Prothèse totale de genou par voie subvastus - mini

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Prothèse totale de genou par voie subvastus - mini
Prothèse totale de genou par voie subvastus
Série comparative de 136 prothèses totales de genou
Résultats et revue de la littérature
Docteur François PRIGENT
Le choix de la voie d’abord est un temps essentiel dans la pose d’une prothèse de genou.
L’approche mini invasif subvastus se caractérise par une incision courte, un respect complet
des muscles de la cuisse et notamment du muscle vaste interne ainsi qu’une réfection de la
membrane synoviale.
La récupération plus rapide de la fonction articulaire, retrouvée dans de nombreuses études
en langue Anglaise, est à l’ origine du développement actuel de cette technique décrite
récemment aux USA (SVA) sous le nom de « mini-subvastus » (1,2). L’étude présentée ici
confirme ces résultats.
Sa pratique nécessite une connaissance parfaite de l’anatomie de la région et des méthodes
précises d’exposition (3, 4, 5, 6, 7,8).
METHODE et RESULTATS
Cette étude compare une première série prospective de 68 patients opérés consécutivement
par le même chirurgien entre janvier 2007 et janvier 2008 à une deuxième série de 68 patients
opérés par une voie parapatellaire standard, entre octobre 2004 et décembre 2005, avec
ouverture musculaire et sans réfection de la membrane synoviale.
Les critères retenus sont l’âge du patient, son poids, la durée opératoire, la qualité du muscle
vaste interne en fin d’intervention, le saignement peri et post opératoire, la douleur post
opératoire, la mobilité articulaire en post opératoire immédiat, à une semaine, à un mois et
trois mois, le contrôle radiologique de la position des implants.
Seules les interventions de première intention ont été retenues. Sont exclues les genoux
présentant une flexion limitée à 90° ou une rotule basse (patella baja).
Au vu des résultats ces deux groupes sont homogènes quant à l’âge et le poids : 72.1 ans
versus 74.2 ; 68.1 Kg versus 70.1 Kg.
La durée d’intervention par voie subvastus SVA est supérieure de 10 minutes à la voie
parapatellaire standard PPA : 83 minutes versus 73 minutes. Cette différence n’est pas
statistiquement significative (t=1,604 P=0,114).
A la fin de l’intervention SVA le muscle vaste interne était intact dans 94% des cas.
Le saignement postopératoire dans les 48 premières heures était de 610 ml dans le premier
groupe SVA (de 330 à 1050 ml) et de 690 ml dans l’abord classique PPA (de 330 à 1100 ml)
sans différence significative (t=1770, P=0,073).
Les patients du groupe SVA ont utilisé moins de produits morphiniques que ceux du groupe
PPA. Cette différence est à interpréter avec prudence de par l’utilisation systématique d’une
analgésie par bloc crural dans la voie subvastus.
L’étude fonctionnelle de la force et de la mobilité, montrait des résultats statistiquement
différents entre les deux abords. Dans le groupe SVA le genou récupérait une extension en
2,9 jours (entre 2 et 6 jours). Ce délai était de 4,8 jours pour le groupe PPA (entre 2 et 9
jours) (t=3.618, P=0.001). Au testing articulaire, il était constaté une même différence sur la
mesure de la flexion articulaire entre le groupe SVA et le groupe PPA. Celle-ci était de 15° à
une semaine, de 8° à un mois (1 semaine : 85° versus 70°; 1 mois : 102° versus 94°). A trois
mois la flexion articulaire était comparable entre les deux groupes (109° - 105°).
La mesure radiologique de l’axe fémoro tibial était identique dans le groupe SVA et le groupe
PPA (valgus 3°2 - valgus 2°8,).
Deux patients dans chaque groupe ont été mobilisés sous anesthésie générale avant le
premier mois. Dans ces deux séries aucune infection n’était retrouvée, de même qu’aucune
fracture de rotules ou migration des implants n’étaient recensée au décours de la première
année.
DISCUSSION
L’étude présente met en évidence les avantages apportés sur la récupération rapide de la
fonction du genou par l’approche anatomique mini-subvastus avec un taux de complication
similaire à la voie standard.
De la même manière, ces dernières années, de nombreuses publications sont venues
renforcer les points forts de l’abord subvastus. Plusieurs séries randomisées (9,10, 11, 12,
13) et prospectives (14, 15, 16, 17, 18, 19) rapportent une récupération plus rapide de la
fonction dans la voie subvastus comparée à la voie standard. Pour Schroer l’extension
complète du genou est obtenue dès les premiers jours chez 83% des patients lorsque le
vaste est respecté (14). Pour Roysam la flexion est supérieure de 20° à la voie standard à
une semaine (9). Cette avance décroit progressivement pour s’égaliser après la douzième
semaine (19).
Dans certaines de ces publications la douleur post opératoire, calculée sur la consommation
d’antalgiques, est moindre dans l’abord subvastus les sept jours suivants l’opération (12,
18,19). Toutefois les progrès de l’analgésie tronculaire rendent difficile l’interprétation de ces
résultats qui ne sont pas retrouvés par tous (13).
En opposition avec les bons résultats fonctionnels de la voie subvastus certains auteurs
soulignent le moins bon contrôle visuel lié à l’abord mini invasif ainsi que les difficultés à
subluxer la rotule (20,21). Pour eux ces contraintes rendent aléatoire le positionnement de la
prothèse. Cependant de nombreuses séries ne trouvent aucune différence dans le
positionnement des implants liée au type d’approche (12, 13, 15, 18, 19,22), résultats
confortés par l’étude randomisée de Weinhardt (23).
Répondant aux mêmes détracteurs plusieurs études rapportent un risque de complication
comparable dans les deux abords (16, 18,10, 24). Cependant Schroer nuance ces résultats.
Dans un travail récent sur 600 prothèses opérées par voie subvastus versus 150 prothèses
standards aucun lien n’est retrouvé entre la voie d’abord et le taux de complication toutefois la
série subvastus présente une diminution du nombre de complication grave de 16% toutes les
50 prothèses (25). Ces résultats, liés à la phase d’apprentissage, renvoient aux conseils de
prudence précédemment exposés.
En parallèle de ces données cliniques une réflexion particulière mérite d’être ouverte sur le
rôle du vastus medialis dans le réglage du jeu patellaire.
En effet, en actif, le muscle VMO a une double action dans l’extension du genou par ses fibres
proximal et dans la médialisation de la rotule par son contingent de fibres distales (26).
En sectionnant la plupart des structures stabilisatrices: vastus medialis et aileron médial, l’abord
para-patellaire standard perturbe l’équilibre patellaire (27). A l’opposé la voie subvastus conserve
l’intégralité du VMO et offre des repères simples pour la reconstruction de l’aileron médial.
Ce rôle de stabilisateur de rotule est évoqué par Maric dans la première série randomisée ou
les deux voies sont comparées. Le recentrage rotulien y est jugé satisfaisant pour 77% des
genoux opérés par voie standard versus 89% par voie subvastus (28).
A l’appui de ces premiers résultats plusieurs études comparatives retrouvent une plus
grande nécessité du release latéral dans l’abord parapatellaire medial. Pour Bingdelglass,
dans une série comparative de 89 patients, la fréquence du release latéral est de 51% en
standard versus 27% en subvastus (29). Pour Matsueda le recours au release passe de
67% à 37% entre les voies standard et subvastus dans une série comparative de 346
2
patients (169/167). Dans cette même série le contrôle radiographique du sixième mois
retrouve 63% de rotule centrée après un abord para patellaire versus 83% si l’attache du
VMO est conservée (30).
De son côté Ogata mesure une tension moindre des sutures de l’aileron medial dans l’abord
subvastus. Dans sa petite série un release externe est pratiqué sur 36% des genoux opérés
par voie standard versus 10% lorsque le VMO est respecté (31).
Un autre élément conservateur de cette voie est la réfection de la capsule articulaire. La
restauration du cul de sac synovial préserve les plans de glissements. Il est toutefois trop tôt
pour conclure à une incidence sur la mobilité articulaire post opératoire car il n’existe aucun
travail spécifique sur le sujet.
CONCLUSION
La technique mini-subvastus se caractérise par une épargne des éléments musculaires de la
cuisse (vaste interne) associé à la fermeture de la capsule articulaire.
Cette chirurgie nécessite des séquences opératoires bien réglées et un matériel adapté à la voie
mini-invasive le tout servie par une équipe chirurgicale bien rodée à ce type de pratique.
Son apprentissage progressif permet un bo positionnement des implants satisfaisant sans
augmentation du taux de complication.
En contrepartie la chirurgie subvastus permet une récupération plus rapide de la force et de
la mobilité associée à une diminution de la douleur postopératoire.
Cette chirurgie conservatrice concoure également à l’équilibre rotulien de façon active par
l’épargne du muscle vaste interne.
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