1013 L`effet boomerang des PDV « facultatifs »

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1013 L`effet boomerang des PDV « facultatifs »
Étude PRATIQUE SOCIALE
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L’effet boomerang des PDV
« facultatifs »
Émeric Jeansen,
maître de conférences HDR à l’université Panthéon-Assas (Paris II),
membre du conseil scientifique du cabinet Dupiré & Associés
Yannick Pagnerre,
maître de conférences à l’université Panthéon-Assas (Paris II),
membre du conseil scientifique du cabinet Dupiré & Associés
L’employeur qui envisage la rupture du contrat de travail de moins de dix salariés sur une même
période de trente jours peut être tenté de privilégier le volontariat. Nonobstant l’absence de
disposition spéciale en ce sens, il organise alors un plan de départs volontaires. Ce plan facultatif
suit un régime distinct de ceux constitués lorsque la mise en place d’un plan de sauvegarde de
l’emploi est obligatoire.
Pratique. – Nombreuses sont les entreprises qui envisagent le
départ volontaire de moins de dix salariés dans une même période
de trente jours ou dans une entreprise de moins de cinquante
salariés 1. Elles offrent aux salariés candidats au départ les mêmes
avantages que ceux octroyés dans un plan de départ volontaire
soumis à la rédaction d’un plan de sauvegarde de l’emploi. À cette
fin, elles organisent, à titre facultatif, un PDV (sur ce point, C. trav.,
art. L. 1233-3, al. 2, et L. 1233-61). Leur mise en place est néanmoins
soumise à des contraintes juridiques souvent sous-estimées, faute de
maîtriser suffisamment la nature (1) et le régime (2) des ruptures
amiables inscrites dans ces PDV facultatifs.
1. Nature des ruptures amiables inscrites
dans un PDV « facultatif »
Dès lors qu’elles s’inscrivent dans un processus de réduction des
effectifs motivé par des raisons économiques, les ruptures de moins
de dix contrats de travail sur une même période de trente jours
empruntent en principe la forme d’une rupture conventionnelle (A)
ou peuvent être assimilées par l’employeur à des ruptures issues d’un
plan de départ volontaire (B).
rupture, même « lorsqu’elles constituent une modalité d’un processus de réduction des effectifs pour une cause économique » 2.
La rupture conventionnelle, une voie imposée. – La loi exclut
l’application du régime de la rupture conventionnelle aux ruptures
de contrats de travail résultant de « plans de sauvegarde de l’emploi
dans les conditions définies par l’article L. 1233-61 » du Code du
travail (C. trav., art. L. 1237-16, 2°), de telles ruptures étant « déjà
encadrées par les dispositions du PSE » 3. La mise à l’écart des
dispositions relatives à la rupture conventionnelle permet « de
conserver leur pleine autonomie à ces procédures, qui ne
concernent, par construction, que les entreprises d’une certaine
taille, font l’objet d’accords collectifs ou du moins de documents
soumis à consultation » et de préserver les « exonérations fiscales et
sociales dérogatoires qu’il convient de ne pas impacter » 4. Cette
exclusion légale ne s’applique pas à un PDV facultatif. L’obligation
d’établir un PSE ne concerne en effet que « les entreprises d’au moins
cinquante salariés, lorsque le projet de licenciement concerne au moins
dix salariés dans une même période de trente jours » (C. trav.,
art. L. 1233-61). Hors du périmètre de mise en œuvre des PSE, et
sauf dispositions légales contraires 5, la rupture du contrat de travail
par accord des parties ne peut intervenir que dans les conditions
A. - Exclusion légale du PDV
La rupture conventionnelle, une voie autorisée. – Lorsque
l’employeur envisage, pour un motif économique, la rupture
amiable d’un nombre de contrats de travail inférieur à dix, nulle
disposition légale ne lui interdit de conclure des conventions de
1. Ce qui est souvent le cas de certaines filiales de groupe de dimension
nationale ou internationale.
2. Cass. soc., 29 oct. 2013, n° 12-15.382 : JurisData n° 2013-023905 ; JCP S
2013, Act. 447 ; RDT 2013, p. 764, note Y. Leroy. – Cass. soc., 9 mars 2011,
n° 10-11.581 : JurisData n° 2011-002913 ; Bull. civ. 2011, V, n° 70 ; JCP S
2011, 1200, note F. Favennec-Héry. – C. trav., art. L. 1233-3, al. 2.
3. Rapp. Sénat n° 306, 30 avr. 2008, art. 5, II, P. Bernard-Reymond.
4. Rapp. AN n° 789, 8 avr. 2008, art. 5, D. Dord.
5. Cf. en cas de ruptures amiables s’inscrivant dans un accord GPEC (C. trav.,
art. L. 1237-16, 1°).
JCP / LA SEMAINE JURIDIQUE – ÉDITION SOCIALE N° 3. 20 JANVIER 2015
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prévues pour la rupture conventionnelle 6. Les ruptures amiables
pour motif économique de moins de dix salariés dans une même
période de trente jours supposent nécessairement la conclusion de
ruptures conventionnelles soumises aux articles L. 1237-11 et suivants du Code du travail. À défaut, les sanctions encourues sont
sévères. L’absence d’homologation permet au salarié de demander la
poursuite du contrat de travail car les conventions n’ont pas
entraîné la rupture de ce dernier 7 ou la requalification de la rupture
en un licenciement sans cause réelle et sérieuse 8.
B. - Assimilation unilatérale au PDV
Une rupture ad hoc ? – Le souhait est parfois émis d’écarter le
régime de la rupture conventionnelle au profit d’une rupture ad hoc
s’insérant dans un plan de départ volontaire 9. Ce choix impose de
mettre en place un PSE puisque « l’employeur qui envisage de
supprimer de nombreux emplois pour motif économique est tenu
de respecter les dispositions d’ordre public des articles L. 321-1 et
suivants du Code du travail, peu important que ces emplois ne
soient supprimés que par la voie des départs volontaires dans le
cadre d’un accord collectif d’entreprise » 10. La mesure n’est, a
priori, pas illicite : la volonté unilatérale d’appliquer le régime du
PSE à un « petit licenciement collectif » est favorable au salarié dont
le contrat sera rompu 11. Mais en présence d’un licenciement
collectif de moins de dix salariés sur une période de trente jours, cet
engagement, qui impose de mettre en place un plan de reclassement
interne et externe au profit des salariés par voie négociée ou
unilatérale, de procéder à une information et une consultation
complètes des représentants du personnel et de recourir à une
homologation ou validation de la DIRECCTE, n’écarte nullement le
respect de la procédure individuelle de licenciement. Mutatis
mutandis, l’élaboration facultative d’un PDV n’exclut nullement
d’avoir à respecter le régime de la rupture conventionnelle. À défaut,
l’illicéité de la rupture amiable pourrait entraîner sa nullité et sa
requalification en licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse.
2. Régime des ruptures amiables
inscrites dans un PDV « facultatif »
En application de l’article L. 1233-3, alinéa 2, du Code du travail,
les ruptures conventionnelles reposant sur un motif économique ne
sont pas en principe soumises au régime des licenciements prononcés pour un tel motif. Cette exclusion – relative – affecte les
conditions (A) et les effets (B) des ruptures conventionnelles
s’inscrivant dans un PDV « facultatif ».
A. - Conditions des ruptures amiables
La nature économique du motif influence tant les conditions de
fond (1°) que les conditions procédurales de conclusion d’une
convention de rupture (2°).
6. Cass. soc., 15 oct. 2014, n° 11-22.251 : JurisData n° 2014-024074 ; JCP S
2014, 1436, note G. Loiseau, 2e esp. – CA Orléans, 3 juin 2014, n° 13/01582 ;
Cah. soc. barreau de Paris, déc. 2014, p. 682, note D. Chenu.
7. Cass. soc., 29 oct. 2013, n° 12-15.382, préc. note 2.
8. Cass. soc., 15 oct. 2014, n° 11-22.251, préc. note 6. – CA Orléans, 3 juin 2014,
n° 13/01582, préc. note 6.
9. Sur ce point, F. Favennec, note ss Cass. soc., 8 févr. 2012, n° 10-27.176 :
JurisData n° 2012-001657 ; JCP S 2012, 1167.
10. Cass. soc., 22 févr. 1995, n° 92-11.566 : JurisData n° 1995-000318 ; Bull. civ.
1995, V, n° 68 ; JCP G 1995, II, 22433, concl. Y. Chauvy.
11. Les conditions posées à l’article L. 1233-61 du Code du travail sont d’ordre
public social.
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1° Conditions de fond
Inscrite dans un PDV « facultatif », la rupture conventionnelle
suppose un consentement éclairé du candidat au départ (a) et
l’absence de fraude (b).
a) Consentement du candidat
Réticence dolosive. – En lui-même, un contexte économique
difficile pour l’entreprise n’exclut pas la rupture conventionnelle 12.
Mais l’employeur qui envisage, pour des motifs économiques, de
rompre des contrats de travail au moyen de ruptures conventionnelles est tenu d’une obligation de transparence : il doit informer les
salariés destinataires de l’offre de rupture de ces motifs 13. Si
l’employeur dissimule le motif économique et que le salarié apporte
la « preuve d’un détournement des règles de la procédure pour
licenciement économique » 14, la nullité de la rupture conventionnelle sera reconnue pour réticence dolosive, voire fraude. Au
contraire, l’information donnée aux salariés leur permet de consentir à la rupture conventionnelle en connaissance de cause en
négociant des mesures avantageuses ou de refuser la rupture au
profit d’un probable licenciement pour motif économique.
Erreur. – L’erreur n’est une cause de nullité de la convention que
si elle affecte la substance de la chose qui en est l’objet (C. civ.,
art. 1110). L’annulation de la convention de rupture est encourue
lorsque sa conclusion puise sa source dans une erreur du salarié
résultant « de la transmission, au cours de l’entretien, par
l’employeur, de renseignements manifestement erronés » qui ont
déterminé le salarié à signer, même si l’employeur n’avait pas
l’intention de le tromper 15.
Défaut d’information. – L’ANI du 11 janvier 2008 organise, en
son article 12, une obligation d’information à la charge de
l’employeur concernant la possibilité ouverte au salarié « de prendre
les contacts nécessaires, notamment auprès du service public de
l’emploi, pour être en mesure d’envisager la suite de son parcours
professionnel avant tout consentement ». Il résulte du défaut de
reprise de cette disposition par le législateur lors de la transposition
de l’accord que l’absence d’information du salarié « sur la possibilité
de prendre contact avec le service public de l’emploi en vue
d’envisager la suite de son parcours professionnel » n’affecte pas « la
liberté de son consentement » 16. Ainsi, le seul manquement à une
obligation d’information n’est pas une cause de nullité 17. Néanmoins, s’il est établi que la liberté de consentement du salarié a été
affectée par l’absence d’information sur la possibilité de contacter
Pôle emploi pour évoquer son parcours professionnel, la validité de
la rupture pourrait être mise ne cause. Particulièrement, dans un
PDV « facultatif », l’existence d’un projet professionnel du candidat
au départ est un élément déterminant de son consentement. En tout
état de cause, la violation de l’obligation d’information cause
nécessairement un préjudice au salarié.
b) Fraude de l’employeur
Rupture conventionnelle avant un transfert d’entreprise. – Les
ruptures conventionnelles pour motif économique ne doivent pas
s’inscrire dans le cadre d’un projet de transfert d’entreprise. La
12. CA Versailles, 6 mai 2014, n° 13/00414.
13. Cass. soc., 9 mars 2011, n° 10-11.581, préc. note 2. – Cass. soc., 29 oct. 2013,
n° 12-15.382, préc. note 2.
14. Cass. soc., 29 oct. 2014, n° 13-11.542.
15. Cass. soc., 5 nov. 2014, n° 13-16.372 : JurisData n° 2014-026655.
16. Cass. soc., 29 janv. 2014, n° 12-25.951 : JurisData n° 2014-001109 ; JCP S
2014, 1078, note G. Loiseau.
17. Rappr. Cass. com., 28 juin 2005, n° 03-16.794 : JurisData n° 2005-029185 ;
Bull. civ. 2005, IV, n° 140. – Cass. 1re civ., 31 oct. 2007, n° 05-15.601 :
JurisData n° 2007-041114 ; Bull. civ. 2007, V, n° 342 ; Contrats, conc. consom.
2008, comm. 34, note L. Leveneur.
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faculté de rompre un contrat par ce biais se heurte au caractère
d’ordre public de l’article L. 1224-1 du Code du travail auquel il ne
peut être dérogé par des conventions particulières 18. En outre,
l’exigence d’une cause licite (C. civ., art. 1131), qui prohibe la
rupture conventionnelle reposant sur un faux motif ou un motif
illicite, s’oppose à celle ayant pour motif le contournement de
l’article L. 1224-1 du Code du travail. Sur le modèle des licenciements prononcés par le cédant avant un transfert d’entreprise,
l’illicéité de la rupture conventionnelle emporterait sa nullité ou, du
moins, la rendrait sans effet 19.
Rupture conventionnelle à l’occasion d’un PSE. – L’existence
d’un projet de licenciement pour motif économique imposant la
mise en place d’un PSE interdit la signature d’une convention de
rupture à l’égard des salariés dont le licenciement est envisagé.
L’initiative de l’employeur serait frauduleuse comme ayant pour
objet de contourner les garanties offertes par le plan en termes de
reclassement interne ou externe 20. Toutefois, aucune fraude n’est
caractérisée lorsque le principe de la rupture du contrat était
antérieur à la mise en œuvre du plan de sauvegarde de l’emploi,
appréciée à la date de la première réunion d’information et de
consultation du comité d’entreprise 21.
2° Conditions de procédure
Régime du « petit licenciement collectif ». – Sur le fondement
de la législation nationale interprétée à la lumière de la directive
98/59 du 20 juillet 1998 concernant le rapprochement des législations des États membres relatives aux licenciements collectifs, la
Cour de cassation retient que les ruptures conventionnelles ayant
une cause économique et s’inscrivant dans un processus de réduction des effectifs dont elles constituent l’une des modalités, voire la
seule, sont prises en compte afin de déterminer la procédure
d’information et de consultation des représentants du personnel
applicable 22. Dès lors, l’employeur qui envisage la mise en place
d’un PDV facultatif est tenu de respecter une procédure mixte.
D’abord, il informe et consulte les représentants du personnel sur les
emplois concernés par le projet de réorganisation (C. trav.,
art. L. 1233-8 et s. – Sur l’information de l’autorité administrative,
C. trav., art. L. 1233-19, L. 1233-53 et L. 1233-56). L’irrégularité
affectant la procédure d’information et de consultation permet
seulement aux représentants du personnel d’obtenir la suspension
de la procédure, si elle n’est pas terminée ; à défaut, les salariés et les
représentants du personnel peuvent demander la réparation du
préjudice subi à ce titre 23. Une fois l’avis des représentants du
personnel émis, l’employeur suit la procédure de conclusion des
conventions de rupture et attend l’homologation a posteriori de la
DIRECCTE 24.
18. Cass. soc., 16 oct. 1980, n° 77-40.117 : Bull. civ. 1980, V, n° 743. – Cass. soc.,
30 avr. 2014, n° 12-35.219 : JurisData n° 2014-008567 ; JCP S 2014, 1340,
note C. Puigelier. – Cf. Cass. soc., 10 oct. 2006, n° 04-40.325 : Juris-Data
n° 2006-035346.
19. Rappr. CJCE, 12 mars 1998, aff. C-319/94. – Cf. Cass. soc., 11 mars 2003,
n° 01-41.842 : JurisData n° 2003-018196 ; Bull. civ. 2003, V, n° 86 ; Dr. soc.
2003, p. 474, rapp. P. Bailly.
20. CA Versailles, 6 mai 2014, n° 13/00414, « si les ruptures conventionnelles
pour motif économique ne sont pas prohibées, elles ne doivent pas avoir
pour effet de contourner les règles et garanties issues d’un plan de
sauvegarde de l’emploi ».
21. Rappr. Cass. soc., 3 déc. 2014, n° 13-21.983.
22. Cass. soc., 9 mars 2011, n° 10-11.581, préc. note 2.
23. C. trav., art. L. 1235-12. – Cf. Cass. soc., 7 avr. 2004, n° 02-17.128 : JurisData
n° 2004-023270.
24. Entretien préalable, délai de rétractation de 15 jours à la suite de la remise
de la convention, délai d’homologation d’au moins 15 jours (C. trav.,
art. L. 1237-12 et s.).
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Assimilation à un « grand licenciement collectif ». – Dans
l’hypothèse où l’employeur envisage, à titre facultatif, la mise en
œuvre d’un plan de sauvegarde de l’emploi, il doit respecter, avant la
conclusion définitive des conventions de rupture, les règles relatives
à l’information et à la consultation des représentants du personnel
(C. trav., art. L. 1233-28 et s.), l’élaboration conventionnelle ou
unilatérale d’un plan de reclassement externe 25 et la décision
administrative de validation ou d’homologation.
B. - Effets des ruptures amiables
Indemnisation et accompagnement. – L’exclusion du régime du
licenciement pour motif économique en cas de rupture conventionnelle n’est pas sans influence sur le traitement des indemnités de
rupture (1°) et des mesures sociales d’accompagnement (2°).
1° Indemnités de rupture
Cotisations sociales et forfait social. – Versées dans le cadre d’un
PSE, les indemnités de départ volontaire ne constituent pas une
rémunération entrant dans l’assiette de l’impôt sur le revenu (CGI,
art. 80 duodecies, 1, 2°). Elles sont exonérées de cotisations sociales
dans la limite d’un montant égal à deux fois le plafond annuel de
sécurité sociale. Par ailleurs, de telles ruptures amiables sont expressément exonérées du forfait social (CSS, art. L. 137-15, 3°). Mais
l’interprétation stricte des exonérations sociales, que respecte scrupuleusement le juge 26, écarte ces dispositions en présence d’indemnités versées dans le cadre d’un PDV « facultatif » 27. Ces indemnités
suivent le régime social des sommes versées dans le cadre d’une
rupture conventionnelle. Dès lors, elles sont exonérées :
- de cotisations sociales pour la partie de l’indemnité non
assujettie à l’impôt sur le revenu dans la limite de deux fois le
plafond annuel de sécurité sociale ;
- de CSG et de CRDS dans la limite du montant de l’indemnité
conventionnelle ou légale de licenciement.
Pour autant, le coût de la rupture est supérieur lorsqu’il
emprunte la voie de la rupture conventionnelle : la partie de
l’indemnité exonérée de cotisations sociales est assujettie au forfait
social (CSS, art. L. 137-15, 3°).
2° Mesures d’accompagnement
Mesures issues de la loi. – La proposition de congé de reclassement ou de contrat de sécurisation professionnelle ne peut être
présentée qu’aux salariés ayant signé des conventions de départ
volontaire intervenues dans le cadre d’un plan de sauvegarde de
l’emploi (C. trav., art. L. 1233-65 et s., art. L. 1233-71 et s.). A priori,
la rupture conventionnelle, mode autonome de rupture du contrat,
ne permet pas au salarié concerné de bénéficier du dispositif du CSP
(C. trav., art. L. 1233-3, al. 2). Mais si la rupture conventionnelle
intervient dans le cadre d’un PDV facultatif, les salariés devraient
retrouver le droit de bénéficier d’un congé de reclassement ou d’un
contrat de sécurisation professionnelle. La solution s’impose
puisque la présence d’un PDV implique celle d’un plan de sauvegarde de l’emploi. Une difficulté jaillit pour l’entreprise : son
25. La voie conventionnelle est cependant fermée dans les entreprises dépourvues de délégué syndical et celles de moins de cinquante salariés (C. trav.,
art. L. 1233-24-1).
26. Rappr. Cass. 2e civ., 7 oct. 2010, n° 09-12.404 : JurisData n° 2010-017676 ;
JCP E 2011, 1122, note G. Vachet ; JCP S 2010, 1488, note T. Tauran. – CE,
5 mai 2010, n° 309803 : JurisData n° 2010-006279 ; JCP E 2010, 1647, note
F. Douet.
27. Lettre-circ. ACOSS n° 2006-073 : « les indemnités versées aux salariés licenciés
pour motif économique lorsque le nombre de licenciements envisagé est
inférieur à 10 ne sont donc pas visées. Le régime social de ces indemnités est
celui applicable aux indemnités versées hors plan de sauvegarde de l’emploi ».
– Cf. CAA Marseille, 6 mai 2014, n° 11MA04331.
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Étude PRATIQUE SOCIALE
engagement unilatéral est inopposable à Pôle emploi. Sa qualité de
tiers à la relation contractuelle l’autorise à refuser de financer une
telle mesure (C. civ., art. 1165). In fine, son financement devrait
incomber exclusivement à l’employeur.
Mesures issues du plan. – Un PDV « facultatif » peut soumettre
l’éligibilité des candidats au départ volontaire à la présentation d’un
projet professionnel soumis à validation de l’employeur. Pour
accompagner ces projets, le plan doit contenir des aides à la
reconversion professionnelle permettant un développement des
compétences, voire une aide à la création ou à la reprise d’entreprise
(C. trav., art. L. 1233-62, 2°, 3°, 4° et 5°). L’inexécution de ces
avantages post-contractuels relève du droit commun de la responsabilité contractuelle 28.
Le régime social de ces aides pécuniaires et matérielles suit celui
des indemnités de rupture versées au salarié. L’addition des unes
(indemnités de départ volontaire) aux autres (aide à la mobilité
géographique, aide à la création d’entreprise...) permet de vérifier le
franchissement du seuil d’exonération. La fraction de ces sommes
inférieure à cette limite est soumise au forfait social ; l’éventuelle
fraction supérieure est soumise à cotisations sociales.
Conclusion. – Le principe de faveur sert de guide à celui qui, par
une stipulation conventionnelle, améliore les dispositions légales. La
mise en œuvre d’un PDV facultatif semble s’inscrire dans cet esprit.
La rupture issue d’un PDV « facultatif » présente, par comparaison
avec le régime de la rupture conventionnelle, des avantages considérables pour les salariés qui en bénéficient. Le dispositif présente aussi
des avantages pour l’employeur qui souhaite trouver des candidats
au départ volontaire. Pourtant, la générosité patronale pourrait ne
pas être appréciée par les défenseurs de la lettre de la loi. Le risque
pécuniaire s’avère très élevé. L’effet boomerang guette l’imprudent
qui a offert plus que ce que la loi lui impose. Condamnés à assumer
la charge d’une somme importante au motif qu’ils ont déjà trop
versé, les employeurs devraient renoncer à mettre en œuvre une telle
procédure.
28. C. civ., art. 1147. – Cf. Cass. soc., 8 févr. 2012, n° 10-12.906, n° 10-13.405 et
n° 10-13.521 : JurisData n° 2012-001654 ; Bull. civ. 2012, V, n° 62 ; JCP S
2012, 1153, note L. Fin-Langer. – Cass. soc., 30 oct. 2002, n° 00-45.660 :
JurisData n° 2002-016275 ; RJS 2003, n° 22. – Cass. soc., 12 juin 2001,
n° 99-43.329 : JurisData n° 2001-010096 ; Bull. civ. 2001, V, n° 218.
Mots-Clés : Rupture du contrat de travail - Rupture amiable - Plan de
départ volontaire - Plan de départ volontaire
Textes : C. trav., art. L. 1233-3, al. 2. – C. trav. art. L. 1233-61
JurisClasseur : Travail Traité, Fasc. 31-3, par Patrick Morvan
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