Éloge funèbre de mon père - Roland Dufort Au nom de tous les

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Éloge funèbre de mon père - Roland Dufort Au nom de tous les
Éloge funèbre de mon père - Roland Dufort
Au nom de tous les membres de ma famille, je vous remercie de vous être déplacé pour nous
accompagner dans ce deuil.
Par mon témoignage, j’aimerais honorer la mémoire de mon père. Pour ce faire, j’aurais pu commencer
en vous disant que mon père était le meilleur, le plus fort, comme tout enfant sait le dire par réflexe
depuis son tout bas âge lorsqu’ils se chamaillent. Mais ça serait trop cliché et vide de sens.
Alors, puisque mon père aimait raconter des histoires grivoises qui avaient souvent des bonnes sœurs
comme personnage principal, j’aurais pu vous les relater. Toutefois, je suis incapable de leur rendre
justice et de vous les compter avec toute la ferveur et l’enthousiasme que mon père savait y mettre.
C’est donc pourquoi il ne me reste qu’à vous livrer le témoignage sur lequel je travaille depuis déjà
quelques années alors que j’avais réalisé que ce moment arriverait un jour et que je me devrais d’être
prêt à honoré sa mémoire à la hauteur de l’appréciation que j’avais pour lui et qu’il me serait impossible
de composer un tel texte dans le tumulte d’un deuil.
Chacun d’entre nous avons nos souvenirs propres en ce qui concerne mon père et tout en vous laissant
les vôtres bien ancrer dans vos mémoires, j’aimerais tout de même vous relater certaines de mes
réflexions afin d’honorer sa vie en tant que père et mari, puisque je ne l’ai naturellement pas connu
autrement. Ainsi j’aimerais vous transmettre tout ce qu’il représentait pour ma mère, ma sœur et moi.
Quoi que marié tardivement alors qu’il allait avoir 32 ans, mon père s’est entièrement dévoué à sa
famille à partir de ce moment-là en se faisant toujours passer en second plan. C’est ce qui explique
d’ailleurs que dès lors son mariage, il arrêta de s’impliquer dans les activités sportives telles que le
hockey et le bowling pour ne se consacrer qu’à sa femme et sa famille en devenir.
C’est à ce moment que sa famille, ses proches devinrent ni plus ni moins sa seule raison de vivre. C’est
donc ainsi qu’il commença à vouloir faire tout en son possible pour le plus grand bien de sa famille.
Chemin faisant, son grand amour l’a peut-être rendu surprotecteur et même quelquefois contrôlant
alors qu’il tentait de nous éviter toutes embuches, toutefois peut-on lui reprocher d’aimer autant?
Il se responsabilisait donc beaucoup des maux des autres, tel que ceux de ma mère de qui il a pris soin
sans relâche au quotidien ainsi que ceux de France pour qui il désirait le plus grand bien. Son AVC était
donc la résultante probable de son abdication face, au poids de la montagne qui pesait sur ces épaules
et qu’il n’arrivait plus à porter.
Quoi qu'il en soit, mon père m’a avant tout appris à être un homme, à être un bon père. Il a été un
homme possédant des grandes qualités et qui a su prêcher par l’exemple toute sa vie. Alors que me
reste-t-il de son passage parmi nous, ne serait-ce qu’une longue liste de valeurs qu’il m’a transmise. Par
exemple, dès mes premières armes sur le marché du travail alors que l’on se devait de repeindre les
toilettes de l’école Vanguard ou ma mère travaillait, mon père m’inculquait la rigueur au travail et la
satisfaction du travail bien fait. C’est grâce à cette première expérience que je compris que quelques soit
la tâche à accomplir, il importait de s’y appliquer ne serait-ce que par satisfaction personnelle. C’est
ainsi qu’en mettant en pratique cette philosophie de vie qu’était la sienne, je puis avoir un certain
succès dans ma vie professionnelle alors que je ne travaillai jamais pour satisfaire autres que moi-même,
souvent plus critique que mes patrons, et donc sans même espérer d’éloges ou de récompenses.
Mon père était donc un homme droit, honnête, un homme sur lequel on savait pouvoir compter.
Toujours disponible à rendre service, cette dernière qualité ne peut mieux s’illustrer que par les
innombrables fois qu’il m’a reconduit aux cadets ou qu’il a reconduit France chez elle après avoir passé
la soirée en famille, et ce jusqu’à tout dernièrement malgré mes inquiétudes.
C’était un grand sensible aussi. Qui ne se rappelle pas de voir ces yeux se remplir de larmes lorsque l’on
faisait état de quelqu’un qui justement, avait subi une blessure aux yeux?
Il tentait d’être prévoyant en tout, ne laissant rien au hasard. Qui ne se rappelle pas du plan à l’échelle
qu’il a fait de l’appartement du Renoir alors qu’il essayait de maximiser chaque centimètre disponible. Il
aimait être organisé, à sa façon peut-être, mais être organisé néanmoins. Rien ne pouvait être
photocopié (photostaté comme il disait) assez de fois et rien n’était assez peu important pour ne pas se
mériter une place dans l’un de ces maints cartables. Même des découpures de journaux y trouvaient
place, qu’elles soient photocopiées ou en version originale.
Dans la mort, mon père a continué à m’apprendre sur la vie. À le voir se rendre malade à trop se soucier
des êtres qui lui étaient chers, j’ai appris qu’il ne fallait pas que je me responsabilise des malheurs qui ne
sont pas miens. Mais aussi, j’ai appris l’importance de s’accrocher à la vie tant qu’il y a de l’espoir, ne
serait-ce qu’afin d’obtenir des moments privilégiés tels que ceux que j’ai eus avec lui lors dès deux
dernières semaines.
Enfin Papa, je te remercie.
Je te remercie d’avoir comblé maman d’autant d’amour tout au long de votre vie commune.
Merci de nous avoir donné vie à France et moi malgré les difficultés que vous avez éprouvées à avoir des
enfants.
Merci pour la dévotion sans bornes dont tu as su faire preuve envers nous, ta famille.
Merci d’avoir été un modèle exemplaire qui a fait la femme et l’homme que France et moi sommes
devenus.
En fin de compte, merci pour tout.
Papa, tu peux te reposer maintenant et ne penser qu’à toi.
Ville St-Laurent, le 26 février 2011