La société OMEIFRA AFRIQUE SA - Tribunal de Commerce d`Abidjan

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La société OMEIFRA AFRIQUE SA - Tribunal de Commerce d`Abidjan
KF/KB/OE
REPUBLIQUE DE CÔTE D’IVOIRE
------------------COUR D’APPEL D’ABIDJAN
--------------TRIBUNAL DE COMMERCE D’ABIDJAN
--------------RG 921/2015
------------JUGEMENT CONTRADICTOIRE
AVANT DIRE DROIT
DU 04/06/2015
----------------Affaire
1- Monsieur KOUADIO Konan
Jérôme
2- Monsieur Claude Fernand
ROUGEOT
3- La société OMEIFRA AFRIQUE SA
(Maître KOUASSI Kouadio Pierre)
Contre
1- La société Civile Immobilière
NADER dite SCI NADER
(Maître KAMIL Tarek)
2- Monsieur HOUINSSOU Brice
(Maître VIERA Georges Patrick KADER)
3- Monsieur GUEYE Zako Edouard
----------------DECISION
Contradictoire
Rejette l’exception d’incompétence ;
AUDIENCE PUBLIQUE ORDINAIRE DU 04 JUIN 2015
Le Tribunal de Commerce d’Abidjan, en son audience publique
ordinaire du jeudi quatre juin de l’an deux mil quinze tenue au
siège dudit Tribunal, à laquelle siégeaient :
DOCTEUR KOMOIN FRANCOIS, Président du Tribunal ;
Messieurs KACOU Bredoumou Florent, N’GUESSAN
Gilbert, René DELAFOSSE, FOLOU Ignace, AMUAH David
et Madame KOUASSI Amenan Hélène épouse DJINPHIE,
Assesseurs,
Avec l’assistance de Maître ANGUI Atsé, Greffier ;
A rendu le jugement dont la teneur suit dans la cause entre :
1- Monsieur KOUADIO Konan Jérôme, né le 1er janvier
1957 à Tiebissou (Côte d’Ivoire), Administrateur Général
de la société OMEIFRA AFRIQUE SA, de nationalité
Ivoirienne, demeurant à Abidjan ;
2- Monsieur Claude Fernand ROUGEOT, né le 29
novembre 1941 à Paris 14eme Arrondissement
(France), Directeur Général de la société OMEIFRA
AFRIQUE SA, de nationalité Française, 04 BP Abidjan
04, tél : 05 60 68 10, demeurant à Abidjan résidence les
Harmonies, 2eme étage N°21 ;
3- La société OMEIFRA AFRIQUE SA, au capital social
de 100.000.000 de francs CFA, dont le siège est à
Abidjan, boulevard de Marseille, rue des Néfliers, 01 BP
4073 Abidjan 01 ;
Se déclare compétent ;
Demandeurs, représentés par Maître KOUASSI Kouadio
Pierre, Avocat à la Cour d’Appel D’Abidjan, y demeurant
Sursoit à statuer jusqu’à ce que la Cour
Abidjan zone 4C, rue du Docteur Calmette NVF, 16 BP 1575
d’Appel d’Abidjan vide sa saisine ;
Abidjan
16,
tél/fax :
21
24
08
63,
email :
[email protected] ;
Réserve les dépens.
D’une part ;
Et ;
1- La société Civile Immobilière NADER dite SCI
1
NADER, au capital social de 1.000.000 de francs CFA
ayant son siège social à Abidjan-marcory zone 3, rue du
canal, lot N°09, 01 BP 230 Abidjan 01 ;
Défenderesse, représentée par Maître KAMIL Tarek, Avocat à
la Cour ;
2- Monsieur HOUINSSOU Brice, majeur de nationalité
Ivoirienne, 01 BP 4073 Abidjan 01 ;
Défendeur, représenté par Maître VIERA Georges Patrick
KADER, Avocat à la Cour ;
Monsieur GUEYE Zako Edouard, majeur de nationalité
Ivoirienne ;
Défendeur ;
D’autre part ;
Enrôlée pour l’audience du jeudi 12 mars 2015, l’affaire a été
appelée et renvoyée au 19 mars 2015. A cette date, le tribunal
procédant à la conciliation des parties en a constaté l’échec, a
ordonné l’instruction de la procédure confiée au juge
TIENDAGA Gisèle et renvoyé la cause à l’audience publique
du 30 avril 2015. Cette mise en l’état a été clôturée par
l’ordonnance N°571/2015 du 28 avril 2015. A cette audience
publique, ladite affaire a été mise en délibéré pour décision
être rendue le 28 mai 2015, prorogé au 04 juin 2015.
Advenue cette date, le Tribunal a vidé son délibéré comme
suit ;
LE TRIBUNAL
Vu les pièces du dossier ;
Vu l’échec de la tentative de conciliation ;
Ouï les parties en leurs moyens et prétentions ;
Après en avoir délibéré conformément à la loi ;
FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES
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Par exploit d’huissier en date du 14 février 2015 Monsieur
KOUADIO Konan Jérôme, Monsieur Claude Fernand
ROUGEOT et la société OMEIFRA AFRIQUE ont assigné la
Société Civile Immobilière NADER dite SCI NADER,
Monsieur HOUINSSOU Brice et Monsieur GUEYE Zako
Edouard à comparaître le 12 mars 2015 devant le Tribunal de
ce siège à l’effet de s’entendre :
-
Déclarer nulle et de nul effet la vente opérée par
Messieurs HOUINSSOU Brice et GUEYE Zako
Edouard, anciens dirigeants de la société OMEIFRA
AFRIQUE au profit de la SCI NADER portant sur
l'immeuble formant le lot n° 344 du lotissement de
Marcory zone industrielle 4/C, île de Petit-Bassam,
faisant l'objet du Titre foncier n° 2080 de la
circonscription foncière Bingerville, siège social de la
société OMEIFRA AFRIQUE ;
-
Ordonner par conséquent et sans délai leur
déguerpissement tant de leurs personnes, de leurs
biens que de tous occupants de leurs chefs ;
-
Condamner en outre les défendeurs aux dépens.
A l’appui de son action, les demandeurs exposent que
monsieur Claude Fernand ROUGEOT était créancier de CKG
HOLDING S.A., condamnée par l'arrêt social contradictoire
n°815 du 24 juillet 2008 de la Cour d'Appel d'Abidjan à lui
payer la somme de Vingt Trois Millions Quatre Cent Vingt Neuf
Mille (23.429.000) Francs CFA ;
Que le recouvrement de ladite créance étant en péril, il a fait
procéder suivant procès-verbal en date du 11 avril 2013 à une
saisie des droits d'associés et des valeurs mobilières de toutes
les actions de CKG HOLDING S.A., son débiteur, dans le
capital social de la société OMEIFRA AFRIQUE S.A., tiers
détenteur, soit 70% dudit capital social ;
Que conformément à la loi, les actions susindiquées ont été
mises en vente aux enchères et adjugées à Monsieur
KOUADIO Konan Jérôme ainsi que le prouve l’attestation de
vente délivrée à celui-ci par le commissaire-priseur ;
Qu’en sa qualité de nouvel actionnaire majoritaire de la société
OMEIFRA AFRIQUE S.A Monsieur KOUADIO Konan Jérôme a
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obtenu de la juridiction présidentielle du Tribunal de Commerce
d'Abidjan, l’ordonnance de référé n° 1169/ 14 du 07 mai 2014
aux fins de désignation d'un mandataire judiciaire en vue de
convoquer une assemblée générale extraordinaire des
actionnaires de ladite société ;
Qu'en exécution de cette décision, Monsieur DO REGO Serge
Adolphe, agissant en qualité de mandataire judiciaire, a
convoqué l'assemblée générale extraordinaire en date du 10
juin 2014 de la société OMEIFRA AFRIQUE S.A., qui, après
délibération, a autorisé :
1- la nomination de Monsieur KOUADIO Konan Jérôme en
qualité d'Administrateur Général de la société OMEIFRA
AFRIQUE S.A.;
2- la révocation de Monsieur HOUINSSOU Brice en tant que
Directeur Général;
3- la nomination de Monsieur Claude Fernand ROUGEOT en
qualité de nouveau Directeur Général de la société OMEIFRA
AFRIQUE S.A., avec tous les pouvoirs prévus par les statuts ;
Que depuis l'acquisition des actions de la société OMEIFRA
AFRIQUE S.A Monsieur KOUADIO Konan Jérôme est devenu
l'actionnaire majoritaire, et partant copropriétaire de plein droit
de tous les biens tant mobiliers qu'immobiliers de ladite
société ;
Que cependant, et contre toute attente, alors qu'il était
désormais en possession desdits droits, grande fut sa surprise
de constater que l'immeuble formant le lot n° 344 du
lotissement de Marcory zone industrielle 4/C, île de PetitBassam, faisant l'objet du Titre foncier n° 2080 de la
circonscription foncière Bingerville, propriété et siège social de
la société OMEIFRA AFRIQUE S.A, a été vendu à la SCI
NADER ;
Que cette vente en date du 24 avril 2013 s'est faite en violation
de la loi et des droits des demandeurs ;
Qu’en effet, la saisie en date du 11 avril 2013 sur les actions et
les valeurs mobilières détenues par la société CKG HOLDING
S.A dans le capital de la société OMEIFRA AFRIQUE S.A a
rendu indisponibles les droits d'associés portant tant sur les
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biens mobiliers qu'immobiliers appartenant au débiteur saisi en
l'occurrence la société CKG HOLDING S.A, de sorte que toute
transaction mobilière ou immobilière ultérieure devenait
purement et simplement nulle et de nul effet ;
Qu’en l'espèce, il est constant que la vente alléguée est
intervenue le 24 avril 2013, bien après la saisie susindiquée
pratiquée par monsieur Claude Fernand ROUGEOT ;
Qu'ainsi, la société OMEIFRA AFRIQUE S.A dont les actions
et valeurs mobilières ont été majoritairement acquises par
Monsieur KOUADIO Konan Jérôme ne pouvait en
connaissance de cause valablement procéder à une telle
transaction immobilière au profit de la SCI NADER ;
Que la vente de l'immeuble ainsi opérée en faveur de la SCI
NADER par les soins de Messieurs HOUINSSOU Brice et
GUEYE Zako Edouard, anciens dirigeants de la société
OMEIFRA AFRIQUE S.A, est nulle ;
Qu’ils sollicitent par conséquent le déguerpissement de la SCI
NADER des lieux tant de sa personne, de ses biens que de
tout occupant de son chef ;
Que sur l’exception d’incompétence soulevée par la SCI
NADER, il s'infère de l'article 3 de l'acte Uniforme portant sur le
droit commercial général que la vente du fonds de commerce
est un acte de commerce par nature ;
Qu'en l'espèce, la vente du siège social, représentant le fonds
de commerce de la société OMEIFRA AFRlQUE, constitue
inéluctablement un acte de commerce par nature tel que défini
par l'Acte uniforme précité ;
Qu’en conséquence, la juridiction compétente pour connaitre
de la présente cause est, le tribunal de céans conformément
aux dispositions de l'article 7 alinéa 3 de la décision N°01 /PR
du 11 janvier 2012 portant création, organisation et
fonctionnement des tribunaux de commerce ;
Qu’en outre, la présente action a pour objet l'annulation de la
vente frauduleuse de l'immeuble opérée par les ex-dirigeants
de la société OMEIFRA AFRlQUE SA ;
Que s'agissant de l'autorité de la chose jugée invoquée
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relativement au jugement n°521 CIV 3 F du 29 juillet 2014, il
est à préciser que Monsieur KOUADIO Konan Jérôme a
interjeté appel contre cette décision depuis le 01 octobre 2014
et que cette cause est encore pendante devant la Cour d’Appel
d’Abidjan ;
Qu'il ne peut en aucun cas y avoir autorité de la chose jugée
car la décision n’est pas définitive ;
Que les conditions de l'autorité de la chose jugée tenant à
l'identité d'objet, de cause et des parties ne sont guère
remplies en l’espèce ;
Qu'en ce qui concerne le défaut d'intérêt à agir de Monsieur
Claude Fernand ROUGEOT, la société OMEIFRA AFRIQUE
SA, anciennement avec conseil d'administration, est devenue
suivant procès-verbal de constat en date du 16 mars 2015, soit
bien avant l'exploit d'assignation en annulation de vente
immobilière du 24 février 2015, société OMEIFRA AFRIQUE
SA avec administrateur général ;
Que c'est en cours d'instance que la qualité de Monsieur
Claude Fernand ROUGEOT a été modifiée ;
Que la nullité de l'exploit d'assignation du 24 février 2015 pour
violation des dispositions de l'article 251 alinéa 2 du code de
procédure civile, commerciale et administrative invoquée par la
défenderesse ne peut prospérer ;
Qu’en conséquence, l’action des demandeurs ne peut être
déclarée irrecevable ;
En réplique, la SCI NADER soulève in limine
l’incompétence du Tribunal de Commerce d’Abidjan ;
litis,
Qu’en effet, elle invoque la décision RG n°1259/13 en date du
28 août 2013 rendue par le juge des référés du Tribunal de
céans qui s’est déclaré incompétent pour connaître de l’action
en expulsion initiée par ladite société contre la société
OMEIFRA AFRIQUE ainsi que l'existence d'une clause
compromissoire attributive de juridiction contenue dans l’acte
de vente passé entre la SCI NADER et la société OMEIFRA
AFRIQUE donnent compétence exclusive au Tribunal de
Première Instance d’Abidjan pour l’interprétation et l’exécution
du contrat liant les parties ;
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Que par ailleurs, Monsieur KOUADIO Konan Jérôme est
intervenu volontairement dans la procédure initiée par la SCI
NADER contre la société OMEIFRA AFRIQUE SA devant le
Tribunal de Première Instance d'Abidjan ;
Que Monsieur KOUADIO Konan Jérôme a sollicité l'annulation
de la vente en date du 24 avril 2013 portant sur le lot n°344 du
lotissement de Marcory Zone industrielle 4/C, île de petit
Bassam, faisant l'objet du titre foncier n°2080 de la
circonscription foncière de Bingerville effectuée par la société
OMEIFRA AFRIQUE au profit de la SCI NADER ;
Qu'au soutien de son action celui-ci a invoqué le même
argument tiré de l'indisponibilité des actions acquises par lui au
cours de la vente aux enchères desdites actions saisies par
Monsieur Claude Fernand ROUGEOT ;
Que par jugement n° 521 CIV 3F du 29/07/2014, le Tribunal de
Première Instance d’Abidjan a déclaré irrecevable l'action de
Monsieur KOUADIO Konan Jérôme qui a relevé appel de cette
décision ;
Que l'affaire doit être appelée à l'audience de la Cour d'Appel
d'Abidjan du 17 avril 2015 ;
Que du fait de l'existence du jugement suscité, il y a lieu
d'opposer à Monsieur KOUADIO Konan Jérôme l'autorité de la
chose jugée en ce qui concerne la demande en annulation de
la vente et de déclarer subséquemment l'action de celui-ci
irrecevable ;
Que pour sa part, Monsieur Claude Fernand ROUGEOT agit
en son nom personnel pour voir annuler une vente conclue
entre la société OMEIFRA AFRIQUE SA et la SCI NADER ;
Qu’outre le fait que dans les sociétés anonymes avec
administrateur général, il n'existe pas de poste de directeur
général, Monsieur Claude Fernand ROUGEOT bien qu'étant
directeur général de la société OMEIFRA AFRIQUE depuis juin
2014, ne justifie pas en l'espèce l'existence d'un intérêt légitime
direct et personnel ;
Que son action est irrecevable pour cause de défaut d'intérêt
à agir en application des dispositions de l’article 3 du code de
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procédure civile, commerciale et administrative ;
Que par ailleurs, l’exploit d’assignation doit être déclarée nulle
pour violation des dispositions de l’article 251 alinéa 2 du code
de procédure précité dans la mesure où l'huissier de justice qui
a servi ledit exploit à mairie n’a pas avisé la SCI NADER par
lettre recommandée avec avis de réception ;
Que c’est de manière fortuite qu’elle a connu l'existence de la
présente procédure ;
Que l’acte d’assignation étant nul, l'action des demandeurs est
irrecevable ;
Qu’en tout état de cause, la décision de vente du terrain
litigieux a été prise en assemblée générale des actionnaires de
la société OMEIFRA AFRIQUE en date du 15 octobre 2012
après validation de la décision du conseil d'administration de
cette société ;
Que cette assemblée générale n'a jamais été remise en cause
selon les voies de droit commun ;
Que la vente de l'immeuble en date du 24 mars 2013 est
intervenue deux mois avant l’acquisition par voie de vente aux
enchères de 70% des actions de la société OMEIFRA
AFRIQUE par Monsieur KOUADIO Konan Jérôme opérée
seulement le 24 juin 2013 ;
Que Monsieur KOUADIO Konan Jérôme ne pouvait donc
prendre part à la prise des décisions collectives ayant autorisé
la vente de la parcelle litigieuse puisqu'il n'était pas actionnaire
au moment de ladite vente ;
Qu'aux termes de l'article 239 de l'Acte Uniforme portant
organisation des procédures simplifiées de recouvrement et
des voies d'exécution, « l'acte de saisie rend indisponible les
droits pécuniaires du débiteur.» ;
Que les actions confèrent à l'actionnaire des droits pécuniaires
et des droits sociaux ;
Que les droits pécuniaires permettent à chaque actionnaire de
recevoir sa quote-part des bénéfices dont la société déciderait
la distribution sous forme de dividendes, ainsi que le cas
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échéant sa quote-part du patrimoine de la société en cas de
dissolution avec répartition des actifs restants après paiement
des dettes ;
Que les droits sociaux donnent, quant à eux, à l'actionnaire le
droit de participer aux décisions de l'assemblée générale de la
société par le biais du vote ;
Que si la saisie des actions rend indisponible les droits
pécuniaires des actionnaires qu'elle concerne, elle ne les prive
pas de leur droit de vote ;
Que c'est par décision d'une assemblée générale
extraordinaire tenue le 15 octobre 2012 que les actionnaires de
la société OMEIFRA AFRIQUE ont décidé de la vente du
terrain litigieux ;
Que cette assemblée générale n'a jamais été attaquée en
annulation par Monsieur KOUADIO Konan Jérôme;
Que c'est donc en vain que se prévalant de sa prétendue
récente qualité d’actionnaire majoritaire et de propriétaire des
actions des deux sociétés actionnaires de la société OMEIFRA
AFRIQUE, Monsieur KOUADIO Konan Jérôme tente de
remettre en cause la vente régulière qui s'est opérée entre
cette société et la SCI NADER ;
Que l'argument tiré de l'indisponibilité des actions de la société
OMEIFRA AFRIQUE étant inopérant, les demandeurs doivent
être déboutés de leur demande en annulation de la vente et en
revendication de propriété. ;
Que partant, l'occupation des lieux par la société SCI NADER
est justifiée, de sorte que son déguerpissement du site sollicité
par les demandeurs n’est pas fondé ;
SUR CE
EN LA FORME
Sur le caractère de la décision
Monsieur GUEYE Zako Edouard n’a pas été assigné à
personne. Il n’a pas conclu et n’a pas fait valoir à un
quelconque moment de la procédure ses moyens. Il y a lieu de
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statuer par défaut à son égard ;
En revanche, la SCI NADER a conclu et Monsieur
HOUINSSOU Brice a été représenté. Il convient de statuer
contradictoirement à leur égard ;
Sur le taux de ressort
L’article 8 de la loi organique n°2014-424 du 14 juillet 2014
portant création, organisation et fonctionnement des juridictions
de commerce dispose que : « Les Tribunaux de commerce
statuent :
-
en premier ressort, sur toutes les demandes dont
l’intérêt du litige est supérieur à un milliard de francs
CFA ou est indéterminé ;
-
en premier et dernier ressort, sur toutes les demandes
dont l’intérêt du litige n’excède pas un milliard de francs
CFA ».
En l’espèce, l’intérêt du litige est indéterminé puisque les
demandeurs agissent en annulation d’une vente immobilière,
en revendication de propriété et en déguerpissement. Il
convient par conséquent de statuer en premier ressort
conformément aux dispositions de l’article 8 susénoncé.
Sur la compétence
La SCI NADER soutient que le Tribunal de Commerce de ce
siège est incompétent pour connaître de l’action en annulation
de la vente au motif que ladite vente effectuée par la société
OMEIFRA AFRIQUE n’est ni un acte de commerce par nature
ni un acte de commerce par accessoire et que la convention
liant les parties comporte une clause compromissoire.
Le Tribunal relève que suivant ordonnance en date du 28 août
2013 rendue par la juridiction présidentielle de ce siège dont la
SCI NADER fait sienne les motifs , le juge des référés s’est
déclaré incompétent pour connaître de la demande en
expulsion initiée par celle-ci à l’encontre de la société
OMEIFRA AFRIQUE en expliquant que la vente immobilière
sur laquelle la société immobilière fondait son action n’est pas
un acte de commerce.
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En l’espèce, il ressort des pièces du dossier que les
demandeurs sollicitent la nullité de la même vente immobilière
conclue entre et la SCI NADER et la société OMIEFRA
AFRIQUE faisant valoir que la saisie en date du 11 avril 2013
sur les actions et les valeurs mobilières détenues par la société
CKG HOLDING S.A. dans le capital de la société OMEIFRA
AFRIQUE a rendu indisponible les droits d'associés afférents à
ces actions, de sorte que toute transaction mobilière ou
immobilière postérieure à cette saisie et portant sur les actifs
de la société OMEIFRA AFRIQUE ne pouvait être valablement
décidée sans l’accord de Monsieur KOUADIO Konan Jérôme,
actionnaire majoritaire de ladite société suite à l’acquisition
desdites actions à la suite d’une vente aux enchères publiques.
Il s’ensuit que l’action en nullité est fondée sur l’inobservation
des règles de prise de décision au sein d’une société
anonyme ; les demandeurs estimant que la vente immobilière
querellée a été opérée en fraude aux droits d’un actionnaire.
Dès lors, le litige se rapportant à la contestation d’une décision
d’un organe d’une société commerciale, il relève de la
compétence du Tribunal de Commerce conformément aux
dispositions de l’article 7 de la loi organique n°2014-424 du 14
juillet 2014 portant création, organisation et fonctionnement
des juridictions de commerce.
Il est constant que l’acte de vente en date du 24 avril 2013
conclu entre la SCI NADER et la société OMEIFRA AFRIQUE
stipule en son titre intitulé "Attribution de juridiction" que « pour
le règlement de tout différend qui pourrait intervenir entre elles
à l'occasion de la signature, de l'interprétation ou de l'exécution
des présentes et de leurs suites, les parties s'en remettent à la
compétence exclusive du tribunal de première instance
d'Abidjan-Plateau».
Il s’ensuit que contrairement à ce que prétendent les
demandeurs, cette stipulation ne prévoit nullement une clause
compromissoire.
En effet, la clause compromissoire est celle par laquelle les
parties s’engagent pour les différends qui surgiraient entre
elles dans l’exécution de leur contrat à recourir à l’arbitrage,
mode de règlement extra judiciaire des litiges.
En l’espèce, les parties ont décidé de soumettre le règlement
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de leurs litiges contractuels «à la compétence exclusive du
Tribunal de Première Instance d’Abidjan Plateau ».
Elles ont ainsi inséré dans leur contrat une clause attributive de
compétence à une juridiction étatique et non une clause
compromissoire donnant compétence à une juridiction
arbitrale.
Cette clause attributive de compétence susindiquée est
reste nulle dans la mesure où elle viole les règles
compétence d’attribution d’ordre public du Tribunal
Commerce de ce siège conformément à l’article 9 du code
procédure civile, commerciale et administrative.
du
de
de
de
La convention des parties ne contenant pas de clause
compromissoire et la clause attributive de juridiction étant nulle,
le moyen invoqué par la SCI NADER doit être par conséquent
rejeté.
Il suit de tout ce qui précède que l’exception d’incompétence
soulevée par la SCI NADER n’est pas fondée et doit être
rejetée.
Il sied en conséquence de dire que le Tribunal de Commerce
de ce siège est compétent pour connaître du présent litige.
Sur la recevabilité
L’action des demandeurs est régulière. Elle est donc
recevable.
AU FOND
Il est constant que par exploit d'huissier de Justice en date du
16 janvier 2014, Monsieur KOUADIO Konan Jérôme est
intervenu volontairement dans la procédure en expulsion initiée
par la SCI NADER contre la société OMEIFRA AFRIQUE
devant le Tribunal de Première Instance d'Abidjan pour
solliciter l'annulation de la vente immobilière du 24 avril 2013
conclue entre les deux sociétés au motif qu’antérieurement à
l’acquisition des actions et valeurs mobilières par la société
CKG HOLDING S.A. dans le capital de la société OMEIFRA
AFRIQUE par ses soins, une saisie pratiquée sur lesdites
actions a rendu indisponible les droits d'associés afférents, de
sorte que toute transaction mobilière ou immobilière ultérieure
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devenait nulle.
Par jugement en date du 29 juillet 2007, le Tribunal de
Première Instance d’Abidjan Plateau a déclaré la demande de
Monsieur KOUADIO Konan Jérôme irrecevable pour défaut de
qualité pour agir en indiquant que la vente des actions de la
société CKG HOLDING S.A. dans le capital de la société
OMEIFRA AFRIQUE effectuée au profit de celui-ci a été
annulée par la Cour d’Appel d’Abidjan suivant arrêt en date du
30 juillet 2013.
Monsieur KOUADIO Konan Jérôme a relevé appel du
jugement du Tribunal de Première Instance d’Abidjan
susindiqué par acte du 1er octobre 2014.
Il ressort de la lecture dudit acte d’appel que Monsieur
KOUADIO Konan Jérôme sollicite l’infirmation du jugement
entrepris et demande à la Cour de statuer à nouveau et de
juger qu’il a bien qualité pour agir et que son action en nullité
de la vente immobilière opérée par la société OMEIFRA
AFRIQUE au profit de la SCI NADER est bien fondée et
d’annuler ladite vente qui est nulle et de nul effet.
Les parties indiquent dans leurs écritures que cette procédure
est pendante devant la Cour ; celle-ci devant être évoquée le
17 avril 2015 ; il n’est pas établi qu’elle ait à ce jour vidé sa
saisine.
Or le Tribunal constate qu’il est actuellement saisi par
Monsieur KOUADIO Konan Jérôme de la même demande en
nullité de la vente immobilière conclue par la SCI NADER et la
société OMEIFRA portée par celui-ci devant la Cour d’Appel
d’Abidjan, assise sur les mêmes arguments.
Il y a lieu dès lors dans le souci d’une bonne administration de
la justice de surseoir à statuer en attendant que la Cour
d’Appel vide sa saisine pour tirer les conséquences de l’arrêt
qu’elle sera amenée à rendre.
Sur les dépens
L’instance n’étant pas achevée ; il y a lieu de réserver les
dépens.
PAR CES MOTIFS
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Statuant publiquement, contradictoirement et en premier
ressort ;
Rejette l’exception d’incompétence ;
Se déclare compétent ;
Sursoit à statuer jusqu’à ce que la Cour d’Appel d’Abidjan vide
sa saisine ;
Réserve les dépens.
Ainsi fait, jugé et prononcé publiquement les jour, mois et an
que dessus ;
ET ONT SIGNE LE PRESIDENT ET LE GREFFIER. /.
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