inde : une croissance spectaculaire, un système

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inde : une croissance spectaculaire, un système
actu-Inde
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INDE : UNE CROISSANCE
SPECTACULAIRE, UN
SYSTÈME À CONSTRUIRE
Ce pays a encore beaucoup d’efforts à faire pour parvenir
à une répartition homogène de la distribution des soins et
des médicaments. Acteur très important sur le marché
du générique, l’Inde souhaite également le devenir dans
le secteur de la recherche et du développement de
molécules princeps. Bilan.
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industrie pharmaceutique
indienne occupe le 14ème
rang mondial du marché
pharmaceutique en valeur
et le 4ème rang en volume. Sa croissance est spectaculaire : son chiffre
d’affaires devrait passer de 7,3 milliards d’euros en 2005 à 22,7 milliards
en 2010. D’ores et déjà, l’Inde est un
Plusieurs plans
gouvernementaux acteur très important sur le marché
se sont succédés du générique ; et elle souhaite égalepour améliorer les
ment le devenir prochainement dans
conditions
sanitaires et
le secteur de la recherche et du dé-
L’
© CORBIS
la santé de la
population.
PHARMACEUTIQUES _ JANVIER 2006
veloppement de molécules princeps.
« Nous avons les mêmes préoccupations scientifiques que l’Europe et il
n’y a pas beaucoup de différences
entre nos deux pays pour le développement et l’enregistrement des médicaments » a estimé Ashwini Kumar
(contrôleur général des médicaments en Inde). « Nous disposons
d’une batterie de règlements qui
fixent le cadre éthique et les procédures de bonnes pratiques. Nous
avons maintenant le même souci de
transparence et de qualité que les
pays occidentaux ».
Des atouts réels en matière d’essais
cliniques. « Les bonnes pratiques cliniques et celles de fabrication des
médicaments en cours aux EtatsUnis sont appliquées chez nous ;
avec la visite d’inspecteurs étrangers
qui viennent contrôler nos procédures » renchérit le Dr S.D. Sheth
(pharmacologie clinique ICMR
Inde) ». « Nous fournissons un grand
nombre de médicaments au reste du
monde, ajoute le Dr Sheth, et l’Inde a
de réels atouts en matière d’essais cliniques, avec notamment, un gros potentiel de patients naïfs de tout traitement, prêts à entrer dans des
études contrôlées, mais aussi des
scientifiques de haut niveau, des
coûts de main-d’œuvre bas et une
bonne connaissance des actifs végétaux utilisés traditionnellement dans
le pays ». Cette volonté forte d’occuper une place importante dans le développement de nouveaux médicaments se matérialise par la mise en
place d’importantes incitations fiscales de la part du gouvernement indien pour encourager les entreprises
s’investissant dans la recherche.
Telle est, depuis les années 93,
la stratégie du laboratoire indien
Ranbaxy, leader sur le marché du
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médicament générique qui s’engage
désormais dans la recherche et le développement de molécules princeps.
Ses domaines d’intérêts tournent autour des maladies infectieuses (un
antipaludéen est en cours de développement), des maladies respiratoires, des désordres métaboliques et
de l’urologie. Ranbaxy offre également un véritable savoir-faire dans le
domaine de la formulation et des
formes galéniques. Pour être à la hauteur de ses ambitions, il développe
des partenariats de recherche avec
les « grands de la pharmacie »
comme GSK ou Bayer. Comme l’a
souligné Thierry Hoffmann (président de Ranbaxy Pharmacie Génériques France), l’engagement des laboratoires Ranbaxy dans le secteur
de la recherche et développement est
rendu possible par le dynamisme de
son activité générique qui continue
de progresser. Des pourparlers sont
en cours avec le laboratoire Roche
pour une éventuelle production du
Tamiflu® par ce laboratoire indien.
Au programme de ces « journées
France-Inde » figuraient également
une confrontation des expertises sur
les systèmes de protection sociale, les
stratégies de prise en charge de problèmes de santé publique comme
l’infection VIH et le tabagisme, les
pratiques pharmaceutiques et les
méthodes de développement et
d’enregistrement des nouveaux médicaments.
« L’Inde a beaucoup à apprendre
de la France, notamment en matière
de qualité et de rigueur scientifiques,
mais la France a aussi à apprendre de
l’Inde dont la volonté de développement et les capacités de travail sont
considérables » a déclaré Subodh
Priolkar (président de l’IPA). Bien que
souvent critiqué dans notre propre
pays, le système français de protection sociale est tout à fait exemplaire.
Comme l’a rappelé Jean-Marie
Spaeth (président du groupement
d’intérêt public santé-protection sociale internationale), ce système a été
classé premier par l’OMS en 2000.
INDE-FRANCE : JOURNÉES PHARMACEUTIQUES ET MÉDICALES
A l’occasion de la Semaine nationale de la
pharmacie indienne, la France et l’Inde
ont toutes deux souhaité organiser pour
la première fois des journées
pharmaceutiques et médicales afin
d’échanger des expériences nationales
dans le domaine de la santé et du
médicament. Ces premières journées
Inde-France qui viennent de se tenir à
New Delhi étaient placées sous le
patronage du ministère français de la
Santé et des Solidarités, celui des Affaires
étrangères, de l’Indian Pharmaceutical
Association (IPA), de l’Ordre national des
pharmaciens français et de la Fédération
internationale pharmaceutique (FIP). De
nombreux représentants du
gouvernement indien étaient présents,
ainsi que Dominique Girard, ambassadeur
de France en Inde. Une large part de ces
premières journées franco-indiennes de
pharmacie était consacrée aux méthodes
de recherche et de développement de
nouveaux médicaments en France et en
Inde.
© DR
De gauche à droite :
Dr Sheth, Dominique
Girard, ambassadeur
de France, Dr Ghosh,
Daniel Vial, directeur
de Pharmaceutiques
et Subodh Pridlar,
président de l’IPA, lors
de la traditionnelle
cérémonie de la lampe.
C’est bien sûr ce thème qui a largement retenu l’attention des Indiens,
mais la pauvreté et la taille considérable de leur pays rendent évidemment difficile la mise en place d’un
système de protection universel. Ce
qui n’empêche pas le développement
d’expériences, certes intéressantes
mais généralement éphémères.
Pourtant, en matière de santé,
d’énormes progrès ont déjà été accomplis. « Depuis l’indépendance du
pays en 1947, l’espérance de vie a
plus que doublé -elle est passée de 32
ans à 66 ans- ; le taux de mortalité
infantile a diminué de 75% ; la lèpre
et la poliomyélite sont en voie d’être
éradiquées » a indiqué Rita Teaotia
(gouvernement indien). « De gros efforts restent à faire dans d’autres domaines : la tuberculose, le VIH, les
diarrhées, le tabagisme… ».
Répartition des soins et des médicaments. Comme l’a souligné le Dr Ajay
Khera (chargé de la question sida au
gouvernement indien), il existe une
grande disparité entre les pays concernant la progression de l’infection VIH.
Dans six états, on peut considérer que
l’épidémie est généralisée, alors que
d’autres sont relativement protégés.
« Nous travaillons à identifier les
groupes à risque et les populations les
plus vulnérables pour cibler nos actions. Les ONG nous aident ». Le gouvernement a mis en place depuis 2002
un programme ambitieux, visant notamment à améliorer le dépistage, la
prise en charge mère-enfant et l’accès
aux médicaments pour tous.
L’Inde a encore beaucoup d’efforts
à faire pour parvenir à une répartition plus homogène de la distribution des soins et des médicaments à
l’ensemble du pays. En 2004, une
mission nationale de la santé rurale a
été créée pour réfléchir à ce problème. Depuis le début des années
80, plusieurs plans gouvernementaux se sont succédés pour améliorer
les conditions sanitaires et la santé
des populations. Principales mesures : une période obligatoire de travail en zone rurale pour les médecins, le recours massif aux
génériques, la prise en charge par
l’Etat d’une part des vaccins, et la
mise en place de systèmes de surveillance des maladies infectieuses et
le développement du secteur privé. ■
DR DENISE CARO
S 2006
? _ PHARMACEUTIQUES
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