’administration de l’organisme
Sentiers de foi, le lundi 6 décembre dernier, nous vous faisons part de la nouvelle composition de
son CA : Michel-M. Campbell (président), Jean-Philippe Perreault (vice-président), Gilles Noël de
Tilly (secrétaire), Louise Deschamps (trésorière), Johanne Phillips, Paul-André Giguère et Denis
Fortin (conseillers). Un grand merci à Pierre Lalonde qui quitte cette instance après dix années
d’engagement. C’est sous sa présidence que le journal Sentierdefoi.info a été fondé. Un joyeux Noël
à vous des membres du Conseil, tout en simplicité et en amitié chaleureusement exprimées.
Fêtons 5 ans
sdf.info • 15 décembre 2010 • 8
Le journal Web Sentiersdefoi.info passe à l’ère Facebook
Une tout autre dimension s’ouvre à nous, à la veille d’une nouvelle année. Une ère nouvelle, pleine de défis... Espérons
qu’elle sera porteuse des plus belles initiatives et des plus beaux échanges.
par
Michel-M. Campbell
président de
Sentiers de foi
et
Ghislain Bédard
sdf.info
Nous avons déjà annoncé que, pour célébrer son 5e anniversaire, le webzine Sentiersdefoi.info
expérimenterait divers moyens pour interagir avec son lectorat. Aussi, nous vous invitons à passer
dès aujourd’hui à une autre dimension...
En effet, depuis le 10 décembre dernier, votre webzine a
désormais sa page Facebook : Journal Web Sentiersdefoi.info.
Cette initiative nous permettra d’annoncer à un public plus large
non seulement la parution d’un nouveau numéro du journal
toutes les trois semaines, mais aussi de diffuser encore plus son contenu et ses articles, ainsi que
toute autre information pertinente en lien avec nos préoccupations, entre les parutions. De plus,
nous y explorerons progressivement d’autres facettes de ce réseau social en offrant, par exemple,
un lieu de discussion sur l’expérience spirituelle du cheminement dans un sentier de foi...
Mais enfin, et surtout, cette interface Web vous permettra, à vous, d’interagir régulièrement avec
votre webzine préféré et de commenter ses articles. Et à nous, de rester à l’affût de vos intérêts, de
vos questions, de vos commentaires... Et ce, presque en direct!
Cherchez dans
Facebook
Journal Web
Sentiersdefoi.info
et dites-nous « J’aime »
pour vous joindre
au groupe.
Ainsi, si vous vous êtes déjà inscrits au réseau social Facebook, ou si vous vous apprêtez à le faire,
vous pourrez profiter de ce nouvel accès à votre webzine. Il vous suffit d’écrire « Journal Web
Sentiersdefoi.info » dans la barre de recherche au haut de votre page Facebook, de vous rendre à
la page du journal et de cliquer avec enthousiasme sur le bouton « J’aime »! Ainsi, vous pourrez
prendre connaissance sur votre babillard de toutes les informations qui seront publiées de temps à
autre par le webzine Sentiersdefoi.info sur ce fameux Livre des visages. Et vos amis Facebook
seront sûrement tentés de faire de même en vous voyant adhérer au groupe. Et cela fera boule de
neige... Voilà la magie d’Internet!
Le journal Sentiersdefoi.info vient de passer à l'ère Facebook. Répandez la nouvelle! Ensemble, un
peu plus unis par la Toile, nous marcherons sur des sentiers pleins d'espérance...
sdf.info • 15 décembre 2010 • 9
Ressources
Pour aller plus loin ou pour satisfaire votre curiosité
[ Voir ]
Jamais je n’oublierai
le 6 décembre 1989
Exposition
[ Lire ]
Mama Miti, la mère des arbres
de Claire Nivola
Le Centre Saint-Pierre présente en
décembre une exposition intitulée
« Jamais je n’oublierai le 6 décembre
1989 ». Une œuvre collective et
communautaire pour nous rappeler la
tragédie de Polytechnique. Un
message de paix, d’amour et de
vigilance pour que cessent l’intolérance et la violence.
www.centrestpierre.org
« C’est aujourd’hui l’erreur répandue
parmi les hommes de vouloir guérir
séparément l’âme et le corps. » Ce
propos que Platon prêtait à Socrate
reste tout à fait d’actualité, même 24
siècles après. La pratique du Dr Vittoz
ainsi que cet ouvrage, le seul qu’il ait
écrit, témoignent d’une préoccupation
pour la personne tout entière.
Voici un livre plein d’espoir, un livre à
offrir à Noël aux enfants, et à ceux et
celles qui ont un cœur comme eux,
pour redonner du sens à la vie, un livre
qui invite à oser transformer le monde!
[ Célébrer ]
Joyeux Noël
de l’équipe du journal Sdf.info
Que ce temps de grâce et de réjouissances vous permette de refaire vos
forces, de recharger vos piles
d’énergie, de nourrir vos sensations,
de bénir vos relations et d’élever
votre cœur et votre âme. Que la Vie
vous comble de bienfaits. Et que la
paix s’installe un peu plus dans tous
les cœurs et entre toutes les nations.
Joyeux Noël à tous et toutes.
[ Lire ]
Traitement des psychonévroses par la rééducation
du contrôle cérébral
du Dr Roger Vittoz
Résumé : Wangari Maathai ne reconnaît pas son Kenya natal. Les arbres ont
été coupés, les rivières sont à sec. Face
à la déforestation, celle que les
Kényans surnomment affectueusement Mama Miti, « la mère des
arbres » en swahili, a alors une idée
simple, mais si grande.
Le parcours de Wangari Maathai
témoigne de la force de l’engagement
en faveur des droits humains. En 2004,
elle devient la première femme
africaine à recevoir le prix Nobel de la
paix pour « sa contribution en faveur
du développement durable, de la
démocratie et de la paix ». Un album
magnifiquement illustré.
Éditions Le Sorbier, 2008.
Dans ce texte, publié au début du
siècle [XXe], Roger Vittoz s’affirme
comme un des précurseurs des
courants thérapeutiques modernes.
Épi/Desclée de Brouwer, 1993.
[ Participer ]
Noël, une secousse d’espérance
Soirée avec M. Michel St-Onge
Une rencontre intitulée « Noël… Une
secousse
d’espérance »
avec
M. Michel Saint-Onge, théologien de
l’icône, aura lieu le jeudi 16 décembre
à 19 h 30 à la librairie Paulines, 2653
rue Masson, à Montréal.
À Noël, nous chanterons « Le monde
entier tressaille d’espérance ». L’icône
de la Nativité nous invite à nous laisser
secouer par l’espérance suscitée par un
événement arrivé il y a 2000 ans. Une
méditation d’espérance à l’occasion de
Noël organisée par le Centre Emmaüs,
Méditation et spiritualité hésychaste.
Contribution suggérée : 5 $ Pour information, joignez le 514 276-2144.
www.librairie.paulines.qc.ca
Prochaine parution du journal : 19 janvier 2011
Le journal Sentiersdefoi.info est une publication de Sentiers de foi, OSBL autonome et indépendant d’inspiration chrétienne fondé en 1984,
qui a pour mission d’être un espace favorisant la connaissance, la reconnaissance et la collaboration des sentiers de foi au Québec,
dans une perspective chrétienne inscrite dans le pluralisme actuel.
ISSN 1715-8370 | 8 2010 Sentiers de foi | Tous droits réservés
Ce journal, publié uniquement sur le Web, est de ce fait entièrement écologique. Imprimez-le et diffusez-le en pensant à l’environnement.
2005-2010
5
ans de marche
dans les pas du vent
de
foi.info
Sentiers
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Vol. 6 no 7 / 19 janvier 2011
Comité éditorial
Rédacteur en chef
Gérard Laverdure
Secrétaire de rédaction
Ghislain Bédard
Représentant du C.A.
Michel-M. Campbell
Collaboration
Daniel Fradette
Raymond Lemieux
8 Lucie Brousseau, 2011 : Énergie créatrice (détail)
Journal Web
bimensuel
indépendant
qui vise à faire
connaître
des parcours
et des lieux
où se vivent
des expériences
humaines
et spirituelles
novatrices.
Itinéraire
Chez plusieurs artistes, quête artistique et quête spirituelle se conjuguent, ce que
la Clarté-Dieu veille à mettre en lumière. Un espace de liberté à découvrir au
détour d’un sentier... [ p. 2 ]
par Daniel Fradette
Perspectives
Conception graphique
Ghislain Bédard
Intériorité
Pour nous joindre
[email protected]
Pour vous abonner
www.sentiersdefoi.info
Abonnement gratuit.
ISSN 1715-8370
8 2011 Sentiers de foi
Tous droits réservés
L’art est aussi une quête...
En nous invitant à la table de la beauté et de la création, les artistes nous
ouvrent à la profondeur spirituelle de toute chose et, par conséquent, à la
contemplation. [ p. 3 ]
par Raymond Lemieux
Photographie
Lucie Brousseau
Ce journal Web existe
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97, rue de l’Aqueduc
Repentigny (Qc) J6A 4E2.
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Une clairière dans la jungle urbaine
La foi et la culture
« Plus que jamais, la foi a besoin de la culture, de la connaissance, de la
réflexion pour s’alimenter et croître. Foi et culture doivent être nourries et
entretenues en interactivité. » Un texte de Roland Arpin. [ p. 5 ]
Présenté par la Clarté-Dieu
Actualités
Métamorphoses du patrimoine religieux
Le paysage des édifices religieux poursuit sa transformation à grande vitesse.
L’entretien de ce trésor patrimonial exige des sommes faramineuses. Sommesnous prêts à préserver collectivement cet héritage qui contient notre âme? [ p. 6 ]
par Gérard Laverdure
Ressources
Pour aller plus loin ou pour satisfaire votre curiosité
Des activités diverses et des ressources pertinentes. [ p. 7 ]
sdf.info • 19 janvier 2011 • 2
Itinéraire
Une clairière dans la jungle urbaine
Chez plusieurs artistes, quête artistique et quête spirituelle se conjuguent, ce que la Clarté-Dieu veille à mettre en lumière.
Un espace de liberté à découvrir au détour d’un sentier...
par
Daniel Fradette
collaboration spéciale
Le sentier traversait une forêt dense et la végétation ambiante ne laissait place à aucune
perspective. Filtrés par l’épais feuillage, les rayons de lumière se donnaient à voir, nourrissant
le sous-bois dans sa fragilité. Qu’il était bon de se laisser envahir par ces effluves végétaux
portés par l’humidité ambiante que retenait le couvert végétal! Puis, tout à coup, au détour du
sentier, surgi de nulle part, un espace dégagé de tout arbre, inondé de lumière, idéal pour
déposer son sac à dos et se laisser choir quelques instants pour goûter la chaleur du midi avant
de poursuivre la route...
Détenteur d’une maîtrise
en théologie et d’un
bacc. en arts visuels,
Daniel Fradette se
passionne pour l’univers
des religions et les
diverses expressions
spirituelles. Après 6 ans
au Japon dans le champ
du travail social et de
l’interreligieux, il a dirigé
le Centre d’information
sur les nouvelles
religions à Montréal. Il
est actuellement
coordonnateur du
secteur de la Vie
spirituelle et religieuse à
l’Université Laval.
Qui n’a jamais vécu une telle expérience qu’on ne croirait possible que hors de la grande ville! Et
pourtant, quiconque ose s’aventurer à Québec et emprunte ce grand sentier de bitume parsemé de
grands ormes qu’est la Grande-Allée y trouvera, au cœur de la jungle urbaine, au milieu des
édifices en construction et des ministères gouvernementaux, une clairière... la Clarté-Dieu.
L’espace
Au cœur de la clairière, un espace public accueille tantôt des entretiens, des réunions, tantôt des
célébrations ou de simples visiteurs de passage. L’espace Frère-Jérôme est une aire où celui qui y
prend place, quelle qu’en soit l’occasion, est exposé à la lumière jaillissante des œuvres
– peintures, gravures, sculptures, dessins, musique ou poésie. Il brise ainsi l’artificiel
cloisonnement pour permettre aux différentes expressions artistiques de se marier pour sculpter
l’espace. L’espace Frère-Jérôme est un lieu de célébration privilégié où les artistes sont invités à
offrir leur jaillissement intérieur, l’expression de leur quête artistique qui est aussi quête
spirituelle... et c’est là la mission fondamentale de la Clarté-Dieu : les artistes nous parlent, ils ont
quelque chose à nous dire. En eux, quête artistique et quête spirituelle se conjuguent, que la ClartéDieu veille à mettre en lumière. La Clarté-Dieu se veut non seulement un lieu leur permettant de
les exprimer, mais aussi un lieu d’exploration et d’approfondissement de la dimension spirituelle
que leurs œuvres et leur quête artistique recèlent.
L’approfondissement de la dimension spirituelle requiert un travail différent de l’exposition et
demande un accompagnement particulier. Aussi, un peu à l’ombre de la clairière, en un lieu plus
retiré de l’espace public, le bureau-atelier de Roger Chabot permet ce travail d’exploration et de
maturation. Initiateur inspiré de la Clarté-Dieu, c’est là l’espace au sein duquel Roger se livre à sa
418 683-6825 propre quête artistique personnelle par son propre travail de création. C’est aussi là, au sein de cet
[email protected] espace matriciel, qu’il s’adonne au travail d’arrimage des dimensions artistique et spirituelle, se
rendant disponible à quiconque souhaite le faire, un espace d’échange, de don mutuel.
La Clarté-Dieu
220, Grande-Allée Est
bureau 140
Québec, QC G1R 2J1
Dans un autre coin retiré de la clairière, d’autres espaces (un bureau d’accueil, un secrétariat et une
salle polyvalente) permettent d’assurer les tâches de soutien nécessaires au bon fonctionnement de
Notre journal Web la Clarté-Dieu. La Clarté-Dieu, c’est aussi un programme d’activités ainsi qu’un bulletin.
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L’initiative
La Clarté-Dieu tire son origine de l’initiative de Roger Chabot, il y a de cela près de 15 ans, au
terme d’un parcours marqué au départ par l’expérience d’une souffrance personnelle qui, au bout
du compte, s’est révélée comme l’illustration du travail de la grâce au sein même des limites
humaines. Engagé dans le ministère presbytéral, Roger a commencé à l’exercer en milieu
paroissial, à L’Ancienne-Lorette. Cependant, très rapidement, l’état de sa voix s’est dégradé au
point qu’il ne lui fut plus possible d’exercer la prédication dans de grands espaces. Aussi, il a dû
Ou écrivez-nous à se mettre en recherche d’une nouvelle orientation pour exercer son ministère. Québec étant une
[email protected] ville où la présence de fonctionnaires est importante, il a d’abord fondé la Paix-Dieu en 1986,
Lire la suite, page 3
sdf.info • 19 janvier 2011 • 3
Itinéraire (suite)
initiative de présence pastorale auprès des travailleurs de la fonction publique. Au cours de ces
premières années de ministère, fasciné par la démarche artistique, Roger, prenant crayons et
pinceaux, est entré lui-même dans l’acte créateur et il en explore les différents ressorts au sein
même de la démarche artistique. Par sa propre pratique, il s’ouvre à la démarche spirituelle de
l’artiste et expérimente l’art comme moyen de la beauté, comme lieu d’expression du spirituel,
l’art comme chemin vers Dieu. Ainsi, avec le temps, la Clarté-Dieu a émergé, moment de
maturation d’un cheminement alors qu’une voix qui semblait éteinte en a ouvert une autre.
Perspectives
L’art est aussi une quête...
En nous invitant à la table de la beauté et de la création, les artistes nous ouvrent à la profondeur spirituelle de toute chose
et, par conséquent, à la contemplation.
par
Raymond Lemieux
collaboration spéciale
Raymond Lemieux est le
pionnier des sciences de
la religion au Québec.
Lié à l'Université Laval
depuis 1965, d'abord en
tant que chercheur au
Centre de recherches en
sociologie religieuse,
puis comme professeur
à la Faculté de
théologie, Raymond
Lemieux a fondé en
1980 le Groupe de
recherches en sciences
de la religion de
l'Université Laval, qu'il
dirige toujours.
1. Pierre Babin, L’ère de
la communication.
Réflexions chrétiennes,
avec la collaboration de
M. Iannone, Paris, Le
Centurion - OCIC, 1986,
p. 113-115.
2. Baruch Spinoza,
Éthique, III, proposition
7, Paris, Seuil, Seuil,
coll. « Points essais »,
1999, p. 217.
3. Histoire de Pi, roman,
Montréal, XYZ Éditeur,
2003, p. 248.
Qu’est-ce que la beauté? Certes, la conception en diffère selon les civilisations, voire selon les
époques dans une même civilisation. Elle est changeante, soumise aux temps et aux cultures,
même aux soubresauts des personnalités. Si on réfléchit le moindrement à l’expérience qu’on en
a, il faut convenir que la beauté réside bien moins dans l’objectivité des choses que dans le regard
porté sur elles par chacun. « C’est l’apparition à la conscience d’une correspondance intime entre
tel son, tel image, tel audiovisuel et l’attente la plus profonde de notre personnalité », écrit Pierre
Babin1. Le nouveau-né est toujours, dans les yeux émerveillés de ses parents, le plus beau bébé que
la terre ait porté.
« Des pays du tiers monde, continue cet auteur, j’ai appris que la beauté n’était pas l’esthétisme,
mais une certaine plénitude de l’humain et que là était la première valeur. [...] La beauté, c’est ce
qui convient aux aspirations les plus profondes de l’être humain. Elle est cette ordonnance
vivifiante et harmonieuse qui suscite, apaise et guérit. » Quoiqu’on ne puisse la contenir dans une
conception unique ni lui donner les limites confortables d’une définition, la beauté est pourtant
bien réelle. Elle appartient à ce qui gîte au plus profond dans l’humain : son désir, ce désir qui,
enseignait Spinoza, est son dynamisme fondamental, son essence même, puisqu’il met en scène
son effort pour « persévérer dans l’être2 », survivre, c’est-à-dire vivre en transcendant les limites
que lui imposent sa naissance, son corps, son environnement. Est beau, pour l’être humain, ce qui
fait signe de vie.
En cela même, la reconnaissance de la beauté est spécifiquement humaine. Pendant des années,
j’ai assisté chaque matin, avec mon chien, au lever du soleil sur les hauteurs du Cap-Diamant.
Expérience ineffable de la lumière dorée dans les boisés d’automne, des éclats cristallins vivifiant
les matins d’hiver, des chatoiements subtils animant les verts printaniers, voire des tamis enfarinés
propres aux brouillards d’été. Expérience véritablement spirituelle, puisque capable de laver
l’esprit des scories de la vie quotidienne et de féconder, chaque jour, le terreau des tâches à
recommencer. « Dans les instants d’émerveillement, on parvient aisément à sortir de la petitesse,
à élever son esprit aux dimensions de l’univers jusqu’à embrasser le tonnerre et le murmure, le
bon et le mauvais, le proche et le lointain », écrit Yann Martel3. Mais pour mon chien, de toute
évidence, tout cela ne disait rien. Ses bonheurs matinaux, à lui, consistaient essentiellement à pister
les écureuils... Noblesse (animale) oblige.
Expérience humaine de dépassement, la beauté est ouverture sur l’altérité, cette altérité dans
laquelle chacun cherche et projette, sans cesse, l’idéal qui va lui permettre de continuer de vivre.
Lire la suite, page 4
Perspectives (suite)
sdf.info • 19 janvier 2011 • 4
En tentant de faire voir la beauté, les artistes en affirment la force créatrice et la liberté. Ils
proclament leur autonomie (« je suis ainsi, je vis ainsi »), ils se jouent des conventions (qu’ils
transgressent d’autant mieux qu’ils les respectent profondément) et disent : « Voici, tentons donc
autre chose... Explorons ce qui échappe aux coutumes et au sens commun, parcourons les
territoires de l’Autre, pour voir, entendre, sentir, ce qu’il pourrait bien nous dire. »
4. Voir les belles pages
que Fernand Dumont
consacre à l’absence,
dans Une foi partagée,
Montréal, Bellarmin,
1996, p. 45-53.
5. Dont Roger Chabot
avouera volontiers,
d’ailleurs, l’inspiration
cistercienne.
6. Voir François
Cassingena-Trévedy,
La liturgie, art et métier,
Paris, Ad Solem,
2007,178 p.
C’est pourquoi l’artiste est toujours proche du spirituel et du mystique. Quelle que soit sa tradition
(ou sa discipline), croyant ou non, il partage avec eux un savoir qui concerne l’impossibilité de
dire complètement l’Autre, et en même temps l’urgence de tenter de le dire. « Trouver Dieu, c’est
le chercher », risque ici l’expérience mystique. Et, ajoute Ignace de Loyola, il faut savoir le trouver
« en toutes choses ». Le vrai courage d’exister, proclame l’artiste, c’est moins la proclamation de
ce qui comble que la volonté de convertir le manque en dynamisme vital. Dans un cas comme dans
l’autre, il faut maintenir l’ouverture à l’altérité, contre vents et marées. Continuer, sans relâche, à
chercher l’Autre, en son absence comme dans le sentiment de sa présence4.
La Clarté-Dieu, dont le nom même laisse entendre la quête de lumière5, offre cette double
expérience au public. En donnant à contempler et à méditer des œuvres d’ici et d’aujourd’hui,
elle montre l’extraordinaire fécondité de la quête spirituelle dans l’art contemporain. Et s’il est
vrai que l’expérience de la beauté n’est jamais un plaisir solitaire, puisqu’on s’y enchante les
uns les autres, non seulement représente-t-elle un contrepoids à la vulgarité qui occupe si
facilement l’espace public, mais aussi la possibilité de « faire église » au cœur même de cet
espace public6. Elle rappelle alors que, pour l’expérience chrétienne, une beauté paradoxale – le
tragique de la croix et du tombeau vide – est l’amorce initiale de l’inscription de la foi dans la
culture et dans l’histoire.
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pourrez prendre connaissance sur votre babillard de toutes les informations qui seront
publiées par le webzine Sentiersdefoi.info sur ce fameux Livre des visages.
FAITES VOTRE DEMANDE À LA FONDATION BÉATI DÈS MAINTENANT
Fondation privée, active depuis près de 20 ans au Québec, Béati a soutenu plusieurs centaines
de groupes au fil des années. Sa mission : contribuer à la construction d’un monde plus juste
en offrant soutien financier et accompagnement aux organismes préoccupés de répondre de
façon audacieuse aux enjeux sociaux et pastoraux de leur milieu.
Échéances pour présenter un projet : 31 mars, 31 août et 31 décembre
Informations et formulaire sur le site www.fondationbeati.org. Tél. : 450 651-8444
La Fondation Béati est un partenaire de Sentiersdefoi.info.
Intériorité
sdf.info • 19 janvier 2011 • 5
La foi et la culture
Plus que jamais, la foi a besoin de la culture, de la connaissance, de
la réflexion pour s’alimenter et croître. Foi et culture doivent être
nourries et entretenues en interactivité. Si la vie de l’intelligence
doit être entretenue par l’activité intellectuelle, la vie de la foi doit
être alimentée par la vie spirituelle et la réflexion. En toutes choses
les muscles doivent s’activer pour conserver leur forme : muscles du
corps, muscles de l’esprit, muscles de la foi.
Une culture qui s’approfondit par l’effet de la réflexion sociale, de la
recherche scientifique et de la création artistique, qui tend à
découvrir et à comprendre la totalité de l’univers, les secrets de la
matière et ceux de l’homme tout entier, invite à soupçonner qu’en
l’homme existe une dimension spirituelle. Celui qui assume la
totalité de son humanité par la réflexion, la recherche de la vérité, la
création artistique et l’engagement social devient de plus en plus
conscient de la transcendance de l’homme et il est conduit à poser
la question du Transcendant, de Dieu.
Roland Arpin, Territoires culturels
sdf.info • 19 janvier 2011 • 6
Actualités
Métamorphoses du patrimoine religieux
Le paysage des édifices religieux du Québec poursuit sa transformation à grande vitesse. L’entretien de ce trésor patrimonial
exige des sommes faramineuses. Sommes-nous prêts à préserver collectivement cet héritage qui contient notre âme?
par
Gérard Laverdure
sdf.info
Des livres pertinents
Luc Nopen, Lucie K.
Morisset, Les églises du
Québec, un patrimoine à
réinventer, Presses de
l’Université du Québec,
2006, 434 pages.
Sous la direction de
Lucie Morisset, Luc
Noppen, Thomas
Coomans, Quel avenir
pour quelles églises?
What future for which
churches?, Presses de
l’Université du Québec,
2006, 608 pages.
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Ou écrivez-nous à
[email protected]
1. Luc Nopen, Lucie K.
Morisset, Les églises du
Québec, un patrimoine à
réinventer, Presse de
l’Université du Québec,
2006, p. 136.
2. Ibid.
L’église Saint-Jean-Baptiste (1912; 2 800 places) sur le Plateau-Mont-Royal est devenue un centre
culturel polyvalent. À Saint-Jérôme, l’immense maison des Jésuites (1959) qui surplombe la ville a
été vendue en 2009 et le monastère des Recluses missionnaires (1951), tout près, est à vendre.
L’église Sainte-Brigide et le presbytère, au Centre-Sud de Montréal, sont en voie de devenir le
Centre communautaire Sainte-Brigide. La paroisse d’Oka a mis en vente les chefs-d’œuvre du
calvaire (1775) pour payer les réparations de l’église1. Les couvents et collèges, eux, finissent plus
souvent en « condos » et en logements sociaux ou pour les personnes âgées. « En 2004, on comptait
au Québec près de 3000 lieux de culte... Mais plus de la moitié d’entre eux seront désaffectés dans
cette première décennie du XXIe siècle2. » La Commission de la culture de l’Assemblée nationale du
Québec commence justement une consultation sur la Loi du patrimoine culturel.
L’État à la rescousse
Toutefois, bien des églises ont été sauvées de la démolition grâce à l’aide gouvernementale. « Dès
1983-1984, le Comité de construction et d’art sacré du diocèse de Montréal obtient du
gouvernement du Canada une somme de 15 millions de dollars consacrée à la restauration de 115
églises catholiques3. » Puis, en 1994, « une étude présente l’inventaire des travaux à effectuer sur
42 églises catholiques, 5 églises anglicanes, 3 églises unies et 3 synagogues de Montréal, révélant
des besoins de 75 millions de dollars4. » La facture ne cesse d’augmenter et la question se pose de
la propriété de cet abondant patrimoine : chaque groupe religieux ou la société québécoise par le
biais du gouvernement? La Fondation du patrimoine religieux du Québec a été créée en 1995 avec
une mise de fond de 35 M$. « Depuis 1995, le gouvernement du Québec a investi 240 M$ dans le
financement des projets de restauration du patrimoine religieux. La participation gouvernementale a entraîné des investissements privés de plus de 115 M$, ce qui a permis d’accroître la
présence des édifices religieux patrimoniaux dans l’offre touristique québécoise5. » Les coûts
continuant de grimper et les ressources, ecclésiales et gouvernementales, de diminuer, les
nouveaux promoteurs de métamorphoses doivent faire preuve d’une grande créativité et se
concerter avec tous les acteurs du milieu.
L’Îlot Saint-Pierre
Un exemple parmi d’autres : le quadrilatère Saint-Pierre-Apôtre à Montréal, comprenant le
renommé Centre Saint-Pierre (1886), la magnifique église néogothique Saint-Pierre-Apôtre
(1853), le monastère des Oblats et le Centre missionnaire dans la Maîtrise (1868). Les Oblats de
Marie-Immaculée ont soutenu généreusement tous ces services depuis les débuts. Comme les
communautés religieuses affrontent des défis financiers importants, la question de la responsabilité
dans le maintien du patrimoine religieux devient urgente. Juste restaurer les fenêtres et les vitraux
de l’église de style néogothique est évalué à 2,5 millions de dollars. Ainsi, ces seuls travaux de
préservation exigeront de la paroisse entre 150 000 $ et 250 000 $ par année sur 5 ans. Alors, à
l’initiative du Centre Saint-Pierre, les partenaires du quadrilatère sont à mettre sur pied, depuis
deux ans, un projet de prise en charge des édifices par une corporation sans but lucratif afin
d’assurer la survie et le maintien des services. Tout un défi d’équilibre et de justice entre la
rentabilité pour faire ses frais et le maintien de services jugés essentiels à la communauté.
Est-ce une catastrophe ou une chance historique? Ce serait une catastrophe de perdre ces joyaux
qui nous rappellent notre histoire, notre foi et notre identité collective. La beauté et la spiritualité
de ces lieux sont irremplaçables. Mais les métamorphoses en cours pourraient-elles nous permettre
d’en conserver certains tout en allant vers une pastorale qui marche à pied tout simplement avec
les concitoyens et concitoyennes du lieu et du temps. Les pasteurs vivant avec et comme le peuple.
4. Ibid. Humbles et légers comme les pèlerins que nous sommes. Le peuple juif n’a-t-il pas survécu à deux
5. Ibid. destructions du Temple de Jérusalem?
3. Site du Conseil du
patrimoine religieux
du Québec :
www.patrimoinereligieux.qc.ca
sdf.info • 19 janvier 2011 • 7
Ressources
Pour aller plus loin ou pour satisfaire votre curiosité
[ Participer ]
Je vous salue Marion...
Engagement social
et quête spirituelle
Le Centre Victor-Lelièvre vous invite
à une table ronde sur l’engagement
social avec Mme Rose Dufour,
anthropologue, de la Maison de
Marthe, sous le thème : « Je vous
salue Marion, Carmen, Clémentine…
Le point zéro de la prostitution »
Cette soirée aura lieu le mardi 8
février 2011 de 19 h 30 à 21 h 30 au
475, boul. Père-Lelièvre, à Québec.
« Une toute petite phrase a marqué
mon enfance, une phrase troublante,
choquante. Comment le Christ avait-il
pu affirmer pareille énormité : "En
vérité je vous le dis, les publicains et
les prostituées arrivent avant vous au
Royaume de Dieu." (Mt 21, 28) Puis, il
y a eu la vie et, 50 ans plus tard, cette
phrase est devenue le grand phare qui
éclaire, qui illumine toute ma Vie parce
qu’elles, et personnes d’autres, m’ont
révélé ce que l’humain a de plus beau,
de plus grand, de plus noble. Le sujet
de l’échange sera la quête spirituelle
dans l’engagement social. »
www.centrevictorlelievre.org
[ Participer ]
Semaine de la parole 2011
du 28 janvier au 6 février 2011
L’Événement se déroule dans les
paroisses du diocèse Saint-JeanLongueuil. Plus d’une soixantaine
d’activités sont ouvertes à toutes et
tous; intéressés ou curieux auront de
multiples occasions d’échanger et de
mieux comprendre la foi. Pour les
;
personnes qui participent aux activités,
il s’agit de moments privilégiés
donnant l’occasion de vivre intensément leur foi, de parler à Dieu et de
Dieu et de porter témoignage.
Qu’est-ce que la Semaine de la
Parole? Célébrer la Parole durant une
semaine, c’est ce que fait le diocèse de
Saint-Jean-Longueuil depuis quatre
ans, à la suite d’une initiative de la
paroisse La Résurrection à Brossard.
La Semaine de la Parole, cette année,
a pour thème « Comme un feu
dévorant ». Elle est célébrée par des
conférences, des ateliers de lecture et
de discussion, des lectures bibliques,
des contes, des récitatifs bibliques et
de multiples autres manières.
Pour consulter le programme, on peut
se rendre sur le site Web du diocèse
– www.dsjl.org – où la pub apparaît.
[ Voir ]
Arts visuels au Gesù
du 13 janvier au 25 mars 2011
Accès libre aux expositions de 12 h à
18 h du mardi au samedi et le lundi de
12 h à 17 h. Visite de l’église : du lundi
au vendredi de 10 h à 16 h et le samedi
de 12 h à 17 h. Pour information et
réservations, joignez le 514 861-4378.
www.legesu.com
[ Visiter ]
Raymond Gravel
a maintenant son site Internet
Les réflexions de Raymond Gravel,
bibliste et prêtre du diocèse de Joliette
sont disponibles sur le site suivant :
www.lesreflexionsde
raymondgravel.org
[ Voir ]
Lignes de vie
Trois artistes s’exposent
Deux artisans du journal Web
Sentiersdefoi.info exposeront leurs
créations artistiques – Ghislain
Bédard, secrétaire de rédaction, et
Lucie Brousseau, photographe – lors
de l’exposition collective Lignes de
vie ou la rencontre de trois itinéraires
intérieurs en compagnie d’une amie
artiste peintre commune, Isabelle
Lockwell. Cette exposition présentant
mandalas à l’encre de Chine, photos
et tableaux empreints de spiritualité et
de symbolisme aura lieu du 1er au 6
février 2011 à la galerie L’espace
contemporain, 313, rue Saint-Jean, à
Québec. Une toute petite semaine de
contemplation à ne pas manquer!
www.lespacecontemporain.com
[ Voir ]
Le voyage d’une vie
de Maryse Chartrand
Dans l’intimité de la salle d’Auteuil du
Gesù, la réalisatrice Mayse Chartrand
et la productrice Lucie Tremblay
présenteront le documentaire Le
voyage d’une vie le 24 janvier 2011 à
19 h. Débarquer du carrousel infernal
de notre société de perfor-mance. Tout
stopper. Maryse, Samuel et leurs trois
enfants l’ont fait. Sac au dos, ils ont
quitté leur confort nord-américain
pour faire le tour du monde pendant un
an. À la fin de la présentation, Maryse
et Lucie se feront un plaisir de
répondre aux questions du public. Prix
d’entrée : 10 $. Pour information,
joignez le 514 861-4036.
www.legesu.com
Prochaine parution du journal : 9 février 2011
Le journal Sentiersdefoi.info est une publication de Sentiers de foi, OSBL autonome et indépendant d’inspiration chrétienne fondé en 1984,
qui a pour mission d’être un espace favorisant la connaissance, la reconnaissance et la collaboration des sentiers de foi au Québec,
dans une perspective chrétienne inscrite dans le pluralisme actuel.
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Rédacteur en chef
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Robert Gagné
8 Lucie Brousseau, 2011 : Derrière la porte close
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qui vise à faire
connaître
des parcours
et des lieux
où se vivent
des expériences
humaines
et spirituelles
novatrices.
Itinéraire
Une perle cachée depuis les débuts de la colonie a été retrouvée en 1991 au
cimetière des sœurs de la Congrégation. Que peut bien avoir à nous dire cette
grande amoureuse, recluse volontaire, à l’occasion de la Saint-Valentin? [ p. 2 ]
par Gérard Laverdure
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Prophète de chez nous
Quel rapport y a-t-il entre une recluse des débuts de la colonie et les défis
auxquels nous sommes exposés aujourd’hui dans une grande ville et une
société tout à la consommation et à Internet? [ p. 3 ]
par Robert Gagné
Photographie
Lucie Brousseau
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sera émis.
Jeanne Le Ber : l’amour extrême
Offrande de l’heure
« Rassemble le monde entier au creux de ton amour. » Cette maxime
caractérise bien la mission de Jeanne Le Ber. Et la prière issue des constitutions
de la communauté des Recluses se situe dans un même esprit. [ p. 5 ]
Présenté par les Recluses missionnaires
Actualités
Désarmés comme l’Enfant de Noël
L’équipe éditoriale du journal a vu Des hommes et des dieux, ce film français
attendu, qui sort sur nos écrans le 25 février prochain. Réflexion sur la
radicalité de la foi chrétienne et la fraternité qui lie les êtres humains. [ p. 6 ]
par Michel M. Campbell
Ressources
Pour aller plus loin ou pour satisfaire votre curiosité
Des activités diverses et des ressources pertinentes. [ p. 7 ]
sdf.info • 9 février 2011 • 2
Itinéraire
Jeanne Le Ber : l’amour extrême
Une perle cachée depuis les débuts de la colonie a été retrouvée en 1991 au cimetière des sœurs de la Congrégation.
Que peut bien avoir à nous dire cette grande amoureuse, recluse volontaire, à l’occasion de la Saint-Valentin?
par
Gérard Laverdure
sdf.info
Pour plus d’information sur
Jeanne Le Ber :
Recluses missionnaires
Monastère Notre-Dame
de l’Annonciation
12050, boul. Gouin Est
Montréal (Québec)
H1C 1B8
L’ange de Ville-Marie
Jeanne Le Ber (1662-1714) était la fille unique, parmi quatre frères, du plus riche marchand de la
Nouvelle-France, Jacques Le Ber, et de Jeanne Le Moyne. C’était une jeune fille normale. Alors,
les offres de mariage ne manquèrent pas pour cette femme belle, intelligente et riche. Mais Jeanne
avait déjà choisi dans son cœur de se consacrer à Dieu dans une vie de solitude, de silence, de
prière et de travail manuel, la broderie. Une option de retrait radical. « Non pour fuir le monde mais
pour prier pour les misères du monde et partager tout son temps avec Jésus dans le Tabernacle1. »
Équilibrée, réaliste et pratique, Jeanne a assumé elle-même la gestion de sa fortune, investissant
dans l’aide aux pauvres – fabriquant des vêtements et payant pour l’éducation de plusieurs jeunes
filles françaises et amérindiennes – et dans la confection de vêtements liturgiques et de parements
d’autel magnifiques pour les paroisses pauvres.
Les habitants de Ville-Marie avaient tellement confiance en sa prière d’intercession qu’ils eurent
recours à Jeanne couramment et collectivement pour protéger les récoltes (1709) et pour parer la
514 648-6801 tentative d’invasion du pays par les Anglais (1711). C’est pourquoi ils lui donnèrent comme
surnom « l’ange de Ville-Marie ».
www.reclusesmiss.org
Site de Thomas Angelitti
sur Jeanne Le Ber :
www.jeanneleber.com
Chapelle Notre-Damede-Bon-Secours
Musée Marguerite-Bourgeoys
514 282-8670
www.margueritebourgeoys.com
Une lumière pour aujourd’hui
Jeanne Le Ber est restée longtemps cachée, comme gardée en réserve, jusqu’en 1991 alors qu’on
a identifié formellement ses ossements dans le cimetière des sœurs de la Congrégation de NotreDame. En 2005, les Sœurs firent transférer ses restes de la maison mère à la chapelle Notre-Damede-Bon-Secours, dans le Vieux-Montréal. Déjà, des centaines d’intentions de prière s’accumulent
chaque année devant son ossuaire placé dans le mur est de la chapelle. Un parcours catéchétique
présente sur place, avec de vrais personnages, « Jeanne, l’ange de Ville-Marie » et les fondateurs
de la colonie comme des témoins de la foi. L’œuvre des tabernacles poursuit le travail créatif de
Jeanne pour orner les autels de beauté. Depuis le début d’octobre 2006, plusieurs activités
marquent la semaine Jeanne Le Ber.
Sa pierre d’aimant
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« Pour approcher un peu le mystère de cette grande amoureuse, il faut se rappeler qu’elle a
fréquenté dans sa jeunesse des femmes exceptionnelles comme Jeanne Mance, sa marraine; tout
près de chez elle, les Hospitalières (Catherine Massé), Marguerite Bourgeoys et ses filles de la
Congrégation de Notre-Dame; et à Québec, comme pensionnaire, de 12 à 15 ans, les Ursulines de
la grande mystique Marie Guyart de l’Incarnation où elle apprit l’adoration et la broderie », me
confie Monique Tremblay, c.n.d., responsable de la pastorale à la chapelle Notre-Dame-de-BonSecours. Après une expérience de réclusion de 15 ans chez elle (18 à 33 ans), bien suivie par les
Sulpiciens, Jeanne décida de poursuivre sa route en prenant un engagement de réclusion à vie en
complicité avec la communauté de Marguerite Bourgeoys, sans devenir elle-même religieuse.
« Elle choisit cette réclusion par amour de quelqu’un, sans aucune compensation humaine ni
spirituelle, dans le dépouillement total. N’est-ce pas le témoignage de tous les moines et de toutes
les moniales », poursuit sœur Monique. Dans la foi et la fidélité. La source en sera d’ailleurs
révélée lors d’une visite de deux officiers anglais protestants amenés par l’évêque; montrant
l’endroit du tabernacle, elle dira : « Voilà ma pierre d’aimant! » Elle a persévéré jusqu’au bout,
soit pendant 34 ans. Une vraie histoire d’amour extrême, l’histoire de Jeanne.
La spiritualité eucharistique de Jeanne a été reprise par les Recluses missionnaires (1943)
1. Guide pour auxquelles se sont associés quelques dizaines de laïques de Saint-Jérôme et de Montréal. Sœur
la visite guidée, p. 5. Louise Lemieux, responsable des associés, résume ainsi cette spiritualité : « L’image des deux
Lire la suite, page 3
sdf.info • 9 février 2011 • 3
Itinéraire (suite)
fenêtres est prise pour signifier que la prière de Jeanne comportait deux dimensions. Une fenêtre
ouverte sur le monde pour y cueillir les intentions de tous ceux qui s’adressaient à elle
(intercession) et une autre fenêtre qui donnait sur le tabernacle où Jeanne venait confier au
Seigneur toutes les requêtes reçues et où elle se plongeait dans une longue et intense prière
2. Une chaîne d’adoration. » Ainsi va la devise des Recluses : « Par Lui, avec Lui et en Lui ».
d’adoration – une heure
par semaine – se met en
place présentement.
Pour y participer
communiquez avec
Gérard Laverdure :
[email protected].
Témoin de l’amour fou de Dieu pour nous, toute sa vie pointe vers sa pierre d’aimant, ce Jésus que
l’on peut toujours rencontrer et accueillir dans le Pain de vie. Faute de lui donner rendez-vous chez
Tim Horton, la Congrégation de Notre-Dame, et surtout ceux et celles qui vivent de sa spiritualité,
les Recluses missionnaires et leurs associés, hommes et femmes, vous la feront mieux connaître.
Elle pourrait nous rappeler qu’au cœur de notre foi, il y a une grande histoire d’amour2.
Perspectives
Prophète de chez nous
Quel rapport y a-t-il entre une recluse des débuts de la colonie et les défis auxquels nous sommes exposés aujourd’hui
dans une grande ville et une société tout à la consommation et à Internet?
par
Robert Gagné
collaboration spéciale
Attachez vos tuques! Celle qui est présentée ici, dans ce numéro qui précède la Saint-Valentin, est
une Montréalaise de la fin du XVIIe siècle et du début du siècle suivant : Jeanne Le Ber. Véritable
paradoxe! En 2004, on choisit son patronyme pour nommer un comté fédéral de l’ouest de
Montréal, dans une ville où foi et pratique religieuse, dans un cadre bien défini, celui du
catholicisme romain, semblent en très grande perte de vitesse. Déjà, à son époque, elle paraissait
marginale; imaginez, aujourd’hui : une recluse! Une recluse qui n’a même pas vécu sur les lieux
qui portent son nom sur la carte électorale et qui évoquent le souvenir de sa présence parmi nous.
Robert Gagné fait partie
de la Compagnie des
prêtres de Saint-Sulpice
(pss) et il est modérateur
de l’unité pastorale du
Vieux-Montréal et du
Quartier latin
comprenant la basilique
Notre-Dame, la paroisse
Saint-Jacques et les
chapelles Notre-Damede-Lourdes et NotreDame-de-Bon-Secours.
Il est responsable du
cimetière Notre-Damedes-Neiges.
Qui est Jeanne Le Ber? Une femme qui s’est enfermée volontairement dans quelques petites pièces
attenantes à une chapelle, ne vivant que de prières et du travail de couture et de broderie. Elle ne
voit que très peu de personnes et ne parle qu’à quelques-unes d’entre elles, le strict minimum. Son
existence matérielle est d’une simplicité qui frise l’indigence, alors qu’elle a les moyens de vivre
dans des conditions moins pauvres... Pourtant, celle qui fuyait le monde, en vivant dans une
recluserie, est devenue en 1709 et en 1711 la porte-parole choisie par la population de Ville-Marie
pour obtenir de son Dieu une protection spéciale. Cette femme, qui avait tout quitté sur le plan des
relations humaines, « voit » le tout-Montréal assister à ses funérailles. Elle avait choisi ce style de
vie à cause de Jésus Christ, celui qu’elle nommait « sa pierre d’aimant ». Elle a vécu près de lui,
séparée seulement par la cloison de bois qui isolait sa chambre de la chapelle où le Christ était
présent dans le tabernacle : une véritable histoire d’amour fondée sur l’adoration.
Pendant près de deux siècles, on conserve peu de traces de son souvenir, sinon des billets pour
qu’elle intercède auprès de son Seigneur afin d’obtenir une faveur. Puis, c’est la découverte de son
cercueil (avec ces billets justement), cercueil que l’on confondait avec celui de son père. C’est
ainsi que des gens se situant à une époque combien différente de la sienne se laissent interpeller
par son témoignage de radicalité. Et elle est promue à la fonction de prophète pour aujourd’hui.
Prophète de l’épanouissement de notre être par la contemplation-adoration du Christ eucharistique.
L’action, le faire et la vitesse prennent une place prépondérante dans notre vie de tous les jours.
Jeanne, par sa manière de vivre, vient déstabiliser nos façons de faire et nous oriente radicalement
vers son amour pour que notre être se trouve transfiguré par la contemplation de Jésus présent dans
Lire la suite, page 4
Perspectives (suite)
sdf.info • 9 février 2011 • 4
l’hostie. Au siècle d’Internet et du téléphone cellulaire, elle nous invite à un temps d’arrêt prolongé
devant le Christ présent dans le Saint-Sacrement, un Seigneur qu’il n’est pas nécessaire de voir de
façon sensible. Cet exercice d’intériorité se révèle très différent de ce qui peut résulter, par
exemple, d’un bain de silence dans la nature. Il ne s’agit pas de dévaloriser ce type d’expérience
qui apporte un enrichissement de l’être et qui est, peut-être, plus accessible à un grand nombre de
personnes. Cependant, même s’il semble y avoir une ascèse plus aride quand nous prenons le
temps de prendre contact avec la personne du Christ, cette contemplation-adoration nous situe
dans une autre dimension de rencontre et permet une transformation de ce que nous sommes par
ce contact amoureux que nous avons avec lui. Je voudrais rappeler ici deux points importants de
l’appel prophétique de Jeanne : l’invitation à la contemplation et le contact d’adoration avec le
Christ dans l’Eucharistie.
Par sa manière de vivre, Jeanne a déconcerté aussi ses contemporains. Le supérieur des Sulpiciens,
Dollier de Casson, ancien militaire et premier urbaniste de Ville-Marie, trouvait que sa « vêture »
était plus proche de l’indigence que de la pauvreté, habillement décrié par les quelques demoiselles
riches de ce pays. Et ainsi de suite. Dans notre monde de surconsommation, même s’il nous est
impensable de vivre comme Jeanne, nous sommes invités à un regard plus écologique sur ces biens
matériels qui nous sont présentés et à nous engager dans la voie d’une plus grande simplicité.
L’esprit qui animait Jeanne Le Ber nous met en dialogue avec les grands courants de la pensée
contemporaine.
Ainsi, son radicalisme nous resitue dans l’essentiel de notre engagement : contemplation, Jésus
dans l’Eucharistie et simplicité de notre manière de vivre. Il ne s’agit pas de l’imiter servilement,
mais d’entrer en dialogue avec elle pour saisir ce qui peut nous transformer aujourd’hui pour un
agir plus authentique.
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pourrez prendre connaissance sur votre babillard de toutes les informations qui seront
publiées par le webzine Sentiersdefoi.info sur ce fameux Livre des visages.
sdf.info • 9 février 2011 • 5
Intériorité
Offrande
de l’heure
Sculpture : André Pelletier / Photo : Rachel Lacroix
Dieu notre Père,
tu nous appelles à participer
à la Pâque de ton Fils
en prenant, avec lui,
la voie du dépouillement
et de l’offrande.
Unis, dans l’Esprit Saint,
l’offrande de notre vie
et de toute la création
à l’éternelle offrande du Christ Jésus.
« Rassemble le monde entier
au creux de ton amour. »
« Tu n’as pas à te répandre,
mais à t’approfondir;
tu n’as pas à t’épuiser,
mais à être comblée. »
Aelred de Rielvaux
à sa sœur recluse
XIIe siècle
Que, sous le regard de Marie,
notre union avec Jésus,
entre nous et avec tous
atteigne sa plénitude
dans le sacrement de son amour.
Amen
sdf.info • 9 février 2011 • 6
Actualités
Désarmé comme l’Enfant de Noël
L’équipe éditoriale du journal a vu Des hommes et des dieux, ce film français attendu, qui sort sur nos écrans le 25 février
prochain. Réflexion sur la radicalité de la foi chrétienne et la fraternité qui lie les êtres humains...
Photo : affiche du film
par
Michel M. Campbell
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Non balisé par l’institution, le sentier multiplie formes et émotions : du tracé sécuritaire, battu à
travers champs, au raccourci dessiné sur le gazon d’un parterre, en passant par ce chemin
Ou écrivez-nous à improvisé pour se sortir d’un espace où l’on se sent perdu. À compter du 25 février prochain, des
[email protected]
milliers de gens d’ici fréquenteront au cinéma un court sentier qui les conduira à la radicalité de la
foi chrétienne : le film Des hommes et des dieux1, qui relate l’expérience vécue dans les années
Pour aller plus loin 1990 par des moines de Tibhirine, en Algérie.
On peut aussi lire
Les moines de Tibhirine,
l’enquête de l’historien
américain de John Kiser
(Nouvelle Cité, 2010)
qui permet de saisir la
complexité du monde
musulman et
d’approfondir la
démarche des moines.
1. Récipiendaire, en
particulier, du Grand Prix
du festival de Cannes
2010 et du Prix du jury
œcuménique, ce film de
Xavier Beauvois a déjà
été vu par 3 millions de
personnes en France.
2. Mt 5, 3.
Voilà une petite communauté à faire rêver les enfants de Jean XXIII. Ancrée dans la liturgie des
psaumes, cette communauté monastique vit en étroite relation avec le village musulman qui
l’entoure : un frère soigne les villageois, et les moines participent au fêtes religieuses des familles.
À l’interne, les moines fonctionnent de façon démocratique.
Un contexte cauchemardesque cependant s’y déploie. Si les villageois se sentent protégés par la
présence des moines, les terroristes qui hantent la région, tout comme l’État, voudraient bien s’en
débarrasser. Les chrétiens et chrétiennes plus ou moins confortables que souvent nous sommes
accèdent alors au tiraillement de ces hommes simples et attachants : faut-il sauver sa vie ou
continuer à être présence du Christ, même sous des menaces de mort? On sait la suite :
l’enlèvement et la mort de sept moines...
D’aucuns déjà leur contestent le titre de martyrs (du grec : témoins) parce que, techniquement, on
ne sait pas s’ils ont été tués en refusant d’abjurer un article de foi. Écoutons cependant le discours
spirituel du prieur Christian de Chergé : « Dans un contexte saturé de violence, il s’agit de vivre
désarmé comme l’Enfant de Noël. » On pourra alors comprendre que leur vie de foi charitable en
a fait des martyrs – des témoins – espérants de la Béatitude paradoxale : « Bienheureux les doux,
ils auront la terre en partage2. »
Un film qui bouscule nos zones de confort. À ne pas manquer.
sdf.info • 9 février 2011 • 7
Ressources
Pour aller plus loin ou pour satisfaire votre curiosité
[ Lire ]
Repenser l’initiation chrétienne
– Le catéchuménat, un modèle
pour tous les âges
de Daniel Laliberté
« On ne naît
pas chrétien, on
le devient. » Le
célèbre adage
de Tertullien remonte à une
époque de persécutions où la
grande majorité
des
baptisés
étaient adultes
et passaient par une étape d’initiation
appelée catéchuménat. Comme à cette
époque, nous ne sommes pas dans une
situation où il est automatique
d’adhérer à l’Évangile. L’Église
catholique, consciente d’une nouvelle
situation socioreligieuse, propose le
catéchuménat comme modèle pour
toute initiation chrétienne.
Daniel Laliberté, l’un de nos
collaborateurs à Sdf.info, met ici en
évidence les conséquences théologiques et pastorales du recours au
catéchuménat comme modèle, en
particulier pour l’éducation à la foi des
plus jeunes. Il n’hésite pas à proposer
certaines modifications audacieuses
aux pratiques héritées de la chrétienté,
posant au passage quelques questions
aux décideurs de l’institution, invitant à
opter pour une initiation chrétienne qui
construise réellement une identité de
disciple du Christ.
Montréal, Médiaspaul, 2010.
[ Lire ]
Le jardinier de Tibhirine
de Jean-Marie Lassausse
avec Christophe Henning
« Je ne crois pas avoir été tout à fait
conscient, au départ, du lourd héritage
qui m’était octroyé... J’ignorais tout
des frères. Et aujourd’hui encore, je
creuse le message des frères assassinés. J’essaie de garder leur mémoire
au contact des villageois. Dans le
travail quotidien, avec Youssef et
Samir, il n’y a pas un jour où l’on ne
parle pas des moines. »
Depuis dix ans, Jean-Marie Lassausse
assure une présence à Tibhirine. En
travaillant la terre, il témoigne aussi de
cet esprit de dialogue enraciné en pays
d’islam. Dialogue fragile, fécond,
bouleversant, fruit de la vie donnée des
sept moines de l’Atlas.
Bayard, 2010.
[ Participer ]
Médias et religion : sur la
même longueur d’onde?
Conférence du Centre culturel
chrétien de Montréal
Les médias – le quatrième pouvoir –
ont-ils une opinion défavorable des
religions? Chose certaine, les relations
sont difficiles entre les diverses
confessions religieuses et le monde de
l’information. Il se montre souvent
indifférent, parfois hostile au fait
religieux. Les institutions religieuses,
elles, sont souvent nerveuses. Les
médias de masse, comme tous les
milieux, possèdent leurs modes et
leurs tendances. Au Québec, il est plus
;
facile de s’y déclarer athée que
disciple du Christ. Trois spécialistes
analyseront pour nous les relations
entre le monde religieux et le monde
de la presse : Rolande Parrot, relationniste; Yves Boisvert, journaliste de
La Presse; Jean-Claude Leclerc,
chroniqueur au Devoir. Entrée libre.
Une contribution est suggérée : 5 $.
Pour plus d’information, joindre le
514 738-6664.
www.centreculturelchretien
demontreal.org
[ Participer ]
Le pape, l’Église
et les signes des temps
Table ronde
Dans le livre Lumière du monde. Le
pape, l’Église et les signes des temps,
(Bayard, 2010), Benoît XVI répond
sans détours aux questions douloureuses et délicates qui marquent son
pontificat. La pédophilie, le célibat des
prêtres, la contraception, l’infaillibilité
pontificale, etc., qu’en est-il vraiment?
Ouverture? Resserrement? Redite? Y
a-t-il du neuf dans ces entretiens?
Une table ronde aura lieu le jeudi 10
février à 19 h 30 à la librairie Paulines,
2653, rue Masson, à Montréal. Avec
Alain Crevier, animateur de Second
Regard, à Radio-Canada; Solange
Lefebvre, titulaire de la Chaire
Religion, culture et société (UDM) et
Jean-Pierre Routy, médecin-chercheur,
du service d’Hématologie et
d’Immuno-déficience (Hôpital RoyalVictoria). Contribution suggérée : 7 $
Réservation au 514 849-3585.
www.librairies.paulines.qc.ca
Prochaine parution du journal : 2 mars 2011
Le journal Sentiersdefoi.info est une publication de Sentiers de foi, OSBL autonome et indépendant d’inspiration chrétienne fondé en 1984,
qui a pour mission d’être un espace favorisant la connaissance, la reconnaissance et la collaboration des sentiers de foi au Québec,
dans une perspective chrétienne inscrite dans le pluralisme actuel.
ISSN 1715-8370 | 8 2011 Sentiers de foi | Tous droits réservés
Ce journal, publié uniquement sur le Web, est de ce fait entièrement écologique. Imprimez-le et diffusez-le en pensant à l’environnement.
2005-2010
5
ans de marche
dans les pas du vent
de
foi.info
Sentiers
www.
Vol. 6 no 9 / 2 mars 2011
Comité éditorial
Rédacteur en chef
Gérard Laverdure
Secrétaire de rédaction
Ghislain Bédard
Représentant du C.A.
Michel-M. Campbell
Collaboration
Monique Dumais
Louise Melançon
8 Lucie Brousseau, 2011 : Femme-zéphyr
Journal Web
bimensuel
indépendant
qui vise à faire
connaître
des parcours
et des lieux
où se vivent
des expériences
humaines
et spirituelles
novatrices.
Itinéraire
Des femmes se sont rassemblées pour défendre leur place dans l’Église afin
qu’elles soient reconnues en toute égalité avec les hommes à tous les niveaux
de responsabilité. [ p. 2 ]
par Monique Dumais
Perspectives
Conception graphique
Ghislain Bédard
Intériorité
Pour nous joindre
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www.sentiersdefoi.info
Abonnement gratuit.
ISSN 1715-8370
8 2011 Sentiers de foi
Tous droits réservés
Quelle Église, quels ministères pour les femmes?
Depuis Vatican II, deux modèles d’Église s’affrontent et coexistent tant bien que
mal, ce qui ne contribue pas véritablement à ouvrir la voie aux femmes. Dans
ces aléas politiques, qu’est-ce qui nourrit l’espérance des femmes? [ p. 3 ]
par Louise Melançon
Photographie
Lucie Brousseau
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Femmes et Ministères : lieu de solidarité et de parole
Qui nous roulera la pierre?
« Trois femmes bravent la mort, leur crainte. Fortes de leur hardiesse, elles
partent tôt le matin, car elles sont empressées de remplir leur service d’amour.
Non, elles ne tardent pas sur le chemin. » Un texte de Monique Dumais. [ p. 5 ]
Présenté par le réseau Femmes et Ministères
Actualités
Étranger, n’es-tu pas au courant?
La Commission Emmaüs cherche toujours les pas de cet Étranger lumineux
sur nos chemins de brunante. Ses membres invitent d’autres marcheurs et
marcheuses à s’associer à la quête. [ p. 6 ]
par Gérard Laverdure
Ressources
Pour aller plus loin ou pour satisfaire votre curiosité
Des activités diverses et des ressources pertinentes. [ p. 7 ]
sdf.info • 2 mars 2011 • 2
Itinéraire
Femmes et Ministères : lieu de solidarité et de parole
Des femmes se sont rassemblées pour défendre leur place dans l’Église afin qu’elles soient reconnues en toute égalité
avec les hommes à tous les niveaux de responsabilité.
Des femmes engagées dans l’Église catholique, elles sont nombreuses, et nous en trouvons de plus
en plus depuis le concile Vatican II à tous les niveaux : diocésain, paroissial ou scolaire. Un certain
nombre de ces femmes sont rémunérées par l’institution ecclésiale et travaillent à un service pastoral
ou administratif. Elles assument des tâches et des fonctions qui étaient autrefois exclusivement
réservées aux clercs. Cependant, elles n’ont pas vraiment de voix au chapitre et ne jouissent pas d’une
Monique Dumais est reconnaissance officielle. Elles ont besoin d’un lieu de rassemblement et de solidarité.
par
Monique Dumais
collaboration spéciale
professeure au département
de sciences religieuses et
d’éthique de l’Université du
Québec à Rimouski et cofondatrice de la Collective
L’Autre parole.
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Origine et objectifs
C’est en octobre 1982 qu’une vingtaine de femmes, engagées en Église ou théologiennes, ont jeté les
bases d’un regroupement qui allait devenir le réseau Femmes et Ministères. À cet effet, elles ont
décidé de former « un lieu de solidarité et de parole, un lieu de ressourcement et de célébration, un
lieu de recherche et d’analyse, un lieu d’élaboration d’une pensée commune, un lieu de concertation
en vue d’une prise de parole collective ». Ses membres sont des femmes qui proviennent de plusieurs
diocèses francophones du Québec, de l’Ontario et de l’Île-du-Prince-Édouard. Leurs objectifs sont :
« travailler à la reconnaissance de tous les ministères exercés par des femmes dans une Église
dynamique et missionnaire; nommer, s’approprier et promouvoir les pistes théologiques et pastorales
inscrites dans un service ecclésial des femmes; développer un partenariat et une solidarité avec des
femmes et des hommes intéressés aux objectifs que nous poursuivons; prendre position sur les
questions d’actualité relatives à la responsabilité et à la situation de la femme dans la mission de
l’Église et à l’accès des femmes à tous les ministères ordonnés1 ».
Activités
Le réseau Femmes et Ministères se distingue par des recherches théologiques et pastorales, des
publications de volumes et d’outils d’animation, l’animation de sessions de formation,
Ou écrivez-nous à l’organisation de colloques et de divers rassemblements.
[email protected]
Nommons en particulier les publications suivantes : le recueil Paroles de femmes, paroles
d’évêques, sur la participation des femmes à la vie de l’Église2; les livres Les soutanes roses.
Portrait du personnel pastoral féminin au Québec3; Voix de femmes, voies de passage, rechercheaction portant sur les pratiques pastorales et les enjeux ecclésiaux4; Projets de femmes. Église en
projet5 et La 25e heure pour l’Église. Guide d’animation pour des rencontres-salon6. Elles ont un
1. Voir le site site qui est très actif où se trouvent différentes contributions concernant les femmes et l’Église.
www.femmesElles sont également en lien avec d’autres groupes de femmes.
ministeres.org.
2. Éditions Paulines,
1986.
Interpellation majeure
En 2007, le réseau Femmes et Ministères a fait connaître officiellement sa position sur l’ordination
des femmes dans l’Église catholique romaine. L’interdiction pour les femmes d’avoir accès aux
ministères ordonnés tant diaconal que sacerdotal constitue une interpellation majeure. En effet, des
4. Éditions Paulines, femmes qui se sentent appelées à ces ministères et possèdent une formation qui leur permettrait
1995.
d’y avoir accès ne peuvent que se sentir brimées. Particulièrement dans une société qui affirme
5. Éditions Paulines, l’égalité entre les hommes et les femmes.
3. Éditions Bellarmin,
1988.
2002.
6. Éditions Paulines,
2002.
7. Pauline Jacob,
Appelées aux ministères
ordonnés, Montréal,
Novalis, 2007, p. 199.
« Avec Jean XXIII et le concile Vatican II, on a vu renaître l’espoir de l’accession des femmes aux
ministères. Ces espoirs se sont atténués sous le pontificat de Paul VI. Ils sont à peu près disparus
avec l’arrivée de Jean-Paul II, qui a multiplié les interventions pour s’y opposer, au nom même de
l’identité de la femme. Avec la lettre Ordinatio sacerdotalis, en 1994, il a verrouillé la porte,
engageant même ses successeurs. L’élection du cardinal Josef Ratzinger comme pape suscite peu
d’espoir sur l’ouverture des ministères ordonnés aux femmes7. »
Lire la suite, page 3
sdf.info • 2 mars 2011 • 3
Itinéraire (suite)
Voir aussi l’article « Ces
lampes qu’on maintient
sous la table »,
sur l’appel de plusieurs
femmes au presbytérat
paru dans le numéro du
4 mars 2009 de
Sentiersdefoi.info
(vol. 4 no 10).
La suite
Le sentier de foi que le réseau Femmes et Ministères a tracé doit être poursuivi avec espérance et
détermination. La voie n’est pas facile et les portes ne s’ouvrent pas. Les ordinations de femmes
dans l’Église catholique romaine demeurent des situations d’excommunication. C’est dire que la
voix officielle de l’Église institutionnelle est forte en paradoxes : elle affirme une égale dignité des
enfants de Dieu en même temps qu’elle promeut une différence marquée et séparée entre les
hommes et les femmes dans les ministères.
Perspectives
Quelle Église, quels ministères pour les femmes?
Depuis le concile Vatican II, deux modèles d’Église s’affrontent et coexistent tant bien que mal, ce qui ne contribue pas
véritablement à ouvrir la voie aux femmes. Dans ces aléas politiques, qu’est-ce qui nourrit l’espérance des femmes?
par
Louise Melançon
collaboration spéciale
Louise Melançon
est théologienne,
une des membresfondatrices de
L’autre Parole
et retraitée de
l’enseignement à
l’Université de
Sherbrooke.
Il est devenu presque banal de référer au concile Vatican II quand il s’agit de parler de mouvements
d’Église qui prônent des changements dont celui que représente le réseau Femmes et Ministères.
Mais pour en bien saisir les enjeux, il est nécessaire de faire une lecture approfondie des
documents du concile les plus pertinents, à savoir Lumen gentium et Gaudium et spes. On
comprendra mieux alors combien immense est l’espérance des femmes engagées dans la
transformation des rapports entre les femmes et les hommes dans l’Église.
1. Deux ecclésiologies « côte à côte », comme l’exprimait Leonardo Boff, voilà ce qui ressort des
documents du concile. Elles correspondent aux deux modèles qui se sont affrontés lors des
sessions du concile : d’abord l’affirmation de l’Église comme société, puis celle de l’Églisecommunauté. L’ordre des chapitres de Lumen gentium marque certes une évolution : le
document débute par une présentation de l’Église sacramentelle, mystérique1; puis, le concept
englobant de peuple de Dieu devance (ch. 2) celui de la constitution hiérarchique de l’Église
comme société (ch. 3). Mais s’il y a une avancée certaine à parler du peuple de Dieu, réalité
englobant les laïcs et les clercs, le fait de garder en parallèle l’autre modèle, l’Église comme
société hiérarchique, affaiblit cette intention. On a tenté une articulation de ces deux modèles
dans le concept de communion hiérarchique : même si la communion peut servir de pont entre
les deux, le fait de la relier à une hiérarchie qui s’impose de l’extérieur l’annule complètement.
Comment réussir une communion des croyants et croyantes si les fonctions de service, les
charismes, etc. ne surgissent pas de la communauté elle-même, y compris le sacerdoce
ministériel?
2. Les femmes sont de plus en plus nombreuses à exercer des fonctions administratives ou de
service dans les organismes paroissiaux ou diocésains. Et cela, parmi les aléas des politiques
vaticanes depuis le Concile. Mais la sincérité et la constance de leur engagement, la diversité
et la créativité de leurs charismes autant que le sérieux de leur compétence ne sont pas reconnus
dans toute leur ampleur parce qu’elles restent exclues des ministères ordonnés, plus
précisément
du « sacerdoce ministériel ». Pourtant, par leurs fonctions pastorales, elles
1. Mystérique : relatif
aux mystères religieux.
contribuent à former la communauté, à « faire Église », comme certains disent. Elles exercent
Lire la suite, page 4
Perspectives (suite)
sdf.info • 2 mars 2011 • 4
des ministères; mais du fait de leur exclusion des « ministères ordonnés », leur situation illustre
d’autant plus le modèle clérical, masculin et patriarcal de la hiérarchie et de l’autorité dans
l’Église. Par ailleurs, si elles étaient « ordonnées » selon le modèle d’Église hiérarchique que
l’on connaît encore dans l’Église catholique, elles ne feraient pas nécessairement changer les
choses en termes d’autoritarisme et de pouvoir « sacré ».
L’espérance qui anime les femmes croyantes, engagées à la suite de Jésus, c’est la foi en
l’action de l’Esprit pour achever ce que le concile de Jean XXIII a semé : une Églisecommunauté bien ancrée dans « le monde de ce temps », inscrite dans nos sociétés modernes
ou plutôt postmodernes, travaillant à construire la communion des humains entre eux, à bâtir
« la communauté des disciples égaux ». De là viendrait une diversité de ministères dans
l’ekklesia, ce qui n’exclurait pas l’exercice de la fonction d’autorité responsable de la
communion avec et selon Jésus.
FAITES VOTRE DEMANDE À LA FONDATION BÉATI DÈS MAINTENANT
Fondation privée, active depuis près de 20 ans au Québec, Béati a soutenu plusieurs centaines
de groupes au fil des années. Sa mission : contribuer à la construction d’un monde plus juste
en offrant soutien financier et accompagnement aux organismes préoccupés de répondre de
façon audacieuse aux enjeux sociaux et pastoraux de leur milieu.
Échéances pour présenter un projet : 31 mars, 31 août et 31 décembre
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rendre à celle du journal et de cliquer avec enthousiasme sur le bouton « J’aime »! Ainsi, vous
pourrez prendre connaissance sur votre babillard de toutes les informations qui seront
publiées par le webzine Sentiersdefoi.info sur ce fameux Livre des visages.
sdf.info • 2 mars 2011 • 5
Intériorité
Qui
nous roulera
la pierre
?
Quand le sabbat eut pris fin, Marie de Magdala, Marie, mère
de Jacques, et Salomé achetèrent des aromates pour la toilette
mortuaire.
De très bonne heure, le premier jour de la semaine, elles
allèrent au tombeau. Le soleil venait de se lever. Elles se
demandaient : « Qui va rouler pour nous la pierre de devant le
tombeau? »
En approchant, elles virent qu’elle avait été roulée. C’était une
pierre énorme.
Évangile de Marc 16, 1-4
Quel bel épisode rempli d’espérance! Trois femmes bravent la mort, leur
crainte. Fortes de leur hardiesse, elles partent tôt le matin, car elles sont
empressées de remplir leur service d’amour. Non, elles ne tardent pas
sur le chemin.
Elles sont chargées des aromates de leur désir intense, celui de se donner, de
s’engager dans l’Église. Toutefois, elles sont conscientes d’un obstacle qui est
énorme, mais elles ne s’y arrêtent pas, ne reculent pas. Une grande confiance
les anime et les guide intérieurement. C’est l’Esprit même qui les presse
d’agir. Et c’est le grand étonnement : l’obstacle qui semblait insurmontable
est disparu. Alléluia! mille fois.
Un jour – quand? –, tout sera ouvert aux femmes dans l’Église.
Monique Dumais, o.s.u.
sdf.info • 2 mars 2011 • 6
Actualités
Étranger, n’es-tu pas au courant?
La Commission Emmaüs cherche toujours les pas de cet Étranger lumineux sur nos chemins de brunante. Ses membres
invitent d’autres marcheurs et marcheuses à s’associer à la quête.
L’idée de tenir une commission qui sera baptisée Emmaüs remonte à une rencontre de février 2009
rassemblant des groupes chrétiens engagés socialement qui souhaitaient voir et entendre ce qui
pousse de neuf comme initiatives d’engagement de chrétiens et de chrétiennes dans notre coin de
pays. Les mêmes qui, en 2008, avaient pris la parole lors du Congrès eucharistique de Québec sur
« Le chemin d’Emmaüs
d’autres manières de faire eucharistie en publiant « Témoins d’une naissance1 ».
traverse toutes les
par
Gérard Laverdure
sdf.info
saisons, à la rencontre
de cet Étranger qui
pérégrine avec nous et
qui se révèle comme le
Vivant. L’expérience qui
vous est proposée ici se
situe clairement sous le
signe de l’espérance
et de la joie. »
Guy Côté.
Guy Paiement disait alors : « Nous nous inscrivons dans une histoire dont nous continuons à être
les acteurs et les actrices. Plusieurs parmi nous ont connu l’espoir de la commission Dumont, les
grandes orientations libératrices du concile Vatican II, les divers synodes diocésains qui ont tous
plus ou moins avorté. Malgré tout, portés par les gens et par le Souffle du Ressuscité, nous
continuons notre route. Si nous décidons de prendre la parole, c’est que nous ne pouvons pas ne pas
parler et témoigner de la nouveauté qui affleure dans nos vies et dans celles de beaucoup d’autres.
De cette nouveauté, nous voulons en rendre témoignage, car nous sommes convaincus qu’elle est
porteuse de vie. » Deux grands rassemblements plus tard, ayant réuni plus d’une centaine de
participants et participantes, une dizaine de représentants de divers groupes2 cherchent une voie de
Pour information, joignez relance et de « nouveaux partenaires intergénérationnels et interculturels » dans l’aventure.
M. Michel Rioux
par courriel à
[email protected].
1. Texte sur
www.culture-et-foi.com,
onglet « Nouvelles
d’Églises » (dossier
Eucharistie).
2. Alain Ambeault csv,
Guy Côté, Céline
Beaulieu (Groupe de
théologie contextuelle
québécoise), Claude
Giasson (Réseau
Culture et foi), Élisabeth
Garant (Centre justice et
foi), Gérard Laverdure
(Chrétiens et chrétiennes
dans la cité), Marilyse
Lapierre (Centre culturel
chrétien de Montréal),
Lorraine Gaudreault
(Centre Victor-Lelièvre),
Richard Renshaw,
Michel Rioux et d’autres
qui soutiennent
l’initiative.
L’histoire des disciples d’Emmaüs (Lc 24, 13-35) exprime bien l’état de découragement d’une
multitude de chrétiens et de chrétiennes qui espéraient tellement le renouveau avec le grand
courant d’air frais que fut le concile Vatican II. Un vrai printemps! « Étranger, tu es bien le seul
qui n’ait pas appris ce qui s’est passé à Rome au début des années 1960, ce fameux Concile
universel, unique en son genre, car pastoral et non dogmatique, et les espoirs que cela avait
suscités chez nous? », pourrait-on lui demander. « Tout cela semble s’être refermé! », pourrait-on
ajouter. Maintenant, on se croirait en hiver tellement « nos grands prêtres et nos chefs » se sont
empressés, dès la fin du Concile, de refermer ces fenêtres à peine ouvertes et d’en verrouiller
d’autres (collégialité à tous les niveaux, sacerdoce des femmes, célibat facultatif, transparence,
etc.) au cas où le Souffle reviendrait. Il y en a tellement qui sont partis depuis!
« Dis, Étranger, cela devait-il se passer ainsi? » Mais pour ceux et celles qui sont restés en marche
sur la route et qui ont continué d’espérer des courants d’air frais, des résurrections, comme le
regretté Guy Paiement et tant de groupes de chrétiennes et de chrétiens engagés dans la cité pour
la justice sociale, les droits humains, la liberté, il semble qu’il pousse du neuf sous leurs yeux, que
le Souffle renouvelle l’Église par en bas, dans le monde, là où on a les pieds. « Ne le voyez-vous
pas? », demandait souvent Guy. Nous, les plus vieux... sommes soucieux de transmettre ce Souffle
de renouveau, de liberté de pensée, de parole et d’action qui a soutenu nos engagements dans le
monde et l’Église comme baptisés responsables ensemble de la mission.
L’Esprit de Jésus nous aurait-il précédés sur le chemin d’Emmaüs et en Galilée? C’est ce que la
commission Emmaüs cherche à voir et à entendre en invitant les « nouvelles pousses », signes de
sa résurrection, à participer à l’organisation de cette nouvelle étape de la commission, « sous le
signe de l’espérance et de la joie ». L’Étranger vous fera signe. Gardez l’œil ouvert!
sdf.info • 2 mars 2011 • 7
Ressources
Pour aller plus loin ou pour satisfaire votre curiosité
[ Participer ]
La revue Relations
célèbre ses 70 ans
Une expérience inusitée de regards
critiques sur notre monde politique,
social, culturel et religieux. La preuve
de la possibilité de s’acculturer de la
foi chrétienne d’ici.
Deux manifestations majeures auront
lieu : une exposition préparée par les
Archives des Jésuites du Canada, en
collaboration avec la revue, qui aura
lieu du 7 mars au 31 mai, à la Maison
Bellarmin, 25, rue Jarry Ouest (du
lundi au vendredi de 8 h 30 à 18 h);
une célébration sur le rôle passé et
actuel de la revue qui se tiendra le
lundi 14 mars 2011, à 19 h, au Gesù,
1200, rue de Bleury, Montréal (Métro
Place-des-Arts). Pour assister à la
célébration, confirmez votre présence
avant le 9 mars. Pour information,
joignez Christiane Le Guen au 514
387-2541, poste 234, ou par courriel à
[email protected].
www.cjf.qc.ca/soirees_relations
[ Participer ]
Journées sociales du Québec
La crise écologique : un enjeu de
justice sociale
Les 3, 4 et 5 juin prochains, au
Collège de Valleyfield, se tiendront
les Journées sociales du Québec sous
le thème : « Le cri de la Terre et le cri
des pauvres – La crise écologique :
un enjeu de justice sociale » Le
conférencier principal sera André
Beauchamp. Pour s’inscrire :
www.diocesevalleyfield.org
(onglet Journées sociales 2011)
[ Lire ]
Le pouvoir déviant. Les abus
dans l’Église catholique
de Mgr Geoffrey Robinson
« J’ai tiré de l’histoire des agressions
sexuelles et de la réaction de l’Église
une conviction inébranlable : l’Église
catholique doit absolument se transformer en profondeur, et cette transformation devra être durable. De
façon plus spécifique, elle devra
s’opérer par rapport à deux réalités :
le pouvoir et la sexualité. » (Mgr
Robinson) Mgr Geoffrey Robinson a
été évêque auxiliaire de Sydney, en
Australie, de 1984 jusqu’à sa retraite
en 2004.
Novalis, 2010, 349 p.
[ Lire ]
Le manifeste des théologiens
allemands
Un renouveau indispensable
« Plus de 190 théologiens germanophones ont signé un manifeste
appelant l’Église catholique à entreprendre des réformes de fond.
Témoignage chrétien propose ici une
traduction de ce texte. »
http://www.temoignagechretien.fr/
ARTICLES/Religion/Le-manifestedes-theologiens-allemands/
Default-4-2394.xhtml
Extrait : « La crise profonde que
traverse notre Église exige de traiter
aussi les problèmes qui ne paraissent
pas au premier abord directement liés
au scandale des abus sexuels et à leur
étouffement durant des décennies. En
;
tant que professeurs de théologie, nous
n’avons pas le droit de nous taire plus
longtemps. Nous avons la responsabilité d’apporter notre contribution à
un véritable nouveau départ : 2011
doit être l’année du renouveau pour
l’Église. Il n’y a jamais eu autant de
chrétiens qui sont sortis de l’Église
catholique que l’année dernière. »
(Jérôme Anciberro)
[ Participer ]
ROJeP – Des groupes
chrétiens se positionnent
sur les gaz de schiste
Priorité au respect de la
population et de son territoire
Montréal, le 25 février 2011 – Nous,
soussignés, membres du Réseau
œcuménique Justice et Paix (ROJeP),
souhaitons affirmer notre vive
préoccupation concernant l’exploration et l’exploitation des gaz de
schiste. Nous refusons de céder aux
pressions de l’industrie en raison du
danger que représente pour l’environnement et la santé des citoyens du
Québec cette source d’énergie fossile.
Nous le faisons sur la base de nos
convictions éthiques concernant la
prépondérance du droit de la population à son bien-être et au respect de
son territoire sur les privilèges
concédés à l’industrie. Porter atteinte
au territoire, c’est mépriser la population qui l’habite. « La terre et moi,
flanc contre flanc, c’est mon affaire. »
(Gaston Miron, L’Homme rapaillé)
Pour information, visitez le site
www.justicepaix.org ou joignez Julie
Sabourault au 438 764-0302.
Prochaine parution du journal : 23 mars 2011
Le journal Sentiersdefoi.info est une publication de Sentiers de foi, OSBL autonome et indépendant d’inspiration chrétienne fondé en 1984,
qui a pour mission d’être un espace favorisant la connaissance, la reconnaissance et la collaboration des sentiers de foi au Québec,
dans une perspective chrétienne inscrite dans le pluralisme actuel.
ISSN 1715-8370 | 8 2011 Sentiers de foi | Tous droits réservés
Ce journal, publié uniquement sur le Web, est de ce fait entièrement écologique. Imprimez-le et diffusez-le en pensant à l’environnement.
2005-2010
5
ans de marche
dans les pas du vent
de
foi.info
Sentiers
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Vol. 6 no 10 / 23 mars 2011
8 Lucie Brousseau, 2011 : Paix
Journal Web
bimensuel
indépendant
qui vise à faire
connaître
des parcours
et des lieux
où se vivent
des expériences
humaines
et spirituelles
novatrices.
Comité éditorial
Rédacteur en chef
Gérard Laverdure
Secrétaire de rédaction
Ghislain Bédard
Représentant du C.A.
Michel-M. Campbell
Itinéraire
Collaboration
Dominique Boisvert
Jean-Marc Gauthier
Louise Deschamps
Perspectives
Photographie
Lucie Brousseau
De l’objection de conscience militaire à l’objection de conscience fiscale, les
mouvements d’opposition à la guerre ont adapté leurs stratégies aux
manœuvres des militaristes. [ p. 2 ]
par Dominique Boisvert
Intériorité
Cessons la guerre! Créons la paix!
L’objection de conscience, une racine qui pousse dans toutes les cultures et
toutes les époques. [ p. 5 ]
Présenté par Conscience Canada
Actualités
Remettre Vatican II sur les rails
À l’invitation de Claude Lefebvre, initiateur des forums André-Naud, des
baptisés de l’Église de Montréal se rassemblent pour voir comment « remettre
Vatican II sur les rails ». [ p. 6 ]
par Gérard Laverdure
Ce journal Web existe
uniquement grâce
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Faites parvenir votre don
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97, rue de l’Aqueduc
Repentigny (Qc) J6A 4E2.
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sera émis.
La revue Relations : 70 ans de résistance
Enquêtes, analyses, prises de position publiques, la revue Relations actualise
l’Évangile dans notre société. [ p. 6 ]
par Louise Deschamps
Fêtons 5 ans
ISSN 1715-8370
8 2011 Sentiers de foi
Tous droits réservés
Guerre absurde... pour rien ou presque
« Faire la guerre, ou ne pas la faire, une maudite question! » On n’a pas fini
de se poser cette question dans notre monde « civilisé ». [ p. 3 ]
par Jean-Marc Gauthier
Conception graphique
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Pour nous joindre
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Pour vous abonner
www.sentiersdefoi.info
Abonnement gratuit.
Faut-il accepter de payer pour la guerre?
Une question de mort et de vie... sur un nouveau blogue
Nous vous invitons à réfléchir sur les effets du mystère de Pâques dans la vie
concrète du quotidien par le moyen de notre nouveau blogue. [ p. 7 ]
par Michel-M. Campbell
sdf.info • 23 mars 2011 • 2
Itinéraire
Faut-il accepter de payer pour la guerre?
De l’objection de conscience militaire à l’objection de conscience fiscale, les mouvements d’opposition à la guerre ont
adapté leurs stratégies aux manœuvres des militaristes.
Grave question qui a divisé les humains de diverses traditions religieuses depuis longtemps! Pour
plusieurs, l’interdit « Tu ne tueras point » de même que le message radicalement nouveau de Jésus
« Aimez même vos ennemis » ont mené à l’objection de conscience : le refus de faire la guerre ou
même de porter les armes en cas de conflit. Ce refus de toute participation militaire est à l’origine
Dominique Boisvert a des « Églises historiques de paix1 », comme les Quakers ou les Mennonites.
par
Dominique Boisvert
collaboration spéciale
travaillé surtout en
milieux communautaires,
dans les domaines des
droits humains, de la
solidarité internationale,
de la non-violence, de la
simplicité volontaire et
de la quête de sens. Il
collabore régulièrement
à la revue Relations et
tient un blogue :
www.carnet.
simplicitevolontaire.org.
1. http://en.wikipedia.org/
wiki/Peace_churches
2. Voir www.conscience
canada.ca. Au Québec
le mouvement, d’origine
non religieuse, s’est
appelé Nos impôts pour
la paix de 1987 à 2007.
3.Le 10 mars 2011, on
apprenait que le coût de
nos 65 nouveaux avions
chasseurs furtifs F-35
est passé de 16 à 29
milliards de dollars! Une
obscénité quand on
pense aux besoins en
santé et en éducation au
Canada, et encore plus
quand on pense aux
besoins d’eau potable et
de nourriture ailleurs
dans le monde.
4.Un Sommet populaire
contre la guerre et le
militarisme, tenu à
Montréal en novembre
2010, a émis une
importante déclaration
« Pour en finir avec la
logique de guerre et de
domination ». Voir
http://www.echecala
guerre.org/assets/
files/evenements/
SOMMET/Declaration.pdf.
5. Voir www.cpti.ws.
Ils ont besoin de notre argent
Ce sont quelques personnes de Victoria, issues de ces traditions, qui ont fondé Conscience Canada
en 19782. Leur but? Mettre à jour l’objection de conscience en l’appliquant désormais aux impôts
militaires. En effet, la modernisation de la guerre et la professionnalisation des armées ont rendu
la conscription des personnes obsolète : c’est désormais notre argent que les gouvernements ont
besoin de « mobiliser », puisque la guerre se fait désormais beaucoup plus avec de la quincaillerie
toujours plus sophistiquée3 qu’avec des humains abrités dans des tranchées. Ce qui faisait dire au
secrétaire d’État de Ronald Reagan, le général Alexander Haig qui assistait à une manifestation
anti-guerre : « Qu’ils manifestent autant qu’ils veulent. Tant qu’ils paieront leurs impôts! »
Et c’est là l’enjeu : acceptons-nous de payer, par nos impôts, pour faire faire par d’autres (ou par
de la technologie) ce que nous refuserions en conscience de faire nous-mêmes? L’objection de
conscience militaire, que le Canada reconnaît depuis 1793, doit évoluer en même temps que la
guerre à laquelle elle s’oppose : c’est maintenant l’objection de conscience fiscale qui doit être
reconnue, c’est-à-dire le refus de payer les impôts militaires.
Des précédents dans l’histoire
Il y a d’ailleurs à cela des précédents importants : dès 1849, le gouvernement du Haut-Canada
reconnaissait que l’impôt spécial (la poll tax), exigé des Quakers pour compenser leur refus de
servir dans la milice et que plusieurs refusaient de payer, préférant aller en prison, pour ne pas
trahir leur conscience, serait désormais affecté exclusivement à l’entretien des routes. De même,
les War Bonds (ou plus pudiquement, en français, les Bons de la Victoire) servant à financer
l’effort de guerre, que refusaient d’acheter les membres des Églises historiques de paix malgré leur
volonté de se montrer patriotiques, ont été remplacés pour eux par des Peace Bonds dont les
recettes servaient exclusivement à des fins non militaires.
Un Fonds des impôts pour la paix
C’est ainsi que, depuis 1978, des citoyennes et citoyens canadiens et québécois ont mis sur pied
un Fonds des impôts pour la paix qui détient, en fidéicommis, les sommes qu’ils ont refusé de
payer pour soutenir la guerre et la préparation de celle-ci. Pendant ce temps, ces citoyens et
citoyennes n’ont cessé de demander au gouvernement canadien de mettre sur pied un mécanisme
fiscal qui leur permettrait de respecter à la fois la loi de leur conscience et celle de l’impôt. Ils sont
allés à plusieurs reprises devant les tribunaux afin de tenter de faire reconnaître judiciairement
l’application de la liberté de conscience garantie par la Charte canadienne des droits et libertés. Ils
ont même, par l’entremise de divers députés fédéraux, fait présenter plusieurs projets de loi privés
visant à faire reconnaître législativement l’objection de conscience fiscale.
Ce mouvement, mis en branle par des chrétiennes et chrétiens pacifistes, s’est peu à peu élargi à
d’autres militants et militantes qui s’engageaient non plus pour des raisons religieuses mais
philosophiques, au nom de leurs principes fondamentaux4. De même, des mouvements semblables
sont nés dans plusieurs pays du monde5, avec des modalités et des accents divers, mais toujours
avec le même objectif de faire reculer la guerre et le recours privilégié à la force des armes pour
résoudre les divers conflits qui surgissent à l’intérieur des pays ou entre eux.
Lire la suite, page 3
sdf.info • 23 mars 2011 • 3
Itinéraire (suite)
Grâce à la Déclaration des impôts pour la paix6, TOUS les contribuables (même ceux et celles dont
les impôts sont déduits à la source ou qui attendent des retours d’impôts) peuvent désormais
facilement exprimer au gouvernement fédéral leur refus de financer la guerre et leur demande pour
7. Voir www.conscience qu’un mécanisme officiel soit mis sur pied afin de leur permettre de respecter leur conscience. Il
canada.ca/eptrfr/
leur suffit de signer l’une ou l’autre des deux options proposées dans la Déclaration et de l’envoyer
index.php.
avec leur rapport d’impôt régulier, soit en version papier ou électroniquement7. Si vous êtes contre
la guerre, vous n’avez plus de raison de payer pour la faire!
6. Voir www.conscience
canada.ca/resources/
ptr_2010_fr.pdf.
Perspectives
Guerre absurde... pour rien ou presque
« Faire la guerre, ou ne pas la faire, une maudite question! » On n’a pas fini de se poser cette question dans notre monde
« civilisé ».
par
Jean-Marc Gauthier
collaboration spéciale
Les êtres humains font la guerre depuis qu’ils ont accédé à l’humanité. Dans la Bible, on parle
déjà, au deuxième moment du monde, de Caïn qui tue son frère Abel... pour presque rien. Les
animaux s’affrontent périodiquement, ou se dévorent régulièrement en tant que prédateurs, mais
jamais ils ne se feront une « Grande Guerre » de quatre ans (1914-1918) ou une autre « Grande
Guerre » de six ans (1939-1945). Et on ne parle pas de la guerre de Cent Ans... qui a, en fait, duré
116 ans, de 1337 à 1453. Car une guerre, on sait quand ça commence, mais on ne sait pas quand
ça finit, même quand ça semble fini. Pensons à l’Irak.
Jean-Marc Gauthier est
professeur retraité de la
faculté de théologie de
l'Université de Montréal.
Il est artisan de la
parole, car il présente
depuis bien des années
des monologues
accompagnés de son
harmonica.
À ce que l’on connaisse, la guerre est le propre des êtres humains. Et seuls les êtres humains
s’entretuent, à ne plus finir. Avez-vous déjà vu un génocide animal? (À moins qu’il ne soit
accompli par des êtres humains.) Mais des génocides humains, il y en a eu, et ça ne finit plus. Et
la « guerre des dieux » ou « la guerre au nom de Dieu » n’est qu’une illusion ou une projection des
pauvres êtres humains, incapables d’assumer leur propre violence, leurs propres meurtres. Car
qu’est-ce que la guerre sinon le contexte extrêmement défavorable où des meurtres à outrance sont
légitimés, sans loi. Au nom de quelque chose ou de n’importe quoi. Les « lois des mesures de
guerre » deviennent en pratique sans aucune mesure. Tout devient démesuré.
Beaucoup d’êtres humains, encore aujourd’hui, se valorisent ou dévalorisent les autres en faisant
la guerre. La guerre est une terre de « valeurs ». Beaucoup d’argent est investi dans beaucoup de
pays du monde pour fabriquer des armes. Et en particulier dans les pays occidentaux, des pays soidisant garants de la démocratie et de la liberté. Vive la guerre libre! La guerre du libre marché et
de la concurrence. La guerre du libre marché des armes. Est-ce cette liberté que l’on veut? Est-ce
cette guerre que l’on veut?
Si l’on calculait l’argent que nous dépensons quotidiennement sur la planète pour l’armement et ses
dérivés, nous serions scandalisés – on parle de deux milliards par jour, mais c’est sans doute plus!
Nous sommes scandalisés, en effet, mais nous ne savons pas trop pourquoi, la plupart du temps.
Nous comprenons mal les jeux complexes de l’économie, en particulier de l’économie guerrière.
Shakespeare, par le biais d’Hamlet, disait : « Être, ou ne pas être, c’est là la question! » La
nouvelle question est : « Faire la guerre, ou ne pas la faire, une maudite question! » On n’a pas
fini de se poser cette question dans notre monde « civilisé ». Notre monde civilisé est guerrier de
fond en comble et, souvent, il ne se rend pas compte à quel point il l’est. En tout cas, il refoule son
« rendre compte » dans les bas-fonds du pouvoir masqué. Pourtant, l’économie politique est un
monde de comptes, mais on nous raconte des contes plutôt que de bien rendre compte.
Lire la suite, page 4
sdf.info • 23 mars 2011 • 4
Perspectives (suite)
Avons-nous besoin de tant de milliards, qui semblent se multiplier, pour construire nombre
d’avions militaires, ici, chez nous? Il est temps qu’on demande des comptes.
Le Collectif
Échec à la guerre
www.echecalaguerre.org
Ce qui s’est passé au Japon, récemment – tremblement de terre et tsunami – nous fait prendre
conscience du caractère dévastateur de la nature, en certaines circonstances : les forces brutales des
éléments naturels peuvent être meurtrières. Et pourtant, le sont-elles plus que les bombes lâchées
sur Hiroshima et Nagasaki en 1945? Alors, des êtres humains décidaient de tuer d’autres êtres
humains pour, soi-disant, mettre fin à la guerre, pour gagner la guerre. La bombe lâchée sur
Hiroshima était surnommée « Little Boy ». Quel lapsus ou quel cynisme! Faire porter sur le dos
d’un « petit garçon en forme de bombe » la mort d’au moins 140 000 personnes – 70 000 sur le
coup – dont plusieurs « petits garçons réels ». Le président Truman, apprenant la « réussite de
l’opération » aurait dit : « C’est le plus grand événement de l’Histoire! » Qui dit mieux!? Je
propose la venue au monde d’un « petit garçon » né d’une humble femme, ce fils qu’« elle dépose
dans une mangeoire parce qu’il n’y avait pas de place pour eux dans la salle d’hôtes » (Lc 2, 7).
Devant cet événement, on chante « Gloire à Dieu au plus haut des cieux et paix sur la terre aux
êtres humains, ses bien-aimés. » (Lc 2, 14) Ce « Little Boy », devenu un grand garçon, aurait dit :
« Heureux ceux qui font œuvre de paix, ils seront appelés fils de Dieu. » Ça a l’air d’une histoire
de gars, mais on pourrait tout dire ça au féminin, peut-être encore mieux. Car les maudites guerres
sont surtout une histoire de gars, hélas!
Guerre et paix, guerre ou paix!? Faire la guerre ou faire la paix? Voilà la question! Elle n’est plus
maudite, cette question, mais bénie. Faire la paix, c’est devenir « fils ou fille de Dieu », si je
comprends bien. Je sais que ce n’est pas simple au cœur de l’Histoire réelle. Je pense à la Libye,
en particulier. Mais là est la grande question de l’humanité : comment vivre ensemble, en paix?
Il faut prendre le temps, de temps en temps, de se lever pour questionner et protester. Questionner
la guerre, questionner l’économie guerrière. Protester contre la guerre et marcher pour la paix, de
différentes façons. Nous l’avons déjà fait, en mars 2003, à l’aube de la « guerre en Irak ». On ne
nous a pas entendus, alors. On doit se remettre en marche, en pensées, en paroles et en actes.
Au cœur de la guerre, apprendre à faire la paix.
Le journal Web Sentiersdefoi.info passe à l’ère Facebook
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accès à votre webzine. Il vous suffit d’écrire « Journal Web
Sentiersdefoi.info » dans la barre de recherche au haut de votre page Facebook, de vous
rendre à celle du journal et de cliquer avec enthousiasme sur le bouton « J’aime »! Ainsi, vous
pourrez prendre connaissance sur votre babillard de toutes les informations qui seront
publiées par le webzine Sentiersdefoi.info sur ce fameux Livre des visages.
sdf.info • 23 mars 2011 • 5
Intériorité
Cessons la guerre!
Créons la paix!
Au fond de sa conscience, l’homme découvre la présence d’une loi qu’il ne s’est pas donnée lui-même, mais à
laquelle il est tenu d’obéir. Cette voix de la conscience, qui ne cesse de le presser d’aimer et d’accomplir le bien et
d’éviter le mal, au moment opportun résonne dans l’intimité de son cœur : « Fais ceci, évite cela. »
Concile Vatican II, Constitution « Gaudium et Spes », no 16.
Rome, 7 décembre 1965
La non-violence est la réponse aux questions morales et politiques cruciales de notre temps : le besoin,
pour tout être humain, de vaincre l’oppression et la violence sans recourir lui-même à l’oppression et à
la violence. L’Homme doit développer, pour tous les conflits humains, une méthode qui refuse la
vengeance, l’agression et les représailles. Et le fondement d’une telle méthode est l’amour.
Martin Luther King, Discours d’acceptation du Prix Nobel de la Paix
Stockholm, 11 décembre 1964
La haine ne peut être stoppée par la haine, mais seulement par l’amour. C’est là la règle éternelle.
Le Bouddha, Inde, VIe siècle avant J.-C.
La guerre dépend maintenant bien plus de l’argent que des militaires. Il n’a fallu que douze hommes
pour larguer la bombe sur Hiroshima, mais il a fallu des millions, peut-être même des milliards de dollars
des contribuables canadiens, britanniques et américains pour fabriquer cette bombe.
Édith Adamson, fondatrice de Conscience Canada, Victoria (BC), 1978
Nous rejetons catégoriquement toute forme de guerre, de lutte ou de combats extérieurs, avec n’importe quelle
arme, quel qu’en soit l’objectif ou sous quelque prétexte que ce soit. Et c’est là notre témoignage à la face du monde.
L’esprit du Christ, par lequel nous sommes guidés, n’est pas changeant, de sorte qu’il puisse nous ordonner de
renoncer à quelque chose comme étant mauvais, puis nous pousser ensuite à l’adopter. Et nous savons avec
certitude, ainsi que nous en rendons témoignage au monde, que l’esprit du Christ, qui nous conduit en toute Vérité,
ne va jamais nous mener à combattre ou à faire la guerre contre un être humain avec des armes, ni pour le Royaume
du Christ, ni pour les royaumes de ce monde.
Un des textes fondateurs des Quakers, tiré de la Déclaration à Charles II, signée par Georges Fox et ses compagnons
Angleterre, 21 novembre 1660
sdf.info • 23 mars 2011 • 6
Actualités
Remettre Vatican II sur les rails
A l’invitation de Claude Lefebvre, initiateur des forums André-Naud, des baptisés de l’Église de Montréal se rassemblent
pour voir comment « remettre Vatican II sur les rails ».
Un beau dimanche après-midi de printemps, 20 mars, où tout dégèle et où on ouvre les fenêtres
tout grand, plus d’une trentaine de baptisés du diocèse de Montréal, à l’invitation de Claude
Lefebvre, fils de la Charité, se sont rassemblés, dans la foulée de la création de la Conférence
catholique des baptisés de France (2010), pour retrouver l’enthousiasme et les invitations de
1
À lire Vatican II et se demander comment « souffler sur les braises et faire ressurgir la flamme » 50 ans
• Mgr Paul-Émile plus tard?
par
Gérard Laverdure
sdf.info
Charbonneau, Célébrer
l’annonce de Vatican II,
Novalis, 2008, 24 p.
• Anne Soupa et
Christine Pedotti, Les
deux pieds dans le
bénitier, Presses de la
Renaissance, Paris,
2010. « Ni partir ni nous
taire. » www.baptises.fr
Un constat de départ : « Depuis des siècles, le clergé s’était approprié l’Église, pourrait-on dire
sans exagération. Vatican II a permis un profond renouvellement de la théologie de l’Église, mais
on n’a pas su trouver les formes pour traduire dans le concret de la vie de l’Église la nouvelle
théologie – Peuple de Dieu, collégialité, place des femmes, dialogue avec le monde – et s’ajuster
ainsi à un monde en évolution. La vieille façon de se comporter a perduré 2. » Constat partagé par
de nombreux évêques, théologiens et historiens de l’Église et par l’un des rares pères de ce concile
toujours vivant, Mgr Paul-Émile Charbonneau, présent à la rencontre.
L’invitation est faite aux baptisés de Montréal de prendre la parole pour renouer avec le Souffle de
Vatican II, pour retrouver ce dynamisme et cette fraîche espérance. Il s’agit donc ici d’aller son
1. Document de la chemin en suivant le Souffle de l’Esprit à la suite de Jésus; rien d’agressif ou de revanchard, mais
rencontre. une volonté adulte d’assumer pleinement ses responsabilités de baptisés dans la mission de
2. Idem. l’Église d’aujourd’hui.
Actualités
La revue Relations : 70 ans de résistance
Enquêtes, analyses, prises de position publiques, la revue Relations actualise l’Évangile dans notre société.
À Montréal, le lundi 14 mars, au Gesù, les artisanes et artisans contemporains et passés de la revue
Relations se sont rassemblés pour une fête toute vibrante de fierté! Ils ont livré un témoignage ému
mêlé d’humour pour 70 ans d’engagement en faveur de la justice sociale. La directrice Élisabeth
Garant et le rédacteur en chef Jean-Claude Ravet ont promis de poursuivre ce projet de
comprendre et d’expliquer notre monde afin que les bafoués, les exclus s’approprient les
arguments de résistance à un système économique voué à l’accumulation du capital par une bien
Louise Deschamps est
trésorière de l’organisme petite part de l’humanité et puissent développer la solidarité humaine en favorisant l’espoir et la
Sentiers de foi. lutte contre l’argent qui rend barbare.
par
Louise Deschamps
collaboration spéciale
Il nous a été rappelé que la revue Relations, fondée par de jeunes jésuites en 1941, s’est rapidement
impliquée dans des enquêtes et des analyses dénonçant l’exploitation d’êtres humains par un
capital qui sait se rendre aveugle. La soirée, articulée autour de cinq thèmes, a fait mémoire de
moments forts, mais a aussi donné lieu à des prises de parole signifiantes pour notre société
La revue Relations est
actuelle. Le tout fut ponctué par diverses prestations artistiques, puisque Relations considère
publiée par le Centre
justice et foi, un centre depuis dix ans l’art comme porteur de sens et outil de libération.
d’analyse sociale
progressiste fondé et
soutenu par les Jésuites
du Québec.
www.revuerelations.qc.ca
Relations nous a fait vivre une célébration à son image où ses responsables et auteurs nous ont
donné à réfléchir sur les mécanismes qui animent les structures de la société. Ils nous ont invités
à accepter l’inconfort de l’Évangile pour tenir sur la route de l’espoir cette lumière vacillante, mais
si nécessaire pour changer le monde.
sdf.info • 23 mars 2011 • 7
Fêtons 5 ans
Une question de mort et de vie... sur un nouveau blogue
Nous vous invitons à réfléchir avec nous sur les effets du mystère de Pâques dans la vie concrète du quotidien par le
moyen de notre nouveau blogue.
par
Michel-M. Campbell
président de
Sentiers de foi
Chers lecteurs et lectrices,
En ce temps du carême, nous, du comité éditorial du journal Web Sentierdefoi.info, vous invitons
à réfléchir avec nous sur les effets du mystère de Pâques dans la vie concrète du quotidien par le
moyen de notre nouveau blogue.
Pour participer à cette nouvelle expérience d'interaction, nous vous proposons de répondre, de
façon brève, à l’une ou l’autre des questions suivantes :
• À la lumière de votre foi en Jésus Christ, reconnaissez-vous des
passages de la mort à la résurrection autour de vous? Lesquels?
• Quels sont les effets concrets de votre foi en la mort et en la
résurrection de Jésus Christ dans votre vie?
Faites-nous part de vos réponses soit en allant directement sur notre nouveau blogue à l'adresse
suivante :
www.sentiersdefoi.wordpress.com
ou en nous faisant parvenir votre réflexion par notre courriel habituel : [email protected], et
ce, d'ici le 8 avril prochain. N'hésitez pas à consulter le blogue régulièrement pour voir les
commentaires des autres participants et participantes et y réagir, si vous le souhaitez.
Visitez notre nouveau
blogue à
www.sentiersdefoi.
wordpress.com
et faites-nous part de
vos réponses ou de vos
commentaires.
Notez que pour amorcer la discussion et en assurer le rythme, nous avons demandé à quelques
personnes d’apporter leur contribution tout au long de l’exercice. Enfin, le numéro du journal du
13 avril prochain présentera un retour sur cette expérience d’interaction entre Sentierdefoi.info et
ses lecteurs et lectrices.
Merci de votre participation.
sdf.info • 23 mars 2011 • 8
Ressources
Pour aller plus loin ou pour satisfaire votre curiosité
question est donc légitime : vivonsnous dans une Église sans pasteurs?
[ Participer ]
Une Église sans pasteurs
Faut-il réinventer la relation
pasteurs-baptisés?
Dans le cadre de son deuxième
colloque annuel, le Réseau Culture et
foi vous invite, le samedi 7 mai
prochain, de 9 h à 15 h 30, à une
journée de réflexion sur la relation
pastorale. Loin de nous restreindre à
une critique des pasteurs de notre
Église, nous allons tenter de cerner
les liens existant actuellement entre
les sujets de la relation pastorale. Que
sont-ils devenus, quelles mutations
sont en cours, quel avenir?
Un coup d’œil rapide nous permet de
reconnaître des tensions importantes
au sein de la relation pastorale. Les
enseignements du pasteur suprême
sont difficilement reçus, voire bannis
par les fidèles de plus en plus
informés, autonomes et critiques. Les
liens entre laïcs, agents de pastorale,
prêtres, curés et leur évêque sont
fréquemment tendus; on reproche à ce
dernier d’être peu à l’écoute de son
peuple au profit de la défense des
directives romaines. Sur le plan
paroissial, les regroupements artificiels (superparoisses) ont éloigné les
communautés chrétiennes de celui qui
se réclame toujours du titre de pasteur;
une tâche intenable leur est assignée.
Finalement, les expériences de
nouvelles formes de communautés
chrétiennes attirent notre attention sur
une autre forme de lien pastoral. La
La participation des invités suivants
nous permettra de faire le point sur
cet aspect crucial de notre tradition de
foi : André Anctil, curé de SaintDenis (Montréal); Nycole Pepper,
coordonnatrice de la pastorale à la
paroisse Saint-Eustache; Gérard
Laverdure, laïc très impliqué en
pastorale et membre de Chrétiens,
chrétiennes dans la cité et André
Myre, bibliste
Le colloque aura lieu à la paroisse
Notre-Dame de Grâce, 5333, av.
Notre-Dame-de-Grâce, à Montréal.
Inscription jusqu’au 3 mai par
téléphone au 514 737-9170 ou au 450
670-9635, ou par courriel à
[email protected] ou à
[email protected].
Coût : 30 $ (incluant repas et
collations)
www.culture-et-foi.com
[ Lire ]
La guerre s’acharne contre les
femmes
Réflexion biblique de Claude
Lacaille, pmé
Disons NON à la guerre! Le Canada se
classe parmi les champions mondiaux
au chapitre des dépenses militaires. Le
Premier ministre a-t-il la moindre idée
de ce que signifie la guerre pour les
femmes et leurs enfants?
http://www.interbible.org/interBible/
source/justice/2011/bjs_110318.html
;
[ Lire ]
Mais d’où vient la femme de
Caïn? Les récits insolites de la
Bible
de Sébastien Doane
« Pour les juifs et les chrétiens, la
Bible est un livre sacré, inspiré par
Dieu. Pourtant, elle renferme bon
nombre de textes surprenants, et même
bizarres ou inusités. On y découvre des
histoires de polygamie, d’inceste et de
jalousie, tout autant que des récits de
géants, des descriptions de miracles et
de prodiges ou des textes au parfum
d’érotisme : comment comprendre le
sens de ces récits et leur insertion dans
le texte biblique?
Passionné par la Bible, Sébastien
Doane commente plus d’une trentaine
de ces textes insolites. Favorisant une
lecture ludique et accessible de la
Bible, il initie avec simplicité à une
lecture intelligente des récits anciens et
permet de découvrir toute l’actualité
de leur message. » (4e de couverture)
Un livre amusant à lire, instructif, qui
nous amène à découvrir avec émerveillement, par ses récits les plus
inusités, les richesses et subtilités de
ce trésor littéraire qu’est la Bible. Une
lecture passionnante autant pour ceux
qui connaissent déjà les récits que
pour les néophytes. On y fait des
découvertes fascinantes! Les textes
sont courts, bien écrits; et on peut y
flâner avec plaisir en lisant, à notre
gré, les chapitres qui nous intriguent
le plus! À lire.
Novalis/Médiaspaul, 2010.
Prochaine parution du journal : 13 avril 2011
Le journal Sentiersdefoi.info est une publication de Sentiers de foi, OSBL autonome et indépendant d’inspiration chrétienne fondé en 1984,
qui a pour mission d’être un espace favorisant la connaissance, la reconnaissance et la collaboration des sentiers de foi au Québec,
dans une perspective chrétienne inscrite dans le pluralisme actuel.
ISSN 1715-8370 | 8 2011 Sentiers de foi | Tous droits réservés
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5
ans de marche
dans les pas du vent
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foi.info
Sentiers
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Vol. 6 no 11 / 13 avril 2011
Comité éditorial
Rédacteur en chef
Gérard Laverdure
Secrétaire de rédaction
Ghislain Bédard
Représentant du C.A.
Michel-M. Campbell
Collaboration
Raymond Lemieux
8 Lucie Brousseau, 2011 : Cœur saignant la passion
Journal Web
bimensuel
indépendant
qui vise à faire
connaître
des parcours
et des lieux
où se vivent
des expériences
humaines
et spirituelles
novatrices.
Itinéraire
À la veille des jours saints, nous vous proposons de reconsidérer la pratique
minoritaire du lavement des pieds à la lumière du dernier livre du théologien
François Nault. [ p. 2 ]
par Michel-M Campbell
Perspectives
Conception graphique
Ghislain Bédard
Intériorité
Révélations et implications du lavement des pieds
Nous vous livrons ici quelques extraits du livre Le lavement des pieds : un
asacrement de François Nault, publié aux éditions Médiaspaul. « C’est le
corps nu, non voilé, non ennobli que ce rite ose montrer... » [ p. 5 ]
Pour nous joindre
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Présenté par Michel-M. Campbell
Actualités
E = mc2
Quels rapports y a-t-il entre la relativité, la mécanique quantique et les traditions
spirituelles? Jean Proulx, philosophe et poète, en a montré les convergences de
fond lors d’une conférence à la librairie Paulines, le 30 mars dernier. [ p. 6 ]
par Gérard Laverdure
Fêtons 5 ans
ISSN 1715-8370
8 2011 Sentiers de foi
Tous droits réservés
La théologie est aussi un sentier de foi
Le rappel du lavement des pieds nous conduit à questionner le sens de nos
rites, jusqu’à l’Eucharistie. « Faites ceci... » mène bien au-delà de la répétition
rituelle. [ p. 3 ]
par Raymond Lemieux
Photographie
Lucie Brousseau
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sera émis.
Un sacrement de la reconnaissance de la chair?
Des lieux nouveaux pour se préparer à Pâques
Nous vous invitons à réfléchir sur les effets du mystère de Pâques dans la vie
concrète du quotidien par le moyen de notre nouveau blogue. [ p. 7 ]
par Michel-M. Campbell
sdf.info • 13 avril 2011 • 2
Itinéraire
Un sacrement de la reconnaissance de la chair?
À la veille des jours saints, nous vous proposons de reconsidérer la pratique minoritaire du lavement des pieds à la lumière
du dernier livre du théologien François Nault.
par
Michel-M. Campbell
sdf.info
On comprendra qu’à 7 ans, Marie Laurence Nault ait trouvé que
son professeur de père s’intéressait à un sujet répugnant (et bas?) :
le lavement des pieds. Pourtant, dans la logique paradoxale de
l’incarnation, celui-ci propose d’exalter cette pratique toujours
minoritaire. J’ose ici suivre un parcours aussi riche qu’inédit.
Le théologien François Nault1 nous apprend, dans son livre Le
lavement des pieds : un asacrement, publié chez Médiaspaul en
2010, qu’une tradition plus que millénaire, étayée par des piliers
de l’Église comme Ambroise de Milan et Bernard de Clairvaux,
considérait le lavement des pieds comme un véritable sacrement;
qu’au XIIe siècle, on ne l’a pas inclus dans la liste nouvelle des
sept sacrements. Aussi, je dois réfléchir à l’ambiguïté de cette
pratique aujourd’hui : l’inopportunité de ce rituel d’accueil dans
la culture moderne; l’incongruité de l’image télévisuelle d’un
pape lavant les pieds avec une cruche et une écuelle d’or; le
sexisme de l’exclusion des femmes, etc.
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Il vaut vraiment la peine de relire attentivement les quelques lignes du récit fondateur de ce rituel
(Jn 13, 1-15). Il y a d’abord la solennité de son préambule : au moment culminant de sa vie, Jésus
entreprend de mettre le comble à son amour pour les siens (Jn 13,1) : cela devrait donc être un des
moments les plus importants des évangiles. Et pourtant, au contraire des trois autres évangélistes,
Jean ne rappelle pas le récit du partage du pain et du vin et nous renvoie à une scène dont les
éléments sont plus étonnants les uns que les autres. Tout d’abord, un détail : c’est au milieu du
repas, et non pas à l’entrée de la maison, que Jésus entreprend le lavement des pieds, alors qu’à
l’époque, cela se faisait à l’entrée de la maison pour ne pas souiller (profaner) l’espace où l’on
mange avec les immondices de la rue. Ensuite, il y a le caractère inimaginable des actions : Jésus
se déshabille, ceint sa nudité d’un linge et s’abaisse à laver les pieds de ses disciples. Un geste
d’esclave. Un geste gênant entre amis à cause de ses connotations érotiques. Enfin, Jésus espère
que, si on ne peut comprendre ce geste du premier coup, on en vienne à reconnaître que ce
lavement mutuel est un exemple à suivre par tous ceux et celles qui veulent marcher avec lui.
Une relecture systématique
Nault revisite ce rituel de façon fort savante. D’Abraham à Jean Vanier. De la préhistoire (scènes
du premier testament) du texte fondateur du rite au monde moderne, il rappelle les différentes
interprétations retenues. D’aucuns ont vu, par exemple, dans le récit de la Cène chez Jean
(lavement des pieds et silence sur l’Eucharistie) une réaction à une sursacramentalisation dans les
communautés primitives; d’autres ont lié tour à tour ce rituel aux sacrements du baptême, de la
confirmation ou de la pénitence; et le dénuement volontaire à la Cène, comme une annonce de
celui du Golgotha.
1. François Nault est
professeur titulaire de
théologie à l’Université
Laval et père de quatre
enfants.
Nault montre enfin comment aujourd’hui, à l’Arche de Jean Vanier, on tente – en opposition à
l’asymétrie des liturgies où le célébrant condescend à aller vers des chrétiens et chrétiennes d’un
niveau inférieur – de respecter l’injonction de réciprocité : chacun et chacune lave les pieds de la
personne à sa droite. Il précise que, si elle s’avère possible dans l’environnement extraordinaire de
l’Arche, cette réciprocité d’un geste de soins intimes reste difficilement imaginable dans les
rassemblements liturgiques, toujours hiérarchisés. Ce qui pose la question du statut sacramentel du
lavement des pieds.
Lire la suite, page 3
sdf.info • 13 avril 2011 • 3
Itinéraire (suite)
Intimité, kénose2 et hiérarchie
Nault constate une tension dans l’évolution de la définition du mot sacrement : signe qui donne la
grâce. Cette tension s’exprime dans l’opposition des traductions, grecque et latine, de ce terme :
mysterium et sacramentum. Alors que le premier, d’abord théologique, met en valeur la grâce de
Dieu qui se manifeste dans le signe, le second insiste sur l’efficacité de l’administration du rituel.
Or le rite ordonne, sépare, hiérarchise, organise l’espace : haut/bas; tête/pied/sexe, c’est-à-dire ce
qui est canonique ou non, correct ou non. D’où des risques de perversion : conception du
sacrement comme un en-soi coupé de la vie, sans référence éthique. On se contente alors d’être en
règle avec les sacrements sans tenir compte qu’ils nous invitent à reprendre le geste de Dieu, à
nous mettre en lien avec notre histoire et celle des autres.
Ainsi, le lavement des pieds ne peut se compter parmi les sept sacrements sans toutefois perdre sa
valeur sacramentelle de signe du mystère de la grâce. Ses dimensions érotiques (se déchausser, se
toucher implique une intimité) et politiques (nu, on perd son statut; on se retrouve sur le même
pied) cadrent mal avec un rituel sacramentel hiérarchisé. Il n’en révèle pas moins la limite de celui2. Action de Dieu qui se ci en opposition à la liberté d’un Dieu pour qui les derniers seront les premiers. Un Dieu capable
dépouille de sa de se dénuder dans sa passion et qui invite à nous aimer les uns les autres comme il nous aime, de
puissance. la tête aux pieds, avec tout ce que cela veut dire.
Perspectives
La théologie est aussi un sentier de foi
Le rappel du lavement des pieds nous conduit à questionner le sens de nos rites, jusqu’à l’Eucharistie. « Faites ceci... »
mène bien au-delà de la répétition rituelle.
par
Raymond Lemieux
collaboration spéciale
Raymond Lemieux est le
pionnier des sciences de
la religion au Québec.
Lié à l’Université Laval
depuis 1965, d’abord en
tant que chercheur au
Centre de recherches en
sociologie religieuse,
puis comme professeur
à la Faculté de
théologie, Raymond
Lemieux a fondé en
1980 le Groupe de
recherches en sciences
de la religion de
l’Université Laval, qu’il
dirige toujours.
Toute institution repose sur un choix arbitraire de symboles qui structurent sa vie et déterminent
sa visibilité. Il n’en va pas autrement de l’Église, dans son histoire, ainsi que des États, totalitaires
ou démocratiques, peu importe. Arbitraire, ici, signifie moins « ce qui proviendrait d’un caprice »
qu’« exerçant une fonction d’arbitre », c’est-à-dire imposant une hiérarchie des pratiques, une
mise en ordre dans laquelle les sujets peuvent se reconnaître et trouver chacun leur place. Il est
toujours intéressant de prendre conscience, devant ce fait, que les Évangiles, sources des traditions
chrétiennes, sont pluriels. Qu’on en ait reconnu quatre comme canoniques, dans les premiers
siècles, n’a rien d’insignifiant. Parmi les multiples directions dans lesquelles s’engageaient déjà les
expériences chrétiennes, on a fait un choix, refoulant, voire jetant l’anathème sur certaines d’entre
elles. Mais on a tout de même conservé quatre ensembles de textes, avec un souci évident de
concordance, mais non sans préserver une certaine pluralité des sentiers de foi dont ils inaugurent
les parcours.
Narrant cet épisode du lavement des pieds situé le soir même du dernier repas, alors qu’il est
négligé par les autres récits, l’évangile de Jean montre bien cette ouverture. Or, pour toutes sortes
de raisons, cette pratique est devenue minoritaire dans l’histoire de l’Église. Elle possède pourtant
une charge symbolique fondamentale. Benoît XVI lui-même l’évoque au chapitre 3 du second
tome de sa Vie de Jésus, en l’associant à la confession : « La faute ne doit pas continuer à suppurer
dans l’âme de manière cachée, l’empoisonnant ainsi de l’intérieur. Elle a besoin de la confession.
Par le moyen de la confession, nous la mettons à la lumière, nous l’exposons à l’amour
purificateur du Christ. Dans la confession, le Seigneur lave sans cesse de nouveau nos pieds sales
et il nous prépare à la communion conviviale avec lui. » Et cette problématique n’est pas sans lien
Lire la suite, page 4
Perspectives (suite)
sdf.info • 13 avril 2011 • 4
avec celle de la vérité, soulevée dans le même chapitre : « Étant donné l’impossibilité d’un
consensus sur la vérité et en s’appuyant sur elle, la politique ne se fait-elle pas l’instrument de
certaines traditions qui, en réalité, ne sont que des formes de conservation du pouvoir? » La
question est lancée par Joseph Ratzinger aux institutions séculières, mais les institutions d’Église
peuvent-elle, devant cette question, rester indifférentes?
Se laisser laver les pieds est un geste d’humilité – les personnes âgées qui ne peuvent plus le faire
par elles-mêmes en savent quelque chose –, a fortiori quand ils sont sales, souillés par les scories
de la route, brisés par les aspérités des chemins parcourus. Les pieds résument la condition
humaine. Au temps de Jésus, quand on circulait chaussés de simples sandales sur des routes
poussiéreuses, il y avait là plus qu’une figure : c’était un acte de compassion, un prendre soin, un
partage de la condition humaine. Les pratiques liturgiques en ont réduit au minimum la charge
symbolique, jusqu’à la dérision parfois. Elles ont plus ou moins évacué le rapport intime entre
l’institution eucharistique, sacralisée, et sa retombée éthique incontournable : « Faites ceci » ne
concerne-t-il pas, bien au-delà de la répétition rituelle, la réalité du partage du pain, c’est-à-dire
des produits humains permettant aux humains de vivre et de mieux vivre? Et, du même coup, le
partage du manque, de la souffrance, que le pain vient temporairement apaiser?
Dans son petit livre, François Nault « revisite » la pratique du lavement des pieds. Sans nier ni
exagérer ses ambiguïtés possibles, il montre comment elle manifeste une crise du rite que le
christianisme vit dès qu’il néglige « la dépendance du rite à l’égard de la relation éthique1 ». Il
1. Voir p. 117. L’auteur souligne, autrement dit, le rapport nécessaire entre le rite et la vie. Et il met en lumière, du même
renvoie ici à Louis-Marie
Chauvet, Rites, sources coup, un autre aspect de la richesse d’un Évangile qui se présente à lire autrement.
et ressources, Bruxelles, Le théologien, est, par métier, appelé à échardonner les jardins de l’expérience croyante. Peut-être
Publications des
trouve-t-il là même sa vocation première. La pratique de la théologie, telle qu’elle se livre alors,
Facultés universitaires
Saint-Louis, est aussi un sentier de foi, toujours critique certes, confronté aux incertitudes de la raison et aux
1995, p. 146 ss. ambiguïtés de la culture, mais capable du risque à prendre avec la vie, avec l’Autre.
Le journal Web Sentiersdefoi.info passe à l’ère Facebook
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Sentiersdefoi.info » dans la barre de recherche au haut de votre page Facebook, de vous
rendre à celle du journal et de cliquer avec enthousiasme sur le bouton « J’aime »! Ainsi, vous
pourrez prendre connaissance sur votre babillard de toutes les informations qui seront
publiées par le webzine Sentiersdefoi.info sur ce fameux Livre des visages.
sdf.info • 13 avril 2011 • 5
Intériorité
Révélations et
implications
du
lavement des pieds
Extraits du livre
Le lavement des pieds : un asacrement
de François Nault
(Éditions Médiaspaul, 2010)
C’est tout à la fois le corps, le corps sexuel, le corps libidinal, le
corps dans toute sa beauté et dans toute sa laideur, dans sa
bassesse et dans sa saleté aussi (au sens propre), c’est le corps nu,
non voilé, non ennobli, que le rite du lavement des pieds ose
montrer...
Mais la liturgie déréalise le corps d’une certaine façon, grâce aux
vêtements liturgiques et à toute une scénographie qui
programment les corps, les rendent en quelque sorte plus
amples, plus élégants, plus angéliques [...]. [Elle] a aussi tendance
à déréaliser le corps des parties nobles, [...] le visage et les mains.
[ p 85 ]
Il faut une communauté dont les membres sont dans leur corps,
plutôt que dans leur tête, pour consentir à descendre dans les
zones troublantes de l’éros, pour accepter que le Sexe soit un lieu
possible de rencontre avec Dieu, qu’il y ait quasi coïncidence
entre le contact de la peau et le toucher divin.
Il faut que le corps ne soit pas simplement l’espace du péché, un
lieu qu’il faille purifier, préalablement à la rencontre avec Dieu,
mais le lieu même – déjà purifié par le Christ, Dieu fait chair – de
cette rencontre.
[ p 79 ]
En Jésus Christ, Dieu se révèle ainsi
à travers une relation de faiblesse
qui a pour effet de briser en retour
tout modèle de subordination.
Déconstruisant la hiérarchie
fondatrice, celle d’un Dieu toutpuissant régnant en maître, le
christianisme annonce un autre
type de relation sociale possible.
La kénose autorise une autre figure
de Dieu que celle qui est proposée
par les religions, un « Dieu
différent ». Le lavement des pieds
montre la souveraineté en acte du
Christ – une souveraineté à
laquelle il convie ses disciples à
participer – une souveraineté
d’amour et de service, d’abandon
plutôt que de subordination.
Rite de la non-différenciation, du
refus des clivages, le rite du
lavement des pieds est l’anti-rite
par excellence. La répulsion de
Pierre s’explique : on comprend
pourquoi « les hiérarques se
réclameront de Pierre qui gardait
ce sens hiérarchique dont le
Seigneur venait de la défaire ».
[ p. 107-108 ]
sdf.info • 13 avril 2011 • 6
Actualités
E = mc2
Quels rapports entre la relativité d’Einstein, la mécanique quantique et les traditions spirituelles? Jean Proulx, philosophe
et poète, en a montré les convergences de fond lors d’une conférence à la librairie Paulines, le 30 mars dernier.
par
Gérard Laverdure
sdf.info
Philosophe et
théologien, poète et
professeur, Jean Proulx
a été secrétaire général
du Conseil supérieur de
l’éducation du Québec. Il
collabore actuellement à
diverses revues, donne
des conférences et des
cours de philosophie à la
Formation continue de
l’Université Laval.
Quelques livres
de l’auteur
Jean Proulx, La
chorégraphie divine,
essai sur le cosmos,
Édition du Septentrion,
2008.
Jean Proulx et Jacques
Languirand, Le Dieu
cosmique, à la
recherche du Dieu
d’Einstein, Éditions Le
Jour, 2008 et L’héritage
spirituel amérindien,
Éditions Le Jour, 2009.
Jean Proulx, Artisans de
la beauté du monde,
Édition du Septentrion,
2002.
Sortira à l’automne 2011
son prochain livre sur La
quête de sens,
précisément avec l’aide
de la physique et des
sciences de la vie, de la
philosophie et de la
pensée spirituelle
1. Énergie = masse de
l’objet multiplié par la
vitesse de la lumière au
carré. Ce qui donne
l’énergie des bombes
atomiques et des
centrales nucléaires.
Nous sommes à l’âge d’or de l’astronomie et des découvertes scientifiques. Le XXe siècle, en
particulier, a complètement chamboulé notre vision et notre compréhension de l’univers. Nous
sommes passés d’un univers plat et statique, avec ses quelques luminaires (étoiles et planètes)
accrochés au plafond, à la Terre qui tourne autour du Soleil, une étoile moyenne dans un océan
d’étoiles, tournant dans une galaxie, la Voie lactée, qui se déplace elle-même dans un amas local
de galaxies (Hubble, 1920), membre d’un superamas de galaxies dit de la Vierge (2000 galaxies)
rattaché à des filaments sans fin de milliards de galaxies... Tout ce beau monde est relié par la force
de la gravité, et orienté depuis le départ – le big bang il y a près de 14 milliards d’années – par des
lois intelligibles en langage mathématique, dans une continuelle expansion et complexification
(Teilhard de Chardin) jusqu’à la conscience humaine. Et nous ne voyons qu’un petit pourcentage
de la matière de notre univers... Nous avons relevé la genèse de notre planète et constaté
l’incroyable force et ingéniosité de la vie. Ainsi, nous ne sommes pas « des étrangers dans »
l’univers, mais nous en sommes parties prenantes. « Nous sommes faits de poussières d’étoiles »
selon la belle expression de l’astrophysicien Hubert Reeves. Vous avez droit à une pause.
La science croyait tout prévoir des phénomènes naturels et tout découvrir des mystères de l’univers.
Or plus elle creuse dans l’infiniment petit et scrute l’infiniment grand, plus les questions difficiles
surgissent et le mystère s’épaissit. Comme le dit si bien Jean Proulx à propos de l’univers : « Avec
Einstein et sa théorie de la relativité (1905), on réalise que tout est en mouvement et interrelié, donc
que les observations sont "relatives" du point de vue de l’observateur et l’univers est désormais
conçu comme un océan d’énergie qui se retrouve sous diverses formes, d’où la formule E = mc2 1.
S’il y a "attraction des corps célestes", c’est que l’espace-temps est "courbé" par la présence d’une
masse comme une planète ou une étoile. Notre propre univers est une courbure... Avec la mécanique
quantique (Planck, de Broglie, Heisenberg, Bohr et Schrödinger, au début du XXe siècle), on réalise
que les informations se transmettent par paquets d’énergie (quantas comme les photons, à la fois
onde et particule) et que l’univers est un tout indivisible. Que le vide n’est pas vide... mais débordant
d’énergie potentielle. » C’est ainsi que nous recevons dans nos télescopes et autres observatoires
spatiaux plein d’informations compréhensibles sur les étoiles et les galaxies lointaines, car dans cet
univers, on observe ordre, intelligence et cohérence. Si les paramètres de départ avaient été différents
ne serait-ce que d’un iota, il n’y aurait rien. Étonnement des scientifiques. Deux d’entre eux, les
frères Bogdanov, physicien et mathématicien, ont intitulé leur dernier ouvrage scientifique sur les
origines de l’univers, Le visage de Dieu... Encore une petite pause?
« Arrivés au sommet de la montagne de la connaissance, les scientifiques découvrent des "campeurs"
déjà rendus depuis longtemps et qui tiennent un langage semblable au leur. Ce sont les penseurs
spirituels ou mystiques de l’Occident et de l’Orient et leur expérience de l’Être divin et cosmique, ainsi
que les grands métaphysiciens et leur intuition de l’Être divin et cosmique », dira M. Proulx. De
l’expérience spirituelle occidentale, chrétienne, on entend depuis plusieurs siècles que Dieu est
Amour-créateur, « pouvoir créateur de l’Être », qu’il y a un logos (Parole), un principe d’ordre et de
raison dans l’univers selon la métaphysique classique et que l’Un est dans le tout et constitue l’unité
du cosmos. L’univers est en devenir et nous sommes tous interreliés. L’expérience spirituelle orientale,
quant à elle, avec une vision plus féminine, nous parle de « vide créateur » qui est source/matrice, qui
contient toutes les formes de l’univers, de conscience cosmique, Brahmâ (hindouisme), d’un principe
d’harmonie des contraires (taoïsme), d’une sagesse cosmique qui s’exprime dans la loi du karma
(bouddhisme). Nous sommes tous reliés les uns aux autres et à l’univers entier. On n’est jamais seuls.
« Nous sommes dans une ère de convergence et de réconciliation possibles entre science,
métaphysique et pensée mystique », conclut le conférencier. Une « conscience » de l’unité, de la
beauté et de l’intelligence de toutes choses émerge à la grandeur de la planète. Quelque chose de
nouveau ou Quelqu’un se manifeste de plus en plus...
sdf.info • 13 avril 2011 • 7
Fêtons 5 ans
Des lieux nouveaux pour se préparer à Pâques
Nous vous invitons à réfléchir sur les effets du mystère de Pâques dans la vie concrète du quotidien par le moyen de notre
nouveau blogue.
par
Michel-M. Campbell
président de
Sentiers de foi
Dans le rythme fou de nos vies modernes, dans l’isolement de nos parcours de foi, nous avons du
mal à nous préparer à vivre Pâques, le mystère central de la foi en Jésus le Christ. Fini le temps du
carême prêt-à-porter, l’impatience devant des liturgies non acculturées où l’on reste passif.
La Toile vous permet d’accéder, de là où vous êtes et au moment où vous le voulez, à des initiatives
nouvelles : Google donne 670 réponses à la recherche de « Carême » en ligne.
Pour sa part, l’équipe du journal Web Sentiersdefoi.info vous invite de nouveau à joindre son
nouveau blogue. Vous y trouverez déjà de brèves réponses aux deux questions que nous vous
avons lancées dans le dernier numéro et auxquelles nous vous invitons toujours à réagir. Nous vous
proposons de répondre, de façon brève, à l’une ou l’autre des questions suivantes :
• À la lumière de votre foi en Jésus Christ, reconnaissez-vous des
passages de la mort à la résurrection autour de vous? Lesquels?
• Quels sont les effets concrets de votre foi en la mort et en la
résurrection de Jésus Christ dans votre vie?
Visitez notre nouveau
blogue à
http://sentiersdefoi.
wordpress.com
et faites-nous part de
vos réponses ou de vos
commentaires.
Faites-nous part de vos commentaires soit en allant directement sur notre nouveau blogue à
l’adresse suivante :
http://sentiersdefoi.wordpress.com
ou en nous faisant parvenir votre réflexion par notre courriel habituel : [email protected], et
ce, d’ici le 27 avril prochain. N’hésitez pas à consulter le blogue régulièrement pour voir les
commentaires des autres participants et participantes et y réagir, si vous le souhaitez.
Notez que le numéro du journal du 4 mai prochain présentera un retour sur cette expérience
d’interaction entre Sentierdefoi.info et ses lecteurs et lectrices. Merci de votre participation.
Que ces jours qui rappellent les derniers gestes, la passion, la mort du Seigneur, nous éclairent et
nous confortent dans le mystère de chacune de nos vies!
Amen! Alléluia!
sdf.info • 13 avril 2011 • 8
Ressources
Pour aller plus loin ou pour satisfaire votre curiosité
[ Lire ]
Suivre Jésus aujourd’hui, une
spiritualité de la liberté radicale
d’Albert Nolan
« Eh bien! Je propose que nous
apprenions à prendre Jésus au
sérieux, et j’estime que c’est très
précisément à notre époque que nous
devons le faire. » (4e de couverture)
« Nous sommes le produit d’un
processus d’une créativité spectaculaire de développement de la matière
et de l’esprit. Nous ne faisons qu’un
avec les étoiles et tout le reste. »
(p. 219)
Pour situer la « spiritualité » de Jésus
et y entrer, pour se situer en harmonie
avec les nouvelles conceptions de
l’univers.
Novalis /Cerf, 2009
[ Participer ]
Jour de la terre
22 avril 2011
À l’occasion du jour de la Terre,
pourquoi ne pas en profiter pour
sensibiliser nos communautés aux
enjeux environnementaux et à la
question importante de la protection
de la Création. Pour ce faire, nous
vous invitons à visiter ou à revisiter
deux sites Internet qui pourront vous
donner de nombreuses pistes de
réflexion et d’action en ce qui a trait à
ces questions. À cette occasion,
célébrons la Terre et engageons-nous
à en protéger les beautés.
http://egliseverte-greenchurch.ca
www.gardienscreation.org
[ Participer ]
Réseau Femmes et Ministères
Un rassemblement à Québec
Le réseau Femmes et Ministères vous
invite à un rassemblement qui se
tiendra à Québec le 29 octobre 2011,
de 14 à 17 heures.
Nous voulons :
1. souligner le 40e anniversaire de
l’intervention de l’épiscopat canadien
qui, par la voix du cardinal George B.
Flahiff, recommanda au synode de
1971 qu’une commission étudie en
profondeur « la question des ministères féminins dans l’Église »;
2. faire mémoire de l’audace et du
courage des femmes qui sont à
l’origine de cette intervention;
3. célébrer l’engagement des femmes
en Église et leur ténacité à faire
avancer la question des ministères.
À inscrire dès maintenant à votre
agenda. Des précisions suivront.
www.femmes-ministeres.org
[ Participer ]
Exposition
Du 10 au 14 avril 2011
[ Lire ]
L’ordination des chrétiennes
dans l’Église catholique, une
question en mouvement au
XXIe siècle
de Pauline Jacob
On peut lire l’article « L’ordination
des chrétiennes dans l’Église catholique, une question en mouvement au
XXIe siècle » de Pauline Jacob sur le
site de Femmes et Ministères.
« La question de l’ouverture des
ministères ordonnés aux femmes a,
dans l’espace public, une visibilité
que nous ne pouvons ignorer. Elle se
pose à la fois dans la marge et en
bordure de la marge de l’institution
ecclésiale catholique. » Pauline Jacob
fait ressortir l’ensemble des actions en
faveur de l’ordination des femmes au
XXIe siècle. Ses références constituent
une mine de renseignement.
Voir aussi dans Sentiersdefoi.info les
articles « Ces lampes qu’on maintient
sous la table » (vol. 5 no 10);
« Femmes et Ministères, lieu de
solidarité et de parole », (vol. 6 no 9)
et « Annine Parent, une femme libre
et tenace » (vol. 3 no 2).
www.femmes-ministeres.org
Exposition d’œuvres d’art réalisées
par des victimes d’actes criminels, à la
galerie Off-Interarts, 5145, boul.
Saint-Laurent, à Montréal. Organisée
par le Centre de services de justice.
www.csjr.org
Pour nous signaler
des ressources pertinentes
ou nous faire vos commentaires,
écrivez à :
[email protected]
Prochaine parution du journal : 4 mai 2011
Le journal Sentiersdefoi.info est une publication de Sentiers de foi, OSBL autonome et indépendant d’inspiration chrétienne fondé en 1984,
qui a pour mission d’être un espace favorisant la connaissance, la reconnaissance et la collaboration des sentiers de foi au Québec,
dans une perspective chrétienne inscrite dans le pluralisme actuel.
ISSN 1715-8370 | 8 2011 Sentiers de foi | Tous droits réservés
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5
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Vol. 6 no 12 / 4 mai 2011
Comité éditorial
Rédacteur en chef
Gérard Laverdure
Secrétaire de rédaction
Ghislain Bédard
Représentant du C.A.
Michel-M. Campbell
Collaboration
Denis Fortin
Daniel Laliberté
8 Lucie Brousseau, 2011 : Renouveau
Journal Web
bimensuel
indépendant
qui vise à faire
connaître
des parcours
et des lieux
où se vivent
des expériences
humaines
et spirituelles
novatrices.
Itinéraire
... de la charité à la solidarité. Dans l'esprit même des Oblats, le Centre VictorLelièvre de Québec se réinvente pour être encore plus près des enjeux de notre
époque et des préoccupations des citoyens et citoyennes de son milieu. [ p. 2 ]
par Denis Fortin
Perspectives
Conception graphique
Ghislain Bédard
Intériorité
L’arbre de vie
Quand on franchit l’entrée du Centre Victor-Lelièvre, on remarque rapidement
ce tableau de l’artiste haïtien Jacques Chéry. Comme un symbole de la vision
qui s’y déploie... [ p. 5 ]
Pour nous joindre
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« À vin nouveau, outres neuves »
Quand quête de sens et quête de justice sociale se rencontrent, se nourrissent
mutuellement et s’ouvrent aux solidarités avec notre monde, il en ressort du
vin nouveau et des sentiers fertiles. [ p. 3 ]
par Daniel Laliberté
Photographie
Lucie Brousseau
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97, rue de l’Aqueduc
Repentigny (Qc) J6A 4E2.
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sera émis.
De la miséricorde à la compassion...
Présenté par le Centre Victor-Lelièvre
Actualités
Crise à Développement et Paix
Développement et Paix fait l’objet de dénonciations par des groupes provie parce
qu’il finance des partenaires qui ont dans leur programme une approche prochoix
sur la santé des femmes. Les réactions d’appui à DP n’ont pas tardé. [ p. 6 ]
par Gérard Laverdure
Ressources
Pour aller plus loin ou pour satisfaire votre curiosité
Des activités diverses et des ressources pertinentes. [ p. 7 ]
sdf.info • 4 mai 2011 • 2
Itinéraire
De la miséricorde à la compassion...
... de la charité à la solidarité. Dans l'esprit même des Oblats, le Centre Victor-Lelièvre de Québec se réinvente pour être
encore plus près des enjeux de notre époque et des préoccupations des citoyens et citoyennes de son milieu.
par
Denis Fortin
collaboration spéciale
Depuis 1925, la Maison Jésus-Ouvrier est connue de la population de l’agglomération de Québec
comme un lieu de célébration et d’approfondissement de la foi. Au fil des décennies et sous
différentes formes, plusieurs générations s’y sont retrouvées pour vivre des retraites et participer à
des groupes de cheminement, de croissance et de formation. À l’origine de cette institution, un
oblat flamboyant, vicaire de Saint-Sauveur, engagé corps et âme avec le style de l’époque dans la
mission en milieu ouvrier de la basse-ville, le père Victor Lelièvre, dont le nom est dorénavant
associé au boulevard qui borde le terrain paysagé et l’édifice du quartier Vanier.
Denis Fortin est pasteur
de l'Église Unie du
Canada, suppléant à la
charge pastorale SaintPierre et Pinguet de
Québec et SaintDamase-des-Aulnaies
[www.egliseunie.org],
membre de l'Action des
chrétiens pour l'abolition
de la torture
[www.acatcanada.org]
et membre du C.A. de
Sentiers de foi.
Après plus de 80 ans de rayonnement, à la suite d’un processus d’évaluation et de discernement,
la communauté des Oblats souhaite relancer l’œuvre en actualisant son intuition initiale pour
l’accorder à la réalité sociale contemporaine. Fort des racines historiques d’une foi accueillante (la
miséricorde) et d’un travail bienveillant (la charité) dans le terreau du milieu populaire, le nouveau
Centre Victor-Lelièvre (CVL) amorce, à l’automne 2008, une véritable refondation afin de
« soutenir l’espérance des femmes, des hommes, des jeunes de notre temps, croyants et noncroyants, à travers leur quête de sens, de justice, de communion et de libération ».
C’est à Lorraine Gaudreau qu’on demande de diriger cette démarche de transformation. Impliquée
depuis des années dans l’organisation communautaire au sein de regroupements des droits sociaux
et du mouvement populaire, elle constate dans son parcours « avoir contribué au fil des ans à
construire des ponts concrets entre ces groupes d’intervention sociale et les alliés chrétiens engagés
dans une analyse critique et préoccupés de justice sociale ». En compagnie des différents
intervenants (animation, gestion, location, hébergement), le cheminement personnel de la directrice
traduit la visée même du CVL : une foi transformatrice et une passion pour l’engagement concret.
Ainsi décrit-elle la démarche entreprise : « La maison a connu plusieurs périodes avec des
approches variées quant à l’animation. L’enjeu actuel de cette relance, c’est l’intégration de
toutes les tendances qu’on y retrouve. Le Jésus qu’on rencontre dans l’adoration est le même qui
conteste ouvertement les structures d’oppression et prend le parti des faibles et des exclus.
418 683-2371 L’apostolat laïque porte l’exigence de comprendre les causes des injustices et des inégalités autant
[email protected]
que d’en contrer les effets. Être fidèles à l’intuition du père Lelièvre aujourd’hui, c’est tenir tout
www.centrevictorlelievre.org autant à la formation de la foi qu’à l’accompagnement des valeurs des gens là où ils se trouvent,
comme lui-même l’a fait à son époque. Quête de sens, de spiritualité et de Dieu, quête de justice,
quête de communion, quête de libération intérieure et collective, cela forme un tout. »
Centre Victor-Lelièvre
475, boul. Père-Lelièvre
Québec (QC)
G1M 1M9
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C’est d’ailleurs cette conviction qui a conduit le CVL à lancer une enquête en profondeur dans le
milieu. Grâce au soutien financier de la Fondation Béati, la « Table ronde itinérante sur la quête de
sens, de justice sociale et de fraternité » a démarré en septembre 2010 sous la coordination de
Jonathan Lacasse, agent d’animation et de développement au CVL. Cette table vise trois objectifs :
1. rencontrer les gens dans les groupes (communautaires, ecclésiaux, scolaires et même des centres
commerciaux) pour un temps d’arrêt et d’écoute sur la manière dont ils articulent leurs quêtes de
sens, de justice sociale et de fraternité; 2. relever des idées intéressantes d’intervention susceptibles
de déboucher sur des pistes ou des projets d’action liés à la mission du centre; 3. renforcer les liens
avec les différents groupes du milieu. Un des impacts de cette démarche est de faire connaître dans
le milieu la nouvelle orientation du CVL. Pour parvenir à recueillir les données nécessaires, le
CVL, avec l’implication d’un comité-conseil, a développé un questionnaire qui sert d’outil
d’animation lors des tables rondes itinérantes. Ces tables rondes circulent dans le milieu et
permettent aux organismes de vivre un temps d’arrêt.
« À l’étape actuelle, affirme Jonathan Lacasse, un premier constat ressort de façon quasi
unanime : seul, on ne peut pas changer les choses. Le fil conducteur, c’est qu’ensemble, avec le
monde, on peut quelque chose. Il émerge une "espérance présente" qui ne s’exprime pas en termes
Lire la suite, page 3
sdf.info • 4 mai 2011 • 3
Itinéraire (suite)
religieux mais qui rejoint les valeurs évangéliques, donc l’engagement social. Le deuxième
constat, c’est que la quête de sens et l’engagement pour la justice sociale sont liés et se nourrissent
« Le Jésus qu’on mutuellement. Ces valeurs sont difficiles à vivre et il faut demeurer alerte, en mouvement, et cela
rencontre dans ne peut se faire seul. » La première année de la Table ronde se conclura par un rassemblement festif
l’adoration est le même
de ceux et celles qui y ont participé à l’automne 2011.
qui conteste
ouvertement les
structures d’oppression
et prend le parti des
faibles et des exclus. »
Lorraine Gaudreau
Dans cette démarche de refondation, le CVL utilise avec créativité les outils contemporains de
communication (site Web, diffusion culturelle par les nouveaux médias, etc.) et mise autant sur la
continuité avec les groupes qui le fréquentent déjà que sur son potentiel de service pour d’autres
qui apprennent à le connaître. Il y a un siècle, un oblat passionné allait parmi le monde pour
partager la miséricorde de Dieu et promouvoir une charité active en milieu ouvrier. Les moyens
diffèrent, les mots changent, mais la vision demeure. C’est ainsi que l’exprime l’équipe du CVL :
« Nous nous réjouissons que des hommes et des femmes engagés de multiples manières – souvent
hors des sentiers battus et au-delà de toute frontière – fassent advenir un monde de justice et de
paix au cœur du quotidien. Nous avons la conviction que, dans ces gestes fraternels et les luttes
pour la dignité de tout être humain, le Royaume de Dieu est déjà en marche. En Église désinstallée, "servante et pauvre", nous entendons l’appel de l’Évangile à l’audace, à la compassion,
au don de soi par amour. »
Perspectives
« À vin nouveau, outres neuves »
Quand quête de sens et quête de justice sociale se rencontrent, se nourrissent mutuellement et s'ouvrent aux solidarités
avec notre monde, il en ressort du vin nouveau et des sentiers fertiles.
par
Daniel Laliberté
collaboration spéciale
L’itinéraire a l’habitude de nous proposer l’expérience d’un chemin de foi emprunté par des
groupes qui se situent eux-mêmes d’emblée hors du cadastre institutionnel habituel. Cette foisci, l’organisme présenté ne peut pas être plus mainstream : le Centre Victor-Lelièvre porte depuis
peu le nom même de son fondateur, un oblat, membre d’une communauté religieuse comme
l’Église en a connu plusieurs. Ce n’est donc pas l’identité de l’organisme présenté qui, par ellemême, justifie de retenir l’attention d’un itinéraire de notre journal.
Daniel Laliberté détient
un doctorat en initiation
chrétienne obtenu
conjointement de
l'Université Laval et de
l'Institut catholique de
Paris. Agent de
pastorale, il est
actuellement
responsable de la
formation chrétienne
pour l'Église catholique
de Québec.
Je pense cependant que ce dont il est question ici est un reflet fort significatif du fait que, dans
l’ébullition actuelle de l’institution ecclésiale, nul besoin de se situer à la marge pour prétendre
paraître dans ces pages. La reconfiguration des orientations du CVL démontre à quel point au sein
même d’institutions qu’on peut avoir tendance à associer au « courant principal » de la vie de
l’Église, il y a un souci, un désir, un appel à ouvrir les yeux et à tendre l’oreille pour proposer des
espaces d’accueil et de dialogue à tout venant qui manifeste une quête, une soif, quelle qu’elle soit.
Bref, avant même de considérer la spécificité du sentier que commence à emprunter le CVL, je
trouvais intéressant de faire ressortir ce que je vois en plusieurs lieux de l’Église actuelle, à savoir
cette prise de conscience qu’elle ne vit pas pour elle-même, mais bien en relation avec les hommes
et les femmes d’aujourd’hui, qu’elle n’a de raison d’être que par le dialogue et la proposition
évangélique adressée à ces frères et sœurs, une prise de conscience qui pousse à entrer en
recherche de modes nouveaux d’être au monde. Sachons reconnaître que l’autoroute ecclésiale est
de moins en moins fréquentée et que ce sont les chemins de traverse qui sont maintenant davantage
foulés par ceux et celles qui entendent l’interpellation du Christ. Moi qui porte une responsabilité
diocésaine pour la catéchèse, je suis très fréquemment témoin, dans les réseaux que je suis appelé
à fréquenter, de ce désir de faire Église autrement. Certes, la « machine » est lourde, cet
Lire la suite, page 4
Perspectives (suite)
sdf.info • 4 mai 2011 • 4
« autrement » peine à naître, mais il est clair qu’il sourd déjà en maints endroits où les préjugés
nous empêchent parfois d’admettre qu’il « peut naître là quelque chose de bon ».
Cela dit, après nous être réjouis qu’une façon nouvelle d’être présence d’Église puisse voir le jour
en un lieu qu’on qualifierait spontanément d’institutionnel, prenons le temps de considérer ce qui
commence à poindre au CVL. À cet égard, il me semble que deux dimensions ressortent. D’abord,
celle qui s’est exprimée dans les mots suivants : « intégration de toutes les tendances » qui ont
marqué l’histoire et l’évolution du Centre. Comment ne pas être d’accord avec Lorraine Gaudreau
quand elle dit que « le Jésus qu’on rencontre dans l’adoration est le même qui conteste ouvertement
les structures d’oppression et prend le parti des faibles et des exclus » ou encore que « quête de
sens, de spiritualité et de Dieu, quête de justice, quête de communion, quête de libération intérieure
et collective, cela forme un tout ». Ce désir de tenir ensemble les grands mouvements qui ont animé
la vie de Jésus-Ouvrier – cet ancien nom est en lui-même éloquent – n’est pas sans présenter un défi
important, mais loin d’être insurmontable. Et à bien y penser, alors même que nos débats
sociopolitiques actuels créent d’importantes polarisations idéologiques caractérisées par les
catégories de gauche et de droite, ce désir de tenir ensemble des tendances variées, mais toutes
rattachées au Christ et à l’Évangile, me semble être porteur d’une intuition en quelque sorte
prophétique. Quiconque connaît les lieux n’aura pas de peine à imaginer qu’une personne s’y
rendant pour une activité de justice sociale entende murmurer dans la chapelle une assemblée
priante qui l’intriguera peut-être. Puis, une heure plus tard, au sortir de la chapelle, un couple réalise
qu’il a partagé les lieux avec un groupe d’action sociale qui, à son tour, l’interpelle sur l’importance
de donner des mains à son élan spirituel intérieur. Ce n’est bien sûr qu’un exemple bien modeste,
mais qui illustre l’avantage que présente ce Centre qui n’est porteur d’aucune étiquette trop campée
qui risquerait de tenir à distance les tenants et tenantes d’une forme ou l’autre d’implication au nom
de la foi. On ne peut qu’encourager ce désir d’« intégration de toutes les tendances ».
L’autre point d’attention, me semble-t-il, est précisément celui qui a suscité l’expression donnée
en titre : « À vin nouveau, outres neuves ». Car l’intégration de toutes les tendances pourrait bien,
si on n’y prenait garde, être quand même un enfermement dans « du vieux ». Or il est clair que ce
n’est pas la volonté des responsables du CVL, qui s’exprime dans cette décision de changer de
nom. Comme on le mentionne, le point de rencontre des tendances diverses, c’est la « quête ». On
est ici en pleine résonance avec le monde contemporain. Ce qui transpire clairement de la mise sur
pied de la Table ronde, c’est une grande attention au monde, à ses attentes, à ses soifs. Ces soifs
ne sont peut-être pas toujours marquées au coin de la foi au Christ, mais elles constituent en ellesmêmes des sentiers où un germe de cette foi pourra, peut-être mais pas forcément, émerger. En tout
cas, il est beau de voir Lorraine et Jonathan, soutenus par la communauté des Oblats, faire le pari
d’un ajustement des offres émanant du CVL de façon à être toujours davantage ce lieu où « quête
de sens et engagement pour la justice se nourrissent mutuellement », fidèle en cela à l’esprit de
son fondateur. Ce qui m’apparaît particulièrement inspirant ici, c’est ce regard bienveillant sur le
monde, ce regard qui, tout en demeurant lucide sur les enjeux socio-éthiques, accueille ce monde
et ceux et celles qui y vivent avec toute l’épaisseur d’une humanité où se côtoient les crucifixions
et les signes de résurrection.
Comme quoi il est possible d’être à la fois fidèle à une vieille intuition tout en travaillant avec
conviction à rendre pertinente cette intuition... Car quand on dit « À vin nouveau, outres neuves »,
il ne faudrait pas penser que c’est l’Évangile qui est le vin vieilli qu’il faut remplacer. Le vin
nouveau, c’est la sensibilité à ce monde qui a profondément muté et qui invite, qui oblige même à
ouvrir des chemins neufs. Quant à l’Évangile lui-même, j’emprunte pour en parler une expression
déjà entendue à quelques reprises dans la bouche du nouvel archevêque de Québec, cette
expression qui dit bien son éternelle jeunesse, son éternelle pertinence : la « fraîcheur » de
l’Évangile. Assurément, c’est ce vent de fraîcheur qui souffle sur le Centre Victor-Lelièvre.
Intériorité
sdf.info • 4 mai 2011 • 5
L’arbre
de vie
Quand on franchit
l’entrée du Centre
Victor-Lelièvre, on
remarque rapidement
ce tableau. Comme un
symbole de la vision
qui s’y déploie...
L’artiste peintre Jacques
Chéry est un chrétien
d’Haïti qui a vécu en exil
sous le régime Duvalier.
Par son art de style
« primitif », il cherche à
éclairer le monde
d’aujourd’hui à la lumière CE TABLEAU ILLUSTRE L’ALLIANCE
de la Parole de Dieu avec son peuple. À
du Dieu vivant. la manière des vitraux de
cathédrales du Moyen Âge
ou de basiliques modernes, il retrace l’histoire du salut de
l’humanité en une vibrante catéchèse. Voyez :
1. En haut au centre : la création d’Adam et Ève, des animaux, des
arbres aux fruits succulents; et l’homme qui bêche la terre selon son
appel à « cultiver le jardin » (Gn 2, 15).
2. En haut à gauche : les Dix commandements donnés à Moïse
(Ex 20) et repris de nos jours (1948) dans la Déclaration universelle
des droits de l’Homme – ou Doa l’om en créole, pour marquer que
la dignité humaine doit s’étendre à toutes les nations, même les
plus appauvries.
3. Au centre à gauche : alors que l’humain détruit la terre en la
surexploitant, Jésus au désert résiste aux tentations de richesse et de
puissance (symbolisées par la maison et l’auto) pour rétablir la paix
avec tous les êtres vivants.
4-5-6. Au bas : ces trois scènes décrivent des situations où les droits
humains sont bafoués : droit à une patrie, alors que les habitants
doivent s’enfuir par bateaux sur une mer déchaînée; droit à vivre
en paix, alors que les victimes (et parmi elles Jésus lui-même,
toujours en robe rouge) s’écroulent sous les coups des soldats et
sous les obus des tanks et des avions; droit à la dignité et à la
solidarité, plutôt que ce piétinement des uns par les autres pour
gravir l’échelle sociale.
Remarquez que dans chacune des scènes de ténèbres, l’artiste a
inséré une lumière d’espoir : dans la barque où les gens s’affolent,
un passager demeure serein, comme Jésus sur la mer de Galilée
(Mt 8, 24); au milieu des massacres, une personne portant
l’emblème de la Croix Rouge soigne un blessé; et au bas de la
pyramide de compétition farouche, une main est tendue pour sortir
des flots celui qui risque de s’y noyer. Au creux de nos désespoirs
luit toujours la petite flamme de l’espérance...
7. Au centre à droite : Jésus dans le Temple libère les colombes et
les chèvres et renverse les tables des échangeurs de monnaies
(Mc 11, 15). En bousculant l’ordre établi par une religion devenue
emprisonnante et mercantile, Jésus annonce qu’il est le véritable
Temple de Dieu, lieu de vie et de liberté.
8. En haut à droite : la grande table du festin de l’humanité est
mise, où s’assoient des gens de toutes races et où les mets
abondants sont servis par des enfants, des petits, « les premiers dans
le Royaume ».
9. Au centre de tout : le Christ en croix, élevé comme le serpent
d’airain dans le désert (Jn 3, 14). Il pend sur un arbre vivant. Un
arbre dont les racines plongent jusque dans la noirceur des flots et
dont les feuilles atteignent le ciel. Ses fruits colorés et ses jeunes
pousses symbolisent la promesse de « vie en abondance »
(Jn 10, 10).
En signe de l’éternel oui du Dieu créateur à toute sa création, un
arc-en-ciel, « signe de l’Alliance » (Gn 10,13), entoure le tableau.
Comme devant une icône, osons faire silence et entrer en dialogue
avec l’Amour qui se livre à notre regard et à notre cœur.
sdf.info • 4 mai 2011 • 6
Actualités
Crise à Développement et Paix
Développement et Paix fait l’objet de dénonciations par des groupes provie parce qu’il finance des partenaires qui ont
dans leur programme une approche prochoix sur la santé des femmes. Les réactions d’appui à DP n’ont pas tardé.
par
Gérard Laverdure
sdf.info
Développement et Paix est l’organisme officiel de solidarité internationale de l’Église catholique
au Canada fondé en 1967. Sa mission : « Soutenir des partenaires dans le Sud qui mettent de
l’avant des alternatives aux structures sociales, politiques et économiques injustes. Dans la lutte
pour la dignité humaine, l’organisme s’allie (partenariat) aux groupes de changement social du
Nord et du Sud. Il appuie les femmes dans leur recherche de justice sociale et économique. Les
objectifs de Développement et Paix, inspirés des valeurs de l'Évangile et en particulier de l'option
préférentielle pour les pauvres, consistent à appuyer les actions des peuples du Sud pour qu’ils
puissent prendre leur destin en mains et à sensibiliser les Canadiens et Canadiennes sur les
questions liées au déséquilibre Nord-Sud. » (site Internet) Il s’agit d’aller aux causes structurelles
des injustices sociales (structures de péché, selon Jean-Paul II) plutôt que d’éponger indéfiniment
les conséquences désastreuses des exclusions économiques et sociales. L’organisme est réputé
pour son intégrité et son expertise, et est soutenu par une base militante de 13 000 membres.
Provie contre prochoix
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Les dénonciations ont débuté avec la Marche mondiale des femmes en 2000, marche que
Développement et Paix et de nombreuses communautés religieuses féminines appuyaient. Dans ce
rassemblement mondial, il y avait des groupes avec option prochoix (étiquetés proavortement par
les dénonciateurs) concernant la santé des femmes. Alimentées par les sites Internet
LifeSiteNews.com (Toronto) et Socon.ca (Ottawa) et reliées à des groupes comme Real Catholic
Women et Real Catholic TV (États-Unis), ces dénonciations se sont poursuivies jusqu’à
aujourd’hui. Ainsi, lors de la dernière campagne Carême de partage (2011), deux évêques (Ottawa
et Alexandria-Cornwall), sous la pression des groupes provie qui se prétendent les seuls « vrais
(real) catholiques », ont exigé que Développement et Paix annule l’invitation faite au jésuite Luis
Arriaga, responsable d’un centre mexicain de défense des droits humains réputé (le PRODH). Le
seul critère étant la non-conformité des programmes de ces groupes aux enseignements stricts de
l’Église catholique dont ceux qui concernent la contraception, l’avortement et l’homosexualité,
comme on l’a affirmé sur le site Socon.ca : « ... 49 groupes qui font la promotion (certains
agressivement) de l’avortement, de la contraception, de l’homosexualité ou sont en général
anticatholiques » (traduction de l’auteur).
Des réactions en chaîne
Les réactions ne se sont pas fait attendre : l’Entraide missionnaire, le Réseau Culture et Foi, le réseau
des Forums André-Naud, l’Association des religieuses pour les droits des femmes (ARDF); puis le
bibliste Claude Lacaille suivi par quatre membres de Développement et Paix Montréal et d’autres
catholiques ont lancé une chaîne de lettres sur Internet adressées aux évêques de chaque diocèse et au
président de la CECC, Mgr Morissette. Des centaines de lettres et de pétitions (86 signatures dans la
seule paroisse Saint-Pierre-Apôtre) ont suivi. L’ARDF, regroupant des déléguées de 46 congrégations
religieuses, a réagi pour dénoncer les coupures de subventions aux groupes de femmes exigées par ces
groupes. Les religieuses affirment que « de telles attaques à l’encontre de la dignité et des droits des
femmes nous provoquent à actualiser pour aujourd’hui cette réponse de Jésus aux pharisiens : "Je
vous le dis : s’ils se taisent, les pierres crieront" (Lc 19, 40) ».
Elles ajoutent : « Des enquêtes menées sur le terrain démontrent que les groupes de femmes affectés
par cette décision prennent soin de leurs sœurs vivant la pauvreté et la violence familiale en plus d’être
très souvent seules à porter la responsabilité de l’éducation de leurs enfants. Nous savons également
que la pratique du viol comme arme de pouvoir des hommes sur les femmes entraînant ainsi la mort
psychologique et spirituelle des victimes, devrait inciter notre Église à des gestes de compassion plutôt
que de jugement, de coupure d’aide et de discrimination. » De nombreux groupes et nombre de
sdf.info • 4 mai 2011 • 7
Actualités (suite)
personnes engagées en Église ont aussi pris position dont quelques-unes sont rapportées sur le site du
Réseau Culture et Foi1.
Qui sont les « vrais catholiques »?
Dans ce débat, un enjeu de fond émerge concernant l’identité chrétienne aujourd’hui. N’y auraitil qu’une seule façon de pratiquer sa foi, soit en étant des copies conformes des enseignements
venant du Vatican – copier-coller et répéter sans réfléchir? Sans tenir compte des contextes
culturels, des consciences et des ouvertures historiques du concile Vatican II élaborées et décrétées
par 2 300 évêques : importance du Peuple de Dieu et de son « sens de la foi », de la liberté de
conscience, de la collégialité, du pluralisme théologique et pastoral, de l’ouverture confiante sur le
monde, de la responsabilisation des baptisés. Sur ces sites Internet, pas un mot de l’Évangile d’un
nommé Jésus et de ses pratiques d’accueil, de compassion, de respect des consciences. « Défendre
la vie ne concerne-t-il pas surtout la défense des conditions de vie et de dignité tout au long de la
vie? C’est ce que fait Développement et Paix depuis ses débuts, en fidélité avec les options et les
pratiques de Jésus dans l’évangile », de nous dire des militants et militantes de cet organisme.
1. Voir d’autres prises
de position sur
www.culture-et-foi.com/
nouvelles/nouvelles.htm
Se faire imposer comme adultes un modèle unique de pratique de foi d’en haut – comme un kit de
peinture par numéros – ou en menaçant de l’enfer n’a rien à voir avec l’esprit de l’Évangile.
« Proposer Jésus Christ aujourd’hui » (priorité du diocèse de Montréal depuis plusieurs années) et
sa liberté est beaucoup plus emballant. Est-ce que nos évêques canadiens ont gardé leur liberté
évangélique? Sont-ils prisonniers d’une ligne de parti, d’une langue de bois et d’une unité de
façade? Où est donc passé le Souffle de Vatican II? Dans le Peuple? Oseront-ils des paroles
courageuses pour défendre ce fleuron de l’Église canadienne qu’est Développement et Paix?
Le journal Web Sentiersdefoi.info passe à l’ère Facebook
Votre webzine a désormais sa page Facebook : Journal
Web Sentiersdefoi.info. Ainsi, si vous vous êtes déjà
inscrits à ce réseau social, vous pourrez profiter de ce nouvel
accès à votre webzine. Il vous suffit d’écrire « Journal Web
Sentiersdefoi.info » dans la barre de recherche au haut de votre page Facebook, de vous
rendre à celle du journal et de cliquer avec enthousiasme sur le bouton « J’aime »! Ainsi, vous
pourrez prendre connaissance sur votre babillard de toutes les informations qui seront
publiées par le webzine Sentiersdefoi.info sur ce fameux Livre des visages.
sdf.info • 4 mai 2011 • 8
Ressources
Pour aller plus loin ou pour satisfaire votre curiosité
[ Participer ]
Une Église sans pasteurs?
Colloque du Réseau Culture et Foi
Le Réseau Culture et Foi vous invite
à son colloque : « Une Église sans
pasteurs? Faut-il réinventer la relation
pasteurs-baptisés? » qui aura lieu le
samedi 7 mai 2011 de 9 h à 15 h 30 à
la paroisse Notre-Dame de Grâce, au
5333, av. Notre-Dame-de-Grâce
(angle Décarie), à Montréal.
Nous vous proposons une journée de
réflexion sur la relation pastorale.
Loin de nous restreindre à une
critique des pasteurs de notre Église,
nous allons tenter de cerner les liens
existant actuellement entre les sujets
de la relation pastorale. Que sont-ils
devenus, quelles mutations sont en
cours, quel avenir? Avec André
Anctil, curé de la paroisse SaintDenis (Montréal); Nycole Pepper,
coordonnatrice de la pastorale à la
paroisse Saint-Eustache; Gérard
Laverdure, laïc impliqué en pastorale
et au journal Sentiersdefoi.info,
membre de Chrétiens, chrétiennes
dans la cité; et André Myre, bibliste.
Des premières communautés chrétiennes, quel témoignage? L’inscription se tient jusqu’au 3 mai (pour fins
de repas) au coût de 30 $. Pour
information ou inscription, joignez
le 514 737-9170 ou le 450 670-9635.
www.culture-et-foi.com
Pour nous signaler
des ressources pertinentes
ou nous faire vos commentaires,
écrivez à :
[email protected]
[ Participer ]
Pourquoi les choses vont-elles
mal dans l’Église?
Regard sur la pensée de John
Henry Newman
Dans le cadre de ses activités
culturelles dans la Chapelle historique sise au 20, rue Dauphine, angle
D’Auteuil et Dauphine, la communauté des Jésuites de Québec vous
invite à cette conférence du père JeanGuy Saint-Arnaud, s.j., qui posera un
regard sur la pensée de John Henry
Newman : « Pourquoi, selon John
Henry Newman, les choses vont-elles
mal dans l’Église? » et qui aura lieu le
dimanche 8 mai 2011 de 15 h à 17 h.
Elle sera suivie d’un Prélude musical
donné par l’organiste titulaire de la
chapelle, le professeur d’orgue du
Conservatoire de Québec Danny
Belisle.
La messe dominicale débutera à 16 h
comme à l’accoutumée et sera
célébrée par le père supérieur Wim
Dombret, s.j., selon la tradition ignatienne. Pour information, joigneznous par téléphone au 418 683-2371
ou par courriel au :
[email protected]
www.centrevictorelelievre.org
Vous aimez lire le journal?
Alors, faites-le connaître à vos
parents, collègues et amis.
Et invitez-les à s’abonner
en allant directement
sur notre site Web. Merci.
[ Lire ]
Vers une écothéologie
Article à lire sur le site du ROJeP
Le Réseau Œcuménique Justice et
Paix regroupe plus de 40 groupes
chrétiens du Québec qui mettent leur
force en commun dans la réflexion et
dans l’action pour faire avancer des
causes de justice, de paix et
d’intégrité de la création.
Vous pouvez lire l’article « Vers une
écothéologie » dans le dossier Les
autochtones et l’exploitation des
ressources naturelles (les mines
surtout) apparaissant sur le site Web
dans la section Événements.
www.justicepaix.org
[ Participer ]
Julien Harvey : homme de foi,
homme du pays
Soirée bénéfice avec Gregory
Baum
Dans le cadre de sa campagne de
financement 2011 et des 70 ans de la
revue Relations, Gregory Baum nous
fera redécouvrir ce grand intellectuel
qu’était Julien Harvey, pilier de
Relations pendant près d’une
trentaine d’années et premier
directeur du Centre justice et foi. Prix
d’entrée : 70 $. (Un reçu pour fins
d’impôt sera remis pour le montant
versé moins 15 $.) Un goûter sera
servi à 17 h 30.
La soirée bénéfice aura lieu le lundi
30 mai 2011 à 17 h 30 à la Maison
Bellarmin, au 25, rue Jarry Ouest,
Montréal (angle boul. Saint-Laurent).
www.cjf.qc.ca
Prochaine parution du journal : 25 mai 2011
Le journal Sentiersdefoi.info est une publication de Sentiers de foi, OSBL autonome et indépendant d’inspiration chrétienne fondé en 1984,
qui a pour mission d’être un espace favorisant la connaissance, la reconnaissance et la collaboration des sentiers de foi au Québec,
dans une perspective chrétienne inscrite dans le pluralisme actuel.
ISSN 1715-8370 | 8 2011 Sentiers de foi | Tous droits réservés
Ce journal, publié uniquement sur le Web, est de ce fait entièrement écologique. Imprimez-le et diffusez-le en pensant à l’environnement.
2005-2010
5
ans de marche
dans les pas du vent
de
foi.info
Sentiers
www.
Vol. 6 no 13 / 25 mai 2011
Comité éditorial
Rédacteur en chef
Gérard Laverdure
Secrétaire de rédaction
Ghislain Bédard
Représentant du C.A.
Michel-M. Campbell
Collaboration
Guy Côté
Jean-Guy Nadeau
8 Lucie Brousseau, 2011 : La face cachée des pas
Journal Web
bimensuel
indépendant
qui vise à faire
connaître
des parcours
et des lieux
où se vivent
des expériences
humaines
et spirituelles
novatrices.
Itinéraire
Pas besoin d’aller en Europe pour vivre un « Compostelle ». Un Québécois
vient d’ouvrir un dixième sentier de marche chez nous le long de la rivière des
Outaouais. La marche comme chemin de rencontre de soi et de l’autre. [ p. 2 ]
par Gérard Laverdure
Perspectives
Conception graphique
Ghislain Bédard
Intériorité
J’ai marché le camino de Saint-Jacques de Compostelle
« J’ai marché le camino sous la pluie constante et intermittente. Sous le vent
violent et la grêle de la montagne. La pluie a façonné mes pensées et arrêté le
temps au présent. Ma marche est devenue une démarche. » [ p. 4 ]
Pour nous joindre
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Pour vous abonner
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Abonnement gratuit.
ISSN 1715-8370
8 2011 Sentiers de foi
Tous droits réservés
Aller voir ailleurs si j’y suis
Quelle idée de marcher pour s’arrêter dans sa vie! Ne marche-t-on pas
suffisamment dans notre quotidien? Quelques propos sur les désirs de marcher
et les paradoxes de la marche. [ p. 3 ]
par Jean-Guy Nadeau
Photographie
Lucie Brousseau
Ce journal Web existe
uniquement grâce
à votre générosité.
Faites parvenir votre don
à Sentiers de foi,
97, rue de l’Aqueduc
Repentigny (Qc) J6A 4E2.
Un reçu de charité
sera émis.
Chemin des Outaouais : un chemin vers l’Autre
Présenté par Rodolphe Latreille
Actualités
Une Église sans pasteurs?
Le don pastoral n’est-il pas confié à tous les baptisés? Comment s’articule ce
nouveau paradigme dans la structure ecclésiale actuelle fortement hiérarchisée
et cléricalisée? Survol du colloque du Réseau Culture et Foi. [ p. 5 ]
par Guy Côté
Ressources
Pour aller plus loin ou pour satisfaire votre curiosité
Des activités diverses et des ressources pertinentes. [ p. 7 ]
sdf.info • 25 mai 2011 • 2
Itinéraire
Chemin des Outaouais : un chemin vers l’Autre
Pas besoin d’aller en Europe pour vivre un « Compostelle ». Un Québécois vient d’ouvrir un dixième sentier de marche chez
nous le long de la rivière des Outaouais. La marche comme chemin de rencontre de soi et de l’autre.
par
Gérard Laverdure
sdf.info
En 2009-2010,
1 251 personnes du
Québec ont fait
officiellement le
pèlerinage de
Compostelle
dont 725 femmes.
Chemin des Outaouais :
www.chemindesoutaouais.ca
Chemin des Sanctuaires :
www.cheminsdes
sanctuaires.org
Compostelle :
www.duquebec
acompostelle.org
Il marche, cet homme-là! En 2002, il a fait le pèlerinage de Compostelle à travers l’Espagne, puis
le chemin des Sanctuaires, appelé aussi le Compostelle québécois, de Montréal à Sainte-Anne-deBeaupré en 2003, c’est-à-dire 375 kilomètres en 18 jours. C’est lors de son pèlerinage à Nevers
(Bernadette Soubirous) que M. Rodolphe Latreille, résidant de l’Outaouais, décide d’ouvrir un
autre sentier de marche au Québec, le « chemin des Outaouais », partant de la cathédrale NotreDame d’Ottawa, en passant le huitième jour par le sanctuaire Notre-Dame-de-Lourdes à Rigaud,
pour finir à l’Oratoire Saint-Joseph à Montréal. Il s’est dit : « On reçoit beaucoup sur le chemin de
Compostelle : accueil, compassion, partage, rencontres, amitié. Alors, je vais permettre à d’autres
qui ne peuvent aller jusqu’en France de vivre cette expérience humaine et spirituelle. » Il passe un
an (2004) à mettre en place l’organisation logistique et les ressources nécessaires pour réaliser ce
projet avec une cinquantaine de bénévoles. L’aventure débute en 2005.
Cette année, il y a près de 150 inscriptions : des gens qui veulent prendre un temps d’arrêt, une petite
pause dans leur vie, se désinstaller, sortir de la routine. Les pèlerins partent pour douze jours, du 25
mai au 18 juin, par groupes de six marcheurs qui ne se connaissent pas, et feront douze haltes sur les
230 km du chemin qui traverse trois fois la rivière des Outaouais. Hébergement dans cinq résidences,
deux communautés religieuses, deux sanctuaires et des salles municipales. Des bénévoles
expérimentés accompagnent les marcheurs et marcheuses dans la première étape de 16 km. Certains
viennent se pratiquer en vue de la grande aventure de Compostelle; d’autres veulent revivre
l’expérience. Plusieurs viennent d’Europe découvrir nos paysages. Deux diplomates retraités sont
venus de New York. On y trouve plus de femmes que d’hommes, environ 60 à 65 %, des gens âgés
au-delà de 55 ans pour la plupart. Dernièrement, des plus jeunes se sont joints à l’aventure.
Qu’est-ce qu’on trouve sur ces chemins? Cela dépend de ce que l’on cherche et où on en est rendu
dans sa vie. La marche change beaucoup du rythme trépidant de la vie active. Les organisateurs ne
donnent pas d’orientations. Chacun et chacune vit son chemin en toute liberté. Mais le chemin
mène nécessairement vers une rencontre avec soi-même et avec les autres, car la marche et les
retrouvailles aux étapes font passer de la solitude (plusieurs vont à leur rythme) ou du
compagnonnage du chemin aux rencontres « familiales » du souper et du déjeuner. « La vie en
petit groupe rapproche », dit M. Latreille. Les marcheurs et marcheuses prennent le temps de se
parler, de s’écouter, de voir ce qu’il y a de bon dans l’autre. C’est aussi l’occasion de se confronter
à ses limites et aux intempéries, mais surtout de communier aux beautés de la nature comme à la
générosité de ceux et celles qui accueillent, et de trouver du sens là où il n’y en avait plus.
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D’ailleurs, les commentaires sont assez impressionnants : « Ça va changer ma vie! »; « Je n’étais
jamais sortie seule ni n’avais jamais couché sans mon mari depuis 40 ans... Ça m’a fait un grand
bien »; « C’est très différent d’un monastère. Seul en marche, on laisse l’esprit travailler à son
rythme »; « Les lieux d’hébergement étaient tous très corrects. Parfois même, c’était le grand luxe,
comme chez les Sœurs de Masson, à Gatineau, et de Plaisance. Chez ces dernières, j’ai appris un
jeu de cartes appelé "La petite école" » (une Française reconnaissante); « Les temps forts pour
nous furent d’être charmés par les paysages, la route et surtout les personnes accueillantes » (un
couple de Québécois); « Que dire de la réception à Thurso, chez Ti-Lou et Suzanne, lauréats du
trophée Centraide : "Le frigo est plein, servez-vous; sinon, tant pis pour vous!" La bière nous
rafraîchit... » (Diane). L’an passé, les organisateurs ont reçu 70 réponses parmi les 120 formulaires
d’évaluation distribués.
« Ce qui m’a le plus impressionné lors de ces pèlerinages, c’est l’autre... la rencontre de l’autre,
confie l’organisateur. J’ai vécu des bouts de chemins sur le pain de l’autre, sur son eau, son amitié.
On crée des liens qui durent et on se retrouve après. On est une grande famille planétaire. » Si je
me rappelle bien, Jésus était un homme qui marchait beaucoup...
sdf.info • 25 mai 2011 • 3
Perspectives
Aller voir ailleurs si j’y suis
Quelle idée de marcher pour s’arrêter dans sa vie! Ne marche-t-on pas suffisamment dans notre quotidien? Quelques
propos sur les désirs de marcher et les paradoxes de la marche.
par
Jean-Guy Nadeau
collaboration spéciale
Marcher! Pas pour moi, sauf en rêve, peut-être en désir. La marche comme désir. Je devrais
marcher pour ma santé. Non pas ma santé spirituelle mais ma santé physique. Bien sûr, les deux
vont de pair. Une âme saine dans un corps sain. Marcher pour aller quelque part? Oui. Pour aller
nulle part? Non. Marcher pour revenir à mon point de départ. Il y a là une gratuité, peut-être une
grâce, un plaisir... prescrit? Un plaisir prescrit, contradiction dans les termes. Et pourtant, ne
revient-on pas toujours à son point de départ? Certains y reviennent transformés, un peu,
beaucoup.
Jean-Guy Nadeau
est professeur retraité
de la Faculté de
théologie et de sciences
des religions
de l’Université de
Montréal.
Et puis, quand j’entends le mot marche, je pense souvent à cette fantastique sculpture de Rodin :
« L’homme qui marche ». Quelle force dans ce buste et ces jambes qui avancent sans bras ni tête!
Un peu plus grand que moi, même sans tête. Force et courage de ce corps crevassé, peut-être
blessé, et néanmoins solide. En marche! Même sans bras ni tête, il a tout d’un homme, d’un
homme debout. Mais cet homme ne me donne pas vraiment le goût de marcher. On n’a aucune idée
où il va. Et puis, il est trop fort, monumental, en fait plus qu’humain. Mais ce marcheur
m’émerveille, et j’ai passé de longues minutes à le contempler... moi qui n’ai rien de contemplatif.
Il y a des gens qui aiment la marche. Des gens qui marchent pour leur bien, des gens qui marchent
pour décrocher, qui marchent pour la grâce, comme certains prient. J’avoue que je préfère marcher
pour accrocher, comme certains prient aussi, accrocher l’attention sur une cause sociale,
manifester un désaccord, s’opposer à l’exploitation des gaz de schiste, réclamer une loi antibâillon.
Il y a des gens qui marchent dans la camaraderie avec une partie du poids du monde sur leurs
épaules. Des gens aussi qui marchent dans la camaraderie avec une partie de la grâce du monde.
Ça aussi, je le fais trop peu. Dans un pays où la petite marche pour aller voter est truquée par les
règles électorales, il faut marcher entre les votes. Ailleurs, plusieurs marchent pour réclamer la
parole; d’autres encore, plus nombreux, marchent pour sauver leur vie.
Il y a, nous dit-on encore, des gens qui marchent pour arrêter. Paradoxe. Des gens qui se donnent
une routine – un pas devant l’autre, puis un autre, puis un autre – pour échapper à la routine, faire
une halte, se trouver. Et ils vont marcher au bout du monde, se trouver ailleurs. Plusieurs jeunes
sont avides de trekking, pas seulement pour se trouver, mais aussi pour se dépasser, communier à
plus grand que soi. D’une part, je les envie de prendre le temps et de trouver tout ça. D’autre part,
je me dis que c’est chez soi qu’on se trouve, là où l’on est, là où l’on vit. Même dans la routine,
un pas quotidien devant l’autre pas quotidien. Il me semble souvent que je suis seul à le croire.
Peut-être parce que je me leurre. Peut-être parce que c’est morne et peu exaltant, la vie
quotidienne. Faut aller ailleurs pour se trouver, répète-t-on sur tous les toits. Et de faire l’éloge de
ceux qui marchent ailleurs... et que j’envie parfois.
Il y en a qui marchent sur le « chemin des Outaouais ». Qui s’y trouvent. Qui y trouvent d’autres.
Sur ce chemin particulièrement attrayant d’humanité, des gens trouvent du temps! Une denrée rare
de nos jours et que bouffent nos centres de divertissement domestiques après le travail, les enfants,
le bénévolat. Il arrive que le temps des uns dépende du bénévolat des autres. Qui accueillent. Qui
écoutent. Qui ouvrent leur table et partagent le pain. Qui rendent grâce. Des amitiés se créent, des
liens se tissent. Ces liens que mon amie Marie (90 ans) a passé sa vie à tisser et à nourrir.
Alors me tenir en bordure de route sur le « chemin des Outaouais », comme je contemple les
fidèles qui s’approchent du crucifix de l’Oratoire Saint-Joseph durant l’Eucharistie et apportent au
Crucifié leurs douleurs, leurs requêtes, leurs enfants, leurs espoirs, leur histoire.
Partout, il y a des gens qui marchent. Parfois, il y a des gens qui les accueillent, qui les écoutent,
qui les relient. Et toujours d’autres qui se mettent en marche. Pour plein de raisons.
sdf.info • 25 mai 2011 • 4
Intériorité
J’ai marché
le camino
de Compostelle
Partir
Partir est avant tout sortir de soi.
Briser la croûte d’égoïsme
qui essaie de nous emprisonner
dans notre propre moi.
Partir, c’est cesser de tourner
autour de soi-même,
comme si on était le centre
du monde et de la vie!
Partir, c’est ne pas se laisser
enfermer dans le cercle
des problèmes du petit monde
auquel nous appartenons,
quelle que soit son importance.
L’humanité est plus grande :
et c’est elle que nous devons servir.
Partir, ce n’est pas
dévorer des kilomètres,
traverser des mers ou
atteindre des vitesses supersoniques.
C’est avant tout s’ouvrir aux autres,
les découvrir, aller à leur rencontre.
C’est s’ouvrir aux idées,
y compris celles
qui sont contraires aux nôtres.
C’est avoir le souffle
d’un bon marcheur.
Dom Elder Camara
Brésil
J’ai marché le camino
(le chemin de Saint-Jacques de Compostelle).
Sous la pluie constante et intermittente.
Sous le vent violent et la grêle de la montagne.
Sous un soleil ardent dans la plaine de blé ou de vignes.
J’ai traversé à moult reprises le village médiéval
et la grande ville avec sa cathédrale.
La pluie a façonné mes pensées
et arrêté le temps au présent.
Ma marche est devenue une démarche.
À force d’user mes chaussures, j’ai usé mes habitudes.
J’ai connu le silence, la solitude, le dépassement, la joie du camino,
en pleine effervescence du renouveau printanier.
J’ai connu la différence, la tolérance et l’humilité,
dans l’ambiance du renoncement.
J’ai connu le merveilleux chemin de la transformation;
je suis allé moins au bout de la route qu’au bout de moi-même.
J’ai connu l’amitié et la bienveillance du camarade-pèlerin,
son respect et le respect du paysan.
J’ai connu les rencontres amicales à l’esprit de fraternité,
entre des marcheurs d’origines et de langues diverses.
J’ai connu le triomphe intérieur du cheminement,
et de son aboutissement à Santiago.
Le camino me manquera. Toujours.
Rodolphe Latreille
Gatineau
sdf.info • 25 mai 2011 • 5
Actualités
Une Église sans pasteurs?
Le don pastoral n’est-il pas finalement confié à tous les baptisés? Comment s’articule ce nouveau paradigme dans
la structure ecclésiale actuelle fortement hiérarchisée et cléricalisée? Survol du colloque du Réseau Culture et Foi.
« Une Église sans pasteurs? Faut-il réinventer la relation pasteurs-baptisés? » C’était la question
soumise au débat par le Réseau Culture et Foi lors de son colloque du 7 mai dernier. Dans son
introduction à la journée, M. Alain Ambeault en présentait ainsi la portée : comment comprendre
la nature fondamentale de la relation pastorale alors que l’absence d’un prêtre permanent est de
plus en plus fréquente et que la relation est brisée entre une large part du peuple croyant et ses
pasteurs traditionnels (prêtres, évêques, pape)? La présence de quelque 80 personnes témoignait
Guy Côté
est un théologien de la pertinence de cette problématique. Comme on pouvait s’y attendre dans le cadre d’une courte
engagé parmi les exclus. journée, on n’a pu que marquer certains repères pour une réflexion à poursuivre.
par
Guy Côté
collaboration spéciale
Les échanges ont été traversés par une tension entre le récit d’expériences créatives et la
déconstruction du paradigme qui continue de les encadrer. La matinée a d’abord permis d’entendre
Mme Nycole Pepper, de Saint-Jérôme, et M. Gérard Laverdure, de Montréal, nous décrire leur
expérience dans un contexte paroissial et diocésain. Les deux nous ont fait part d’une redéfinition
dynamique des rôles et responsabilités entre pasteurs ordonnés et laïcs répondants à l’intérieur de
ce cadre. À Saint-Jérôme, Mme Pepper coordonne un regroupement pastoral de quatre paroisses
avec la collaboration étroite d’un prêtre modérateur qui demeure le ministre de la parole et des
sacrements, comme pasteur répondant à l’évêque. Après plusieurs années dans des contextes non
paroissiaux (Action catholique, communautés de base, etc.), M. Laverdure est engagé à la paroisse
Saint-Pierre Apôtre, à Montréal, qui évolue vers un statut de mission sur une base non territoriale
et où le conseil de pastorale a une responsabilité décisionnelle. Dans ces deux cas, le rôle pastoral
est élargi à des laïcs : accompagnateurs spirituels, éducateurs de la foi, témoins parfois horsnormes... Selon la belle expression de Mme Laurette Lepage citée par M. Alain Ambeault, le don
pastoral n’est-il pas finalement confié à tous les baptisés?
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Au fil de leur récit, Mme Pepper et M. Laverdure ont signalé des limites et des conditions de
réalisation qui révèlent une certaine précarité de leurs expériences. Parmi les limites : la résistance
encore fréquente du clergé à reconnaître une coresponsabilité du pastorat laïque sur le plan spirituel,
un climat de rectitude politique dans l’institution, une volonté persistante de contrôle dans la
hiérarchie cléricale, la recherche de sécurité morale parmi les croyants et les croyantes au lieu d’un
exercice collectif de discernement, la difficulté de trouver et de former les ressources humaines
nécessaires... Et comme conditions d’évolution : la nécessité d’une vision partagée entre les
responsables à tous les niveaux, une passion commune pour le projet pastoral dans une perspective
d’ouverture aux changements nécessaires, la capacité de dépasser les débats internes afin de
préparer les conditions d’une expérience chrétienne et ecclésiale pour les générations montantes...
Poussant l’exercice critique un cran ou deux plus loin, M. André Myre s’est employé à contester
le lien entre l’Église et le projet de Jésus et à démontrer la non-nécessité des formes actuelles
d’organisation ecclésiale. Jésus n’a rien dit sur un groupe destiné à lui succéder, les documents
chrétiens les plus primitifs (source Q) ne parlent pas de la structure ou des fonctions requises dans
un tel groupe, les modalités d’organisation initiales n’ont rien de normatif pour la suite des temps.
Le groupe des disciples a évolué sous l’influence des modèles culturels qu’il avait sous les yeux
et la pression des besoins de chaque époque, en exerçant au mieux son discernement. L’essentiel
était et est toujours de vivre comme Jésus et, ensuite, de s’organiser comme cela semble bon, sans
chercher à s’autoriser d’un « plan » de Jésus ou d’une conformité à un modèle primitif. Tout est
affaire de foi, d’initiative et de discernement.
Au long de la journée, un certain nombre de perceptions et de questions ont affleuré dans les
conversations ou en en atelier :
• La vie précède la structuration et pousse vers les changements nécessaires.
Lire la suite, page 6
Actualités (suite)
sdf.info • 25 mai 2011 • 6
• La période actuelle de transition donne lieu à des expériences qui indiquent des chemins à
explorer, mais ne font qu’amorcer des évolutions beaucoup plus importantes.
• Les changements viendront de la base plutôt que de la tête, sous l’impulsion de l’Esprit répandu
chez tous les baptisés.
• Allons-nous vers « une Église vraiment fraternelle » ou sommes-nous limités à des expériences
exceptionnelles?
• En plus des questions habituelles sur l’ordination sacerdotale de femmes ou d’hommes mariés
se pose celle de la nécessité d’un clergé pour répondre aux besoins pastoraux. Le « don
pastoral » confié aux baptisés de même que leur statut de « prêtres, rois et prophètes » ne
devraient-ils pas permettre de trouver au sein du peuple de Dieu tous les ministères requis? N’y
aurait-il pas lieu d’officialiser une diversité de ministères avec des mandats pastoraux
spécifiques, assumés par des laïcs?
• Faut-il aller dans le sens d’une structuration complexe des services pastoraux – même redéfinis
ou redistribués – ou privilégier la formation de communautés de foi avec un type d’animation
plus souple, laissant toujours place au rôle indispensable de rassembleur?
• Selon l’analyse d’André Myre, l’Église pourrait-elle être appelée à se transformer en une
constellation de réseaux qui constitueraient une mouvance informelle plutôt qu’une institution,
quelque chose comme « le mouvement de Jésus »?
Ce genre de questionnement peut se faire librement dans le cadre d’un colloque, mais devient plus
exigeant lorsqu’on se demande par où commencer et jusqu’où l’on veut aller. Qu’est-ce que le
peuple de Dieu a besoin d’« instituer » pour demeurer fidèle à l’Évangile dans la cohérence et la
durée? Quels chemins concrets devrait emprunter notre responsabilité dans la liberté ? Nous nous
trouvons à une époque charnière où nous pressentons l’ampleur du processus de déconstruction et
de réinvention qui s’annonce sans être encore en mesure d’en dessiner les contours ou d’en prévoir
les aboutissements. Le mot clé de la journée du 7 mai a sans doute été discernement. Pourrons-nous
apprendre à lire ensemble les signes des temps, comme nous y invitait le concile Vatican II?
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pourrez prendre connaissance sur votre babillard de toutes les informations qui seront
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sdf.info • 25 mai 2011 • 7
Ressources
Pour aller plus loin ou pour satisfaire votre curiosité
[ Participer ]
Assises de la spiritualité
à Québec
Une spiritualité avec ou sans
Dieu?
À l’initiative des Pères Assomptionnistes, des Éditions Novalis et
Médiaspaul, de l’Église Unie du
Canada et de la revue La Chair et le
Souffle, les premières Assises de la
spiritualité se tiendront les vendredi
26 et samedi 27 août prochains au
Centre Montmartre de Québec.
Deux temps forts viendront marquer
cette fin de semaine avec des invités de
choix. La conférence d’ouverture du
vendredi soir sera donnée par Lytta
Basset avec pour sujet : « Dieu dans
les quêtes spirituelles de nos contemporains ». Le samedi sera, quant à lui,
organisé autour de la question :
Comment construire aujourd’hui une
spiritualité? La journée se déroulera en
deux temps; en matinée une table
ronde et, en après-midi, un ensemble
d’ateliers consacrés à la pratique
autour d’expériences spirituelles dans
différents domaines comme l’environnement, l’action sociale, la visualisation, la méditation, la fin de vie, la
spiritualité amérindienne, la vie monastique, le judaïsme et le bouddhisme. Ces ateliers seront animés par
les personnes les plus compétentes de
chacun de ces domaines. La conclusion de ces rencontres sera assurée
par Lytta Basset. Nous vous invitons à
vous inscrire pour recevoir le
programme définitif ainsi que le
bulletin de participation par courriel à :
[email protected] ou
au 514 278-3020 (poste 246).
[ Lire ]
Les racines d’un Québec vert
Revue Relations de juin 2011
Parmi les articles pertinents à lire :
« L’urgence d’un changement de
société »; « Habiter le pays »; « La
ville écologique »; « La campagne :
cultiver un milieu de vie »; « Les
énergies de l’avenir »; « Le sort des
communautés
chrétiennes
au
Machrek ». Disponible en kiosque.
www.revuerelations.qc.ca
[ Lire ]
L’accès des femmes aux
ministères ordonnés dans
l’Église catholiques : une
question réglée?
Actes du colloque
Organisé en octobre 2006 par le
Centre justice et foi en partenariat
avec le Centre Saint-Pierre, la
collective L’autre Parole et le réseau
Femmes et Ministères, ce colloque a
voulu relancer le débat sur cet enjeu
fondamental.
Les textes de ce colloque sont
maintenant disponibles sur le site du
réseau Femmes et Ministères. Un
DVD reprenant toutes les communications données lors de cette
rencontre (conférences, table ronde
œcuménique, synthèses), des extraits
de la liturgie d’envoi qui a clôturé
l’événement
ainsi
que
les
propositions issues du travail en
ateliers est aussi disponible.
www.femmes-ministeres.org
[ Participer ]
« Moi, je ne juge personne » –
L’Évangile au-delà de la morale
Conférences de Lytta Basset
Mme Lytta Basset prononcera une
conférence au Centre Saint-Pierre,
1212, rue Panet, à Montréal, le mardi
23 août 2011, à 19 h.
Critiques, moqueries, comparaisons…
nous passons notre temps à juger. Les
situations, les autres, nous-mêmes, très
souvent pour fuir la réalité L’affirmation de Jésus « Moi, je ne juge
personne » nous amène à poser un
regard et de bienveillance et de
compassion sur les autres, sur nousmêmes et sur les situations. Madame
Basset abordera cette thématique en
appuyant sa réflexion sur quelquesunes des grandes figures bibliques
comme celles de la femme adultère et
de Judas. Pour compléter votre
démarche, nous vous proposons la
journée-conférence « Moi, je ne juge
personne. De la peur à l’accueil de
l’autre », le mercredi 24 août 2011.
Lytta Basset est professeure
théologie pratique à la Faculté
théologie
de
l’Université
Neuchâtel. Elle est l’auteure
plusieurs ouvrages.
de
de
de
de
Coût de la soirée : 15 $ Coût de la
journée-conférence : 70 $ Réservez
tôt, les places sont limitées. Pour vous
inscrire, consultez le site du Centre.
www.centrestpierre.org
Pour nous signaler
des ressources pertinentes
ou nous faire vos commentaires,
écrivez à :
[email protected]
Prochaine parution du journal : 15 juin 2011
Le journal Sentiersdefoi.info est une publication de Sentiers de foi, OSBL autonome et indépendant d’inspiration chrétienne fondé en 1984,
qui a pour mission d’être un espace favorisant la connaissance, la reconnaissance et la collaboration des sentiers de foi au Québec,
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ISSN 1715-8370 | 8 2011 Sentiers de foi | Tous droits réservés
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5
ans de marche
dans les pas du vent
de
foi.info
Sentiers
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Vol. 6 no 14 / 15 juin 2011
8 Lucie Brousseau, 2011 : Se poser quelque part
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bimensuel
indépendant
qui vise à faire
connaître
des parcours
et des lieux
où se vivent
des expériences
humaines
et spirituelles
novatrices.
Comité éditorial
Rédacteur en chef
Gérard Laverdure
Secrétaire de rédaction
Ghislain Bédard
Représentant du C.A.
Michel-M. Campbell
Itinéraire
Collaboration
Richard Bonetto
David Fines
Perspectives
Le message social de l’Évangile a conduit Gérald Doré de la théologie au
quartier Saint-Roch de Québec, et à devenir finalement pasteur. Avec lui,
l’Église unie Saint-Pierre deviendra un « sanctuaire pour l’étranger ». [ p. 2 ]
par David Fines
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Abonnement gratuit.
Intériorité
L’accueil du réfugié
Voici des extraits d’une prédication de Gérald Doré, à l’ouverture de la
Semaine interconfessionnelle des sanctuaires, le 17 octobre 2004. [ p. 5 ]
présenté par Gérald Doré
Actualités
Entendons-nous crier la Terre?
Comme citoyens et citoyennes de ce monde, nous avons mission de le
développer durablement et de le protéger, comme les gardiens d’un jardin.
Voilà ce que nous ont rappelé les 10e Journées sociales du Québec. [ p. 6 ]
par Gérard Laverdure
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Redécouvrir les pages vertes de la Bible
La Bible lue par deux auteurs environnementalistes : le livre Les pages vertes
de la Bible propose un regard nouveau, audacieux et prophétique. [ p. 6 ]
par Ghislain Bédard
Fêtons 5 ans
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8 2011 Sentiers de foi
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Croyant sur macadam
Qui parle pour qui? La prise de parole par les appauvris, originale,
prophétique, nous pousse à faire société et à faire Église autrement. Un tour
d’horizon du monde nouveau qui se bâtit ici. [ p. 3 ]
par Richard Bonetto
Photographie
Lucie Brousseau
Conception graphique
Ghislain Bédard
Le « gars du communautaire » devenu pasteur
Un mot avant de partir en vacances
L’année de célébration du cinquième anniversaire de notre journal se termine
avec un sondage. Rendez-vous l’automne prochain! [ p. 7 ]
par l’équipe éditoriale du journal
sdf.info • 15 juin 2011 • 2
Itinéraire
Le « gars du communautaire » devenu pasteur
Le message de solidarité sociale de l’Évangile a conduit Gérald Doré de la théologie au quartier Saint-Roch de Québec,
et à devenir finalement pasteur. Avec lui, l’Église unie Saint-Pierre deviendra un « sanctuaire pour l’étranger ».
Le parcours de M. Gérald Doré, pasteur à la retraite de l’Église Unie, n’a pas été un long fleuve
tranquille. « Mon enfance à Saint-Jean-sur-Richelieu s’est déroulée en milieu ouvrier, bien
encadrée par des parents très affectueux. Le curé a suggéré que je fasse mon cours classique au
séminaire local, et j’ai eu là une excellente éducation. J’aimais beaucoup les études, je servais la
messe, j’allais aux vêpres. C’était des années très intenses, mais j’ai vécu avec beaucoup
David Fines est pasteur d’ambivalence les tensions entre la religion institutionnelle et le message de l’Évangile,
de l’Église Unie du notamment dans l’attitude du clergé ou des notables envers les gens plus modestes. »
par
David Fines
collaboration spéciale
Canada, président du
Synode MontréalOttawa. Il a été
rédacteur en chef de la
revue Aujourd’hui Credo,
le mensuel francophone
de l’Église Unie du
Canada.
M. Doré a approfondi sa compréhension de la dimension sociale de l’Évangile par le message de
l’abbé Pierre ou des livres du théologien brésilien Josué de Castro. « À la fin de mes études, à 20
ans, j’ai choisi d’entrer dans la communauté religieuse la plus intellectuelle, les Jésuites, mais j’y
ai frappé un mur. C’était la période effervescente de Vatican II et je me suis retrouvé en plein
16e siècle! Je ne suis resté qu’un an. » Il entreprend une maîtrise en travail social à l’Université de
Montréal et un doctorat à l’Université Laval tout en œuvrant comme animateur social dans le
quartier Saint-Roch à Québec, « un quartier très désorganisé ».
« Au fil de mes études, j’ai eu des périodes de questionnement de la foi catholique et de la foi tout
court. Les autorités religieuses n’avaient pas de réponses satisfaisantes aux questions que posaient
les sciences humaines. » C’est alors qu’un de ses anciens professeurs lui propose un poste à l’École
de service social de l’Université Laval où il est resté pendant 27 ans, tout en poursuivant son
activisme. Celui-ci se traduit par de nombreux engagements sociaux sur le terrain dans des
organisations politiques, syndicales ou communautaires. Une recherche sur l’aménagement urbain
inscrite dans le cadre d’une analyse marxiste a réglé son ambivalence sur la religion. « J’ai tout mis
de coté et je me suis engagé dans une mission laïque marxiste, tout en faisant parfois équipe avec
des religieux engagés sur le terrain, adeptes de l’option préférentielle pour les pauvres. » Avec la
débâcle de la gauche des années 1980 et la montée du néolibéralisme, bien des gens « de gauche »
ont changé d’allégeance. M. Doré, qui a poursuivi ses engagements sur le terrain malgré ce
changement de mode, s’est retrouvé très isolé : « Un vide s’est créé en moi d’où a émergé une
dimension spirituelle et religieuse sur laquelle je n’arrivais pas à mettre le couvercle. »
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Il s’est mis à fréquenté l’abbaye Saint-Benoît-du-Lac. « Tout à coup, en février 1992, durant l’office
de laudes, j’ai senti un envahissement intérieur, un bien-être inconnu, une grande libération
spirituelle. » Comme il demeurait un « gars du communautaire », il avait besoin de se rattacher à une
communauté. Paradoxalement, une religieuse l’oriente vers Pierre Goldberger, pasteur de l’Église
Unie et alors directeur du Séminaire Uni, à Montréal. Celui-ci lui propose un programme menant au
ministère. « Ce n’était certes pas ce que j’avais envisagé. Alors, j’ai suivi des cours à Laval, tout en
enseignant. Puis, j’ai pris ma retraite à 55 ans, j’ai terminé ma maîtrise en théologie à McGill et j’ai
été consacré pasteur en 1999. Par chance, le poste de pasteur à la paroisse unie Saint-Pierre, à
Québec, s’est ouvert à ce moment-là, et j’y suis resté jusqu’à ma (deuxième) retraite en 2008. »
En 2004, il reçoit un appel de Louise Boivin, la conjointe de Mohammed Cherfi. « Mohammed,
un réfugié algérien, allait être déporté. Louise m’a demandé si j’accepterais de le recevoir en
sanctuaire dans l’église. J’ai vite compris que c’était une candidature sérieuse par ses
antécédents, son engagement pour les sans-statut, ses appuis, comme la Ligue des droits et libertés
Ou écrivez-nous à
et Amnistie internationale. Je ne pouvais me défiler, compte tenu de mes convictions et de ce que
[email protected]
je savais de l’engagement de l’Église Unie dans les sanctuaires. J’ai dit oui et ils sont venus à
Québec. J’ai fait une longue entrevue avec eux, puis une réunion avec le Conseil de Saint-Pierre,
qui a endossé l’accueil, et une autre avec la paroisse anglophone Chalmers-Wesley dont nous
louions les locaux, moins enthousiaste, mais qui finalement a aussi dit oui. On a reçu plusieurs
appuis dont celui du cardinal Ouellet, très sensible à la cause des réfugiés. »
Lire la suite, page 3
sdf.info • 15 juin 2011 • 3
Itinéraire (suite)
Mohammed était dans la mire des autorités. « Il avait été le porte-parole des Algériens sans statut, il
devait être puni. En 2002, le premier ministre Chrétien a levé le moratoire sur la déportation des
Algériens que le Canada avait décrété à cause de la guerre civile et 1020 réfugiés risquaient d’être
déportés, de se retrouver en prison, de perdre leur vie. Un comité des Algériens sans statut a été formé
et a organisé des manifestations, des occupations, et Mohammed est devenu son porte-parole. Mais
comme il s’est consacré à temps plein pour aider ses compatriotes à remplir la paperasse sans pouvoir
travailler, il a été jugé non intégré dans la société. Il allait être extradé, et sa vie était en danger. »
Un événement unique dans l’histoire canadienne s’est alors déroulé le 5 mars 2004. « Jamais
auparavant la police n’avait violé un sanctuaire; mais ce jour-là, elle a envahi la salle
communautaire et arrêté Mohammed. Mais c’était un coup monté, car ce sont plutôt les services
frontaliers qui se sont saisis de lui et l’ont amené tout de suite aux États-Unis d’où il était venu
6 ans auparavant. » Gérald Doré était présent ce jour-là. « Mais l’action a continué, avec le
cardinal Ouellet, des militants musulmans, le conseil municipal de Québec, des parrains qui ont
constitué un fond de soutien, la Société Saint-Jean-Baptiste. Mohammed est resté 13 mois aux
États-Unis, où une procédure légale lui a évité la déportation. On a continué à faire des pressions
et, finalement, on a gagné : en été 2009, il est entré au pays avec sa résidence permanente. »
Cet épisode a été, du point de vue spirituel, un temps fort de son ministère : « J’ai accepté ce
sanctuaire en sentant, au départ, le caractère juste de cette demande de protection. J’ai été soutenu
par la pratique de mon Église, mon expérience de militant et l’ouverture de ma paroisse; la dimension
spirituelle, je l’ai découverte graduellement. Lors d’une visite d’un autre sanctuaire à Montréal, j’ai
été invité à faire une réflexion biblique; j’ai alors utilisé des textes sur les villes sanctuaires, sur le fait
que, si les gens arrivaient à toucher l’autel, ils étaient protégés. Et surtout, la parole de Jésus : J’étais
un étranger et vous m’avez secouru. J’ai eu le sentiment d’un temps fort spirituel qui ne reviendrait
pas : tu le fais ou tu passes à côté. » Et Gérald Doré n’a pas pu passer à côté.
Perspectives
Croyant sur macadam
Qui parle pour qui? La prise de parole par les appauvris, originale, prophétique, nous pousse à faire société et à faire
Église autrement. Un tour d’horizon du monde nouveau qui se bâtit ici.
par
Richard Bonetto
collaboration spéciale
1. Centre qui a produit
un recueil de chants
pour l’usage de
paroisses et de
communautés dans les
années 1970-1980.
J’ai eu peu de contacts avec Gérald Doré, pour ainsi dire aucun; si ce n’est une fois, il y a une
dizaine d’années, à l’assemblée de fondation du Réseau œcuménique justice et paix (ROJeP) du
Québec. C’est pourtant un frère que je découvre en lisant son itinéraire. Un frère, parce que
protestant? Pas tout à fait, non. S’il est un frère, c’est à cause des airs de famille, de la fréquentation
des mêmes réseaux, de la familiarité également avec le fier monde des milieux populaires, un
enracinement d’Évangile dans le macadam urbain, dans le béton des ruelles citadines du Québec
avec, en prime, la capacité de mettre un prénom et une histoire personnelle sur chaque situation
d’injustice et d’exclusion, mais aussi sur des réussites collectives et des histoires d’épanouissement personnelles.
Un chant, création collective de l’ALPEC1, proclamait ce refrain dans les années 1970 : « Un Pays
à bâtir, une Église à conquérir, des mains pour façonner, et des mains pour aimer... » Combien
furent-ils et furent-elles dans les quartiers ouvriers, qu’on appelle populaires aujourd’hui, de
Québec, de Hull, de Montréal, tels des levains dans la pâte, à avoir participé à la construction d’un
monde meilleur? Ils s’appellent Isidore Ostiguy, Roger Poirier, Benoît Fortin, Claude Hardy,
André Myre; elles s’appellent Lise Lebrun, Annette Benoît, Simone Bernier, Nicole Jetté, Janelle
Bouffard, Vivian Labrie. La liste serait trop longue pour les nommer tous et toutes. Tous des
Lire la suite, page 4
Perspectives (suite)
Richard Bonetto a
œuvré et milité en milieu
populaire pendant une
vingtaine d'années.
Préocupé par les droits
des peuples autochtones
il a cofondé le centre
Wampum pour
promouvoir la culture et
la spiritualité autochtone.
Il est présentement
candidat à l’ordination
dans l'Église
presbytérienne au
Canada et chargé de
ministère à l’église SaintLuc. Il a terminé une
maîtrise en théologie à
l'université McGill.
sdf.info • 15 juin 2011 • 4
croyants et croyantes, souvent en marge de l’institution, qui se sont mis à rêver d’un monde
nouveau avec d’autres et ont ouvert toutes grandes leurs oreilles pour entendre les joies, les peines,
les souffrances, les espoirs et les aspirations de leur entourage, qui se sont laissé toucher,
bouleverser, indigner et, forcément, transformer par ce qu’ils et elles ont entendu. De cette prise
de conscience et de ces bouleversements sont nés un monde nouveau, un « vivre autrement », un
« être autrement au monde ». Pétris d’Évangile, ils se sont rendu compte que cet « être autrement
au monde » entraînait un « être autrement Église ».
Le langage religieux demeure souvent une langue étrangère qui n’arrive pas toujours à toucher les
gens. Joseph Cardjin, fondateur de la JOC, a dû se tenir à la sortie des usines pour apprendre la
langue des jeunes ouvriers, et c’est seulement à ce moment qu’une communication fut possible.
Beaucoup de croyants et croyantes en milieux populaires ont dû s’éloigner des réseaux officiels
d’Église pour pouvoir partager l’Évangile, célébrer leur vie et leur foi. Des communautés
ecclésiales de base, des groupes de révision de vie ou d’autres réseaux, formels ou informels, de
partage de foi se sont mis sur pied et se réunissent encore aujourd’hui. Peut-on parler d’une Église
underground? Parlons d’Église autrement. Il semble peut-être que ce sont des lieux drôlement plus
pertinents pour celles et ceux qui y participent que la routine du « assis, debout, à genoux... » À
cause d’une société et d’Églises qui excluent, ces lieux d’appartenance où chacun et chacune a sa
place sont nécessaires pour que l’Évangile puisse se vivre à nouveau dans nos villes.
Laisser passer leurs voix
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Un livre sur Adolphe Proulx, évêque de Hull jusqu’à sa mort en 1987, avait pour titre Adolphe
Proulx La voix des sans-voix. C’était bien gentil, mais il laissait croire que le monde des quartiers
populaires ne pouvait s’exprimer par lui-même. Or la voix de ces derniers, quand on la laisse passer,
peut être drôlement prophétique et interpeller universellement. Je pense à ce cri lancé en pleine
église Jacques-Cartier, dans la Basse-Ville de Québec, lors d’un jeûne pour l’élimination de la
pauvreté : « Pauvreté zéro! », comme un écho à l’obsession d’alors du déficit zéro du gouvernement
Bouchard. Ce cri est devenu slogan et cri de ralliement pour des milliers de personnes. Je me
souviens, lors d’une réunion présynodale à Montréal, de ce commentaire à propos de l’Église :
« Leurs murs de pierre sont trop épais pour qu’ils entendent ce qu’on a à dire... »
La présence de personnes soucieuses de faire passer la voix de ceux et celles qui vivent l’injustice
– trop souvent réduites au silence par les bien-pensants qui parlaient en leur nom – permet d’ouvrir
les horizons d’une Église et d’une société trop souvent coincées dans leurs vieilles mentalités, leurs
traditions et leurs règles désuètes. Je pense à ces personnes réunies, tantôt des femmes, mères de
famille monoparentale, tantôt des sans-abris, autour du père Benoît Fortin, qui ont réécrit des
Ou écrivez-nous à
textes et des prières traditionnelles à partir de leur réalité. Ces textes ont circulé abondamment tant
[email protected]
ils étaient percutants et trouvaient résonance chez d’autres personnes vivant d’autres réalités. Qui
dit que des voix locales ne tendent pas vers l’universel?
Quel Dieu nous révèlent ces voix entendues dans la Basse-Ville de Québec, à Limoilou, sur l’île
de Hull, à Rivière-du-Moulin (Chicoutimi), au Centre-Sud, à Saint-Henri, à Pointe-Saint-Charles,
à Hochelaga-Maisonneuve? Un Dieu qui n’est pas impassible, immobile, insipide. Il prend parti et
marche à côté de ceux et celles qui sont en marche... Il est reconnaissable dans le silence et la brise
légère, mais aussi dans la lutte et le cri de colère des épris de justice. C’est le Dieu de Jésus Christ,
l’Insoumis de Nazareth, qui transgresse le sabbat et les règles injustes parce que remué de
compassion pour l’exclu du système, le laissé-pour-compte, la personne discriminée.
Comme pour Gérald Doré à Saint-Benoît-du-Lac, comme pour Moïse au buisson, comme pour
Jésus au désert, ce Dieu se révèle parfois dans le silence, à l’écart, dans le recul. Mais il se fait
également entendre dans le cri d’indignation du prophète d’alors et de celles et ceux d’aujourd’hui
qui interpellent quiconque a des oreilles pour entendre.
sdf.info • 15 juin 2011 • 5
Intériorité
par
Gérald Doré,
pasteur
L’accueil
La notion de la vie du réfugié à protéger
est présente dès le retour qu’effectue le
livre des Nombres sur les anciens temps
bibliques. Le Seigneur y dit à Moïse qu’à
l’entrée, dans le pays de Canaan, les
Hébreux auront à choisir des villes qui
serviront de « villes de refuge » pour les
auteurs
d’homicides
involontaires
(Nombres 35, 9-15); sans doute pour les
protéger des vengeances tribales. Malgré
l’ethnocentrisme propre à un peuple en
formation, la protection s’adresse « aussi
bien aux fils d’Israël qu’à l’émigré et à
l’hôte de passage au milieu d’eux... »
À l’époque du roi Salomon, c’est en
saisissant les coins, en forme de cornes,
de l’autel des sacrifices qu’on pouvait
avoir la vie sauve. « Adonias, lui, par peur
de Salomon, se leva et alla saisir les
cornes de l’autel. » (1 Rois 1, 50) Et plus
loin : « [Joab] se réfugia dans la Tente du
Seigneur et saisit les cornes de l’autel. »
(1 Rois 2, 28) Déjà, en ces temps
lointains, la protection du sanctuaire
était, comme aujourd’hui, à la merci de
l’arbitraire du pouvoir civil. La vie
d’Adonias fut épargnée (1 Rois 1, 53),
mais Joab fut assassiné dans la « Tente du
Seigneur » (1 Rois 2, 30-31).
Dans l’évangile de Luc, le Messie à venir
en Jésus est annoncé comme la « corne de
salut » à laquelle on peut s’accrocher (Luc
1, 69). Il en ressort que marcher avec le
Christ implique que nous soyons nousmêmes, à notre mesure, « cornes de
salut ». Les évangiles ne parlent ni de
refuge, ni de droit d’asile, ni de « sanctuaire », au sens où nous l’entendons
aujourd’hui. L’évangile selon Matthieu dit
plus encore. Il situe dans la transcendance
du jugement ultime qui sera porté sur
l’histoire humaine l’accueil que nous
du
Extraits d’une
prédication,
à l’ouverture de la
Semaine
interconfessionnelle
des sanctuaires,
le 17 octobre 2004
réfugié
réservons à l’étranger en besoin de
protection. « Venez, les bénis de mon
Père, recevez en partage le Royaume qui a
été préparé pour vous, depuis la fondation
du monde... J’étais un étranger et vous
m’avez recueilli... » (Matthieu 25, 34-35)
En ces temps difficiles où plusieurs
confessions chrétiennes sont engagées
dans l’accueil en sanctuaire de réfugiés
sans statut, prions.
Inspire, Seigneur,
discernement et courage
aux réfugiés présentement en
sanctuaire, aux réfugiés emprisonnés
dans l’angoisse de la déportation,
aux réfugiés confinés à la clandestinité
par peur d’être déportés,
aux alliés qui les soutiennent
dans la lutte pour la vie
et l’intégrité de leur personne,
à ces gouvernants qui ont le pouvoir
de les protéger,
afin qu’ils les libèrent
en se libérant eux-mêmes de l’emprise
de la violence institutionnelle,
et fassent des lois qui permettent
que les légitimes demandeurs
du statut de réfugié soient accueillis
en ce pays
et protégés comme sujets de droit.
Nous te le demandons
par Jésus Christ
qui en eux vient à nous
et en nous veille sur eux.
AMEN.
sdf.info • 15 juin 2011 • 6
Actualités
Entendons-nous crier la Terre?
Comme citoyens et citoyennes de ce monde, nous avons mission de le développer durablement et de le protéger,
comme les gardiens et gardiennes d’un jardin. Voilà ce que nous ont rappelé les 10e Journées sociales du Québec.
par
Gérard Laverdure
sdf.info
Développement et Paix
www.devp.org
Les Églises vertes
www.eglisevertegreenchurch.ca
Équiterre
www.equiterre.org
Fondation rivières
www.fondationrivieres.org
Moratoire d’une génération
www.rimouskimontreal.net
Coalition Eau Secours
www.eausecours.org
Cette fin de semaine du 3 juin, nous étions 188 personnes de tous âges, engagées pour la justice
sociale et écologique, rassemblées au cégep de Valleyfield pour les 10e Journées sociales du
Québec, sous le thème « Le cri de la Terre et le cri des pauvres ». Ces deux cris ne seraient-ils pas
les deux facettes d’un seul cri? Ici au Québec, on entend de plus en plus souvent parler des
« verts » ou des « écolos » et de leurs luttes. Peut-être avons-nous l’impression que ce sont de doux
rêveurs, qui aiment se bercer aux chants des oiseaux et des rivières non harnachées. Mauvaise
perception. Les mouvements écologiques sont organisés, scientifiquement préparés, bien ancrés
dans de nombreuses communautés et engagés dans les défis planétaires pour la survie des
écosystèmes et de leurs habitants, communautés humaines comprises.
M. André Beauchamp était le conférencier principal. Il a repris les paroles fondatrices de notre
mission sur la Terre pour nous rappeler que nous n’avons pas à dominer la Terre comme une chose,
à l’asservir selon nos intérêts égoïstes, mais à « entretenir et garder le jardin terrestre », à veiller
à son intégrité, car nous en sommes parties prenantes et nous sommes constitués des mêmes
éléments. « Et Dieu vit que cela était bon. » Ce n’est pas tant la Terre qui nous appartient que nous
qui appartenons à la Terre mère. Nous sommes « membres » de la nature.
Oui, la Terre et les appauvris crient à tue-tête. « J’ai entendu les cris de mon peuple... » (Ex 3, 7)
dit Dieu à Moïse. Alors, protéger et défendre la création, notre magnifique jardin terrestre donné à
tous et toutes par notre Père commun, c’est aussi défendre les droits des pauvres et des exclus de
la table commune, c’est faire justice sociale et défendre la vie en son nom, c’est faire eucharistie
par des gestes concrets. À chacun et chacune de faire sa part.
Actualités
Redécouvrir les pages vertes de la Bible
La Bible lue par deux auteurs environnementalistes : de l’audace, de la créativité et de la nouveauté, c’est ce que
Novalis vient de proposer avec le livre Les pages vertes de la Bible. Un regard rafraîchissant, prophétique et stimulant.
par
Ghislain Bédard
sdf.info
« La protection de l’environnement est certes l’affaire des communautés chrétiennes. Elle est un appel que Dieu lance impérieusement
à toutes les Églises. Si celles-ci n’y répondent pas, personne ne le fera
à leur place; si elles ne montrent pas le chemin spirituel de la
À lire aussi protection de la Création, qui le fera? » (Quatrième de couverture)
André BEAUCHAMP,
L’eau et la terre me
parlent d’ailleurs, une
spiritualité de
l’environnement,
Montréal, Novalis, 214 p.
André BEAUCHAMP,
Environnement et Église,
Montréal, Fides, 2008,
170 p.
1. Pour les 52 dimanches
de l’année (y compris Noël,
Pâques, la Pentecôte,
l’Action de grâce, etc.) et
22 autres fêtes qui ne
tombent pas le dimanche.
Le livre Les pages vertes de la Bible de David Fines et Norman
Lévesque, deux auteurs qui ont déjà écrit dans nos pages, est un ouvrage
incontournable d’une grande pertinence prophétique pour nos
communautés chrétiennes et toutes les Églises. Il présente un parcours
de 74 réflexions bibliques à caractère écologique pour l’année liturgique.
Celles-ci se découpent en trois parties : un passage biblique; ensuite, une
réflexion théologique et une actualisation écologique du passage; enfin,
des objectifs, des conseils, des trucs pratiques et des actions possibles
que l’on peut mettre en œuvre individuellement ou collectivement.
À l’instar des auteurs, provenant de deux traditions différentes – Norman Lévesque est catholique
romain et David Fines, pasteur dans l’Église Unie du Canada –, je crois que ce livre au contenu
œcuménique sera des plus utiles pour transformer les consciences et guider nos pas vers une Terre
nouvelle. Nous avons grandement besoin de livres comme ceux-ci, de chemins spirituels qui
conduisent vers une spiritualité de la création active et prometteuse pour l’avenir de la planète!
sdf.info • 15 juin 2011 • 7
Fêtons 5 ans
Un mot avant de partir en vacances
L’année de célébration du cinquième anniversaire de notre journal se termine avec un sondage. Et les quelques
expériences menées nous donnent des pistes pour mieux entrer en relation avec notre lectorat. Rendez-vous à l’automne!
par
l’équipe éditoriale :
Ghislain Bédard
Michel-M. Campbell
et Gérard Laverdure
sdf.info
Notre mission est de vaincre la solitude, l’isolement, l’effacement de pratiques collectives ou
individuelles de foi chrétienne qui, par leur caractère minoritaire, marginal ou contestataire, ne
jouissent pas de la visibilité des pratiques officielles ou majoritaires. La publication du webzine
Sentiersdefoi.info met en lumière, à chaque numéro, une de ces expériences. L’augmentation du
nombre d’abonnés (plus de 20 % cette année; nous avons actuellement près de 1140 abonnés) et
les quelques réactions qui nous parviennent à chaque parution permettent de vérifier la pertinence
de ce genre de démarche. Des parcours québécois aussi spécialisés que diversifiés font sens pour
des gens ici, mais aussi, quelquefois même, en Amérique du Sud et en Europe. Il faudra creuser ce
que sous-tend ce genre d’intérêt.
Des expériences d’interaction éclairantes
Cherchez dans
Facebook
Journal Web
Sentiersdefoi.info
et dites-nous « J’aime »
pour vous joindre
au groupe.
À cet égard, durant l’année de notre cinquième anniversaire, nous avons voulu intensifier
l’interaction avec notre lectorat. Vous en avez été témoins. Nous avons ouvert une page Facebook
qui compte maintenant une centaine d’amis, ce qui constitue un excellent départ. Une deuxième
expérience sur blogue, une invitation générale à échanger sur les effets du mystère de Pâques dans
nos vies, s’est révélée un succès mitigé en ce qui concerne la participation : seules des personnes
sollicitées directement par l’équipe y ont fourni des textes, excellents par ailleurs (voir
http://sentiersdefoi.wordpress.com). Ce qui nous amène à nous interroger sur ce genre de format.
Sans y participer, quelque 486 personnes ont tout de même visité le blogue jusqu’à ce jour, bien
qu’il ne soit pas des plus animés...
Un prochain sondage à propos du journal : tenez-vous aux aguets!
Ce qui nous amène à un troisième projet d’interaction. Vous serez invités dans les prochain jours
à participer à un sondage Internet à propos de votre webzine Sentiersdefoi.info. Y répondre ne
devrait prendre que quelques minutes de votre temps. Vos réponses nous permettront cependant de
mieux vous connaître, de mieux cerner votre vision et votre utilisation du jounal et de récolter vos
suggestions. Votre participation nous sera précieuse : plus nos lecteurs et lectrices répondront au
sondage, plus nous aurons un portrait précis de notre lectorat. Tout cela, dans le but de répondre le
mieux possible à vos besoins. Nous vous en remercions à l’avance.
Veuillez prendre note, enfin, que le journal fait relâche pour la période estivale et qu’il vous
reviendra, sans faute, à l’automne prochain. Aussi, nous vous souhaitons de très bonnes vacances
et un excellent été.
FAITES VOTRE DEMANDE À LA FONDATION BÉATI DÈS MAINTENANT
Fondation privée, active depuis près de 20 ans au Québec, Béati a soutenu plusieurs centaines
de groupes au fil des années. Sa mission : contribuer à la construction d’un monde plus juste
en offrant soutien financier et accompagnement aux organismes préoccupés de répondre de
façon audacieuse aux enjeux sociaux et pastoraux de leur milieu.
Échéances pour présenter un projet : 31 mars, 31 août et 31 décembre
Informations et formulaire sur le site www.fondationbeati.org. Tél. : 450 651-8444
La Fondation Béati est un partenaire de Sentiersdefoi.info.
sdf.info • 15 juin 2011 • 8
Ressources
Pour aller plus loin ou pour satisfaire votre curiosité
[ Visiter ]
Exposition
Vocation : enseignantes
Les Sœurs de Sainte-Anne, c’est 150
ans d’éducation à Lachine! Vous
pouvez désormais visiter, du 29 mai
2011 au 30 mars 2012, la toute
nouvelle exposition au Centre
historique, sis au 1280, boul. SaintJoseph, à Lachine, axée sur les 14
écoles où les Sœurs de Sainte-Anne
se sont impliquées. L’exposition
intéressera à la fois les anciennes
élèves, les religieuses et les personnes
qui ne connaissent pas la communauté. On y retrouve des témoignages, du matériel didactique, du
matériel scolaire, divers objets
utilisés dans les écoles, un historique
du passage des Sœurs de Sainte-Anne
dans chaque établissement scolaire et,
bien sûr, des photos. Le Centre
historique a fait appel aux élèves du
collège Sainte-Anne pour illustrer les
uniformes des pensionnaires au fil
des ans. Pour information, joignez le
514 637-4616 poste 212.
www.ssacong.org/musee
Pour nous signaler
des ressources pertinentes
ou nous faire vos commentaires,
écrivez à :
[email protected]
[ Lire ]
L’Église actuelle et l’avenir
souhaité
Article sur l’activité du 8 juin du
réseau des forums André-Naud
Vous pouvez dès maintenant lire un
compte rendu des interventions
données par Marco Veilleux, sœur
Mariette Milot et Michel Simard lors
de l’activité du Forum André-Naud
de Trois-Rivières/Nicolet, au Centre
communautaire Jean XXIII, le 8 juin
2011. À ce sujet, voir www.forumandre-naud.qc.ca, page Le réseau à la
section Équipe de Trois-Rivières/
Nicolet. Une centaine de personnes
ont assisté à cette activité du FAN.
[ Se souvernir ]
Décès de Claude Lefebre
Fondateur des Forums AndréNaud
Sur le site du réseau des Forums
André-Naud, vous trouverez aussi des
hommages à la « mémoire d’un
disciple libre et convaincu », Claude
Lefebvre, fils de la Charité, fondateur
des FAN, et décédé le 9 juin à 78 ans.
Les funérailles seront célébrées le
samedi 18 juin 2011, à 10 h 30 en
l’église Saint-Édouard (angle boul.
Beaubien E.), à Montréal.
www.forum-andre-naud.qc.ca
[ Visiter ]
Développement et Paix
Se mettre au parfum des enjeux
Pour être bien informé sur ce qui se
brasse à Développement et Paix et les
enjeux en cause, vous pouvez
consulter les documents importants,
lire les lettres envoyées et signer la
pétition en allant sur :
www.sauvonsdetp.wordpress.com
et sur www.mouvement-movement.
blogspot.com
[ Célébrer ]
Passent les saisons...
Bon été! de la part du comité
éditorial du journal
Nous vous souhaitons un bel été qui
prend son temps. Toutes les saisons
ont leur beauté et elles ne se répètent
jamais d’une année à l’autre. Tout est
en croissance et pousse vers l’accomplissement de l’Histoire, de nos
histoires. Alors prenons le temps de
bien sentir le soleil et la pluie, la brise
et la tempête, de jouir des parfums et
des couleurs, des chants des rivières et
des oiseaux. Arrêtons-nous pour sentir
sa Présence en toute chose, partager le
pain et le vin de l’amour, de l’amitié et
de la solidarité.
Le comité éditorial du journal
Prochaine parution du journal : automne 2011
Le journal Sentiersdefoi.info est une publication de Sentiers de foi, OSBL autonome et indépendant d’inspiration chrétienne fondé en 1984,
qui a pour mission d’être un espace favorisant la connaissance, la reconnaissance et la collaboration des sentiers de foi au Québec,
dans une perspective chrétienne inscrite dans le pluralisme actuel.
ISSN 1715-8370 | 8 2011 Sentiers de foi | Tous droits réservés
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