No future without the past - Perspectives of

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No future without the past - Perspectives of
Zentrum für Konfliktforschung
Centre for Conflict-Studies
Philipps-Universität Marburg
e.V.
35112 Fronhausen
Germany – Allemagne
International Symposium
No future without the past - Perspectives of
democratisation and promotion of peace in the
Great Lakes Region, Central Africa
14.-17. August 2008, Marburg – Germany - Allemagne
Symposium International
Pas d’avenir sans le passé - Perspectives de
démocratisation et de promotion de la paix dans
la Région des Grands Lacs, Afrique centrale
Documentation edited by
Imbuto asbl: Hildegard Schürings
Sebastian Günther, Andrea Pabst
Marburg
December 2008
Impressum
Impressum
Edition/ Rédaction:
Imbuto e.V.
Hildegard Schürings, en collaboration avec/ in cooperation with
Sebastian Günther, Andrea Pabst, Eva Anderson-Park, Sang-Min Park, Jasmin Scholle
Facilitation of the symposium: Luise Lehmann, Hildegard Schürings
Web portal: www.uni-marburg.de/konfliktforschung/afrikanische-grosse-seen
Fotos: © Imbuto
Maps used by permission of the University of Texas Libraries, The University of Texas at
Austin and MONUC – UN-Mission in the Democratic Republic of Congo
© Copyright
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35112 Fronhausen – Germany
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Centre for Conflict Studies (CCS)
Philipps-Universität Marburg
Ketzerbach 11
35032 Marburg - Germany
Dr. Johannes M. Becker
[email protected]
www.uni-marburg.de/konfliktforschung
Appuyé par, supported by:
2
Table of Content
Table de matières
Table of Content / Table des matières
Abbreviations - Abréviations
7
Programme of the symposium / Programme du symposium
9
Opening session – Ouverture
Rapport de séance - Jasmin Scholle
13
14
The Great Lakes Region through the Prism of History:
Oblivion, Memory and Myth-Making – René Lemarchand
La région des Grands Lacs à travers le prisme de l’histoire:
la mémoire, l’oubli et la création des mythes - René Lemarchand
20
27
1990 – 2008 Political and societal situation in the Great Lakes Region
1990 – 2008 Evolutions politiques et sociétales dans la Région des Grands Lacs 31
Dynamiques politiques et institutionnelles en Afrique des Grands Lacs :
1990 – 2008 - Julien Nimubona
32
Rapport de séance - Joseph Ngarambe
37
Evolutions politiques et sociétales 1990 – 2008 Burundi
Les défis de la reconstruction de l’Etat et de la stabilisation politique
au Burundi : 1990-2008 - Julien Nimubona
39
40
Comment la communauté des Batwa a vécu les conflits et les changements
– quels sont les défis ? - Liberate Nicayenzi
44
Rapport de séance - Carla Schraml
48
Evolutions politiques et sociétales au Zaïre/
en République Démocratique du Congo 1990-2008
Congo/Kinshasa 1990-2008 : De la démocratisation à l’épreuve des armes
au défi de la (ré)construction - Isidore Ndaywel è Nziem
49
50
Situation des Droits de la personne dans la Region des Grands Lacs
- Joseph Chiko Sanane
52
Rapport de séance - Bernard Niyomugabo
58
Evolutions politiques et sociétales 1990 – 2008 au Rwanda
Rwanda: Pas d’avenir sans le passé – de l’invention de l’histoire au présent:
Mythes, piège identitaire, pluralité et ? - Hildegard Schürings
59
60
La Diaspora ou une autre façon de vivre avec le Rwanda - René Sibomana
67
Minutes of the Workshop - Johannes Melzer
71
3
Table of Content
Table de matières
The impact of international, national and local justice systems
Les impacts des systèmes de justice internationaux, nationaux et locaux
Le bilan du Tribunal Pénal International pour le Rwanda - Joseph Ngarambe
73
74
Le système Ubushingantahe (sages) - peut-il aider le Burundi dans
le processus démocratique ? - Joseph Ntamahungiro
78
Peasants, Power and the Past: Political Transition and Transitional Justice
in Rwanda and Burundi - A View From Below - Bert Ingelaere
83
Rapport de séance - Andrea Pabst
88
The role and impact of stakeholders in the region
Le rôle des acteurs nationaux et multilatéraux dans la région
89
L’évolution de la situation des Droits de la Personne au Zaïre/
en République Démocratique du Congo entre 1994 et 2001 - Roberto Garretón 90
The international community in the region: loaded agenda, limited results
- Volker Weyel
94
Rôle de la société civile au Zaïre/ en République Démocratique du Congo
– RDC entre 1990 et 2008 - Joseph Chiko Sanane
98
Rapport de séance - Xavérine Niwemutoni
102
Struggle for economic resources: Ways to stop illegal exploitation
of natural resources
Le combat pour les ressources économiques :
Comment réguler l’exploitation des ressources naturelles
Fatal Transactions – Natural Resources and the Transformation
of the Congolese War Economy - Lena Guesnet
Certification of Coltan, Cassiterite and Gold as a means to gain control
over mineral production and trade in the Kivus, DR Congo - Nicola Martin
105
106
108
Le Contrôle de la terre en RD Congo : un défi pour la population congolaise ?
- Prosper Musafiri Nobirabo
112
Minutes of the Workshop Simone Claar
116
Plenary Session – Séance plénière
Rapport de séance - Prosper Musafiri Nobirabo & Hildegard Schürings
119
120
Dealing with the past: history, memory, commemoration
Comment gérer le passé: histoire, mémoire, commémoration
The interlinkage of ethnicity and political power in the perception of
Rwandans and Burundians - Carla Schraml
Comment les filles et femmes gèrent la violence: les faits et les effets –
Ignatiana Mukarusanga
4
123
124
128
Table of Content
Table de matières
Approche Ubuntu - de la réconciliation au Rwanda - Laurien Ntezimana
131
Rapport de séance - Lena Guesnet
134
Traumatisation and healing - Traumatisation et guérison
L’image de l’autre me fait peur : Cohabitation entre victimes et
bourreaux dans l’après génocide de 1994 - Eugène Rutembesa
135
136
Suivi psychosocial des victimes de traumatisme pendant les Juridictions Gacaca –
Heide Rieder & Marie-Grace Gazinzigwa Kagoyire
139
Minutes of the Workshop - Klaas Kunst
144
Girls and women – their suffering and potential 149
Des filles et femmes – leurs souffrances et potentialités
Après le mal absolu – création de l’avenir – AVEGA - Esther Mujawayo
149
150
Un long trajet pour un éveil conciliant - Marie Aimable Umurerwa
153
Minutes of the Workshop - David Bodensohn
156
Youth in the Great Lakes Region – For Social cohesion
Les jeunes de la Région des Grands Lacs – construction des relations sociales
Cadre de l'atelier
159
160
Visions des jeunes pour l’avenir – Résultats des réflexions des étudiants d’Imbuto
et de l’AEPCSM – Bernard Niyomugabo
161
Le rôle des jeunes de la Région des Grands Lacs dans la résolution des conflits Cas de la Maison des Jeunes de Kimisagara et de son projet
Heza, émission radiophonique et journal pour la paix
- Andreas Wagner & Pascal Mwema
163
Rapport de séance - Denyse Amahirwe & Xavérine Niwemutoni
Summary of the workshops - Restitution des ateliers
Minutes of the summary of the workshops - Toni Hassenmeier
Minutes of the summary of the workshops - Jasmin Scholle
168
171
172
174
Lessons from the past – visions for the future
Leçons apprises – Visions pour l’avenir
177
Minutes of the closing session – Rapport de la séance de clôture –
Jasmin Scholle & Xavérine Niwemutoni
178
Comité Consultatif du Secrétariat Général des Nations Unies sur
la Prévention des Génocides et autres atrocités massives - Roberto Garretón
180
5
Table of Content
Table de matières
Evaluation du Symposium – Evaluation of the Symposium
184
Moderators / Modérateurs et Modératrices du Symposium
187
Comité d'Organisation du Symposium
193
Participants of the Symposium / Participants du Symposium
197
6
Abbreviations
Abréviations
Abbreviations - Abréviations
ACNUR
AEPCSM
ALDHU
AMI
APR
ARCT
AVEGA
BGR
BICC
CCS
CEBB
CEDR
CEEC
CEMAF
CEPGL
CNB
CNDD-FDD
CNDP
CPI
CPRS
DED/ ZFD
DRC
EurAc
FAO
FAR
FARDC
FAZ
FDLR
FNL
FNLA
FRODEBU
FPR
GTZ
ICG
ICGLR
ICISS
ICTR
IDEC
Imbuto
IOB
IRG
LDGL
-> UNHCR
Association des Etudiants en Psychologie Clinique et pour la
Promotion de la Santé Mentale, Université Nationale du
Rwanda, Butare
Association Latino-américaine des Droits de l’Homme
Association Modeste et Innocent
Armée Patriotique Rwandaise
Association Rwandaise des Conseillers en Traumatisme
Association des Veuves du Génocide d'Avril/Agahozo
Bundesanstalt Geowissenschaften und Rohstoffe
Bonn International Centre for Conversion
Center for Conflict Studies, University of Marburg
Centre d’Echanges Belgo-Burundais
Convention internationale sur l’élimination de toutes les
formes de discrimination raciale
Centre d’Expertise et d’Evaluation
Centre des Mondes Africains, Paris Sorbonne
Economic Community of the Great Lakes Countries
Conseil National des Bashingantahe
Conseil National pour la Défense de la Démocratie –
Forces de Défense pour la Démocratie".
Congrès National pour la Défense du Peuple
Cour Pénale Internationale
Centre for Peace Research and Strategic Studies
Deutscher Entwicklungsdienst/ Ziviler Friedensdienst
Democratic Republic of Congo
Réseau Européen pour l’Afrique Centrale
Food and Agriculture Organization
Forces Armées Rwandaises
Forces Armées de la République Démocratique du Congo
(Armée du Congo)
Forces Armées Zaïroises
Forces Démocratiques de Libération du Rwanda
Forces Nationales de Libération
Frente Nacional da Libertação de Angola
(National Front for the Liberation of Angola)
Front for Democracy in Burundi
Front Patriotique Rwandais
Deutsche Gesellschaft für Technische Zusammenarbeit
(German Technical Cooperation)
International Crisis Group
International Conference on the Great Lakes Region
Commission Internationale d’Intervention et de Souveraineté
International Criminal Tribunal for Rwanda, Arusha – Tanzania
Institut de Développement Economique du Burundi
Nom de l’association en Allemagne, signifie semences/ grains
en kirundi et en kinyarwanda (langues nationales au Burundi
et au Rwanda)
Institute of Development Policy and Management
Internationale des Résistant-e-s à la Guerre
Ligue des Droits de la personne dans la
Région des Grands Lacs
7
Abbreviations
Abréviations
MIR
MLC
MPLA
OEA
ONG
ONU
OTAN
PNUD
RCD
RCD/ML
RCD/N
RDC
RPF
TPIR
UDPS
UN
UNESCO
UNHCR
UNIPROBA
UNITA
UNR
USAID
Mouvement international de la réconciliation
Mouvement de Libération du Congo
Movimento Popular de Libertação de Angola
(Popular Movement for the Liberation of Angola)
Organización de los Estados Americanos (Organization of
American States)
Organisation non-gouvernementale
Organisation des Nations Unies
North Atlantic Treaty Organization
Programme des Nations Unies pour le Développement
Rassemblement Congolais pour la Démocratie
Rassemblement congolais pour la démocratie/ Mouvement
de libération du Congo
Rassemblement congolais pour la démocratie/National
République Démocratique du Congo
Rwandan Patriotic Front
Tribunal Pénal International pour le Rwanda, Arusha, Tanzanie
Union pour la Démocratie et le Progrès Social
United Nations
United Nations Educational, Scientific and Cultural
Organization
United Nations High Commissioner for Refugees
Unions Nous pour la Promotion des Batwa
União Nacional para a Independência Total de Angola
(National Union for the Total Independence of Angola)
Université Nationale du Rwanda
United States Agency for International Development
8
Programme of the Symposium
Programme du Symposium
Programme of the symposium / Programme du symposium
9
Programme of the Symposium
Programme du Symposium
10
Programme of the Symposium
Programme du Symposium
11
Programme of the Symposium
Programme du Symposium
12
Plenary session - Séance plénière
Opening session – Ouverture
Jeudi - Thursday 14.08.2008
15:00 - 16:30h
Plenary session - Séance plénière
Opening session – Ouverture
Prof. Babette Simon, Vice-President of the University of Marburg
Ulrich Wagner, CCS Marburg
Hildegard Schürings, Imbuto asbl
Luise Lehmann, Germany
Rapporteure: Jasmin Scholle
13
Plenary session - Séance plénière
Opening session – Ouverture
Jeudi - Thursday 14.08.2008
15:00 - 16:30h
Rapport de séance
Jasmin Scholle
pouvoir souhaiter la bienvenue a tant de
scientifiques venant des différents coins du
monde et travaillant dans de diverses
disciplines.
Pour l’appui financier, il a remercié la
fondation Volkswagen, la Coopération
Technique Allemande – GTZ et le Ministère
fédéral de la Cooperation Economique et
au Développement – BMZ, et enfin l’université de Marburg.
De plus, il a exprimé sa gratitude aux
organisateurs de la conférence, à. M. Dr.
Johannes Becker du Centre sur la
recherche des conflits et à Mme Dr.
Hildegard Schürings de l’association Imbuto.
Herzlich Willkommen
Bienvenue
Welcome
Karibuni
Murakaza neza
Toyambi bino malamu
Ensuite, Mme Hildegard Schürings a souhaité la bienvenue à tout le monde, son
discours fut traduit par Mme Luise Lehmann.
Les deux dames ont assuré la modération
de toute la conférence.
La conférence fut inaugurée par Mme Prof.
Babette Simon, Vice-présidente de l’Université, présentée par M. Johannes Becker,
Coordinateur du Centre sur la recherche
des conflits de l’Université de Marburg.
Mme Simon a parlé de l’histoire de
l’Université fondée en 1527 par le comte
Philipp. Elle a souligné l’internationalité de
cette
université
avec
environ
12%
d’étudiants d’autres pays et de nombreuses coopérations avec des universités
dans le monde. Se référant à l’intitulé du
symposium « Pas d’avenir sans le passé »
Mme Simon a confirmé que le but de l’université est de faire valoir les expériences de
cinq siècles pour répondre aux défis d’aujourd’hui. Elle a terminé par une idée de
Confucius : La personne qui tient compte
du savoir ancien pour comprendre le
nouveau peut enseigner d’autres personnes. Elle a remercié les organisateurs et
organisatrices d’avoir réalisé cette importante conférence.
The symposium was inaugurated by Ms.
Prof. Dr. Babette Simon, Vice-President of
the University of Marburg, presented by Dr.
Johannes Becker, Coordinator of the
Centre for Conflict Studies – CCS. Ms. Simon
told the plenary about the history of the
University of Marburg which was founded in
1527 by Land count Philipp. She acknowledged the internationality of the
University with 12% of its students coming
from foreign countries and pointed out the
importance of international scientific cooperation.
Referring to the title and topic of the
conference „No future without the past“,
Ms. Simon compared it to the aim of the
University that wants to take advantage of
the tradition and knowledge of the almost
five centuries old history for a science that
has to adapt to the tasks of today. Prof.
Simon finished her speech with the words of
Confucius: „The one who takes into
account the old to understand the new
can be a teacher to others“, and thanked
the organisers of the conference.
Ensuite Prof. Ulrich Wagner, doyen de la Faculté de Psychologie et Vice-directeur du
Centre sur la recherche des conflits a pris la
parole et a souligné aussi bien l’importance
de l’internationalité que de l’interdisciplinarité de la recherche et de l’enseignement. Pour lui, c’est un honneur de
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Plenary session - Séance plénière
Opening session – Ouverture
Jeudi - Thursday 14.08.2008
15:00 - 16:30h
Si on n’avait pas pensé que ces efforts
valaient pas la peine, on n’aurait pas vous
fait parvenir ce long trajet et dépenser tant
d’énergies physique, intellectuel, spirituel et
matériel.
The next speaker Prof. Ulrich Wagner who is
the Dean of the Department of Psychology
at the Philipps-University of Marburg and
the Vice Director of the Centre for Conflict
Studies pointed out the importance of not
just international but also interdisciplinary
scientific research and teaching. So he said
that he is very pleased to welcome
scientists from all around the world with very
different disciplinary backgrounds.
Quel est le pourquoi de cette conférence:
Les conflits dans la Région des Grands Lacs
ont fait trop de souffrances, plusieurs
millions de personnes ont perdu leur vie,
des millions de personnes ont été chassés
de leurs lieux de vie et de travail, des
millions de personnes ont été privé de tout
leur bien, de leur famille, de leurs amis, de
leur confiance en autrui, de leur respect
d’eux–mêmes, de leur identité, de leur
emploi, de leur sécurité.
Surtout depuis le génocide en 1994 au
Rwanda, la guerre atroce en République
Démocratique du Congo et les meurtriers
conflits au Burundi on a organisé beaucoup
de réunions et conférences à tous les
niveaux : local, national, sous-régional,
international. Peut-être il y en avait même
beaucoup trop de réunions, beaucoup
d’accords et de cessez-le-feu, qui étaient
souvent brisés au moment de la signature,
et beaucoup d’argents dépensés pour
parfois des résultats modestes.
For the (financial) support of the Conference he gave thanks to the Foundation
“Volkswagenstiftung”, the GTZ (German
Technical Cooperation), the Federal Ministry for Economic Cooperation and Development and the Philipps-University of
Marburg, as well as to Dr. Becker, CCS, and
to Dr. Hildegard Schürings the Managing
Director of the association Imbuto as the
main organizers of the conference.
Mot de Bienvenue
Hildegard Schürings
Nous, les organisateurs de ce symposium
avions pensé qu’il serait temps de prendre
un peu de recul, de calmer les émotions, et
de réfléchir, en tant que scientifiques et
acteurs/ actrices du terrain, comment on
peut construire un meilleur avenir pour les
peuples de la région.
Mesdames, Messieurs, chers amis et
collègues
Au nom de l’association Imbuto asbl je
vous souhaite la bienvenue à cette
conférence scientifique :
« Pas d’avenir sans le passé – Perspectives
de démocratisation et de promotion de la
paix dans la Région des Grands Lacs,
Afrique centrale. »
De nombreuses personnes n’ont ménagé
aucun effort pour nous joindre ici à
Marburg.
D’aucuns se demandent si ça valait la
peine de vous inciter de faire des si longs
trajets d’une dizaine de pays sur trois
continents : de la Chili, de la Région des
Grands Lacs en Afrique centrale - du Burundi, de la République Démocratique du
Congo, du Rwanda – de la Floride aux Etats
Unis d’Amérique, du Sénégal et de nos
pays voisins : la France, la Belgique, la
Suisse, le Luxembourg et de plusieurs villes
en Allemagne.
L’Allemagne comme lieu de la conférence :
L’Allemagne a - à notre avis - une place importante et des expériences dans les
champs conflictuels, par rapport à son
histoire, sa place géostratégique et son rôle
politique et économique :
En 1884/85 à Berlin, les pays occidentaux se
sont partagés l’Afrique ce qui a eu des
effets néfastes sur le continent africain.
Les Allemands étaient les premiers colonisateurs du Burundi et du Rwanda.
Les gouvernements de l’Allemagne étaient,
durant le siècle passé, responsables pour
les deux guerres mondiales.
En Europe, des Allemands ont commis un
génocide, la Shoa, durant lequel 6 millions
de personnes ont été tués, des juifs, des
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Plenary session - Séance plénière
Opening session – Ouverture
Jeudi - Thursday 14.08.2008
15:00 - 16:30h
opposants, des gitans, des personnes
handicapés et aussi des Africains.
La chute du mur à Berlin 1989 a contribué à
terminer la guerre froide et à changer les
intérêts géostratégiques dans le monde et
aussi dans la région des Grand Lacs.
La mise en réseautage de toutes ces
perspectives et acteurs/ actrices aura certainement un effet positif sur l’avenir.
Aujourd’hui l’Allemagne est une force
politique et économique très importante,
elle n’a pas directement été impliquée
dans les conflits dans la Région de Grands
Lacs, mais elle est y très présente par les
coopérations au développement, étatiques, non-gouvernementales et des
Eglises.
Le terrain par rapport aux intérêts de l’Allemagne dans la région est moins conflictuel
que par exemple les rapports avec
l’ancienne puissance coloniale, la Belgique,
ou des Etats comme la France, les Etats Unis,
la Grande Bretagne.
Notre association porte le nom : IMBUTO
Imbuto signifie en Kinyarwanda et Kirundi,
les langues nationales du Rwanda et
Burundi : semences, et c’est ainsi que cette
association veut semer pour un jour récolter
de bons fruits.
La majorité des membres sont des jeunes
de la Région des Grands Lacs et d’ailleurs je suis la doyenne et c’est pour cette raison
que j’ai le droit à la parole - mais ce droit
n’est pas exclusif, il est inclusif, ça veut dire
la jeunesse d’aujourd'hui a un droit à la
parole et c’est elle qui portera la responsabilité si un meilleur avenir est possible.
Durant cette conférence, nous voulons
analyser la situation d’une perspective
holistique et ceci à plusieurs niveaux :
On aimerait bien vous imposer quelques
règles : Nous attachons beaucoup d’importance à une ambiance constructive et
respectueuse durant la conférence. Ce qui
implique que les participants s’écoutent,
respectent la parole des autres et
acceptent des différents points de vue.
Il n’y a personne qui sait tous et personne
qui ne sait rien.
- par rapport aux disciplines
scientifiques : il y a des scientifiques de
Anthropologie, des Sciences de l’Education,
du Droit, de la Géologie, de l’ Histoire, de
l’Economie, et des Théologiens, Philosophes,
Politologues, Psychologues, Sociologues
- Il y a des universitaires de la Région
des Grands Lacs, des étudiants en psychologie clinique du Rwanda, des chercheurs
et étudiants de plusieurs pays de l’Europe
et des Etats Unis d’Amérique,
- Il y a des acteurs de la société
civile de la région et d’ailleurs, des
associations des Droits de la Personne, des
jeunes d’Imbuto comme aussi une
personne, membre du Comité des Nations
Unies pour la prévention des génocides,
- Il y a des hommes et des femmes
avec leur perspectives et ceci plus ou
moins à parité
- Il y a des personnes âgés avec tout
leur savoir et expériences et des jeunes
chercheurs et acteurs/ actrices avec leur
dynamisme et leur volonté de changer le
monde.
Avant de clôturer j’aimerais bien vous présenter le comité d’organisation qui a,
depuis plus qu’une année, travaillé pour
que ce symposium devienne réaliste. Cette
équipe essaie de rendre votre séjour le plus
agréable, et ils vont vous appuyer pour que
tout se passe dans de bonnes conditions.
Je vous invite à contribuer au programme
et aux débats qui sont multi-perspectivistes,
multidisciplinaires, multicolores, multi-âges,
multi-languages.
Je vous souhaite un très bon séjour, nous
souhaitons à tous des échanges agréables,
fructueux et nous espérons pouvoir contribuer des pierres à la construction d’une
culture et des maisons de la paix.
Merci de votre attention !
Tous sont invités à apporter leurs analyses,
leurs perspectives et à contribuer aux
réflexions.
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Plenary session - Séance plénière
Opening session – Ouverture
Jeudi - Thursday 14.08.2008
15:00 - 16:30h
fires, that have been broken instantly after
signature, and a lot of money has been
spent, often with quite modest results.
As organisers of this symposium, we thought
that it is about time to sit back and take a
look from a distance, to appease emotions,
and to think as scientists and actors in praxis
about how to build a better future for the
people of the Region.
Welcome speech
Translated by Luise Lehmann
Ladies and gentlemen, dear friends and
colleagues,
Germany as host country for this conference:
We believe that Germany has a role to play
– and experiences as well – in the area of
conflict management, due to its own
history, its geo-strategic position and its
political and economic role:
On behalf of Imbuto, I would like to
welcome you to this scientific conference:
“No future without the past – Perspectives
of democratisation and promotion of
peace in the Great Lakes Region, Central
Africa.”
Many people spared no efforts to join us
here in the city of Marburg. Questions were
raised whether this is worth the effort to let
you travel such long ways – from more than
ten countries in three continents: from Chile,
from the Great Lakes Region in Central
Africa – from Burundi, the Democratic
Republic of Congo, and from Rwanda -,
from Florida in the United States, from
Senegal, and last but not least, from our
neighbouring countries: France, Belgium,
Switzerland, Luxembourg and from a
number of German cities.
But be assured, had we not believed that
your efforts are worthwhile; we would not
have asked you to travel from so far and to
invest so much energy, physical, intellectual,
spiritual and material
•
•
•
•
•
Why this conference?
The conflicts in the Great Lakes Region
have caused so much suffering, millions of
people have lost their lives, millions of
people have been chased away from their
homes and places of work, millions of
people have been bereaved of all their
belongings, their families, their friends, their
confidence in others, their self respect, and
even their own identity, their work and their
security.
Conferences have been organized ever
since the genocide 1994 in Rwanda, the
atrocious war in DR Congo and the bloody
conflicts in Burundi – conferences at all
levels: local, national, sub-regional, international. Maybe there were even too many
meetings, many agreements and cease-
In Berlin, during the years 1884/85,
the African continent was divided
up among the most powerful
Western
countries.
This
had
devastating consequences for the
African continent.
Germany was the first European
coloniser in Burundi and Rwanda.
During the past century, German
governments were responsible for
the two World Wars.
In Europe, Germans have committed a genocide, the Shoa (Holocaust) in which 6 million people
have been murdered - Jews, opponents, gypsies, disabled persons as
well as Africans.
The fall of the Berlin wall in 1989 has
contributed to terminate the cold
war and to change geo-strategic
interests around the world and likewise in the Great Lakes Region.
Today, Germany is a very important political and economic force. Germany has
not been directly involved in the Region’s
conflicts, but it is all the more present
through its development cooperation, be it
governmental, non-governmental or faithbased.
For Germany, there is less conflict regarding
the interests in the Region, compared to
the ancient colonial power like Belgium or
countries like France, the United States of
America or the United Kingdom.
17
Plenary session - Séance plénière
Opening session – Ouverture
Jeudi - Thursday 14.08.2008
15:00 - 16:30h
Our association is called: IMBUTO
Imbuto means in Kinyarwanda and in Kirundi, the national languages of Rwanda
and Burundi: Seeds. And this is what this
association aims to do – seed to reap fine
fruit one day.
The majority of Imbuto’s members are
young people from the Great Lakes Region
and other countries. Hildegard is the managing director and therefore has the right
to speak. But this right is not exclusive,
rather inclusive, meaning that today’s
youth has the right to speak and this youth
will be held responsible if a better future is
possible.
We want to have a holistic view of the situation at different levels:
- With regard to scientific disciplines:
there are scholars of anthropology, education, law, geology, history, economics,
theology, philosophy, psychology, sociology and political science;
- There are university scientists from the
Great Lakes Region, representatives of the
association of clinical psychology of
Rwanda and their students, researchers
and students from various European
countries and the United States of America;
- There are actors of the civil society from
the Region and, moreover, human rights
associations, youth of Imbuto, and a
member of the UN Committee for prevention of genocide;
- There are men and women with their (own)
perspectives, here represented more or less
in parity
- There are elderly people with all their
knowledge and experiences and young
researchers and actors / actresses with their
dynamic and their dedication to change
the world.
We would like to impose a few principles on
you:
We attach quite some importance to a
constructive and respectful ambiance
throughout the conference.
This means that the participants should
listen to each other, respect the right to
speak of others and accept differing
viewpoints.
Before coming to an end, I would like to
introduce the organisational committee to
you. The committee has worked for more
than a year to make this symposium
happen.
The team will try to make your stay as comfortable as possible and will help you to get
things organised under good conditions
All of you are invited to bring in your
analyses, your views and to contribute to
the reflections.
Nobody knows everything - and nobody
knows nothing.
Bringing together all these views and actors
will surely have a positive impact on the
future.
We invite you to contribute to the debates
and the success of the conference programme which is of its nature: multiperspective, multi-disciplinary multi-colour,
multi-aged and multi-languages.
We wish you a very good stay and congenial and fruitful discussions.
We hope that we will be able to contribute
some bricks to the construction of culture
and houses of peace.
Thank you for your attention!
Hildegard Schürings, Imbuto asbl
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Plenary session - Séance plénière
The Great Lakes region through the prism of history: oblivion, memory and myth-making
La Région des Grands Lacs à travers le prisme de l’histoire : la mémoire, l’oubli et la création des mythes
17.00-18.30h
Thursday – Jeudi 14.08.2008
Plenary Session – Séance plénière,
The Great Lakes region through the prism of history:
Oblivion, Memory and Myth-making
La Région des Grands Lacs à travers le primse de
l’histoire : la mémoire, l’oubli et la création des mythes
René Lemarchand, University of Florida
Moderation: Anna-Maria Brandstetter, University of Mainz
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The Great Lakes region through the prism of history: oblivion, memory and myth-making
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17.00-18.30h
Thursday – Jeudi 14.08.2008
The Great Lakes Region through the Prism of History: Oblivion,
Memory and Myth-Making
René Lemarchand
pulated, amputated, twisted and ultimately
pressed into the service of a particular
cause is an entirely different matter.
Whether we like it or not it is the latter phenomenon – how the past is remembered,
perceived and reinterpreted collectively
that makes analysis of the past so
problematic, and weighs most heavily on
the future of the Great Lakes. This is not to
suggest that historians have no choice but
to abdicate their professional responsibilities
– only to stress the distance between fact
and fiction, description and perception.
How to bridge that space is what this
discussion is about.
There are as many paths to speculating
about the future as there are many ways of
interpreting the past. Hence my sense of
ambivalence as I try to deconstruct the
overarching theme of this conference: Are
we to understand that “coming to terms
with the past” is the key to a brighter future
for the people of the Great Lakes, and if so,
what, exactly, does it mean? Does it mean,
as Ernest Renan insisted, recasting the past
into a selective historical frame, where
amnesia sifts out of the historical record the
horrors of ethnic killings? Does it mean
recourse to a Truth and Reconciliation
Commission as the ultimate tribunal for
apportioning guilt and innocence? Does it
mean, as Ranke’s would put it, "Wie es
eigentlich gewesen ist", in short, “telling it
like it is” – or, to put it differently, getting an
empirical handle on the facts, the better to
understand the complexity of the circumstances that led into the abyss?
Although I would hesitate to call myself a
devotee of post-modernism, I am just as
wary of what might be called “brute
empiricism.” My scepticism requires little
elaboration. It stems from the very nature of
the subject at hand. In a region that has
been so thoroughly soaked in blood and
where the intensity of ethnic feelings often
distorts reality, perceptions tend to become
reality. The central question, I would
suggest, is not what happened as much as
how did it shape the vision that one group
has of the excesses of the other. I am not
suggesting that the basic historical facts
should be treated as epiphenomena whether it be the Hutu revolution, the mass
killings of 1972 in Burundi, the monstrosity of
the 1994 carnage in Rwanda, or the civil
war in Burundi. The point, rather, is that
these events, filtered through the lens of
ethnicity, have transformed victim hood
into an identity marker, highlighting the
crimes of one group to the exclusion of the
other’s. This is where the past intrudes into
the future in ways that are profoundly
subversive of a peaceful tomorrow.
If the past is preface to the future my own
inclination is to follow Ranke’s footsteps and
look for the facts. Admittedly, attention to
factual evidence is no guarantee of
objectivity - but it helps. It helps to know
that Hutu and Tutsi both have blood on
their hands and that neither group can be
held responsible collectively for such crimes;
that genocide is not the shameful privilege
of any single group; that rape has been
and continues to be the weapon of choice
of all militias in eastern Congo, and that
includes Kabila’s rabble army. It helps to
know that guilt and innocence are shared
by all communities. Group culpability is no
less of a myth than group virtuousness.
This said, and as anyone with any degree of
familiarity with the region knows, nothing is
more elusive than the “facts.” It is one thing
to take historical events into account. How
history is reinterpreted, rewritten, mani-
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Banyamulenge, and the moral and
logistical support extended by the
government of Burundi to the Rwandan
army.
The Uses of History
Its limitations notwithstanding, something
must be said at the outset of the merits of
the historical approach, if only because it
sets the parameters within which memory
and oblivion combine to produce potent
myths and lasting hatreds.
There is a sequential rhythm to these
ruptures and here again history helps to
illuminate the chain of events that links one
to the other. Seen in a time-space perspective the human dramas that have
swept across the Great Lakes take on the
quality of a Greek tragedy, where the
ultimate denouement is already inscribed in
the first act: As the curtain rises on the
revolutionary havoc of the Belgian-sponsored Hutu insurrection of the late fifties –
misleadingly named “révolution sociale” the dramatic spin-offs are already looming
on the horizon: The mass exodus of Tutsi
civilians, the hardening of Hutu-Tutsi
relations in Burundi, culminating in the 1972
genocide, followed in 1973 by the vicious
backlash of anti-Tutsi pogroms in Rwanda,
triggering yet another wave of refugees to
neighbouring states. It would take another
twenty years for the sons of the Tutsi
diaspora to turn back the tide of history
and re-establish the hegemonic claims of
their ancestors. No small feat indeed when
one considers the odds. Nonetheless, the
price exacted by their victory leaves one to
wonder whether the long-terms costs will
not exceed the unevenly shared short-term
benefits.
Besides providing the indispensable tool for
comprehending the root cause of conflict,
history is the most effective antidote to the
despotism of facile formulae. “Ethnic
hatreds”, “ancestral enmities”, “tribal
antagonisms”, the “contagiousness of ethnic conflict” are obvious examples. These
are by no means illusory phenomena. They
are indeed part and parcel of the human
drama unfolding through much of the
region. But they do not happen in a void.
They are the product of a concatenation of
events that need to be factored in and
critically examined.
Just as conflict does not materialise in an
empirical void, neither does it occur within
hermetically sealed boundaries. What
history brings into relief is the interconnectedness of ethnic crises across national
frontiers. Something in the nature of
Huntington’s “kin-country syndrome” comes
to mind: Where ethnic communities
straddle geographical boundaries the
gravitational pull of their kinsmen across the
border is hard to resist. To explain the
Rwandan genocide while ignoring the
wider regional setting is no less risky than to
try to comprehend the 1972 bloodbath in
Burundi in isolation from the Rwanda
revolution and the strategic proximity of
Tanzania and eastern Congo. Or take the
case of the 1996-1997 killings of Hutu
refugees in eastern Congo: the security
threats posed by Hutu extremists to the
newly enthroned government of Rwanda
are undeniable, but President Kagame’s
decision to cleanse the refugee camps
must be seen against a broader canvas,
including the military assistance given by
Mobutu to the interahamwe, the vicious
attacks mounted by the provincial
authorities of South Kivu against the
While turning the spotlight on a seemingly
relentless Hutu-Tutsi conflict, history also
shows that there are many exceptions to
the rule. In particular, and most importantly,
it brings out the “grey zones” in the social
landscape. The phrase is borrowed from
Primo Levi’s moving meditation on the
ambivalent relations between victims and
oppressors in the Nazi death camps. His
commentary deserves to be quoted at
length:
“We also tend to simplify history; but the
pattern within which events are ordered is
not always identifiable in a single, unequivocal fashion, and therefore different
historians may understand and construe
history in ways that are incompatible with
one another. Nevertheless, perhaps for
reasons that go back to our origins as social
animals, the need to divide the field into
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‘we’ and ‘they’ is so strong that this pattern,
this bipartition – friend/enemy – prevails
over all others. Popular history, and also the
history taught in schools, is influenced by
this Manichaean tendency, which shuns
half-tints and complexities: It is prone to
reduce the river of human occurrences to
conflicts, and conflicts to duels – we and
they, Athenians and Spartans, Romans and
Carthaginians.”1
has become the touchstone of collective
selves. Not only are divisions between Hutu
and Tutsi receding under a shared linguistic
label, but by the same token the subdivisions within each group tend to
evaporate. Language is indeed the single
most powerful bond between the Banyamulenge of South Kivu and the ethnic Tutsi
of North Kivu, between the so-called “fifty
niners”, who left Rwanda during the 1959
Hutu revolution, and the refugees who
came in after the 1993 pogroms. That this
phenomenon is happening at a time when
a number of Hutu and Tutsi indigenous to
North Kivu are joining hands against
“native” Congolese, with the apparent
blessings and support of Rwanda, is not a
matter of coincidence. The potential for
conflict arising out of this situation can
hardly be overestimated.
This holds true also for Hutu and Tutsi. Levi’s
reflections are a plea to transcend the allencompassing Hutu-Tutsi duality, and take
notice of those countless acts of heroism
that gave the lie to the notion of a
perennial, rigidly structured Hutu-Tutsi
template. We know, for example, that the
victims of the Rwanda genocide were not
all Tutsi, and that many Hutu took enormous
risks in trying to save Tutsi lives. It is equally
plain that the 1972 genocide of Hutu in
Burundi is not wholly reducible to a straight
Hutu-Tutsi conflict, and that here too many
Tutsi saved Hutu lives. And yet the binary
Hutu-Tutsi model continues to dominate
much of our discourse. Here again history
helps dispel our illusions. No one familiar
with the years that followed their independence in 1962 can overlook the
intra-Hutu splits (Kiga vs. Nduga) that led to
the overthrow of Rwanda’s first president
Grégoire Kayibanda, or the bitter intra-Tutsi
squabbles (Banyaruguru vs. Hima) that
preceded – and precipitated – the 1972
Hutu uprising in Burundi, the trigger that
unleashed the Tutsi-led genocidal backlash.
That ethnicity is neither eternal nor
immutable is the central lesson history
teaches us.
Thinking prospectively, then, the good news
is that ethnic identities are not fixed once
and for all. Exemplary in this regard is the
case of Burundi, where decades of bitter
ethnic strife have given way to a relatively
peaceful modus vivendi between Hutu and
Tutsi. Attempts to de-polarize the social field
of the region may thus effectively result in
lowering the potential for conflict. The bad
news, however, is that no matter how fluid,
the binary structuring of group identities has
remained a constant in the history of the
region. Whether the shifts have been from
Kiga vs. Nduga to Hutu vs. Tutsi (as in
Rwanda), from Bezi vs. Batare to Hima vs.
Banyaruguru to Hutu vs. Tutsi (as in Burundi),
from Banyamulenge vs. “native” Congolese
to Rwandophones vs. Swahiliphones, the
we/they dichotomy has been a persistent
element in the ethnic landscape. To make
the bad news even worse, the mythic
representations that have accompanied
such shifts of identity have added a powerful normative dimension to social conflict.
The case of eastern Congo is no less
instructive. It brings into focus some startling
mutations of ethnic identities in response to
changing circumstances. Thus, in parts of
the Kivu, the widespread use of the
Rwandophone label as a way of discriminating between “natives” (Swahili speakers)
and “foreigners” (Kinyarwanda speakers)
has resulted in a spectacular reformatting
of Hutu and local Tutsi identities. Language
1 Levi, Primo, The Drowned and the Saved, New York,
1989, p. 36.
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basis of fragmentary evidence. Just how
many lives were lost during the 1972 Burundi
genocide will never be known. Although
there is a broad consensus about the
number of Tutsi-victims in Rwanda – between 800,000 and a million – one can only
guess how many of them were Hutu, and
how many died at the hands of the
genocidaires or under the blows of the RPF.
Much the same guesswork applies to the
number of Hutu killed by the RPF in eastern
Congo in 1996/97, how many were interahamwe or ex-Forces Armées Rwandaises
(FAR) and how many were innocent
civilians. The same is true of the human
losses incurred by both Hutu and Tutsi in
Burundi during the ten-year civil war that
followed President Melchior Ndadaye’s
assassination in 1993. Little wonder in such
circumstances if each victimized community tends to inflate the number of
casualties it has suffered at the hands of
the other.
Mythologies
In the Great Lakes as elsewhere myths
materialise in different forms at different
epochs. Some are traceable to precolonial times (e.g. the myths of origins of
the Nyiginya monarchy); others are the
product of colonial historiography (e.g. the
Bantu vs. Hamites fantasy); others still, of
more recent vintage, are part of the
ideological ammunition of political parties.
Myths are nowhere more likely to flourish
than where violence becomes endemic.
That the Great Lakes happens to be the
most violent region anywhere in the continent and at the same time one where
myths have never ceased to grow and proliferate is not a matter of coincidence. As
Chris Hedges perceptively noted, “the
potency of myth is that it allows us to make
sense of mayhem and violent death”.2 And
what makes sense for one community is
rejected as nonsense by the other. Since
myth-making puts a normative construction
on the excesses committed by one group
against the other, the chances of ever
reaching agreement on who did what to
who are all the more remote.
What has been called “the numbers
game” is not the only source of confusion.
At a different level of analysis, even more
congenial to the efflorescence of myths
have been the traumatic events that
constitute the tipping points in the bloodstained trajectories of Rwanda and Burundi.
To return to Ndadaye’s murder, the pivotal
event that led to the civil war: as one
reflects on the incredible story pieced
together by some Tutsi extremists to explain
away Ndadaye’s assassination one is
forcefully reminded of Chris Hedges contention that “myth gives justification to
what is often nothing more than gross
human cruelty and stupidity.”3 Ndadaye’s
murder, we are told, was not a random act,
let alone a politically motivated attempt to
reverse the verdict of the elections: it was
dictated by a moral imperative, i.e. to
prevent him from carrying out his longstanding plan to commit genocide against
the Tutsi minority. But the one issue about
which the evidence is most violently
contested – even though recent testimonies have greatly reduced the range of
speculation – concerns the identity of those
responsible for shooting down President
Recourse to myths is nowhere more
tempting than where the evidence is
missing or subject to debate. The greater
the uncertainty surrounding past events,
the more tempting it is to treat as solid
evidence what is in fact a phantasm in
service of an ideology. The “double
genocide” thesis to describe the Rwanda
tragedy is a case in point. While there can
be no question about the crimes committed by the Rwanda Patriotic Front (RPF)
in its quest for power, there is simply no
equivalence in terms of numbers between
the killings perpetrated by the RPF and the
sheer scale of the mass murder committed
by the interahamwe-cum-ex-FAR. This is but
one example among others.
On a number of critically important events,
the best we can do is to speculate on the
2 Hedges, Chris, War is a Force that Gives Us Meaning,
New York 2002, p. 23.
3
23
Ibid.
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Juvénal Habyarimana’s plane, the real
detonator that ignited the 1994 genocide.
Despite the substantial body of circumstantial evidence pointing to the involvement of the future president of Rwanda –
much of it available from the report of the
French magistrate in charge of investigating the matter as well as from the
detailed account of an RPF defector who
also happened to be a leading participant
in the military operations that led to the
crash – the “official truth” is that the
shooting down of the presidential plane
was the dastardly act of Hutu extremists.
International Rescue Committee), the far
greater tragedy suffered by the Congo has
attracted relatively little attention compared to Rwanda. What makes the
carnage in Rwanda uniquely memorable is
that it is, after the Holocaust, the biggest
genocide of the second half of the last
century.
There is nothing mythical of course about
the Rwanda genocide. Where fantasy
creeps in is in the assumption that it is
reducible to a carbon copy of the Holocaust. From this blinkered perspective the
Tutsi are the symbolic incarnation of the
Jews, and thus globally identified with the
good guys, while the Hutu are seen as
stand-ins for the Nazi bad guys. As readers
of Philip Gourevitch and Jean Hatzfeld must
surely realise, the parallel, however flawed,
owes much to the pen of journalists of
Jewish origins, who can hardly be blamed, I
hasten to add, for seeing in the Rwanda
genocide a re-enactment of the Shoa.
More intriguing, however, is how some Tutsi
are returning the favour: I refer to the
appropriation of Jewish identity by a small
group of Tutsi intellectuals from Burundi and
Rwanda who, under the banner of a
Brussels-based association (Havila), quote
chapter verse from the Bible to reclaim their
Kushitic-based Jewishness. Even more surprising is the spin-off effect of this initiative
to the Congo, and of all places Katanga!
Thus in a lengthy statement issued in 2004,
we learn that “the Imperial Lunda House of
Shaba/Katanga proclaims its historic alliance with the Tutsi Jews within the SouthKushitic Confederation”, a natural alliance
given that “we Lunda have been linked to
the Tutsi since times immemorial, share the
same roots and are part and parcel of the
same history”. 5 A more sustained exploration of the Tutsi-Jewish nexus would take
us too far afield. Suffice to note that
Rwanda’s legacy of genocide has
produced some of the most startling
mutations of identity.
Rwanda is the locus classicus of mythmaking. From early missionary fantasies
about Bantus and Hamites to the scurrilous
cartoons and ethnic slurs of Kangura, not to
mention the rabidly racist “Hutu Ten
Commandments”, from the rituals of the
genocide commemorations - which, as
Claudine Vidal observed, explicitly deny
the status of victims to those Hutu who fell
under the blows of the interahamwe 4 – to
the drastic redrawing the country’s ethnic
map, Rwanda has never ceased to nurture
and disseminate one set of mythical
representations after another. In its latest
avatars, the phenomenon has as much to
do with the semantics of genocide as with
the perception that the new Rwandan
authorities have of the root cause of the
bloodbath: Since Hutu-Tutsi enmities were
the moving force behind the killings, the
most obvious remedy against a recurrence
of such horrors is to do away altogether
with such nefarious labels and replace
them with the term Banyarwanda. To this
extraordinary exercise in ethno-surgery we
shall return in a moment.
As for the term “genocide”, it evokes visions
of the extreme, among which the Holocaust is first and foremost. It tends to eclipse
all other crimes by its scale and cruelty. We
are thus confronted with the paradox that
although civil strife in the Congo has
claimed more than five times the number
of human lives lost in Rwanda (i.e.
approximately 5.4 million according to the
5 Kayemb Uriel Nawej, pour le Prince Impérial RuundLunda Jimb André Tshombe, “La Maison Impériale
Lunda proclame son alliance historique avec les juifs
Tutsi au sein de la confédération Sud-Kushitique”,
Lubumbashi, 5 septembre 2004.
4 Vidal, Claudine, “Les commémorations du génocide
au Rwanda”, Les Temps Modernes, 2001, p. 613.
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The Judeization of Tutsiness may conceivably be dismissed as an aberration; the
official obliteration of Hutu-Tutsi identities for
the sake of a unified Rwandan selfhood
confronts us with a phenomenon of a very
different nature. What we are dealing with
here is a political decision made at the
highest level. The aim is a drastic reconfiguration of Rwanda’s ethnic map. The
underlying logic is disarmingly simple: if
awareness of ethnic differences can be
learned, so too can the idea that ethnicity
does not exist. In other words, since HutuTutsi enmities have been the bane of
Rwanda, the time has come to create a
national community free of the taint of
ethnicity. In line with this reasoning the
constitution has been duly amended to
sanction the crime of “divisionism” as a
constituent element of genocidal ideology.
Besides providing the government with a
convenient pretext to ban all forms of
ethnically inspired opposition, it offers the
new nation-builders an ideological justification for legislating ethnic ties out of
existence. The question is whether the ban
on ethnic memories is the safest strategy for
building a new Rwanda.
through radically different lenses. At stake
here is not the reality of the horrors
committed by one group or the other, but
the circumstances that led to the carnage,
the identity of the participants in the killings,
the responsibilities of the leaders who
carried out such crimes. This is where the
clash of memories takes the form of conflictive and seemingly irreconcilable narratives.
There is, on the one hand, the familiar tale
of woe of the blood-soaked Hutu genocidaires, inflicting mass murder as well as
unspeakable sufferings on innocent Tutsi
civilians, and there is, on the other, the
untold story – except only recently by
Abdul Ruzibiza, 7 - of the countless Hutu
civilians killed in cold blood by RPF soldiers,
the responsibility borne by the RPF leadership in the shooting down of Habyarimana’s
aircraft, the mass murder of refugees in
eastern Congo. Not only are these
narratives not mutually exclusive, they are
complementary. They each reveal a fundamental aspect of the gruesome reality,
yet they have to be brought into a
common historical memory. Referring to the
abominations that have accompanied the
Armenian genocide, Chris Hedges writes:
“These atrocities – denied by the perpetrators and sanctified by the victims – leave
huge chasms between peoples. They serve
to create two distinctive and antagonistic
histories. It is only with an historical consensus that there can be reconciliation”
(my italics). 8 The thwarting of ethnic
memories is unlikely to heal the scars of
genocide; the recovery of such memories, I
would suggest, is the indispensable first step
for each community to acknowledge their
share of the blame. That there is such a
thing as a shared responsibility for the
bloodbath of 1994 is what Rwanda’s
ideologues refuse to admit. The same
applies to other tragedies, including the
1972 genocide in Burundi, the massacres of
innocent Tutsi populations in 1993, following
Ndadaye’s assassination, the 1996-1997
cleansing operations conducted by the
Rwanda army in eastern Congo, and the
Memory and Oblivion
It is in the nature of memory to be selective.
Oblivion and memory are but two faces of
the same coin. Yet there is an obvious
difference between the blank spots in
individual or collective memories and the
hijacking of ethnic memories by the state.
Oblivion in this case is ordained from above;
it is enforced by the courts; it reflects a
political agenda. Seen from this perspective, the elimination of ethnic identities
in contemporary Rwanda is a recipe for
failure.6
To this day, the clash of ethnic memories
continues to draw apart perpetrators and
victims, not only for what they have
suffered at each other’s hands, but
because their respective agonies are seen
6 This section draws heavily from my chapter on “The
Politics of Memory” in my forthcoming book, The
Dynamics of Violence in Central Africa, University of
Pennsylvania Press.
Abdul Ruzibiza, Rwanda: L’histoire secrète, Paris,
2005.
8 Hedges, op. cit. p. 126.
7
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murderous civil war that engulfed Burundi
from 1993 to 2003.
Echoes of Ricoeur can be detected in Eva
Hoffman’s wonderfully sensitive essay on
“The Balm of Recognition”. Yet she goes
further in her attempt to situate the experience of trauma in historical perspective.
She invites us “to look beyond the fixed
moment of trauma to those longer historical
patterns, to supplement partisan memory
with a more complex and encompassing
view of history – a view that might examine
the common history of the antagonistic
groups and that might, among other things,
enable us to question and criticize dubious
and propagandistic uses of collective
memory”.12
In his magisterial work on Memory, History
and Oblivion, the late Paul Ricoeur reminds
us of the difficulties involved in getting a
memorial grip on the past. He refers to
“thwarted memory, manipulated memory
and enforced memory” (“mémoire empechée, mémoire manipulée, mémoire
abusivement commandée).9
Contemporary Rwanda, as I have shown
elsewhere, offers a perfect illustration of this
trilogy. By way of a conclusion, I want to
draw attention to what he calls “le travail
de mémoire”, or “the labour of memory”,
by which he means a sustained effort to
probe the relationship between history and
memory, and between memory and recognition. It harks back, says Ricoeur, to
Freud’s concept of Durcharbeiten (which
he translates as “translaboration”); just as
the obsessive, repetitive memory of traumatising events can be seen as an obstacle to
the psychoanalytic cure, the compulsive
urge to rehash the sufferings endured by
one group at the hands of another, stands
in the way of the healing process. What is
needed instead is a new kind of narrative
history, where the past is seen from the
vantage point of the other; this does not
mean forgetting the past but rather
“narrating differently the stories of the past,
telling them from the point of view of the
other – the other, my friend or my enemy”.10
As alternative perceptions are brought into
view, the past takes on a different meaning:
“Past events cannot be erased: one
cannot undo what has been done, nor
prevent what has happened. On the other
hand, the meaning of what has happened,
whether inflicted by us unto others, or by
them upon us, is not fixed once and for all.
What has changed is its moral freight (sa
charge morale), the weight of the debt it
carries. This is how the working of memory
opens up the way to forgiveness to the
extent that it settles a debt by changing
the very meaning of the past”.11
Such indeed is the message that I would
want the theme of this conference to
convey to all of us, and to all the people of
the Great Lakes – that the time has come
for a constructive recovery of the past.
Which does not mean to forget but to
transcend the horrors of reciprocal killings,
to look beyond the fixed moment of
trauma, so as to supplement ethnic
memory with a more encompassing, and
ultimately more generous vision of the
future.
Paul Ricoeur, La mémoire, l’histoire, l’oubli, Paris 2002.
Paul Ricoeur, “Le pardon peut-il guérir?”, Esprit,
March-April 1995, p. 78.
11 Ibid.
9
Eva Hoffman, “The Balm of Recognition”, in Human
Rights, Human Wrongs, Nicholas Owen ed., Oxford,
1999, p. 296.
10
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René Lemarchand
bourreaux; elles font table rase des interconnections qui traversent les frontières
nationales; elles ne prétendent qu’une
attention distraite, ou une inattention calculée, aux contextes où se situent ces
dialectiques meurtrières qui à travers le
temps et l’espace engendrent les vengeances ethniques, au prix de centaines
de milliers de vies humaines.
Résumé de
“The Great Lakes Region through
the Prism of History: Oblivion,
Memory and Myth-Making”
Au vu de ces considérations un constat
s’impose: aucune communauté, Hutu, Tutsi
ou Twa, ne peut revendiquer son innocence face à des massacres qui n’ont
jamais été à sens unique, même si le chiffre
des victimes varie énormément d’un
groupe à un autre. Les mêmes standards
de culpabilité et de moralité devraient
s’appliquer indépendamment des pays ou
des communautés. Si les insurgés Hutu
portent une lourde part de responsabilité
dans le bain de sang qui a endeuillé le
Burundi en 1972, on peut également se
demander si le génocide de 1994 aurait eu
lieu sans l’invasion du Rwanda par le Front
patriotique rwandais, et sans le choc
provoqué par le crash de l’avion du
Président Habyarimana. Dans le même
registre, il est difficile de comprendre les
atrocités commises dans la foulée du
meurtre de Melchior Ndadaye sans tenir
compte de l’impact psychologique de
l’évènement, de cette gifle à la démocratie que fut son assassinat, et enfin, pour
beaucoup de Hutu, de la remise en
mémoire du génocide de 1972. Prétendre,
comme le firent en leur temps certains
extrémistes Tutsi, que la mort de Ndadaye
se justifiait par son projet génocidaire est
typique des mythes qui entourent l’historiographie de la région. C’est aussi, rappelons-le, cette même intention génocidaire
attribuée aux autorités du Sud Kivu qui, en
2005, fut invoquée par Laurent Nkunda
pour attaquer et prendre le contrôle de
Bukavu, avec pour conséquence le
massacre des Banyamulenge a Gatumba
(Burundi). C’est ainsi que le concept de
Le thème de cette conférence nous invite
à une plongée dans l’histoire – singulièrement tragique et tourmentée -- de la
Région des Grands Lacs, et ceci pour
mieux baliser son avenir. Exercice salutaire
mais non sans risque. Sans doute y a-t-il un
part de vérité dans l’idée que quiconque
oublie son passé est condamné à le revivre,
formule qui nous renvoie à l’obsession,
typiquement française, du “devoir de
mémoire”. Or chacun de ces postulats
laisse dans l’ombre ce qui devrait être, à
mon sens, la véritable interrogation: de
quel passé s’agit-il? De quelle mémoire
avons nous le devoir? Nous touchons ici
aux risques que soulève l’exercice qui nous
est proposé.
Le danger n’est pas d’oublier le passé mais
de le circonscrire; non d’araser la mémoire
mais d’occulter celle d’un groupe au profit
de l’autre; non d’oublier le génocide des
Tutsi au Rwanda en 1994 mais de le voir
éclipser celui des Hutu du Burundi en 1972.
D’où le mérite d’une démarche historique
ayant pour objet d’élargir notre champ de
vision. Seul un regard objectif sur le passé
peut nous dispenser des formules trop
faciles, où l’ethnie se confond avec la culpabilité ou l’innocence, où l’amalgame se
substitue à l’analyse, et l’évènement s’affranchit de ses racines historiques. Ce que
l’histoire met en lumière c’est une gamme
de facteurs qui donnent un démenti aux
interprétations manichéennes: trop souvent
celles-ci se refusent à reconnaître ce que
Primo Lévi appelait les “zones de grisaille”
qui entourent les relations entre victimes et
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Plenary session - Séance plénière
The Great Lakes region through the prism of history: oblivion, memory and myth-making
La Région des Grands Lacs à travers le prisme de l’histoire : la mémoire, l’oubli et la création des mythes
17.00-18.30h
Thursday – Jeudi 14.08.2008
génocide s’affranchit de son historicité
pour se transformer en mythe au service de
l’ethnisme.
une mémoire officielle imposée d’en haut.
Or c’est bel et bien cette mémoire
imposée qui dans le Rwanda d’aujourd’hui
se met en travers des mémoires ethniques,
et, ce faisant, pose problème. Il ne s’agit
pas seulement de réhabiliter la mémoire
Hutu, même s’il est impératif de mettre en
évidence un certain nombre de faits trop
facilement oubliés: la très faible participation de la population Hutu aux tueries
de Tutsi (environ 6%), contrairement à la
version officielle; le fait que des milliers de
Hutus furent massacrés par les génocidaires,
et a ce titre devraient être reconnus en
tant que victimes; que de nombreux Hutu
risquèrent leurs vie pour sauver leurs voisins
Tutsi. Autant d’éléments constitutifs de la
mémoire Hutu, au même titre que les
atrocités commises par les bourreaux. Ceci,
évidemment, ne devrait aucunement
occulter la mémoire Tutsi (ni celle des Twa),
et en premier lieu celle des rescapés, car
eux aussi ont des comptes à régler avec
l’histoire.
La distance qui sépare le mythe de la
réalité s’inscrit dans les zones d’ombre qui
entourent l’histoire des Grands Lacs: nul ne
saura jamais le chiffre exact des victimes
de 1972 au Burundi, ni de la guerre civile
qui a suivi l’assassinat de Ndadaye, a
fortiori des pertes subies par les communautés Hutu et Tutsi. Si nous avons un chiffre
beaucoup plus fiable en ce qui concerne
les victimes de 1994 au Rwanda, nous
sommes incapables d’évaluer le chiffre des
Hutu tués par d’autres Hutu pendant le
génocide, ni de ceux exterminés par le FPR
au Rwanda, encore moins l’étendue du
nettoyage ethnique des réfugiés Hutu dans
l’est du Congo en 1996-97. Devant ces
incertitudes il est tentant de combler ces
lacunes par des estimations fantaisistes -pour le groupe ciblé d’augmenter le
nombre des victimes et pour le groupe
incriminé de les sous-estimer. C’est sur la
base de ce principe que prit forme l’affabulation du “double genocide” à propos
du Rwanda.
Dans son ouvrage magistral sur La Mémoire,
l’histoire et l’oubli, le regretté Paul Ricœur
parle de “mémoire empêchée”, de
“mémoire manipulée”, de “mémoire abusivement commandée”. A chacun de ces
termes l’histoire des Grands Lacs offre une
tragique illustration. Au delà de la mémoire
empêchée ou abusivement commandée
dont le Rwanda donne l’exemple, il y a les
manipulations mémorielles qui trouvent leur
terreau dans l’histoire coloniale et précoloniale, et servent d’aliment à l’idéologie
génocidaire. Il y a aussi la mémoire retrouvée. A cet égard il faut espérer que tous
ceux qui se sentent concernés par l’avenir
de la région, sans exclusive d’ethnie ou de
pays, puissent trouver leur inspiration dans
ce que Ricœur appelait “le travail de
mémoire”. Cet exercice, qui s’inspire de la
psychanalyse freudienne (Durcharbeiten),
a pour objet d’arriver à une meilleure
compréhension de la relation entre histoire
et mémoire, entre mémoire et reconnaissance, en l’occurrence la reconnaissance de “l’autre” en tant que victime.
Plutôt que de ressasser de manière
compulsive et obsessionnelle les souffrances d’un groupe à l’exclusion de l’autre,
nous dit Ricœur, une nouvelle vision du
passé nous sollicite. Le but ultime de cette
Les mythes, comme le souligne Chris
Hedges, ne sont souvent qu’une stratégie
visant à justifier les pires cruautés. Le
Rwanda nous en donne de multiples exemples, allant des caricatures de Kangura aux
incitations à la haine ethnique inscrites
dans les fameux “Dix commandements
Hutu”. On comprend mieux, à la lumière du
rôle joué par ces élucubrations dans la
montée en puissance des interahamwe -les méchants Hamites contre les braves
Hutu -- pourquoi le Président Kagame ait
vu dans l’élimination des ethnies la promesse d’un avenir radieux. On peut néanmoins s’interroger sur la sagesse d’une
décision qui tend à remplacer une mythologie par une autre, en l’occurrence un
univers affranchi de toute identité ethnique
où seuls les Banyarwanda ont le droit de
figurer.
La mémoire et l’oubli sont les deux faces
d’un même phénomène; la mémoire est
par sa nature sélective. Il n’empêche que
le tri qui s’opère par le jeu de ses
défaillances, n’a rien de commun avec
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La Région des Grands Lacs à travers le prisme de l’histoire : la mémoire, l’oubli et la création des mythes
17.00-18.30h
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démarche n’est pas de mettre entre
parenthèses les évènements qui font mal,
mais de les insérer dans une nouvelle forme
d’histoire narrative, où le passé est
appréhendé du point de vue de l’autre.
Ce qui change ce n’est pas l’évènement
en tant que tel mais la charge morale qu’il
véhicule. C’est ainsi, nous dit Ricœur, que
le travail de mémoire ouvre la voie au
pardon, dans la mesure où il règle une
dette en transformant la signification du
passé.
Pas d’avenir sans le passé? Encore faudraitil que les drames qui ont traversé la région
cessent d’alimenter les haines et les vengeances; la recette que nous propose
Ricœur pour les exorciser n’est peut-être
pas la meilleure, au moins dans l’immédiat,
mais elle a cependant le mérite de nous
orienter vers une nouvelle lecture du passé
pour repenser l’avenir.
René Lemarchand is Emeritus Professor at
the University of Florida. He has written
extensively on the Great Lakes region. His
book on “Rwanda and Burundi” (1971)
received the “Herskovits Award” from the
American Association of African Studies in
1971. He is the author of “Burundi: Ethnic
violence and genocide” (1995), and
“Political awaking in the former Belgian
Congo” (1964). He served with USAID as
Regional Advisor on Governance and
Democracy for West Africa in Abidjan
(1992-1996) and Accra (1997-1998).
Reception by the Lord Mayor of the City of
Marburg in the city hall
Réception à la mairie de Marburg par le
Maire Egon Vaupel
His book on “The Dynamics of violence in
Central Africa” (University of Pennsylvania
Press) will come out in October. He has
served as visiting lecturer at the University of
California at Berkeley, Brown University,
Concordia University in Montreal, Smith
College, and the universities of Helsinki,
Bordeaux, Copenhagen and Antwerp.
He is currently working on a collaborative
volume
tentatively
titled,
“Forgotten
genocides: The interplay of memory and
oblivion”.
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9.15 – 11.00h
Plenary session - Séance plénière
1990 – 2008 Political and societal situation in the Great Lakes Region
Evolutions politiques et sociétales dans la Région des Grands Lacs
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Lakes Region
1990 – 2008 Evolutions politiques et sociétales dans la
Région des Grands Lacs
Dynamiques politiques et institutionnelles en Afrique des Grands Lacs :
1990 – 2008
Julien Nimubona, Université de Bujumbura, Burundi
Commentaire:
Isidore Ndaywel è Nziem, Université de Kinshasa,
République Démocratique du Congo
Modération: René Lemarchand, University of Florida
Rapporteur: Joseph Ngarambe
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9.15 – 11.00h
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1990 – 2008 Political and societal situation in the Great Lakes Region
Evolutions politiques et sociétales dans la Région des Grands Lacs
Friday – Vendredi 15.08.2008
Dynamiques politiques et institutionnelles en Afrique des Grands
Lacs : 1990 - 2008
Julien Nimubona
consciences et de croyances en la possibilité de vivre ensemble.
Dès le début des années 1990, les effets des
régimes autoritaires fondés depuis les indépendances sur les politiques de la violence2,
les pratiques néo - patrimoniales 3 de corruption, de clientélisme, d’ethnisme et de
régionalisme se sont faits sentir et ont désaxé la ligne de cette rencontre de l’Etat
avec la Nation. Au Burundi et au Rwanda,
c’est l’Etat qui perd sa nation lorsque des
guerres civiles conduisent à des crimes
massifs de guerre, de crimes contre l’humanité et de génocide. Au Zaïre/RDC, c’est la
Nation qui perd son Etat puisque la
conscience nationale réussit à sauver le
pays de mobilisations rebelles multi–centrées ayant des élans géopolitiques internes
et régionaux4.
Introduction
Entre 1990 et 2008, l’Afrique des Grands
Lacs connaît un temps de grande tourmente politique et institutionnelle suivie
d’un processus de stabilisation et de
recherche de la paix au niveau national et
au niveau régional. Aujourd’hui, il est
légitime de se poser la question de savoir si
on passe des « conflits à la paix »1, tant les
enjeux et les défis sont énormes tant à
l’interne de chaque pays et de la région
qu’à l’externe des deux niveaux. Cette
période pourrait se caractériser de trois
grandes manières : des Etats à la
recherche de leurs Nations et des Nations à
la recherche de leurs Etats ; des stratégies
institutionnelles de sortie de crises ; une
approche régionale insuffisante et une
absence de synchronisation des rythmes
politiques et institutionnels.
La convergence de plusieurs facteurs dont
les plus importants sont la raréfaction des
ressources économiques et par conséquent
la fin des capacités de dons5 ainsi que les
demandes internes et externes relatives à
la libéralisation démocratique sont venus
Guichaoua, André, Vidal Claudine, « Les politiques
internationales dans la région des Grands Lacs
africains », in Politique africaine, N°68, Décembre 1997,
pp.3-10, p.4
3 Pour l’analyse de ces pratiques voir : Médard, JeanFrançois (dir.), Etats d’Afrique noire. Formations,
Mécanismes et Crise, Paris, Karthala, 1991 ; Bayart, J.F., L’Etat en Afrique. La politique du ventre, Paris,
Fayard, 1989
4 Cros, Marie France, Misser, François, Géopolitique du
Congo, Bruxelles, Complexe, 2006 ; Tshiyembe,
Mwayila, Géopolitique de paix en Afrique médiane,
Paris, L’Harmattan, 2003 ; Lanotte, Olivier, « La guerre
en République démocratique du Congo (1998-2004) »,
in Remacle, Eric, Rosoux, Valérie, SAUR, Léon, Op cit.,
pp.41-62, p.43
5 Nimubona,
Julien, « La masque ethnique du
clientélisme politique au Burundi », Communication au
colloque international sur « Le comparatisme à la
croisée des chemins. Autour de l’œuvre de JeanFrançois Médard : néo-patrimonialisme, corruption,
gouvernement local, échange et éthique politiques »,
Bordeaux, 29-31 mars 2007 (à paraître dans Actes du
Colloque)
2
I. Des Etats à la recherche de leurs
Nations et des Nations à la
recherche de leurs Etats
A l’origine de la grande tourmente
politique et institutionnelle que l’Afrique des
Grands Lacs a connue au cours de la
période considérée se trouve la grande
problématique de la conciliation entre
l’Etat en tant qu’organisation politique et la
Nation en tant que communauté de
1 Sous – titre de l’ouvrage de Remacle, Eric., Rosoux
Valérie., Saur Léon, L’Afrique des Grands Lacs. Des
conflits à la paix ?, Bruxelles, P.I.E. Peter Lang, Editions
scientifiques internationales, 2007
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9.15 – 11.00h
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Evolutions politiques et sociétales dans la Région des Grands Lacs
Friday – Vendredi 15.08.2008
alourdir le climat. Ainsi, des guerres civiles
larvées sont devenues des guerres ouvertes
avec des dimensions de conflits civils
internes, de conflits interétatiques et de
conflits armés complexes6.
II. Des stratégies institutionnelles pour
sortir des crises
Dans l’ensemble des trois pays de la Région
des Grands Lacs (Burundi, Rwanda, RDC), il
existe une convergence sur l’impérieux
objectif d’articuler Etat et Nation. La première manifestation d’une telle volonté,
c’est le consensus sur la nécessité des élections. Tous les arrangements politiques et
institutionnels qui ont pu se faire dans le cas
du Burundi et de la RDC posent l’issue
électorale comme résultat final10. Quant au
Rwanda, l’option démocratique est considérée comme un moyen tandis que la
vraie fin se situe du côté de l’efficience de
l’Etat pour séduire la Nation11.
Cette situation peut être considérée
comme le résultat mais également la
cause de la remise en cause des représentations idéales des gouvernés de la
meilleure forme de gouvernement (des
autorités, des systèmes de règles et de
pratiques), d’où un grave problème de
légitimité justifiant des affrontements entre
concitoyens et des mobilisations rebelles
aux régimes. En plus des facteurs internes
comme les disfonctionnements bureaucratiques et l’inefficience des gouvernements et externes comme le soutien aux
rébellions ou l’intervention directe 7 , ces
mobilisations ont éprouvé les systèmes
jusqu'à provoquer l’effondrement des Etats8.
En vue de la résolution des conflits et la
stabilisation de la région, la grande bataille
en Afrique des Grands Lacs (le Rwanda
depuis la fin du génocide, la RDC depuis le
processus de Lusaka initié en 1998 et le
Burundi depuis le processus d’Arusha initié
en 1998) consiste à reconstruire les Etats (en
leur conférant leur attribut weberien du
monopole de la violence 9 ) et à les relégitimer (en leur conférant une légitimité
démocratique et une efficience), afin de
retrouver des soutiens importants au sein
des populations. Cette orientation semble
privilégier des stratégies institutionnelles qui
ont certes des performances mais qui
accusent aussi des limites.
Si les « stratégies d’arrangements » développés en RDC et au Burundi ont eu pour
impact positif d’atténuer les conflits dans
leur élan émotionnel et matériel, elles ont
eu pour effets négatifs d’éroder l’autorité
étatique, de criminaliser l’Etat et en basant
les négociations et le partage des pouvoirs
sur les rapports de forces ou les capacités
de nuisance, de rendre le recours à la
violence productif, d’institutionnaliser l’ethnicité (Burundi) et ce faisant de piéger tout
le processus de démocratisation destiné à
refonder les Etats et les Nations12.
Les différents rendez-vous électoraux organisés ont raté cette fonction de réconcilier
en profondeur les pouvoirs politiques et les
citoyens. Faute de visibilité des programmes de changements sur le plan
Voir l’Accord de paix de Pretoria de décembre 2002
pour la RDC, et celui d’Arusha d’août 2000 pour le
Burundi.
11 Shyaka, Anastase, « Refondation de la rwandité :
stratégie de résolution des conflits, de démocratisation
et de développement durable du Rwanda », in
Rutembesa Faustin, Semujanga, Josias, Shyaka,
Anastase, Rwanda. Identité et citoyenneté, Butare,
Editions de l’Université Nationale du Rwanda, 2003,
pp.206-219.
12 Nimubona Julien, « De l’accord d’Arusha aux
élections de 2005 : le processus de paix au Burundi.
Entre Espoirs et inquiétudes », in Remacle, Eric, Rosoux,
Valérie, Saur, Léon, Op cit., pp. 63-93 ; Nimubona,
Julien, « Citoyenneté et représentations ethniques :
perspectives pour la démocratisation en Afrique des
Grands Lacs », in Rutembesa, Faustin, Semujanga,
Josias, Shyaka, Anastase, Op cit., pp. 185-205
10
6 Pour cette typologie des guerres, voir Derriennic,
Jean-Pierre, Les guerres civiles, Paris, Presses de
Sciences Po, 2001, pp.16-17, et pour l’étude du conflit
complexe congolais, Lanotte, Olivier, Guerres sans
frontières en République démocratique du Congo. De
Joseph-Désiré Mobutu à Joseph Kabila, Bruxelles,
Complexe, Les livres du GRIP, N° 266-268, 2003
7 Pourtier, Roland, « La guerre des Grands Lacs », in
Cahiers
français,
N°290,
mars-avril
1999,
La
Documentation française.
8 Zartman I. William, (dir.), L’effondrement de l’Etat.
Désintégration et restauration du pouvoir légitime,
Colorado,
Lynne
Rienner
Publishers/Nouveaux
Horizons, 1995
9 Weber, Max, Economie et société, T.1, Paris, Plon,
1971, p.57
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9.15 – 11.00h
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Friday – Vendredi 15.08.2008
socio-économique, les mobilisations électorales se sont déroulées sur fond de peurs
communautaires (Burundi, Rwanda)13 et de
sentiments ethno nationalistes (RDC)14.
privés se sont développés et ont contribué
à promouvoir le dialogue politique entre
concurrents, la communication entre les
dirigeants et les dirigés, le rapprochement
des familles et des communautés et même
les Etats ou les peuples des Etats. Cependant, cette société civile s’est développée
sur fond de crise des Etats et surtout grâce
à des appuis financiers extérieurs, ce qui
pose le problème de leur identité, de la
cohérence de leurs actions et de leur
viabilité.
En plus d’être perçues et vécues comme
des modèles importés et subis, les politiques
de réinvention de l’Etat (décentralisation,
réformes des corps de défense et de
sécurité, réformes de l’administration publique, politiques de bonne gouvernance,
etc.15 apparaissent davantage comme des
stratégies de contrôle des pouvoirs au profit
des dirigeants que comme des techniques
de réconciliation de l’Etat avec la Nation16.
Au Burundi et en RDC, mieux qu’au
Rwanda, la période analysée a été marquée par le développement d’un des
grands piliers de la démocratie et la bonne
gouvernance: la société civile. Des associations de défense des droits de l’homme
et des catégories spécifiques vulnérables
dans de tels contextes de crises (femmes,
enfants, minorités diverses, etc.) se sont
multiplié et ont été de tous les combats
pour la paix dans la région. Les médias
13 Chrétien,
Jean-Pierre, Le défi de l’ethnisme :
Rwanda et Burundi 1990-1996, Paris, Karthala, 1997 ;
Chrétien, Jean-Pierre, L’Afrique des Grands Lacs. Deux
mille ans d’histoire, Paris, Aubier, 2000 ; Rosoux, Valérie,
« La gestion du passé au Rwanda. Ambivalences et
poids du silence », in Remacle, Eric, Rosoux, Valérie,
Saur, Léon, Op cit, pp. 97-118
14 Tambwe Kitenge Bin Kitoko, Eddie, Collin, Collin,
Makosso (dirs), RD Congo, Les élections et après ?,
Paris, L’Harmattan, 2006
15 Gramizzi, Claudio, Sebahara, Pamphile, « La réforme
du secteur de la sécurité en RDC. Enjeu de la
construction de la paix », in Remacle, Eric, Rosoux,
Valérie, Saur, Léon, Op cit, pp. 143-186 ; Nimubona,
Julien, Performances et limites du mécanisme
institutionnel de la reconstruction de l’Etat au Burundi,
Communication au Colloque du GRAPAX sur « State
building et coopération au développement dans la
région des Grands Lacs. Enjeux pour la Belgique en
RDC et au Burundi », Bruxelles, FUSL, 23 mai 2008, inédit
16
Ndaywel,
Isidore,
« Décentralisation
et
Démocratisation en Afrique, le fédéralisme et la
gouvernance en RDC : L’organisation politique et
administrative d la RDC aux temps anciens », in
Mondes en Développement, Vol.34-2006/1-N°133,
1998 ; voir aussi les communications au colloque du
GRAPAX susmentionné de : Liégeois, Michel, « La
décentralisation en RDC : enjeux et défis » ; Ukelo Jok
Oga, « Actualités sur la décentralisation en RDC : le
point de vue des acteurs » ; Mputu, Jean-Claude, « La
décentralisation, source de conflits en RDC ? » ;
Bolakonga, Ilye, « Décentralisation : une opportunité
pour l’éclosion des territoires ruraux de la RDC ».
III. Une approche régionale
insuffisante et une absence de
synchronisation des rythmes
Si situer les causes des conflits dans la région reste problématique (étant donné la
profondeur historique et nationale de
chaque crise étatique), leurs enchaînements régionaux sont en revanche clairs17.
Tenant compte de ce fait que les conflits
en Afrique des Grands Lacs sont internes,
interétatiques et complexes; le meilleur
mécanisme de leur trouver des solutions
consisterait en la coordination des stratégies, des actions et même des intentions
des intervenants internationaux, étatiques
et infra - étatiques. Tel a été le projet de la
Conférence Internationale sur la Région
des Grands Lacs qui consiste à postuler que
les projets communs donnent une perception positive de problèmes partagés et
Voir Guichaoua, André (dir.), Exilés, réfugiés,
déplacés en Afrique centrale et orientale, Paris,
Karthala, 2004
17
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9.15 – 11.00h
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1990 – 2008 Political and societal situation in the Great Lakes Region
Evolutions politiques et sociétales dans la Région des Grands Lacs
Friday – Vendredi 15.08.2008
peut alors induire une identité régionale, ce
qui permet d’atténuer l’ampleur des
conflits internes qui sont à l’origines de
l’instabilité, des tensions et des guerres inter
- étatiques.
Ne pouvant réguler des sociétés protégées
par une certaine « souveraineté internationale », ou composée d’acteurs qui voudraient eux aussi « vivre du chaos », la
communauté internationale manque de
cohérence, de rigueur et d’efficacité dans
ses interventions. Dans la plupart des cas,
elle ne se contente que de la « politique
d’accompagnement » des gouvernements
institués19.
Cette vision idéaliste est vite contrariée par
la réalité. En effet, au niveau interne
d’abord, les politiques conduites en
matière de réformes institutionnelles, de
paix et de sécurité sont partout conduites
de manière autoritaire, preuve que la
culture démocratique et de bonne gouvernance est loin de s’enraciner. Les
échéances électorales prochaines provoquent déjà de l’énervement aussi bien
au niveau des gouvernants que de leurs
oppositions parce qu’elles sont déjà vécues
comme des drames ou des chocs à éviter.
Cela est d’autant plus préoccupant que
tous ces pays ne sont pas totalement
pacifiés. Au niveau régional ensuite, malgré
les efforts de la Belgique et de l’Union
Européenne pour relancer la CEPGL, il se
manifeste un flagrant manque de volonté
au sommet des Etats lié sans doute aux
ressentiments exacerbés justement suite
aux différentes guerres dans lesquelles tous
les dirigeants actuels ont des responsabilités
(Tous les Chefs d’Etat sont issus des
rébellions).
Conclusion
Ce tableau pessimiste ou plutôt réaliste
cache des dynamiques positives20 comme
les accords de Nairobi (pour la RDC) et de
Dar es Salam (pour le Burundi) en 2006 ; la
paix et la sécurité relative sur les territoires,
le climat serein de travail des gouvernants
qui initient beaucoup de réformes, les
performances économiques du Rwanda,
etc. Mais le scepticisme est fondé d’abord
sur le fait que les pouvoirs de la région sont
issus des temps de guerres et entretiennent
l’impunité des crimes. Ceci justifie l’idée
selon laquelle les Etats qui sortent de
guerres éprouvent d’énormes difficultés à
quitter le spectre des violences. Ensuite, il
est fondé sur cette absence de « coopération » au niveau régional qui prouve
que les pays sont plus en défiance qu’en
confiance. Enfin il tient au fait qu’il manque
une grande vision qui consisterait à prendre
en charge le potentiel de générosité des
peuples et qui donnerait une identité
positive « Afrique des Grands Lacs » à la
région.
Par ailleurs, à l’ombre des Etats en
déliquescence, il s’est développé de
véritables « sociétés contre l’Etat » : des
réseaux et des bandes de criminels
transfrontaliers plus ou moins liés aux
acteurs étatiques. Leurs intérêts et enjeux
sont tels qu’ils doivent empêcher la paix et
la stabilité pour continuer à « vivre du
chaos » 18 . Par ailleurs, les guerres qu’ont
connues ces pays ont provoqué tellement
de blessures que les idéologies mobilisant
les solidarités ethno – raciales transfrontalières de type « Bantu contre Hima » ont
pris racine et ont pour conséquence très
néfaste d’entretenir un état de confrontations communautaires, donc de guerre
civile permanente.
Julien Nimubona, Dr., Chercheur Professionnel en Gouvernance et Développement
Institutionnel
19 Politique africaine, N°68 : Politiques internationales
dans la région des Grands Lacs, 1997 ; Remacle, Eric,
Rosoux, Valérie, Saur, Léon, Op cit., Troisième partie :
Acteurs internationaux de résolution des conflits en
RDC.
20 Mukendi Tshimuanga, Philémon, République démocratique du Congo, entre crise et renaissance, Paris,
L’Harmattan, 2007
Pauwels Natalie, « L’économie de guerre en RDC.
Un défi pour la paix et la reconstruction », in Remacle,
Eric, Rosoux, Valérie, Saur Léon, Op cit, pp.159-186
18
35
9.15 – 11.00h
Plenary session - Séance plénière
1990 – 2008 Political and societal situation in the Great Lakes Region
Evolutions politiques et sociétales dans la Région des Grands Lacs
Friday – Vendredi 15.08.2008
Institut de Développement Economique du
Burundi (IDEC),
Professeur de Science politique des Universités, Consultant international en Gouvernance et systèmes démocratiques et électoraux
Publications sélectionnées
« De l’Accord d’Arusha aux élections de
2005 : le processus de paix au Burundi. Entre
espoirs et inquiétudes », in Remacle (E.),
Rosoux (V.), Saur (L.), dirs, L’Afrique des
Grands Lacs. Des conflits à la paix, Bruxelles,
P.I.E. Peter Lang, 2007, pp.63-93
« Processus de paix au Burundi. Limites et
performances de l’approche instrumentale
de l’ethnicité (1993-2005) », in Deslaurier (C.)
et Juhé-Beaulaton (D.), dir., Afrique, terre
d’histoire, Paris, Karthala, 2007.
« Mémoire de déplacé et de réfugié
burundais. Analyse critique de la politique
publique de réhabilitation », in Guichaoua
A., dir., Exilé, Réfugié, Déplacé en Afrique
centrale et orientale, Paris, Karthala, 2004.
Revue critique des instruments de maintien
de la paix dans la Région des Grands Lacs,
Ouvrage (en co-édition), Butare, Editions
de l’Université nationale du Rwanda, 2004.
« Dynamique de paix au Burundi et ses
implications sur le Rwanda », in Cahiers du
CGC, Université du Rwanda, Butare, 2005.
Analyse des Représentations du Pouvoir
politique. Le cas du Burundi. Lille, Presses
Universitaires du Septentrion,
juin 2001,
648p. (Thèse de Doctorat en Science
politique, Université de Pau et des Pays de
l’Adour / Centre de Recherches et d’Etude
sur les Pays de l’Afrique Orientale -CREPAO,
éditée).
« Les représentations de la citoyenneté :
Analyse culturelle de la participation
politique au Burundi », In FIEVET (Claude),
sous la dir., Invention et réinvention de la
citoyenneté,
Actes
du
colloque
international de Pau, Université de Pau et
des Pays de l’Adour, Pau, Editions Joëlle
Sampy, 2000, pp. 351-361.
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9.15 – 11.00h
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Rapport de séance
Joseph Ngarambe
Les modératrices de la conférence
Hildegard Schürings et Luise Lehmann
présentent le programme de la journée et
expliquent certaines questions organisationnelles. De plus, elles remercient les conférenciers et conférencières qui ont apporte
leur contribution écrite, à 95% environ,
chose exceptionnelle pour une conférence
scientifique.
l’action des groupes violents qui créent des
zones de non droit.
Autre tendance lourde dégagée par M.
Nimubona : la nécessité de légitimer les
Etats démocratiquement en mettant en
place des institutions sorties des élections !
Et pour parvenir à cette étape, des
mécanismes de transition ont été mis en
place, avec souvent un effet désastreux :
l’érosion de l’autorité étatique.
Autre conséquence de cette évolution : la
criminalisation de l’Etat. Les acteurs ayant
le plus de capacité de nuisance sont
privilégiés dans le processus du partage de
pouvoir. On assiste à un phénomène de
violence productive qui consiste à insister
sur l’appartenance ethnique, à l’instar du
Palipehutu qui fait monter les enchères en
s’inspirant du FRODEBU. La violence est ainsi
favorisée aux détriments de la justice et de
la démarche non violente.
Autre tendance lourde dans la région :
l’absence de l’approche régionale, de la
synchronisation des rythmes au niveau
régional. Caractéristiques principales : existence des conflits intra-étatiques, mais aussi
des conflits interétatiques (Exemple : conflit
des Banyamulenge).
Le projet de l’intégration régionale soutenu
pas la Belgique et l’Union Européenne se
heurte à des résistances des intérêts
étatiques contrôlés par des Chefs d’Etat
issus de la rébellion dans les trois Etats. Des
bandes criminelles sont également soutenues par certains Etats et contribuent à
compliquer la donne.
Une telle situation crée des ressentiments
individuels et intra-communautaires.
Par la suite, la parole est donnée au
modérateur de la séance M. René
Lemarchand. Il présente le conférencier
Julien Nimubona comme une « étoile
montante dans le firmament de la science
politique du Burundi », une personnalité
consultée dans ses travaux qui font autorité.
Julien Nimubona parle de la région des
Grands Lacs en dégageant les « tendances
lourdes », recueillies tout au long de ses
travaux dans les trois pays considérés
(Burundi, Congo, Rwanda). En guise
d’introduction, M. Nimubona parle des
tourments qui ont connus les trois pays. Il
parle également des enjeux, des défis qui
ne permettent pas d’être optimiste. Pour lui,
les trois pays ont connu des tourments, mais
ceux-ci sont diversifiés, spécifiques à
chaque pays. Il existe cependant quelques
convergences : des Etats à la recherche de
leur Nation et la Nation à la recherche de
l’Etat.
M. Nimubona a enchaîné sur les effets des
régimes autoritaires fondés sur la violence,
la corruption et le népotisme. Il a souligné
la délinquance de l’Etat zaïrois mais qui n’a
pas perdu sa valeur Nation. Le Burundi a
été aussi évoqué pour souligner l’affaiblissement de l’Etat, tandis qu’au Rwanda la
situation de l’Etat en construction a été
mise en exergue avec sa dimension
autoritaire.
Les conflits qui jalonnent l’évolution des trois
Etats ont été également soulignés. Ces
Etats sont à la recherche de leur rôle qui est
le monopole de la violence pour limiter
En conclusion, M. Nimubona se déclare
pessimiste au nom du réalisme. Dans les
trois pays, il règne un climat d’impunité des
crimes. Ces Etats sont en outre caractérisés
par un manque de vision qu’au niveau
régional et par une méfiance inter-Etats
bien marquée. Un climat qui n’est pas
propice à l’intégration régionale.
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par le sentiment national des Congolais
hérité du régime Mobutu.
Un deuxième intervenant demande s’il
existe des efforts des communautés locales
pour s’opposer aux mouvements des
rebelles. Il se demande en outre si le réflexe
identitaire n’est pas la conséquence de
l’injustice colonial. M. Nimubona répond
qu’il existe des initiatives de la société civile
pour circonscrire les violences des mouvements rebelles et pour aboutir à la
construction d’une paix durable. Il admet
que la colonisation a exploité les clivages
sans perdre de vue les responsabilités des
élites post-coloniales.
Commentaire de M. Isidore
Ndaywel è Nziem :
M. Ndaywel è Nziem rend hommage aux
organisateurs de la conférence et appelle
à la multiplication des occasions de
dialogue. Il souligne que l’Afrique des
Grands Lacs n’est pas une entité
homogène.
L’Afrique des Grands Lacs comprend une
entité nordique et une partie méridionale,
lesquelles ne sont pas forcément articulées
de la même façon à travers l’histoire.
Autre dimension à prendre en compte : la
mondialisation. Dans ce cadre, on parle de
la bonne gouvernance et de la démocratie. Une question à se poser : bonne
pour qui exactement ? Pour les peuples ou
pour la Banque Mondiale ?
La notion de démocratie véhicule le
multipartisme, notion mal maîtrisée dans la
mesure où l’on finit par sombrer dans
l’éthnicisme.
Les voies pour s’en sortir passent par la
cessation des guerres et le processus
semble engagé. Mais pour que la
démarche soit durable, il faut une lecture
consensuelle de l’histoire de la Region des
Grands Lacs.
A la question de savoir comment gérer les
problèmes de l’ethnicité, M. Nimubona
déclare privilégier la suppression, même s’il
doute du réalisme de cette approche. Pour
lui, le modèle Rwandais pose des problèmes au modèle Burundais et l’inverse est
aussi vrai.
Autre défi : la question démographique. Le
Rwanda et le Burundi sont menacés par
l’explosion démographique qu’avec des
impacts négatifs dans toute la région. Mais
il ne faut pas oublier que la RDC et même
la Tanzanie sont confrontés au même
problème.
Afin de répondre à tous ces défis, il est
nécessaire d’avoir une grande vision de
l’Afrique des Grands Lacs.
Par la suite, le modérateur René
Lemarchand invite à poser des questions.
La première question conteste l’efficacité
des systèmes autoritaires qui ont montré
leur limite notamment au Zaïre de Mobutu.
L’orateur souligne également que certaines
élections servent à légitimer les dictatures –
on a laissé la place à des revendications
malhonnêtes à l’exemple du Kenya et du
Zimbabwe. En réponse, M. Nimubona
déclare qu’il a toujours été impressionné
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Evolutions politiques et sociétales 1990 – 2008 Burundi
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Workshop/ Atelier
Evolutions politiques et sociétales 1990 – 2008 Burundi
Les défis de la reconstruction de l’Etat et de la stabilisation politique
Julien Nimubona, Université de Bujumbura
Comment la communauté des Batwa a vécu les conflits et les
changements – quels sont les défis ?
Liberate Nicayenzi, Unions Nous pour la Promotion des Batwa, Burundi
Modération: Jean-Baptiste Sadiki, Bruxelles
Rapporteure : Carla Schraml, Université de Marburg
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11.30 – 13.00h
Workshop/ Atelier
Evolutions politiques et sociétales 1990 – 2008 Burundi
Friday – Vendredi 15.08.2008
Les défis de la reconstruction de l’Etat et de la stabilisation
politique au Burundi : 1990-2008
Julien Nimubona
et dirigés. Quant à Raymond ARON 2 , la
stabilisation politique tient à quatre facteurs
déterminants à savoir : la disponibilité des
ressources économiques, la neutralité et le
professionnalisme de l’armée, la qualité
(compétence) du leadership politique et
administratif , le respect des procédures
légales
ou
institutionnelles
(culture
institutionnelle). A ces facteurs, RogerGérard Schwartzenberg3 ajoute la « cohérence gouvernementale » ou « l’unité de
direction », le contrôle du gouvernement
par un Parlement efficace ; une opposition
responsable et une société civile solide et
crédible ; une politique de communication
politique efficace ; la recherche permanente de consensus sur les valeurs
nationales, la forme et la nature des
institutions, etc.
Introduction
Pour résoudre un conflit à multiples
dimensions (économiques, sociales, culturelles, politiques et ethno - politiques, régionales) qui a secoué le pays depuis 1993, et
aux fins de reconstruire l’Etat et d’atteindre
une stabilisation politique, les parties en
négociations à Arusha ont convenu sur la
voie institutionnelle consistant en un ensemble de réformes de structures et de
cadres légaux (constitution, loi électorale,
réformes institutionnelles comme celles qui
ont touché les corps de défense et de
sécurité ou la magistrature, nouvelles lois
régissant certains appareils de l’administration publique) et en un processus de
démocratisation avec notamment l’organisation des élections.
Après avoir donné le contenu de l’objectif
recherché et les indicateurs poursuivis, la
présente contribution montre que les
solutions apportées privilégiant les logiques
institutionnelles et matérielles et évacuant
les pesanteurs idéologiques et normatives
ou éthiques, accusent des limites.
Il est ici clair que stabilisation politique est
au cœur de la reconstruction de l’Etat de
par les réformes institutionnelles qu’elle
suppose. Elle apparaît également liée aux
processus de démocratisation, d’institution
d’un environnement de bonne gouvernance, de paix durable et de réconciliation.
Et, si le Burundi d’aujourd’hui satisfait les
conditions de l’alternance politique et de
la majorité démocratique, il lui reste à construire les autres exigences pour échapper
au spectre menaçant de l’instabilité politique.
Mais quelles sont les approches et les
stratégies développées par les acteurs
politiques pour réussir la stabilisation ?
I. Le contenu de l’objectif poursuivi
de la stabilisation politique.
Selon Martin Seymour Lipset 1 , la « stabilisation politique » est conditionnée par trois
facteurs majeurs : l’articulation efficience
/légitimité légale, l’alternance au pouvoir
qui donne au peuple la possibilité de choisir
les gouvernants et les programmes de
gouvernement ainsi que les modes de
scrutin en particulier majoritaire qui permet
de renforcer la confiance entre dirigeants
2 Dans Aron, Raymond, Dix - huit leçons sur la société
industrielle, Paris, Gallimard, 1964
3 Dans
Schwartzenberg, Roger-Gérard, Sociologie
politique, Paris, Montchrestien, 1977
Dans Lipset, Martin Seymour, L’Homme et la politique,
Paris, Seuil, 1963
1
40
11.30 – 13.00h
Workshop/ Atelier
Evolutions politiques et sociétales 1990 – 2008 Burundi
Friday – Vendredi 15.08.2008
II. Le contenu des approches et
stratégies développées
2. L’approche par la bonne
gouvernance et la démocratie
Deux approches ont été privilégiées : le
pragmatisme matérialiste de l’ethnicité
politique ; la démocratisation et l’instauration de la gouvernance.
Les
principales
réformes
engagées
affichent l’intention des acteurs politiques à
mettre en place des institutions démocratiques et de bonne gouvernance.
Ainsi, les gouvernements successifs depuis
2000 ont proclamé dans les discours et
dans les textes conventionnels et constitutionnels les principes généraux relatifs à la
Démocratie et la Bonne Gouvernance
fixées depuis l’Accord d’Arusha.
Des réformes importantes touchant des
secteurs sensibles de l’administration, de
l’armée et de la police ou encore de la
magistrature et des hautes fonctions
publiques sont menées avec succès depuis
la Transition (2000-2003). De nouvelles institutions sont apparues dans le domaine de
la bonne gouvernance telles la Loi anticorruption, la Cour des Comptes, l’Inspection Générale de l’Etat, la Cour et la Brigade anti–corruption, etc.
Des élections ont été organisées en 2005
qui ont permis de baisser les tensions
sociopolitiques qui existaient dans la
société. C’est la preuve que l’alternance
politique et l’existence d’une majorité
démocratique constituent de réels facteurs
de stabilisation politique. Même si les
attentes sont encore énormes, le Gouvernement bénéficie encore de la grâce
électorale.
1. L’approche du pragmatisme
matérialiste de l’ethnicité politique
A Arusha en août 2000 a triomphé la
« logique partoethnocratique ». Les acteurs
politiques burundais ont trouvé dans
l’ethnisme la seule ressource qui pouvait
leur permettre de faire triompher leurs
stratégies de conservation ou de conquête
du pouvoir. Le processus de négociation a
été dominé par la mobilisation et
l’instrumentalisation des appartenances
identitaires. Au Burundi, le politique prime
sur
l’économique
étant
donné
le
développement embryonnaire du secteur
privé. Or, l’espace étatique étant trop étroit,
la concurrence binaire hutu - tutsi restera
violente car, le pouvoir signifie ici un
tremplin pour accéder aux ressources de la
survie matérielle, symbolique et même
physique.
C’est pourquoi l’approche institutionnelle
qui est utilisée privilégie depuis les conventions l’allocation des postes politiques et
administratifs sur base ethno - politique. Si
ce pari « pragmatique » décrispe l’environnement politique, les recompositions
politiques, les spéculations et les infidélités
au sein des partis politiques attestent
cependant que le système institutionnel qui
en découle encourage cette dérive
matérialiste des acteurs politiques au
détriment de la force des partis qui doit
être fondée sur les principes et les
convictions idéologiques. Il a également
pour
conséquence
de
piéger
le
fonctionnement normal des institutions et
l’Etat - Nation en général en encourageant
le recours à la violence en politique, en
institutionnalisant l’impunité et l’ethnicité.
Malgré ces résultats dans le domaine des
réformes, c’est dans la pratique qu’il faut
aller chercher des facteurs d’instabilité
politique notamment la persistance de
l’impunité des crimes de sang et des crimes
économico – financiers (bloquant ainsi le
mécanisme de la justice transitionnelle),
l’irruption des phénomènes de corruption
et de détournement massifs (Affaires
Falcon 50, Interpétrol, Route Rumonge,
etc.), les violations des lois (Arrêt du 5 juin
2008 de la Cour Constitutionnelle), la
violation massive des droits de l’homme
(Actes d’emprisonnement abusif et de
tortures en 2006, Massacre de Muyinga,
etc),
la
persistance
d’une
culture
autoritaire et d’intolérance (Non agrément
des partis nouveaux, chasse et emprisonnement des députés de l’opposition),
etc.
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11.30 – 13.00h
Workshop/ Atelier
Evolutions politiques et sociétales 1990 – 2008 Burundi
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Les réformes institutionnelles se trouvent
ainsi contrebalancées par les pratiques
politiques, ce qui crée un sentiment de
désillusion après les nombreuses attentes
qui se sont exprimées lors des dernières
élections.
violences physiques ; l’élimination
des
formes
de
discrimination
politique, économique et culturelle ;
une communication, une consultation et une négociation permanentes, sincères et efficaces à
différents niveaux et entre les
principaux
détenteurs
d’enjeux
(acteurs politiques institutionnels, les
partis, les syndicats, les associations,
etc.) ;
III. Les problèmes qui se posent et les
défis à relever
La voie institutionnelle de la résolution du
conflit burundais accuse des limites. Elle
agit efficacement sur l’Etat et ses structures
mais agit avec beaucoup de limites sur les
comportements individuels. Le long chemin
à parcourir consiste en l’instauration d’une
culture démocratique et institutionnelle.
Pour relever les défis majeurs, les options
politiques suivantes nous semblent prioritaires :
Promouvoir un système de justice efficace,
légitime et réparatrice ;
Promouvoir un système de loyautés plurales,
c’est-à-dire un système de relations et de
culture politique dépassant et condamnant
les seules identifications ethniques contraires à la culture de citoyenneté;
Une forte internalisation des processus
politiques de démocratie et de bonne
gouvernance ;
La réhabilitation et le renforcement des
instances de régulation sociale à la base,
de socialisation et de sociabilités transrétinoïques.
1) Engager une volonté de punir à
travers des lois les idéologies et tous
les actes de génocide, de massacres, de terrorisme, de racisme,
d’ethnisme, ainsi que toute autre
forme de violence et de crimes
contre l’humanité;
2) Construire les piliers d’un dialogue
politique qui favorise le consensus et
le compromis dans la recherche de
solutions aux problèmes communs,
et qui disqualifie les logiques de
provocation et d’énervement;
3) Créer et protéger les conditions
politiques et institutionnelles d’un
Etat de droit respectueux des droits
de l’Homme, des libertés fondamentales et garantissant l’indépendance du système judiciaire à cet
effet ;
4) Créer les conditions légales pour
protéger l’administration publique
des dérives ethnopartisanes afin de
promouvoir les principes rationnels
qui président au fonctionnement de
toute administration moderne à
savoir la compétence, le mérite et
la neutralité ;
5) Reconnaître et protéger le rôle et la
place importants de l’opposition et
de la société civile ;
6) Promouvoir une culture démocratique fondée sur : l’absence de
Conclusion
Dans un pays qui sort d’une crise profonde,
la solution institutionnelle n’est pas suffisante étant donné que les institutions
démocratiques se développent d’autant
mieux qu’il y a un environnement de paix
durable et de réconciliation en profondeur
de la société.
La notion de « Paix durable » fait référence
à une situation caractérisée par : l’absence
de violences physiques, structurelles,
psychologiques et culturelles, c’est-à-dire
une situation de sécurité objective et
subjective : les gens sont et se sentent en
sécurité ; l’élimination de formes de
discrimination politiques, économiques et
culturelles; un haut degré de légitimité et
de soutien interne et externe du processus
de paix et des acteurs qui le portent.
La notion de réconciliation quant à elle est
le reflet d’un climat moral, social et politique intégré. L’expression « climat moral,
social et politique intégré »4 fait référence à
4 Putnam,
R., Making Democracy Work : Civic
Traditions in Modern Italy, Princiton, Princiton University
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Workshop/ Atelier
Evolutions politiques et sociétales 1990 – 2008 Burundi
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un environnement politique et psychologique caractérisé par le sentiment
« Nous » 5 (par opposition à « Nous » et les
« Autres »), par l’existence de loyautés/
allégeances plurales 6 , la perspective de
bénéfices mutuels résultant de la coopération, la réconciliation du passé et du futur
et une dissolution des murs sentimentaux,
une réconciliation sur les valeurs qui guideront le futur et des engagements mutuels
à coopérer.
C’est à ces conditions pas nécessairement
institutionnelles que le Burundi pourra réussir
sa reconstruction de l’Etat et sa stabilisation
politique.
Julien Nimubona, Dr, Chercheur Professionnel en Gouvernance et Développement
Institutionnel
Institut de Développement Economique du
Burundi (IDEC)
Professeur de Science politique des Universités
Consultant international en Gouvernance
et systèmes démocratiques et électoraux
Press, 1993, cité in Reychler, Luc, Democratic
Peacbuilding : The devils in the Transition, Leuven,
Leuven University Press, 1997
5 Dans le sens développé par Martin, Denis-Constant,
Cartes d’identités. Comment on dit « Nous » en
politique, Paris, PFNSP, 1994.
6 Voir à ce sujet, Grosser, Alfred, Les identités difficiles,
Paris, PFNSP, 1996 ; Bayart, Jean-François, L’illusion
identitaire, Paris, Fayard, 1996
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11.30 – 13.00h
Comment la communauté des Batwa a vécu les conflits
et les changements – quels sont les défis ?
Liberate Nicayenzi
Graphique sur l’effectif des Batwa par
province
Introduction
Remerciements et salutations
9000
8088
7979
7947
8000
67326473
7000 6676
6203
6079
6000
5100
4700
5000
3956
4000
3126
3000
2071
2000
849
786
750 556
1000
0
1. Présentation des Batwa
Bu
jum B u b
B u b ur anz
jum a M a
bu air
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Ru
B u ra l
C a ru r
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M mb
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M vya
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in
M ga
wa
r
Ng o
oz
Ru i
ta
n
Ru a
yig
i
Les Batwa constituent la 3ème composante ethnique de la société burundaise. Ils
représentent environ 1% de la population
burundaise estimée aujourd’hui à 8 millions,
et sont dispersés dans tout le pays avec
une disproportion suivant les provinces.
Tableau : Effectif des Batwa par province
PROVINCE
Effectifs
Bubanza
6676
Fréquence
(%)
8,6
Bujumbura
Mairie
Bujumbura
Rural
Bururi
849
1,1
5100
6,5
3956
5,1
Cankuzo
786
1,0
Cibitoke
7979
10,2
Gitega
6079
7,8
Karuzi
6732
8,6
Kayanza
6473
8,3
Kirundo
7947
10,2
Makamba
2071
2,7
Muramvya
6203
7,9
Muyinga
4700
6,0
Mwaro
3126
4,0
Ngozi
8088
10,4
Rutana
750
1,0
Ruyigi
556
0,7
TOTAL
78071
100,0
Source : Données du tableau précédent
Le tableau et le graphique montrent ainsi
que les Batwa sont très inégalement répartis sur l’ensemble du territoire du Burundi.
De par leur mode de vie, les Batwa ne se
sont jamais fixés définitivement sur des
propriétés foncières et en faire les leurs.
Etant un peuple chasseur-cueilleur et pratiquant beaucoup plus la poterie et la forge,
les Batwa du Burundi ne se sont pas
intéressés à la possession de terres au
même titre que les Hutu et les Tutsi.
Avec la diminution des ressources naturelles
et la mise en place de politiques de protection de l’environnement, les Batwa ont
été obligés de se convertir en agriculteurs
et éleveurs.
En effet, la poterie et la forge sont devenus
aujourd’hui des activités accessoires, les
produits qui y sont issus ne se vendent que
très difficilement. Les produits manufacturés
de cuisine et de conservation de l’eau ont
concurrencé ceux de l’argile et du fer
traités traditionnellement.
Le problème actuel est ainsi celui de
manque criant de propriétés foncières pour
pouvoir s’adapter à cette nouvelle vie.
N’ayant pas pu les acquérir bien avant, les
Batwa sont restés sans terres, vivant sur de
petits lopins de terre ou sous l’empire
d’UBUGERERWA (servitude). Mais avec
Source : Données d’enquête 2006 et 2008
44
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Evolutions politiques et sociétales 1990 – 2008 Burundi
Friday – Vendredi 15.08.2008
11.30 – 13.00h
l’abolition de cette pratique en 1977, la
mesure d’abolition n’a profité qu’aux
autres catégories sociales, beaucoup de
Batwa ont continué de servir de maind’œuvre gratuite chez des familles qui les
utilisent contre une rémunération non seulement en nature mais également insuffisante. Les Batwa se sont alors installés sur les
propriétés de leurs maîtres, vivant dans de
petites huttes couvertes de paille ou de
feuilles de bananier. Ils vivent dans l’insécurité car pouvant être chassés à n’importe quel moment selon l’humeur du
maître.
Statut des ménages batwa sans propriété
foncière
DESIGNATION
STATUT DES
MENAGES BATWA
SANS PROPRIETE
FONCIERE
Ubuger
erwa
EFFECTIFS
1453
Propriété
prêtée
1506
FREQUENCE
(%)
49,1
50,9
TOTAL
2959
100,0
Source : Enquête 2006 et 2008
Tableau montrant le nombre de ménages
batwa et la situation foncière
DESIGNATION
EFFECTIFS
FREQUENCE
(%)
PROPRIETAIRE
D’UN
TERRAIN
Oui
Non
17196
2959
20155
85,3
100,0
14,7
Statut des ménages batwa sans propriété
foncière
TOTAL
1506
1510
1500
1490
1480
1470
1460
1450
1440
1430
1420
Source : Données d’enquête 2006 et 2008
Graphique correspondant à cette situation
Ubugererwa
Propriété prêtée
Source : Données du tableau précédent
17196
18000
16000
14000
12000
10000
8000
6000
4000
2000
0
2. Le conflit burundais
2959
Oui
1453
Le Burundi a connu, depuis les années d’indépendance 1962, des conflits qui ont
emporté des vies humaines appartenant à
toutes les ethnies. Les Batwa ont toujours
été victimes des faits dont ils n’étaient pas
acteurs. Les tueries de 1993 et la guerre de
1996 à 2005 ont fait des veufs et veuves
chez cette communauté, même si le conflit
concernait les deux ethnies majoritaires, les
Hutu et les Tutsi. Certains Batwa ont été
arrêtés et emprisonnés, accusés d’avoir
participé dans les tueries de tel ou tel autre
groupe ethnique (Hutu ou Tutsi).
Non
Source : Données du tableau précédent
Parmi les Batwa identifiés comme des sans
terres, les uns vivent sur des propriétés prêtées, d’autres sous le servage. Le tableau et
la graphique suivants sont très expressifs à
ce sujet.
D’après l’enquête menée par UNIPROBA, la
situation familiale s’est détériorée à cause
de cette guerre, laissant beaucoup de
veufs et veuves et d’enfants orphelins.
45
Workshop/ Atelier
Evolutions politiques et sociétales 1990 – 2008 Burundi
Friday – Vendredi 15.08.2008
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Beaucoup de familles se sont disloquées,
fuyant vers les pays frontaliers.
4. Les changements
a) Création de l’UNIPROBA : c’est une association sans but lucratif dont le but est la
promotion des droits des Batwa du Burundi
b) Accords d’ARUSHA (non implication
directe des Batwa dans les négociations)
c) Constitution Nationale du Burundi :
• Article 164 et 180 (3 Batwa à l’Assemblée Nationale, et 3 Batwa au
Sénat)
• Article 129 et 257 (la constitution ne
réserve pas de quota pour les Batwa, ni au gouvernement, ni dans
l’armée)
d) Commission Nationale Terres et Autres
Biens (1 membre)
e) Inspection Générale de l’Etat (1 membre)
Tableau reprenant la situation des chefs de
ménages
Etat civil
Effectifs
Fréquence (%)
Célibataire
1586
7,9
Marié
14192
70,4
Divorcé(e)
866
4,3
Veuf(ve)
3496
17,3
Orphelin mineur
15
0,1
Total
20155
100,0
Source : Données d’enquête 2006 et 2008
5. Les défis actuels
Graphique 2: Etat civil des chefs de
ménages enquêtés
La scolarisation des enfants batwa
Le défi majeur reste la scolarisation des
enfants batwa, comme le montre le
tableau ci-dessous :
14192
16000
14000
12000
10000
Tableau sur la scolarisation des enfants
batwa au Burundi
8000
6000
4000
3496
1586
866
2000
15
Niveau
Nombre
Primaire
Secondaire
Universitaire
Non scolarisés
TOTAL
8518
429
4
24465
33416
Fréquence
(%)
25,5
1,3
0,0
73,2
100,0
0
Célibataire
Marié
Divorcé(e) Veuf(ve)
Orphelin
mineur
Source : Données du tableau 2
Comme le montre le tableau et le
graphique 2, le conflit burundais qui a débuté depuis les années des indépendances
n’a pas épargné les familles des Batwa.
Source : Données d’enquête 2006 et 2008
Graphique sur la scolarisation des enfants
batwa au Burundi
3. Les conséquences de cette crise
24465
25000
•
•
•
•
•
•
•
Beaucoup de pertes en vies
humaines,
La pauvreté extrême,
L’instabilité (réfugiés en Tanzanie, en
Australie, au Canada, etc.),
La menace du VIH/SIDA et autres
maladies,
Changement des mœurs,
Manque d’autonomie,
Méfiance entre la population
20000
15000
8518
10000
5000
429
4
0
Primaire
Secondaire Universitaire
Non
scolarisés
Source : Données du tableau précédent
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Workshop/ Atelier
Evolutions politiques et sociétales 1990 – 2008 Burundi
Friday – Vendredi 15.08.2008
L’état d’avancement de la scolarisation
des enfants Batwa n’est pas très significatif.
Le taux de scolarisation reste encore très
faible compte tenu des effectifs enregistrés
dans chaque province et à chaque niveau
de l’enseignement, si on fait une analyse
comparative du nombre de scolarisés à
ces trois niveaux pour les deux autres
catégories sociales.
Au niveau de l’université, la situation est
catastrophique ; seulement trois batwa ont
terminée l’enseignement supérieur (niveau
licence), et quatre autres sont en cours de
formation.
Conclusion
Pour terminer, nous souhaiterions émettre
des recommandations :
• Soutenir directement les organisations qui travaillent pour la promotion des Batwa
• Sensibiliser et mobiliser les Batwa
qu’ils soient les « forgerons » de leur
propre développement
• Interpeller les pays africains à la ratification et l’adoption des instruments juridiques visant la promotion
et la protection des droits bafoués
des populations autochtones.
Chez la communauté des Batwa du
Burundi, le niveau général de scolarisation
est très bas, en témoigne le nombre
d’enfants non scolarisés, y compris ceux qui
ont abandonné leurs études surtout au
niveau du primaire : 24465 soit 73,2% du
nombre total d’enfants batwa.
Comme chez toutes les autres ethnies, les
enfants batwa sont nombreux au primaire ;
les chiffres diminuent au fur et à mesure
que l’on monte de niveau, jusqu’à être
presque nuls au niveau universitaire.
QUE DIEU VOUS BENISSE
Liberate Nicayenzi, Présidente de l’association UNIPROBA - Unions Nous pour la
Promotion des Batwa, et membre du
Parlement au Burundi
La problématique foncière
Comme nous l’avons dit plus haut,
l’obtention des propriétés foncières pour les
Batwa reste une préoccupation majeure
de l’UNIPROBA
Les instruments internationaux protégeant
les droits des populations autochtones et
des minorités
Ces instruments ne sont pas ratifiés,
respectés et appliqués par le Gouvernement du Burundi. Nous citons à titre
d’exemple la Déclaration des Nations Unies
sur les droits des peuples autochtones non
adoptée par le gouvernement burundais,
lors de la 61ème session de l’Assemblée
Générale des Nations Unies tenue à New
York en septembre 2007.
Les opportunités
•
•
•
•
Une minorité facile à développer
L’existence de l’UNIPROBA, une
association qui s’occupe exclusivement de l’intégration socio-économique des Batwa du Burundi
La culture des Batwa
Le dynamisme des femmes et des
jeunes.
47
11.30 – 13.00h
Workshop/ Atelier
Evolutions politiques et sociétales 1990 – 2008 Burundi
Friday – Vendredi 15.08.2008
Rapport de séance
Carla Schraml
Dans notre atelier, deux conférenciers ont
fait leur présentation: Julien Nimubona a
parlé des “défis de la reconstruction de
l’Etat et de la stabilisation politique au
Burundi: 1990-2008“ et Liberate Nicayenzi a
analysé “Comment la communauté des
Batwa a vécu les conflits et les changements et quels sont les défis“.
Le modérateur était Jean-Baptiste Sadiki.
question Julien Nimubona a souligné le problème que l’Etat est la seule sphère sociale
dans laquelle l’existence matérielle, symbolique mais aussi physique peut être protégée. En conséquence, il y a une lutte pour
le contrôle de l’Etat.
Au cours de la discussion la question a été
posée pourquoi la guerre au Burundi a duré
plus long qu’au Rwanda. En répondant
Julien Nimubona a souligné l‘espoir trahi et
le choc qui a dominé après 1993: Ensuite,
une radicalisation des partis politiques a eu
lieu au Burundi. La reproduction des
acteurs à cause de l’impunité joue aussi un
grand rôle par rapport à la continuation
des conflits au Burundi.
Julien Nimubona est professeur de sciences
politiques et consultant international en
matière de la gouvernance et des systèmes démocratiques et électoraux.
Libérasse Nicayenzi est la présidente de
l’association UNIPROBA (une association
sans but lucrative dont le but est la
promotion des droits des Batwa) et
membre du parlement de la République du
Burundi.
Pendant
la
deuxième
présentation
Libérasse Nicayenzi a développé le sujet de
la situation de Batwa qu’elle décrit comme
un groupe social à la marge de la société
burundaise. Elle a souligné le fait que les
Batwa sont un groupe qui a été victime des
conflits dans lesquels ils n’étaient pas
acteurs.
Comme problèmes fondamentaux des
Batwa Libérasse Nicayenzi a identifié le
manque de la propriété foncière et le taux
de la scolarisation des enfants très bas –
surtout à l’école secondaire et à l’université.
Dans ce contexte un problème en relation
avec les bailleurs de fonds a été discuté
parce que quelques-uns ne financent pas
des programmes pour l’éducation des
enfants dont les effets ne seraient pas
évaluables.
En outré la confession de Detmold a été
mentionnée pendant la discussion et la
revendication de se mettre dans la
situation de l’autre pour comprendre la
perspective des autres.
La présentation de Julien Nimubona traitait
les défis de la reconstruction de l’Etat et de
la stabilisation politique au Burundi du 19902008. Il a procédé en trois démarches:
D’abord, il a identifié les variables d’une
stabilisation, entre autres il a mentionné la
légitimité légale, l’alternance au pouvoir et
la disponibilité des ressources.
Deuxièmement, Julien Nimubona a identifié
des stratégies pour arriver à la stabilisation
politique: 1) l’approche du pragmatisme
matérialiste de l’ethnicité politique et 2)
l’approche par la bonne gouvernance et
la démocratie. En terminant Julien Nimubona a décrit les défis à relever pour arriver
à la stabilisation politique, par exemple une
volonté de punir et un Etat de droit.
Pendant la discussion d’autres défis étaient
ajoutés par l’audience: le manque de
leadership au Burundi présent et le choc de
la majorité de la population burundaise. En
outre, il a été discuté que pendant les
élections les votes sont influencés par les
appartenances ethniques. Ensuite une
question par rapport aux sources variées du
conflit a été posée. En répondant à cette
La discussion théorétique a été enrichie par
les expériences personnelles de Liberate
Nicayenzi qui a été maltraitée à cause de
son appartenance au groupe des Batwa.
48
Workshop/ Atelier
Evolutions politiques et sociétales au Zaïre/ en République Démocratique du Congo 1990-2008
11.30 – 13.00h
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Workshop – Atelier
Evolutions politiques et sociétales au Zaïre/ en République
Démocratique du Congo 1990-2008
Congo/Kinshasa 1990-2008 : De la démocratisation à l’épreuve des armes
au défi de la (ré)construction
Isidore Ndaywel è Nziem, Université de Kinshasa, RDC, CEMAF - Sorbonne, Paris
La situation des droits de la personne dans la Région des Grands Lacs
Joseph Chiko Sanane, Ligue des Droits de la Personne dans la Region des Grands
Lacs, Goma, République Démocratique du Congo
Modération : Eugène Rutembesa, Université Nationale du Rwanda
Rapporteur : Bernard Niyomugabo, AEPCSM, Rwanda
49
Workshop/ Atelier
Evolutions politiques et sociétales au Zaïre/ en République Démocratique du Congo 1990-2008
11.30 – 13.00h
Friday – Vendredi 15.08.2008
Congo/Kinshasa 1990-2008 : De la démocratisation à l’épreuve des
armes au défi de la (ré)construction
Isidore Ndaywel è Nziem
contraint le régime de Mobutu à lâcher du
lest et à opérer une première « démocratisation » du régime. Mais le vers, une
fois dans le fruit, ne pourra plus y être extrait.
D’où la naissance d’une opposition au sein
du parlement et la naissance d’un parti
d’opposition « hors-la-loi » (UDPS). En même
temps, on commença à s’en prendre aux
« privilégiés » du régime de Mobutu,
notamment aux Rwandophones qui, au
Kivu et à Kinshasa, avaient formé une
véritable baronnie commerciale et financière. Le mouvement allait s’accentuer au
fur et à mesure que le régime allait
s’affaiblir.
La quête de la « démocratie », au Congo,
est un long processus qui aura occupé
pleinement les cinq décennies de l’âge
postcolonial ; un processus qui s’est articulé
en trois cycles successifs, liés l’un à l’autre,
et dont le dernier, entamé au début des
années 1990, se poursuit de nos jours sous
forme de défi à la reconstruction politique
et économique du pays.
Le premier cycle (1960-1968) est né avec
l’indépendance. Il est le fruit de l’impréparation de la décolonisation. La loi
constitutionnelle – la Loi Fondamentale –
que la Belgique avait léguée à la colonie,
et dotée d’un exécutif sur le modèle
métropolitain, avait été rapidement source
d’une grave crise constitutionnelle, attisée
par l’impératif de la « guerre froide ». La
révocation réciproque du Premier ministre
et du Chef de l’Etat, l’assassinat de ce
dernier, la mise à l’écart de ses amis
politiques détenant pourtant la majorité
parlementaire, tout cela avait rendu inévitable la succession des guerres civiles,
qualifiées dans l’historiographie congolaise,
de « rébellions » ou de « rébellions-révolutions ». Le coup d’état de Mobutu vint
conforter le schéma de marginalisation des
tenants des rébellions et imposa une accalmie qui ne résolut en rien le problème de
fonds.
Le troisième cycle, lié au précédant, est né
de la radicalisation de la crise économique
et des effets de la fin de la guerre froide qui
fit perdre au Zaïre de Mobutu son rôle de
« gendarme » de la région. Face aux
injonctions du multipartisme restauré et aux
assauts d’une « conférence nationale
souveraine », Mobutu fit de la résistance et
parvint à accorder un sursis à son régime
moribond. Mais le recyclage de la guerre
rwandaise au Congo, vécue ici comme
une « guerre de libération » vint donner le
coup de grâce au régime de Mobutu (17
mai 1997).
Mais rapidement, le nouveau maître du
Congo, Laurent Kabila, poussé par la
nécessité de se défaire de la tutelle de ses
« parrains » dans la guerre, réussit à s’attirer
leur hostilité. Cette nouvelle conjoncture
aboutit à la « première guerre mondiale
africaine », une guerre qui n’a eu de cesse
de se préoccuper de sa pérennisation, en
vue de l’exploitation sauvage des richesses
du Congo.
Le second cycle est né au milieu des
années 1970. La crise économique née
d’une politique hâtive des nationalisations
(zaïrianisation), les retombées de la « révolution des œillets » (Portugal) ayant conduit
à une indépendance de l’Angola au profit
du MPLA (allié des pays du pacte de
Varsovie) au détriment du FNLA et de
l’UNITA (alliés de l’OTAN), commencèrent à
donner de la voix à une opposition muselée
et en exil. Cela a abouti aux guerres du
Katanga (guerre de quatre-vingt jours en
1977, guerre du Shaba en 1978, guerres de
Moba en 1983/85). Une pression qui a
A présent que le processus de réconciliation (Accords de Lusaka, Accords de
Sun City) a rendu possible la tenue des
élections présidentielles et législatives
(2006), le Congo est aux prises avec au
moins quatre défis majeurs : le défi de la
consolidation de la paix, de l’intériorisation
50
Workshop/ Atelier
Evolutions politiques et sociétales au Zaïre/ en République Démocratique du Congo 1990-2008
11.30 – 13.00h
Friday – Vendredi 15.08.2008
des pratiques démocratiques, de la mise
en œuvre de la décentralisation et, de la
bataille du développement.
Isidore Ndaywel è Nziem, Historien, professeur ordinaire à l’université de Kinshasa,
République Démocratique du Congo,
chercheur associé au Centre des mondes
africains (Cemaf) de l’Université Paris I
(Sorbonne) et membre correspondant de
l’Académie Royale des Sciences d’Outremer (Bruxelles),
de 1999 à 2004 directeur des Langues et de
l’Ecrit à l’Agence intergouvernementale de
la Francophonie.
Jadis professeur aux Universités de Lubumbashi, de Brazzaville et de Québec, il a
également été directeur d’études associé
à l’école des hautes études en sciences
sociales (Paris), directeur général de la
bibliothèque nationale du Congo et Secrétaire Permanent du Conseil d’administration des Universités du Congo.
Il est le Président de la société des historiens
du Congo.
Bibliographie:
L’université dans le devenir de l’Afrique : le
demi-siècle de présence au Congo-Zaïre
(1956-2006), Paris, l’Harmattan, 2007 (sous la
direction).
Congo-River, Bruxelles, la Renaissance du
livre, 2007 (en collaboration)
Mondialisation, culture et développement,
Paris, Maisonneuve & Larose, 2005 (sous la
direction conjointe avec Kilanga M.)
La Constitution de la république du CongoZaïre adoptée par la CNS, Paris,
l’Harmattan, 2002, 2 vol. (sous la direction)
Histoire générale du Congo. De l’héritage
ancien à la république démocratique,
Louvain-la-Neuve, Duculot, 1998.
51
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11.30 – 13.00h
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Situation des Droits de la personne dans la Region des Grands
Lacs
Joseph Chiko Sanane
populations. D’après les officiels, 20.000
personnes étaient forcées à fuir leurs
villages. Selon la même source, 4305
familles avaient quitté les villages Kirembe,
Mema et Ramba vers le 5 mai 2007,
provoquant une crise humanitaire grave.
En plus de la famine due à une mauvaise
saison culturale et aux effets de la guerre,
le Burundi devait faire face au retour de ses
citoyens réfugiés en Tanzanie. Ce mouvement provoqua une résurgence de conflits
de terres dans certains villages.
Introduction
Je veux dans la présente communication
dresser le tableau synoptique de la situation des droits de l’humain au courant du
premier semestre de l’année en cours.
L’essentiel des informations contenu dans
ce texte proviennent de la banque des
données de l’observatoire de la Ligue des
droits de la Personne dans la région des
Grands Lacs. La situation des droits humains
étant fonction de l’évolution socio-politique,
je m’attellerai dans un premier temps à
faire un bref aperçu du contexte avant de
faire un état des lieux.
Il faut révéler que le temps de grâce était
très court pour le nouveau Gouvernement
au regard des attentes de la population.
Même si le travail était immense, le Gouvernement a fait preuve, à ses débuts, d’un
amateurisme et d’un laxisme dans la
gestion de l’Etat.
Un autre fait important est la mise en place
d’un double mécanisme de justice
transitionnelle. 1 Le premier semestre de
l’année en cours a connue une crise
institutionnelle grave due au changement
de la majorité parlementaire. Pendant la
1ère session de l’année, le parlement
n’avait voté aucune loi, alors que les
« honorables députés » recevaient régulièrement leurs émoluments. Consécutivement à une requête du parti CNDD-FDD,
tendant à obtenir l’invalidation des députés dissidents de son parti, la Cour constitutionnelle invalida, avec une célérité
inhabituelle, les 22 parlementaires, fidèles à
Mr Rajabu. Parallèlement à cette évolution,
le FNL-Palipehutu accepte la reprise des
travaux du Mécanisme conjoint de
vérification de suivi de l’Accord de cessez-
I. Contexte Socio-Politique
En dépit de l’aboutissement des processus
électoraux au Burundi et en RD Congo, les
deux pays vacillent entre la paix et la
guerre sur fond des violations massives des
droits de l’homme. Le Rwanda, pour sa
part semble recouvrer sa sécurité intérieure,
mais la situation des droits humains n’est
pas aussi reluisante que d’aucuns le
pensent.
1.1 Burundi
Les deux premières années du Gouvernement
issu
des
élections
furent
caractérisées par une dérive autoritaire
inquiétante, traduite par des menaces de
nature à réduire la presse privée et
indépendante au silence, des arrestations
et détentions arbitraires de certains leaders
de la société civile. Dans l’entre temps, les
affrontements entre l’armée gouvernementale et les éléments du FNL Palipehutu
reprenaient dans certaines provinces du
pays, occasionnant des tueries de civils, le
pillage des biens et le déplacement des
Le gouvernement burundais, l’ONU et la Société
civile ont trouvé, en 2007, un compromis sur la création
d’une Commission Vérité et Réconciliation et d’une
Chambre mixte devant examiner les violations du
passé. En 2008, une commission devant s’occuper des
consultations préliminaires a été créée. La commission
mixte est en œuvre, mais des diverses de taille
persistent entre le Gouvernement et la société civile.
1
52
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11.30 – 13.00h
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le-feu, mais il semble poursuivre le recrutement des jeunes.2
La province de Bubanza où se trouvent
concentrés les éléments du Palipehutu FNL
a été le théâtre des pillages, vols à main
armés par les éléments du FNL, mais les
militaires gouvernementaux étaient également identifiés comme responsables.
Sur le plan de la gestion du pays, certains
membres du gouvernement brillent par un
amateurisme déconcertant. La corruption,
le clientélisme politique et le régionalisme
minent les institutions burundaises, alors que
les moyens et les énergies devaient être
mobilisés pour faire face à la pauvreté
absolue dans laquelle s’enlise la population.
Au début de cette année, le Gouvernement a initié une conférence sur la paix,
la sécurité et le développement dans les
deux Kivu, à l’issue de laquelle un Acte
d’engagement en faveur de la paix a été
signé par les groupes armés. Paradoxalement, la situation sécuritaire s’est détériorée après, à telle enseigne que le NordKivu, à elle seule, compte près d’un million
des déplacés internes 4 Les FDLR (une milice
rwandaise) constituée des anciens Interahamwe et militaires rwandais demeurent
une menace pour la paix dans les Kivu où
ils pillent, violent les femmes et soumettent
la population aux travaux forcés.
Même si un grand nombre d’entre eux est
retourné au Rwanda, les anciens génocidaires continuent à prendre en otage des
candidats au retour volontaire. Il s’est tenu
entre avril et juin deux réunions des
représentants des Gouvernements Rwandais et Congolais, successivement à Gisenyi et à Kisangani pour évaluer l’avancement de l’application du Communiqué
conjoint de Nairobi. Les Congolais, en plus
de la sensibilisation des FDLR au retour,
proposent dans leur agenda, la relocalisation des combattants rwandais dans la
Province Orientale, ce qui a suscité de
vives protestations des étudiants de
Kisangani. A notre sens la question des FDLR
ne pourra être réglée qu’à travers des
initiatives communes entre les deux pays,
raison pour laquelle le rétablissement de la
diplomatie entre Kinshasa et Kigali est plus
qu’urgent.
1.2. République Démocratique du
Congo
Le processus électoral était couronné par
l’organisation des élections et la mise en
place de nouvelles institutions, ce qui avait
suscité un espoir parmi la population, meurtrie par près de cinq années de guerre.
Deux années après, les provinces du Kivu se
cristallisent dans la violence dans les deux
Kivu, même si le district de l’Ituri a été
relativement pacifié. Les deux provinces
sœurs du Kivu deviennent un sanctuaire où
opèrent les groupes armés de tout bords.
Le résultat mitigé du processus de
désarmement, démobilisation et réinsertion
des combattants, l’impunité qui règne au
sein de l’armée sont à la base de la
multiplication des bandes armées. Décidément, les seigneurs de guerre ne sont pas
prêts à abandonner les dividendes tirés de
cette confusion politico-militaire.3
Après la conférence de Goma, les groupes
armés poursuivent le recrutement des
enfants dans leurs rangs, ce qui contraste
avec leur engagement. En conséquence,
les actes de viol, le massacre des civils et
les enlèvements n’ont pas baissés. Un
rapport récent de Human Rights Watch
avance un chiffre de 160 personnes tuées
entre janvier et juin 2008 dans la seule
province du Nord-Kivu et fait état d’une
recrudescence des viols contre les femmes
et jeunes filles. Autant que les groupes
2 A la fin du moi de mai et au début juin 2008, on a
assisté à un mouvement impressionnant de jeunes
garçons, à partir des zones du Sud et de l’Ouest du
Burundi en direction de la réserve forestière de Kibira,
qui héberge un grand nombre de combattants du
Palipehutu-FNL. Des jeunes abandonnaient l’école
pour
regagner
ce
mouvement
pourtant,
conjointement
avec
les
représentants
du
gouvernement, a signé le cessez- le -feu. Le porte
parole du FNL (source Ligue Burundaise Iteka 2008)
3 Le Centre de Formation pour la Promotion de Droits
de l’Homme de Goma a publié dans un communiqué
récent la liste des taxes illicites imposées par les
groupes armées ; ex. un camionneur qui fait GomaMasisi paie au CNDP de Laurent NKUNDA entre 100 et
300$ ; à Kibirizi, un paysan paie aux FDLR 1000 Francs
congolais, équivalent de 2 US$, pour accéder à son
champ ; d’autres groupes armés s’illustrent dans la
pêche illicite et le braconnage dans le Parc de
Virunga.
4 OCHA avance un chiffre de 850.000 US$ dans les
camps près de Goma.
53
Workshop/ Atelier
Evolutions politiques et sociétales au Zaïre/ en République Démocratique du Congo 1990-2008
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Friday – Vendredi 15.08.2008
armés sont responsables d’atteintes aux
droits de l’Homme à l’Est du Congo, les
FARDC ne sont pas à l’abri des critiques.
II Etat des Lieux des Droits de
l’Homme et Libertés publiques
L’insécurité est également omniprésente
dans les autres provinces du pays où la
population est à la merci des forces de
l’ordre. 5 Sur le plan politique, on note un
immobilisme du Gouvernement et la corruption qui affecte l’ensemble des
institutions du pays.6
2.1. Le droit de participer à la
gestion de l’Etat
Les trois pays de la région ont organisé des
élections et installé de nouvelles institutions.
La leçon tirée de ces processus est qu’il est
difficile d’organiser des élections transparentes et libres dans un contexte où près de
80% de la population est analphabète. Le
choix des élus a été fonction d’appartenance ethnique ou tribale et non du mérite
et la pertinence des programmes politiques.
Des programmes de décentralisation
existent dans les trois pays, mais leurs
effectivité et succès seront fonction de la
qualité des animateurs. En République
Démocratique du Congo, je crains que le
système organisé par le constituant de 2006
ne favorise l’émergence des phénomènes
tels que le régionalisme et le tribalisme.
1.3. Rwanda
Le Rwanda, par rapport à ses voisins, est
relativement sécurisé mais la situation des
droits de l’Homme n’est pas reluisante. Le
contexte socio-politique est dominé par le
rétrécissement des espaces d’expression
au fur et à mesure que l’on approche des
échéances électorales. La presse libre et
indépendante est bâillonnée au profit des
médias officiels. Des reformes économiques
et politiques sont mises en place sans
mesures d’accompagnement et en dehors
des consultations des citoyens. En dépit des
efforts du Gouvernement, la pauvreté, le
règlement du contentieux du génocide et
la réconciliation restent un défi majeur pour
le Rwanda.
2.2. L’accès à la justice
Une fraction importante de la population
n’a pas accès à la justice soit par manque
des moyens, soit par éloignement des cours
et tribunaux, soit par ignorance. Il n’existe
pas dans les trois pays l’institution d’aide
légale permettant aux plus démunis d’accéder aux services des avocats et à la
justice, pourtant tous les trois Gouvernements ont ratifié sans réserves les
instruments internationaux relatifs aux Droits
de l’Homme. La justice demeure sous le
joug de l’exécutif et apparaisse comme un
instrument au service du Gouvernement.
Les lois sur l’indépendance de la justice
sont lacunaires pour promouvoir l’indépendance de la magistrature.
La corruption, la lenteur et l’inexpérience
dans le traitement de dossiers sont autant
de maux qui gangrènent et qui favorisent
l’impunité des auteurs des violations des
Droits de l’Homme. En RD Congo,
particulièrement, ce phénomène est
inquiétant, car lorsque la justice rend les
décisions qui sont rarement appliquées.7
Après ce bref aperçu sur le contexte, je me
propose de faire un état des lieux de
certains droits de l’Homme et libertés
publiques choisis sans aucune préférence
parce qu’il est très difficile d’être exhaustif
au regard du temps m’imparti par les
organisateurs.
5 Evénement récent du Bas-Congo: la répression des
adeptes du mouvement politico-religieux Bundu dia
Congo, prônant la restauration du Royaume Kongo en
Afrique Centrale. La MONUC a fait état de plus de 150
personnes tuées par la police au cours des ces
événements ;
nous
pouvons
citer
également
l’agression d’un député national du RCD, l’assassinat
du vice Président de l’Assemblée provinciale de la ville
de Kinshasa
6 La Présidence de la République, le Parlement,
l’Armée et l’administration de la justice sont
impliquées dans la corruption d’après un rapport
récent de la Cour des comptes.
7 Les
assassins condamnés pour le meurtre du
journaliste Serge MAHESHE de la Radio Okapi viennent
de s’évader de la prison de Bukavu. A ce sujet le
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11.30 – 13.00h
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En ce qui concerne les Gacaca au
Rwanda. 8 Sans revenir sur les critiques
abondantes faites contre le fonctionnement des Gacaca, je relève néanmoins
leur résultat mitigé au regard des objectifs
poursuivis. Elles devaient, en principe
terminer les procès en 2008, mais il est fort
probable que le Gouvernement proroge
leur fonctionnement au-delà de cette
année. A mon avis, un débat devra être
engagé afin de trouver une alternative
répondant aux exigences d’un procès
équitable.
stances dans lesquelles ces prêtres avaient
péri.
Au cours d’une évaluation du bilan de la
justice rwandaise, cinq ans après la réforme,
tenue du 16 au 18 juin 2008, le Ministre de la
Justice est revenu sur la loi organique
portant organisation et poursuite des crimes
par les détenus d’Arusha qui doivent être
jugés au Rwanda ou transférés devant ces
juridictions rwandaises. Dans l’entre-temps,
le TPIR (Tribunal Pénal International pour le
Rwanda) rejetait la requête du Rwanda
visant le transfert des procès de Youssouf
MUNYAKAZI et de KANYARUKA vers le
Rwanda. Ce fut un revers pour les officiels
rwandais.
S’adressant au Conseil de Sécurité de
l’ONU en date du 09 juin 2008, le Procureur
du TPIR annonçait que le parquet général
du Rwanda lui avait fait part de « sa
décision d’inculper et de poursuivre
rapidement pour meurtre et complicité de
meurtre quatre officiers supérieurs rwandais
soupçonnés d’être impliqués dans le
meurtre, en 1994, de 13 ecclésiastiques
rwandais dont 3 évêques ». Amnesty
International estime à environ 60.000 le
nombre des civils tués par les forces FPR
entre avril et juillet 1994. Certains analystes
pensent que cela constitue une fuite en
avant pour le Gouvernement rwandais, qui
ne souhaite pas voir les crimes commis par
le FPR soient au centre des investigations
par la justice internationale.9 Cette initiative
a été critiquée par l’Evêque de Kigali,
estimant que la justice rwandaise n’est pas
indépendante pour élucider les circon-
2.3. Liberté de presse et la situation
des défenseurs des droits de
l’Homme
Les pays de la région entravent à volonté
l’exercice de la liberté de la presse et
d’opinion. Les journalistes font l’objet de
menaces, d’arrestations et détentions arbitraires pour les actes posés dans le cadre
purement professionnel. Au Rwanda,
plusieurs journalistes du journal UMUSESO
ont fui le pays pour avoir dénoncé les
dérapages dans le fonctionnement du
pays.
Au Burundi, trois journalistes de la presse
indépendante ont été emprisonnés en 2007
pour avoir publié le résultat d’une enquête
sur le massacre de civils par les agents de
sécurité.
La RD Congo a enregistré plus de trois
journalistes assassinés dont les commanditaires courent toujours la rue. Le cas le
plus récent est l’assassinat du journaliste
Serge MAHASHE de la Radio Okapi Bukavu.
Les menaces pèsent également sur les
défenseurs des droits de l’homme. Au
Rwanda, notre collègue François Xavier
BYUMA a été condamné, en mai 2007, à 19
ans d’emprisonnement par le Gacaca
après avoir enquêté sur le viol commis par
un des juges de cette juridiction.
En RD Congo, la mort de Pascal KABUNGULU (il fut Secrétaire Exécutif des Héritiers
de la Justice avant d’intégrer le personnel
de la LDGL) n’est pas toujours élucidée. En
Ituri, je déplore les menaces proférées par
les anciens proches de Thomas LUBANGA
contre l’intégrité physique de Joël Bisubu
Professeur Nyabirugu fait le constat en ces termes :
autres défis rencontrés par la Justice nationale sont
l’évasion et le non paiement des dommages et
intérêts par l’Etat. Lors d’une communication faite le 2
mai 2005, à l’ occasion d’ un séminaire organisé par l’
Etat major des FARDC à l’ intention des officiers
Supérieurs par Avocats sans frontières, il a été révélé
que sur les 24 condamnés par les juridictions militaires
pour crimes internationaux, 12 étaient évadés. En ce
qui concerne l’exécution des dommages et intérêts, la
même source révèle que sur l’ensemble de USD
1.385.000 que devait payer l’Etat à titre des DI en
faveur des victimes, aucune de celles-ci n’a été
payée à ce jour.
8 Ces juridictions combinent à la fois les règles du droit
coutumier et celles du droit écrit et ne respectent pas
les standards internationaux, raison pour la quelle elles
doivent être limitées dans le temps.
9 Il y a eu des tentatives des juges Français et
Espagnols d’ouvrir une information judiciaire contre un
groupe d’officiers Rwandais.
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11.30 – 13.00h
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de l’ONG « Justice Plus ». Ce collègue avait
pris publiquement position contre la mise
en liberté éventuelle de LUBANGA par la
CPI – Cour Pénale Internationale, ce qui lui
a valu des menaces.
difficile de savoir la contribution des
autorités aux charges dues à la gestion du
pays. Le cas de la RD Congo est plus
troublant, les salaires des ministres, variant
entre 6.000$ et 20.000$, ne sont pas
imposables. Ce sont les petits salaires qui
sont lourdement imposés, ce qui est injuste.
2.6. La situation de la femme
Je ne peux terminer cette communication
sans relever la précarité dans laquelle la
femme, et particulièrement celle vivant en
milieux ruraux évolue. Elle est la victime
résignée des bandes armées qui opèrent
impunément ; elle est soumise aux lourds
travaux et n’accède pas aux soins de
santé de qualité. Nos Gouvernements
devront inscrire dans leur priorité la question
de la femme et lui accorder une place de
choix dans les différents programmes de
développement.
2.4. Des droits économiques et
sociaux en général
III Conclusion
Les Etats de la région ont tous adhéré au
Pacte International relatif aux doits
économiques, sociaux et culturels, ce qui
les oblige à prendre des mesures
législatives, judiciaires afin de permettre la
réalisation progressive du Pacte. Des
initiatives existent, mais beaucoup d’efforts
restent à faire.
En matière d’éducation et de santé, les
Gouvernements du Burundi et de la RD
Congo ont décrété la gratuité de l’enseignement fondamental sans arrêter les
mesures d’accompagnement. Au Burundi,
on a noté le surpeuplement de classes et la
baisse de la qualité d’enseignement. En RD
Congo, bien que la gratuité de l’enseignement primaire soit garantie par la Constitution, les parents continuent à verser aux
enseignants une prime afin de renforcer
leurs maigres salaires.
Il faut noter que le taux de la mortalité
maternelle est des plus élevés au monde.
L’eau est devenue une denrée rare dans la
région, ce qui est à la base de la
résurgence des maladies hydriques et
aggrave le taux de mortalité infantile.
La construction d’une paix durable dans la
Région des Grands Lacs passe par la
restauration de la primauté du droit et
l’instauration progressive d’une culture des
Droits de l’Homme. En cette occurrence,
les acteurs politiques doivent repenser les
systèmes politiques en s’engageant en
faveur de la protection des droits des
citoyens sans discrimination et du rétablissement des équilibres socio politiques
rompus. Les citoyens de la Région partageant un héritage historique commun,
des passerelles entre les peuples sont
nécessaires afin de favoriser les échanges
culturels et économiques entre les Etats.
Joseph Chiko Sanane, né à Bukavu, Congo
- Kinshasa, est avocat, il a exercé successivement des fonctions en tant que magistrat puis vérificateur des impôts à la
Direction Générale des Impôts jusqu’en
1993.
En 1994, il est admis au tableau des Avocats près la Cour d’Appel de Goma, en
République Démocratique du Congo. Il est
élu Bâtonnier par ses confrères en 2006.
2.5. Droits à la solidarité nationale
Les systèmes fiscaux en vigueur dans les
trois pays favorisent les grandes fortunes au
détriment des citoyens modestes. Il est
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11.30 – 13.00h
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Il préside depuis l’année 2005 la Ligue des
Droits de la Personne dans la Région des
Grands Lacs www.ldgl.org, un réseau constitué de 26 organisations oeuvrant pour la
défense et la promotion des droits humains
au Burundi, en RD Congo et au Rwanda,
après avoir occupé les fonctions de
Conseiller Juridique au sein du Conseil
d’Administration de la même structure.
Il est membre du Réseau de l’Afrique
Francophone de formateurs sur la justice
transitionnelle.
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11.30 – 13.00h
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Rapport de séance
Bernard Niyomugabo
Pour le Burundi : il n’y a pas eu d’amélioration après les élections sous le plan de la
gestion du pays, il a noté la corruption et la
violence dans la plaine de la Rusizi.
La première présentation a été faite par le
Prof. Isidore Ndaywel sur : « la démocratisation à l’épreuve des armes au défi de la
(ré)construction ». Dans sa présentation, le
conférencier a souligné que la quête de la
démocratie au Congo est un long
processus qui aura occupé pleinement les
5 décennies de l’âge post-colonial, un
processus qui s’est articulé en trois cycles
successifs, liés l’un à l’autre et dont le
dernier entamé au début de 1990, se
poursuit de nos jours sous forme des défis à
la reconstruction politique et économique
du pays.
Au Congo : les gens en avaient mal avec
la guerre. Fatigué, ils ont voté massivement
Kabila comme président. Des questions
récurrentes persistent : sur l’ensemble du
pays il n’y a pas des mécanismes pour
lutter contre la corruption, l’impunité au
niveau de la juridiction militaire etc.
Au Rwanda : le Rwanda semble avoir la
sécurité intérieure mais la présence de FDLR
semble inquiétante. Il a mentionné le défi
de la gestion du génocide et les procès
Gacaca, la pauvreté et le développement
déséquilibré entre ville et campagne. Dans
sa conclusion, il a montré qu’à présent on
ne sait pas faire le débat sur les défis de ces
trois pays. Enfin, il a évoqué la situation des
femmes paysannes en montrant qu’elles
sont les premières victimes des conflits et a
noter la recrudescence de violences sexuelles au Congo.
Le premier cycle de 1960-1968 est né avec
l’indépendance du Congo, le second
cycle est né au milieu des années 1970
avec lequel est née la crise économique
due à la politique des nationalisations
(zaïrianisation) de la crise économique. Le
troisième cycle, lié au précédent, est né de
la radicalisation de la crise économique.
A présent que le processus de réconciliation a rendu possible la tenue des
élections présidentielles et législatives
(2006). Le Prof. Isidore a montré que le
Congo est aux prises avec quatre défis
majeurs :
• Le défi de la consolidation de la
paix
• Le défi de l’intériorisation des pratiques démocratiques
• La mise en œuvre de la décentralisation
• La bataille du développement
Enfin, le débat encore peut se faire sur « La
protection et la valorisation des ressources
au bénéfice de la population ».
Au cours de ces deux ateliers, les participants ont eu l’opportunité de poser des
questions et de donner leurs contributions
dans un climat d’échange et de complémentarité. En général, les questions
importantes tournaient autours de ce qui
suit : - ce qui a causé l’échec de la
conférence de Goma - comment restaurer
l’autorité de l’Etat au Congo.
La deuxième présentation : « La situation
des droits de la personne dans la région
des Grands Lacs, Afrique centrale » a été
faite par Maître Joseph Chiko Sanane. Au
cours de l’atelier Joseph a retracé le
paysage socio-politique, économique et
juridique des trois pays des Grands Lacs :
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Workshop/ Atelier
Evolutions politiques et sociétales 1990 – 2008 Rwanda
Friday – Vendredi 15.08.2008
Workshop – Atelier
Evolutions politiques et sociétales 1990 – 2008 au Rwanda
Rwanda: Pas d’avenir sans le passé – de l’invention de l’histoire au présent :
Mythes, piège identitaire, pluralité et ?
Hildegard Schürings, Frankfurt, Allemagne
La Diaspora ou une autre façon de vivre avec le Rwanda
René Sibomana, Action Jeunesse et Environnement, Dakar, Sénégal
Modération: Konrad Melchers, Berlin
Rapporteur : Johannes Melzer, Université de Marburg
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11.30 – 13.00h
Workshop/ Atelier
Evolutions politiques et sociétales 1990 – 2008 Rwanda
Friday – Vendredi 15.08.2008
Rwanda: Pas d’avenir sans le passé – de l’invention de l’histoire au
présent: Mythes, piège identitaire, pluralité et ?
Hildegard Schürings
contraint, suite aux évènements de 1959, à
l’exile est un autre exemple pour des
interprétations fort divergentes: « Pour les
uns, les Tutsi qui n’ont pas accepté la
révolution sociale de 1959, voulaient
réinstaurer au Rwanda un régime féodomonarchique et asservir de nouveau les
Hutu. Pour les autres, il règne au Rwanda
une dictature raciste qui, de surcroît,
oppose un prétexte démographique à un
droit inaliénable d’une partie du peuple
rwandais de retour dans leur pays. ».
Lors du festival de film, organisé le 20
décembre 2007 à Kigali par l’IRDP - Institut
de Recherche pour le Dialogue et la Paix l’audience rwandaise pose bien de
questions : « Quelle est donc la vraie version
de l’histoire du Rwanda ? » … « Qu’est-ce
la vérité ? » « Y aurait-il jamais eu au
Rwanda un roi hutu ? », « Qu’est-ce que
hutu, tutsi, twa ? Ethnie ou classe sociale ? ».
« Reste-t-il une ou plusieurs chances
d’écrire de plus belles pages d’une histoire
enfin réconciliée avec elle-même ? »
autant de questions auxquelles on n’a pas
de réponses. 1 Et à ce jour, l’histoire tant
controversée du Rwanda n’est pas enseignée dans les écoles.
Une chaise vide au bord du Lac Kivu au
Rwanda : Symbole d’énormes pertes en
vies humaines, en valeurs morales, en
confiance en soi et en autrui, en comportements civilisés, en biens matériels et
immatériels, des souffrances, des deuils,
symbole de l’innommable et l’indescriptible …
mais aussi un siège à occuper, des
chances, des opportunités de créer l’avenir,
à s’investir, à construire des relations
sociales, à repenser et remettre en question,
à semer de nouveaux espoirs …
L’invention de l’histoire – la création
des mythes
Au Rwanda, la perception de l’histoire par
les divers acteurs et des imaginaires qui en
découlent a fortement influencé les évolutions de la société aux niveaux spirituel et
psychologique, politique, socio-culturel et
économique. Des grandeurs de la société
rwandaise comme le sentiment d’être
depuis des millénaires un peuple et une
nation unis, d’être porteur d’une civilisation
ancienne avec une structuration politique
et militaire très forte, organisée par le clan
des Banyiginya, sont des éléments de la
perception de l’histoire de plusieurs Rwandais. Souvent on défend, que la société ait
toujours été pacifique et que les divers
groupes sociaux et des classes sociales
vivent en parfaite harmonie. D’autres
pensent que des conflits importants aient
de tout temps caractérisé les évolutions
durant les siècles passés.
La perception des causes de la guerre
déclenchée le 1er Octobre 1990 par des
descendants d’un groupe de Rwandais
L’histoire du Rwanda séculaire a, jusqu’au
début du 20ème siècle, été transmise de
génération en génération par des traditions
orales aux niveaux officiels, populaires et
familiers. Son interprétation dépendait de la
position sociale de celui qui la perçoit et la
transmet à la future génération. On peut
ainsi supposer que les traditions orales des
groupes sociaux dépendants n'étaient
communiquées que conditionnellement
aux maîtres et inversement.
1
IRDP 2008: http://www.irdp.rw/news.php?id_article=6
60
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Workshop/ Atelier
Evolutions politiques et sociétales 1990 – 2008 Rwanda
Friday – Vendredi 15.08.2008
L’histoire de la région est multiple : politique,
économique, culturelle, sociale, spirituelle,
individuelle, communautaire, locale, régionale, de la vie quotidienne, vue d’en haut,
d’en bas … et ne pas figée. Jusqu’à
aujourd’hui, il manque des données fiables
sur plusieurs siècles, sur la colonisation de la
région, sur les systèmes socio-politiques et
économiques. Ce qui est admis est que
depuis le 15ème siècle, on observe la
formation de petits royaumes dans la
Région des Grands Lacs avec des
structures sociales, politiques et économiques très différenciées et des langues
complexes. Durant des siècles, de nombreux conflits, guerres de succession, de
vengeances, souvent très violents et avec
des méthodes cruelles, émergent entre les
royaumes, les grandes familles et les clans,
pour le pouvoir politique et militaire, le
contrôle des ressources (femmes et enfants,
terres, bétail). Surtout le 19ème siècle est
caractérisé par une augmentation des
violences et des guerres menées dans
toute la région par l’Umwami Rwabugiri
(1867-1895) et la conquête d‘autres régions
au-delà du Rwanda actuelle (Vansina 2001,
Viret 2008). En même temps l’exploitation
de la majorité de la population par la
noblesse régnante augmente et de nombreuses famines et rafles guerrières
déstabilisent toute la société. Au moment
de l’arrivée des colons occidentaux, des
fissures profondes caractérisaient la société
qui était « au bord du précipice de
l’anomie » (Vansina 2001, p. 248).
troupes belges, le Rwanda est mis en 1923
sous tutelle de la Belgique par la Société
des Nations.
Umwami Musinga (au milieu, environ 1920) opposé au
pouvoir colonial et à la christianisation fut, en 1931,
destitué par les forces occidentales.
Restructuration de toutes les structures sociales, politiques et économiques, culturelles, spirituelles:
Les principaux acteurs de la restructuration
de la société sont les missionnaires (d’abord
français), l’administration belge, Umwami
et sa cour, les grands chefs, les chercheurs
occidentaux et le philosophe et prêtre
Alexis Kagame. Une administration coloniale est imposée, qui au long des années
conduit, par plusieurs réformes, à la
centralisation du pouvoir et sur le plan
psychologique, politique et économique à
l’infériorisation d’un groupe social, appelé
Bahutu (Hutu) et des Batwa. Sur le plan
juridique, le droit coutumier est dans de
nombreux cas remplacé par une juridiction
occidentale. Sur le plan socio-économique
de nombreuses mesures conduisent à une
nouvelle répartition des richesses par le
contrôle des terres et du bétail par certains
dignitaires. D’autres mesures comme l’imposition des cultures (manioc, café)
changent les cultures agricoles et les
habitudes alimentaires et intègrent le pays
dans les circuits économiques internationaux. Des travaux forcés et des rede-
Avec la colonisation par des Allemands,
ensuite par la Belgique, et la christianisation
par des missionnaires, une importante
restructuration de la société est entamée et
des mythes de toute sorte sur cette région
sont inventées. En 1894, le comte GustavAdolf Graf Von Götzen (Allemand) entre
par la force dans la cour rwandaise et le
Rwanda devient en 1897 un „protectorat
allemand“ „Deutsches Schutzgebiet“ (suite
à la Berliner Konferenz 1884/85). En 1900
commence la christianisation appelée aussi
civilisation par des missionnaires catholiques
français de la congrégation 'Société des
Missionnaires d'Afrique', appelés Pères
Blancs. En 1907 une „résidence“ allemande
est érigée à Kigali par le médecin et
ethnologue Richard Kandt. Suite à la
défaite des Allemands en 1916 par des
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11.30 – 13.00h
Workshop/ Atelier
Evolutions politiques et sociétales 1990 – 2008 Rwanda
Friday – Vendredi 15.08.2008
vances déjà existants avant la colonisation
augmentent, de plus l’introduction des
impôts contribue à une accélération de
l’exploitation des agriculteurs et éleveurs.
Cette
nouvelle
stratification
sociale
renforce les disparités sociales.
Au niveau culturel, de la « Weltanschauung » et du pouvoir spirituel tous les us et
coutumes jusque là en vigueur sont
classifiés comme paganisme et rejetés. La
culture et les valeurs morales sont brisées et
remplacées pas des comportements européens et valeurs chrétiennes.
Concernant le passé, une nouvelle histoire
de la société rwandaise est inventée, figée
et légitimant la supériorité d’un petit
groupe (en se basant sur des théories
racistes en vigueur en Europe et biblique, la
théorie hamite). Même s’il y avait déjà des
conflits entre les groupes appelés Hutu, Tutsi
et Twa avant la colonisation, les mesures
prises renforcent ces clivages et surtout
leurs caractéristiques sont considérées
comme immuables. Cette ethnisation de la
société est renforcée par l’introduction
d’une école fortement discriminatoire toujours en faveur d’un petit groupe, considéré comme Batutsi.
Un important fournisseur d’informations
était le prêtre rwandais, philosophe, poète
et historien Alexis Kagame. Ses nombreux
travaux méritent une haute reconnaissance
et constituent, dans le conflit entre les
colonisateurs et les colonisés, un pas historique important. Il fut le premier à avoir eu
accès à la narration officielle de la maison
régnante de Mutara III (Rudahigwa) et il l'a
reprise relativement sans critique. Il fut
formé par les Pères Blancs et était par là
influencé par leur image du monde, en
particulier par l'école aristotélico-thomiste.
Ses vastes travaux doivent être compris
dans le contexte historique. Beaucoup de
travaux de Kagame vont essayer de
démontrer que la valeur de la culture
rwandaise n'est pas inférieure à celle de
l'Occident et s'efforcent d'élaborer une
synthèse entre la culture rwandaise et le
christianisme. Mais il contribua aussi à
embellir l’histoire du pays. En 1962,
l’anthropologue Jan Vansina constate que
l'historiographie pratiquée jusque là reproduisait uniquement la tradition de la maison
régnante d'alors sans se poser de questions
critiques sur sa valeur historique.
Au milieu des années 1980 des chercheurs
rwandais et occidentaux ont commencé à
faire des analyses critiques sur l’histoire
écrite du pays et aussi sur la question des
soi-disant « ethnies ». Mais depuis la guerre
de 1990 et surtout, suite au génocide en
1994, l’histoire inventée durant la période
coloniale fut de nouveau propagée au
niveau local et international et est pour de
nombreux Rwandais, Africains et Occidentaux une référence et ceci malgré que
beaucoup de Rwandais constatent qu’elle
est souvent contradictoire aux vécus. Mais
cette propagation a un effet néfaste sur
l’analyse des conflits et aussi sur la
résolution des conflits.
Un important rôle est joué par l‘Eglise
catholique, Mgr. Léon Classe influence durant de nombreuses années (1907-1945)
toutes les décisions au niveau politique.
Même jusqu’aux années 1980 le rôle de
l’Eglise catholique aux niveaux religieux,
socio-culturel et économique restent déterminant pour la société rwandaise. Le
chanoine de Lacger était considéré, il y a
peu encore, comme l'historien du pays et
son livre était la base de l'enseignement de
l'histoire à l'école. De Lacger avait reçu
mandat de la part des Pères Blancs
d'organiser systématiquement les informations qu'ils avaient eux-mêmes collectées
sur l'histoire du Rwanda. Sans une connaissance plus exacte sur le Rwanda, ses
habitants, il écrivit un ouvrage impressionnant. Il établit beaucoup d'analogies
avec les situations et les structures historiques au Moyen-âge féodal en France
avec des références aux situations
grecques et romaines. Le livre apparut en
1939 et en 1940 en deux parties et était,
comme le remarque Emmanuel Ntezimana,
une déformation complète de l’histoire du
Rwanda (Ntezimana 1987, p. 376).
Ce qu’on peut retenir : l’histoire était dynamique et ne pas figée ayant de nombreuses facettes, elle est interprétée sous
diverses angles, elle sert parfois comme
légitimation pour des conflits ultérieurs.
Vansina 2001 (p. 248) constate, que contrairement à ce qui se dit et écrit encore
aujourd’hui, il n’a jamais eu les migrations
successives de Batwa, Bahutu et Batutsi, ce
sont des catégories sociales qui se sont
formées sur place. Le mythe d’un créateur
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11.30 – 13.00h
Workshop/ Atelier
Evolutions politiques et sociétales 1990 – 2008 Rwanda
Friday – Vendredi 15.08.2008
Gihanga est inventé. Le royaume des
Banyiginya est assez récent et ne pas millénaire. L’Umwami n’était pas un autocrate
tout puissant, ni nécessairement bienveillant. L’unité linguistique et culturelle du
pays actuel n’existait pas au 17ème siècle et
le Rwanda n’était pas une nation « naturelle ». Le Rwanda est seulement devenu
une vraie nation au début du 20ème siècle.
« Le passé et le présent sont reliés par
d’autres liens qu’inévitable. Le lien actif
entre le passé et le présent est la mémoire
collective du souvenir (écrit, oral, collectif,
familial, etc.) qu’on en a conservée, un
souvenir exploité d’ailleurs par des propagandes de tout bord. Cette mémoire
collective
influence
les
perceptions
actuelles et guide parfois les actions
actuelles des habitants, selon le principe ce
qui fut peut se reproduire. … Parfois même
de spéculations totalement dénuées de
fond viennent s’y ajouter. C’est cet ensemble de souvenirs et de spéculations qui
forment la mémoire collective, celle qui
loue et celle qui blâme, celle qui agit sans
cesse sur le présent et celle qui s’exprime
par les livres, les médias, et encore toujours
par la parole » (Vansina 2001, p. 250).
conflits socio-politiques à l’intérieur du pays
se multiplient.
La fin de la « guerre froide » en 1990 crée
de nouvelles données dans le monde et
change les intérêts géostratégiques des
pouvoirs occidentaux, ce qui a des effets
importants sur l’Afrique.
Le 1er Octobre 1990, le Rwanda est attaqué
par le Front Patriotique Rwandais (composé
des descendants des réfugiés des années
1960) à partir de l‘Uganda. De 1990 – 1994,
une guerre civile est menée au Rwanda,
qui fait beaucoup de dégâts, cause le
déplacement d’un million de personnes à
l’intérieur du pays et de surcroît toute une
population, surtout les Batutsi et des
opposants au pouvoir sont stigmatisés
comme ‘complices’ du Front Patriotique
Rwandais. Avec l’instauration du multipartisme les conflits entre les divers acteurs
politiques augmentent, des milices des
jeunes des partis font des manifestations
souvent violentes. A divers endroits beaucoup de personnes sont tuées mais les
responsables ne sont pas identifiés, une
ambiance de terreur s’installe dans le pays.
En Août 1993, l’Accord de Paix est conclu à
Arusha en Tanzanie, mais, à cause des
blocages de différents côtés, le gouvernement de transition prévu et la restructuration de divers structures ne sont pas mis
en place.
Le 6 Avril 1994, l‘avion du Président Habyarimana est abattu, à bord des hauts
dignitaires
du
régime,
le
Président
Ntaryamira (Burundi) et l‘équipage français,
tous trouvent la mort.
L’imaginaire sur les ethnies et comme elles
ont été décrites pendant la période coloniale fut désastreuse pour la population
rwandaise. L’ethnie est devenue un piège
identitaire qui, chaque fois qu’il y a un
conflit de pouvoir, est instrumentalisé. Suite
à la „Révolution sociale“ en 1959, basée sur
des conflits de pouvoir, liés aux identités
„ethniques“, de plus en plus figées, de
nombreux Batutsi persécutés fuient le pays.
Après l’indépendance :
Génocide et crimes contre l’humanité :
Actuellement, les années 1962 à 1994 sont
très différemment interprétées. Elles ne sont
pas objet de cette communication, mais
rappelons quelques dates importantes : Le
1er Juillet 1962, le Rwanda recouvre son
indépendance de la Belgique, le Président
de la 1ère République est (après Dominique
Mbonyumutwa) Grégoire Kayibanda. Le 4
Juillet 1973, un coup d‘Etat renverse le
régime et Juvénal Habyarimana prend le
pouvoir comme président de la 2ème
République. Le régime est longtemps considéré par de nombreux pays comme un
modèle de développement, mais avec les
crises économiques des années 1980, les
7 Avril 1994, les premières victimes des tueries sont des membres du gouvernement en
place. La garde présidentielle tue la
Premier Ministre Agathe Uwilingiyimana,
d‘autres Ministres, des Intellectuels et 10
casques bleus belges. Tous les étrangers
sont évacués comme la majorité des
casques bleus des Nations Unies. Le
Rwanda est abandonné par le monde
entier! Le 4 Juillet 1994, le FPR crée la 3ème
République.
Le bilan est atroce: Un pays et une société
en ruine, presque un million de morts, la
majorité des Tutsi et aussi des Hutu et Twa,
des millions de déplacées, des millions de
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Workshop/ Atelier
Evolutions politiques et sociétales 1990 – 2008 Rwanda
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personnes ont fui le pays. Une société
traumatisée, divisée, les solidarités brisées,
des milliers d’assassins, des rescapés, des
femmes violées, de nombreux orphelins,
l’économie à plat – toute une société traumatisée.
Avec d’énormes efforts durant les années
suivantes, le pays est reconstruit et attire
par là l’admiration et le soutien de
nombreux bailleurs de fonds. Mais d’autres
conflits violents créent d’autres souffrances
et des pertes de vie. En 1995, le camp de
déplacés à Kibeho est démantelé par
l’armée rwandaise et plusieurs milliers de
personnes tuées. En 1996 l’armée rwandaise détruit les camps de réfugiés au Zaïre,
plusieurs centaines de milliers de personnes
« disparaissent ». Le Rwanda mène une
guerre au Zaïre/ en République Démocratique du Congo qui cause, par la suite,
dû aux famines, au manque de soins de
santé et des moyens de subsistance de
millions de morts. Au Rwanda des « insurgés » venant du Congo sont combattus
dans la région du Nord-ouest et de nombreuses familles souffrent de ces batailles.
Aujourd’hui, le pays est reconnu comme
sécurisé.
causte, le pays a confronté le génocide
très vite après 1994. Le gouvernement a mis
en place des structures/ commissions pour
la réconciliation avec de nombreux sites de
mémoires et la documentation des faits. Un
deuil national est organisé chaque année.
Un système judiciaire à la base (les gacaca)
pour juger les responsables du génocide au
pays a été établi et, avec des énormes
efforts, des centaines de milliers de personnes ont comparu et ont été jugés. Un
fonds de soutien pour les rescapés et les
orphelins aident les victimes à subvenir à
leurs besoins et faire des études. De
nombreuses associations d’auto-aide ont
été créées par les concernés, par exemple:
Ibuka - Association des Rescapés, Avega –
Agahozo – Associations des Veuves (voir
communications de Marie-Grâce Gasinzigwa Kagoyire, Heide Rieder et de Esther
Mujawayo), Association des Elèves et
Etudiants Rescapés du Génocide – AERG.
Partout dans le pays on trouve des associations et institutions qui travaille pour la
paix (voir comme exemple leurs contributions pour ce symposium : l’Association
Modeste et Innocent, la maison des jeunes
de Kimisagara, l’association des étudiants
en psychologie clinique, Imbuto asbl).
Le « nouveau Rwanda » 1994-2008
Le chemin difficile de la reconstruction :
De nombreux défis sont à relever.
Aujourd’hui la société rwandaise se
compose de personnes ayant des vécus
très divers, cette pluralité devrait être
reconnue comme une richesse et ne pas
comme facteur de conflits. Le développement socio-économique doit être
plus équilibré entre la capitale et le monde
rural et la lutte contre la pauvreté doit
s’accélérer. Au niveau régional les intérêts
géostratégiques sont à réguler. Il s’impose
que la justice soit impartiale, et tous les
actes criminels doivent être reconnus. De
nombreuses victimes n’ont pas encore le
droit que leurs souffrances soient reconnues
et qu’elles ont un droit au deuil. La démocratisation de la société devrait mieux
répondre aux attentes de la population
Il est proposé que des recherche-actions
scientifiques, avec un maximum de sérieux
et d’objectivité, et des réflexions soient me-
On constate une appréciation de la situation fortement contrastée du « nouveau
Rwanda » par les différents acteurs, le
gouvernement du Rwanda, les diverses
couches de la population, les groupes
rwandais en exil, des bailleurs de fonds et
instances politiques occidentales, de
l’Union Africaine, des pays voisins.
Des acquis importants depuis 1994 sont: Par
la forte présence de l‘Etat, le Rwanda peut
se vanter d’un développement économique exceptionnel surtout dans la capitale. Les infrastructures (routes, écoles,
centres de santé, services) et l‘administration sont mises en place, rénovées et
modernisées. La gestion des affaires publiques est reconnue comme efficace. Ces
acquis sont à la base d’une reconnaissance internationale. De plus, le Rwanda a
su se faire représenter dans des instances
internationales importantes comme la
Banque Africaine de Développement.
Concernant la gestion du passé : En comparaison avec l’Allemagne après l’Holo-
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nées avec la participation de toutes les
couches de la société :2
Prise en compte de la pluralité de la
société (au niveau individuel, collective,
par rapport au vécu, au passé …)
Travail sur l’histoire du pays, sur l’imaginaire,
sur les référents (traditions orales, recherches scientifiques…)
Les causes du génocide et les effets sur la
société (la violence individuelle et sociale,
le traumatisme et sa transmission transgénérationnelle, les approches de guérison et
de réconciliation …)
Organiser des débats sur les valeurs culturelles de la société et créer des références positives.
Par un travail d’éducation et socio-culturel,
l’analyse et la réflexion sur le travail sur soi
et le rapport avec l’autre sont à promouvoir, sur les multiples identités, les relations
sociales, le bien-être, le rétablissement de
la confiance en soi-même et l’autrui pour
ainsi rendre les victimes en acteurs/ actrices
de leur destin (sujet de leur histoire) et de
pouvoir se réconcilier avec soi-même et
l’autre. Ceci nécessite de reconnaître le
mal, de promouvoir la compassion et le
pardon, de se mettre à l’écoute de
l’autre … pour enfin construire la cohésion
sociale. Et enfin, il faudrait reconnaître
toutes les potentialités de toutes les
couches de la société (morale, intelligence,
spirituelle, créatrice et physique, la compassion, les capacités de pardon, …) pour
que la construction de l’avenir devienne
une œuvre communautaire.
Bibliographie
Des Forges Alison, Human Rights Watch/
Fédération Internationale des Ligues des Droits
de l’Homme, Kein Zeuge darf überleben –
Genozid in Ruanda, Hamburger Edition, 2002
De Lacger Louis, Ruanda, Kabgayi 1958
Guichaoua André (dir), Les crises politiques au
Rwanda et au Burundi (1993-1994), Université
des Sciences et Technologie de Lille. Paris,
Karthala 1995
Maalouf Amin, Les identités meurtrières, Grasset
1998
Marysse Stefaan, Reyntjens Filip (dir), L’Afrique
des Grands Lacs: Annuaires, Paris, l’Harmattan
1998-2008
Ntezimana, Emmanuel, Alexis Kagame à la
rencontre de l’histoire, in: Education, Science et
Culture : Sagesse et vie quotidienne en Afrique,
No 15, Janvier-Mars 1987, p. 371-395
En priorité la future génération a besoin des
espaces de parole, des capacités de
participer aux affaires publiques. Il faut
libérer les jeunes d’un lourd fardeau, être
enfant de victime ou de bourreau pour
qu’ils recouvrent leur dignité, des nouveaux
espaces spirituels et morales d’action pour
enfin revaloriser la fierté d’être Rwandais et
Rwandaise.
Schürings H., Gacaca in Ruanda: Der schwierige
Weg zu Wahrheitsfindung und Versöhnung, in:
Perspektive Mediation, 3-2008
Schürings, H. (Ed), „Wiederaufbau in Ruanda –
dreizehn Jahre nach dem Genozid“, Dossier
„eins – Entwicklungspolitik, Information NordSüd“, 5-2007, Frankfurt
Schürings H., 12 years after genocide in Rwanda
- Youth between hope and suffering. Traumresearchnetwork Conference, St. Moritz, 14.-17.
2
Des démarches dans ce sens très appréciables
sont réalisées par l’Institut de Recherche pour le
Dialogue et la Paix : www.irdp.rw.
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ennes et africaines et comme professeure
et encadreure des thèses dans les
Universités de Bilbao, Darmstadt, Frankfurt
am Main, Freiburg, Kassel, Louvain-laNeuve, Strasbourg, Tübingen.
Elle est secrétaire exécutive de Imbuto asbl
(www.imbuto.net) et coordinatrice du symposium.
September 2006, Hamburger Institut für Sozialforschung, Germany
Schürings H., Die Wahrheit heilt - Ruandas steiniger Weg zu Frieden und Versöhnung, in: Zeitschrift, Entwicklungspolitik, 1+2, 2005, p. 33-36
Schürings, H., Versagen im Angesicht des Völkermords – Die unabhängige Untersuchung zur
Verantwortlichkeit der internationalen Gemeinschaft in Rwanda 1994. In : Vereinte Nationen,
Bonn, 2/2000
Schürings H., Kann Wissenschaft zu Gerechtigkeit
in der Region der Großen Seen in Zentralafrika
beitragen? In: Aithal Vathsala/ Schirilla Nausikaa/ Schürings Hildegard/ Weber Susanne (Ed.),
Wissen, Macht, Transformation – Internationale
und interkulturelle Perspektiven. Frankfurt a. M.,
IKO-Verlag 1999
Schürings H. (Ed), Ein Volk verlässt sein Land Krieg und Völkermord in Ruanda., Köln, ISP Verlag, 1994
Schürings H., Rwandische Zivilisation und christlich-koloniale Herrschaft. Frankfurt 1992
Tadjo Véronique, L’ombre d’Imana – Voyages
jusqu’au bout du Rwanda. Actes Sud 2000
Der Schatten Gottes, Reise ans Ende Ruandas,
Wuppertal: Peter Hammer Verlag, Wuppertal
2001
Vansina Jan, Le Rwanda ancien – Le royaume
nyiginya, Paris: Karthala, 2001
Vansina Jan, L’évolution du royaume rwanda
des origines à 1900, ARSOM, Bruxelles 1962
Viret Emmanuel, Rwanda, Index chronologique
1867-1994,
http://www.massviolence.org/IMG/pdf/Rwanda
-Index-chronologique-1867-1994.pdf, 10.07.2008,
in : www.massviolence.org, Ed. Jacques Semelin,
Avril 2008
Hildegard Schürings, Allemagne, doctorat
et licence en sciences de l’éducation, et
éducation des adultes.
Depuis 1972 elle travaille dans les domaines
de l’éducation des jeunes et adultes, de la
formation professionnelle et la promotion
de l’économie, des études à distance, de
la promotion de la société civile, formation
en genre, prévention des conflits et promotion de la paix. Depuis 1978 chercheure et
conseillère dans la Region des Grands Lacs,
elle a fait de nombreuses publications sur le
Rwanda et la région, l’histoire, la période
coloniale, le génocide et les crimes contre
l’humanité et sur la promotion de la paix.
Elle a travaillé pour de nombreux organismes internationaux, des ONG europé-
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La Diaspora ou une autre façon de vivre avec le Rwanda
René Sibomana
slogan « mugende, mwari murihehe »1 et la
peur de partager le peu de ressources
disponibles dans leur pays qui subit déjà
une très forte pression démographique.
Introduction
La meilleure façon de partager avec vous
de mes expériences sur la DIASPORA est de
parler de moi-même, de mon expérience
personnelle que j’ai vécue en deux temps :
d’abord comme membre d’une famille
issue de la diaspora rwandaise au Congo
belge et qui a vécu plusieurs années en
dehors du Rwanda ; ensuite comme chef
d’une famille en diaspora dans un pays
africain depuis plus de 10 ans.
Je suis né d’une famille rwandaise d’agriculteurs fatigués de cultiver très jeunes ; elle
décide d’aller s’inscrire à l’Administration
coloniale pour aller travailler dans les mines
de cassitérite de Kalima, dans l’ancienne
province du Kivu en République Démocratique du Congo alors Congo belge.
Le départ vers l’inconnu
Convaincus qu’en dehors du pays, on
pouvait obtenir plus facilement d’argent « amasenti » d’où le surnom donné à
leur premier fils Sengirarusha (qui signifie
« on gagne l’argent de la sueur de son
front »)… Ma famille était convaincue que
là-bas loin du Rwanda, elle serait plus libre,
loin des pressions de l’Administration coloniale, contraignante par les corvées et les
impôts et qu’elle reviendrait avec beaucoup d’argent. Ce rêve ne s’est pas
réalisé…
En 1968 la famille rentre au pays natal, le
Rwanda, devenu indépendant et même
une République pour rechercher le bonheur qu’elle n’a pas su trouver au Congo
avec comme tout capital un sac de paddy
(graines de riz non-décortiqué) d’une
valeur de 20.000 Francs congolais de l’époque, une vieille machine à coudre et un
vélo en bon état, qui sera volé aussitôt
après notre arrivée à la colline natale.
Avec 4 enfants, ça s’annonçait plutôt difficile…. Il fallait tout recommencer à zéro.
Cette décision de rentrer au pays avait été
prise par nos parents sans tenir compte de
nos avis car nous étions plus attachés à
notre milieu de vie au Congo qu’au
Rwanda que nos parents ne cessaient de
nous chanter chaque jour : « un Rwanda
riche de par sa culture de haricots, de
grosses patates, où on mangeait la viande
chaque jour, etc. » Cependant, jusqu’à sa
mort, malgré ce retour désenchanteur,
mon père n’a jamais regretté sa décision.
Une note de rappel historique
Après la première guerre mondiale, le
Rwanda et le Burundi qui étaient des colonies allemandes vont passer sous protectorat belge et seront donc identifiés sous le
vocable « Congo belge et RwandaUrundi »; nous faisions partie de ces
populations ‘indigènes’ auxquelles va recourir le colonisateur belge pour valoriser
les immenses richesses minières et agricoles
du Congo. En même temps aussi, le Congo
voisin accueillera des vagues de migrations
démographiques les unes plus importantes
que d’autres et sous différentes raisons. Ce
sont ces populations qui feront plus tard
partie de la diaspora rwandaise au Congo
belge devenu plus tard, RDC puis RZ et
enfin encore une fois depuis quelques
années RD Congo. Leur statut est resté
depuis lors de plus flous et controversés ; au
point de les revêtir d’un statut d’apatrides
dans le pays hôte et d’étranger indésirables dans leur propre patrie. Ce rejet se
justifie par les mutations politico-économiques intervenues en leur absence d’où le
1
Traduction : « Où étiez-vous quand nous nous
construisions le pays » ? Ou encore « Les
retardataires mangeront les os »
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Aller au-delà du Rwanda a été considéré
comme une source de richesse et une
manière « d’être différent », de créer des
différences avec ceux qui restaient dans le
pays.
Nous pouvons citer les exemples,
- départs pour l’Ouganda et la Tanzanie
- sortie vers le Congo,
- sortie dans les mines du Congo.
La diaspora après les événements
de 1994
Après les événements tragiques de 1994, la
donne sociale s’est beaucoup compliquée.
En effet, des vagues de personnes revenues de plusieurs pays hôtes se sont
retrouvées dans le pays d’origine, rendant
la carte d’intégration difficile à dessiner.
Pour la diaspora dont je suis, plusieurs
facteurs se sont conjugués pour amoindrir
les chances d’une intégration totale ; si
bien que la plupart dont moi-même ont
préféré de poursuivre la route vers un autre
pays hôte, toujours en quête d’un moment
de répit pour préparer un retour possible au
pays natal.
Le profil du retourné
La diaspora s’est toujours distinguée par sa
pluralité et ses colorations. On reconnaissait
la plupart des gens de la diaspora par leur
façon altérée de parler le Kinyarwanda
(considéré comme signe d’acculturation),
les pratiques/habitudes alimentaires et leur
accoutrement vestimentaires, la gestuelle
dans le langage, et les dialectes d’ailleurs
qu’elle maîtrisait avec fierté (par ex. le
lingala, le swahili). Et au-delà il y avait aussi
toutes ces expériences vécues à la
rencontre et au brassage des cultures, les
habitudes observées chez d’autres tribusethnies, les mariages mixtes, les rites
initiatiques vécus : tout cela a été un
capital de connaissances qui a enrichi le
parcours de la diaspora et à travers lequel il
était identifié.
Une diaspora pour la paix ou
comment contribuer à l’édification
de mon pays
De ma vie de plus d’une décennie au
Sénégal, j’ai retenu quelques leçons :
La paix n’a pas de prix : au plus fort des
tensions sociales, au moment où tous les
indicateurs sociaux recueillis par des analystes chevronnés annoncent une catastrophe sociale, une porte reste toujours
ouverte pour donner une chance à la paix .
La paix commence au sein des familles :
l’éducation telle qu’elle se donne au sein
des familles sénégalaises favorise l’expression des sentiments de tous les membres de
la famille, autrement dit par une culture de
dialogue. C’est au travers du dialogue que
se désamorcent les situations les plus
explosives mais cela doit commencer tôt et
être inscrit dans la culture d’une éducation
familiale.
Le respect des différences entre les ethnies
est une richesse inestimable: au Sénégal
cohabitent plusieurs ethnies dirigées par
des Chefs traditionnels en étroite intelligence avec les Chefs religieux. Mais les
Sénégalais ont su développer une culture
de respect mutuel en puisant dans leur
passé respectif; le cousinage à plaisanterie
voudra par exemple qu’un Peuhl ironise sur
le statut d’esclave du Serere avec qui il
s’entend du reste très bien. En cas de
conflit, les Chefs coutumiers et religieux à
différents échelons sont là prêts à
désamorcer la tension…
Comment la diaspora a été perçue
avant les événements tragiques de
1994
Cette étiquette va poursuivre les retournés
jusqu'à leur mort. Les héritiers et dépendants ne pouvaient échapper a cet
anathème social qu’au prix d’une
délocalisation vers des zones où ils
n’étaient pas connus ; certains ne pouvant
s’adapter a une vie de perpétuel cache
cache, se sont résolus à rentrer dans le
pays d’accueil.
Aujourd’hui à plus de 50 ans, à cause de
mon accent d’un kinyarwanda imparfait, je
porte encore l’étiquette de « umunyekongo » (le Congolais). En RD Congo, je ne
peux pas faire valoir mon statut d’ayant
droit à la nationalité congolaise pour des
raisons non encore élucidées. Tel sera le
statut de bien de personnes de la diaspora
qui se retrouvent encore une fois sur la
route de l’exil (réfugiés) ou avec un statut
d’apatridie, ballottés entre deux pays qui
ne les acceptent pas.
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Ces trois clichés parmi tant d’autres
démontrent combien la diaspora peut
apprendre et apporter des valeurs positives
partant des expériences qu’elle a vécues
dans le pays qui l’a accueilli. C’est cette
richesse cumulée par les personnes
capables de retourner et de contribuer à
l’édification du pays qui servira de socle
pour bâtir un pays nouveau, fort, capable
de transcender ses différences, des gérer
les conflits et de tourner les tristes pages
d’une histoire douloureuse et peu héroïque
pour tous.
Mon pays peut capitaliser sur l’engagement qu’il a pris de supprimer l’institutionnalisation de l’ethnie Hutu, Tutsi et Twa.
C’est déjà un pas décisif vers un avenir plus
communautaire ; et nous l’oublions souvent.
C’est une démarche difficile mais qu’il faut
commencer quelque part notamment par
l’éducation des enfants et des jeunes de
tous bords à la tolérance mutuelle et à la
cohabitation pacifique.
stabilité. La diaspora peut contribuer au
processus de changement positif qui
s’observe dans le pays en vue de
l’évolution de notre société vers la paix,
l’acceptation de l’autre, le partage des
valeurs et des richesses.
René Sibomana, né le 31 Décembre 1948, à
Kigembe. Je suis parti très jeune avec mes
parents au Congo. Père de cinq enfants.
Après ma formation à la Magistrature, suivi
d’un diplôme de planification des projets
de développement à Buea au Cameroun.
Après mes expériences de 6 ans au Greffe
du Tribunal de première Instance au
Rwanda, je me suis engagé entièrement
dans le Mouvement Scout jusqu’à atteindre
le niveau de Commissaire Général. Après
plusieurs années de travail dans le
scoutisme tant au niveau national qu’international, j’ai été décoré de Loup de
Bronze, la plus haute distinction mondiale
du Scoutisme. Après quelques années de
recherche sur la méthodologie de la
participation des enfants avec d’autres
groupes d’experts africains, je dirige le
réseau africain pour la Recherche Action
Participative - RAP dans les pays de
l’Afrique de l’Ouest et du Centre.
Une expérience avec des jeunes
Je voudrais partager avec vous l’expérience que je viens de vivre en décembre
2007, dans un village de SoucoutaToubacouta, 260Km de Dakar, au Sénégal.
Une rencontre a mis en présence les jeunes
des pays des Grands Lacs - Rwanda,
Burundi, RD Congo - et ceux du Sénégal,
pays d’accueil, sur le partage des
pratiques de la vie communautaire dans
leurs expériences de chaque jour.
A la question de savoir comment ils
percevaient, en tant que jeunes de cette
région, l’acceptation des jeunes des autres
communautés, les jeunes ressortissants des
pays des Grands Lacs ont proposé la
démarche suivante :
- faire un pas positif vers l’autre en reconnaissant que l’autre est tellement abattu
qu’il n’a plus d’énergie pour venir vers vous,
- opérer un changement d’attitudes individuelles et collectives vis-à-vis de l’autre.
C’est seulement après que le processus de
l’acceptation peut être engagé avec
l’autre.
Pour les jeunes du Sénégal par contre, en
passant par le « cousinage à plaisanterie »
entre les différents groupes communautaires, on arrive à ouvrir toutes les portes et
à se faire accepter. Dans le pays, on
reconnaît à ce principe la vertu de
favoriser l’accueil, la tolérance et la
Actuellement Secrétaire Exécutif de l’ONG
Action Jeunesse et Environnement au
Sénégal, actif au sein des organisations de
la société civile au Sénégal, je participe
aux différentes activités liées à la recherche
de la paix dans la région des grands lacs
en tant que membre de l’Initiative de
GENEVE dans la région de Grands Lacs. Je
suis membre de l’Association Imbuto qui
co-organise cette Conférence.
La participation à cette Conférence, à
l’Université de Marburg est une opportunité
unique pour moi de partager mes idées
avec plusieurs de mes amis présents ici et
d’autres venus de différents horizons.
Auteur de plusieurs brochures :
Guide méthodologique sur la participation
des enfants » Ed. ASMAE, Bruxelles, 2003
Auto organisation des réfugiés dans les
camps des réfugiés rwandais à l’Est du
Congo » (ouvrage collectif) PUN/Belgique
2004
Guide du Jeune Citoyen » Librairie Saint
Paul, Dakar/Sénégal, 2003.
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Minutes of the Workshop
Johannes Melzer
First speaker of the workshop (26 participants) was Hildegard Schürings who has
worked in the Great Lakes Region in Africa
since 1978. Besides working as project
director, advisor and researcher in Europe,
Maghreb, West Africa and Central Africa,
she has also published widely on Rwanda,
its history and colonial period, the genocide,
crimes against humanity, peace-promotion
and youth.
nition of all criminal acts regarding the civil
war and genocide and the implementation
of a democratisation which meets the
expectations of the population. To deal
with these challenges, Ms. Schürings recommended the organisation of debates
concerning the cultural values of the
society, which can serve for the creation of
positive references and the reconstruction
of social relations. Furthermore, the youth
has to be offered opportunities and
possibilities to participate in public affairs
and compassion and forgiveness have to
be encouraged. Regarding the creation of
a better future for Rwanda, it is important
that the victims can change their position
from object to subject of their history and
that the pride of being Rwandan becomes
re-evaluated.
Hildegard Schürings spoke on the topic “De
l’invention d’histoire au présent – Mythes,
pièges identitaires, pluralité et?”. Ms.
Schürings gave a brief summary of the
Rwandan history to illustrate that the history
of Rwanda and the whole Great Lakes
Region is not fixed but dynamic. To outline
this argument, she pointed at the colonial
reorganisation of political, economic and
cultural aspects of the Rwandan society,
including the invention of a new version of
the country’s history, the changes in
common law, the imposition of cultures
(manioc, coffee) and the centralisation of
power that accompanied the implementation of colonial administration and led to
an ethnicisation of the Rwandan society.
Corresponding to this social reorganisation
and ethnicisation, the “social revolution” of
1959 was based on conflicts over power
that were bound to ethnic identities which
became increasingly rigid.
The discussion focussed mainly on the question if the Rwandan government is managing the past in an adequate manner and
on the problem of unbalanced development. Regarding this first aspect, it was
emphasised that the process of reconciliation was initiated very quickly by the
Rwandan government (especially in comparison to Germany) but that the Rwandan
society will need much more “healing time”.
To ensure that the process of reconciliation
is effective, it is important that the actors of
this process recognise all forms of crimes
because there is no single trigger effect or
one exclusive form of guilt which can be
isolated.
Regarding the second aspect of the discussion, it was pointed out that the Rwandan government implemented various
programmes to balance the uneven
development and to cope with its negative
effects, but that some of these measures
were forced on the population and
therefore create new conflicts. This enforcement is partially due to the conditionality of international financial institutions that the Rwandan government has
to fulfil and to negative impacts of structural adjustment programs.
After the catastrophe of 1994, Rwanda had
to face a very difficult way of reconstruction, considering the ruined society
with so many dead, refugees, displaced
and traumatised persons and a ruined
economy. Ms. Schürings emphasised that –
although many challenges such as the
legal processing of the genocide, the
coping with the past and the economic
reconstruction have been confronted very
quickly – there are various challenges for
the country to be faced, like the uneven
development of the urban (especially in
the capital) and rural areas, the imposition
of an impartial judicial system, the recog-
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mana referred to the propositions of young
people of Burundi, the Democratic Republic of Congo, Rwanda and Senegal
who met in Senegal to share and reflect on
community life problems in December 2007.
The second speaker of the workshop, Mr.
René Sibomana is Executive Secretary of
“Action Jeunesse et Environment au Sénégal” and member of various organisations
of civil society one of them being Imbuto.
He shared with us his very personal experiences regarding the Rwandan diaspora
which he experienced in two episodes: first
as descendant of a Rwandan family in
Congo which lived there for several years,
studied in Cameroon and then as head of
a family living in Rwanda and today in
Senegal.
These propositions were the following:
Before a process towards acceptance of
differences can start, positive steps towards
the “other” have to be taken, for example
in such debates concerning community life
problems, the less traumatised have to take
the first step. Since negative stereotypes
lack of positive references, such positive
steps should have repercussions on the
social context of the actors. It is the young
people who can lead the way to a culture
of dialogue and respect because they do
not carry the burden of the elder
generation and can serve as multiplicators
in their social context by promoting peace,
acceptance of differences and the sharing
of common cultural values.
After the tragic events of 1994, the social
structure of the Rwandan society became
ever more complicated, concerning the
fact that various waves of people were
returning to their home country from their
different host countries. Regarding that
many people living in diaspora weren’t
really integrated in their host countries and
at the same time could be distinguished
from people who stayed in the country by
certain criteria, for example by an altered
way of speaking Kinyarwanda, these
returnees had problems determining their
identity and finding themselves back in
their country of origin. Although the institutionalisation of the ethnic labels in Rwanda
is abolished, people are still looking for
indications for someone’s (ethnic) identity
in different, more subtle ways. This makes it
a difficult task to draw a map of social
integration to ensure a peaceful community life. So the question is how the
community can deal with differences,
which are part of every society, and how
acceptance of differences can be
achieved.
Since diaspora is also known for its plurality
and its colorations, with people from very
different backgrounds and with different
social identities getting in touch with each
other and other cultures, it (returning diaspora) can be a source of benefit for a
society facing such challenges as the
Rwandan one. The persons who return from
their host countries bring with them the
riches of such experiences of exchange
and can thus contribute to the building of a
society which is capable of transcending its
differences and able to handle conflicts
peacefully. To highlight this point, Mr. Sibo-
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15.00-16.30h, 17.00-18.30h
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The impact of international, national, local justice systems
Les impacts des systèmes de justice internationaux, nationaux et locaux
Friday – Vendredi 15.08.2008
Workshop - Atelier
The impact of international, national and local justice
systems
Les impacts des systèmes de justice internationaux,
nationaux et locaux
Le bilan du Tribunal Pénal International pour le Rwanda
Joseph Ngarambe, Expert ICTR – International Criminal Tribunal for Rwanda,
Arusha, Tanzanie
Le système Ubushingantahe (sages) - peut-il aider le Burundi dans
le processus démocratique?
Joseph Ntamahungiro, Bruxelles, Belgium
Peasants, Power and the Past – Political Transition and
Transitional Justice in Rwanda and Burundi – A View from Below
Bert Ingelaere, University of Antwerp, Belgium
Moderation: Dieter Magsam, Hamburg
Rapporteure : Andrea Pabst, Imbuto
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15.00-16.30h, 17.00-18.30h
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The impact of international, national, local justice systems
Les impacts des systèmes de justice internationaux, nationaux et locaux
Friday – Vendredi 15.08.2008
Le bilan du Tribunal Pénal International pour le Rwanda
Joseph Ngarambe
Avec la condamnation d'Akayesu à la
prison à perpétuité, la communauté internationale commence à réparer l'injustice
dont souffrent depuis longtemps les
femmes victimes des conflits armés. Pour la
première fois en effet, une cour
internationale a puni la violence sexuelle
perpétrée dans le cadre d'une guerre civile,
et reconnu le viol comme un acte de
génocide ainsi qu'un acte de torture. »2
Le 2 septembre 1998 : les juges du TPIR
prononcent la condamnation de Jean-Paul
Akayesu, ancien maire de Taba. Il s'agit en
effet du premier verdict de culpabilité de
génocide rendu par une cour internationale de justice depuis 1948. Avec
cette première décision si attendue, les
responsables du TPIR espèrent lever les
ambiguïtés pesant sur son fonctionnement
depuis sa création en 1994 et promettent
d’ouvrir rapidement plusieurs autres affaires.
Dix ans après l’élan d’optimisme né de la
conclusion de l’affaire Akayesu, le TPIR
affiche au 22 juillet 2008 3 : 36 personnes
jugées (dont 5 ont été acquittées), 27
personnes en cours de jugement, 8 personnes qui attendent d'être jugées et que
le procureur tente de transférer devant
d'autres juridictions nationales. Treize accusés sont encore recherchés par le procureur du tribunal.
Parmi les nombreuses affaires en cours,
certaines sont à un stade avancé (au
stade de la présentation des preuves de la
défense ou en délibéré) et devraient
s'achever d'ici la fin de l'année 2008.
Entre les propos saluant le jugement
« historique » d’Akayesu et ce bilan des dix
années ayant suivi, il y’a lieu de dresser une
liste des « points positifs » que le TPIR pourra
laisser derrière lui lorsque le rideau va tomber en 2009 4 sur ses affaires de première
instance et en 2010 sur celles en appel5.
Le TPIR pourra en effet se réjouir de sa
grande contribution en jurisprudence pénale internationale, comme le soulignait
Kofi Annan, le secrétaire général des
Nations Unies, n’est pas en reste dans le
concert d’éloges qui suit ce jugement
historique. De Durban, où il assiste au 12e
sommet des pays non alignés, il déclare,
dans un communiqué, que ce jugement
serait un point de référence "dans l'histoire
du droit international“, que cette décision
de justice "donne corps, pour la première
fois, aux idéaux de la convention de
Genève adoptée il y cinquante ans", que
"Ce jugement est la preuve que nous
sommes déterminés à affronter le crime
atroce de génocide comme nous ne
l'avons jamais fait", a-t-il dit, avant d'ajouter
qu'il souhaitait que ce jugement puisse
contribuer à la réconciliation nationale au
Rwanda.1
La condamnation de Jean-Paul Akayesu
est également saluée par l’ONG « Coalition
pour les droits des femmes en situation de
conflit », dans un communiqué de presse
enthousiaste :
«De plus le Tribunal l'a condamné à 80
années d'emprisonnement pour viol et
d'autres crimes y compris d'avoir encouragé la perpétration de viols et d'actes de
violence sexuelle.
1
http://www.womensrightscoalition.org/site/newsRele
ases/1998-10-rwanda_fr.php
3 Fondation Hirondelle du 22 juillet 2008.
4 La récente prolongation des mandats des juges
jusqu’en 2009 présage l’acceptation de celle de tout
le tribunal.
5 Le mandat du TPIR vient d’être prolongé jusqu’en
2009 pour les affaires en première instance. La clôturé
des procès en appel demeure inchangée.
2
Source : Nord Net citant AFP.
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déjà en 2004 le procureur Hassan Bubacar
Jallow :
« Les tribunaux ad hoc ont grandement
contribué à combler le vide jurisprudentiel
et à enrichir et à accroître la jurisprudence
du droit pénal international, en l’absence
de laquelle aucun système de justice pénal
international
ne
peut
fonctionner
efficacement. Les règles de procédure
pénale internationale, les règles internationales de preuve, et les normes
internationales garantes de procès équitables ont toutes été en grande partie
élaborées et perfectionnées par les
tribunaux. Nous avons acquis une expérience et des compétences considérables
relativement à la conduite d’enquêtes
criminelles internationales, à la sélection
des personnes à poursuivre, aux défis de
logistique posés par l’organisation et la
conduite de poursuites criminelles, et aux
conséquences de celles-ci, à savoir les
mesures de protection des témoins, la
fixation des peines, l’exécution des peines,
etc. »6
Même le Rwanda, l’un des grands
détracteurs du TPIR reconnaît aujourd’hui
« l’immense jurisprudence produite, notamment à partir de la condamnation de
Jean Kambanda, chef du gouvernement
ayant dirigé le pays durant la période du
génocide
et
de
Jean
Akayesu,
bourgmestre de Taba » Et il se félicite de ce
que ce tribunal « a condamné des criminels
de la première catégorie qui auraient pu
être hors d’atteinte de la justice
rwandaise ».8
Par ailleurs, IBUKA, principale association de
rescapées du génocide rwandais et autre
grand détracteur du TPIR, consent que
«Sans le TPIR, les grands génocidaires,
n’auraient sans doute pas été arrêtés, jugés
et condamnés, même si certains d’entre
eux n’ont pas encore été appréhendés »9
Les critiques les plus nourries auront
également accompagné le TPIR durant son
existence.
D’aucun jugent en effet son bilan bien
«maigre » au regard de l’importance de
son enveloppe financière. C’est le cas des
rescapés du génocide regroupés notamment autour de l’association Ibuka, mais
aussi de hautes autorités judiciaires du
Rwanda : « Avec un budget annuel de près
de 200 millions de dollars, le TPIR pouvait
faire mieux »10. En outre, rendre justice « loin
du Rwanda » est, selon ces critiques, de
nature à édulcorer la valeur pédagogique
de l’action du TPIR11.
En outre, le TPIR sera fondé de se féliciter
de l’inclusion des crimes sexuels parmi les
éléments constitutifs d’un crime de génocide :
« Dans la convention de 1948, le viol ne fut
pas mentionné. Le jugement d'Arusha, qui
définit pour la première fois le viol en droit
international, conclut que "les viols et les
violences sexuelles constituent certainement des atteintes graves à l'intégrité
physique et mentale des victimes". "La
Chambre a constaté, poursuivent les juges,
que les actes de viols et de violences
sexuelles étaient exclusivement dirigés
contre les femmes tutsies, qui ont été très
nombreuses à être soumises aux pires
humiliations, mutilées et violées, souvent à
plusieurs reprises, souvent en public, et
souvent par plus d'un assaillant. Ainsi donc,
par-delà les femmes victimes, c'est tout le
groupe tutsi qui faisait l'objet de ces
crimes." »7
L’absence d’indemnisation des victimes est
un autre sujet de reproche au TPIR : « La
justice sans indemnisation est une justice
faite à moitié », déclarait Théodore
Simburudali, lundi 23 juin, au cours d’un
entretien avec de journalistes rwandais,
burundais et congolais en atelier organisé à
Kigali et Arusha sur la « justice internationale
»12.
Propos du procureur général du Rwanda, Martin
Ngoga, qui s’exprimait en juin dernier devant une
réunion des journalistes de la région des Grands Lacs
(source : Kinshasa News)
9 Propos de Théodore Simburudali, président d’Ibuka
en juin dernier (source : Kinshasa News).
10 Martin Ngoga, le procureur général du Rwanda, au
micro de Kinshasa News.
11 Kinshasa News, citant le procureur général Ngoga.
12 Kinshasa News.
8
6 Bubacar Hassan Jallow, procureur du TPIR, discours
du 1er novembre 2004, à l’occasion de la prestation
de serment de Mme Fatou Bensouda, procureur
adjoint de la CPI.
7 Nord Net commentant le jugement Akayesu.
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« Le président d’Ibuka, une association qui
défend les droits de quelque 400.000
rescapés du génocide, regrette que les
génocidaires déférés devant le TPIR ne
soient pas poursuivis du chef de «destruction des biens ». La plupart des
dignitaires de l’ancien régime rwandais
accusés d’avoir planifié ou commandité
des crimes durant la période d’avril à juillet
1994, possèdent, selon lui, des biens qui
auraient pu servir à l’indemnisation des
victimes »13.
paraît mieux disposé envers la justice
rwandaise, en contradiction avec les juges
du TPIR qui, se prononçant sur trois cas de
transfert, ont jugé le système rwandais
inapte à rendre un jugement équitable :
« Une justice de ‘‘vainqueurs’’ : En mai 2003,
l’ambassadeur américain pour les crimes
de guerre, Pierre-Richard Prosper organisait
une rencontre à Washington entre le procureur général du Rwanda, Gérald
Gahima et Carla del Ponte. Il proposait que
la Suissesse remette ses dossiers à la justice
rwandaise. Mais Carla del Ponte était
finalement évincée. Et c’est donc son
successeur, Hassan Bubacar Jallow, qui,
cinq ans plus tard, met en œuvre l’accord
de Washington. Sa nomination par New
York avait été assortie d’une résolution qui
le contraignait à poursuivre ses enquêtes
sur les soldats du FPR, mais pas à en
poursuivre les auteurs.
Hassan Bubacar Jallow a néanmoins assuré
au Conseil de sécurité que le dossier
resterait ouvert à Arusha. Le parquet suivra
de près la procédure enclenchée à Kigali,
et le cas échéant, s’en saisira, a-t-il affirmé.
Mais cette décision du procureur constitue
un revers pour les juges du TPIR. Fin mai, ils
avaient refusé de remettre des dossiers
concernant des auteurs présumés de
génocide au Rwanda, estimant que le
système judiciaire rwandais était l’objet de
pressions politiques.16
Or cette fois, les juges n’auront pas à se
prononcer car aucun acte d’accusation
n’a été délivré par le procureur contre les
responsables présumés de ces crimes. »
A seulement quelques mois de son échéance initiale, le TPIR n’a procédé à la
moindre mise en accusation d’anciens
membres de l’Armée patriotique rwandaise
(APR) pour les violations graves du droit
international humanitaire commises sur le
territoire du Rwanda en 199414. Afin de les
soustraire à la justice internationale, le
pouvoir n’a jamais été économe de
pressions, une situation qui inquiétait déjà
International Crisis Group (ICG) en 2002 :
« La crainte et le refus de ces poursuites par
l’actuel gouvernement de Kigali est la
raison essentielle de la crise sans précédent
qui a caractérisé, en juin 2002, les relations
entre le TPIR et le Rwanda. Le gouvernement rwandais doit honorer son obligation
de coopérer avec la juridiction internationale et renoncer à toute forme de
chantage comme la restriction de l’accès
aux témoins vivant au Rwanda. Dans
l’avenir, le dilemme du TPIR entre son
besoin ou son désir de bonne coopération
avec le gouvernement rwandais et
l’imposition nécessaire de son indépendance risque de s’aggraver »15.
Les pourfendeurs de cette « justice des
vainqueurs » rappellent sans cesse que la
recherche de la vérité aurait dû commencer par une enquête sur les
circonstances de l’attentat contre l’avion
du président Habyarimana, élément que
d’aucuns considèrent comme le déclencheur des crimes graves qui ont tant ému
l’humanité.
La succession des événements semble
avoir donné raison à ICG. En effet, le
Rwanda aidé par l’administration américaine a fini par obtenir, en 2003, le départ
du procureur Carla del Ponte qui refusait
de confier au Rwanda la poursuite des
dossiers des membres de l’APR. Son
remplaçant, M. Hassan Bubacar Jallow,
Kinshasa News.
A l’opposé des juridictions française et espagnole
qui ont lancé des mandats d’arrêts contre plus de 40
officiers, respectivement en novembre 2006 et février
2008.
15 Rapport Afrique N°50, 1er août 2002.
Article RFI du 10 juin 2008. La tentative de
Washington est également relatée par HRW (rapport
de juillet 2008) et par Florence Hartman, ancienne
porte-parole du procureur Carla del Ponte dans "Paix
et châtiment. Les guerres secrètes de la politique et
de la justice internationale" (Flammarion, 2007).
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Les impacts des systèmes de justice internationaux, nationaux et locaux
Friday – Vendredi 15.08.2008
En conclusion :
A la veille de la fermeture du TPIR, les
critiques s’élèvent encore sur son bilan, tant
sur le plan quantitatif que sur le plan
qualitatif. Aujourd’hui comme hier, le
gouvernement rwandais n’épargne rien
pour soustraire du jugement les éléments
de l’ex-APR qui se sont rendus coupables
de violations du droit humanitaire. Les
organisations de victimes estiment ne pas
avoir été représentées ni entendues par la
justice internationale, tandis que la majorité
des
accusés
contestent
ce
qu’ils
considèrent comme une justice de vainqueurs.
Un tel climat est loin du rêve d’atteindre la
réconciliation de la société rwandaise mais,
en tout état de cause, il est permis de dire
que ce tribunal a d’ores et déjà apporté
une grande pierre à la consolidation du
droit international humanitaire.
Joseph Ngarambe, Rwandais, Economiste
indépendant,
Expert-Consultant du Procureur du Tribunal
Pénal International pour le Rwanda ICTR,
Arusha – Tanzanie depuis 1996, ayant mené
plusieurs enquêtes et négociations. Témoin
de la tragédie rwandaise. Habite en France
depuis avril 1994.
Co-auteur du livre : Chrétien, Jean-Pierre et
al. : Rwanda - Les médias du génocide.
Paris, Karthala 1995/ 2002
Membre depuis près de 20 ans de plusieurs
associations, dont des partis politiques.
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Le système Ubushingantahe (sages) - peut-il aider le
Burundi dans le processus démocratique ?
Joseph Ntamahungiro
Fonctions des Abashingantahe
(pluriel de Umushingantahe) :
Partant
de
ces
définitions,
Zénom
Manirakiza énonce quatre fonctions pour
les Abashingantahe :
• « Ils sont les gardiens de la coutume
et des moeurs. Ils servent de modèle
au milieu,
• Ils veillent à la sécurité des personnes et des biens, à la concertation et à la concorde dans leurs
milieux,
• Ils instruisent et tranchent les palabres dans un esprit non répressif,
mais de conciliation,
• Ils constituent une régulation du
pouvoir suivant un réseau de Conseillers allant de la colline jusqu’à la
Cour du Roi ».
Essais de définitions 1:
Selon Zénom Manirakiza, Vice-président du
Conseil National des Bashingantahe (CNB),
«Le concept d’Ubushingantahe vient du
verbe gushinga (planter, fixer, établir) et du
substantif Intahe (baguette de la sagesse).
Ce substantif Intahe est utilisé dans un sens
métonymique et symbolique pour signifier
l’équité et la justice (ingingo). Dans ce cas,
‘Umushingantahe’ signifie l’homme de
justice et d’équité (Umuntu w’ingingo). En
termes clairs, le concept d’Ubushingantahe
signifie une action de témoignage, de
médiation et d’arbitrage en vue de rétablir
la véracité des faits et la justice conciliatrice » 2 . Pour l’abbé Adrien Ntabona,
président du CNB : Le Mushingantahe
signifie «Un homme responsable du bon
ordre, de la tranquillité, de la vérité et de la
paix dans son milieu. Et cela, non pas en
vertu d’un pouvoir administrativement
attribué, mais de par son être lui-même, de
par sa qualité de vie, que la société voulait
reconnaître à sa personne en lui conférant
une investiture»3.
Conditions pour être
Umushingantahe :
Selon Zénom Manirakiza déjà cité, sept
conditions étaient nécessaires pour remplir
correctement la fonction d’Ubushingantahe :
• «La maturité humaine (ugutandukana n’ubwana),
• Le sens de la vérité (ukuba
imvugakuri)
• L’Intelligence
lucide
(ubwenge
butazindwa)
• Le sens de l’honneur et de la dignité
(ukugira agateka mu bandi)
• L’amour du travail et la capacité de
subvenir à ses besoins (ubwira mu
kwimara ubukene)
• Le sens de la justice (ukuba
intungane)
• Le sens de la responsabilité sociale
(ukurwanira intano, uguha itiro
inyakamwe)».
• En résumé, l’Ubushingantahe n’était
pas une fonction, mais un état.
1 Les idées développées dans cette contribution sont
puisées dans une Conférence donnée le 25 août 2007
à Bruxelles sous le titre «Burundi : les Bashingantahe au
service de la paix». C’était dans le cadre d’un
Séminaire organisé par le Mouvement international de
la réconciliation (MIR) et l’Internationale des Résistante-s à la Guerre (IRG) sur le thème : «Les manières de
‘faire’ la paix en Afrique»
2
Zénon Manirakiza, «Modes traditionnelles de
règlement des conflits : l’institution d’Ubushingantahe»,
Bujumbura, 2002
3 Abbé Adrien Ntabona, «L’itinéraire de la sagesse. Les
Bashingantahe hier, aujourd’hui et demain au
Burundi », Bujumbura, 1999
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Friday – Vendredi 15.08.2008
tragiques aussi pénétrants que les massacres actuellement en cours au Burundi
ont jalonné notre histoire ». Les Burundais
doivent «remonter jusqu’aux premiers
assassinats et massacres de masse pour
découvrir la volonté génocidaire des
Burundais hutu et tutsi, en passant par des
techniques d’exclusion sociale non moins
efficaces pour éliminer l’autre (école,
emploi, économie, cercles d’influence)”. 5
Arguments en faveur de la remise
sur pied de l’institution des Bashingantahe.
Pour la Commission Constitutionnelle,
« L’omniprésence des partis politiques peut
être un danger réel pour l’entente
quotidienne des gens sur les collines (...) et
risque de compromettre un certain nombre de valeurs que devrait fonder la
démocratie, notamment la paix sociale et
l’unité nationale (…). Les réalités sociales et
la tradition du Burundi nous commandent
de choisir à la fois un système de représentation inspiré de l’âme et de la culture
burundaises et compatible avec l’exigence
d’institutions modernes. C’est pourquoi la
Commission constitutionnelle propose que
la démocratisation à la base se fonde sur
l’institution d’Ubushingantahe qui, pendant
des siècles, a servi de socle à la paix
sociale, à la justice, à l’entente et à la
convivialité des Burundais sur nos collines.
Investis par les habitants des collines, les
Bashingantahe symbolisent pour les Burundais le sens élevé de l’honneur et de la
responsabilité, le culte de la justice et de la
vérité. Même si cette institution a été quelque peu altérée par le temps, elle garde
une signification profonde pour les
Burundais tant du milieu rural que du centre
urbain. Le moment est venu de lui faire
retrouver sa place dans notre organisation
socio-politique ». 4
Pour feu l’Abbé Paul Burire, il existait dans le
Burundi ancien plusieurs sortes de conflits:
“conflits sociaux courants (conflits familiaux
entre la belle-mère et sa bru et entre les
demi-frères par le phénomène de la
polygamie), conflits économiques” dans “la
volonté de posséder toujours plus, d’être
riche en vaches et en propriétés” (...). Les
“conflits politiques prenaient racine dans la
succession monarchique souvent sanglante.
Ils furent aggravés par la colonisation qui
favorisa les Ganwa (princes) et les Tutsi et
marginalisa les Hutu déjà peu représentés
dans le pouvoir monarchique. L’arrivée des
réfugiés rwandais en 1959 compliqua
encore la situation, car un bon nombre de
Tutsi rwandais installés au Burundi ont
apporté avec eux une haine profonde des
Hutu ».6
De son côté, Laurent Kavakure écrit :
« Depuis des temps immémoriaux, le Burundi connaît la culture de la violence, de
l’arbitraire, de l’impunité, et de l’exclusion que consacrait l’ordre des Bashingantahe qui étaient les piliers du système
traditionnel et participaient à toutes ses
intrigues (…). En outre, Bashingantahe ne
disposaient pas de moyens pour s’opposer
à certaines injustices commises par les
Baganwa (chefs) et le Roi, comme le
kwomora ou kwangaza (la contrainte à
l’exil) ou le kunyaga (razzia sur les vaches)»7
Arguments en défaveur de la remise
sur pied de l’institution des Bashingantahe.
1) Partir de fausses prémisses.
Parmi bien d’autres, citons quelques
auteurs. Selon Mgr Simon Ntamwana,
archevêque de Gitega et ancien président
de la Conférence Episcopale du Burundi,
l’affirmation selon laquelle “les Barundi ont
très longtemps vécu en paix” paraît pour le
moins fausse puisque «des événements
Mgr Simon Ntamwana, « Le Burundi, un autre
Rwanda: Pourquoi ? Que faire » ? Conférence
organisée par l’ACAT, Fribourg, 05/05/1996
6 Paul Burire (Abbé), « Possibilités et difficultés de paix
et de réconciliation au Burundi », Thèse de doctorat
présentée à Rome, juin 1987, 315 p.
7 Laurent Kavakure, « La réhabilitation de l’Ubushingantahe : une fausse réponse ? Genève, septembre
2002, p.1
5
4 République
du Burundi, Commission Constitutionnelle, Rapport sur la démocratisation des
institutions et la vie politique au Burundi, Bujumbura,
août 1991 p. 120
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Les impacts des systèmes de justice internationaux, nationaux et locaux
Friday – Vendredi 15.08.2008
Confirmant d’autres auteurs, 8 E. Mihigo
abonde dans ce sens quand il écrit :
« Contrairement à ce qui a toujours été
affirmé, la dignité et la charge des
Bashingantahe n’étaient pas accessibles à
tous les sujets capables, à quelque milieu
qu’ils appartinssent. On y entrait, si et
seulement si, l’on était assez riche et suffisamment intégré socialement pour mobiliser les quantités de bières nécessaires aux
différentes étapes du stage. Seuls ceux qui
jouissaient d’une influence au niveau local,
c’est-à-dire, d’une haute intégration sociale, et d’une capacité de mobilisation et
d’organisation avaient la chance d’accéder à l’investiture ».9
Juvénal Ngorwanubusa ne dit pas le
contraire. De nos jours, écrit-il, on voit « peu
à peu se confondre les attributs de prestige
et de sagesse, un jeune militaire pouvant se
prévaloir Mushingantahe par la simple possession d’une arme (ukwatirwa n’inkoho)
ou un jeune lauréat de l’enseignement
secondaire se déclarant notable sous
prétexte qu’il a décroché un diplôme
(ukwatirwa n’amashure), tout cela avec la
couverture de véritables Bashingantahe qui
mesuraient le parti qu’ils pouvaient ainsi
tirer d’une investiture à peu de frais de leurs
fils »11.
3) Une volonté de vouloir récupérer
le pouvoir perdu.
2) Une institution effritée au cours
des temps.
L’Abbé Salvator Ntibandetse s’étonne que
certains Burundais fassent du retour à l’institution des Bashingantahe la solution
adéquate et magique pour la résolution du
conflit burundais, alors que cette institution
a été politisée et a perdu sa vraie valeur. Il
s’agit là, écrit-il, d’un «‘fétichisme culturel’
peu critique, plus soucieux de valoriser une
identité exclusive originaire que de prôner
une culture universelle des droits humains,
qui esquive les questions de la domination
et de la violence dans l’histoire passée et
présente, et occulte les questions posées
par la situation anthropologique et sociale
actuelle. »12
Pour l’Abbé Protais Nkurikiye, aujourd’hui,
l’institution d’Ubushingantahe a été complètement vidée de sa substance. Elle a
été dévoyée depuis les années de l’indépendance car, depuis lors, le ‘Mushingantahe’ se confond avec ‘l’intellectuel’.
C’est un homme d’affaires avec beaucoup
d’argent, dont « l’autorité-domination se
fonde sur les principes d’une idéologie
importée » et qui traite « tout opposant à
son idéologie, ou dans certains cas celui
qui ne partage pas son ethnie » comme un
enemi à éliminer. « Il soutient l’impunité, vit
séparé de son peuple » et n’est plus élu par
la collectivité. Il vit selon la philosophie de
‘ntirumveko’ (que je n’aie affaire avec
personne) (...), tombe facilement dans la
culture du mensonge. Il est facilement
corruptible avec de l’argent. Le ‘paraître’
prend le dessus. C’est un ‘savant’ qui
manipule et exploite les esprits faibles. Pour
lui comptent le prestige et l’argent”10.
4) Une institution inadaptée aux
réalités actuelles.
Pour Mgr Bernard Bududira, ancien évêque
du Diocèse de Bururi, « On a beaucoup
écrit sur la palabre africaine, et en ce qui
concerne le Burundi, sur le statut social et le
rôle des Bashingantahe (...). Certes, dans
un milieu social peu diversifié comme celui
du Burundi précolonial, la pratique du
dialogue et de la concertation était plus
facile. Il n’est plus évident que les
Makarakiza, A., 1959, Dialectique des Barundi,
Académie Royale des Sciences Coloniales, Bruxelles, p.
39 et Mworoha, E., 1977, Peuples et rois de l’Afrique
des Lacs. Le Burundi et les royaumes voisins au XIXème
siècle, Dakar/Abidjan, Les Nouvelles Editions Africaines,
p. 170-171.
9 E. Mihigo
10
Abbé Protais Nkurikiye, «L’Eglise du Burundi
interpellée: les communautés chrétiennes de base
comme champ d’action pour une pastorale de
libération», Mémoire de licence, Bruges, 1995-1996, 54
p.
8
11 Juvénal Ngorwanubusa, « L’institution des Bashingantahe », p. 279, cité par Laurent Kavakure
12
Abbé Salvator Ntibandetse, « La place du
développement dans la revue ‘Au Coeur de l’Afrique’
du Burundi », Mémoire présenté en vue de l’obtention
du Diplôme d’études complémentaires du 2ème cycle
en théologie à l’Institut catholique de Louvain, année
académique 1997-1998, 117 p
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Enfin, quand certains chantres du retour à
l’Ubushingantahe font une lecture partiale
et partisane du conflit burundais, contestent les résultats des élections démocratiques de 1993 et justifient le coup d’Etat
sanglant contre le Président Melchior
Ndadaye18, cela pose problème.
méthodes anciennes puissent servir dans le
contexte actuel. La société burundaise a
beaucoup changé en s’ouvrant à un plus
grand pluralisme (politique, économique,
culturel et religieux) »13. De l’aveu même de
Zénom Manirakiza, Vice-président du CNB,
«Le génocide et d’autres crimes contre
l’humanité comportent une charge émotionnelle et affective que les Bashingantahe ne peuvent pas réguler, étant
donné que la plupart d’entre eux sont
également victimes de ces vices. C’est
pour cette raison que d’autres compétences doivent intervenir pour régler le
conflit sur base d’une objectivité et d’une
neutralité sans faille»14.
Joseph Ntamahungiro, Licencié en Lettres
et diplômé en Moyens de Communication
Sociale, Président du Centre d’Echanges,
Belgo-Burundais (CEBB) et Chargé d’Information au Réseau Européen pour l’Afrique
Centrale (EurAc)
Conclusion :
Avec Zénom Manirakiza, nous pensons qu’il
faut «protéger le terme ‘Umushingantahe’
de l’utilisation abusive qui a déjà corrodé
sa sémantique» comme constaté plus haut.
Nous sommes convaincus que le respect à
la lettre des instruments que se donne un
Etat de droit et la reconnaissance des droits
de chaque citoyen indépendamment de
son ethnie, de sa région, de son appartenance politique et/ou idéologique, de sa
religion et de son statut social est le meilleur
fondement et ciment d’un Etat de droit. Il
fera régner d’avantage la paix au Burundi
que le vouloir remettre à l’honneur coûte
que coûte une institution qui était loin
d’être parfaite. Surtout que de nos jours, il
est apparu que la notion du Mushingantahe rime avec compétence intellectuelle et économique 15 . Des Bashingantahe ont même été nommés par
décret présidentiel16, ce qui donne raison à
ceux qui affirment que «derrière la
réhabilitation
de
l'institution d'Ubushingantahe (...) se cache une manipulation
politique »17
Bibliographie (Conférences - Articles)
Burundi : les Bashingantahe au service de la
paix, Conférence donnée dans le cadre
d’un Séminaire organisé par le MIR
(Mouvement international de la reconciliation) et l’ IRG (Internationale des Résistant-e-s à la Guerre) sur le thème : «Les manières de ‘faire’ la paix en Afrique », Bruxelles, 25 août 2007, 12 p.
Burundi : Comment aboutir à une véritable
réconciliation ? Article rédigé pour le site inBurundi dans le cadre d’un Magazine Web
d'informations et d'analyses sur le Burundi.
(Rédacteur en chef : Antoine Kaburahe),
Bruxelles, 13 février 2003, 12 p.
Situation et attente des immigres burundais
et rwandais en Belgique, Conférence
donnée dans le cadre de la rencontre
organisée par les «Laïcs Scalabriniens
Mission pour les Migrants» sur le thème
«L’immigration africaine en Wallonie : Mieux
vivre ensemble», Charleroi, 25 Octobre
2003, 6 p.
Les ethnies au Burundi : une réalité, in
Dialogue N° 241, Bruxelles, NovembreDécembre 2006, p. 37-61
Mgr Bernard Bududira, «La dimension morale de la
crise burundaise», in Au cœur de l’Afrique, N° 1,
Bujumbura, janvier 1995, p. 99-110
14 Zénom Manirakiza, art. cité
15 Zénom Nicayenzi, « Adaptation et réhabilitation de
l’institution des Bashingantahe », Bujumbura, 2002
16 IRIN : « Les membres du Conseil des Bashingantahe »,
Nairobi, 1997
17 Net Press : « Derrière la réhabilitation de l'institution
d'Ubushingantahe initiée par le CRID se cache une
13
manipulation politique, estime le parti Frodebu »,
Bujumbura, 2002
18 Pie Ntavyohanyuma, Recension du numéro spécial
de la revue ‘Au coeur de l’Afrique’ intitulé « Burundi:
Autopsie de la crise », de juillet-décembre 1994, in
Dialogue n° 184, juillet-août 1995, p. 125-132.
81
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Le mythe de la surpopulation, in Dialogue,
N° 129, Kigali, Juillet-Août, 1988, pp. 27-49
Les causes de la pauvreté en Afrique
subsaharienne et les enjeux pour en sortir,
Conférence donnée dans le cadre du
Séminaire « Stratégies de lutte contre la
pauvreté en Afrique Subsaharienne »,
organisé par Voisins Sans Frontières des Iles
Baléares (VSF-IB), le Collectif d’Education
en DDH et de Prévention Active des Conflits
(CEPAC), avec la participation de
différentes organisations d’immigrés originaires d’Afrique résidant aux Iles Baléares et
de l’Université des Iles Baléares, Palma de
Mallorca, 22 Avril 2008, 21 p.
82
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Peasants, Power and the Past: Political Transition and Transitional
Justice in Rwanda and Burundi - A View From Below
Bert Ingelaere
Moreover, analyses of political transitions even when incorporating the critical rethinking of the ‘transition paradigm’ - are
dominantly focusing on elite actions and
discourses, institutional build-up and procedural regulations. Local perceptions of
socio-political change are not mentioned
in the transition literature. It is important that
we incorporate concrete results of governance, that is, tangible life changes in the
(perceived) well-being of the population,
to understand the nature and in assessing
the outcomes of transitions. Well-being
includes both objective and subjective
elements, so an assessment of indicators of
change should include measures of how
people feel about their lives and perceive
the changing socio-political environment.
The Transition Paradigm1
The assumption underlying the main literature on political transitions, the so-called
“transition paradigm” entails that a country
shifting away from authoritarian rule is
evolving towards democracy. 2 Through
reform, compromise or overthrow – the
modalities of the transition – do the choices
of the main actors – incumbent and
opposition elite forces – drive the transition
towards its outcome: the new democracy.
A reconceptualisation of this classical transition paradigm has highlighted some major
shortcomings based on the observation
that several countries that underwent a
political transition failed to democratise. 3
Therefore, these emerging regimes - the
outcome of the transition – need to be
situated somewhere in the “grey zone”4 inbetween authoritarianism and democracy.
Important in the understanding of reasons
why countries failed to democratise was
the observation that “structural features”
influence or hamper efforts to democratise.
These
structural
conditions
comprise
historical and institutional legacies, the economic situation, social class or ethnic makeup.
A mainly top-down assessment of the
Rwandan transition(s), its different phases
and its outcome is provided by several
authors.5 It is not our intention to provide an
assessment of the outcome of the Rwan5 On the Rwandan transition between 90-94 see : F.
Reyntjens, L’Afrique des Grands Lacs en Crise. Rwanda,
Buundi. 1988-1994, Paris, Editions Karthala, 1994.
G. Prunier, The Rwandan Crisis. History of a Genocide,
New York: Columbia University Press, 1995. A.
Guichaoua (ed.) Les Crises Politiques au Burundi et au
Rwanda (1993-1994), Paris, Editions Karthala, 1995).
R. Lemarchand, ‘Managing Transition Anarchies.
Rwanda, Burundi and South-Africa in Comparative
Perspective’, Journal of Modern African Studies Vol. 32,
N) 4, 1994, pp. 581-604.
On (mainly) the second phase of the transition see F.
Reyntjens, ‘La Transition Politique Au Rwanda’, in S.
Marysse & F. Reyntjens (eds.) L’Afrique des Grands
Lacs. Annuaire 2003-2004, Paris: L’Harmattan, 2004, pp.
1-22. F. Reyntjens, ‘Rwanda: Ten Years on. From
Genocide to Dictatorship’, African Affairs, N° 103, 2004,
pp. 177-210. I. Nifosi, ‘A New Conceptual Framework
on Political Transitions. A Case-Study on Rwanda.’ In: S.
Marysse & F. Reyntjens (eds.) L’Afrique des Grands
Lacs. Annuaire 2004-2005, Paris: L’Harmattan, 2005, pp.
73-94. And M. Rafti, A Bungled Path to Democracy:
Political Transition and Authoritarian Consolidation in
Rwanda," paper presented at the Conference
"Deepening Democracy in Divided Societies" Cape
Town, South Africa, 19-21 September 2007.
This paper summarizes the findings presented in B.
Ingelaere, Living the Transition. A Bottom-Up
Perspective on Rwanda’s Political Transition, Discussion
Paper / 2007.06, Institute of Development Policy and
Management, University of Antwerp, 2008. And: B.
Ingelaere, “Does the Truth Pass Across the Fire without
Burning?” Transitional Justice and Its Discontents in
Rwanda’s Gacaca Courts, Discussion Paper / 2007.07,
Institute of Development Policy and Management,
University of Antwerp, 2007.
2 S. Huntington, The Third Wave: Democratization in the
Late Twentieth Century, Oklahoma: University of
Oklahoma Press 1991.
3 T. Carothers, ‘The End of the Transition Paradigm’,
Journal of Democracy, Vol. 13, N° 1, pp. 5-21.
4 Ibid, p. 10.
1
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dan transition (as or in-between authoritarianism and democracy), but to bring into
focus how a structural feature (ethnicity)
defines the experience of transition by the
ordinary peasant population. Ethnicity as a
structural feature not only defined the
nature of Rwanda’s political transition, but it
also shapes collective imaginaries. Long
states: “[…] Issues or events are, of course,
often perceived, and their implications
interpreted, very differently by the various
parties/actors involved. Hence, from the
outset one faces the dilemma of how to
represent situations where there are
multiple voices and contested ‘realities’.” 6
ladder of life compared to the situation
before the genocide and war, the start of
the political transition. Most of this is a consequence of the violence: the dire
economic situation in rural areas, the loss of
life and goods, the destruction of the social
fabric and social cohesion. The overall
picture also reflects the fact that both Hutu
and Tutsi situate themselves on the positive
side of the ladder again, which indicates
an appreciation of a positive evolution
since the year 2000 compared to the
decade of upheaval experienced in the
past. The state guarantees physical security
and local authorities are present to solve
conflicts and problems for both Hutu and
Tutsi. Both groups are faced with the
problem of the “security of the stomach”,
the economic and household situation.
Nevertheless, in general Hutu perceive their
security situation lower compared to fellow
Tutsi community members. This is a result of
the fact that security also entails an appreciation of the political order, the policies it
generates and how these policies are
implemented.
We therefore adopt a bottom-up perspective that intends to “bring peasants back in
to an understanding of the political and
social processes of the state.” 7 In our
current analysis of what it means to live
through a transition, a bottom-up perspective, we use ethnicity - normally an unobservable variable in (studies on) postgenocide Rwanda - as pivot. Based on
more than 400 life-story interviews with both
Hutu and Tutsi living in the Rwandan
countryside and their subjective rankings on
a ‘ladder of life’ related to the economic
situation, the feeling of security, confidence
(in the own and other ethnic group) and
political representation, we shed light on
perceived changes over time.8
The most striking element in the results of
the ranking exercise is this reversal of perceived ethnic dominance, especially related to ‘political representation’. While Hutu
had the upper hand before 1994, Tutsi are
on top of Hutu rankings in the post-genocide rankings. Hutu are more confident
than Tutsi, but feel less politically representted. Tutsi on the other hand score high for
political representation after 1994, while in
their perception they live in an inimical
social environment being the untrustworthy
Hutu in their communities or the outside of
Rwanda.
Living the Transition
The graphs with rankings visually paint the
trajectory the Rwandan transition took in
the ordinary experience or perception after
its departure. 9 Both Hutu and Tutsi situate
themselves several steps lower on the
How to interpret this change? By looking at
power in its overt manifestation and in its
disguises 10 . The graphic results of this
subjective ranking exercise portray the
cartography of the perceived interrelation
of power and identity that structured and
continues to structure the Rwandan sociopolitical landscape and everyday life.
Previously, several authors have explored
6 N. Long, ‘Agency and Constraint, Perceptions and
Practice. A Theoretical Position’, in H. de Haan & N.
Long (eds.), Images and Reaities of Rural Life.
Wageningen Perspectives on Rural Transformations,
Assen: Van Gorcum & Comp, 1997, pp. 3-4.
7 C. Newbury & D. Newbury,’ “Bringing Peasants Back
In: Agrarian Themes in the Construction and Corrosion
of Statist Historiography in Rwanda’, American
Historical Review, 2000, p. 874.
8
Fieldwork and methodology is discussed in B.
Ingelaere, Living the Transition, pp. 10-23.
9 For the findings of the subjective ranking exercise
see: B. Ingelaere, Living the Transition, pp. 24-25
10 J. Gledhill, Power and its Disguises. Anthropological
Perspectives on Politics, London: Pluto Press, 1994.
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this theme, often in an attempt to understand that which brought about the
genocide. 11 Apparently, the current rankings reveal a similar process at work. It
solicits a further exploration of the micropolitics of power: how power is culturally
constructed and has been historically
transferred 12 ; how power is and was
institutionalised and practised and how it
was/is exercised in its ideological –
agentive - or hegemonic mode, for example through the mechanisms and policy
practices adopted to deal with the
violence from the past.
process should bring reconciliation, but
instead, or at least in its initial or operational
phase does the placement on the ladder
of life by respondents indicate that the
degree of trust in the other ethnic group is
not improving with the advent of the
Gacaca process. The feeling of security
starkly diminishes for genocide survivors, but
also for Hutu who were never imprisoned
but stand now accused in their communities. Tutsi and especially genocide
survivors feel less secure since the start of
Gacaca, while the feeling of security levels
out for Hutu.14
Justice in Transition
In the aftermath of war and genocide, cohabitation was a simple necessity. Life in
the countryside is highly pragmatic.
Peasants depend on each other in their
daily struggle for survival in mutual impoverishment. Secrets are kept in the dark
and personal thoughts are not ventilated in
order not to make enemies in the
community. But distrust was pervasive,
lingering under the surface of daily life.
Confidence and the feeling of security are
often expressed by referring to the heart
(umutima). The heart is the force unifying
the human being. Hearts have changed
because of the crimes committed, the
violence experienced and the inhuman
acts observed. Reconciliation, therefore, is
a matter of the heart. Hutu and Tutsi would
share the same living area again and
partake in ordinary village activities in a
mode of peaceful co-existence. The heart
was only tacitly explored in the years
before the installation of the Gacaca
courts, without much discursive content.
Within this framework of the experience of
‘transition’ and (perceived) state functioning, the Gacaca courts were installed
to “deal with the past”, tackle the distrust
between Hutu and Tutsi and reconcile
Rwanda and Rwandans. 13 From the year
2000 onwards, the upward trend is visible
on the charts depicting the results of the
ranking exercise. But the levelling of this
trend is equally visible from 2005 onwards,
the moment when the Gacaca courts
come to dominate rural life. The Gacaca
P. Uvin, Aiding Violence. The Development Enterprise
in Rwanda, Connecticut: Kumarian Press Inc., 1998, p.
33 & G. Prunier, The Rwandan Crisis: History of a
Genocide New York: Columbia University Press, 1995,
p. 80 & F. Reyntjens, Pouvoir et Droit au Rwanda. Droit
Public et Evolution Politique, 1916-1973, Tervuren :
Musée Royal de L’Afrique Centrale, 1985.
12 P. Chabal & J.-P. Daloz, Culture Troubles. Politics and
the Interpretation of Meaning, London: Hurst &
Company, 2006. & J. Gledhill, op.cit. For the Rwandan
context de Lame notes:: “Rwandan mentalities are still
imbued with a spiraling conception of time, as shown
by
the
pervading
ideological
recourse
to
(considerably falsified) history to justify the present (Des
Forges 1995). Any important new event harks back to
a similar, earlier period, especially when it touches on
historical identity. […] Being unique, the source of
power remains incompatible with shared authority, be
it cohabitation with a rival or the republican
separation of powers.” D. de Lame, A Hill Among a
Thousand. Transformations and Ruptures in Rural
Rwanda, Madison: The University of Wisconsin Press,
2005, p. 482.
13 For an analysis of the conception, nature and
functioning of the Gacaca court system see: B.
Ingelaere, ‘The Gacaca Courts in Rwanda’, in: L.
Huyse & M. Salter (eds.) Traditional Justice and
Reconciliation Mechanisms. After Violent Conflict:
Learning From African Experiences, Stockholm:
International Idea, 2008.
11
Exploring the heart of the other would
come into play after 2005, when the
Gacaca courts started to operate nationwide in every local community. The (nature
of) participation during the Gacaca
14 The
findings of the subjective rankings are
corroborated by the results of large-scale surveys
measuring social cohesion. See: Republic of Rwanda,
Cohesion Sociale 2005-2006. Sondage d’Opinion,
(Kigali: National Unity and Reconciliation Commission –
NURC, 2007) (Unpublished – On File With the Author) &
Republic of Rwanda, Sondage d’Opinion sur La
Participation A La Gacaca et la Réconciliation
Nationale, (Kigali National Unity and Reconciliation
Commission – NURC, 2003).
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sessions has become the element to probe
(the nature of) the heart of the other. The
(state-sanctioned) speaking or hearing of
the truth has become an important condition to increase the level of confidence
between parties that distrusted the nature
of the heart of the other before. The fact
that truth in the popular experience, both
from the side of Hutu and Tutsi, is perceived
as not surfacing in the Gacaca process,
explains the levelling out of the confidence
ranking. Not only factual knowledge
remains largely absent, but a re-humanization and re-socialization of the other - the
healing dimension of truth-telling - is not
easily forthcoming.
periences that are not forgotten but simply
not ventilated because un-expressible
through the installed transitional justice
architecture. These claims turn out to be
not legal, sometimes even illegal when
acted upon as genocide ideas/ideology,
but remain existential, seeking refuge in
the ’underneath of things’ 17 , a second
world constituted in relation to the first
world of social reality and rooted in the
collective social imaginary. Collective
imaginaries that differ according to ethnic
identity, as revealed in the findings of the
subjective ranking exercise.
The question is then what can this type of
transitional justice practice still accomplish
in the following stages of the post-conflict
reconstruction? And where does it fail and
what are, subsequently, the consequences?
And what are the prospects and lessons
learned for other countries in the region?
And do we learn from comparisons with
societies with a similar socio-political
context and legacy of violence but radical
other models and policies of restructuring
power and identity constructs? As Burundi
for example where a ‘transition’ is being
‘consolidated’ and the main transitional
justice work is still to come, primarily through
a ‘Truth and Reconciliation Commission’.
Restructuring or Deepening
Divergent Collective Imaginaries?
The reasons why there is a general experience that the ‘truth’ is not easily forthcoming are multifarious and complex. 15
One of the reasons is the fact that the
‘truth’ is curtailed by the a priori defining
parameters of what the ‘truth’ can be,
methodologically and ideologically, but
also because of the features of Rwandan
culture. As a result the ‘truth’ is ‘partial’ in
the sense of ‘incomplete’ and ‘deformed’
but also meaning ‘one-sided’ and ‘onedimensional’ lacking a broadly based
contextual anchoring.
Bert Ingelaere studied philosophy and
social and cultural anthropology at the
University of Leuven (Katholieke Universiteit
Leuven), Belgium. He has worked as a
consultant for the World Bank in Rwanda
and China, and is currently researching the
experience and perception of political
transition(s) and transitional justice at the
local level in both Rwanda and Burundi. His
research is funded by the Research Foundation Flanders (FWO) and hosted by the
Institute of Development Policy and Management (IOB), University of Antwerp and
the Centre for Peace Research and Strategic Studies (CPRS) at K.U.Leuven, Belgium.
Dissonance between popular embodied
experiences and understandings of the
conflict and the government controlled
and produced version of the ‘Truth’ with
regard to the past, both on the factual and
interpretative level, is one of the main
obstacles for fully legitimizing the Rwandan
socio-political order. It creates a volume of
unexpressed grievance under the surface
of daily life and the assiduous Gacaca
activities, fermenting in the ‘hidden transcript’16, as can be seen in the results of the
rankings. These are opinions and exFor a more comprehensive insight in the problematic
quest for the truth in the Gacaca process, see: B.
Ingelaere, “Does the Truth Pass Across the Fire without
Burning?”
16 J. Scott, Domination and the Arts of Resistance.
Hidden Transcripts, New Haven & London: Yale
University Press, 1990.
15
Publications
17 M. C. Ferme, The Underneath of Things, Violence,
History and the Everyday in Sierra Leone, Berkeley
University of California Press, 2001.
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Workshop - Atelier
The impact of international, national, local justice systems
Les impacts des systèmes de justice internationaux, nationaux et locaux
Friday – Vendredi 15.08.2008
* ‘The Gacaca Courts in Rwanda’, in: L.
Huyse & M. Salter (eds.) Traditional Justice
and Reconciliation Mechanisms. After
Violent Conflict: Learning From African
Experiences (Stockholm: International Idea),
2008, pp. 25-59.
* Living the Transition. A Bottom-Up Perspective on Rwanda’s Political Transition,
Discussion Paper, Institute of Development
Policy and Management, University of Antwerp, 2007.
* “Does the Truth Pass Across the Fire without Burning?” Transitional Justice and Its
Discontents in Rwanda’s Gacaca Courts,
Discussion Paper, Institute of Development
Policy and Management, University of Antwerp, 2007.
* ‘A la Recherche de la Vérité dans les
Juridictions Gacaca au Rwanda’, in : F.
Reyntjens & S. Vandeginste (eds.), L’Afrique
des Grands Lacs, Annuaire 2006-2007, Paris :
L’Harmattan, 2007, pp. 41-74.
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Friday – Vendredi 15.08.2008
Rapport de séance
Andrea Pabst
Dans ce cadre le problème d’instrumentalisation et de justice de vainqueur était
discuté. Concernant ce point il y a par
exemple le problème que les crimes
commis par le FPR – Front Patriotique
Rwandais – ne sont pas jugées ni devant les
gacaca ni devant le TPIR dû à des pressions
des acteurs puissants soit internationaux soit
locaux.
Les points importants évoqués pendant la
discussion :
La question de l’effectivité et efficacité des
tribunaux :
Sur le plan international on a constaté que
le bilan du TPIR – Tribunal Pénal International pour le Rwanda est faible : la cour
travaille depuis 14 ans, il y a des coûts
énormes, mais le nombre des personnes
jugées est très minime. On pourrait dire que
la mission du TPIR n’a pas été accomplie,
parce que beaucoup de planificateurs du
génocide n’ont pas été jugés.
La difficulté de déterminer qui est victime,
quels sont les intérêts des victimes et le
problème comment on poursuit les coupables :
Il y a plusieurs groupes qui se sentent
comme victimes et qui ont des intérêts
divergents. Et il y a aussi plusieurs groupes
de bourreaux. Dans ce cadre on a par
exemple évoqué qu’on aurait pu faire une
plus grande différence entre les vrais
responsables, alors les planificateurs du
génocide, et les petits qui ont suivis.
Les impacts des tribunaux internationaux,
les impacts des processus Gacaca et du
système burundais des sages :
On constate que l’impact des procès du
TPIR sur la vie quotidienne des gens au
Rwanda tend vers zéro, parce qu’il est
physiquement et psychologiquement trop
éloigné. Mais il était quand même important pour juger et ainsi neutraliser des organisateurs du génocide.
Concernant l’impact des gacaca on peut
d’abord dire que c’est une justice de
proximité et du coup acceptée, mais il y a
aussi des problèmes dû à la forme hybride
de ces tribunaux: dans leur forme originaire
ils avaient une forte orientation de justice
restaurative, c’est-à-dire vers la réconciliation. Dans la forme actuelle des gacaca, l’aspect restauratif passe en l’arrièreplan et les gacaca ont plutôt une orientation retributive qui vise à la poursuite et
condamnation des individus. Il faudrait
donc assurer un mécanisme qui va vers une
vraie réconciliation.
Sur l’impact du système Ubushingantahe
au Burundi on a constaté qu’une réinstallation de cette institution pourrait
contribuer à régler des conflits de proximité.
Les buts politiques derrière la justice : La
justice est toujours aussi un jeu politique.
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The role and impact of national and international stakeholders in the region
Le rôle des acteurs nationaux et multilatéraux dans la région
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Workshop – Atelier
The role and impact of national und international
stakeholders in the region
Le rôle des acteurs nationaux et multilatéraux dans la
région
L’évolution de la situation des Droits de la Personne au Zaïre/ en RDC
entre 1994 et 2001
Roberto Garretón, Chile, former Special UN-Adviser, RDC
The international community in the region: loaded agenda, limited results
Volker Weyel, Global Policy Forum Europe – GPF Europe, Bonn
Le rôle de la société civile au Zaïre/ en RDC 1990-2008
Joseph Chiko Sanane, Ligue des Droits de la Personne dans la Région des
Grands Lacs -LDGL, Goma, RDC
Moderation : Konrad Melchers, Berlin
Rapporteure : Xavérine Niwemutoni, Imbuto
89
15.00-16.30h, 17.00-18.30h
Workshop- Atelier
The role and impact of national and international stakeholders in the region
Le rôle des acteurs nationaux et multilatéraux dans la région
Friday – Vendredi 15.08.2008
L’évolution de la situation des Droits de la Personne
au Zaïre/ en République Démocratique du Congo entre
1994 et 2001
Roberto Garretón
pays qui sous Mobutu avait donné un fort
appui au dictateur rwandais Juvénal
Habyarimana. La protection donnée aux
réfugiés a augmenté les tensions dans le
pays, du fait des rivalités ethniques et
historiques au Zaïre, et plus particulièrement
dans cette région.
Ainsi, dans mon rapport de 1994,
paragraphe 274, j’ai indiqué que « l’actuel
niveau de tensions et les innombrables
rivalités tribales et régionales, ravivés par
l’arrivée massive de réfugiés rwandais, font
craindre que cela puisse provoquer une
explosion politique « avec des conséquences beaucoup plus transcendantes
que celles vécues au Rwanda ou au
Burundi ». La communauté internationale
ne peut ignorer une situation d’une telle
envergure, et encore moins les pays qui ont
de telles responsabilités historiques dans la
région » 2.
Rien n’a été fait.
Lorsque j’ai pris mes fonctions de
Rapporteur des Nations Unies en 1994, le
Zaïre était un immense pays dévasté par
une dictature féroce.1 Cette dictature datait de 1965 suite à un coup d’état de
Mobutu Sese Seko qui, en 1961, avait
participé à l’assassinat du père de l’indépendance de l’ancien Congo Belge,
Patrice Lumumba. Le dictateur a alors
imposé un régime dictatorial et cruel, avec
une corruption rarement vue auparavant.
Cependant, les Nations Unies n’ont jamais
établi de commission d’enquête sur les
atrocités commses. Peut-être parce que
Mobutu était vu comme un défenseur des
valeurs occidentales au centre de l’Afrique,
ou alors du fait des immenses richesses qui
provoquaient des intérêts dans les pays
occidentaux.
En 1990, à la fin de la guerre froide,
Mobutu a perdu son importance. Ses
massacres sont qualifiés d’honteux par les
personnes qui auparavant fermaient les
yeux. Une société civile forte et vigoureuse
fait apparition et fait pression afin de
bénéficier de réformes démocratiques et le
contraint à organiser une Conférence
Nationale Souveraine, qui met fin à un
régime « Parti/ Etat ». Mais le dictateur
(doté d’une certaine force) ignore tous les
progrès, et se maintient inébranlable au
pouvoir.
En 1994, à la fin du génocide au
Rwanda, plus d’un million de réfugiés
accusés dans le pays de participation au
génocide, se réfugient dans l’est du Zaïre,
Entre le 6 et le 14 juillet 1996 j’ai à
nouveau visité Goma, la capitale de la
Province de Nord Kivu, dans l’est du Zaïre.
Quelques réfugiés hutu et plus particulièrement la milice interahamwe, bénéficiant du soutien des Forces Armées
Zaïroises (FAZ), d’une part persécutaient les
tutsi rwandais arrivés du Zaïre avant et
pendant la colonisation belge, et d’autre
part rentraient clandestinement dans le
pays pour continuer le génocide. Dans un
autre rapport, j’ai averti « que ce qui se
passait dans le Nord-Kivu pouvait se
reproduire avec les mêmes caractéristiques
dans le Sud-Kivu ». J’ai alors estimé « que vu
le niveau de confrontations ethniques dans
la zone des Grands Lacs et l’internationalisation du conflit, aggravé par le fait
1 Rapporteur Spécial de la Commission des Droits de
l’Homme aux Nations Unies sur les Droits de l’Homme
au Zaïre, 1994-2001
2
90
E/CN.4/1995/67.
15.00-16.30h, 17.00-18.30h
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Le rôle des acteurs nationaux et multilatéraux dans la région
Friday – Vendredi 15.08.2008
que les FAZ se sont montrés incapables de
trouver une solution au Zaïre et qu’ils n’ont
fait que l’aggraver, la seule possibilité
d’éviter l’extension de la violence serait
une mission d’observateurs militaires dans la
région » 3 . A nouveau rien n’a été fait et
quarante-six jours plus tard l’Armée
Patriotique Rwandaise (APR), avec l’aide
des rebelles zaïrois commandés par Laurent
Kabila envahie le Zaïre, justement par le
Sud Kivu. L’APR, pour attaquer les champs
de réfugiés hutu ; les rebelles, pour
renverser Mobutu.
conflit initial RDC contre RCD un caractère
international. Le peuple congolais s’est
senti indigné par le fait que le Conseil de
Sécurité ait distingué lors du conflit entre les
Etats qui ont soutenu la RDC conforme au
« droit naturel de légitime défense individuelle ou collective énoncé à l’Article 51
de la Charte des Nations Unies » et « les
forces non invitées », mot qui cachait
difficilement l’expression « agression » 4.
Neuf Etats et vingt-deux groupes irréguliers
ont finalement participé à ces conflits. Tous
ont violé les droits de l’homme et le droit
international humanitaire. Pour mettre fin
aux affrontements plus de trente rencontres
internationaux ont été organisés5.
Mais il y avait aussi d’autres conflits, toujours
avec cette dynamique ethnique, comme
celui qui opposait les Hema (d’origine
ougandaise), aux Lendu (originaires de la
région de Ituri). Ce conflit a d’ailleurs été à
l’origine des trois premiers cas de la Cour
Pénale Internationale.
Le 17 janvier 2001 Laurent Kabila a été
assassiné. Comme ces dispositions de
transition ne prévoyaient pas sa succession,
les dirigeants politiques ont imposé comme
Président son fils, Joseph. La répression qui
a agi spontanément contre les opposants,
et plus particulièrement contre les
défenseurs des droits de l’homme, à été
brutale.
Dans un autre rapport, sur ma visite
à la région en mars 1997, j’ai rendu compte
des massacres dans les camps de réfugiés
hutu, ce qui a permis à Kabila, alors Chef
des rebelles, d’annoncer que plus jamais il
ne m’autoriserait à visiter son pays. Le
secrétaire des Nations Unies a alors désigné
une équipe parallèle que je présidais, pour
enquêter sur les plaintes des massacres
commis dans les camps des réfugiés.
Neuf mois après l’invasion, Kabila
s’installe comme Président de l’actuelle
République Démocratique du Congo. Mais
il a été un second dictateur, à qui on a pu
reprocher d’être manipulé par les rwandais
tutsi. Les tensions politiques ont alors
augmenté, jusqu’au point où Kabila a dû
expulser les rwandais du pays le 27 juillet
1998.
Le 2 août, le Rwanda, avec la couverture
congolaise qui formait un mouvement
nommé Rassemblement Congolais pour la
Démocratie (RCD) envahit la RDC par l’est
(Goma) et par l’ouest (Kitona y Muanda).
En peu de mois, le RCD occupe le tiers
Nord-Est du pays et installe un gouvernement avec les Rwandais. En novembre 1998, le Mouvement de Libération
du Congo (MLC), commence à fonctionner en tant que groupe armé mais il va se
rajouter à une fraction dissidente du RCD.
Lors de mon dernier rapport, dirigé a
l’Assemblée Générale (le 31 août 2001), j’ai
regretté que « la paix reste illusoire, tout
comme le retrait des troupes étrangères, à
commencer par celles qui ont violé
l’intégrité territoriale et la souveraineté du
Congo. Les pays concernés et les factions
congolaises qui les appuient trouvent
toujours de nouveaux prétextes pour
retarder l’exécution de leurs obligations. En
plus, les normes du droit international
relatives aux conflits armés internes, aux
conflits internationaux et aux conflits
internes internationalisés sont fréquemment
violées pendant ces guerres »6.
Mon rôle de rapporteur s’est alors
achevé mais pas mon intérêt et mon
affection pour la RDC et son peuple.
Le Rwanda, l’Uganda (qui a ensuite
appuyé le MLC) et, occasionnellement le
Burundi, ont appuyé militairement le RCD.
La RDC a appelé à soutenir le Zimbabwe,
l’Angola et à d’autres moments le Tchad,
le Soudan et la Namibie en donnant au
S/RES/1234 (1999).
E/CN.4/2000/42, anexo X.
6 A/56/327, párr. 95 et 96.
4
5
3
E/CN.4/1997/6/Add.1, párr. 116.
91
15.00-16.30h, 17.00-18.30h
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le 6 décembre 2006, la nouvelle
Constitution est entrée en vigueur, en dépit
du report de quelques changements
fondamentaux, tels que le processus de
décentralisation dans les 26 provinces et la
nouvelle structure judiciaire. Ce jour Kabila
a prononcé un discours dans lequel il a mis
l’accent sur ses responsabilités “face à une
Nation dont les aspirations sont résolument
tournées vers l’avenir“, sans faire référence
majeure aux conflits du passé. Il précise
même que “l’espérance du peuple congolais étant tournée vers l’avenir, il
s’empêchera ici de s’appesantir sur le
passé, sans cependant l’oublier totalement”.
Après mon départ, c’est finalement
le 17 décembre 2002 qu’à abouti un
Accord Global et Inclusif (dorénavant, AGI)
pour la paix et la transition démocratique
signé à Pretoria par les huit parties comprenant les six composantes ci-dessous : Le
Gouvernement, le Rassemblement congolais pour la démocratie (RCD); le
Mouvement de libération du Congo (MLC);
le Rassemblement congolais pour la démocratie/ Mouvement de libération du Congo
(RCD/ ML); le Rassemblement congolais
pour la démocratie/National (RCD/N) et les
Maï-Maï); surnommés entités (l’Opposition
Politique et les Forces Vives). Commence
alors un processus de transition.
Néanmoins de nombreux conflits persistent
et réapparaissent de temps à autres, à
mon avis, parce que les causes à l’origine
de ces tensions n’ont toutefois jamais été
traitées.
Mais une chose est certaine: la transition
s’est révélée être une transition sans justice
transitionnelle, ce qui a seulement pu
arriver par le simple fait d’avoir écarté la
participation des victimes de violations aux
droits de l’homme et au droit international
humanitaire. L’accord a exigé un immense
effort de générosité de la part de
l’ensemble des acteurs, en vérité celui-ci
fut fondamentalement politique, avec la
participation de nombreuses personnalités
directement responsables des maux ayant
affectés le pays tels que violations des
droits de l’homme, propagation des conflits
armés et corruption.
Cet accord complexe est entré en vigueur
le 4 avril 2003, lors de l’approbation le
même jour par le Gouvernement du
Président Kabila, de la Constitution de la
Transition (dorénavant CT) qui reconduit
dans ses fonctions le chef de l’Etat (article
65). La période de transition est fixée à 24
mois, prorogeable jusqu’à deux fois pour
une durée de six mois chacune, ce qui
dans les faits s’est traduit par une totalité
de trois ans (chapitre IV du AGI). Le pouvoir
Exécutif comprenant 36 ministères et 26
vice-ministres.
Durant la transition, les conflits ont continué,
plus particulièrement dans l’est, où des
groupes radicaux tutsi, avec l’appui
comme toujours du Rwanda, ont continué
les massacres contre la population locale.
Roberto
Garretón,
chilien;
Avocat,
Défenseur des droits de l’homme au Chili
pendant la dictature du Général Pinochet7.
Ambassadeur du premier gouvernement
après la dictature, auprès des organisations
internationales des droits de l’homme (ONU,
OEA) (1990-1994), Membre du Groupe de
Travail sur la Détention Arbitraire de l’ONU
(1991-2000, et depuis 2008).
Rapporteur Spécial de la Commission des
Droits de l’homme de l’ONU sur les droits de
l’homme au Zaïre, après République
Démocratique du Congo (1994-2001) ;
Représentant de la Haute Commissaire aux
Droits de l’Homme de l’ONU pour
l’Amérique Latine et le Caraïbes (20012005) ;
Membre
du
Conseil
de
l’organisation féministe chilienne Institut de
la Femme (dès 2001)
Titre
actuel:
Membre
de
Conseil
Consultative nommé par le Secrétaire
Général de l’ONU, M. Kofi Annan, sur la
Prévention des Génocides (depuis 2006).
7 Au Comité de Coopération pour la Paix, (1973-1975)
et après au Vicariat de la Solidarité (1976-1990), la plus
importante et reconnue des organisations des droits
de l’Homme au Chili.
Avec la prise de fonction de Joseph
Kabila tant que Président de la République
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Bibliographie/ Distinctions :
Plusieurs publications dans de magazines
spécialisés et ouvrages sur des questions
des droits de l’homme
Prix Mons, Leonidas Pro AHo, pour la
défense des Droits de l’Homme, de
l’Association Latino-américaine des Droits
de l’Homme – ALDHU (1993) Le prix a été
partagé avec Rigoberta Menchú, Guillermo Ungo et Paulo Freire
Prix Ruth Pearce du Service International
des Droits de l’Homme au diplomate le plus
engagé à la défense des droits de
l’homme (1993)
Prix Palme Nationale, du Conseil National
des Droits de l’Homme en Islam, Kinshasa,
République Démocratique du Congo (1999)
Décoration: Officiel de la Légion d’Honneur
(France, 2003)
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The international community in the region:
loaded agenda, limited results
Volker Weyel
ICC but before the 'Special Court for Sierra
Leone' [which deals with his case in The
Hague because of security considerations].
International Criminal Court - ICC's
long-range effect
Let's draw a first lesson: Impunity is not the
order of the day any more. Even current
heads of state may face international
juridical action, as the recent debate on
Sudanese President Omar al-Bashir shows.
You may recall that of late, the ICC Prosecutor presented a case against him for
genocide, crimes against humanity and
war crimes in Darfur.
Even if one plays down or ridicules the role
of the international community - the establishment of the ICC alone is a major
historical achievement, benefitting the
peoples of the Great Lakes Region as well.
Spotlight on a scene in a very remote part
of the Democratic Republic of the Congo
(DRC) some time last year: In the focus
there is Joseph Kony, the head of the LRA,
the 'Lord's Resistance Army', Ugandan
bandits - not 'rebels' - who have taken
refuge in the Garamba National Park.
Peace talks between the Ugandan government and the LRA in Juba are dragging on,
and Kony is contemplating the consequences. He chews over very personal
consequences, meaning a possible trial in
The Hague before the International
Criminal Court. The ICC had issued arrest
warrants against him and four other LRA
leaders in 2005. The result is known: A
peace deal was not signed up to the
present day, because Kony was not
satisfied of not being prosecuted by the
ICC. By the way, it was reported that in
Garamba he also watched a video of the
hanging of Saddam Hussein. Though even
a life term in a Dutch prison cannot be
compared to the cruel, degrading and
even unprofessional execution of Saddam,
it is remarkable how much fear the ICC
instils on people of the Kony brand.
Kony is still at large, but Thomas Lubanga
Dyilo from the DRC since quite some time is
on trial in The Hague [currently dispute on
his release]. Jean-Pierre Bemba Gombo, a
former Vice-President of the DRC, just
recently, on 3 July, was delivered to the
detention centre of the Court [incidentally
because of his activities in the Central
African Republic; surrendered by the
Belgian authorities to the ICC]. Former
Liberian President Charles Taylor stands trial
in The Hague as well, though not before the
Different faces of the international
community
But who is the 'international community'?
There are different layers of this phenomenon, and there is a multitude of multilateral
actors, stretching from the regional organization African Union (AU) to the European
Union (EU) and eventually to the NGO
community (which in certain places even
appears to perform the role of an
international agency or of a national
government). And you have the interests of
major state actors like the U.S. and China,
not to forget the old colonial powers
France and Great Britain. Some channels of
influence are invisible, like outright
corruption or the activities of intelligence
agencies. Our focus, however, shall be on
what I would call the major legitimate international actor, i.e. the world organisation.
The United Nations comprises a good
number of programmes, funds and
agencies which at present operate in the
Great Lakes region. Yet, UN involvement in
94
15.00-16.30h, 17.00-18.30h
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The role and impact of national and international stakeholders in the region
Le rôle des acteurs nationaux et multilatéraux dans la région
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the region is not new. Just to recall the
major landmarks:
• Ruanda-Urundi: Trust Territory (League of Nations / UN)
• Rwanda referendum 1961 (supervised by the UN)
• Congo operation 1960-1964 (ONUC)
• UNOMUR 1993/94 and UNAMIR 1993
-1996
• ill-fated (non-)involvement in Rwanda 1994
• setting up of the 'International Criminal Tribunal for Rwanda' in Arusha
by the Security Council end of 1994
• More recently:
• facilitation of peace processes in
the region,
• support of regional initiatives like the
'International Conference on the
Great Lakes Region' (ICGLR) which
held its second summit in Nairobi on
14 and 15 December 2006; there it
concluded a pact [see below] and
envisaged a US $ 225 m security
package as well as programmes on
good governance and other issues
deployment of MONUC.
Interahamwe as a genocidal military
organisation in the DRC. Such operations
should be simultaneously conducted with
operations to dismantle illegal armed
groups in North and South Kivu". The role of
the international community was described
in this way: "the United Nations, the African
Union, the European Union, the United
States, South Africa and other partners that
the two signatories to this Communiqué
may agree on, together with representatives of the two parties, shall be invited to
facilitate and monitor the implementation
of this agreement".
In its resolution 1804 of 13 March 2008, the
United Nations Security Council called
upon the Governments of the DRC and
Rwanda "to intensify their cooperation to
implement their commitments under the
Nairobi communiqué".
Goma Statements of Commitment: In the
same resolution, the Security Councils
underscored "that the statements of commitment (Actes d’engagement) signed in
Goma on 23 January 2008, together with
the Nairobi communiqué, represent a
major step towards the restoration of lasting
peace and stability in the Great Lakes
region".
The 'Kivus Conference for Peace, Security
and Development' was held in Goma from
6 to 23 January 2008. The follow-up shall be
done through the Amani ("peace" in Swahili)
Programme launched by the DRC
Presidency as the comprehensive framework for the implementation of the
commitments entered into in Goma: a
number of commissions, including a mixed
technical commission on peace and
security. In addition, it aims at sensitisation.
[There is also a 'Amani Forum', the 'Great
Lakes Parliamentary Forum on Peace': a
network of Members of Parliaments in the
region committed to peace, created by a
group of parliamentarians in 1998. National
Chapters exist in the five East African
countries plus the DRC and Zambia.]
Here, we shall concentrate on the internationally-facilitated regional peace plans
and supporting actions. Funding of these
activities largely comes from the donor side.
Pacts and Processes
International Conference on the Great
Lakes Region: concluded with the signing
on 15 December 2006 in Nairobi of the Pact
on Security, Stability and Development in
the Great Lakes Region. It aims at
addressing "the underlying causes of the
conflicts in the region" and intends to deal
with the various problems under a regional
perspective. The agreement entered into
force on 21 June 2008 after ratification by
eight of the 11 'core countries' of the ICGLR
[the eight are the five East African countries,
the Central African Republic, the DRC and
the Republic of the Congo].
Two ESDP (European Security and Defence
Policy) missions in the DRC: EU security
sector reform mission in the Democratic
Republic of the Congo (EUSEC RD Congo):
provides advice and assistance for security
sector reform (SSR) in the country;
Nairobi Communiqué: Agreement signed
between the DRC and Rwanda on 9
November 2007. Here, the DRC undertook
to "launch military operations, as a matter
of urgency, to dismantle the ex-FAR/
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15.00-16.30h, 17.00-18.30h
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[According to a recent analysis of the
situation in the Kivus by the South African
Institute for Security Studies, the "current
problems between the EU and the DRC in
prolonging and defining the mandate of
the EU advisory mission (EUSEC) serves as
another clear indication that the DRC is not
yet fully committed to the SSR process."]
EU Police Mission for the DRC (EUPOL RD
Congo): assists in the reform of the
Congolese national police.
measures … remained fully applicable to
the current situation. The Baril mission also
acknowledged that, to fulfil its mandate,
MONUC required a high degree of mobility
and flexibility on the part of its contingents.
A willingness to use appropriate force in
accordance with the Rules of Engagement,
was also required, both to protect civilians
and to support the Nairobi and Goma processes, including through joint military
operations with the FARDC."
[S/2008/433, para. 36]
Tripartite Plus Joint Commission: This is a
notable example of intelligence cooperation under the guidance of an
external state actor. The 'Tripartite Commission' was set up in 2004 by the DRC,
Rwanda and Uganda in order to bring their
security concerns in line. A year later, it was
expanded through the admission of Burundi
and renamed the 'Tripartite Plus Joint Commission'. The joint intelligence office of the
four countries was established in 2006 in
Kisangani under the leadership of CIA
agents: the 'Tripartite Fusion Cell'. The role of
the U.S. as a 'facilitator' was underlined
when a summit of the 'Tripartite Plus Joint
Commission' was called after renewed
unrest in the east of the DRC. This meeting,
which took place in Addis Ababa on 4
December 2007, was attended by the
Presidents of Burundi, Rwanda and Uganda,
the DRC internal affairs minister - and by U.S.
Secretary of State Condoleezza Rice.
Major challenges facing the
international community
Half a year after the Goma Statements of
Commitment, the expectations appear to
be largely unfulfilled. The 'Congo Advocacy
Coalition' of 64 aid agencies and human
rights groups, founded in July 2008, states
the "horrendous violence continues to
plague" the east of the DRC, pointing out
that "at least 150.000 people have been
forced to flee from their homes due to
ongoing fighting since the Goma peace
agreement
was
signed".
A
senior
researcher with 'Human Rights Watch' put it
like this:
"The Amani Program hasn't yet made life
better for the citizens of eastern Congo. The
international community and the Congolese government should do what it takes to
make the peace program a reality, not just
a nice idea. They need to ensure it's funded
properly so it reaches those most in need."
[Anneke Van Woudenberg]
In view of the still appalling security situation,
the reform of the security sector undoubtedly is of major importance. In the
DRC, this so far is no success story. The
United Nations Secretary-General in his 26th
report on the MONUC [para. 38] deplores
the "limited operational capacity and lack
of discipline of Forces Armées de la
République Démocratique du Congo". This
also does not augur well for the envisaged
exercises of 'brassage' (the assimilation of
militiamen into the national army) and of
'DDR' (disarmament, demobilisation and
reintegration) of the various armed elements. Moreover, "MONUC is severely
overstretched and faces growing demands
MONUC: The 'United Nations Organization
Mission in the Democratic Republic of the
Congo' was originally set up in 2000 in
support of the 'Lusaka Ceasefire Agreement' of 1999. Strength of Mission as of 30
June 2008: 16 666 troops, 693 military
observers, 1 046 police and 939 international civilian personnel. In addition (as of
31 May), 2 110 local civilian staff and 590
United Nations Volunteers. The approved
budget (1 July 2007 - 30 June 2008): US $ 1 1
bn. Force Commander is Lt.-Gen. Babacar
Gaye (Senegal).
The force has a robust mandate, i.e. it can
and should use force if necessary in the
fulfilment of its tasks, including support for
the national army in its attempts to gain
control over the whole territory. A recent
UN report "concluded that the Force's
robust Rules of Engagement and the
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15.00-16.30h, 17.00-18.30h
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The role and impact of national and international stakeholders in the region
Le rôle des acteurs nationaux et multilatéraux dans la région
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with regard to support for the Nairobi and
Goma processes" [para. 76].
to register the achievements: bringing
about a certain measure of stability and
providing the structures which can be used
for sustainable solutions.
So, in view of the limitations mentioned, the
record of the international community is not
as poor as some critics claim. Moreover, the
existence and activity of the 'International
Criminal Court' sends out signs of hope to
the peoples of the region. Let me repeat it:
Impunity is not the order of the day any
more!
Volker Weyel. Dr. worked as editor-in-chief
of the specialised periodical "VEREINTE
NATIONEN. Zeitschrift für die Vereinten Nationen und ihre Sonderorganisationen" from
1977 to 2004. The bimonthly - published by
the "Deutsche Gesellschaft für die Vereinten Nationen" (German United Nations
Association) – examines the work of the UN
in its main fields of operation.
Signs of hope
The agenda of the international community
indeed is loaded and in fact the results are
limited. The UN provides the framework for
solutions as well as the instruments and is
helpful in organising the funding, so the
blame shall not be put on the world
organisation. It is almost a rule that it is
given heavy tasks - mainly by the Security
Council - but not the means to accomplish
it. The responsibility lies with the states especially the powerful and wealthy ones,
which do not want to commit themselves.
Just a brief reminder: When SecretaryGeneral Boutros-Ghali asked for Blue
Helmets at the height of the 1994 genocide,
the member states looked sideways. This,
by the way, is no excuse for the lack of cooperation shown at times also by local
actors, i.e. the governments of the region
which pay lip-service to peace but
frequently follow their own agenda, not
much different from the major powers.
Needless to say that the actors do not
always act consistently in their various areas
of action.
Weyel was born in 1944; after studies of
Sociology, Ethnology and Political Science,
he graduated from Frankfurt's Goethe University.
He is also a former Research Associate of
the Makerere Institute of Social Research
and Makerere University, Kampala/Uganda.
In 2004, he was a founding member of
"Global Policy Forum Europe (GPF Europe)"
and is member of GPF Europe's Board since
then.
As a consequence of the limited willingness
to get involved too much, the number of
troops mandated to keep the peace in the
DRC is inadequate given the size of the
territory which is supposed to be supervised.
Given this background, one should not fail
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Rôle de la société civile au Zaïre/ en République Démocratique du
Congo – RDC entre 1990 et 2008
Joseph Chiko Sanane
Période 1990-1996 : Société civile
engagée, mais sans identité claire
Introduction
L’existence de la société civile congolaise
remonte vers les années 1950, au cours
desquelles les associations mutualistes et
chrétiennes ont mené des actions pour
conquérir l’indépendance politique. Dès
l’accession du Congo, alors Zaïre, à la
souveraineté nationale, les syndicats s’engagent dans des actions en faveur de la
promotion de la main d’œuvre locale.
Après le coup d’Etat militaire de 1965, le
président Mobutu instaure un parti unique
et centralise à outrance le pouvoir : lui et
les structures du parti unique deviennent le
centre d’impulsion de la vie nationale ; les
syndicats sont fusionnés en un seul ; la
justice est placée sous le joug de l’exécutif ;
le parlement devient une caisse de résonance du Mouvement Populaire de la
Révolution, alors que les espaces d’expression sont verrouillés au profit des medias
officiels.
La restauration de l’Etat de droit et la construction d’une paix durable sont un enjeu
majeur après l’aboutissement du processus
électoral en 2006. Au regard de
l’effondrement des cadres de vie, il est
urgent d’inciter les différents partenaires
sociaux à trouver un consensus sur de
nouvelles valeurs fondamentales susceptibles de rétablir les équilibres économiques
et socio-politiques rompus. Comment extirper les causes à la base des conflits en
République Démocratique du Congo si
leurs acteurs ne sont pas prêts à
reconnaître leur responsabilité et à s’engager, sans état d’âme, dans le changement ?
Au-delà de la responsabilité de la classe
politique dans la tragédie congolaise, quel
rôle les acteurs de la société civile ont ils
joué dans la faillite du Congo- Kinshasa et
dans la détérioration des relations avec ses
voisins ? Cette communication propose,
sans être exhaustive, quelques éléments de
réponse et formule des suggestions pour
que la société civile congolaise redevienne
une structure capable de porter les
revendications de sa base au près des
décideurs.
Entre 1965 et 1970, l’économie du pays,
dopée par les cours favorables de matières
premières, permet au gouvernement d’initier quelques projets de développement.
C’est à partir de 1973 que la RD Congo
amorce sa chute aux enfers : l’économie
se désarticule, la corruption et la prédation
des ressources nationales affectent tous les
secteurs de la vie nationale, le pouvoir
d’achat du citoyen se lamine progressivement. A cette époque, l’Eglise Catholique, choquée par la misère et la
désintégration sociale, monte au créneau
en mettant à nue les dérives du pouvoir.
L’Union Nationale des Travailleurs du Zaïre,
l’unique syndicat de travailleurs (considéré
comme une des structures du parti unique),
les Eglises Protestantes et Kimbanguiste
Mon analyse porte sur une période d’au
moins 18 ans, ce qui m’oblige à la
subdiviser en trois phases ci-après : 19901996 ; 1996-2003 et 2003-2008. Ces époques
correspondent, comme nous allons le voir,
aux événements sociopolitiques ayant
marqué l’histoire du Congo- Kinshasa
durant les deux dernières décennies.
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15.00-16.30h, 17.00-18.30h
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brillent par un mutisme et cautionnent sans
faille les projets macabres du pouvoir.
impulsion viendra d’un porte parole de la
société civile de la province du Haut Zaïre
qui, du haut de la tribune, avait lancé une
motion pour réclamer un rééquilibrage
régional au sein de l’Assemblée et menacé
de suspendre la participation des originaires de sa province. Plusieurs mutuelles à
caractère tribal ont vu le jour dans la foulée
parce que l’appartenance ethnique
devenait désormais un critère pour accéder aux fonctions politiques.
L’ethnisme a atteint aussi d’autres groupes
sociaux et leurs élites comme les citoyens à
nationalité douteuse au Nord Kivu, c'est-àdire les Congolais d’expression kinyarwanda établis par vagues successives en
RD Congo depuis 1930 et regroupés dans
un parti qui avait eu son heure de gloire en
1960. Les membres de ce parti se verront
exclure de la conférence nationale parce
qu’ils étaient recensés comme étrangers
par la commission de validation des mandats3.
Le 24 avril 1990, à travers un discours historique, le président Mobutu, à la faveur des
pressions internes et externes, proclame la
suppression du parti Etat en instaurant le
multipartisme ainsi que le pluralisme syndical.
C’est à partir de cette date que la société
civile va émerger comme force sociale aux
cotés des syndicats et partis politiques
crées dans l’effervescence.
Le nombre de syndicat de travailleurs
passe de 1 à 112 en 1990. Les organisations
non gouvernementales locales effectivement recensées sont à 450 en 1990 pour
atteindre le chiffre de 1.322 en 1996. C’est
dire que plus de 50 % des composantes de
la société civile congolaise existent depuis
19901.
Une année après cette ouverture politique,
les forces sociales et politiques obligent le
Président Mobutu, désormais affaibli et isolé,
à convoquer la Conférence Nationale dont
l’objectif est de :
- procéder à l’examen critique de l’histoire
du pays sur les plans politique, économique,
social et culturel ; dégager les responsabilités individuelles et collectives et
mettre en place un nouvel ordre politique.
La société civile a joué un rôle important
dans la phase préparatoire et dans le
déroulement des travaux de ce forum
national au regard du nombre de ses
représentants2.
Malheureusement, cette conférence se
transformera en une messe où l’intolérance
politique et tribale sera à l’ordre du jour.
L’ethnisme ou sa variante régionaliste s’est
manifesté de manière plus ouverte et
beaucoup plus offensive au moment de la
réouverture de la conférence nationale
entre décembre 1991- janvier 1992. JeanClaude Willame note que la première
Alors qu’ailleurs, des coalitions d’Eglises ont
pu se former et se situer clairement et sans
ambiguïté par rapport aux dérives politiciennes, la situation est ambivalente dans
le cas du Congo-Kinshasa. Les églises
locales étaient très divisées sur des
questions d’intérêt national. Jean-Claude
Willame, citant un auteur congolais, considère qu’au sein de l’Eglise Catholique,
massivement présente au Congo, une
division existe entre une église d’« en haut »
et une Eglise qui peut être définie comme
l’ensemble de la communauté des laïcs qui
se reconnaissent catholiques, d’« en bas ».
Celle-là est représentée principalement par
l’épiscopat et ses instances officielles ;
celle- qui agissent et se manifestent dans la
société, non seulement à l’intérieur de
l’église, mais également au sein d’autres
organisations4.
S’il est vrai que depuis le début de la
transition, la hiérarchie catholique, l’Eglise
d’« en haut », a dans son ensemble appuyé
Baudouin HAMULI KABARUZA, La Société civile
congolaise, état des lieux et perspectives, colophon
édition Essai 2003 p 27.
2 Le nombre total de participants était fixé à 2850
conformément aux propositions de la commission
préparatoire. Sur 2850, la société civile était
représentée par 1.100 délégués, rapport de la Commission préparatoire
3 Jean Claude Willame, le Zaïre: une transition sans
PILOTE; in : Cahier africain anciennement cahier du
CEDAF, Gouvernance et pouvoir, essai sur trois trajectoires africains Madagascar, Somali, Zaïre, n°7-8,
l’Harmattan, Paris, p 135.
4 Philippe B Kabongo-Mboya, les Eglises et la lutte pour
la démocratie au Zaïre, 1993 p 5, cité par J. Claude
Willame, op cit 137
1
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sans ambiguïté la réconciliation nationale, il
existe plus de nuances sur ses positions
réformistes et prudentes et l’engagement
d’une base plus militante.
Du coté protestant, l’ambiguïté a été
beaucoup plus prononcée. Traditionnellement, les chefs de file des Eglises Protestantes, minoritaires, ont tenu un discours
se situant dans la ligne pro-mobutiste ou à
tout le moins abstentionniste.
Si la société civile était favorable à l’opposition politique, elle n’avait pas une identité
claire, alors qu’une société civile forte et
autochtone par rapport au champ
politicien aurait pu atténuer, voir neutraliser
tant les dérives centrifuges de l’ethnisme
que des manipulations autour de la quête
ou de la conservation du pouvoir.
Pour certains animateurs, la société civile a
été un tremplin soit pour entrer dans la
carrière politique, soit pour accéder à
l’argent facile. A l’issue de la conférence
Nationale, le Zaïre plongera dans une
incertitude politique due au refus du
Président d’appliquer ses résolutions, pourtant opposables à tous.
II. Période de 1996-2003 : Ralliement
politique de la Société civile
La guerre de 1996 se solde par la chute de
Mobutu et la prise du pouvoir par Laurent
Désiré Kabila. La société civile est, dans sa
majorité, favorable à cette aventure militaire, mais les abus perpétrés par les
militaires rwandais sur les civiles élargissaient
le fossé entre les occupants rwandais et la
population. Un rapport du HCR du 13
decembre 1997 précise à ce sujet que la
menace réelle ou supposée d’une occupation étrangère pourrait conduire l’ensemble des consciences ethniques du Kivu
à fusionner dans une espèce de nationalisme – pluri tribal - contre les tutsi. Face à
un ennemi commun, les ethnies du Kivu et
les hutu de l’extérieur se trouvant dans
cette région pourraient former une coalition qui s’opposerait à celle des tutsi des
origines diverses. C’est ce qui fait dire à
certains experts que les tensions politicoethniques qui agitent actuellement le Kivu
opposaient les tutsi aux bantus5.
En 1993, la province du Nord Kivu connaît le
début des conflits interethniques dus d’une
part au déni de la citoyenneté à une partie
de ses fils et filles et à la mauvaise gestion
des conflits de terres d’autre part. Certains
acteurs de la société ont une responsabilité
évidente dans les conflits interethniques de
Masisi, au Nord Kivu.
En 1994, des centaines de réfugiés
rwandais déferlent à l’Est du Zaïre et s’installent dans des camps près des frontières
rwando-congolaises. La présence des militaires de l’armée rwandaise défaite,
appuyés par des miliciens Interahamwe
menaçait la sécurité du Rwanda. Ce
dernier sera, au nom du droit de poursuite,
obligé d’organiser une expédition militaire
afin de détruire les sanctuaires qui servaient
de base d’appui à des attaques contre son
territoire. C’est fut alors le déclenchement
de la guerre en novembre 1996.
Monsieur Lubala Mugisho écrit à ce sujet
que cette nouvelle forme de dualisation de
la société du Kivu est totalement différente
de celle qui a été souvent provoquée par
la question de nationalité banyarwanda, et
dont les catégories étaient fondées sur un
critère juridique. Les conflits qui pourraient
éclater dans l’avenir au Kivu, risqueraient
d’être assez durables et très meurtriers à
5 Rapport du HCR/ Uvira, situation hebdomadaire, 13
décembre 1997, p 3)
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l’image du modèle rwandais6. Suite à une
révolution de palais, une deuxième
rébellion, commanditée par le Rwanda,
éclate à l’Est du Congo, en août 1998, pour
chasser Laurent Désiré Kabila du pouvoir.
Cette insurrection est perçue par le Gouvernement comme une agression du
Rwanda, raison pour laquelle il mobilise la
population à résister contre l’agresseur.
Cela provoquera une montée de l’intolérance interethnique contre les tutsi du
Congo (les agresseurs ici sont les tutsi tant
de l’intérieur que de l’extérieur)
Des acteurs importants de la société civile
deviennent propagandistes du gouvernement et affichent une haine viscérale
contre leurs compatriotes rwandophones,
spécialement contre les tutsi. Certains
intègrent même la nébuleuse Mai Mai.
L’Eglise catholique est, à son tour, divisée
sur la question. En contradiction de leur
hiérarchie, certains prêtres des provinces
de l’Est appellent les chrétiens à la
résistance contre l’agression et fournissent
un appui à certains groupes Mai Mai.
certaines sont favorables à une restructuration profonde de cette société civile.
Je ne peux passer sous silence le rôle très
négatif qu’a joué la société civile dans les
conflits interethniques en Ituri ou certains de
ses leaders étaient impliqués dans l’épuration ethnique.
Conclusion
Dans un environnement politique, caractérisé par l’affaiblissement de l’opposition,
une société civile forte et autonome par
rapport au champ politicien, comme je l’ai
souligné, peut réduire ou neutraliser les
dérives centrifuges de l’ethnisme, la corruption, l’exclusion et l’impunité qui hypothèquent l’avenir du pays .
La société civile congolaise devra se
redéfinir par rapport à l’environnement
socio-politique post électoral, revoir ses
stratégies et créer de nouvelles alliances
avec les partis politiques pour mieux
canaliser les revendications de la base. Ses
représentants doivent s’employer résolument à promouvoir les principes démocratiques qui sont à la base de la culture de la
paix.
III. Période de 2003-2008: Société
civile affaiblie et divisée
Après cinq ans de guerre, les belligérants
acceptent un règlement politique de la
crise et s’engagent dans les négociations
politiques sous la médiation de l’Afrique du
Sud. La société civile est associée au
processus en ordre dispersé. Si les églises
n’ont pas eu des difficultés pour désigner
leurs représentants, cela n’a pas été le cas
pour la composante société civile.
Le ralliement d’une frange importante de
la société civile aux forces politiques en
présence et sa participation aux institutions
de la transition provoquent sa scission.
Jusqu’aujourd’hui, elle n’a pas su surmonter
ses divisions. Elle est représentée par
quelques organisations non gouvernementales et personnalités indépendantes.
Les organisations professionnelles se sentent
marginalisées à telle enseigne que
Joseph Chiko Sanane, né à Bukavu, Congo
- Kinshasa, est avocat,
il a exercé successivement des fonctions en
tant que magistrat puis vérificateur des
impôts à la Direction Générale des Impôts
jusqu’en 1993.
En 1994, il est admis au tableau des
Avocats près la Cour d’Appel de Goma au
Zaïre. Il est élu Bâtonnier par ses confrères
en 2006.
Il préside depuis l’année 2005 la Ligue des
Droits de la Personne dans la Région des
Grands Lacs (www.ldgl.org) un réseau constitué de 26 organisations oeuvrant pour la
défense et la promotion des droits humains
au Burundi, en RD Congo et au Rwanda,
après avoir occupé les fonctions de
Conseiller Juridique au sein du Conseil
d’Administration de la même structure.
Il est membre du Réseau de l’Afrique
Francophone de formateurs sur la justice
transitionnelle.
6 Emmanuel Lubala Mugisho, La situation politique du
Kivu : vers une dualisation de la société, in : Afrique
des Grands Lacs, annuaire 1997- 1998, p. 333.
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Rapport de séance
Rapporteure : Xavérine Niwemutoni
groupes irréguliers ont participé aux conflits.
Tous ces combattants ont violé les droits de
l’homme et le droit international humanitaire.
Plusieurs rencontres internationales ont été
organisées pour mettre fin au conflit et
finalement un Accord Global et Inclusif
pour la paix et la transition démocratique
fut signé à Pretoria entrant en vigueur le 4
avril 2003. Durant cette transition, les conflits
ont continué, plus particulièrement dans
l’Est, où des groupes radicaux tutsi avec
l’appui du Rwanda ont continué les
massacres contre la population locale.
Le président Kabila est assassiné et remplacé par son fils Kabila Joseph et celui-ci
déclare dans un discours que l’espérance
du peuple congolais est tournée vers l’avenir, sans faire référence majeure aux conflits
du passé. Il est compréhensible que ce
discours a fait de la peine aux victimes de
ce qu’il venait d’appeler le passé à oublier.
Le sujet a été traité sous trois angles:
1° L’évolution de la situation des droits de la
personne au Zaïre/RDC entre 1994 et 2001
présenté par Roberto Garretón, Avocat,
Défenseur des Droits de l’Homme au Chili et
particulièrement Rapporteur Spécial de la
Commission des Droits de l’homme de
l’ONU sur les Droits de l’Homme au Zaïre,
actuelle République Démocratique du
Congo de 1994-2001. Monsieur Garretón a
fait un parcours de la situation politique et
des droits de la personne sous la dictature
de Mobutu jusqu’à aujourd’hui, d’abord
comme Rapporteur Spécial des Nations
Unies et après son mandat, par attachement à ce pays.
Il nous a fait part spécifiquement de trois de
ses 17 rapports.
Dans le premier rapport, il a exprimé le
sentiment de haine des Congolais par
rapport au Rwandais. Dans un autre rapport en 1994, il a indiqué ceci : «l’actuel
niveau de tensions et les innombrables
rivalités tribales et régionales, ravivés par
l’arrivée massive des réfugiés rwandais, font
craindre que cela puisse provoquer une
explosion politique avec des conséquences beaucoup plus transcendantes
que celles vécues au Rwanda et au
Burundi»; mais rien n’a été fait.
Sa troisième mission s’est passée à Gisenyi
au Rwanda parce qu’il n’était pas autorisé
par Kabila à se rendre au Congo pour avoir
dénoncer les massacres commis dans les
camps des réfugiés hutu rwandais.
Finalement qu’en est-il du Congo ?
La transition s’est révélée être une transition
sans justice, de nombreux conflits persistent
parce que les causes à l’origine de ces
tensions n’ont jamais été traitées. Monsieur
Garreton considère qu’il est inacceptable
de voir qu’une dictature puisse passer à la
démocratie sans rendre compte des faits
du passé, et termine en soulignant que le
rôle du Rapporteur est très difficile car il doit
rapporter la vérité et il refuse les déclarations telles que il y aurait des améliorations.
Après la prise du pouvoir par Kabila, les
tensions politiques augmentent dans la
région du Nord et du Sud Kivu et en août
1998, le Rwanda, sous la couverture du
mouvement appelé Rassemblement Congolais pour la Démocratie (RCD) envahit et
occupe le tiers du Nord-Est du pays. Kabila
fait appelle aux pays amis ce qui donne au
conflit initial RDC/RCD un caractère
international car neuf Etats et vingt-deux
2° L’exposé qui a suivi « la Communauté
Internationale dans la région des Grands
Lacs » a été donné par Volker Weyel, qui a
été éditeur de la revue “Vereinte Nationen
- Nations Unies” en Allemagne et qui est
spécialiste pour l’Uganda.
Mr Volker a fait un large exposé sur la
présence de la communauté Internationale dans la région des Grands Lacs. Il a
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cité les conférences internationales, les
Accords comme celui de Nairobi qui ont
été organisé pour amener la paix dans la
région, la présence des organisations
onusiennes pour aider la population, la
présence de la Monuc pour aider le
gouvernement
de
Kinshasa
au
démantèlement des Interahamwe et à leur
désarmement.
Il a ensuite parlé du rôle de la Cour Pénale
Internationale qui veut rendre justice en
poursuivant les chefs des rebellions
responsables des crimes de guerre et des
crimes contre l’humanité tels que l’arrestation de Jean Pierre Bemba, ancien viceprésident de la RDC, le mandat d’arrêt
contre Joseph Kony qui sévit le Nord de
l’Uganda et il a ajouté que même les
présidents en exercice sont actuellement
poursuivis comme celui du Soudan, l’ancien président de la Sierra Léone,… Tout
ceci montre qu’il n’est plus question de
laisser les crimes de guerre impunis.
Toutefois, Mr Volker reconnaît que malgré
tout ce que font les Nations Unies pour la
paix dans la région, les attentes sont
déçues; les violences continues à l’Est de la
RDC, le brassage entre les différents miliciens n’est pas encore terminé, etc.
•
Pour finir, le constat est que le mal
de la RDC est profond, qu’il faut
creuser pour atteindre ses racines.
3° A 17h45 a suivi l’exposé de Joseph Chiko
Sanane, Avocat et Président de la Ligue
des Droits de la Personne dans la Région
des Grands Lacs sur « le Rôle de la Société
Civile au Zaïre/ en République Démocratique du Congo entre 1990-2008 ».
Maître Joseph a fait un état de la situation
de la RDC entre 1990 et 2008.
Il a subdivisé son analyse en 3 périodes :
La période entre 1990 et 1996 pendant
laquelle la société civile est engagée mais
sans identité claire. Il faut noter que la
société civileau Congo/ Zaïre existe depuis
les années 1950, et elle a milité pour conquérir l’indépendance politique. Avec le
coup d’Etat militaire de 1965, le président
Mobutu instaure un parti unique, centralise
le pouvoir, les syndicats sont fusionnés en
un seul, la justice est placée sous le joug de
l’exécutif et les espaces d’expression sont
verrouillées au profit des médias officiels.
Avec la suppression du parti Etat en 1990 et
l’instauration du multipartisme, la société
civile va émerger comme force sociale aux
cotés des syndicats et partis politiques. Le
nombre des syndicats de travailleurs passe
de 1 à 112 en 1990 et 450 ONG locales
recensées en 1990 sont 1.322 en 1996.
Une année après l’ouverture politique, les
forces sociales et politiques obligent le
Président Mobutu à convoquer la Conférence Nationale et la société civile a joué
un rôle important dans la préparation et
dans le déroulement.
Mais si la société civile était favorable à
l’opposition politique, elle n’était pas forte
et n’avait pas une identité claire. Pour
certains animateurs, la société civile était
un tremplin soit pour entrer dans la politique,
soit pour accéder à l’argent facile.
Après l’exposé de Monsieur Volker Weyel,
les participants ont pris la pause et ont
repris les débats à 17h00 par les questions,
réponses et observations sur les deux
exposés.
De toutes ces échanges, on peut retenir
ceci :
• Le désarmement au Nord Kivu ne
terminera pas le conflit ;
• Il est regrettable que les Nations
Unies ont joué la carte des élections
en supprimant le poste de Rapporteur Spécial de l’ONU ;
• Depuis les élections de 2006 en RDC,
il y a huit cent milles déplacés au
pays dont personne ne parle ;
• La peur de la population des
multinationales, acteurs invisibles
mais qui divisent ;
• La présence des Chinois et le
comportement de la Belgique vis à
vis de cette présence inquiète les
nationaux ;
La période entre 1996 et 2003, marqué par
le ralliement politique de la société civile.
La guerre de 1996 déclenchée par l’armée
rwandaise, au nom du droit de poursuite
des miliciens interahamwe et des militaires
de l’armée rwandaise défaite se solde par
la chute de Mobutu et la prise du pouvoir
par Laurent Désiré Kabila soutenu par
l’armée patriotique rwandaise. La société
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15.00-16.30h, 17.00-18.30h
Workshop- Atelier
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Le rôle des acteurs nationaux et multilatéraux dans la région
Friday – Vendredi 15.08.2008
civile dans sa majorité est favorable à cette
aventure militaire, mais les abus perpétrés
par les militaires rwandais sur les civiles
élargirent le fossé entre les occupants
rwandais et la population congolaise.
Une deuxième guerre éclate à l’Est du
Congo en août 1998, commanditée par le
Rwanda, pour chasser Laurent Désiré
Kabila du pouvoir. Celui mobilise la
population à résister contre l’agresseur et
cela
provoquera
une
montée
de
l’intolérance interethnique contre les tutsi
du Congo. Suite à cela, les acteurs importants de la société civile deviennent
propagandistes du gouvernement et
affichent une haine viscérale contre leurs
compatriotes rwandophones, spécialement les tutsis. Même l’Eglise catholique est
divisée sur la question bien que celle-ci a
joué un rôle positif par rapport à la société
civile.
Les discussions des participants qui ont suivi
cet exposé ont soulignées ce qui suit :
• que la présence de la communauté
rwandophone tutsi (mot qui était
inconnu par les Congolais avant le
conflit) sont à la base des conflits au
Congo et l’influence de l’armée
rwandaise envenime les choses ;
• le peuple congolais a le sentiment
que l’ONU est contre le Congo et
est pour le Rwanda; ce qui n’est
pas vrai car les Nations Unies sont les
Etats et que c’est finalement les
Etats qui décident donc il ne faut
pas s’en prendre aux Nations Unies
comme institution.
L’atelier a beaucoup intéressé les participants et M. Garretón a souligné que le titre
de la conférence a été bien choisi. On ne
peut pas construire l’avenir sans assainir le
passé, et il est maintenant inacceptable
qu’une dictature puisse passer à la démocratie en toute impunité.
La période de 2003-2008 s’est caractérisée
par une société civile affaiblie et divisée.
Après 5 ans de guerre, les acteurs au conflit
acceptèrent un règlement politique de la
crise et s’engagent dans les négociations
politiques sous la médiation Sud africaine.
La société civile est associée au processus
mais n’est pas unies contrairement aux
Eglises qui n’ont pas eu de difficultés à
désigner leurs représentants. La société
civile à certains moments et à certains
endroits comme en Ituri a joué un rôle très
négatif, s’impliquant dans les conflits interethniques.
Pour conclure, Maître Sanane trouve que
dans un environnement politique caractérisé par l’affaiblissement de l’opposition,
une société civile forte et autonome par
rapport au champ politicien, peut réduire
ou neutraliser les dérives centrifuges de
l’ethnisme, la corruption, l’exclusion et
l’impunité qui hypothèquent l’avenir du
pays. La société civile congolaise devra
donc se redéfinir par rapport à l’environnement socio-politique post électoral, revoir
ses stratégies et créer de nouvelles alliances avec les partis politiques pour mieux
canaliser les revendications de la base. Ses
représentants devront s’employer à promouvoir les principes démocratiques qui
sont à la base de la culture de la paix.
104
Workshop - Atelier
Struggle for economic resources: Way to stop illegal exploitation of natural resources
Le combat pour les ressources économiques : Comment réguler l’exploitation des ressources naturelles
15.00-16.30h, 17.00-18.30h
Friday – Vendredi 15.08.2008
Workshop – Atelier
Struggle for economic resources:
Ways to stop illegal exploitation of natural resources
Le combat pour les ressources économiques :
Comment réguler l’exploitation des ressources naturelles
Fatal Transactions – Natural Resources and the transformation of the
Congolese war economy
Lena Guesnet, BICC, Bonn
Certification of Coltan, Cassiterite and Gold as a means to gain control
over mineral production and trade in the Kivus, DR Congo
Nicola Martin, Bundesanstalt Geowissenschaften und Rohstoffe, Braunschweig
Le contrôle de la terre en RDCongo: un défi pour la population
congolaise?
Prosper Musafiri Nobirabo, Université de Berne
Moderation : Jean-Baptiste Sadiki, Bruxelles
Rapporteur: Simone Claar, University of Marburg
105
Workshop - Atelier
Struggle for economic resources: Way to stop illegal exploitation of natural resources
Le combat pour les ressources économiques : Comment réguler l’exploitation des ressources naturelles
15.00-16.30h, 17.00-18.30h
Friday – Vendredi 15.08.2008
Fatal Transactions – Natural Resources and the
Transformation of the Congolese War Economy
Lena Guesnet
the resource curse will be presented (the
Lutundula commission, the Kimberley Process, the Extractive Industries Transparency
Initiative, resource governance).
The natural wealth of the DRC offers a
broad range of resources such as cobalt,
copper, tantalum, petroleum, diamonds,
gold, silver, zinc, manganese, tin, uranium,
coal and timber. But instead of these
resources and the revenues generated by
them being a blessing for the population,
bringing development and a good living
standard, they have been a curse. Ever
since King Leopold of Belgium, the natural
wealth of the Congo has been used by the
country’s leaders to sustain their patronage
networks and for their private enrichment.
During the second Congolese war, also
termed the first African world war, the
exploitation of natural resources sustained
the war efforts of all parties to the conflict
(the government, the rebel groups and the
neighbouring countries). As it became
clear in the early stages of the war that
military victory would be hard to achieve,
the control of natural resources turned out
to be the predominant reason for the
actors to stay in conflict. Thereby, the DRC
became the example “par excellence” of
a conflict influenced by the richness in
natural resources. In the context of fragile
statehood, the impact of this resourcebased war economy on the dynamics of
the war has thus been pervasive.
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The presentation “Fatal Transactions –
Natural Resources and the Transformation
of the Congolese War Economy” will first
give an insight of how different actors
made a profit from the natural resources.
With the example of the tin mine in Bisie, it
will show how economic and political
structures of the war economy have stayed
intact after the end of the war and how
former war elites remained influential, trying
to defend their interests and (economic)
assets. In the last part, approaches to end
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Le combat pour les ressources économiques : Comment réguler l’exploitation des ressources naturelles
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Lena Guesnet studied Political Science, Law
and Peace and Conflict Studies at the
Philipps-University of Marburg and finished
her diploma in December 2007. The subject
of the Master Thesis was “Peace-consolidation in Rwanda after 1994”. During her
studies, she did an internship from March to
September 2006 at the GTZ in Rwanda and
worked on the subject “Supporting the
Democratisation
and
Reconciliation
Process”.
Since January 2008, she is a research assistant in the Fatal Transaction team at the
Bonn International Centre for Conversion
(BICC) - Germany. Her working subjects are
natural resources and conflicts and Côte
d’Ivoire.
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Certification of Coltan, Cassiterite and Gold as a means
to gain control over mineral production and trade in the
Kivus, DR Congo
Nicola Martin
serves to justify the rebellion of General
Laurent Nkunda and is related to recent
outbreaks of violence by Mai Mai fighters.
In the eastern provinces, an estimated
200.000 artisan miners account for the
entire Congolese production of coltan,
cassiterite and gold. The informal character
of artisanal mining promotes illegal exploittation and trade as the assessment of
produced and traded quantities is difficult
in an environment of weak governance 3 .
Official exports of these mineral resources
amounted to US$52 M. in 2007. The true
values should exceed this number by far
when considering export statistics of neighbouring countries. Artisanal miners and
porters suffer from arbitrary levies and theft
by informal power groups as well as by
corrupt state officials 4 . While unofficial
payments are levied all along the way from
production to export, legal taxes due
according to the national mining regulations are evaded. Consequently, state
revenues from the mining sector fall short of
their potential, while belligerent groups
continue to finance themselves though
mineral resources. The state is unable to
enforce legal regulations. Mining sector
institutions are present at national,
provincial and local level, but cannot fulfil
their tasks of mining oversight because they
are
understaffed,
unqualified,
under
equipped and inadequately paid.
Background
Exploitation of mineral resources in Central
Africa has been associated with violent
conflict, illegal trading and the diversion of
state funds. The role of production and
trade of mineral resources in fuelling the
Congo war became so obvious around the
turn of the millennium that the UN Security
Council mandated an expert panel to investigate the matter and elaborate
recommendations to counter this situation1.
This Panel of Experts on the Illegal
Exploitation of Natural Resources and Other
Forms of Wealth of the Democratic Republic of the Congo identified the complex
ways in which elite networks gain revenues
from the mining sector.
Today, mineral production and trade still
contribute to instability and violence in the
eastern provinces of the DR Congo. A
recent assessment of the links between
mining and conflict reveals that a multitude
of private and state security actors
compete and at the same time collaborate for economic gain in mining
localities 2 . The Congolese army (FARDC)
itself is heavily involved in the exploitation of
natural resources in particular in the Kivus.
The Rwandese rebel group FDLR still
controls mines in the Kivu provinces, which
contributes to continued conflict and instability, particularly in North Kivu, as it
1 UN Security Council (2002) Final Report of the Panel
of Experts on the Illegal Exploitation of Natural
Resources and Other Forms of Wealth of the
Democratic Republic of the Congo (S/2002/1146). UN,
New York.
2 Garret, N.; Gille, F.; Newton, D. & o’Brien, J.W. (2008)
Strategic Conflict Assessment of the Mining & Minerals
Sector in the DRC. DFID, London.
DFID (2007) Trading for Peace. Achieving security
and poverty reduction through trade in natural
resources in the Great Lakes area. Research Report.
DFID, London.
4 Berke, C., Martin, N., Pulkowski, J., Vasters, J., Wagner,
M. (2007): Rohstoffe in der DR Kongo - Potenziale für
die Entwicklung?, KfW Diskussionsbeiträge 50, April
2007.
3
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The development of a concept of
certification at BGR
The emergence of the idea of
certification
Taking up the proposal put forward by the
UN Expert Group, BGR started mineralogical
research in 2006 on the feasibility of an
analytical proof of origin of Coltan, the
trade name of tantalum bearing mineral
concentrates of the columbite-tantalite
group. First results indicated that an analytical proof is feasible but very demanding
on costs, time and the required skills of
laboratory personnel. In parallel, BGR therefore began elaborating an alternative concept based on establishing transparent and
fair trading chains. This concept of Certified
Trading Chains 8 found entry to the preparatory discussions for the G8 summit in
Heiligendamm in 2007. The summit protocol
acknowledges the potential of certification
systems to increase transparency and good
governance in the extraction and
processing of mineral raw materials, to
reduce environmental impacts, support the
compliance with minimum social standards
and counter illegal resource extraction
(article 85). It also recognizes the role of
artisanal and small-scale mining (article 86)
and decides to support a pilot study on the
feasibility of a designed certification system
for selected raw materials.
The role of illegal trade in continuing
conflict in the eastern DR Congo and the
suspected involvement of western metal
processing companies in buying raw materials from the DR Congo initiated the
discussion whether it was possible to
determine the true origin of mineral resources that are offered for sale.
In 2005 the UN Expert Group on the DRC,
mandated by the UN Security Council to
investigate violations of the arms embargo,
proposed the idea of a certification system
as an alternative to an export ban on
natural resources that would be costly and
difficult to enforce 5 . In its subsequent
report6, the Expert Group refined the concept of an advanced traceability system
for precious minerals and recommended a
pilot study approach. The concept took a
rather technical approach based on
setting up a network of laboratories that
would prove the origin of exported material
by analytical means.
The UN Expert Group cooperated with the
International Conference on the Great
Lakes Region (ICGLR). An outcome of this
cooperation was a project proposal by the
ICGLR at the end of 2005 to develop a
regional mechanism for the certification of
natural resources to combat the illegal
exploitation of natural resources within the
region. In November 2006, the eleven
member states of the International
Conference on the Great Lakes Region
signed the Protocol against the Illegal
Exploitation of Natural Resources, which
includes a mechanism for the certification
of natural resources in its Article 117.
The concept developed by BGR aims to
certify the direct mineral trading chain
between a local mineral producer in a
conflict-ridden region and a mineral processor in an industrialized country. CTC
seeks to establish responsibility and transparency on the mineral producers’ side as
well as on the side of the mineral consumers. Certification serves as an instrument
to regularize informal artisanal mining by
promoting partnerships between an Industrial consumer, an investor and the mining
community. Producer and consumer
commit themselves to comply with certain
minimum standards regarding labour
conditions, environmental protection and
transparency adapted to the local context
of artisanal and small-scale mining. All
5 UN Security Council (2005) Report of the Group of
Experts on the Democratic Republic of the Congo
(S/2005/436). UN Security Council, New York
6 UN Security Council (2006) Report of the Group of
Experts on the Democratic Republic of the Congo
(S/2006/53). UN Security Council, New York
7 International Conference of the Great Lakes Region
(2006) Protocol Against the Illegal Explotaion of Natural
Resources, 30 November 2006. ICGLR, Bujumbura
8 Wagner, M.; Franken, G.; Martin, N.; Melcher, F. and
Vasters, J. (2007) Certified Trading Chains in Mineral
Production. BGR, Hannover
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actors involved in the trading chain are
responsible for the progressive convergence towards these standards in a
phased approach of continuous improvement. The stages of certified mineral
production are audited by an independent
third-party.
visible effect, which is an important signal
to the Congolese population and international investors. Certification successively
transforms current informal mining into a
regulated one. This formalization is a
precondition to achieve transparent recording of production and trade, and to
reduce conflicts associated with the mining
sector.
For international investors, the option of
certification opens the door to produce or
buy mineral resources in/ from the DR
Congo without the risk of losing their
reputation. This increases investments
required for an efficient exploitation of
mineral resources. At the same time,
traceability of traded mineral resources
forces traders and consumers to apply due
diligence when choosing their sources of
supply. Through this mechanism, the market
for non-certified minerals shrinks while
certified products have a competitive
advantage in a global market. Over time,
certified trading chains of legal production
and transparent trade will therefore
expand. Improved control over production
and tax payments of companies belonging
to certified trading chains eliminates unofficial payments and increases the officially
exported percentage of mineral production. Consequently, state revenues from
mining increase, while illegal powers (rebel
groups) lose their access to mining
revenues in the long-term.
How can certification be
implemented in the DR Congo and
what is the expected impact?
In the institutional context of the DR Congo,
certification of mineral substances will not
only concern private companies, but also
several government authorities. These are
sector institutions under the Ministry of Mines
- particularly the national certification
authority Centre d’Expertise et d’Evaluation
(CEEC) and the Division des Mines responsible for overseeing the mining sector - as
well as financial institutions that receive and
administer tax payments from mining
revenues. The planned technical cooperation between BGR and the Congolese
Ministry of Mines will develop a certification
system for coltan, cassiterite and gold,
implement it at selected mining sites and
combine this pilot implementation with
strengthening the sector institutions so that
they can fulfil their mining oversight function.
The exemplary implementation of certification creates islands where mineral resources are legally produced and traded in
a transparent fashion. Introducing minimum
standards at the production sites creates a
Summarizing, certification of mineral
resources can contribute to
•
•
•
•
•
•
•
•
110
promoting transparency,
consolidating standards,
regulation of the informal sector,
building governance capacity,
sectoral economic growth,
additional state revenues,
sustainable use of the national
natural resources and
conflict prevention.
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Nicola Martin has worked for the German
Federal Institute of Geosciences and Natural Resources since 2000. As the country
coordinator for Central Africa she plans
and prepares technical cooperation
projects with the DR Congo, Rwanda and
Burundi and advises the German Ministries
on geoscientific issues in this region. 19881995 studies of Hydrology at the Universities
of Bayreuth and Maryland (US), 1998/99
Postgraduate Program in International
Affairs of the Robert Bosch Foundation,
2005 PhD in Applied Geology at the
University of Göttingen, 2003 – 2008,
Postgraduate studies of Natural Resources
Economics at Imperial College (London)
Bibliographie:
Berke, C., Martin, N., Pulkowski, J., Vasters, J.,
Wagner, M. (2007): „Rohstoffe in der DR
Kongo - Potenziale für die Entwicklung?“,
KfW Diskussionsbeiträge 50, April 2007.
Wagner, M.; Franken, G.; Martin, N.;
Melcher, F and Vasters, J. (2007): “Certified
Trading Chains in Mineral Production”,
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and Natural resources (BGR), Hannover.
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Le Contrôle de la terre en RD Congo : un défi pour la
population congolaise ?
Prosper Musafiri Nobirabo
femme avertie irait, en termes savants,
consulter un spécialiste en gynécologie
obstétrique, alors qu’en termes simples, il
s’agit du médecin qui s’occupe des
femmes. Mais n’allons pas par quatre
chemins. Regardez le programme prévisionnel de la conférence internationale qui
vous a été distribué. Vous pouvez y lire : «La
Région des Grands Lacs – vue d’une perspective historique : l’oubli, la mémoire et la
création des mythes» ou encore «les défis
de la reconstruction de l’État et de la
stabilisation politique». Des mots sorciers.
Vous permettez cependant que je vous
avertisse, tout en sollicitant votre indulgence, que le temps qui m’est imparti ne
me permet pas d’aborder entièrement
mon sujet. Je suis obligé de procéder par
les simplifications, or les simplifications ont
ceci d’inconvénients qu’elles conduisent,
assez souvent à simplifier ce qu’il fallait
laisser et à laisser ce qu’il fallait simplifier et
cela a pour conséquence fâcheuse de
rendre les idées tantôt obscures tantôt
contradictoires. De sorte que des contradictions ou de zones d’ombres que vous
remarquerez, éventuellement, dans mon
exposé seront essentiellement dues à ces
simplifications nécessitées par un discours
compréhensible par tous dans un temps
très limité
1. Introduction
La Bruyère écrivait que nous sommes nés
trop tard et que tout est déjà dit. Fallait-il en
conséquence, devant l’impressionnant travail déjà réalisé sur les conséquences des
conflits armés dans la région des Grands
Lacs en Afrique centrale, jeter l’éponge
sinon nous abstenir ? Pouvions-nous au
contraire, sans faire preuve d’orgueil intellectuel, se jeter dans l’eau dans une
nouvelle aventure ? Il apparaît bien, au
cours de cette conférence internationale,
que la nouvelle tentative de s’exprimer sur
le fléau qui a ravagé et continue encore à
ravager la Région des Grands Lacs est la
bonne. Aussi, voudrais-je, d’entrée de jeu,
remercier les organisateurs de la Conférence internationale sur la perspective de
démocratisation et de promotion de la paix
dans la Région des Grands Lacs de m’avoir
désigné en vue de prendre part à cette
rencontre de l’Université Philipps de
Marburg en Allemagne.
Cependant dans ce genre d’échange et
de partage, en l’occurrence celui des perspectives de démocratisation et de
promotion de la paix dans la poudrière de
l’Afrique Centrale, les scientifiques en
général et les chercheurs en particulier, se
comportent le plus souvent comme les
grands sorciers au village, usant d’un
langage occulte, proche des envoûtements et incantations du sorcier ou du
féticheur. A titre indicatif, dans un centre
hospitalier ou dans une clinique, le service
de l’oto-rhino-laryngologie n’est autre
chose que l’endroit où un médecin soigne
une douleur dans l’oreille, dans le nez ou
dans la gorge. Par ailleurs, une femme à la
recherche de la maternité ou de l’avortement, ou qu’elle soit en instance de
grossesse ou en plein accouchement, une
2. Voici notre GPS (Global position
system)
Au demeurant, un proverbe populaire dit
que «Tout chemin mène à Rome». Ce
dicton, en réalité, nie ou ignore l’existence
des impasses, c’est-à-dire, des routes et des
labyrinthes sans issue ! Autrement dit, si cet
adage était vrai, il n’y aurait pas de gens
qui se tromperaient d’adresses et dont
s’occupent les services d’information de la
gare et aéroport ou les personnes de
bonne volonté en les indiquant l’endroit
qu’ils cherchent. Aussi, pour ne pas nous
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perdre dans la recherche de la connaissance du «contrôle de la terre en RD
Congo et les défis des populations», qui
constitue le thème que les organisateurs
ont voulu me confier, je m’en vais vous
proposer une carte de repère et de la
reconnaissance de la route, autrement dit,
un Global position system (GPS) selon le
langage des automobilistes qui nous
aiderait sûrement à repérer le contrôle de
la terre en RDC et les défis des populations.
précise: Les terres occupées par les
communautés locales sont celles que ces
communauté habitent, cultivent ou exploitent d’une manière quelconque –
individuelle ou collective – conformément
aux coutumes et usages locaux. (Je précise : ici, il faut tenir compte du fait que la
loi dit : habitent, cultivent et exploitent,
c’est-à-dire si ces communautés n’habitent
pas, ne cultivent pas ni n’exploitent ces
terres reviennent à l’État. Première source
des conflits les peuples de la forêt dits
« Pygmées » sont semi-nomades, vivent de
la chasse, cueillette ramassage et sont
obligés de se déplacer à chaque fois qu’il y
a carence de nourriture). L’art. 389: les
droits de jouissance régulièrement acquis
sur ces terres seront réglés par une
ordonnance du président de la République.
(Je précise encore cette ordonnance
depuis 1973 tarde à venir).
Enfin, le code forestier en son art. 36 dit: «les
droits d’usage forestier des populations
vivant à l’intérieur ou à proximité du
domaine forestier sont ceux résultants de
coutumes et traditions locales pour autant
que ceux-ci ne soient pas contraires aux
lois et à l’ordre public ». (Je précise enfin
que cet art. 36 contient des éléments
positifs: il reconnaît implicitement l’existence des communautés qui vivent à
l’intérieur du domaine forestier et il souligne
la coutume et traditions locales comme
base des droits des communautés sur les
forêts). L’art. 1 al. 17 du code précité
reconnaît que les communautés locales
sont titulaires du droit d’usage. Par
communauté locale on entend: « une
population traditionnellement organisée sur
la base de la coutume et unie par des liens
de solidarité clanique ou parentale qui
fondent sa cohésion interne. Elle est
caractérisée, en outre, par son attachement à un terroir déterminé ». Le droit à une
forêt communautaire est prévu par l’art. 22:
« Une communauté locale peut, à sa
demande, obtenir à titre de concession
forestière une partie ou la totalité des forêts
protégées parmi les forêts régulièrement
possédées en vertu de la coutume […] ». Le
droit de possession et le droit d’usage, le
droit de participation des communautés
des forêts dans la gestion des ressources
forestières
constituent
le
troisième
constituant des prérogatives.
3. Plan de l’exposé :
C’est ainsi donc pour ne pas égarer les
esprits de ceux qui suivent cet exposé, je
m’en vais vous proposer une carte de
reconnaissance de la route, c’est-à-dire, un
plan de navigation selon le langage fluvial
qui nous aiderait sûrement à clarifier le
débat de cet après-midi. Mon propos
tourne autour de 3 points suivants : - Les lois
nationales ; les lois internationales dont la
RDC est signataire et la réalité à prendre en
compte. Afin de mieux illustrer ma pensée,
je commence par interroger :
3.1. La loi congolaise
Il y a lieu de souligner que la Constitution en
vigueur en RDC depuis le 18 novembre
2006, stipule en son article 34 que: La
propriété privée est sacrée. L’Etat garantit
le droit à la propriété individuelle ou
collective, acquis conformément à la loi
ou à la coutume […]. Nul ne peut être privé
de sa propriété que pour cause d’utilité
publique et moyennant une juste et
préalable indemnité […]. Puis la loi foncière
en vigueur en RDC depuis 1973 consacre
en son art.53 : le système régalien. C’est-àdire, le sol et les sous sols appartiennent à
l’État. Par conséquent les personnes
physique et morales ne peuvent désormais
bénéficier que des droits d’usage. Le sol se
divise en domaine public et domaine privé
(art. 54). Les terres du domaine privé de
l’État
peuvent
faire
l’objet
d’une
concession perpétuelle (art.57) ; la concession perpétuelle est le droit que l’État
reconnaît à une personne physique […] de
jouir indéfiniment de son fonds […] (art. 80).
En son article 387, la loi foncière congolaise
affirme que les terres occupées par les
communautés locales deviennent à partir
de l’entrée en vigueur de la présente loi,
des terres domaniales (État) et l’art. 388
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rarement le titre de propriété de leurs terres
du fait que leur droit coutumier n’est pas
reconnu ou respecté et que, dans
beaucoup de cas, la législation ne prévoit
pas l’acquisition de titres de propriété
collectifs». Le Rapport périodique présenté
par la RDC indique que l’État a pris
quelques mesures pour protéger les
peuples « Pygmées » dans le district de l’Ituri
à l’est de la RDC. Cependant, la réalité sur
le terrain prouve l’exclusion flagrante des
peuples susmentionnés des décisions qui les
concernent au sein du processus de
conversion de titres des concessions forestières. La loi régissant ce processus
stipule que tous les titres existant à la date
d'entrée en vigueur du Code forestier
doivent être réenregistrés et faire l'objet de
nouveaux contrats pour être considérés
comme étant juridiquement valides. Bien
que le processus de conversion soit en
cours, l’État congolais n’a toujours pas
organisé les consultations larges et
approfondies avec les communautés
autochtones pour assurer la garantie de
leurs droits, bien que le processus ait révélé
que beaucoup des concessions existent sur
les terres des peuples « Pygmées » et
qu’aucune mesure n’a été prise pour aider
ces peuples autochtones de trouver des
terres alternatives après que leurs terres
soient octroyées aux concessionnaires
forestiers.
3.2. Le droit international
L’art. 215 de la constitution congolaise dit:
« les traités et accords internationaux
régulièrement conclus ont dès leur publication, une autorité supérieure à celle des
lois, sous réserve pour chaque traité ou
accord, de son application par l’autre
partie ». La RDC est partie aux deux pactes
des Nations notamment le Pacte international relatif aux droits civils et politiques
dont l’art. 2 al.1 demande aux lois
nationales de donner effet aux droits
reconnus dans le Pacte précité et les
individus doivent pouvoir disposer d'un
recours auprès des cours de justice et des
autorités administratives afin de faire
respecter ces droits. A cela il faut ajouter
que la RDC est signataire de la Convention
internationale sur l’élimination de toutes les
formes de discrimination raciale (« CEDR »),
qui garantit le droit de «toute personne,
aussi bien seule qu’en association, à la
propriété». Dans sa Recommandation
générale XXIII, le CERD a fait remarquer
avec
pertinence
que
les
peuples
autochtones ont le droit « de posséder, de
mettre en valeur, de contrôler et d’utiliser
leurs terres, leurs ressources et leurs
territoires communaux ». C’est ainsi par
exemple, le CERD a largement affirmé les
droits fonciers des peuples autochtones
dans sa jurisprudence. En outre, il a établi
les liens directs qui existent pour les peuples
autochtones entre leurs terres, leur culture,
et leurs pratiques économiques.
3.3. Réalité à prendre en compte :
Aujourd’hui les ONG en Afrique et particulièrement en RDC fonctionnent comme
la propriété privée de leur fondateur. Ce
dernier impose ‘sa discipline’ et ne donne
pas l’occasion aux autres membres de
s’exprimer librement par rapport à la
marche de l’ONG. Il ne faut pas oublier: on
retrouvera dans certaines ONG un nombre
élevé d’une même famille, d’une même
tribu ou d’une même province : le choix de
représentants dans les rencontres onusiennes ne repose pas toujours sur des
critères objectifs, des réseaux des ONG en
Afrique font l’objet de la manipulation et
d’imposition de choix des représentants
africains par le bureau des Nations Unies ;
du point de vue financement, il faut
déplorer
la
forte
dépendance
de
beaucoup d’ONG vis-à-vis de leurs
partenaires au point que ces derniers
C’est ainsi donc dans ses Observations
finales du 17 août 2007 sur la RDC, le CERD
a noté «Avec préoccupation que les droits
des Pygmées (les Bambuti, les Batwa et les
Bacwa) de posséder, de mettre en valeur,
de contrôler et d’utiliser leurs terres, leurs
ressources et leurs territoires collectifs ne
sont pas garantis ». La Déclaration des
Nations Unies sur les droits des peuples
autochtones, dont la RD Congo a voté
pour – lors de son adoption en date du 2
octobre 2007 par l’Assemblée générale des
Nations Unies – reprend à son article 26 les
normes internationales qui garantissent les
droits fonciers des peuples autochtones. La
commission africaine des droits de l’homme
et des peuples a fait remarquer que les
peuples autochtones en Afrique : «Ont très
114
Workshop - Atelier
Struggle for economic resources: Way to stop illegal exploitation of natural resources
Le combat pour les ressources économiques : Comment réguler l’exploitation des ressources naturelles
15.00-16.30h, 17.00-18.30h
Friday – Vendredi 15.08.2008
affichent parfois des attitudes paternalistes
à l’égard des organisations assistées ; le
dualisme juridique: la RDC connaît la
coexistence du droit moderne dans les
centres urbains et du droit traditionnel,
encore vivace dans les milieux ruraux. Il se
pose donc le problème de la vulgarisation
du droit moderne de manière à le
rapprocher de toutes les couches sociales ;
le faible niveau d’instruction qui explique
les difficultés de réceptivité du droit
moderne par les communautés qui ne
savent ni lire ni écrire. La diffusion limitée de
l’information juridique ce qui a comme
conséquence la difficulté de s’en procurer
facilement, car si déjà à Kinshasa la
capitale congolaise, le journal officiel est
difficile à obtenir, que dire des milieux
ruraux ; l’handicap de la langue: bien que
la RDC compte 4 langues nationales,
aucune d’elles n’est utilisée comme langue
de travail dans l’administration. Ainsi le
français est la langue officielle et tous les
textes légaux, les documents officiels et les
décisions des cours et tribunaux sont
rédigées en cette langue que ne maîtrise
pas les communautés de la forêt. Ce qui
soulève la question de savoir comment
faire descendre le droit au niveau des
masses populaires ; - l’inexistence des cours
et tribunaux dans les milieux ruraux et la
difficulté de la saisine de ces derniers sont
autant d’obstacles majeurs à relever.
Lacs en Afrique centrale, C’est-à-dire
d’aller voir comment le contrôle de la terre
en RDC peut constituer le casse tête
chinois aux populations et, au demeurant,
vous remercier vous tous ici présents d’avoir
écouté mon rapport de mission. Sur ces
entrefaites, je suis disposé à répondre à
toutes vos questions et si le temps ne nous
permet pas de ramasser toutes vos
préoccupations, qui du reste sont légitimes,
je suis disposé à continuer les débats soit
pendant la pause, soit au cours du repas,
soit enfin, le soir à la fin de nos travaux
Prosper Musafiri Nobirabo, Dr et Habil.
Etudes de droit à l’Université de Kinshasa/
RD Congo et à la faculté de droit de l’Université de Berne/Suisse (doctorat en droit
2007 avec mention Summa Cum Laude) ;
Master en fédéralisme et décentralisation à
l’Université de Fribourg/Suisse (2004) ;
Fellows at Central Connecticut State University (Etats-Unis 2008) et Habilitation à
diriger les recherches universitaires (l’Université de Berne 2008).
Principaux Domaines de recherche : Droit
international (droits des minorités et des
autochtones, Droits humains) et aspects
juridiques et financiers de la décentralisation.
Bibliographie
De l’application de l’Argument A Rubrica
dans la jurisprudence congolaise, Université
de Kinshasa, RDC, 1996 ;
De la répression du trafic illicite des drogues
en droit congolais : Cas de cannabis et de
la cocaïne, Université de Kinshasa, RDC,
1998 ;
Droit foncier des peuples autochtones et le
droit international : cas des peuples de la
forêt « Pygmées » de la RD Congo (Thèse
de doctorat décembre 2006)
Difficile gestation de la démocratie en RDC,
le Monde Diplomatique, juin 2007
Publications d’une série d’articles sur les
questions autochtones en Afrique dans le
journal d’anthropologie sociale de l’Université de Florida aux Etats-Unis.
4. Conclusion
Mesdames et Messieurs, nous sommes ainsi
arrivés au terme de notre contribution de
15 minutes. L’exposé aurait eu plus de
mérite, s’il nous avait été permis de parler
plus que le temps prévu. Mais cela c’est, en
quelque sorte, la faute à personne. Car, les
thèmes à traiter sont très nombreux et
l’agenda très serré. Quoiqu’il en soit, il
paraît que lorsque le saint père des
catholiques, c’est-à-dire le pape constate
que quelque part dans un pays, l’église
catholique locale est en difficulté, il envoie
son émissaire à qui il remet un ordre de
mission qui contient quatre mots à savoir :
«IRE, Vidère et Reffere », ce qui veut dire :
« Vas, vois et fais rapport ».
Je voudrais en dernier ressort remercier les
organisateurs de cette conférence internationale de l’ordre de mission qu’ils m’ont
remis afin d’aller visiter la région des Grands
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Workshop - Atelier
Struggle for economic resources: Way to stop illegal exploitation of natural resources
Le combat pour les ressources économiques : Comment réguler l’exploitation des ressources naturelles
15.00-16.30h, 17.00-18.30h
Friday – Vendredi 15.08.2008
Minutes of the Workshop
Simone Claar
of the renegade 85th brigade of the
government army, led by Colonel Samy
Matumo who controls, monitors and taxes
the miners. Control of the tin business
means control of the whole area. Therefore,
stakes are high, and State interference is
not wanted, as an incident shows in which
state officials where chased away and
even shot at.
As the war economy is still in place,
Guesnet asked the question of a way out.
So far there have been different ideas of
regulation, sanctions etc. in theory and
praxis.
For example: Resource governance:
Government should regulate and manage
the use of natural resources in a transparent
way and to the profit of the country and its
people.
A start for better resource governance was
made with the Lutundula Commission,
which investigated the administration of
rights to extract natural resources. Of the 61
mining contracts, 39 contracts have to be
reviewed and 22 have to be nullified. The
commission reported in 2004/2005 but
results were only made public in January
2006, and not much has happened since
then.
First Presentation: Lena Guesnet: “Fatal
Transactions: Natural Resources and the
Transformation of the Congolese War
Economy”, presentation based on a PPT.
Along a map, Lena Guesnet showed the
distribution of the natural resources of the
DRC. It is a rich country in natural resources.
Cooper belt is mainly concentrated in the
Katanga region. Already before the
conflict started, natural resources were
exploited and the country has been
characterised by rent seeking behaviour.
All parties of the conflict were able to
secure huge spoils by exploiting the natural
wealth of the DRC. The revenue generated
was used for their war effort, thereby
influencing the political and military power
balance. The war was financed by profits
made from the exploitation of natural
resources. Additionally, the mining contracts were sold out for low prices and the
big companies made big profits out of it
and Kabila could sustain his networks. Also,
the rebel groups control mining areas and
sell mining licences. Further they collect
fees for protection. The huge amount of
money generated out of the mines was not
used for the improvement of the development of the country.
UN arms embargo: There is a UN arms
embargo in place, but it has proven insufficient and would need strengthening. At
the time of the presentation, rebel groups in
the Kivus were re-arming.
Kimberly Process: Certification Scheme to
prevent conflict diamonds from entering
the legal trade chain, by certifying the
origin as conflict free and monitoring
production, licenses and import/export. It is
a voluntary scheme, but all major
producers and traders of rough diamonds
participate in it.
Extractive Industries Transparency Initiative:
The aim is to strengthen (resource)
governance by improving transparency
and accountability in the sector of
extractive resources. The idea is to intro-
War economy: “The war economy created
a context in which it was economically
lucrative and politically rational for the
parties to continue the war despite the fact
that a military solution was unlikely from an
early stage of conflict”. This kind of war
economy has been transferred/ taken over
into the post-war DRC. The former political
economic structures remain influential and
former war elites could make their illegal
business legal.
After the general explanation, Lena
Guesnet tried to explain the problem using
the example of the city Bisie (District,
Walikale, North Kivu). It is the biggest tin
mine on earth and around 2000 miners are
working there. The mining is under control
116
Workshop - Atelier
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Le combat pour les ressources économiques : Comment réguler l’exploitation des ressources naturelles
15.00-16.30h, 17.00-18.30h
Friday – Vendredi 15.08.2008
duce a global standard for companies to
publish what they pay and for governments
to disclose what they receive.
everyone has equal access and
informal mining can get regulated.
the
Discussions/ questions about the first and
second presentation
Question: If the military combatant is part of
official forces it is difficult to implement and
enforce regulation legal tax in a place
which is difficult (infrastructure). Why took it
so long?
Answer: Nicola Martin: it is possible to have
an analytical technique. We had a lot of
political lobbying to put this idea forward.
Belgium opposed the idea, because it
could be against the mining industry and
this was not the idea.
Comment: Both presentations have been
very technical and ignored the complex of
political economy of the global market. We
have to look at the country leader and
decision makers. The elite are weak and
need international support. Action without
international constraints is not possible. It is
important who the owners of the mines are.
And it is very important WHO makes the
regulations e.g. UN embargo, Kimberly
Process not effective.
Answer: Lena Guesnet: Arms traders come
from western countries and use all the laws
and given weapons.
Nicola Martin: There are a lot of people
who are doing legal business. We tried to
promote the good players in the world
economy.
Question: Question of certification?
Nicola Martin: Technical certification, artisanal miners cannot sell on the market;
transparency is not there without naming
the agencies and companies. G8 gives not
an international ok for exploiting.
Question to Lena Guesnet: Can you give
names of German companies? Why do you
not mention the World Bank? All those firms
are financed by World Bank.
Answer: Lena Guesnet: Contracts are
incredible: sell out. The role of the World
Bank is very controversial. An example for
German companies is Bayer (H.C. Starck).
Question: How it (DRC) can control? We do
not have a state, legitimate government?
How UN should work?
Answer: Nicola Martin: In some parts of the
DRC, the state has no control but in others it
has control. You have to start in those parts
where the situation is acceptable. Improve-
Second
Presentation:
Nicola
Martin:
Certification of coltan, cassiterite and gold
as a mean to gain control over mineral
production and trade in the Kivus, DR
Congo
Nicola Martin presented a concrete idea to
get control of the trade with natural
resources. The customers (private and
business) should have the possibility to
prove from which country their resources
come from. There have been indications
that
countries
like
Rwanda
and
Mozambique are selling the resources of
the Congo because their export volumes
are much higher than their respective
capacities. The legal trade of resources is a
source of financing the war, although the
mineral resources are not the only reason
for the conflict. It is not easy to control the
production and trade of mineral resources
because of a weak state, corruption and
also a weak legal system. Another problem
that Nicola Martin stated is the informal
nature of mining although international
companies operate in the country. Further,
the people who produce have no direct
access to the market and they are
dependent on the traders.
The UN Expert Group came up with an idea:
A certification of origin. Congo-based
resources should be separated by a
technical specification. It is a kind of
fingerprint
e.g.
of
coltan:
Age,
mineralogical composition and chemical
composition. Parallel to the fingerprint, a
concept of certified trading chains. This
means that the mineral resources have to
come from legal production associated
with minimum standards, transparent
production, certain working conditions etc.
She explained different benefits of this
chain on the example of the DRC: The
producer can improve the market access
and working conditions. Through this, the
producer can increase the capital for
investment. The mineral consumer can
order mineral resources without reputation
loss and can guarantee supply security.
And also, the government can profit from
this chain. Conflicts are prevented because
117
Workshop - Atelier
Struggle for economic resources: Way to stop illegal exploitation of natural resources
Le combat pour les ressources économiques : Comment réguler l’exploitation des ressources naturelles
15.00-16.30h, 17.00-18.30h
Friday – Vendredi 15.08.2008
ment in these areas is necessary to spread
over to other places. Not that this
approach can solve the problems. There
are different programmes: UN; World Bank
governance, EU improving governance etc.
It is only one element.
argument has been the problem of owning
land. New types of entitlement were
introduced by the colonial system. There is
a friction between two legal systems
(Roman/Latin law and collective law).
Colonialism brought private property which
did not exist before. Another important
question by a participant has been: If
Prosper would change the Congolese law,
what would he change? Prosper M.
Nobirabo answered that he has not
reflected on this and he thinks that it is also
a problem of bad implementation of law
and what should be done to achieve
proper implementation? Why is the system
not working?
Nicola Martin tried to bring the issue of land
and mining together. The DRC is ruled by
customary law rather than the formal law.
In several African countries the population
have the right to claim user rights up to 5
hectares. The mining code of the DRC does
not have this provision. Does DRC have
some law to claim user rights for small areas?
Most of the people who mine by hand will
not find a job in industrial companies, or?
Why can this land issue not be handled in
the law? Prosper M. Nobirabo said it is
difficult to find a solution for the mines and
all documents are behind closed doors. All
going to work in the mines: whole society
which have to be changed? It is also a
question of finances. The land belongs to
everyone expect the locals.
The whole discussion has been not very
optimistic. In the end the moderator tried to
get a more positive perspective and asked:
Nothing we can do? Prosper M. Nobirabo
focused in his answer on the civil society
which should do something for the
improvement of social and economic rights.
The problem is that there is not enough
finance and “we cannot deal with it".
Third Presentation:
Prosper Musafiri Nobirabo: Le contrôle de la
terre en RDCongo et les défis des
populations (Land control in the DRC and
the challenges of the population)
In his presentation Prosper M. Nobirabo
explained different kinds of law. On the
national level, one can find the constitution
and he described different articles which
are related to the land issue (inter alia
article 34, 387, 288, 389). The problem is that
if you need some land you only can go to
the state institution because the state owns
the land in the moment. In practice, if you
want to buy land, you have to pay the
municipality, the state and taxes. But you
have to leave if the state wants to have the
piece of land. Communities can have land
if they do not use it against law and public
order.
Another field is the international law with
different agreements and ratifications
which also defines ownership. In reality, the
local community cannot read the
documents, because these are written in
the international languages (French) and
not in local ones. Some have never been at
school and never learned French and they
cannot understand the text and it is more
difficult to understand the law. Another
problem is that they are not involved. In the
big cities, the people can get support by
the international NGOs. Additionally, it is
difficult to get a solution over land conflict,
because the courts are mainly in the big
cities not in the rural areas.
Discussion / questions about the third
presentation:
During the question and discussion round,
several points were brought up. One participant questioned the link between NGO
and the title of the workshop. The referee
explained that he sees a link because
NGOs are in favour of the population and
they should support them, because the
population does not know the national and
international law. Another main discussion
118
Plenary Session – Séance plénière
Saturday – Samedi 16.08.2008
9.15-11.00h
Plenary Session – Séance plénière
Modération : Luise Lehmann
Rapport: Prosper Musafiri Nobirabo, Université de Berne
Hildegard Schürings, Imbuto
119
Plenary Session – Séance plénière
Saturday – Samedi 16.08.2008
9.15-11.00h
Rapport de séance
Prosper Musafiri Nobirabo, Hildegard Schürings
La séance plénière a été consacrée à la
restitution de trois ateliers du vendredi
15.08.2008 par trois rapporteurs.
Chacun de ces ateliers a reçu pour tâche
d’examiner les différents points ainsi qu’il
suit :
Les Batwa sont une population marginalisée par rapport à la politique, par
rapport aux acteurs des conflits. Mme
Libérate Nicayenzi a expliqué davantage
la situation socio-culturelle des Batwa dans
la société du Burundi, les défis de la
propriété foncière et de la scolarisation et
les domaines à améliorer.
Concernant la question de l’ethnicité on
devrait accepter la différence mais
valoriser plutôt la diversité, reconnaître la
pluralité des sociétés comme un potentiel
et une richesse.
En réponse à des questions, M. Ndaywel è
Nziem a souligné l’importance de la réconciliation qui doit être reconnue comme un
processus et ne pas comme une fin en soi.
Parlant de la situation des droits de la
personne dans la région, Joseph Chiko
Sanane souligne pour la RDC la corruption
qui y règne et une des violations des plus
graves la violence sexuelle envers les filles
et femmes qui se fait en toute impunité.
Pour le Rwanda le grand défi est les
juridictions gacaca, la justice et un développement plus équitable.
Atelier : Evolutions politiques et sociétales
1990-2008 au Burundi
• Les défis de la reconstruction de
l’État et de la stabilisation politique;
• Comment la communauté des Batwa a vécu les conflits et les changements – quels sont les défis ;
par Carla Schraml
Atelier : Evolutions politiques et sociétales
1990-2008 au Zaïre/ en République Démocratique du Congo
• Congo/Kinshasa : de la démocratisation à l’épreuve des armes au
défi de la (ré) construction ;
• La situation des droits de la personne dans la Région des Grands
Lacs -Perspectives ;
par Bernard Niyomugabo
Atelier : Evolutions politiques et sociétales
1990-2008 au Rwanda
• De l’invention de l’histoire au présent : mythes, piège identitaire,
pluralité et ?
• Un Rwandais de la Diaspora témoigne ;
par Denyse Amahirwe (en français)
et Johannes Melzer (en anglais)
Répondant à des questions, Mme Hildegard Schürings a mise en exergue le défi de
la reconnaissance de la pluralité de la
société au Rwanda, la reconnaissance des
histoires et vécus individuels qui influencent
sur la perception de l’identité, la pluralité
de la composition des familles rwandaises
et la complexité des rapports entre les
membres d’une famille, les relations avec
les voisins etc. Elle a mentionnée que les
groupes sociaux vivant au Rwanda
appartiennent à la même race, qu’il n’y a
qu’une seule race dans le monde, la race
humaine. Mais il y a une multiplicité
d’identités.
Et
durant
l’histoire
des
stigmatisations ont été collées sur les uns et
les autres. L’auto-perception peut être très
différente de la perception de l’autre, de
nouvelles identités se construisent à partir
du vécu (voir aussi la contribution de René
Sibomana). La colonisation a contribué au
développement
d’un
complexe
de
supériorité parmi de nombreuses popula-
Pour tous les trois ateliers et les
présentations des questions et débats ont
été menés par une audience très
intéressée. Voici quelques éléments des
débats : On a souligné la complexité des
causes des conflits et proposé qu’il faudrait
un changement de perspectives, un
nouveau regard par la perception de
l’autre. La criminalisation de l’Etat est un
facteur gênant pour l’avenir. M. Julien
Nimubona a fait de nombreuses recommandations pour des options politiques
(voir sa contribution).
120
Plenary Session – Séance plénière
Saturday – Samedi 16.08.2008
9.15-11.00h
tions tutsi et un complexe d’infériorité parmi
des populations hutu, ce qui a eu des effets
néfastes sur les conflits. Laurien Ntezimana
rappelle qu’il y a une population importante « Hutsi » et demande quel est leur rôle?
Les histoires des sociétés comme les
identités ne sont alors pas figées mais dynamiques. Dans les années 1980 au Rwanda,
la question des régions et des intérêts
régionaux (Nord versus Centre/Sud) étaient
beaucoup plus importants que la question
« ethnique ».
On peut constater un clientélisme fort prononcé qui n’est pas (plus) lié aux identités
ethniques (voir par exemple la situation au
Burundi), mais plutôt lié au pouvoir, au
contrôle des richesses.
L’orateur Isidore Ndaywel è Nziem a tenu à
situer l’évolution politique et sociétale en
RD Congo dans un contexte historique. En
effet, quatre événements symbolisent la
grande aventure de la démocratisation en
RD Congo ex Zaïre. Il s’agit de l’avènement
d’une opposition hors-la-loi au cœur de la
dictature mobutienne avec l’opposant
politique Etienne Tshisekedi comme figure
emblématique ; ensuite celui de la Conférence nationale souveraine qui arriva à
produire tous les ingrédients juridiques
indispensables, sans parvenir à y faire
soumettre au dictateur Mobutu dopé d’un
entourage peu scrupuleux et davantage
préoccupé de sa propre survie que de
l’intérêt général de la population congolaise ; puis, celui de la « guerre» dite de la
libération de Laurent-Désiré Kabila alias
M’zee qui permit au Congo dit démocratique à se défaire de Mobutu, mais qui
fut aussitôt anéanti et paralysé du fait du
déclenchement de la «première guerre
mondiale africaine» qui permit aux armées
étrangères (Rwanda, Uganda, Burundi,
Angola, Zimbabwe et Namibie) à s’affronter sur le territoire de la RD Congo, pays
souverain et membre de l’ONU et enfin,
l’orateur a tenté de situer le début de la
démocratisation que le Congo démocratique se trouve engagé, aujourd’hui,
dans le cycle de transition qui a débuté
avec les Accords de Pretoria ayant pour
but de conduire vers les élections générales
dites «libres, démocratiques et transparentes» avec la rétention de rétablissement
de la paix en RD Congo et dans la Région
des Grands Lacs.
L’historien congolais Isidore Ndaywel è
Nziem a eu le mérite d’examiner une par
une, ces quatre crises de démocratisation
déjà citées qui occupent, dans l’histoire du
Congo dite démocratique, une place de
choix dans l’anomie, le remue-ménage
politique, économique et sociale, sans
oublier les violences en crescendo, qui ont
fait des milliers de victimes et la profanation
à grande échelle, en RD Congo, des vagins
des femmes congolaises victimes des viols
des bandes armées qui s’affrontent dans la
Région des Grands Lacs.
Ci-joint, le rapporteur Prosper Nobirabo
propose un résumé des interventions des
conférenciers J. Nimubona (atelier : Burundi)
et de Isidore Ndaywel è Nziem (atelier : RD
Congo). Les résumés faits par les rapporteurs des séances suivent les exposés des
conférenciers.
Dans son exposé, Julien Nimubona a planché sur la problématique de la résolution
du conflit à multiples dimensions (économiques, sociales, culturelles, politiques,
ethno-politiques et régionales) qui a
secoué le Burundi depuis 1990-2008. Pour
l’auteur, aux fins de reconstruire l’État de
droit au Burundi et d’atteindre une stabilité
politique dans ce pays, les parties en
négociations à Arusha en 1993 ont convenu de mettre en place un ensemble de
mécanismes institutionnels favorisant un
ensemble de réformes de structures et de
cadres légaux – à savoir la Constitution, la
loi électorale, les réformes de corps de
défense et de sécurité, les réformes de la
magistrature, les nouvelles lois régissant
certains appareils de l’administration
publique burundaise – en vue d’aboutir à
un processus de démocratisation avec clef
de voûte l’organisation des élections dites
libres et démocratiques.
Après avoir analysé l’évolution politique et
sociétale au Burundi depuis 1990 jusqu’à ce
jour (2008), Julien Nimubona a tenté de
proposer des solutions susceptibles de privilégier les logiques institutionnelles et matérielles au Burundi, tout en évacuant de
simple revers de la main les pesanteurs
idéologiques et normatives ou éthiques, qui,
selon l’orateur, accusent des limites.
121
11.30-13.00h, 15.00-16.30h
Workshop – Atelier
Dealing with the past: history, memory, commemoration
Comment gérer le passé : histoire, mémoire, commémoration
Saturday – Samedi, 16.08.2008
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11.30-13.00h, 15.00-16.30h
Workshop – Atelier
Dealing with the past: history, memory, commemoration
Comment gérer le passé : histoire, mémoire, commémoration
Saturday – Samedi, 16.08.2008
Workshop – Atelier
Dealing with the past: history, memory, commemoration
Comment gérer le passé:
histoire, mémoire, commémoration
The interlinkage of ethnicity and political power
in the perception of Rwandans and Burundians
Carla Schraml, Université de Marburg
Comment les femmes et les filles gèrent la violence – les faits et les effets
Ignatiana Mukarusanga, Université Nationale du Rwanda
L’approche Ubuntu – de la réconciliation au Rwanda
Laurien Ntezimana, Association Modeste et Innocent AMI, Rwanda
Moderation: Anna-Maria Brandstetter, Université de Mainz
Rapporteure : Lena Guesnet, BICC, Bonn
123
11.30-13.00h, 15.00-16.30h
Workshop – Atelier
Dealing with the past: history, memory, commemoration
Comment gérer le passé : histoire, mémoire, commémoration
Saturday – Samedi, 16.08.2008
The interlinkage of ethnicity and political power in the
perception of Rwandans and Burundians
Carla Schraml
The first category deals with ethnic
interpretation of formal power. The second
category deals with ethnic interpretation of
informal power. In both categories, the
formal or informal political power exercised
is interpreted depending on the ethnic
affiliation of the respective person.
However, the third category deals with the
(re)interpretation of ethnic affiliation depending on political power:
First, the analytical categorisation is meant
to reveal the interlinkage of ethnicity and
politics in the perception of Rwandans and
Burundians. Second, regarding the discussion about the political-institutional systems
in ethnical divided societies, the following
statements are meant to highlight the
difficulty of both political-institutional models to overcome an ethnic interpretation
of political power.
1. Introduction
In the history of Rwanda and Burundi violent
conflict erupted several times along ethnic
cleavages. Therefore, to the regimes in
power today, the ethnic cleavages are still
a major and crucial problem to overcome.
Their decreasing and increasing salience is
considered to be strongly influenced by the
interaction between the political-institutional system and the society (q. a. Brubaker 1994, Mozaffar 1995). Consequently
the focus of the present paper is on the
ethnic interpretation of politics and political
power by social actors. In other words, the
focus is on how Rwandan and Burundian
citizens perceive their regimes in power.
Although the two institutional-political
systems in Rwanda and Burundi are
officially aimed at avoiding an ethnic
interpretation of political power – the first
one by political denial and the second one
by political recognition of ethnic cleavages
– both systems and the allocation of power
within them are interpreted in ethnic terms.
This paper wants to present three different
categories of ethnic interpretation of
politics and political power which were
found in qualitative interviews with
Rwandan and Burundian citizens conducted by the author from September 2007
until May 2008 in Rwanda and Burundi. The
categories are analytical distinctions that
are meant to reveal the interlinkage of
ethnicity and politics in the perception of
Rwandans and Burundians and the
consequent problems for both models of
majoriatarian and consociational democracy.
2. The political-institutional systems in
Rwanda and Burundi
Burundi introduced ethnic quotas in 2005,
whereas Rwanda prevents – at least
officially – the political representation of
ethnic cleavages. In Burundi, subsequently
to the Arusha agreement of 2000, the
constitution takes into account the ethnic
affiliation of the members of government,
parliament, senate, military and the police.
The distribution of the ministerial portfolios
and the places in the national assembly
considers a percentage of 60% Hutu and
40% Tutsi whereas in the Senate Hutu and
Tutsi hold a parity of seats (Reyntjens 2006,
Lemarchand 2006). One of the purposes of
this political-institutional model that is as
well articulated in the Burundian con-
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stitution1 is to avoid an ethnic perception of
political power and to promote the feeling
of political representation of all (ethnic)
“segments”. The Rwandan constitution
pursues a similar objective: By avoiding the
reference to ethnicity in the political
discourse and the political-institutional model a non-ethnic interpretation of the
present regime is aimed2. The reference to
ethnic affiliation in political but also social
context can have juridical consequences
related to the accusation of “divisionisme”.
sente l’ancien régime, l’ancien pouvoir,
alors il faut faire attention (Rwandan).
The interviewee equates ethnic affiliation
with regimes that were in power in different
times. According to his statement ethnicity
is represented by the regime and people
that have a certain ethnic affiliation represent the political regime and political
power. He establishes a quite explicit
relationship between ethnicity and political
power. In the next two quoted statements
the established relationship between
ethnicity and the political power is even
more explicit: in both of the two statements
the interviewees speak about Tutsi in
Burundi that ruled for long time. The
statements reveal the idea that equates
the people in power with Tutsi.
Et les Tutsi c’étaient eux qui étaient
habitués à gouverner c’est pour ça ils n’ont
pas accepté qu’un président Hutu gouverne (Burundian).
Another interviewee stated:
Je sais, en 1993 j’étais enseignante … au
niveau des propagandes même si on ne le
réclamait pas en haute voix, on disait il faut
voter pour les Hutu, les Tutsi ont gouverné
depuis long temps (Burundian).
3. The first category: Ethnic
interpretation of formal power
An ethnic description and interpretation of
the regime in power could be found in
interviews with citizens from both countries,
even though both systems attempt to
break with this ethnic perception: In the
Burundian case, the regime in power has
been described as a Hutu regime despite
the ethnic quotas. In a similar way in the
Rwandan case the regime in power is often
referred to as Tutsi regime.
One Rwandan describes the problem as
follows:
On confond toujours les ethnies encore à
un régime. Quand on parle de régime de
Habyarimana ce sont souvent les Hutu de
qui on parle et quand on parle du régime
actuel on se réfère à l’ethnie Tutsi. Alors,
quand je suis devant une ethnie Tutsi je me
sens insécurisé. Pourquoi? De tout ce que je
vais parler je peux savoir d’être rapporté la
et ça peux avoir des répercussions sur moi.
Quand je suis devant quelqu’un de l’ethnie
Hutu, c’est comme quelqu’un qui repré-
Those statements were meant to show an
interlinkage of ethnicity and political power
in the narration and perception of Rwandans and Burundians although the politicalinstitutional systems in both countries are
aimed at overcoming this description and
perception. In the following category,
statements and narrations are included
that refer to informal political power. Due to
this reference, the respective political
institutional system seems to be even more
insufficient to cope with this form of perception and description.
1 See e.g. Article 13 that says that nobody should be
excluded due to his ethnic origin and Article 16 that
says that the composition of the government should
assure the feeling of political represented of any
Burundian.
2 Therefore, the Rwandan Constitution declares as
fundamental principles (Article 9) the eradication of
ethnic, regional and other divisions and promotes
national unity as well as the equitable sharing of
power. Furthermore it prohibits the discrimination
based on ethnic origin (Article 11 and 33). Political
organisations are not allowed to be based on race,
ethnic origin, clan, region (Article 54) and they have to
reflect the unity of people (concerning their members,
e. g.).
4. The second category: Ethnic
interpretation of informal power
Unlike the previous statements that
established a relation between formal
political power and ethnicity, those that
follow refer to informal power: The Burundian as well as the Rwandan system is
described in a manner that stresses an
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ethnic interpretation of informal political
power.
Je reconnais, que dans le système politique,
administratif au Rwanda, les Hutu occupent
des postes comme tant d’autres. Mais estce que ça permet aux gens qui sont classés
dans cette catégorie, Hutu je veux dire,
d’accéder de la même façon que les
autres. Est-ce que ça, ça le permet, je ne
crois pas. Je crois pas, donc … d’ailleurs il y
a certaines personnes aussi qui disent que
c’est tout simplement une représentation,
comme je dirais, une représentation en
faite … abstraite. Donc, qui est là, mais qui
ne peut rien influencé, qui ne peut prendre
aucune décision, tout simplement pour
tromper. Tromper, tromper la vie, surtout la
communauté internationale, surtout les
étrangers (Rwandan).
system are insufficient to cope with this kind
of perception: These statements reveal the
difficulties that both political-institutional
systems seem to have in overcoming their
ethnic interpretation.
5. The third category: Political
interpretation of ethnic affiliation
Whereas the narration in the two previous
categories interprets the political power depending on the ethnic affiliation, the
following statement interprets the ethnic
affiliation depending on the political
power.
Les quotas en tout cas on ne les suit pas.[…]
Et puis les quotas … si on met un Tutsi dans
un gouvernement des Hutu c’est un Tutsi
qui est pour les Hutu: ça ne sert à rien de le
considérer comme Tutsi, il est pour les Hutu.
Même si il vote, il ne vote pas pour les Tutsi il
vote pour les Hutu, à quoi ça sert?
Un exemple simple: il y a eu plusieurs fois la
même chose. Un ministre qui est Tutsi qui
vient de l’UPRONA doit faire partie du
gouvernement. L’UPRONA nomme quelqu’un. Et puis après le gouvernement fait
des choses que l’UPRONA ne veut plus.
Alors l’UPRONA dit nous avons décidé de
sortir du gouvernement. Le Ministre qui a
été nommé dit moi je reste, moi je travaille
pour le gouvernement, je ne travaille pas
pour l’UPRONA […] Alors les quotas, non…
ça ne sert à rien les quotas (Burundian).
According to the interviewee a Tutsi person
that works within a Hutu government is not
to be considered as Tutsi because he will
not represent the Tutsi interest. Therefore,
the interviewee concludes, the quotas
seem to be useless. This reversion of the
argumentation undermines the basic
principle of political systems like the
Burundian system that tries to stabilize the
situation by political representation of
ethnicity.
According to the interviewee there are
Hutu in the Rwandan government, but he
does not think that they have any power or
influence. The informal representation of
ethnicity in Rwanda as well as the formal
representation in Burundi – as we will see in
the following statement – is insufficient to
cope with this kind of perception. The
interviewee answers the question if there
are also Tutsi in the actual Burundian
political regime:
Oui, parce qu’on veut montrer …. Mais ils
n’ont pas de pouvoir. On leur dit il faut
mettre autant des Tutsi…oui, ils sont là, mais
ils ne sont jamais président du parti, ils ne
vont pas avoir les grands ministères, c’est
ça le problème (Burundian).
Like the Rwandan interviewee, the Burundian interviewee states that the persons
described have formal power in order to
show (e.g.) the international community
that all people are integrated into the
government. Both of them perceive the
informal power as being unequally
distributed and interpret the distribution of
power in ethnic terms. Regarding the
discussion about which of the two political
systems – consociationalism or majoritarian
democracy – help to prevent an ethnic
interpretation of the political system, it has
to be stated that the reference to informal
power undermines this discussion: The
informal representation of ethnicity as they
do it in Rwanda as well as the Burundian
The third analytic category reveals quite
openly the interlinkage of ethnicity and
politics: Ethnic categories are thought of as
categories linked to political power and
political power is linked to ethnic categories.
Regarding the discussion about the
political-institutional systems, all of the previous statements highlight the difficulty of
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both political-institutional models to cope
with the ethnic interpretation of political
power. The perception expressed in the
statements undermines in some way the
discussion about majoritarian and consociational system by establishing an
interlinkage between ethnicity and political
power.
Literature
Brubaker, Rogers, Nationhood and National
Question in the Soviet Union and Post Soviet
Eurasia: An Institutionalist Account. In:
Theory and Society, 23, 1: 47-78, 1994.
Lemarchand, Réne, Burundi’s Endangered
Transition. FAST Country Risk Profile Burundi.
Working Paper, Swiss peace, Bern, 2006.
Mozaffar, Shaheen, The Institutional Logic of
Ethnic Politics, 1995 In: Harvey Glickmann.
Ethnic Conflict and Democratisation in
Africa, Atlanta, 1995.
Reyntjens, Filip, Briefing: Burundi: A Peaceful
Transition after a Decade of War? In:
African Affairs, 105/418, 117–135, 1996.
Carla Schraml studied in Dresden, Germany,
and Trento, Italy, at the department of
sociology and has a diploma in sociology.
Currently she works as a research assistant
at the department of sociology and the
centre for conflict studies (CCS) of the
Philipps-University at Marburg. She writes her
PhD about "The Dilemma of institutionalisation of ethnicity in the present
political system in Rwanda and Burundi".
Within this scope she stayed 10 month in
Rwanda and Burundi in order to conduct
interviews with Rwandans and Burundians.
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Comment les filles et femmes gèrent la violence:
les faits et les effets
Ignatiana Mukarusanga
Les filles et les femmes africaines jouent
aussi un grand rôle dans la réconciliation
de la communauté en situation des conflits.
Au Rwanda on dit que la fille ou la femme
est un « trait d’union » (cyungo cyunga
imiryango). Par le mariage, la fille ou la
femme instaure une relation de parenté
entre sa famille et celle de son époux.
Avant la colonisation, il arrivait que la
famille de la fille se serve d’elle pour régler
les crimes de sang. Elle était donnée en
mariage à un homme de la famille de la
victime de sa propre famille.
Depuis la naissance, le jour où on donnait
le nom à la fille, le couple parental
emmenait l’enfant à l’extérieur de l’enclos
et on lui montrait les collines en lui disant :
« Tu seras la fille des collines » 5 « Uzabe
Nyampinga » les parents liaient l’enfant aux
collines et au monde, pour agrandir la
famille. Par le nom de Nyampinga, la fille
recevait aussi la mission de cultiver les
qualités relatives à l’hospitalité. Dans le
pays des milles collines, l’enclos se trouvait
souvent au sommet de la colline. Les
voyageurs qui n’avaient pas d’Auberge à
l’époque se rendaient dans l’enclos le plus
proche pour bénéficier de la restauration
et être hébergés gratuitement. Ils étaient
toujours les bienvenus grâces à l’éducation
des filles qui les sensibilisaient à être
accueillantes, généreuses et disponibles
chaque fois que l’on avait besoin d’elles.
Introduction
Dans le mythe de la création on nous dit
que l’homme appela sa femme Eve parce
qu’elle fut la mère de tous les vivants1. Nous
avons la première potentialité de la
femme : elle est donatrice de vie. Ceci
l’engage à être source non seulement de
la vitalité biologique, mais aussi de la
vitalité dans toutes les dimensions humaines.
Comme une source ne garde rien pour elle
ce que la femme reçoit c’est pour le
donner ensuite. La femme doit donner ce
qu’elle a reçu, mais elle doit savoir mesurer
et donner selon les besoins de ceux qui
voient en elle la mère. Sans cette capacité
de donner sur mesure, elle risque d’être une
trop bonne mère ou une mauvaise mère
décrite par les psychanalystes 2 Dans son
rôle de mère, elle devient redynamisatrice
des valeurs éthiques et joue le rôle de
réconciliatrice entre les membres de la
famille nucléaire et de la famille élargie et
même de la nation.3 Dans le contexte de la
culture africaine, la femme est le cœur de
la maison. C’est à elle que reviennent
toutes les tâches liées à la survie des
membres de la famille. On peut dire que
l’économie africaine - qui est général une
économie de survie - repose sur les activités
des femmes (l’agriculture, le commerce, les
objets de tissage et de tressage etc.) Nous
pouvons donner l’exemple de la RDC 4 :
depuis les années 1980 l’économie de ce
pays connaît des crises graves, mais le peu
qui survit repose sur les activités des
femmes. Ce sont elles qui supportent toutes
les charges familiales. On observe la même
situation dans les pays où la violence a
perduré comme au Nigeria, au Soudan et
au nord de l’Ouganda.
Contrairement à certaines tribus africaines,
la femme rwandaise a toujours été traitée
avec égard : elle n’apparaissait pas beaucoup en public, mais elle était souvent
consultée par son mari avant une prise de
décision qui engageait la famille.
Le roi régnant recevait des conseils de la
reine-mère. Celle –ci était le plus souvent sa
Genèse 3,20
Mélanie KLEIN, WINNICOTT etc.
3 Séminaire sur la paix et la réconciliation entre les
femmes du Rwanda et de la RDC, juin 2005
4 République Démocratique du Congo
1
5 MUNYANDAMUTSA N. (2002) Question de sens et des
repères dans le traumatisme psychique : réflexion
autour de l’observation clinique d’enfants et d’adolescents survivant du génocide de 1994, Genève, p.50
2
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mère biologique ou sa mère adoptive. Un
proverbe rwandais dit à propos « quel que
soit son âge, un enfant n’est jamais totalement sevré » (ntawe ucuka kuri nyina). Ceci
pour dire que l’on a toujours besoin des
conseils de la mère même à l’âge adulte.
Actuellement,
la
représentation
des
femmes au parlement est de 48.8%. Les
femmes sont représentées dans toutes les
instances de prise de décision. Les femmes
parlementaires ont mis en place un Forum
(FFPR = Forum des Femmes Parlementaires
rwandaises) pour promouvoir la culture de
la paix et l’amélioration du Statut de la
femme.
qui n’avaient pas eu la chance de faire
des études secondaires sont devenues
autodidactes, elles ont eu des diplômes et
elles font des études supérieures. Cette
volonté a encouragé les Universités et les
Instituts supérieurs à mettre en place des
programmes de cours du soir. Nous n’avons
pas les statistiques, mais nous avons
observé que les femmes sont présentes en
grand nombre.
Nous venons de souligner les potentialités
(pas toutes) des femmes. Pendant les
conflits elles endurent les souffrances et
après les conflits, elles sont les premières à
se relever et à agir pour le bien-être de la
communauté. Elles ne négligent aucune
dimension : physique, morale, intellectuelle,
spirituelle, psychologique et économique.
Elles cherchent toujours le développement
de la personne dans toutes ses facultés et
d’une façon durable.
Beaucoup d’Associations Féminines existent
à tous les niveaux :
- Les associations des femmes rescapées du
génocide et des massacres pour se soutenir
mutuellement ;
- L’association HAGURUKA qui assiste
juridiquement les filles et les femmes ;
- Les coopératives agricoles ou artisanales ;
- Les ASBL de micro-finance (ex DUTERIMBERE) qui octroient des crédits aux
femmes sans exiger d’hypothèque.
Les souffrances des filles et des
femmes
Toujours dans le mythe de la création dieu
dit à la femme « je multiplierai les peines de
tes grossesses, dans la peine tu enfanteras
[…] ton mari dominera sur toi6. Par différents
mythes grecs et romains nous savons combien la femme a été soumise à l’homme et
de temps en temps elle faisait l’objet des
guerres fratricides. Chaque femme porte
en elle tous les sentiments du monde et les
malheurs des hommes dans des situations
de conflits armés fragilisent en même
temps les femmes (mère, sœur, épouse).
En Afrique des Grands Lacs les femmes
souffrent :
• De voir leurs maris ou leurs fils tués
sauvagement ou incarcérés injustement ;
• De voir leurs maris ou leurs fils ou
leurs frères enrôlés de force dans
l’armée ;
• De voir leurs familles menacées par
des conflits interethniques ou inter
partis politiques
• Des tortures morales et corporelles
• Des viols sexuels traumatisants et le
plus souvent véhiculant le VIH/SIDA7
Toutes ces Associations se rassemblent sous
la houlette du collectif PRO-FEMME TWESE
HAMWE (toutes ensemble) ; collectif des
organisations rwandaises de promotion de
la femme. Ce collectif a reçu le premier
prix de l’UNESCO en 1996 pour la Tolérance
et la non-violence. En 2003, il a reçu le
premier prix de la fondation Peter GRUBER
pour les droits de la femme.
Depuis 1997 les femmes, des Grands Lacs,
réunies au sein de différentes associations
n’ont jamais cessé d’ériger des capacités
en transformation de conflits et pour la
construction de la paix durable en Afrique,
surtout en Afrique des Grands Lacs où la
violence a élu demeure depuis la dernière
décennie.
En même temps elles soutiennent les
veuves et les orphelins et apportent une
aide psychosociale aux traumatisées. Dans
ces pays, les traumatismes liés aux conséquences de la guerre handicapent la vie
dans tous les secteurs : physique, social,
intellectuel, économique etc.
Genèse 3, 16
IRIN (2003), Nos corps leur champ de bataille, violences sexuelles durant les conflits (reportage)
6
7
Les femmes rwandaises font des efforts
pour hausser leur niveau intellectuel. Celles
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De la banalisation du crime et de
l’impunité
Des blessures morales et des
traumatismes psychologiques provoqués par les violences de la
guerre
De la marginalisation et le la cassure
de la société
De la déstabilisation et de l’anéantissement de l’économie
De l’incertitude d’une vie qui ne
laisse pas envisager le lendemain.
D’être considérées comme des
objets et quelquefois de tomber
dans des panneaux de prostitution
qui leur font perdre le respect et leur
dignité humaine
mergés, leurs bras raidis les tenaient encore
au dessus d’elles. »8
Ignatiana Mukarusanga, Rwandaise, 19881993 études universitaires en sciences de
l’éducation avec diplôme, 2001-2002 DEA
en psychopathologie avec certificat, 20052008 Doctorat en psychopathologie à
l’Université de Toulouse, France.
Autres formations
1975-1978 : formation religieuse chez les
sœurs Benebikira (Rwanda), 1995 : formation sur la documentation des enfants non
accompagnés (Rwanda), 1995 : formation
sur la recherche et la réunification de la
famille (Rwanda), 1996 : formation sur la
collecte et le traitement des déchets
(Afrique du Sud). 1997 : formation sur la
transformation de conflits et la construction
de la paix en Afrique (Nairobi), 1997:
formation DELTA (Development, Education,
Leadership, Team Action) (Rwanda), 1998 :
formation sur Appui aux initiatives privées
en milieu rural. Création et financement
d’entreprises (France).
Expériences professionnelles
1984-1988 : Enseignante dans un Lycée et
préfet de discipline, 1994-1995 : Superviseure des assistantes sociales au Care
Australia, Mai 1995 à Septembre 1995 :
Agent à la prison au service de Save the
Children, USA, Septembre 1995 à décembre 1998 : Bourgmestre de la Commune
Urbaine de Ngoma, Juin 1999 à 2008 : Enseignante à l’Université Nationale du
Rwanda, Chef de département de Psychologie clinique.
Publications
La cohabitation pacifique entre les bourreaux et les victimes du génocide de 1994
au Rwanda, in : Guide de santé mentale
dans le contexte de Gacaca, Kigali 2004.
Les effets post-traumatiques du génocide
de 1994 au Rwanda, in : Remembering
Rwanda, Butare 2004.
Rwanda idéologie du génocide et
stratégies de son éradication, Kigali 2006.
Musicothérapie pour la jeunesse scolaire
ayant des blessures psychiques conséquentes au génocide de 1994, in : Etudes
Rwandaise n°13, Butare 2007.
Nous ne pouvons pas parler de toutes les
souffrances des filles et des femmes africaines pendant les situations des conflits.
Nous ne manquerons pas de souligner que
dans la période d’après conflit, elles sont
les premières à se relever, à enfouir leurs
blessures, leurs traumatismes pour voler au
secours des autres.
Nous pouvons clôturer avec cette citation
de SEGUR « ce fut là qu’on perçut les
femmes, au milieu des glaçons avec leurs
enfants dans leurs bras, les élevant à
mesure qu’elle s’enfonçaient, déjà sub-
8
130
SEGUR, Histoire de Napoléon XI, 9, dans la BERESINA
11.30-13.00h, 15.00-16.30h
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Approche Ubuntu - de la réconciliation au Rwanda
Laurien Ntezimana
logique de l’unité. Le dernier niveau est
appelé « transpersonnel » parce que l’ego
est transcendé. Ici la trialectique s’exerce
pleinement dans un être humain enfin mûr.
Sa maturité se déploie dans la non-dualité
caractérisée par les notions de
« nonrésistance au méchant », de « non-jugement » et de « non-attachement ».
Le Vocabulaire
Ubuntu :
Ubuntu en langue rwandaise signifie
l’« essence de toute chose. » En philosophie
rwandaise, cette essence est bonté et
gratuité. Pour Neale Donald Walsch 1 ,
l’essence de toute chose est d’être un
« soul : Single Outflow of the Universal Life »,
une émanation singulière de la Vie
Universelle. Pour Eckhart Tolle2, l’essence est
la présence de l’être non-manifeste au
cœur de la forme. L’être humain est donc
double : il est en même temps essence (=
la conscience, qui il est vraiment) et ego (=
la forme, qui il croit être). Pour Olivier
Clouzot 3 , la conscience humaine se
déploie sur un axe vertical qu’on peut
considérer comme une échelle à quatre
degrés, deux degrés inférieurs qui correspondent à l’ego et deux degrés supérieurs
qui correspondent à l’essence. Le premier
degré est le niveau de « l’ego socioculturel », où l’être humain est prisonnier
des formes et de la logique formelle. Le
second degré est le niveau de « l’ego
individualiste » où l’être humain est préoccupé d’affirmation personnelle et pris dans
la violence de la logique dialectique. Le
troisième degré est le niveau de « l’individu
individualisé » qui découvre son essence et
enfile le chemin de crise qui le mènera à sa
maturité. Avec ce troisième niveau
commence la logique trialectique ou
Approche ubuntu :
L’approche ubuntu ou approche « essentielle » est l’autre de l’approche ibintu ou
approche « formelle ». Les deux sont
complémentaires. L’approche ibintu ou
formelle est celle qui prend en compte les
ibintu, c’est-à-dire les choses. En ce qui
concerne la réconciliation, l’approche
ibintu ou formelle se préoccupera d’abord
de « réparer » les choses pour « rétablir »
des conditions de vie décentes. Les choses
à réparer sont autant matérielles (infrastructures, habitations, etc.) que symboliques (institutions, liens, etc.). L’approche
ubuntu, quant à elle, s’occupe de la vie
derrière les conditions de vie. Elle vise donc
d’abord le déploiement de l’essence. Elle
est là pour tirer les leçons de la catastrophe
et mener plus loin sur le chemin de l’évolution humaine. Elle procède par transmutation de la souffrance en conscience. Elle
profite du chaos pour créer du neuf, elle
transforme ce qui est « pourri » en fertilisant
pour « ce qui doit naître de là » ! Pour parler
le langage des thérapeutes de Palo Alto4,
l’approche ubuntu ne vise pas le
« changement 1 » (changement à l’intérieur d’un système), mais bien le « changement 2 » (changement qui affecte le
système lui-même). Dans l’approche
ubuntu, on change de logique. On sort de
la logique dialectique de l’opposition du
bien et du mal pour entrer dans la
trialectique du Bien supérieur qui exploite la
1 Walsch, Neale Donald, Conversations avec Dieu : un
dialogue hors du commun, trois tomes, éditions Ariane,
1993-1999.
2 Tolle, Eckhart, Le pouvoir du moment présent et
Nouvelle Terre : l’avènement de la conscience humaine, éditions Ariane, 2000 et 2005.
3 Clouzot, Olivier, Eveil et verticalité : essai sur la
transcendance et sur le chemin de transformation qui
y conduit, éditions Le Souffle d’or, 2000.
4Par exemple Watzlawick, Paul, et alii, Changements :
paradoxes et psychothérapie, éditions du Seuil, 1975.
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pays devenu immense par la vertu de
cette horreur-même. Elle fut suivie par une
kyrielle de conséquences plus néfastes les
unes que les autres, et pour le pays, et pour
la région des Grands Lacs. C’est cet ensemble que j’appelle « pro-vocation rwandaise » au sens où elle « appelle » les
Rwandais, tous ceux qui en furent affectés
et tous ceux qui en prennent connaissance,
« en avant » pour transcender l’ego en eux
et manifester l’essence qui nous constitue
et nous unit.
circulation de l’énergie entre « le bien » et
« le mal » pour se manifester.
Réconciliation :
Si l’on en croit le Petit Larousse, l’essence
de la réconciliation, c’est de faire cesser le
désaccord. Transcender l’ego est la seule
démarche capable de faire cesser définitivement le désaccord, de réconcilier
durablement. Car l’ego est le véritable
créateur du désaccord. Tolle note à juste
titre que l’ego se nourrit d’identification et
de division.
Il écrit : « Pour maintenir la pensée « Je »,
l’ego a besoin de la pensée opposée
« l’autre ». L’idée de « Je » ne peut survivre
sans l’idée de « l’autre ». Les autres sont
surtout « autres » quand je les considère
comme mes ennemis. En bas de l’échelle
de ce scénario inconscient de l’ego, on
trouve l’habitude compulsive de se
plaindre des autres et de leur donner tort.
C’est ce à quoi Jésus fit allusion quand il dit
« Pourquoi voyez-vous la paille qui est dans
l’œil de votre prochain, mais pas la poutre
qui est dans le vôtre ? » En haut de l’échelle,
on trouve la violence physique entre
personnes et la guerre entre nations.» (Dans
Nouvelle Terre, p.50).
Si donc c’est l’ego, c’est-à-dire l’inconscience humaine, qui est le maître du
désaccord, seul son antidote, la conscience-témoin ou la présence, sera le
maître de la réconciliation. En effet celui
dont la présence est active voit la
perfection de chaque instant ; il est familier
de l’acceptation et du lâcher-prise, ce qui
lui permet de vivre l’harmonie avec le Tout.
L’approche ubuntu de la réconciliation
consiste à indiquer les voies et moyens de
l’éveil de cette présence-témoin.
Bien connaître l’ego
D’après Eckhart Tolle, l’ego est fait de pensées et d’émotions récurrentes. Il appelle
ces pensées « temps psychologique » et
ces émotions « corps de souffrance ».
Différent du temps horloge qui nous permet
de planifier, le temps psychologique est fait
de régression dans le passé (non-pardon)
et de projection dans le futur (inquiétude).
Le corps de souffrance est fait de pensées
toxiques que nous avons héritées de notre
socio-culture (sexe, race, nation, famille)
ainsi que des blessures de notre histoire
personnelle. Chacun porte donc en luimême, de naissance, un corps de souffrance qui peut être léger ou chargé. Il
l’alourdit par les résidus des émotions
négatives qu’il ne parvient pas à affronter
dans le moment et à exprimer totalement.
Car ce qu’on n’« ex-prime » pas s’« imprime », évidemment.
Transcender l’ego
Pour transcender l’ego, il faut sortir du
temps psychologique et se dés-identifier du
corps de souffrance en vivant dans le
moment présent. Vivre au présent de
l’indicatif, c’est accepter ce qu’apporte le
moment présent comme si on l’avait choisi.
C’est cela « prendre la responsabilité de
son état dans l’immédiat. » Cela se traduit
d’abord par le fait de renoncer à juger, ni
soi-même (culpabilité) ni qui ou quoi que
ce soit (accusation). On ne retient plus les
fautes, ce qui ne veut pas dire qu’on ne les
voit pas ! « Ne jugez pas, et vous ne serez
pas jugé ; ne condamnez pas et vous ne
serez pas condamné », dit l’Evangile ! Juger
et condamner sont des stratégies privilégiées de l’ego. Voilà pourquoi Tolle note
que, même si le blâme est plus que justifié,
Approche ubuntu de la
réconciliation
La pro-vocation rwandaise
En 1994, le Rwanda connaît pendant trois
mois qui valent des siècles ce qu’on peut
appeler « l’inconscience humaine dans
toute son horreur » : le génocide des Tutsi,
doublé du massacre des Hutu dits
« modérés ». Entre 800.000 et 1.000.000 de
morts en trois mois. Cette horreur fut
préparée par la triste histoire de ce petit
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11.30-13.00h, 15.00-16.30h
Workshop – Atelier
Dealing with the past: history, memory, commemoration
Comment gérer le passé : histoire, mémoire, commémoration
Saturday – Samedi, 16.08.2008
en blâmant on continue à nourrir son corps
de souffrance et on reste prisonnier de
l’ego.
Loin d’être des causes, nos fautes et celles
des autres sont des occasions en or d’éveil
de notre conscience. En venir là, c’est
désactiver le mode « ego » pour activer le
mode « essence ». Commencer à fonctionner sous ce mode, c’est cela qu’on appelle
« éveil » et donne accès au niveau de
conscience de « l’individu individualisé ».
Fonctionner en permanence sous le mode
« essence », c’est cela qu’on appelle
« illumination », « réalisation de soi » ou
« salut » en termes religieux (niveau transpersonnel).
L’approche ubuntu de la réconciliation
consiste ainsi à rappeler aux humains leur
essence, c’est-à-dire qui ils sont vraiment.
L’histoire leur fait réaliser (se rendre compte
de) qui ils sont devenus par oubli de qui ils
sont vraiment, dans le but de les « provoquer » à réaliser (rendre réel) qui ils sont
vraiment. « Faire mémoire du génocide
pour que plus jamais ça », c’est, très
précisément, « réparer l’oubli à la racine du
malheur subi» : l’oubli de qui nous sommes
vraiment.
pelé « Mpingagasani »6 qui s’inspire du chi
gong et du T’ai chi. Pratiqué comme il faut,
Mpingagasani développe « la fréquence
vibratoire de la présence consciente » qui
est la clé alchimique pour transmuter la
souffrance en conscience. Mpingagasani
se trouve ainsi au cœur de l’approche
ubuntu de la réconciliation au Rwanda.
Laurien Ntezimana, né en 1955, est marié
avec Marie Madeleine Karamira, quatre
enfants. Théologien de formation (Kinshasa,
République Démocratique du Congo et
Leuven, Belgique). Promoteur du Principe
Bonne Puissance. Il a créé le Service d’Animation Théologique du Diocèse Catholique
de Butare (1990-1999) où il a travaillé avec
feus ses amis Abbé Modeste MUNGWARAREBA (décédé le 04.05.1999) et M.
Innocent SAMUSONI (tué le 30.04.1994). Il a
créé l’« Association Modeste et Innocent »
pour promouvoir le « droit-devoir fondamental » de l’être humain, droit d’être bon
et devoir d’être don. A reçu deux prix
internationaux : Le Prix de la Paix de Pax
Christi International 1998 et le TheodorHaecker-Preis für Politischen Mut und
Aufrichtigkeit 2003.
Bibliographie
Uburenganziranshinganoremezo bw’ikiremwa muntu (Le droit-devoir fondamental
de l’être humain), AMI – Association
Modèste et Innocent, Butare, 2008.
De la bonne puissance pour la justice et la
réconciliation, Pax Christi Grands Lacs, 2005.
Libres paroles d’un théologien rwandais,
Karthala, Paris, 1998
Ancrer le changement 2
Pour rappeler aux Rwandais qui ils sont
vraiment, l’Association Modeste et Innocent- AMI5, qui promeut l’approche ubuntu
dans la société rwandaise, a mis au point
l’initiation à la bonne puissance et la
méthodologie de troisième niveau. A
travers les clefs de la bonne puissance, énergie, maturité, harmonie, créativité,
synergie, fécondité-, l’initiation à la bonne
puissance poursuit le changement 2 en
cultivant la bonté (santé physique, émotionnelle, mentale et spirituelle) et la
gratuité (efficacité dans l’économique, le
politique, le culturel et le social). Quant à la
méthodologie de troisième niveau (3è
niveau d’apprentissage chez G. Bateson,
3è niveau de conscience chez O. Clouzot)
elle cherche à « forcer » le passage du
mode ego au mode essence chez une
masse critique de gens. Démarche
holistique, la méthodologie de l’AMI fait
fond sur un entraînement énergétique ap5
6 Littéralement : « Je cultive dans mon corps la perfection, la bénédiction, la force de vivre ».
site www.ami-ubuntu.org
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11.30-13.00h, 15.00-16.30h
Workshop – Atelier
Dealing with the past: history, memory, commemoration
Comment gérer le passé : histoire, mémoire, commémoration
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Rapport de séance
Lena Guesnet
Dans notre atelier intitulé: Comment gérer
le passé: histoire, mémoire, commémoration, nous avons parlé d´approche politique, social et individuel. Aussi, nous avons
eu des perspectives scientifiques et le vécu
personnel. Le point commun des débats
était d´essayer de dépasser les clivages
ethniques et le piège de la logique
ethnicisante du passé.
D´abord, Carla Schraml nous a expliqué
son projet de thèse, dans lequel elle a fait
des recherches sur la question, comment
les différents systèmes politiques au
Rwanda et au Burundi sont perçus par
rapport à l´ethnicité et au pouvoir politique.
Comme vous le savez, les systèmes dans les
deux pays sont opposés: tandis qu´au
Burundi il y a les quotas ethniques, au
Rwanda en met en avant la Rwandité et
ne parle plus d’ethnies, mais on met en
avant les parties politiques. On peut donc
parler d´un “consociational system“ au
Burundi et d´un modèle de compétition ou
majoritaire au Rwanda.
Ce qui est intéressant, c´est que les deux
systèmes ont pour but d´en finir avec
l´interprétation ethnique du pouvoir. Puis
c´est intéressant de voir le résultat des
recherches que Carla a mené dans les
deux pays. Les personnes qu´elle a
interviewé ont une interprétation qu´elle a
catégorisé de la manière suivante:
1) il y a l´interprétation ethnique du
pouvoir formel
2) il y a l´interprétation ethnique du
pouvoir informel
3) la re-interprétation de l´affiliation
ethnique selon le pouvoir politique.
Il devient donc clair par son analyse, que
les deux systèmes n´ont pas encore réussi à
mettre fin à l´interprétation ethnique du
pouvoir. Du coup, quand on parle du
“political engineering”, il faut prendre en
compte
l´interprétation
ethnique
du
pouvoir politique.
Dans la prochaine intervention Ignatiana
Mukarusanga nous a parlé de la manière
dont les femmes et les filles gèrent la
violence. Elle nous a d´abord placé dans le
contexte de la femme au Rwanda, qui a
toujours été respectée et vue comme une
conseillère par son mari, et même le roi
consultait sa mère. Durant les conflits en
général, et donc aussi ceux de la région
des grands lacs, les femmes sont les
premières qui souffrent. Et à ce moment là,
on ne fait plus de différence de l´identité
des femmes: “La femme couchée n´a pas
d´ethnie”. Alors il y a beaucoup de souffrances parmi les femmes, des traumatismes suite à la violence et aux viols. Mais
les femmes sont aussi les premières à se
relever une fois le conflit fini. Aujourd´hui, les
femmes sont bien représentées au
parlement rwandais. En plus, il y a beaucoup d´associations qui prennent en
charge les femmes, dans lesquelles les
femmes s´aident mutuellement. Toutefois,
ce qu´il faudrait ce serait la paix physique
pour vraiment pouvoir reconstruire la région.
Ensuite, la présentation de Laurien Ntezimana: L´approche Ubuntu – de la réconciliation au Rwanda. Il nous a explique les
concepts Ubuntu et de bonne puissance.
Puisque ce sont des concepts philosophiques, pour bien comprendre je vous
encourage de lire l´exposé que Laurien a
préparé. Pour résumer brièvement je
voudrais dire que l´Ubuntu consiste à
d´abord s´accepter soi-même en tant
qu´individu puis d´accepter l´autre en tant
que être humain, sans lui coller une étiquette/ lui mettre un masque. Donc, il
s´agit de voir l´essentiel, la chose dans
toute chose et ne pas s´arrêter à une
affiliation ethnique. Pour le futur de la
société, il s´agit de gérer les conflits avec
cette philosophie de respecter l´autre au
lieu de se tuer. D´aller vers l´autre au lieu de
l´exclure.
A la fin nous avons réfléchi comment gérer
le passé à travers des modèles politiques, à
travers une confiance accordée aux
femmes et à travers une approche philosophique et théologique.
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11.30-13.00h, 15.00-16.30h
Workshop – Atelier
Traumatisation and healing - Traumatisation et guérison
Saturday – Samedi 16.08.2008
Workshop – Atelier
Traumatisation and healing
Traumatisation et guérison
L’image de l’autre me fait peur : Cohabitation entre victimes et
bourreaux dans l’après génocide de 1994
Eugène Rutembesa, Université Nationale du Rwanda
Suivi psychosocial des victimes de traumatisme pendant les Juridictions
Gacaca
Marie-Grâce Gazinzigwa Kagoyire, IBUKA , Rwanda
Heide Rieder, DED/ ZFD Rwanda
Moderation : Ulrich Wagner, CCS, Université de Marburg
Rapporteur : Klaas Kunst, CCS, Université de Marburg
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11.30-13.00h, 15.00-16.30h
Workshop – Atelier
Traumatisation and healing - Traumatisation et guérison
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L’image de l’autre me fait peur : Cohabitation entre victimes et
bourreaux dans l’après génocide de 1994
Eugène Rutembesa
•
•
Introduction
•
Le génocide et ses conséquences furent
l’objet des nombreuses recherches, notamment au sujet des répercussions psychologiques ; du vécu psycho-économique
des survivants du génocide et d’autres
questions y relatives. Ce qui nous intéresse
dans cette recherche c’est le vécu
relationnel entre les deux groupes mentionnés, la perception de l’un envers l’autre
suscite encore un questionnement pertinent suite au mouvement de libération en
masse des prisonniers responsables du
génocide.
Comment les bourreaux perçoiventils les rescapés et vice versa ?
Quelles sont les conséquences de
cette perception dans leur cohabitation et leur vécu relationnel ?
Quelles sont les dispositions à prendre selon les différents échelons
d’intervention pour aider les deux
groupes à vivre en harmonie ?
Les objectifs de recherche :
• Mettre en évidence la perception
de l’un envers l’autre entre les bourreaux et les victimes du génocide
de 1994 ;
• Dégager les différentes émotions et
sentiments liés à cette perception ;
• Décrire les conséquences émanant
de l’image que l’un se fait de
l’autre ;
• Proposer des solutions pour aider les
deux groupes à mieux cohabiter et
à vivre en harmonie.
Dans notre pratique quotidienne, l’on
constate que la cohabitation entre
bourreaux et victimes reste encore problématique. Pourtant, la réalité du pays tend à
la situation soulignée par S. SEBASONI
(2000) : « il n’y a pas d’autre choix que de
vivre ensemble, les autres voies sont des
impasses : l’extermination a échoué et la
séparation est impossible car elle signifierait
un retour à l’exil, il faut reconstruire l’unité
de la nation rwandaise que la colonisation
et l’idéologie ont brisé.»
Méthodologie :
Nous avons formé deux groupes de parole :
15 victimes rescapées du génocide et 15
bourreaux. Les membres de ces groupes se
rencontraient une fois les deux semaines. Le
but était de les amener à s’asseoir et à
discuter ensemble.
Focus group :
Les récits de vie et leur enregistrement.
C’est donc à travers des groupes de parole
à visée thérapeutique que nous avons
demandé aux participants d’écrire leurs
récits de vie. Des entretiens semi directifs
ont été menés et enregistrés sur cassette.
Partant de ce constat, voyons de plus près
l’image que l’un a envers l’autre. Quelle est
la considération que le bourreau a de la
victime et vice versa ? Quelles sont les
conséquences d’ordre social et relationnel
découlant de cette perception de l’un
envers l’autre ? Nous avons amorcé cette
recherche en créant un espace de parole
pour les deux groupes qu’on pourrait
qualifier au départ d’antagonistes : un
au départ d’antagonistes : un groupe de
rescapés et un groupe de génocidaires.
Résultats
Les résultats de notre étude montrent que
les attitudes et les comportements suivants
caractérisent les relations sociales entre les
groupes cibles :
• L’isolement et le repli sur soi ;
• L’indifférence sociale ;
• La méfiance à l’égard de l’autre ;
Les questions de recherche :
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•
•
•
•
•
Workshop – Atelier
Traumatisation and healing - Traumatisation et guérison
Saturday – Samedi 16.08.2008
La suspicion ;
Les rivalités basées sur les appartenances ethniques ;
Les comportements d’évitement les
uns les autres ;
Le manque de contact et d’autres
signes d’ordre social tels que
l’échange de paroles et d’idées, le
partage de repas ou de boissons ;
L’évitement dans des activités
communautaires pouvant mettre
en contact les deux groupes. Toutes
ces réactions émotionnelles et
comportementales ne font qu’accentuer cet éloignement entre les
deux groupes antagonistes.
vue de redonner un visage d’humanité aux
Rwandais de demain et ainsi d’éviter que
la transmission intergénérationnelle des
séquelles du génocide se fasse d’une
façon calamiteuse.
La politique nationale pourrait initier des
activités communautaires où les victimes
et les bourreaux se rencontreront dans des
associations mixtes et pourront ainsi entrer
en contact. L’image que chacun se fait de
l’autre changera progressivement vers le
pôle positif.
Recherche effectuée par :
Dr Eugene Rutembesa
Pr Jean Damascène Ndayambaje
Centre Universitaire de Santé Mentale
Université Nationale du Rwanda
Après le génocide des Tutsi de 1994,
chaque Rwandais, s’est fait une nouvelle
identité. Ainsi, la perception et la
représentation que les victimes et les
bourreaux du génocide ont les uns envers
les autres quatorze ans après, influence
leurs relations sociales. Le processus de
stéréotypisation utilisée comme une des
armes du génocide est ancré dans les
schèmes cognitifs des Rwandais et ainsi
chacun se fait une image stéréotypée de
l’autre.
La cohabitation entre les victimes et les
bourreaux contribue à la chronicité de
certaines pathologies dont le traumatisme
psychique. Ceci est dû surtout au fait que
l’image de l’un fait peur à l’autre et que
cette reviviscence de souvenir replonge les
rescapés dans les moments stressants du
génocide de 1994.
Bibliographie
Hatzfeld J. (2000). Dans le nu de la vie :
récits des marais rwandais. Paris, éditions du
seuil.
Hatzfeld J. (2003). Une saison des machettes. Paris, éditions du seuil.
Lebigot F. et Bessoles P. (2005). Victimologie
- criminologie: approches cliniques. Tome 5.
Nîmes: champ social.
Lipiansky .E, (1991), Identité, communication interculturelle et dynamique de groupe,
Paris, PUF.
Lopez G. et al.( 1998). Psychothérapies des
victimes : traitement multimodal du psychotraumatisme. Paris, Dunod.
Minisanté, (2003). Ministère de la Santé,
Kigali.
En guise de prise en charge et de
contribution au changement de la situation
relationnelle qui règne entre les victimes et
les bourreaux, il est proposé d’encourager
le travail en groupes de parole
pour
permettre surtout le contact entre les deux
groupes.
Les dits groupes pourraient se rencontrer
dans les cellules ou dans les agglomérations (Imidugudu) où ils habitent. Ils
seraient par exemple des groupes d’entraide, des groupes de soutien ou des
groupes d’expression régis par la confidentialité et le respect mutuel.
Les enfants des victimes et des bourreaux
pourraient constituer un groupe modèle en
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Munyandamutsa N. (2001). Questions de
sens et de repères dans le traumatisme psychique. Genève ; Médicine & Hygiène.
Ndayambaje J. D. (2000). Le génocide des
Tutsi etait-il inéluctable - vu par un Psychologue, Ibuka, Bruxelles.
Sebasoni S. (2000). Les origines du Rwanda.
Paris, l’Harmattan
Sironi F. (1999). Bourreaux et victimes psychologie de la torture, Paris, Odile
Rutembesa Eugène, né en 1965 au Rwanda,
Doctorat en Psychologie clinique et
Psychopathologie à l’Université Paris 8,
France ;
Doyen de la Faculté de Psychologie et
Sciences de l’Education de l’Université
Nationale du Rwanda.
Domaines de Recherche :
Psychotraumatisme et résilience, Thérapies
traditionnelles au Rwanda,
Les effets post-traumatismes du génocide
des Tutsi au Rwanda (Cohabitation entre
victimes et bourreaux)
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Suivi psychosocial des victimes de traumatisme
pendant les Juridictions Gacaca
Marie Grâce Gasinzigwa Kagoyire et Heide Rieder
Aspect psycho-médical :
Les services de la santé mentale
L’histoire de la santé mentale au Rwanda
est encore jeune, donnant ici l’exemple de
la psychologie clinique, qui a été introduite
dans le cursus universitaire de l’Université
Nationale du Rwanda (UNR) en 1999 seulement. Sachant qu’il existait déjà des
structures psychiatriques avant le génocide
de 1994, la question de l’état psychique et
de la santé mentale dans la population
rwandaise s’est pourtant beaucoup développé autour du concept du traumatisme
psychique : une conséquence de l’expérience du génocide. Le terme clinique du
trouble du stress post traumatique (PTSD)
qu’on trouve dans le monde scientifique
aussi bien que chez les cliniciens a été
adapté au contexte rwandais décrivant
des symptômes spécifiques chez les
victimes. Des comportements de crier, de
fuir en courant, tomber par terre et de
perdre conscience se laissent observer
dans la vie quotidienne aussi bien qu’à des
moments précis comme pendant les
Juridictions Gacaca.
Introduction
L’histoire du Rwanda est marquée par des
vagues fortes de discrimination soit disant
ethnique et de violence s’accumulant
dans le génocide perpétré contre les Tutsis
en 1994. Le passé douloureux a laissé des
cicatrices profondes et toujours visibles
dans la population du pays. Non seulement
au niveau psychologique, mais touchant
aussi toutes autres conditions de vie, pour
ne citer que le logement, la santé,
l’éducation, l’extrême pauvreté et la
sécurité, le Rwanda est confronté à des
multiples problèmes.
Dans le suivi des victimes de traumatisme
de
notre
projet
nous
comprenons
l’approche psychosociale comme une voie
possible de répondre aux problèmes
rencontrés dans la société qui ne sont pas
uniquement de l’ordre psychique ou social,
mais concernent aussi les dimensions
politiques ou bien juridiques. L’intervention
psychosociale au Rwanda doit donc
s’adapter au contexte spécifique de la
phase post-conflit aussi bien qu’à la culture
et mentalité rwandaise. Dans la suite nous
essaierons d’éclaircir quelques aspects
psycho-médicaux, politiques et juridiques
au Rwanda et montrons comment nous y
avons adapté notre approche psychosociale dans le processus de guérison et de
réconciliation.
Le système de Santé Mentale au Rwanda a
répondu à ces problèmes en mettant en
place des conseillers en traumatisme au
niveau national, formé en grande partie
par l’association des conseillers en traumatisme (ARCT-RUHUKA). Ils s’occupent, ensemble avec les assistants psychosociaux
de ces crises rencontrées et offrent un
service de counselling individuel ou en
groupe. Les assistants psychosociaux,
comme des personnes de bonne volonté,
sont formés par les associations de la
société civile, mais n’ont pas forcement
une expérience professionnelle dans le
domaine psychosocial. Mais connaître la
colline et être connu par la communauté
est un atout avantageux qui améliore le
transfer d’information entre bénéficiaires et
les services spécialisés. L’idée, de les
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la cohabitation entre les bourreaux et les
rescapés après le génocide de 1994.
Comme les années passées ont montrés,
les effets des Gacaca sont multiples, pour
nommer juste le risque réel d’une réaction
post-traumatique signifiant une reviviscence du passé vécu. Il y a l’insécurité générale de certains témoins (Brounéus, 2008)
qui ne veulent pas se cacher derrière la
vérité douloureuse même si leurs dépositions envoient d’autres membres de la
famille en prison. Mais il s’agit aussi d’un
sentiment d’apaisement chez les familles
des victimes qui ont trouvé les corps des
leurs familles. Dans le contexte Gacaca on
a essayé de confronter les doutes et
questions de la population par des moyens
de sensibilisation et de formation. Les soit
disant élus de la communauté - les inyangamugayo- jouent un rôle crucial en ce
qui concerne le processus des Juridictions
Gacaca. Le manque de sensibilité dans la
manière de guider les procès et en utilisant
des mots blessants ou même en se
moquant devant ceux qui ont trouvé le
courage de témoigner crée des nouvelles
blessures et un sentiment de rejet chez ces
derniers.
intégrer dans le suivi psychosocial, répond
en outre aux nombreux problèmes de
traumatisme et aux besoins de travailler en
équipe pour éviter le traumatisme indirect.
Nous avons vu à quel point les échanges
entre collègues étaient essentiels ainsi que
les supervisions cliniques pour créer un
espace de dialogue où chacun puisse
exprimer sa fatigue et ses propres frustrations.
Aspect politique : Deuil national
Chaque année au moment du mois d’avril
le Rwanda trompe dans le souvenir des
événements de 1994. Les commémorations
offrent un lieu et un temps de mémoire et
d’expression d’une souffrance collective
pour les rescapés et d’autres membres de
la communauté. Au Rwanda, où la culture
et la mentalité ne permettent pas toujours
aux gens de montrer leurs propres
sentiments et souffrances aux autres, le
deuil ouvre un espace de partage d’une
histoire intime où les larmes et des crises
sont permises. Avec la mise en place d’un
système d’assistance psychologique aux
moments du deuil on a su répondre aux
réactions individuelles de chaque personne.
Du point de vue psychique il n’est pas
facile à distinguer entre la victime qui
cherche cette collectivité pour enfin vivre
sa crise comme elle le veut de celle qui ne
sait pas se contrôler. Celle-ci se sent
provoquée et stimulée par le poids des
souvenirs remontant à travers des images
atroces et des témoignages durs à écouter
aux moments des rencontres. Les conseillers
en traumatisme peuvent donc jouer un
intermédiaire entre la population et les
services spécialisés aussi bien que les
autorités pour mieux articuler les besoins de
chacun. S’agit-il de forcer un membre de
la communauté d’aller au deuil sans qu’il le
veuille par exemple, risque de provoquer
encore plus de crises et de contraintes.
C’est aussi à ce moment là qu’un conseiller
peut intervenir et sensibiliser les personnes
concernées et responsables à réfléchir sur
leur démarche.
Les conseillers en traumatisme aussi bien
que les assistants psychosociaux offrent une
sorte de protection pendant les juridictions
envers ces affronts et essaient de minimiser
les effets négatifs par un suivi proche de la
victime. D’autres contraintes sont de l’ordre
politique comme les changements des lois
qui mettent actuellement les acteurs du
crime de viol de la première catégorie de
crime devant les Gacaca. Pour offrir le
maximum de sécurité aux témoins concernés les conseillers doivent adapter des
approches interdisciplinaires au niveau de
suivi juridique, psychologique et social.
D’autres facteurs non mentionnés ici
comme l’aspect communautaire de la
cohabitation des familles des victimes et
des bourreaux demandent surtout dans la
phase post-Gacaca qui s’annonce, une
adaptation continue des interventions
psychosociales comme la nôtre pour répondre aux besoins changeants dans le
temps.
Aspect juridique :
Juridictions Gacaca
Le grand objectif des Juridictions Gacaca,
introduit en 2002, était, d’instaurer la justice,
l’unité et la réconciliation et de permettre
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des nouveaux facteurs dans le projet.
Prenant en compte le risque du renforcement des symptômes cliniques si on néglige
le contexte social pour entendre aussi
socio-économique, on s’y attend à pouvoir
offrir un suivi plus complexe dans le futur du
projet.
Le projet Gacaca et Trauma :
Comment le suivi psychosocial
pendant les Juridictions Gacaca
s’est développé ?
Rétrospective des phases 2005- 2008
Le constat du besoin d’un suivi spécifique
était fait, accordé aux victimes du traumatisme pendant la phase Gacaca. Pour
développer un projet Ibuka a collaboré
avec l’assistante technique du DED/ ZFD.
Dans une première phase nous avons
identifié des zones pilotes ayant un grand
nombre des gens traumatisés pour y mettre
en place des conseillers. Ils se rendaient sur
terrain les jours des Juridictions Gacaca
dans leurs zones respectifs, y restaient en
suivant les procès, sensibilisaient les
participants avant le procès et facilitaient
des crises traumatiques dues à ces
juridictions. Après un travail d’expérience
de soi-même et de l’évaluation des résultats, l’équipe des conseillers a développé
des modules de formation pour à leur tour
former des assistants psychosociaux afin de
créer une équipe de 18 assistants autour de
chaque conseiller. Puisque nous avons vu
que le point fort dans la réalisation du
projet était la structure de collaboration et
de suivi entre les conseillers en traumatisme
et leurs assistants psychosociaux, nous
avons lancé la deuxième phase du projet
pour renforcer l´équipe des conseillers de
12 à 19 personnes et des assistants psychosociaux à un nombre de 336. La formation
des conseillers en traumatisme comme
formateur et comme superviseur envers les
assistants psychosociaux représentait un
élément primordial dans cette extension du
projet.
Exemple d’un cas : La crise
traumatique et conflictuelle
Pour illustrer la complexité du travail nous
voulons parler d’un cas rencontré sur terrain
et montrer comment on peut intervenir
dans une telle situation, marqué par la
question d’identité de Madame M. et son
conflit de se retrouver entre les intérêts de
ses deux familles.
Madame M. est âgée de 43 ans. Au moment du génocide, elle avait 29 ans, marié
avec un homme tutsi, qu’on a tué pendant
le génocide. Elle, hutu, a été à la suite
rejetée par sa propre famille et sa belle
famille. Au cours de la séance de Gacaca
en 2007, M. a piqué une crise lorsqu’elle
témoignait contre son propre frère, qui a
massacré son mari et son garçon et
prononçait les noms des autres qui ont
participé dans le génocide y compris
d’autres membres de la famille. Lors de la
crise, elle a crié beaucoup, a fermé les
yeux ayant des flash-backs, elle s’agitait et
avait peur. Ses cris et ses angoisses
évoquaient la façon dont on a tué son
enfant.
Mais personne n’a voulu intervenir. Les gens
qui étaient dans la séance de Gacaca se
sont écartés d’elle. Les membres de famille
génocidaires étaient fâchés contre elle,
Dans la supervision avec les conseillers en
traumatisme nous avons constaté qu’un
conseiller en traumatisme est souvent sollicité pour des problèmes de pauvreté ce
qui augmente le sentiment d’impuissance
parmi les conseillers et risque à renforcer le
"burn out". Alors que les victimes n´intègrent
pas leur trauma à cause de la pauvreté
extrême et des conflits rencontrés dans
leurs familles ou dans la communauté.
L’idée de l´intégration des travailleurs sociaux était née. Le counselling social aussi
bien que la gestion des conflits constituent
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Workshop – Atelier
Traumatisation and healing - Traumatisation et guérison
Saturday – Samedi 16.08.2008
car elle témoignait contre eux. Ils proclamaient : «Toi, tu mens, tu t’es identifié
des Tutsis, toi Tutsi ». Les tutsis, surtout les
voisins et les membres de sa belle famille,
chuchotaient qu’elle faisait semblant pour
attirer l´attention. Même l’assistant psychosocial en place qui était Tutsi, se sentait
faible de l’aider. Mme M. se sentait abandonnée.
La conseillère en traumatisme est intervenue pour faciliter la femme de sortir de
sa crise. Elle l´a écarté de la foule pour
rester avec elle dans un endroit calme.
Pour l’aider à sortir de ses réactions posttraumatiques la conseillère est restée avec
elle pendant toute la durée de la crise et
elle a créé un climat de confiance et l’a
écouté avec empathie.
Lors de l’accompagnement psychosocial
de la femme et de la supervision des
assistants psychosociaux la conseillère a
appris l’histoire de Mme M. La supervision a
montré que l’assistant qui refusait à aider la
femme avait une relation amicale avec le
mari de M. et a été influencé par les
mauvaises rumeurs contre Mme M. du côté
des rescapés. Ceux-ci croyaient qu’elle
savait tout et qu’elle refusait de témoigner
volontairement. Dans les phases précédentes de Gacaca Mme M. n’était pas
capable de témoigner. Elle était très
frustrée et avait les sentiments d’ambivalence. Elle ne pouvait pas croire que sa
propre famille a participé dans l’assassinat
de son enfant et son mari. D’autant plus le
fait d’être rejeté par les deux familles dans
un contexte de vie où les uns dépendent
socialement et financièrement des autres
la mettait dans une position socio-économique précaire. C’est pour cela elle a
cherché de l’aide chez l’association
AVEGA pour avoir la force de témoigner.
Pour assurer le suivi psychosocial de la
femme en question, la conseillère a
permuté les assistants dans d’autres sites
d’intervention et a sensibilisé la population
locale à matière du traumatisme pour
éviter le rejet.
le grand défis de trouver des voies de sortie
pour arriver à une cohabitation paisible et
la réconciliation dans les jours a venir.
Références
Bronéus, Karen, Truth-Telling as talking Cure?
Insecurity and Retraumatization in the
Rwandan Gacaca Courts, Security Dialogue, 2008, 39/1/55.
Programme National de Santé Mentale,
Guide en santé mentale dans le contexte
Gacaca, Kigali 2004.
Marie Grâce Gasinzigwa Kagoyire, née en
Décembre 1979, Sociologue Trauma-counsellor, membre de l'Association Rwandaise
des Conseillers en Traumatisme (ARCT). Elle
a 6 ans de travail avec les victimes du
traumatisme psychique au sein du Fonds
National pour l'Assistance aux Rescapés du
génocide de 1994, expérience dans le
counselling, suivi, supervision des cas
cliniques des assistants psychosociaux au
sein de l'IBUKA (Souviens-toi - Association
des rescapés du génocide), elle travaille
actuellement pour le département de
trauma-counselling et projet à l'IBUKA
comme Coordinatrice du projet d'accompagnement psychosocial des victimes du
traumatisme et gestion des conflits
pendant les juridictions Gacaca, un projet
financé par le Service Allemand de
Développement (DED/ ZFD).
Publications:
G. Kagoyire, M. G.: Traumatisme psychique
dans
des
établissements
scolaires
secondaires, ULK, Kigali, 2007.
Bakansanga, A.; Mukansoro, E.; Kumpf, B.;
Rieder, H.; Groninger, K.; Kagoyire, M.G.:
GACACA ET TRAUMA: Le suivi psychosocial
des victimes de traumatisme au Rwanda.
Ibuka, Kanyarwanda, DED/ ZFD, Kigali, 2007.
Heide Rieder, née en 1978, psychologue,
travail dans l’assistance des personnes
ayant un handicap physique et/ ou
mental en Allemagne, en France et au
Liban; expérience dans le suivi psychologique et psychothérapeutique des réfugiés
de Bosnie - Herzégovine et du Kosovo dans
le service de la Croix Rouge Allemande
Ce cas décrit reflète bien la réalité de
toute l’équipe des conseillers en traumatisme et des assistants psychosociaux.
Confronté à une augmentation des conflits
communautaires et familiaux issus des Juridictions Gacaca le projet se trouve devant
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Workshop – Atelier
Traumatisation and healing - Traumatisation et guérison
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(DRK) à Berlin; elle travaille actuellement
comme assistante technique pour le
programme psychosocial du Service Civil
de Paix (ZFD) du Service Allemand de
Développement (DED) au Rwanda en
appuyant les activités des organisations
locales Kanyarwanda et Ibuka (organisations de droits de l‘homme et des rescapés du génocide)
Publications :
Von Lersner, U., Rieder, H., Elbert, T. (2008).
Psychische Gesundheit und Rückkehrvorstellungen am Beispiel von Flüchtlingen aus
dem ehemaligen Jugoslawien. Zeitschrift für
Klinische Psychologie und Psychotherapie.
2008, 37(2), 112-121
Bakansanga, A., Mukansoro, E., Kumpf, B.,
Rieder, H., Groninger, K. (2007). GACACA ET
TRAUMA: Le suivi psychosocial des victimes
de traumatisme au Rwanda. Ibuka, Kanyarwanda, DED/ ZFD, Kigali
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Workshop – Atelier
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Minutes of the Workshop
Klaas Kunst
The moderator Ulrich Wagner sets up the
outline for this workshop: Both presentations
will be 20 minutes long, followed each by
the possibility for questions for understanding. In the second part the discussion
should take place.
many others as well. They discovered that
especially when they went into the countryside and visited far away villages, where
they found many victims with posttraumatic stress symptoms. It became clear
during their work the evil should be named,
only
then
could
forgiveness
and
reconciliation start. Rwanda has always
been a mixed community, where things
and space were shared and exchanged,
but in these days there was strong defiance
and anger between the people and a
want for revenge.
According to Mr. Rutembesa there is a
path which should be taken, shown by the
three ‘R’s:
• Recognition: People (Victims and
Perpetrators) should see what was
done, it should be made open to
everybody
• Regret (and Répentance): The perpetrators should show their regret to
the victims and not e.g. insist on the
often seen opinion that killing Tutsi
was just a marginal thing to do
• Repair: Things have to be repaired,
reparations have to be made.
Presentation of Eugène Rutembesa:
L’image de l’autre me fait peur: cohabitation entre victimes et bourreaux
Supported by a PowerPoint presentation Mr.
Rutembesa speaks about a project he and
his colleague started in 2005 in Rwanda
after a massive release of prisoners, these
being perpetrators from the period of the
Rwanda genocide. The people did not
really understand this decision and were
afraid of for example more atrocities. The
project with his colleague intended to
develop discussion groups where 15 victims
or villagers could come together with 15
perpetrators/ former prisoners. The aim of
these meetings, which were held every two
weeks, was to reduce fears on both sides.
They mainly came together before the
meetings of the Gacaca trials. Before these
meetings under the title "The other one
scares me" people did not speak to each
other, now they could speak to each other
and find out their opposites fears and
thoughts. Ultimately the goal was to bring
together these two communities of Hutu
und Tutsi again.
The genocide destroyed the social fabric in
Rwanda, the people living inside the
countries borders did no longer perceive
themselves as one community. There were
many orphans and 40.000 children without
any more family ties left; other problems
included poverty and a crushed economy.
Mr. Rutembesa stated that victims of rape
and torture do now want justice and that
they are ready for facing their violators.
The trauma centre he is working in was
established in 1995 with the financial
support of UNICEF, but the funding was
taken over by the Rwanda Ministry of
Health after they discovered that not only
children needed psychological help but
So the questions Mr. Rutembesa raised on
the basis on the notion, that there is no
clear line to be drawn between Hutu and
Tutsi and also not between victims and
perpetrators, are the following:
• How are the victims seen?
• How are the perpetrators seen?
• How can harmony like before been
reached again?
The method taken by his colleague and
him in the project presented (2005-2007) is
bringing together the above mentioned
group of each 15 victims and former prisoners. Results are as follows: The victims
feared that the perpetrators would come
back for more atrocities. Perpetrators in
exchange feared that they would be killed
in revenge. Victims wanted to stay in solitude and not go out into the open, whereas the perpetrators did want to live in a
community again but not in their own
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home village. The victims felt guilt and
shame, but did not want to talk about it,
especially not when sexual atrocities
happened. The perpetrators had a very low
self-image and a low self-confidence. The
victims were opposing the release of the
prisoners because that could be seen as a
pardon or an amnesty. In some cases the
victims did not see the perpetrators as
human beings any more. There was lots of
suspicion and distrust between the groups
and they avoided the presence of one
another, there was rivalry in both groups. In
former times people did often have meals
and bears together, this is not happening
any more, only in one’s own group.
As a conclusion Mr. Rutembesa said that
people should be encouraged to meet
one another again and that he and his
colleagues are working for organising that.
In these discussion groups they could
communicate and talk about the things
that happened. A model is called Amatorero, which traditionally are groups of
young people, which share different
activities. But at the end he is stressing that
without justice or with the personal feeling
of justice the whole process is not working.
they had so much time to reflect in prison
about what they had done they needed
psychological support, some showed
mental illness.
The answer to the question of Prosper
Nobirabo Mr. Rutembesa said is very sensitive; it is in Rwanda very difficult to get out
of the categories from the genocide. But
they always tried to work with the people in
need, so the answer would be yes.
Mr. Rutembesa said in return to the
question of Ms. Rieder that they found
many symptoms at the perpetrators which
they tried to cure. The perpetrators do as
an act of repair work of general interest.
They now feel like victims themselves
because they want to be recognized as
perpetrators which have been released
and which are working for the community
now. They want to leave the world of the
“animals” and become human beings
again.
Presentation of Marie-Grâce Kagoyire
Gazinzigwa and Heide Rieder:
Heide Rieder started with this presentation,
also supported by a PowerPoint presentation, about a study in Rwanda, where
victims of trauma are supported. This project was initiated by IBUKA, an organisation
of victims and for human rights protection.
The group wanted to help victims who
suffer trauma during the Gacaca trials.
During the national mourning, people
sometimes burst open into screaming, so for
the Gacaca trials people were accompanied. The project that aims at peace
and stability, wants to ease negative
effects of Gacaca and strengthen its positive effects. One of the measures is to raise
awareness of ‘trauma’ in the public and
also among officials. They try to cover the
whole country, 19 counsellors and 360
psycho-social workers have worked in eight
months with more than 20.000 people.
Jean-Baptiste Sadiki notes that as a Rwandan he wants to contribute to these victimperpetrator talks, it is very important to him
that all perpetrators have a possibility to
talk in these processes, not only because
they had lots of time to reflect in prison. So
his question is, if it would be a good idea to
extend these talks to the whole society.
Prosper Nobirabo asked if there were Hutu
and Tutsi in both victims and perpetrator
groups.
Heide Rieder wanted to know to what
extent Mr. Rutembesa and his colleagues
listened to the atrocities of the perpetrators.
Also she was interested in psychological
symptoms, which the perpetrators showed.
And she asked for the role of forgiveness, so
if there was regret to be seen in the
perpetrators contributions.
Eugène Rutembesa answered to JeanBaptiste Sadiki that in his project unfortunately only few people could be asked, it
was a scientific research and the resources
were limited. He referred also to a study
done by researchers from the University of
Berkeley on the roots of the genocide. The
findings were for example that because
M.-G. Kagoyire Gazinzigwa then spoke
about obstacles and negative and positive
effects towards the Gacaca process. The
local population takes very much part in
the Gacaca trials, most crises happen
within this local population, for example
redeemed by harsh words by the
perpetrators. Obstacles to the process can
be wrong witnesses, who give false
testimonies on purpose, superficial testi-
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monies, the banalisation of killing Tutsi,
corruption by perpetrators, bribing victims
to not to testify etc. This can all lead to less
participation by victims.
Negative effects can be for example
flashbacks by victims, when they relive the
atrocities; feelings of vengeance, which
can be re-inflamed; people can be or were
threatened; some people were even killed
after their testimony, which would increase
the fear within both groups victims as well
as perpetrators. Ms. Kagoyire gave the
example of a Hutu woman, who was
married to a Tutsi man. He and her oldest
child, a son, were killed by her own brother.
In the Gacaca she testified against him,
while he said that it was only a casual killing.
She was abandoned by both her and her
husband’s family and required and got
psychological assistance.
Positive aspects of the Gacaca project
were for example that people could
express their feelings, talk about their
wounds, overcome the deaths in their
surroundings, some testimonies could be
done through the support of this psychosocial help, less stigmatization was seen
and some reconciliation was reached. In
2008 the project, in which both Hutu and
Tutsi get support, goes on and the psychosocial workers stay in the field.
Prosper Nobirabo asked about the precautions which were taken for the team,
which was sometimes far from the conflict
and sometimes given false information.
Heide Rieder answered that the counsellor
and the psycho-social workers have
worked in the field, so they had lots of
contact with the people, they did not only
sit in their offices. Against the false testimonies they tried to raise the awareness of
traumatisation. She added that she was
never in the field while working with the
group but also this distance could have
advantages.
ciliation. Marie-Grâce Kagoyire added that
participants could better manage their
emotions through the help of their group.
Heide Rieder said that as more additional
effects, in some cases the truth came out,
so that for example the bones of missing
people could be found and properly
buried, this helped in the healing process.
Christine Kunst asked if there was also a
danger of trauma within the group of
Arusha court (ICTR) witnesses. Eugène
Rutembesa answered that this question is
discussed very much in Rwanda, very often
there is no follow-up after the victims’
testimonies, and no psychological help is
organised by the court. They are now
thinking about training for the questioners,
which would help the victims.
P. Nobirabo addressed the case where a
person comes out of jail in the events of
2005, which has admitted its guilt, but this
person has just done it to come free,
although he is being completely innocent.
Also he wondered about what will happen
in the Democratic Republic of Congo,
where many former Rwandan citizens still
live. Mr. Nobirabo wanted to know how
long will Gacaca last. And referring to the
in the DRC living Rwandans he asked if
Interahamwe members can be handled by
Gacaca jurisdictions, too. He said that the
Gacaca process is insecure because
judges have been corrupted and there is a
danger of being killed if one is participating
in the process. Eugène Rutembesa answered that his observation is a reality, that
some people just admitted guilt to get free.
It is hard for them then but they can go
back to their village and start with reality
there again, they can tell their fellow
villagers, friends and family, how it really
was; they can take their confessions back.
Marie-Grâce Kagoyire is not sure when the
Gacaca trials will end. At the moment
there is the second stage going on, the
trials on rapists. There are so many perpetrators that it will take a long time until they
all have come before the Gacaca courts.
But in her estimation it will be much quicker
than the process of the ICTR. She cannot
answer the Interahamwe question, that has
to be decided when the situation arises
and on the political level. She agreed that
corruption is there and added that the role
of the victims was often changed or even
In the second part of the workshop Ulrich
Wagner and Christine Kunst presented a
graph summarising the approaches of the
presenters. Eugène Rutembesa wanted to
add one point to this graph: While he
outlined the three steps starting each with
an 'R’, his work mainly left out the first ‘R’,
the perpetrators mainly had recognised
their own guilt, hey focused more on the
therapy and wanted to reach recon-
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degraded, which made it more difficult for
them.
Bert Ingelaere asked the following questions:
• Isn’t reconciliation too big? What is
reconciliation in the field, to the individuals?
• Was Gacaca chosen as the best
system to prosecute the perpetrators? Would you use Gacaca again?
• Is there assistance to perpetrators?
E. Rutembesa first came back to the situation before the genocide, which was
homogenous, after 1994 everything was
different. He said that reconciliation is when
Hutu can marry Tutsi again and vice versa.
The Gacaca were not really chosen, but
emerged and were respected by everybody, without Gacaca it would have taken
too long.
H. Rieder answered that reconciliation can
‘in the field’ only function on an individual
basis. How can you reconcile families,
when the Hutu-Tutsi line was in the middle
of the family? How can they reconcile, if
they had not forgiven their enemy and
themselves? She said that there is also assistance to perpetrators, although there are
objections against that in the country,
when people ask how they could even
counsel these villains. Marie-Grâce Kagoyire added that there are steps taken and
signs of reconciliation are seen. Victims are
looking for support. Perpetrators get also
support; Hutu and Tutsi look the same, so
everybody can receive help.
‘How big is the number of innocent people
who admitted their guilt to get out of jail?’
and ‘What does the crowd, the watching
people at the Gacaca trials do?’ were the
questions of Toni Hassenmeier. The answer
of E. Rutembesa shows the problem of
these innocent people, because many
really guilty perpetrators say the same and
deny their involvement. It is so very hard to
believe innocent people after they have
admitted guilt. There are no statistics on this.
Marie-Grâce Kagoyire answered the other
question that the Gacaca trials happen
once a week, in the meantime the local
population speaks about the contents of
the trials to come, they are part of it and
they can be called as witnesses.
P. Nobirabo wants then to know about the
future of the project of Mr. Rutembesa,
especially when many Hutu (members of
the Interahamwe) return to Rwanda. His
second notion was where the about
160.000 people awaiting their trial will serve
their sentences once they are guilty. Also
he asked about the possibilities for appeal,
if this then is done by regular Rwandese
courts or will the International Criminal
Court fill this gap? E. Rutembesa hopes for
a bright future for the National Centre for
Trauma. It is nearly unique in Africa and can
give lots of people assistance. He does not
see such a big problem when returnees
come back from the Democratic Republic
of Congo. Not all of them are Interahamwe
members and they will be welcomed. There
is a possibility for appeals directly at the
Gacaca courts, M.-G. Kagoyire said people
could just call for another meeting.
U. Wagner asked for recommendations,
what aspects counsellors should focus on.
Many of the people active in this field have
studied somewhere in the Western world, E.
Rutembesa said, so the background also
originates from there. But he stressed that a
community approach should be adopted,
because traditionally groups and families
are very important, so the solutions should
also be found in a collective way. He also
mentioned a problem of mourning, that
Rwandese have not come to terms with
that, they are strongly connected to their
dead people.
Hannah Janetschek poses a question, if
belonging to either the Hutu or the Tutsi was
a problem for the psycho-social workers
and counsellors on the one hand and for
the victims and perpetrators on the other.
Also she wants to know if there are longterm plans of this project. Marie-Grâce
Kagoyire answered that counsellors were
trained for one and a half years in counselling and mental health, the psychosocial workers for a shorter time but also in
conflict management. Also they were embedded in the community. They were seen
as neutral as they were trained as neutral
and the people knew that. H. Rieder
added that they now only spoke about
urgent crises, but there are also long-term
projects.
René Lemarchand noted that many
people were put into prison after the
Gacaca trials, after they have been
acquitted by the courts there. Eugène
Rutembesa answered that it is true but that
they are working on that and many have
been released again.
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11.30-13.00h, 15.00-16.30h
Workshop – Atelier
Girls and women – their suffering and potential
Des filles et femmes – leurs souffrances et potentialités
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Workshop – Atelier
Girls and women – their suffering and potential
Des filles et femmes – leurs souffrances et potentialités
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Workshop – Atelier
Girls and women – their suffering and potential
Des filles et femmes – leurs souffrances et potentialités
Après le mal absolu – création de l’avenir AVEGA
Esther Mujawayo, Germany
Le long trajet – pour un éveil plus conciliant
Marie-Aimable Umurerwa, Belgique
Moderation: Liberate Nicayenzi,
Unions Nous pour la Promotion des Batwa - UNIPROBA, Burundi
Rapporteur : David Bodensohn, University of Marburg
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Workshop – Atelier
Girls and women – their suffering and potential
Des filles et femmes – leurs souffrances et potentialités
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Après le mal absolu – création de l’avenir - AVEGA
Esther Mujawayo
réappartenir encore à une famille, le clan
des Veuves!
Introduction
Juillet 1994: Des défis énormes
Au Rwanda, entre Avril et juillet 2004, un
million de personnes sont massacrés dans
les plus brutales et abjectes conditions en
moins de 10 semaines. Ces personnes
étaient massacrées du seul fait qu'ils
étaient nés Tutsi ou bien en tant que Hutu
s'opposaient à l'élimination de leurs frères
Tutsi. C'était un génocide préparé à
l'avance par le gouvernement rwandais lui
même, soutenu par des puissances
étrangères, notamment la France et,
connu du monde entier. Il aurait pu être
prévenu avant qu'il ne se passe, il aurait pu
être arrêté pendant qu'il se passait, mais le
monde a fermé les yeux et laissé faire.
Pourtant il y a la fameuse convention de
Genève de 1948 qui oblige les nations à
intervenir là où un génocide se produit. Au
Rwanda il s'est produit à cause de la
lâcheté des uns, le cynisme ou l'ignorance
des autres. Ce n'est point une excuse. Tôt
où tard le monde devra répondre de sa
responsabilité. Si ce n'est envers les quelques rescapés du génocide, au moins
devra t-on dire aux générations à venir
comment on a laissé faire!
Juste après le génocide, chaque survivante
se croit la seule à avoir survécu. Et puis
finalement, miracle, tu rencontres une amie
qui a aussi survécu. Et puis une autre. Et
vous commencez à parler. Parler, parler
sans fin. Chacune croyait son histoire la plus
terrible mais tu découvres qu’il y a pire.
Nous nous retrouvons dans un vide affectif
terrible. Mari, enfants, parents, frères et
soeurs, cousins et cousines, oncles et tantes,
ils ne sont plus. Tu te retrouves là comme un
arbre qui n'a plus aucune branche. La
première réaction n'est pas vraiment: Oh
quelle chance nous avons survécu, mais
plutôt nous sommes condamnées à vivre.
Vivre sans eux! Vivre malgré tout. Mais qui
suis-je maintenant? Qui est là pour
m'écouter, me soutenir, me consoler?
Personne. Si quand même, il y a ton amie,
veuve aussi. Elle peut te consoler. Elle peut
t'écouter et vice versa! Ainsi naît AVEGA
(Association des Veuves du Génocide
d'Avril/Agahozo)
Agahozo, c'est le mot en kinyarwanda qui
signifie une sorte de berceuse, de poème
pour essuyer les larmes.
Ce million de mort, finalement on ne le voit
pas. Ils gisent dans les latrines et les puits
perdus, les fleuves les ont charriés. Que
reste-il pour rappeler qu'ils ont existé? Il y a
un proverbe en kinyarwanda qui dit que:
„Ntabapfira gushira“ qui signifie on n'extermine pas un peuple. Et oui, même dans
le pire des génocides, il y a eu des
survivants. Il y a eu des veuves et des
orphelins. Qui sont-ils? Où et comment
vivent ils?
Mais il n y a pas que seulement essuyer les
larmes, en fait nous nous retrouvons
démunies de tout: les maisons ont été
détruites en même temps qu'on tuait les
nôtres. Tout a été pillé. Les vaches ont été
mangées. Tu te retrouves dans un vide
économique total. Tu n'as pas un lieu matériel, une chambre, une porte que tu peux
fermer, un lit sur lequel t'allonger et pleurer
sur ta misère. Ceci est aussi un défi énorme
auquel Avega va s'attaquer, reconstruire
presque tout à partir de rien.
La plupart des rescapées ont survécu
parce que leurs bourreaux les ont laissé
pour mortes au milieu des cadavres. Elles
ont des coupures atroces au niveau du cou,
La contribution décrit brièvement les défis
d'une organisation de veuves du génocide
des Tutsi qui se sont mis ensemble dès la fin
du génocide pour ne pas devenir folles
après l'épouvante, pour survivre, et finalement pourquoi pas pour Vivre vraiment,
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Girls and women – their suffering and potential
Des filles et femmes – leurs souffrances et potentialités
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de la tête, des membres etc. Petit à petit
nous allons découvrir aussi une autre tragédie: En fait si les femmes ont survécu plus
que les hommes, elles étaient gardées en
vie uniquement parce qu'elles servaient
d'esclaves sexuelles. Pendant les trois mois,
plus des 80% des survivantes furent violées
chaque jour par des bandes de tueurs. Et
finalement elles s’aperçoivent qu'elles ont
été infectées HIV positives.
des massacres cycliques, les tueurs sont
toujours restés impunis.
Les actions d'AVEGA face à ces
défis
Malgré l'énormité des problèmes à attaquer, Avega se mobilise.
Nous commençons par le plus important:
Appartenir, être encore quelqu'un, donner
un sens nouveau à la vie. Mais pour cela on
doit faire beaucoup de visites, rencontrer
d'autres veuves partout dans le pays. Et
finalement le plus grand défi est celui
d'accepter que nous sommes vivantes,
vivantes et pas seulement survivantes.
Aujourd'hui AVEGA a plus de 35.000 membres partout dans le pays. Ce sont des
soeurs. C'est devenu une grande famille.
On se soutient mutuellement dans le
malheur et dans le bonheur. Ensemble on
est forte. Avega est devenu une
organisation incontournable pour les questions des femmes. On a lancé le défi que
même veuves, on valait la peine. Ceci a eu
un impact au delà de ce que nous
pensions. Ca a contribué à changer le rôle/
l'image de la femme dans la société
rwandaise.
Maintenant
en
politique
comme en économie, on voit la femme
partout. La loi de la famille a changé. La
femme a le droit d'hériter au même titre
que ses frères...
La question de la santé physique devient
donc une priorité. Nous enrageons. Nous
nous disons: A quoi ça sert d'avoir survécu
au génocide si c'est pour mourir plus tard
du SIDA ou des blessures? Mais ce n'est pas
la santé physique seulement, c'est aussi la
santé mentale. Les personnes survivantes
ont subi, vu, senti, entendu ce qui dépasse
l'entendement d'un être humain. En plus les
dernières images des nôtres sont atroces.
Nous ne les avons pas enterrés. La folie
nous guette. Il est impératif de pouvoir sortir
cela de nos ventres et nos têtes. Mettre en
place un programme de guérison intérieur
est plus que urgent.
Mais le contexte social environnant ne nous
y aide pas non plus. Les bourreaux sont
parmi nous. Ceux qui ont tué, nous les connaissons. Ce sont nos voisins, paysans,
instituteurs, médecins, hommes, femmes et
enfants. Il est très difficile de faire encore
confiance en qui que ce soit. Sur les
collines, règne une méfiance totale. Il est
important que la justice soit faite. Il n y a
pas d'oubli, pas de deuil, pas de pardon
sans justice. Depuis 1959, depuis le début
Avec cette force nouvelle de réappartenir,
d'avoir encore le droit de vivre, il a fallu
mettre en place des programmes divers:
Un programme psychosocial qui s'occupe
de tout ce qui est santé mentale et
physique ainsi que de l'assistance sociale
aux plus vulnérables.
Un programme de développement qui
s'occupe de reconstruction des maisons
mais aussi des projets générateurs de
revenu qui permettent aux femmes de
prendre en charge les nombreux enfants
dont elles ont la charge actuellement.
Un programme d'advocacy et justice qui
s'occupe de faire connaître au pays et en
dehors les conséquences du génocide et
la nécessité d'intervenir aujourd'hui de
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11.30-13.00h, 15.00-16.30h
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Girls and women – their suffering and potential
Des filles et femmes – leurs souffrances et potentialités
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même que la nécessité de faire cesser
toute impunité si on veut que le plus jamais
ne soit plus que un slogan!
Esther Mujawayo, Auteur, sociologue et
psychothérapeute, rescapée du génocide
de 1994 durant lequel presque toute sa
famille a été anéantie, à l'exception de ses
trois filles, ses deux soeurs et d'une bellesœur. Esther Mujawayo est coauteur, avec
Souâd Belhaddad, de l'ouvrage SurVivantes. Dans ce livre-témoignage, elle
retrace son parcours, de sa naissance sur
une colline rwandaise à sa vie actuelle en
Allemagne, et tente de restituer l'effroyable
blessure du génocide afin de vaincre le
terrible sentiment d’ « 'être en tort d'exister ».
Dès juillet 1994, elle a cofondé une association de veuves, 'Avega - Agahozo' (Association des Veuves du Génocide d’Avril/
Agahozo) qui tente d'apporter une aide
aux femmes rescapées, notamment celles,
nombreuses, qui ont subi des viols et
souffrent aujourd'hui du SIDA.
Sociologue et psychothérapeute dans un
centre psychologique pour réfugiés à
Düsseldorf, elle poursuit sa mission de thérapeute spécialisée dans les traumatismes
psychiques d'après génocide.
Bibliographie:
Esther Mujawayo et Souâd Belhaddad :
SurVivantes - Rwanda - Histoire d’un
génocide, L’aube, 2004, en allemand : Ein
Leben mehr. Wuppertal 2005.
La Fleur de Stéphanie, Rwanda entre
réconciliation et déni, Flammarion 2006, en
allemand : Auf der Suche nach Stéphanie.
Wuppertal 2007.
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11.30-13.00h, 15.00-16.30h
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Un long trajet pour un éveil conciliant
Marie Aimable Umurerwa
La Tristesse étant à côté, l'Amour lui
demanda : "Tristesse, laisse-moi venir avec
toi."
"Ooh... Amour, je suis tellement triste que j'ai
besoin d'être seule !"
Introduction
Le Bonheur passa aussi à coté de l'Amour,
mais il était si heureux qu'il n'entendit même
pas l'Amour l'appeler !
Soudain, une voix dit : "Viens Amour, je te
prends avec moi." C'était un vieillard qui
avait parlé.
L'Amour se sentit si reconnaissant et plein
de joie qu'il en oublia de demander son
nom au vieillard. Lorsqu'ils arrivèrent sur la
terre ferme; le vieillard s'en alla.
L'Amour réalisa combien il lui devait et
demanda au Savoir
"Qui m'a aidé ?"
"C'était le Temps" répondit le Savoir.
"Le Temps ?" s'interrogea l'Amour.
"Mais pourquoi le Temps m'a-t-il aidé ?"
Le Savoir, sourit plein de sagesse, et
répondit :
"C'est parce que seul le Temps est capable
de comprendre combien l'Amour est
important dans la Vie."
Avant de vous exposer mon point de vue
sur la question qui nous rassemble (« Pas
d’avenir sans le passé »), je souhaiterais
avant tout - en guise d’introduction vous
faire part de ma façon d’aborder le sujet.
C’est la meilleure façon, selon moi, d’essayer de concilier ces deux passages et de
tenter un bel accord dans le tableau représentant mes aventures et mes mésaventures dans la région des grands lacs
pendant ces dernières années de guerre.
J’aimerais vous présenter un petit texte qui
mérite toute votre attention et qui résume
l’idée que je voudrais faire passer. Je vous
invite à le décortiquer avec moi.
« Il était une fois, une île où tous les différents sentiments vivaient :
le Bonheur, la Tristesse, le Savoir, ainsi que
tous les autres, l'Amour y compris.
Un jour on annonça aux sentiments que l'île
allait couler.
Ils préparèrent donc tous leurs bateaux et
partirent.
Seul l'Amour resta. L'Amour voulait rester
jusqu'au dernier moment. Quand l'île fut sur
le point de sombrer, l'Amour décida
d'appeler àl'aide.
La Richesse passait à côté de l'Amour dans
un luxueux bateau.
L'Amour lui dit : "Richesse, peux-tu m'emmener?"
"Non car il y a beaucoup d'argent et d'or
sur mon bateau. Je n'ai pas de place pour
toi."
L'Amour décida alors de demander à
l'Orgueil, qui passait aussi dans un
magnifique vaisseau : "Orgueil, aide-moi je
t'en prie !"
"Je ne puis t'aider, Amour. Tu es tout mouillé
et tu pourrais endommager mon bateau."
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Comme a dit Lupasco :"(...) il n'est pas
d'élément, d'événement, de point quelconque au monde qui soit indépendant,
qui ne soit dans un rapport quelconque de
liaison ou de rupture avec un autre
élément ou événement ou point, du
moment qu'il y a plus d'un élément ou
événement ou point dans le monde (ne
serait-ce que pour notre représentation ou
notre intellect)." « Tout est ainsi lié dans le
monde... si le monde, bien entendu, est
logique... » 2 La physique et les mathématiques sont des sciences utilisées pour
mesurer la nature.
Voilà, ce texte me parle de trois éléments
majeurs : l’amour, le temps et la vie.
Sans trop vouloir m’étaler sur mon parcours,
je voudrais vous dire que seuls ces sentiments m’ont vraiment soutenue aux pires
moments de ma vie. Ayant tout perdu,
mon pays, ma famille, mes amis et tout ce
qui fait du bien au quotidien de chaque
personne, je ne disposais plus que des jours
qui couraient, du soleil qui brillait au matin
et qui se couchait au soir. Je n’avais plus
rien d’autre que le temps qui passait.
J’existais dans le temps, seul capable de
délier les énigmes de la vie et seul capable
de les contenir. J’existais et je voulais
continuer à vivre. J’existais et j’avais encore
l’amour en moi, l’amour pour mes
compagnons de route : mes enfants et
mon mari. Je me suis accrochée au temps
tout le temps qu’il a fallu pour que la
tempête se calme. Cette volonté de
garder ce que j’avais construit et qui
m’était très précieux, m’a ouvert les yeux et
j’ai vu. J’ai vu que mon couple avait passé
au delà des choix politiques de mon pays....
« Et ceux qui préparent le génocide des
Tutsi ne peuvent pas accepter qu’un
homme hutu, dans ce petit Rwanda, puisse
aimer une femme tutsi. »1
Nous, les humains, faisons partie de cette
nature et, en dehors de notre taille et poids,
notre mesure principale, ce sont nos émotions, notre sensibilité. Ce sont elles qui vont
nous gérer à travers notre vie car elles
dépendent de notre éducation, de notre
environnement. Deux personnes vivant un
même événement ne réagiront pas de la
même manière vu que nous sommes
différents selon notre histoire. Ce concept
est transgénérationnel. Par exemple : je ne
serais pas moi si je n’avais pas eu les
parents que j’ai eus et mes enfants ne
seraient pas eux si je n’avais pas été un de
leurs parents. Ceci pour souligner que la
paix dont nous avons tant besoin dans
notre région des grands lacs, dépend
fortement de ce que nous avons vécu
d’une part, de la façon dont nous avons
réagi pour faire face et de comment nous
le transmettons à nos enfants.
J’ai réalisé que notre choix allait à contre
courant de celui imposé par ma société.
Un choix plutôt marginal mais qui nous
rendait tellement libres en nous mêmes.
Réussir la traversée sans être dans la
mouvance reconnue et acceptée demandait beaucoup de confiance et d’amour
en soi. Pendant tous ces moments de
galère, de souffrance et de pleurs, quelque
chose qui semble l’expression d’une force
émanant d’un profond amour en la vie me
poussait à chercher à me situer, à me
découvrir, à m’affirmer et à être plus forte
dans la quête de cette liberté. C’est cela
que j’appelle « l’éveil ». Ce sentiment de
me sentir libre d’aimer m’a permis de
construire le pont entre le qui je suis
psychologiquement, et le où j’allais. Il fallait
concilier ces deux passages pour parvenir
à se maintenir et retrouver la paix intérieure.
Les psychologues vont nous parler de la
reproduction (l’histoire se répète) mais nous
avons encore en nous cette force pour dire
STOP et faire un autre choix qui conduise
vers la recherche de la paix. L’important
étant de garder et d’améliorer nos
richesses intérieures qui sont immenses et
qui attendent d’être sollicitées pour notre
évolution. Nous avons la chance aujourd’hui d’avoir le temps de penser, de
réagir et de grandir. C’est dans ce très
grand espace que j’appelle « disponibilité
intérieure » que nous pouvons œuvrer pour
tout et particulièrement pour la paix. Je re2 Stéphane Lupasco, Le principe d'antagonisme et la
logique de l'énergie - Prolégomènes à une science de
la contradiction, p.70.
Umurerwa M.A. Comme la langue entre les dents,
l’Harmattan, Paris 2000
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joins le penseur allemand Goethe qui a
écrit : « Mein Erbteil wie herrlich, weit und
breit! Die Zeit ist mein Besitz, mein Acker ist
die Zeit.
Ce qui veut dire selon moi : Ma propriété
c’est mon champ et mon champ c’est le
temps que j’ai reçu en héritage et il est
généreusement vaste.
Au terme de ces années d’études, j’ai produit un travail de fin d’études : le mémoire
et mon sujet porte sur la problématique
d’insertion des jeunes belges issus de
l’immigration en provenance de la Région
des Grands Lacs intitulé: « Expérience d’insertion des jeunes belges issus de l’immigration de la région des Grands Lacs
africains ».
Voilà, rien ne sert de ruminer le passé. Par
contre, il est très important d’interroger le
passé pour vivre le présent et l’avenir.
En 2008 les jeunes qui ont participé aux ateliers organisés pour répondre à la question
de mon mémoire, ont manifesté la nécessité d’un lieu de rencontre pour échanger
et affronter ensemble la réalité de la vie
d’un exilé pour appuyer leur insertion
scolaire ou professionnelle. Nous avons
pensé à la création d’une association
« Amabilis » qui sera opérationnelle dans les
débuts 2009.
Marie Aimable Umurerwa, mariée et mère
de 4 enfants.
Réfugiée politique en Belgique. Assistante
sociale de formation, j’ai travaillé pendant
15 ans dans un centre de rééducation pour
handicapés physiques à Gatagara au
Rwanda et deux ans au Centre scout à
Kigali. Ces années là m’ont permis de comprendre combien l’handicap physique ou
moral est un frein à l’évolution de la
personne, et qu’il faut toujours essayer les
voies pour s’en sortir. J’ai pris goût à tout
ce qui a trait à l’associatif : « l’union fait la
force » J’ai donc : une attirance pour le
milieu associatif, les ONG, le secteur
humanitaire, un intérêt pour la coopération
au développement, les questions migratoires, un attrait pour l’insertion sociale, la
médiation culturelle.
En 1996, j’ai atterrie en Belgique et je n’ai
pas bien vécu l’exile. Je ne savais pas
encore le rôle des psychologues, j’ai
cherché par moi même comment sortir le
trop plein que j’avais dans la tête et j’ai
écrit : Comme la langue entre les dents :
fratricide et piège identitaire au Rwanda,
l’Harmattan, Paris 2000.
En 2002, j’ai été engagée comme ouvrière
dans un Complexe sportif à Louvain La
Neuve. J’ai été frustrée de me voir réduite
à une simple nettoyeuse de 2 grands
bassins d’eau et en 2004, j’ai repris les
études. Je termine cette année une
licence en Sciences Politiques Economiques et Sociales.
En 2007, j’ai mis sur papier ma déception et
mes cris de revanche sur l’emploi en
écrivant: Je courrai moi aussi pour le train,
Je Publie, décembre 2008.
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Minutes of the Workshop
David Bodensohn
(Tanzania) so that the rapes would be
considered as war crimes and succeeded
with that. Seeing the perpetrators being
sentenced gave back a little bit of selfesteem to the women, but did not heal
their wounds. The actual situation for women in the Rwandan society being in the
majority brought new rights, laws and
responsibilities. This gave the speaker the
motivation “to get up and make the best
out of it now!” She underlined the complex
situation of living together, victims with
perpetrators, families divided – but they live
together every day and they are obliged to
do so. And it is possible and a must to
create a new together.
The moderation of the session was done by
Ms Liberate Nicayenzi, founder of UNIPROBA, and member of the parliament in
Burundi.
The First Speech was „Après le mal absolu –
création de l’avenir“
"After the absolute evil –creating a new
future" By Esther Mujawayo, Social Scientist,
Psychological therapist, one of the founders
of AVEGA – Agahozo.
Agahozo is Kinyarwanda which means
weeping.
She explained to us the situation of the
women who survived the genocide. How
they felt the need to tell their stories but
most of their relatives whom they would
have wanted to tell their experiences
where murdered during the genocide. The
many widows organised through AVEGA to
spread and share their experiences. And
there are as well Tutsi-women as Hutuwomen who are widows from war and
genocide.
She then described one incident, where
she wanted to go to the house of her
parents and was not able to recognise
even the hill where the house used to be,
because the very path leading to the
house was destroyed. From experiencing
this came the will to rebuild the country
and the society for the survivors and the
following generations.
Because
many
people
long
time
neighbours and “friends” did not stand up
against the systematic killings, the survivors
lacked the trust in people they thought
they knew before, because it was hard to
make out who was on whose side during
the genocide. She pointed out the
systematic rapes that not only made it
even worse for nearly 80 percent of the
women because of the shame they felt,
but also because HIV was spread widely
amongst the victims.
The AVEGA association went to the
International Criminal Tribunal in Arusha
After the presentation, she was asked
about the progress of AIDS-prevention and
-education and if the “normal” woman on
the countryside could get support. Ms
Mujawayo told us that even though the
problems are still huge and will last for
many years still, a lot of positive progress is
noticeable. Regional clinics are now able
to help infected people to deal with HIV,
the medicine is easier to get compared to
2003 and the most important thing AIDS is
not a taboo subject to talk about anymore.
The second speech was held by MarieAimable Umurerwa “Un long trajet pour un
éveil conciliant” – “A long way for an
awakening conciliable”. She shared a lot of
personal experiences with us to show the
tragedy a refugee has to deal with. She, as
a Tutsi married to a Hutu had wanted to
totally stay out of the conflict between the
two parties, because she already had her
own fight for her own world that she wanted to create for her beloved ones and
herself. She stated that she never belonged
to anyone except for herself, even though
she recognised that, due to the fact
ethnicity plays a major role in her societal
roots, she can’t exclude herself from that.
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She then quoted a poem to say life without
love has no value.
She came to that conclusion by writing the
book “Like a tongue between the teeth”
for her children to have something to
identify with. She decided to attend
university after she had gone through a
period of anger and questioning herself to
give her life a new direction.
From seeing that a lot of children were not
succeeding at school in Belgium, she was
motivated to form a group of exiled young
people from the Great Lakes Region to
research where the problems came from.
This research came to the conclusion that
the children needed anchors in their lives to
identify with, that their parents were not
able to be because they were carrying
their burdens from their troubled past.
Through the research the children of her
group freed themselves and were able to
also help their parents to live again.
After that, the experiences of the surviving
women in Rwanda, Burundi and Congo
were compared to the experiences of the
German-Kriegskinder. The complexity of the
Rwandan society was pointed out through
the three ethnic groups, but a lot of families
are composed of members of Hutu and
Tutsi, the interlinkages between relatives
with quite different pasts (sometimes victims
and perpetrators in one family), several
immigrating and emigrating processes of a
quite large portion of society.
The two speakers and the moderator
agreed on building up a worthy society for
their children and grand-children by setting
an example of multi-ethnicism, sharing of
skills and knowledge drawn from the
experiences.
Liberate Nicayenzi also shared some
experiences with the group. All the three
speakers promoted the idea of not getting
rid of ethnicity but stepping back from
focusing too much on it, because the
identity of an individual is a combination of
plenty of different identities and ethnicity is
only a small part. The most important is to
support young people to find their own
ways and to change history into a better
future, if not a better present.
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Les jeunes de la Région des Grands Lacs – construction des relations sociales
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Les jeunes de la Région des Grands Lacs – construction
des relations sociales
Visions des jeunes pour l’avenir – Résultats des réflexions des étudiants
d’Imbuto et de l’AEPCSM
AEPCSM – Association des étudiants en psychologie clinique et pour la santé
mentale, UNR – Rwanda & Imbuto asbl – Bernard Niyomugabo
Le rôle des jeunes de la Région des Grands Lacs dans la résolution des conflits
- Cas de la Maison des Jeunes de Kimisagara et de son projet Heza, émission
radiophonique et journal pour la paix
Andreas Wagner, Pascal Mwema, DED/ ZFD, GTZ, Rwanda
Modération : Jean-Louis Bisangwa et Andrea Pabst, Imbuto
Rapporteurs:
Denyse Amahirwe et Evalde Nteziryayo, AEPCSM, Xavérine Niwemutoni, Imbuto
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Youth in the Great Lakes Region – For Social cohesion
Les jeunes de la Région des Grands Lacs – construction des relations sociales
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Cadre de l'atelier
fication de ces représentations. Les
réponses données étaient proches de la
réalité.
La première sculpture montre la situation
actuelle des jeunes : une jeunesse désorientée, dans le désarroi, sans savoir où
aller, traumatisée et souffrante, divisée,
sans confiance en elle, exposée à de nombreuses difficultés. La seconde statue montre une jeunesse forte, unie et solidaire et
capable d’affronter l’avenir.
Introduction
Les séances furent préparées en avance et
évaluées durant un séminaire à Frankfurt et
après la conférence à Fronhausen et à
Berlin par un groupe d’étudiants représentant les deux associations Imbuto et
AEPCSM: Eva Anderson, Denyse Amahirwe,
Jean-Louis Bisangwa, Anne-Gisèle Nimbona,
Xavérine Niwemutoni, Bernard Niyomugabo Rubangura, Marie-Reine Nizeyimana,
Evalde Nteziryayo, Veronika Ott, Andrea
Pabst, Sang-Min Park, Jasmin Scholle,
Jeanne d’Arc Uwimbabazi. Ce séminaire
fut animé par Ananie Bizimana, Fra Zeller et
Hildegard Schürings (voir documentation
« Visions des jeunes pour l’avenir »,
Fronhausen Octobre 2008).
Avant de faire les commentaires et un
débat sur les sculptures, le modérateur a
invité Bernard Niyomugabo de l’AEPCSM
de faire son exposé sur la situation des
jeunes, développé au cours du séminaire.
Bernard a fait d’abord une brève présentation de l’Association AEPCSM (Association des Etudiants en Psychologie Clinique
et pour la Promotion de la Santé Mentale).
Celle-ci a été crée en 2002 au sein de
l’Université Nationale du Rwanda pour
répondre aux problèmes psychosociaux
conséquences du génocide des Tutsi de
1994. En collaboration avec d’autres
associations ayant la santé mentale dans
leurs attributions, l’AEPCSM intervient
pendant la période de commémoration et
de deuil national en avril de chaque année
en aidant les personnes en crises
traumatiques (PTSD – Post-traumatic Stress
Disorder) dues à la reviviscence des
situations traumatisantes vécues. Cette
intervention psychologique en cas d’urgence contribue grandement à la préparation d’un avenir meilleur car la majorité
des personnes touchées par le traumatisme
et la rétraumatisation sont des jeunes
(élèves et étudiants).
L’atelier était divisé en deux parties : une
partie qui a été présentée par les étudiants
d’Imbuto-AEPCSM et une autre par les
représentants de la maison des Jeunes de
Kimisagara. La séance a débuté vers la fin
de la matinée par une introduction faite
par la modératrice Andrea Pabst en disant
que les jeunes sont très intéressés à
développer de nouvelles perspectives pour
une paix durable dans la Région des
Grands Lacs en Afrique centrale. Elle a
ensuite invité les participants à donner leur
contribution pour la construction de l’avenir
de nos sociétés qui ont été déchirées par
les conflits de toutes sortes.
Le modérateur Jean-Louis Bisangwa a invité
les étudiants d’Imbuto et de l’AEPCSM à
présenter les résultats du séminaire,
organisé auparavant. Les jeunes ont
d’abord fait une présentation artistique sur
le sujet : « visions des jeunes pour l’avenir».
La présentation a été faite sous forme de
statues des jeunes, sculptées par d’autres
jeunes. Ensuite, Jean-Louis Bisangwa a
demandé au public de déchiffrer la signi-
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Workshop – Atelier
Youth in the Great Lakes Region – For Social cohesion
Les jeunes de la Région des Grands Lacs – construction des relations sociales
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Visions des jeunes pour l’avenir –
Résultats des réflexions des étudiants d’Imbuto et de l’AEPCSM
Bernard Niyomugabo
Depuis plusieurs décennies la région des
Grands Lacs d’Afrique a été marquée par
plusieurs événements tragiques ayant des
effets négatifs sur la population et les
jeunes en particulier. Malgré que la majorité de la population dans cette région est
jeune (par exemple au Rwanda les jeunes
c'est-à-dire entre 0 et 25 ans d’âge
représentent 67% de la population générale), cette jeunesse reste une force qui
n’est pas assez exploitée. Ceci s’explique
entre autre par l’histoire qui est caractérisée par les conflits politiques et les
violences dans cette région. Suite au mauvais leaderships, les jeunes ont été manipulés et ils sont devenus auteurs dans les
violences. Ainsi, ils ont été victimes de
situations suivantes :
1) De l’inégalité sociale et de l’injustice : ce ci s’explique par la
ségrégation ethnique, par le régionalisme.
2) Du manque d’information et de
formation professionnelle. C’est dû
par exemple à l’analphabétisme,
au manque de scolarisation et l’insuffisance d’accès à l’information
et la documentation.
3) Des maladies sexuellement transmissibles comme le VIH/SIDA qui
posent souvent un problème de
stigmatisation et de pauvreté.
Ensuite à cause des vécus différents des
jeunes, il y a souvent une insuffisance d’échanges d’expérience et de coopération
(les jeunes s’identifient suivant leur vécu
historique et leurs pays de naissance). En
effet, en faisant une réflexion sur la situation
que traversent les jeunes, on trouve qu’ils
sont désorientés. Ne faut-il pas chercher
des solutions à ces problèmes, vu la
précarité de la situation et le besoin manifeste de changement rapide ? Pour une
région qui a été déchirée par les conflits et
ses conséquences ; l’éducation serait une
des bases fondamentales pour un progrès
positif allant vers une jeunesse unie, forte et
capable.
Premièrement, il serait judicieux d’enseigner
la culture de la paix aux jeunes. Les parents
ainsi que les instances éducatives devraient
transmettre un discours positif œuvrant vers
une cohésion sociale et ethnique qui condamne les idées divisionnistes, qui à la
longue sont érosives à la stabilité de la
région. Une compréhension de l’histoire de
la Région des Grands Lacs d’Afrique aussi
bien que de l’origine des conflits par les
jeunes, serait un bastion de défense fort et
durable contre les idéologies extrémistes.
Cependant, l’éducation n’est pas le seul
secteur où l’on a besoin de changement
important. La région des Grands Lacs a
besoin de mettre plus de force dans le
domaine de la justice en protégeant les
droits de la personne. Jusqu’à présent,
certaines personnes jouissent d’une grande
impunité judiciaire qu’il faut éradiquer. Seul
un système judiciaire transparent pourrait
permettre une unité et réconciliation dans
la Région des Grands Lacs.
La culture de la violence au Rwanda causée par les conflits politiques et qui a
débouché sur le génocide, a entraîné les
jeunes à manquer de repères et de références avec plusieurs conséquences :
4) Manque de confiance en soi et
entre les jeunes eux-mêmes ;
5) Difficulté de mener des bonnes relations sociales ou de créer des amitiés ;
6) Traumatismes psychologiques et
physiques que l’on trouve chez la
plupart des orphelins et des rescapés du génocide.
L’insertion professionnelle des jeunes est un
impératif à la résolution du problème socioéconomique car bon nombre de jeunes
souffrent du manque d’emploi. Ainsi les
bonnes relations sociales, la création de
l’emploi et des associations s’avèrent être
une prérogative à un développement
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Les jeunes de la Région des Grands Lacs – construction des relations sociales
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économique donnant au jeunes un pouvoir
de décision, le pouvoir d’entreprendre et,
finalement, un pouvoir politique conséquent. Actuellement, les jeunes ont une
vision positive de leur avenir, quitter une
situation difficile où ils sont désorientés, vers
un futur meilleur où ils sont ensemble forts et
capables. Pour aboutir à cette vision voici
les opportunités et certaines de nos
initiatives :
commémoration du génocide entre avril et
juillet. Le groupe le plus touché étant celui
des
filles
adolescentes
des
écoles
secondaires.
L’AEPCSM
essaye
d’accompagner ces jeunes par l’approche
des counselling (conseil psychologique),
guidance (orientation psychologique et
scolaire) pour sortir de leurs souffrances
psychologiques etc.
L’AEPCSM entretien un partenariat avec
l’Association Imbuto dans l’échange
d’expériences et d’information en matière
de résolution de conflits et de la culture
d’une paix durable. Imbuto a permis à
l’AEPCSM l’ouverture de ses horizons à rencontrer d’autres institutions d’Europe
travaillant sur les problèmes psychosociaux
(un rapport spécifique à ce programme est
disponible).
1. Quelques opportunités qui nous donne la
force :
• Le conseil National de la Jeunesse a
été créé et décentralisé jusqu’au
niveau de la cellule (entité administrative de base)
• Rencontre de jeunes dans des
camps de solidarité « ingando »
avant d’entrer dans l’enseignement
supérieur. Ceci renforce les liens
sociaux entre les jeunes, leur donne
l’orientation sur la politique d’unité
et de réconciliation et les prépare à
la vie communautaire
• Emissions des jeunes des Grands
Lacs à la radio Salus de l’UNR qui
établit un réseau d’échange entre
les jeunes du Burundi, de la RDC et
du Rwanda et qui passe simultanément à la radio Isanganiro du
Burundi, Radio 10 du Rwanda et
Maendeleo de Bukavu en RDC
• Des Associations et mouvements de
jeunes tels que l’Association des
Etudiants en Psychologie Clinique et
pour la Promotion de la Santé
Mentale (AEPCSM) ;
• Student Club for Unit and Reconciliation (SCUR) oeuvrant au niveau
des Universités, Institut Supérieur et
Ecoles Secondaires etc.
• Des
associations
des
jeunes
oeuvrant pour une culture de la
paix par l’éducation à la paix, la
tolérance,
contre
le
racisme
comme Imbuto asbl en Europe.
Défis :
Le manque de moyens (temps, l’argent, le
personnel etc.) handicape les projets. Bien
sûr, le problème de la région est beaucoup
plus complexe. Les différentes solutions que
l’on préconise pourraient paraître typiques
d’un pays africain en voie de développement. Cependant, il est toujours
nécessaire d’appuyer et d’insister sur :
l’obligation d’éduquer notre jeunesse ; le
manque de justice et, l’endémie de la
pauvreté économique car tels sont nos
problèmes les plus urgents.
2. Les initiatives
Malgré les dernières quatorze années
passées depuis le génocide, les expériences de l’AEPCSM dans ses interventions
psychologiques montrent que les traumatismes
psychologiques
s’augmentent,
chaque année pendant la période de
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Le rôle des jeunes de la Région des Grands Lacs
dans la résolution des conflits - Cas de la Maison des
Jeunes de Kimisagara et de son projet Heza,
émission radiophonique et journal pour la paix
Pascal Mwema et Andreas Wagner
Pour ce qui nous concerne, notre travail
avec les jeunes nous a appris que l’éducation devrait veiller à la promotion du
savoir, des attitudes et des connaissances
pratiques qui pourront aider les jeunes à se
forger eux-mêmes leurs propres jugements
et à jouer un rôle actif dans la société. Ceci
exige d’abord un changement d’attitudes
et de comportements qui n’est pas un
résultat immédiat d’une simple transmission
d’un savoir personnel, social et même des
compétences spécifiques en matière de
gestion des conflits. C’est un travail
d’apprentissage de longue haleine qui
exige patience et suivi continuel surtout
qu’il y a d’autres facteurs internes et
externes à notre travail qui affectent le
processus d’apprentissage au point de le
rendre rapide ou lent.
L’éducation des jeunes est
inévitable
La jeunesse et l’éducation font partie de
principales ressources que dispose une
société pour son investissement dans le
futur. En fait, les jeunes sont les moteurs du
développement et l’éducation a été
considérée à travers les âges comme un
outil et du développement individuel et de
la transformation de la société 1 . Ceci est
d’autant plus important que les jeunes
s’imposent sur le plan démographique
comme la majeure partie de la
population. 2 Ainsi, l’amélioration de leurs
conditions socio-économiques constitue un
indicateur du développement social. Par
conséquent, le développement de leur
potentiel n’est possible que si la société
promeut et appuie une coexistence
pacifique.
La Maison des Jeunes, un centre
pour la culture de la paix
Neuf ans après le génocide (2003), la
Maison des Jeunes a été créé dans la ville
de Kigali afin d’offrir aux jeunes un cadre
approprié pour leur éducation, leur
expression, leurs initiatives en matière de
culture de la paix et de la résolution des
conflits3. Ceci se justifie par le fait que non
seulement les jeunes ont été entraînés dans
le conflit rwandais en qualité de bourreaux
ou d’observateurs passifs mais aussi parce
qu’ils ont été des victimes de ce conflit 4 .
1 GTZ, Peace-Building, Crisis Prevention and conflict
management. Technical cooperation in the context of
crisis, conflict and disasters, Eschborn 2002, p.67
2 Le 3ème Recensement général de la population et de
l’Habitat du Rwanda (Août 2002) fait état de la forte
jeunesse de la population du Rwanda car 67% de la
population sont âgés de moins de 25 ans quand 44 %
ont moins de 15 ans et 30% n’atteignent pas encore
10 ans (p.11).
3 Republic of Rwanda, Kigali International Youth
Conference. Youth Empowerment Peace Building and
Development, final report, Kigali, 1999, p.14 et
Carrefour Jeunesse, La jeunesse africaine a l’avenir
devant elle, Kigali 2000, p.6.
4 Dans son article “Résultats définitifs de l’enquête
quantitatives sur les attitudes des Rwandais vis-à-vis
des juridictions gacaca“ in Cahiers du Centre de
Gestion des Conflits nº6, Editions de l’UNR, Butare 2002,
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Plus encore, leur flexibilité, leur adaptabilité,
leur sociabilité, leur enthousiasme et leurs
aspirations font de ces jeunes des acteurs
importants pour un développement durable et pacifique du Rwanda et de la
Région. Bref, la création de ce centre répondait à un unique objectif : faire des
jeunes des agents et des promoteurs de la
paix.
Depuis sa création, la Maison des Jeunes a
été successivement orienté vers :
• La promotion de l’emploi et des
projets générateurs de revenu ;
• La promotion de la démocratisation
avec plus d’emphase sur les projets
d’éducation aux droits humains et
les projets de promotion de l’unité
et de la réconciliation.
• Depuis 2007, le centre pose petit à
petit mais sûrement les bases d’un
centre national et régional de
culture de la paix et de la résolution
des conflits.
Au bout de cinq d’existence, le centre
possède 33 associations et clubs repartis
généralement autour de quatre importants
domaines : le sport, la culture et les arts, la
paix, la santé de reproduction et la lutte
contre la drogue.
En ce qui concerne les activités, hormis
celles liées à la promotion du sport, de la
culture et des arts, on peut citer : Les
journées citoyennes avec le débat pour
méthode, le football pour la paix fondé sur
les règles de résolution pacifique des
conflits sur le terrain de sport, l’éducation
par le cinéma, des arts martiaux
d’intervention5, le festival Amani6, l’expression journalistique des jeunes sur les enjeux
de la paix avec le projet Heza, les
formations en résolution des conflits, en
droits humains, les rencontres d’échange
régional, les célébrations des journées
internationales et un programme habituel
de renforcement des capacités des
associations (le leadership, la gestion
organisationnelle et institutionnelle des
associations) afin le développement une
pédagogie de l’action et du leadership. En
ce moment même, la méthode du débat
est utilisée dans la sensibilisation des jeunes
à la participation citoyenne au centre et
dans 144 écoles secondaires de Kigali, de
Rwamagana et de Nyamagabe.
Toutes ces activités aux approches
innovatrices exercent un important attrait
chez les jeunes au centre et dans les écoles
cibles. Du lundi au samedi, le centre vibre
et les initiatives ne cessent de fleurir. Pour
information, ce centre est parmi l’un des
rares centres des jeunes du pays qui
dispose des infrastructures physiques et
matérielles modernes en plus de ressources
humaines qualifiées et engagées.
Quelques constats
¾ Que le conflit au Rwanda ait conduit en
1994 à l’innommable et qu’il ait engendré
des conséquences désastreuses à la fois
pour la communauté rwandaise et pour la
région des Grands Lacs, cela ne signifie en
aucune façon que le conflit doit toujours
être perçu négativement. Il y a un riche
potentiel pour un développement social à
trouver dans nos dissensions. A ce sujet, les
jeunes trouvent dans ces différentes formes
de débat des capacités de communication, de coopération, de dialogue et
des compétences de confrontation intelligente et raisonnée. C’est à cette condition
du dialogue que l’on peut faire usage,
dans le cadre du Rwanda et même des
pays voisins, de concepts tels que l’unité,
la réconciliation et la coexistence pacifique.
¾ Ces différents types d’activités mettent à
la disposition des jeunes un espace pour
l’interaction et pour un apprentissage basé
sur la découverte de l’autre et de ses
potentialités. Elles favorisent en définitive
l’ouverture d’esprit et le développement
d’un sens critique incompatible avec
l’endoctrinement par l’aménagement d’un
espace de parole et d’action.
¾ Il ne faudrait pas sous-estimer les capacités d’analyse et d’observation des jeunes.
Récemment, ils ont pu déterminer les
Simon Gasibirege analyse la répartition de la
population selon l’expérience liée à la guerre et à
l’exil, au génocide et au massacre (pp48-49). Il
constate que les jeunes comme les autres groupes
sociaux ont été victimes du conflit et qu’ils cumulent
de facteurs de tension au-delà du supportable.
5 Ils établissent le maillage entre leur discipline et un
contenu citoyen. Leurs présentations sont utilisées
comme préambules à certaines activités comme les
jeux des vacances, les formations sur les droits
humains, etc.
6 C’est un festival de cinéma autour des principaux
thèmes et initiatives liés à la paix.
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thèmes qui les préoccupent en matière de
résolution des conflits. Il s’agit entre autres
de l’identité et de la citoyenneté et d’autre
part de l’histoire du Rwanda. Ces thèmes
sont les plus difficiles à traiter au Rwanda
d’après le génocide.
¾ Les différentes méthodes d’éducation
participative
ou
active
constituent
également un important facteur de
changement de comportement dans un
pays marqué par l’enseignement formel
frontal et par une structure familiale et
sociale fondamentalement autoritaires.
¾ Les rencontres d’échange régional (RDC,
Burundi et Rwanda) permettent aux jeunes
de prendre de la distance par rapport aux
conflits qui sévissent dans leurs pays afin de
découvrir l’autre, son pays et ses souffrances. Au fait, ces rencontres ont favorisé
la création d’une amitié transfrontalière audelà de la méfiance qui existe entre
Congolais, Burundais et Rwandais. Ces
rencontres d’échange devraient être davantage renforcées au cours de cette
période au cours de laquelle la tendance
est à l’intégration régionale.
Heza – émission radiophonique et
journal pour la paix par et pour les
jeunes
Depuis 2006 le Forum des Jeunes Giramahoro et l’association Urungano - Youth and
Media 7 ont développé à la Maison de
Jeunes de Kimisagara le projet Heza8. Ce
dernier utilise les mass média (Radio, presse
écrite, Internet) pour augmenter la participation de la jeunesse au processus à la
paix et à la démocratisation au Rwanda.
Devant l’arrière plan historique d’abus des
médias et de la manipulation des jeunes,
c’est l’idée clé de Heza de mettre les mass
médias dans les mains des jeunes et de les
rendre capables d’utiliser cet outil politique
très puissant pour l’éducation à la paix et à
la citoyenneté active. Pour la réalisation de
cette idée, les initiateurs ont utilisé l’approche participative dans toutes les étapes
et sur tous les niveaux du projet en plus des
Défis
Æ Comment le travail sur la prévention et la
gestion des conflits pourrait s’orienter vers le
travail éducatif dans la structure familiale et
sur l’histoire de la communauté sans créer
de nouvelles tensions?
Æ Comment mener et orienter un travail sur
la mémoire avec les jeunes dans une
communauté divisée et dont l’histoire est
lue et relue au gré des ressentiments
identitaires ?
Æ Comment résoudre la tension entre le
travail au niveau micro et l’influence au
niveau macro dans l’édification d’une
société pacifique au Rwanda et à l’échelle
régionale ?
Tout ce travail est rendu possible grâce à
l’appui technique et financier de la GTZ
(Deutsche Gesellschaft für Technische
Zusammenarbeit) et du DED (Deutscher
Entwicklungsdienst) et surtout grâce à une
ferme volonté des jeunes rwandais d’en
découdre avec le paradigme victimaire et
avec une histoire toujours présente
marquée par le génocide et toutes ses
conséquences.
7 Avec l’appui technique du DED/ZFD (Deutscher
Entwicklungsdienst/ Ziviler Friedensdienst – Service
Allemand de Développement/ Service civile de Paix)
et de la GTZ (Deutsche Gesellschaft für technische
Zusammenarbeit – Coopération Technique Allemand).
8 HEZA (Kinyarwanda) signifie « Un bon endroit ». Dans
le contexte du projet « Heza » signifie un endroit où on
est bien, avec les autres. Un endroit où on se donne
mutuellement une chance de s’exprimer quelle que
soit son histoire, son origine ou son ethnie. Cet endroit
est aussi le Rwanda de demain, un Rwanda en paix.
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techniques des médias et du journalisme
pour la paix.
des journalistes rwandais. Pour impliquer
aussi le public dans la conception, le
groupe des 20 jeunes journalistes en formation entreprenait des enquêtes entre leurs
pairs. Ainsi, les thèmes principaux, le style
du journal et de l’émission (un mélange des
éléments sérieux et divertissants), le nom
« Heza », l’organisation interne de l’équipe
des journalistes et beaucoup d’autres éléments ont étés trouvés de façon participative.
C’est quoi les médias et le
journalisme pour la paix ?
Les médias pour la paix9 se focalisent sur les
potentiels des médias de servir comme
éclaireurs et comme réconciliateurs. Ils
utilisent les vertus du journalisme professionnel comme l’objectivité, la profondeur
et l’équilibre ainsi que la puissance des
genres fictionnels (p.ex. les séries théâtrales
à la radio ou les films) de toucher le public
de façon profonde.
Les médias pour la paix donnent une voix
aux victimes des conflits et se focalisent
plutôt sur les initiatives positives dans le
processus de la paix au lieu des détails
cruels qui pourraient réchauffer le conflit.
Mais ils refusent d’utiliser toutes sortes des
méthodes manipulatrices, comme les
généralisations, les exagérations, etc.
Après une année de production pilote, les
20 jeunes journalistes de la Maison des
Jeunes ont lancé en janvier 2008 l’émission
Heza – une émission hebdomadaire de 30
minutes en Kinyarwanda qui combinent les
reportages, les interviews et les tables
rondes avec les chansons reggaes et hiphop rwandais et une animation divertissante. La participation des auditeurs est
motivée par les questions provocatrices et
un forum des auditeurs. L’émission est
rediffusée quatre fois par semaines et
écouté par environ 2 millions d’auditeurs au
Rwanda et dans les régions frontalières
surtout en DRC et au Burundi.
Le journal Heza est depuis cette année un
journal bimensuel et est distribué dans les
centres des jeunes et les écoles secondaires des provinces du pays et de la ville
de Kigali. Dans 25 écoles secondaires
partenaires, le projet dispose d’un Club des
auditeurs et des lecteurs, dans le but
d’animer les discussion participatives sur les
thèmes diffusés et de créer les éditions
« Heza locales».
Comment est assurée la
participation des jeunes dans le
projet Heza?
Au début, un groupe d’environ 20 filles et
garçons entre 16 et 20 ans à la Maison des
Jeunes voulait publier un journal qui
aiderait la jeunesse à se promouvoir et à se
distraire. Dans le contexte des formations à
la gestion des conflits à Kimisagara,
l’objectif de promouvoir la paix s’est ajouté
et à travers les contacts avec la Radio Voix
de l’Amérique (VOA), l’idée de produire
une émission radiophonique est née.
A partir de ce moment les séances des
formations en journalisme de base et en
médias pour la paix se sont alternées avec
les séances de planification et de
conception
facilitées
par
l’assistant
technique (Friedensfachkraft), des stagiaires et des experts juniors du DED/ZFD et
Quel est le groupe cible et
comment il a été déterminé ?
Heza cible essentiellement les jeunes Rwandais ayant entre 15 et 25 ans. Ce choix est
guidé par l’idée que cette génération
partage des expériences existentielles qui
les séparent de leurs collègues plus jeunes
et plus âgés. Nés entre 1983 et 1993, ils
gardent en eux d’une certaine manière
une relation avec le génocide et la guerre
de 1994. Rescapés ou enfants d’un
génocidaire, nés en exile ou réfugiés de
1994, tous ont perdu une grande partie de
leur enfance à cause de l’ethnisme et de
la violence. L’hypothèse qui est à la base
Des exemples célèbres sont les émissions du Studio
Ijambo au Burundi et du « Talking Drum Studio » de
l’ONG Search for Common Ground et de la « Radio
Okapi » en DRC de la Fondation Hirondelle. Une très
bonne introduction dans le sujet des médias pour la
paix est fournie par: Howard, Ross et al. (Edit.), The
Power of the Media – A Handbook for Peacebuilders,
(European Centre for Conflict Prevention), Utrecht
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du projet « Heza » est, qu’une fois que cette
génération
aura
découvert
cette
expérience commune d’une enfance
volée 10 , il sera pour elle plus facile de
développer le sentiment d’une unité plus
profonde par rapport aux générations plus
jeunes qui connaissent l’histoire seulement
par les narrations et par rapport aux
générations plus âgées caractérisées par
les complexes de culpabilité, des reproches
mutuelles ou le sentiment de vengeance.
Rwanda (CLADHO) - ADPM (Belgique, Septembre 2005 à ce jour : Assistant technique
de la GTZ (Deutsche Gesellschaft für Technische Zusammenarbeit) au Programme
d’Appui au Processus de Démocratisation
et de Réconciliation au Rwanda, Conseiller
technique du programme Résolution des
Conflits et Renforcement des capacités,
Maison des jeunes de Kimisagara, Coopération technique Allemande GTZ-Rwanda.
Quelles sont les prochaines activités
dans le cadre du développement
du projet ?
Andreas Wagner, né en 1972, marié depuis
2007 avec une Rwandaise,
Etudes
universitaires
en
Littérature
allemande, Communication (Publizistik) et
Philosophie à Berlin (Freie Universität) et
Dublin (University College).
2000 - 2003 Editeur, producteur et responsable des relations publiques, Vier-TürmeVerlag (Maison d’édition des livres psychologiques et théologiques) à Münsterschwarzach/ Allemagne.
Dans les prochains mois, une série théâtrale
radiophonique et le site web Heza seront
lancés. Le développement et la production
de ces deux nouveaux éléments est
(comme toujours) conçu de façon participative. En plus, nous sommes en ce
moment à la recherche des fonds pour
assurer la durabilité du projet jusqu’en fin
2010. A la fin de cette année une première
évaluation d’impact est planifiée – si les
moyens le permettent – avec les méthodes
qualitative et quantitative.
Depuis 2005: Conseiller Médias et Jeunesse
(Friedensfachkraft), Maison des Jeunes de
Kimisagara, Service Civile de Paix du
Service Allemand de Développement
(DED/ ZFD), Kigali/Rwanda.
Pascal Mwema MUJIJI, né 1971 en R.D.C
(ex Zaïre), Etudes universitaires en Sociologie (Université de Lubumbashi), Langue et
Littérature
Françaises
à
l’Université
Nationale du Rwanda.
1996-1997 : Encadreur technique à la Mission de la Croix – Rouge Rwandaise et
Belge (Kacyiru/ Rwanda),
2003-2005 : Responsable du programme
« Droits de l’Enfant » au Collectif des Ligues
et Organisations de Droits de l’Homme au
La série « Enfance volée » était jusqu aujourd’hui la
plus significative pour la ligne éditoriale: Pour
promouvoir la compréhension et l’empathie de tous
les jeunes, quelle que soit leur appartenance ethnique
ou leur origine géographique nous avons opposé dans
une suite de quatre émissions chaque fois deux
interviews biographique avec un couple des jeunes
rwandais « typiques »: Une rescapée et la fille d’un
génocidaire, un ex-enfant soldat FPR (« Tutsi ») et un
ex-enfant soldat FDLR (« Hutu »), un enfant des réfugiés
« Tutsi » des 1959 et un réfugié « Hutu » de 1994. Les
auditeurs ont été invités à réagir et une table ronde a
clôturée la série.
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Rapport de séance
Xavérine Niwemutoni
En terminant sa présentation, Bernard a
souligné que malgré des efforts conjugués,
le bout du tunnel est encore loin car il y a
toujours des défis à lever comme : le
manque des moyens (matériels, financiers,
temps, etc); permettre aux jeunes de
passer du statut de victime passive au
statut d’acteur et de leur permettre
d’exploiter les opportunités qui leurs sont
offertes.
Après l’introduction et les statues sur la
jeunesse désorientée et visant l’avenir, Bernard Niyomugabo a, dans la communication des étudiants de l’AEPCSM et d’Imbuto,
parlé des problèmes et difficultés des
jeunes de la Région des Grands Lacs qui
sont entre autre : le mauvais leadership, la
pauvreté, l’analphabétisme, le chômage,
les épidémies (VIH/SIDA), les orphelins, la
manipulation des jeunes par les adultes et
leur entraînement dans les guerres dont ils
sont victimes, etc… Il a ajouté que malgré
cette situation déplorable et catastrophique, des solutions d’encadrement des
jeunes sont trouvées par l’initiative des
gouvernements, des associations, etc.
Au Rwanda, le Conseil National de la
Jeunesse (CNJ) a été créé ; des structures
administratives des jeunes ont été décentralisées jusqu’au niveau de l’umudugudu
(villages créés – au pluriel imidugudu comme nouvelle forme d’habitation pour
la population ayant perdu leur maison
durant la guerre et le génocide) et de la
cellule pour impliquer les jeunes dans la
prise des décisions ; différentes associations
des jeunes tels que AEPCSM ; AJPRODHOJIJUKIRWA (Association de la Jeunesse pour
la Promotion des Droits de l’Homme et le
Développement), SCUR (Students Club for
Unity and Reconciliation), DUSAF (Districts
University Students Forum), LUCS (Ligue
Universitaire pour la Lutte Contre le Sida),
UWSA
(University
Women
Students
Association), Imbuto asbl Europe.
Les rencontres annuelles des jeunes dans
des camps de solidarité (ingando) sont
organisées avec pour objectif de renouer
des liens sociaux; des jumelages et
partenariats avec les organisations tant
nationale, régionale qu’internationale ; des
émissions des jeunes à la radio Salus animés
par les étudiants de l’Université Nationale
du Rwanda leur permettent de passer leurs
opinions, souhaits etc.
Après l’exposé, les participants ont posé la
question sur la façon de commémorer qui
crée la reviviscence des situations traumatisantes vécues (projections des films de ce
qui s’est passé pendant le génocide) et qui
est selon les participants cause d’une
retraumatisation pour les victimes et par
conséquent il faut arrêter cette façon de
commémorer et cette méthode de thérapie. Une autre question pertinente a été
posée sur le rôle du Conseil National de la
Jeunesse dans la vision d’avenir des jeunes
Rwandais. Après une longue discussion sur
ce conseil, il a été clair que celui-ci est une
structure politique qui ne joue aucun rôle
dans la résolution des problèmes des jeunes.
La deuxième présentation a été faite par
Pascal Mwema Mujiji, sociologue, assistant
technique de la Coopération Technique
Allemande - GTZ au programme d’appui
au processus de démocratisation et de
réconciliation au Rwanda, conseiller technique au programme de résolution des
conflits et renforcement des capacités à la
maison des jeunes de Kimisagara, et par
Andreas Wagner, conseiller pour les médias
et la jeunesse, travaillant pour le DED/ZFD à
la maison des jeunes de Kimisagara à Kigali.
Dans leur présentation, ils sont revenus sur
l’idée que la jeunesse et l’éducation font
partie des principales ressources que
dispose une société pour son investissement
futur. Ceci est d’autant plus important
quand les jeunes s’imposent sur le plan
démographique comme la majeure partie
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de la population (67% ont moins de 25 ans).
Ceci étant, le développement de leur
potentiel ne serait possible que si la société
promeut et appuie une coexistence
pacifique.
La maison des jeunes est un centre pour la
culture de la paix. Elle oriente ses activités
en quatre domaines à savoir le sport
(organiser le football pour la paix), la culture, les arts, la santé et la vie reproductive.
Elle offre aux jeunes un cadre pour leur
expression, pour leurs initiatives en matière
de culture de la paix et de résolution des
conflits car les jeunes ont été entraînés
dans les conflits rwandais en qualité de
bourreaux, d’observateurs passifs ou de
victimes.
Dans la même logique, la maison des
jeunes de Kimisagara a voulu ouvrir une
nouvelle page dans l’histoire des médias
par la création de HEZA, radio et journal
pour la paix par et pour les jeunes. L’idée
de HEZA est de mettre les mass-médias
dans les mains des jeunes et de les rendre
capables d’utiliser cet outil puissant pour
l’éducation à la paix et à la citoyenneté.
La radio HEZA a commencé avec les
jeunes qui se racontent leur vécu avec une
hypothèse qu’une fois que cette génération aura découvert cette expérience
comme une enfance volée, il sera pour elle
plus facile de développer un sentiment
d’unité plus profonde.
Les rencontres d’échanges régionales permettent aux jeunes de prendre un espace
pour l’interaction, une distance par rapport
aux conflits et de découvrir l’autre dans ses
souffrances.
Défis:
•
•
•
Les débats :
Les débats sont revenus sur le concept de
la radio « HEZA », le mot du Kinyarwanda
qui signifie ‘’un bon endroit’’ mais qui
pourrait également être interprété comme
‘exclure’. L’objectif principal de la radio
Heza est d’aider les jeunes à sortir de la
situation de victime et d’instrument. Les
discussions ont abouti à ce que les jeunes
soient initiés à prendre des responsabilités
dès le bas âge; de rétablir les valeurs
culturelles et d’autres appuis telle que la
famille, l’Eglise, l’école, etc. Quant à la
question de la clientèle visée par la maison
des jeunes, la méthodologie utilisée et le
degré de participation des jeunes; la
réponse a été que les jeunes touchés sont
entre 15 et 25 ans, ils déterminent eux
mêmes les thématiques à aborder, ils se
racontent leurs vécus, leurs histoires
respectives et par le même biais leurs
blessures peuvent être guéries. Le centre ne
s’occupe pas des cas de traumatisme et
c’est un problème qui mérite une réflexion
plus profonde.
Les constats:
•
•
•
•
Orienter le travail sur la prévention
et la gestion des conflits par le travail éducatif dans la famille et sur
l’histoire de la communauté sans
créer de nouvelles tensions;
mener et orienter un travail de mémoire avec les jeunes;
résoudre les tensions entre le travail
au niveau micro et l’influence au
niveau macro.
Malgré les conflits de la région des
Grands Lacs, il y a un riche potentiel
pour le développement social à
trouver dans nos dissensions ; une
nouvelle dynamique pour créer les
bases de l’unité, de la réconciliation
et la coexistence pacifique.
Les différents types d’activités
mettent à la disposition des jeunes
un espace pour l’interaction et la
découverte de l’autre semblable et
différent
ainsi
que
de
ses
potentialités.
Il ne faut pas sous-estimer les
capacités d’analyse des jeunes.
Les méthodes d’éducation participative constituent un facteur de
changement.
Cet atelier était très bien modéré, le débat
sur les problèmes et défis des jeunes dans la
Région des Grands Lacs était très riche,
mais les jeunes ont déploré la non
participation en grand nombre des adultes
à cet atelier. Cette remarque fut le lendemain, lors de la restitution de l’atelier,
également communiquée par le modérateur Jean-Louis Bisangwa à l’audience du
symposium.
169
Plenary Session
Séance plénière
Saturday – Samedi 16.08.2008
17:00-18.30h
170
Plenary Session
Séance plénière
Saturday – Samedi 16.08.2008
17:00-18.30h
Plenary Session – séance plénière
Summary of the workshops - Restitution des ateliers
Summary of the workshops, held on Saturday – 16.08.2008
Restitution des ateliers en plénière, samedi 16.08.2008
Moderation: Luise Lehmann, Hildegard Schürings
Rapporteur: Toni Hassenmeier
Summary of the workshops, held on Sunday – 17.08.2008
Restitution des ateliers en plénière, dimanche 17.08.2008
Moderation: Luise Lehmann
Rapporteur: Jasmin Scholle, Imbuto
171
Plenary Session
Séance plénière
Saturday – Samedi 16.08.2008
17:00-18.30h
Minutes of the summary of the workshops
Toni Hassenmeier
use. Only by doing this we will find the
appropriate way of handling the genocide.
One participant asked for a summary of the
argument regarding Ubushingantahe.
Joseph Ntamahungiro: Ubushingantahe
was originally, in ancient times, used to
solve family problems and conflicts. Additionally the conflict in Burundi has become
extremely complex. Therefore the potential
of Ubushingantahe should not be exaggerated.
Before opening the plenum for the summary session, the moderators decided to
give Ms Mujawayo the opportunity to
speak to the plenum as she had to leave
early. Ms Mujawayo is founding member of
the widow’s organization ‘Avega-Agahozo’.
Her husband and all of her family besides
three brothers and two sisters have been
killed during the genocide of 1994. Ms
Mujawayo wanted to give an optimistic
statement, that there is a future, despite all
the happenings of the past. Frequently
people ask her, she stated, why she is able
to be so joyful, although all these things
happened to her. She explained that her
family ran a filling station before the
genocide. She used the picture of a car
that you need to fuel, if you do not want to
get stuck in the desert. She encouraged
everybody to use the happy times available to fill the tank with joy. Then a person
will be able to fuel itself out of this depot, in
times of grieve and sorrow. Although
Rwanda is linked to the genocide and
hatred it should not be forgotten to see the
beauty of the landscape e.g. Ms Mujawayo
wants the youth to live. Therefore she
encouraged the audience to smile and
start projects to build a better future.
The second rapport was given by Xavérine
Niwemutoni, Imbuto, about the workshop
‘The role and impact of stakeholders in the
region’. The main findings were that there is
a lot of hatred amongst Congolese people
against Rwandans. Despite a broad involvement of international and national
organisations in regional conferences violence still prevails. Civil society is divided in
several groups and played a partly negative role.
Questions and comments from the plenum:
Unfortunately the UN played the card of
elections in DR Congo. The roots of suffering
are very deep, multifaceted and not yet
unveiled. The number of displaced people
is high, but rarely spoken about.
Rwanda is supported by the UN. We should
not forget that the UN is composed by
states and states have interests, which they
promote within the UN-system.
Roberto Garretón: The eastern part of DR
Congo is a region of conflict since 1993.
Civil society has mostly played a negative
role since then. From 1990 – 1996 the strong
Mobutu regime repressed civil society. In
contrast churches and other civil society
actors have been essential in the fight for
independence. 1996 the population lost
the confidence in Mobutu and supported
Kabila. Later civil society discovered Rwandese interests behind Kabila. But civil
society was already fragile and ethnically
divided.
The question of nationality was instrumentalised in the region. The USA and
The first rapport was given by Andrea Pabst,
Imbuto, about workshop ‘The impact of
international, national, local justice systems’.
Questions and comments from the plenum:
Originally Gacaca and Ubushingantahe
had a restorative and reconciliating character. Is it really useful in this different
structure?
The traditional Gacaca was restructured
and the trials were conducted in a new
way. Mr Ingelaere is strongly convinced
that this resulted in a less effective tool.
Gacaca has positive and negative effects.
But we cannot expect these courts to solve
all problems and bring peace.
We do not ask the right questions. We have
to think of what is the aim of the tools we
172
Plenary Session
Séance plénière
Saturday – Samedi 16.08.2008
17:00-18.30h
Great Britain try to make the region a
second Kosovo.
The third rapport was given by Simone
Claar about the workshop ‘Struggle for
economic resources: Ways to stop illegal
exploitation of natural resources’.
Questions and comments from the plenum:
In DR Congo it is not possible to own land, it
will always be owned by the state. Only
Congolese people can have perpetual
utilisation rights, according to law. If the
land is not utilized you will loose the right of
utilization. The absence of official courts in
many areas might lead to other local
solutions.
Is it not possible to link the current situation
in eastern DR Congo to the situation in
Katanga in the 1960s?
Prosper Nobirabo:
The
question
of
Tschombe was introduced by international
stakeholders in the region to destabilise
Lumumba. Today the number of actors in
the Kivu region is substantially higher.
Therefore a comparison is nearly impossible.
Today Katanga is a closed area where
even Congolese people need a permit to
travel.
Comment: Comparison is impossible. At the
end of the colonial times, the Belgian
colonial administration tried to disassociate
Katanga from Congo but also from Belgium.
Today there is no restriction to move in
Katanga. The Minister of the Interior of DR
Congo blocked the attempt mentioned
before.
The Katanga conflict was closely linked to
the whites in Rhodesia, South Africa, etc.
Today the conflicts have a different
globalised context. Therefore it is not
possible to assess the conflict without linking
it to other regions like the Balkans e.g.
173
Plenary session - Séance plénière
Summary of the workshops/
Restitution des ateliers
Sunday – Dimanche 17.08.2008
9:15-11.00h
Minutes of the summary of the workshops
Jasmin Scholle
represented in governmental and nongovernmental organisations in the country.
After Luise Lehmann welcomed the
participants to the first session of the last
day (Sunday) which had to be held without
the help of the translators we continued
with the presentation of yesterdays
workshops.
Lena Guesnet gave us a short summary of
the workshop „Dealing with the past: history,
memory, commemoration“. After the
presentation there was the question
whether in the workshop the participants
where just talking about the suffering of
women or also about the suffering of
children. Ignatiana Mukarusanga one of
the speakers at the workshop answered
that talking about the suffering of women
means also talking about the suffering of
their children because very often women
transfer their sufferings to their children.
About the situation of women in conflicts
she said „our bodies are the battlefield“.
The presentation of the workshop about
„Traumatisation and healing” was done by
Klaas Kunst and was followed directly by
the presentation of the workshop named
„Girls and women - their suffering and
potential“ which was done by David
Bodensohn.
After the two presentations one particippant asked the question whether people
that are trained in Europe to work with
traumatised are a help to the situation in
Rwanda or not. One answer to that was
that of course its not that easy to use i.e.
western psychoanalyse in Rwanda but that
one should not reject either the western
psychology nor the traditional one but take
what its best of it.
Another question was if there can be a
realistic act of regret in ethnic crises and if
an individual regret is possible when the
crime was committed by a group. There
was no real answer to this question but one
of the participants coming from Rwanda
and working in the field of psychology said
that after a massive release of prisoners in
Rwanda in 2005 peace was in danger
because they started to realise that also
the perpetrators and not just the victims
where suffering.
One participant asked the question, referring to the situation in Rwanda, if women
might be the better to take care of the
future. That question opened a discussion
about the position of women in Rwandan
society. Ignatiana Mukarusanga explained
that women play an important role in
Rwanda but that their position is also quite
unclear. She gave two Rwandan proverbs
as an example: „Who has a better wife has
a better household“ and „As long as the
cock sings, the chicken won’t say
anything“. Referring to the role of women
Julien Nimubona stated that 48% of the
members of the Rwandan National Assembly are female. This brought up the question
whether this is the result of the struggle of
women or it is due to a decision of the
government. Lena Guesnet answered that
in fact it was the government which
decided that but Ignatiana Mukarusanga
also added that it was and is the struggle of
women that makes sure that women are
The last workshop about „Youth Visions for
the future“ was presented by Denyse Amahirwe. Before she started her presentation
the members of the youth group of Imbuto
and AEPCSM (Association of students from
the National University of Rwanda) formed
two human sculptures to express the
situation of young people in Rwanda.
The plenary who was asked about what
they have seen, recognised that the first
statue showed the current situation of a
lonely and disillusioned and disorientated
youth while the second statue presented a
174
Plenary session - Séance plénière
Summary of the workshops/
Restitution des ateliers
Sunday – Dimanche 17.08.2008
9:15-11.00h
youth that might be stronger and happier in
the future. Because of the limitation of time
there was no discussion at the end of the
presentation but one question came up:
Who is the manipulator or who might be
the facilitator of this change?
At the very end Jean-Louis Bisangwa, the
moderator of the Youth Workshop, in the
name of the group of the young members
of Imbuto and AEPCSM gave thanks to the
participants and organisers of the symposium and said that in future whenever
adults and young people come together
they should also talk about youth related
themes.
175
12:00-14.00h
Closing session - Séance de clôture
Lessons from the past – Visions for the future/ Leçons apprises – Visions pour l’avenir
Sunday - Dimanche 17.08.2008
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12:00-14.00h
Closing session - Séance de clôture
Lessons from the past – Visions for the future/ Leçons apprises – Visions pour l’avenir
Sunday - Dimanche 17.08.2008
Closing session - Séance de clôture
Lessons from the past – visions for the future
Leçons apprises – Visions pour l’avenir
Moderation: Hildegard Schürings, Imbuto
Rapporteurs: Jasmin Scholle & Xavérine Niwemutoni, Imbuto
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12:00-14.00h
Closing session - Séance de clôture
Lessons from the past – Visions for the future/ Leçons apprises – Visions pour l’avenir
Sunday - Dimanche 17.08.2008
Minutes of the closing session
Jasmin Scholle & Xavérine Niwemutoni
can not just be put upon states through the
guidance of other actors. In the opinion of
the speaker there are three main constraints to full fill the demand of good
governance:
1) The question of memory is strongly
linked to the past / the conflict
2) The institutionalisation of ethnic
ideas
3) The management / role of the state
He also said that there is no synchronisation
between local and global actors and that
global mechanisms have to be reinvented
to fit the needs of the Region. As another
problem he considers the fact that some
states are still governed by actors who
where part of the conflict before.
As this was the very last session of the symposium Hildegard Schürings gave thanks to
everybody for coming and for the great
engagement and interest in the themes of
the Symposium. She also thanked the organisation team of the Philipps-University of
Marburg (CCS) and of the association
Imbuto most of them had worked more
than one year on the preparation of the
symposium. Hildegard Schürings said that
she hopes that everybody is happy with the
scientific exchange and honour he or she
received at the conference.
The final conclusions and recommendations were given by René Lemarchand,
Julien Nimubona, Joseph Chiko Sanane,
Roberto Garretón, Eugène Rutembesa,
Bernard Niyomugabo and Patrick Dias as a
guest participant.
René Lemarchand said that seemingly
there is no final answer to the question
whether the state forms the nation or vice
versa. So he asked: What is the role of the
state? In his opinion Rwanda is very good
at the reconstruction of the state but no at
all at the task of social reconciliation.
Referring to the work of memory being
done in Rwanda he said that memory can
help to bring people together and to find a
new consensus but he also pointed out his
opinion that one should not just stick to the
past either. Poverty, environmental pollution and the demographic growth rate
were other points René Lemarchand
considered as problematic for the development of the Region.
Laurien Ntezimana was invited to leave a
message of the concept of Ubuntu to the
plenary. Ubuntu can be translated into
“You are!” It includes the fact that there is
no future without the past but also that
there is no sense in repeating the past over
and over again. It means that we have to
find a reason of being because there can
also be no future without the present.
The next speaker Joseph Chiko Sanane said
that we haven’t talked enough about the
question of poverty during the conference.
He asked the question how the reconstruction of a state and peace where so many
people are suffering poverty and are
restraint from living a “normal live“ can be
possible. He also pointed out that the youth
has a very important role to play for the
reconstruction of the state, as well as the
civil society which is unfortunately often
weakened by governments which try to
split the society.
In the following speech Julien Nimubona
explained why in his point of view the
region is still not ready to fulfil the demands
of good governance and democracy.
Julien Nimubona said that there is a need
to deepen the mechanisms of the region to
find reconciliation and that the region has
to find a common history. He underlined
that good governance and democracy
The following speaker Roberto Garretón
said that genocide is the crime which is the
easiest to predict but the most difficult to
prevent. It is easy to predict genocide because you can see the violation of human
rights which are going on long before but it
is difficult to prevent because the sove-
178
12:00-14.00h
Closing session - Séance de clôture
Lessons from the past – Visions for the future/ Leçons apprises – Visions pour l’avenir
Sunday - Dimanche 17.08.2008
reignty of states over their affairs makes it
difficult for the UN to intervene. Roberto
Garretón explained that there are a lot of
debates going on within the UN since the
sad example of the Rwandan genocide
showed what the UN can actually do and
what not. The speaker said that reports
from the year 1993 made already clear
what is going to happen in Rwanda.
Considering what had happened Garretón
said that it is time for the UN to change its
concept: There is not just the right to
intervene in such conflicts but the
obligation (see below his contribution in
French).
motion of humanity and create networking
for a common humanity.
At the very end Ulrich Wagner said that he
himself learned a lot about the conflict. He
said that the summaries given made clear
that we were discussing a lot of different
questions of which a lot are still open – but
well, this is science he said. In the name of
the organisers, the centre for conflict
studies and Imbuto, he gave a last “thank
you” to the participants and organisers of
the conference.
Marie Grâce Gasinzigwa Kagoyire, Ibuka,
invited Eugène Rutembesa to give a comment. He said that he really liked the
mixture of different people taking part at
the conference with their different contributions, approaches and looks at the
theme.
Bernard Niyomugabo Rubangura agreed
that at the conference we were talking
about many different themes of great
importance. He explained that in his
opinion without the lesson learned from the
past we cannot build a better future. He
thanked Imbuto for also having invited
young people from the Region to take part
at the conference and to prepare this
conference with a seminar with students
from the associations Imbuto, Germany
and AEPCSM, National University of
Rwanda. He pointed out that young
people need to get a better position in
decision making because it’s them who
depend on the future of the world.
Patrick V. Dias, Professor emeritus at the
University of Frankfurt, with reference to the
contributions of Marie-Aimable Umurerwa
« Un long trajet pour un éveil conciliant »
and Esther Mujawayo : « Après le mal
absolu », underlined the importance of
telling one’s the individual story and
sufferings. But as Marie-Aimable said, there
is not so much sense to repeat and to
ruminate on the history, but one day it is
necessary to say STOP and empty all in the
waste bin to find the inner peace. It is
important to become again subject of his
or her own history, to enhance the pro-
179
12:00-14.00h
Closing session - Séance de clôture
Lessons from the past – Visions for the future/ Leçons apprises – Visions pour l’avenir
Sunday - Dimanche 17.08.2008
annoncé avec une anticipation suffisante,
notamment par Bacre Ndiaye, Rapporteur
Spécial sur les Exécutions extrajudiciaire
après sa visite au pays un an avant, en avril
1993. Dans son rapport, il a clairement
averti : « que le Rwanda était le théâtre de
massacres et de nombreuses autres graves
violations des droits de l’homme ». Selon la
Commission indépendante d’enquête sur
les actions de l’Organisation des Nations
Unies lors du génocide de 1994 au
Rwanda 1 « le fait que la population tutsi
était prise pour cible avait conduit Ndiaye
à se demander si la qualification de
génocide pouvait être envisagée». La
Commission Indépendante a souligné : «Il
semble que les membres de la mission ne
connaissaient même pas le rapport
inquiétant». Cet échec de l’ONU n’a pas
été le premier depuis la fin de la Guerre
Froide (avant a eu lieu l’intervention
désastreuse en Somalie), ni le dernier
puisqu’ils ont continué en Bosnie-Herzégovine (Srebrenica) et au Kosovo.
Ces désastres ont amené le Secrétaire
Général à se demander dans son rapport
adressé au sommet du Millénaire (sur les
dilemmes de l’ingérence humanitaire) « si
l’intervention humanitaire constitue effectivement une atteinte inadmissible à la
souveraineté, comment devons-nous réagir
face à des situations comme celles dont
nous avons été témoins au Rwanda ou à
Srebrenica et devant des violations flagrantes, massives et systématiques des
droits de l’homme, qui vont à l’encontre de
tous les principes sur lesquels est fondée
notre condition d’êtres humains?”2.
Afin de trouver une solution, le
Gouvernement canadien a convoqué une
Commission Internationale d’Intervention et
de Souveraineté (ICISS). Si ces deux
concepts paraissent contradictoires, lors de
la Commission ont été abordé le thème de
la « responsabilité pour protéger » (connu
comme R2P, à cause de sa phonétique en
anglais). Ce concept s’est imposé tant au
niveau politique qu’au niveau académique, à tel point qu’il apparaît dans le
Document Final du Sommet Mondial de
2005, qui consacre ainsi ce principe fonda-
Hereby the written contribution of Roberto
Garretón:
Comité Consultatif du Secrétariat Général
des Nations Unies sur la Prévention des
Génocides et autres atrocités massives
Roberto Garretón*
Le 7 avril 2004 a été commémoré dans l’ex
Commission des Droits de l’Homme la
Journée Internationale de Réflexion sur le
Génocide commis au Rwanda initiée dix
ans auparavant. A cette occasion, le
Secrétaire Général a présenté un plan en
cinq points afin de prévenir de futurs
génocides.
Les cinq points du plan sont les suivants : la
prévention des conflits armés, plus tard le
Secrétaire Général introduira le concept de
prévention systémique, qui se réfère aux
mesures visant à faire face aux risques de
conflit au niveau mondial; la protection des
civils dans les conflits armés; l’élimination de
l’impunité au moyen de mesures judiciaires
devant les juridictions tant nationales
qu’internationales; une alerte rapide et
claire en cas de situation susceptible de
dégénérer en génocide, et la mise en
place au sein de l’Organisation des Nations
Unies de capacités pour analyser et traiter
les informations; et une action rapide et
décisive fondée sur une série de mesures
cohérentes.
De plus, Kofi Annan a informé le jour même,
de sa décision de nommer un Conseiller
Spécial sur la Prévention des Génocides, en
désignant l’ex-Président de la Commission
Interaméricaine des Droits de l’Homme,
Juan Méndez. Après son départ en 2007,
Francis Deng, ex rapporteur de la
Commission des Droits de l’Homme des
Nations
Unies
sur
les
Droits
des
Déplacements Internes, a été nommé.
Cette désignation correspond à la
nécessité d’une politique d’alerte rapide.
Un des éléments fondamentaux
pour ses nominations a été le fait que les
Nations Unies n’avaient toujours pas
surmonté (et ne l’ont toujours pas fait) le
traumatisme qu’a supposé le Rwanda,
alors même que ce génocide avait été
1 Rapport connu aussi comme le Rapport Carlsson, du
fait qu’il ait été fait par Ingvar Carlsson, ex Premier
Ministre de Suède, S/1999/1257, pages. 6 y 32.
2 Rapport au Sommet, page 217
Membre du Comité Consultatif du Secrétariat
Général sur la Prévention de Génocides et autres
atrocités massives.
*
180
12:00-14.00h
Closing session - Séance de clôture
Lessons from the past – Visions for the future/ Leçons apprises – Visions pour l’avenir
Sunday - Dimanche 17.08.2008
mental. « C’est à chaque État qu’il
incombe de protéger ses populations du
génocide, des crimes de guerre, du
nettoyage ethnique et des crimes contre
l’humanité ». Mais, dans le cas où l’Etat ne
peut pas ou ne veut pas adopter des
mesures appropriées pour protéger sa
population, « Il incombe également à la
communauté internationale, dans le cadre
de l’Organisation des Nations Unies, de
mettre en oeuvre les moyens diplomatiques,
humanitaires et autres moyens pacifiques
appropriés, conformément aux Chapitres
VI et VIII de la Charte, afin d’aider à
protéger les populations » de ces faits
illicites sans préjudice de « mener en temps
voulu une action collective résolue, par
l’entremise du Conseil de Sécurité,
conformément à la Charte, notamment
son Chapitre VII ». Dans ce document, les
Etats ont déclaré appuyer « pleinement la
mission du Conseiller spécial du Secrétaire
général pour la prévention du génocide»
(paragraphe 140).
subsidiarité) dans la mesure où le devoir de
protection correspond en premier et
principalement à l’Etat où les faits sont
commis.
Un autre aspect fondamental est le fait que
R2P inclus les obligations de prévenir, suivies
de celles de réagir, pour aboutir finalement
à celle de reconstruire les structures et les
droits des sociétés touchées. L’intervention
se fait en terme de moyens économiques
(saisie par exemple), diplomatiques ou
politiques, et seulement en dernier recours,
on pourrait faire appel à l’action militaire.
Encore faut-il que plusieurs conditions soient
réunies :
Danger exceptionnel et imminent, avec un
aspect humanitaire imminent (« fondé en
raison ») ;
But de protection, sans un autre intérêt
(« de bonne foi ») ce qui supposerait un
caractère multilatéral ;
Epuisement des alternatives non militaires
(« dernier recours ») ;
Le mal causé ne doit pas être supérieur à
celui qu’on cherche à éviter (« proportionnalité des moyens ») ;
Possibilités réelles de protéger les populations touchées (« chance de réussite »);
Et, enfin, légitimité de la décision (« autorité
compétente »), raisonnablement le Conseil
de Sécurité de l’ONU, et en cas de refus, les
organismes régionaux multilatéraux3.
Le concept de « responsabilité de
protéger » substitue un supposé droit des
Etats d’exercer une « ingérence humanitaire », idée développée depuis la fin de la
guerre froide. A l’inverse, le devoir de
protéger les populations en danger suppose une intervention, non seulement dans
le cas de conflits armés internationaux mais
aussi et plus particulièrement, dans les cas
internes, qui constituent plus de 90% de tous
les conflits armés qui ont eu lieu lors des
années 1990.
En réalité, il n’y a jamais eu d’accord en ce
qui concerne l’ingérence humanitaire (le
Comité International de la Croix Rouge n’a
par exemple jamais accepté l’allégation
de protection humanitaire lors d’une
intervention armée) alors même que beaucoup de pays et d’ONG manifestaient leur
désaccord dans la mesure où l’on abusait
de ce concept. D’autres protestaient
parce que généralement on ne protégeait
pas les populations touchées par cette
ingérence humanitaire. L’ICISS cherche à
concilier l’idée de protection et le respect
de la souveraineté. L’idée est celle
d’adopter les décisions en prenant en
compte ceux qui nécessitent de cette
protection et non pas les Etats intéressés
par l’intervention. Néanmoins, ceci doit se
faire de manière subsidiaire (principe de
Le 3 mai 2006, le Secrétariat Général a créé
un Comité Consultatif du Conseiller Spécial
afin d’agrandir le groupe et de pouvoir
l’aider dans son travail. Lors des débats du
Comité (trois sessions entre 2006 et 2007) il a
été reconnu le fait qu’il s’agissait du
génocide le crime le plus facile à prévoir
(cas au Rwanda et Srebrenica et même en
Allemagne dans les années 1930). En effet,
les signes, les discours, et les attaques in
crescendo contre quelques groupes sont
bien antérieurs au déclenchement. Mais il
est le plus difficile de prévenir pour les
appuis nationaux et internationaux que
tiennent les autorités qui le préparent et
l’organisent. D’un autre côté, pour déterminer s’il s’agit ou non d’un génocide,
c’est-à-dire, si l’on tente de détruire, totalement ou partiellement un groupe national,
La Responsabilité de protéger, Gareth Evans. Dans
la gestion de crise, Revue de l’OTAN, numéro hiver
2002.
33
181
12:00-14.00h
Closing session - Séance de clôture
Lessons from the past – Visions for the future/ Leçons apprises – Visions pour l’avenir
Sunday - Dimanche 17.08.2008
ethnique, racial ou religieux, on ne pourra
le savoir qu’une fois les faits commis ou au
moins initiés. C’est la raison pour laquelle le
Comité Consultatif a proposé que la prévention des « atrocités massives » soit inclue
dans son mandat. De même, le Comité a
souhaité que le Conseiller soit désormais un
Représentant du Secrétariat Général. Sa
quatrième session aura lieu en octobre de
cette année.
Le mandat du Comité, qui ne diffère pas
de celui du Représentant, est fondamentalement celui d’étudier les situations et les
alertes. Son travail ne consiste pas à se
référer aux génocides ou massacres du
passé, même en cours. Il ne s’occupe pas
non plus des autres violations, quand bien
même qu’il s’agisse de violations des Droits
de l’Homme plus graves (discriminations,
dictatures, assassinats politiques, détentions
massives etc.). Le Comité se charge seulement des cas de massacres qui sont
souvent les prémices de massacres à
grande échelle ou de génocides. Selon le
premier Conseiller, Juan Méndez, la prévention à court et moyen terme comprend
les actions inter-relationnelles, par exemple,
la protection des populations en danger,
études des responsabilités de l’Etat et des
personnes, accès ou privation des droits
économiques, sociaux, culturels, détectant
les causes des conflits.
La création de Conseiller et du Comité a
provoqué des résistances dans certains
Etats qui n’admettent pas que eux-mêmes
ou des pays avec lesquels ils aient des
intérêts puissent être responsables de
massacres et de génocides qui pourraient
permettre certaines formes d’interventions
dans les affaires internes. C’est ce qui se
passe actuellement au Soudan et au
Darfour. De plus, les organes administratifs
de l’ONU préfèrent que les alertes se
fondent dans les informations de leurs
propres structures qui sont sur le terrain
(PNUD, FAO, ACNUR, etc.) et non pas par
des experts externes.
Ma propre expérience en tant que Rapporteur des Droits de l’Homme au Zaïre/ RDC,
et comme nous le démontre ce qui a été
commis au Rwanda avec la méconnaissance d’une information essentielle
d’un Rapporteur, mérite à mon avis, que
parmi les principales sources d’informations
soient pris en compte les rapports des
Rapporteurs Spéciaux et ceux des autres
mandats de l’actuel Conseil des Droits de
l’Homme.
---------------------------------------------------------------Hildegard Schürings a annoncé la clôture
en remerciant tout un chacun pour leur
contribution et participation active, de leur
sérieux, les débats francs et de haute qualité. Elle a remercié spécialement les jeunes
étudiants de l’Université de Marburg et
d’Imbuto pour leur disponibilité et leur implication dans l’organisation et le succès de
la conférence. Comme conclusion elle a
invité plusieurs représentants de différentes
institutions et associations de donner un
mot de clôture contenant les idées maîtresses qu’on peut retenir pour l’avenir.
Dans cette séance, René Lemarchand,
University of Florida, décrit le paysage
politique dans la Région des Grands Lacs
qu’il a résumé en ces points : La persistance
des conflits, la gestion des traumatismes, la
question ethnique, comment les sociétés
des Grands Lacs puissent se réorienter, quel
est le rôle de l’Etat et comment définir la
relation Etat-Nation et quel est le rôle de la
communauté internationale. Il relève ensuite les problèmes majeurs de la Région,
qui sont, l’explosion démographique, la
destruction de l’environnement, les réseaux
mafieux à l’Est du Congo, les problèmes de
la pauvreté (80% de la population vivent
au dessous du seuil de la pauvreté),
l’organisation des transitions politiques, la
gestion des conflits ethniques, l’Etat n’est-il
pas
générateur
de
conflits
que
modérateur ? Quel est le rôle de la mémoire ?
Julien Nimubona, Professeur à l’Université
du Burundi, pose une grande question :
Comment réussir la démocratie et la bonne
gouvernance avec les contraintes liées à la
mémoire, aux conflits communautaires, à
l’instrumentalisation ethnique, à l’Etat luimême. Il faut donc pour réussir, le dialogue,
la mémoire des uns et des autres, mettre en
place des mécanismes pour aboutir à la
réconciliation. En conclusion, pour lui, le
grand défi dans la Région des Grands Lacs
est plutôt la gestion de nos Etats que la
question Hutu-Tutsi.
182
12:00-14.00h
Closing session - Séance de clôture
Lessons from the past – Visions for the future/ Leçons apprises – Visions pour l’avenir
Sunday - Dimanche 17.08.2008
Laurien
Ntezimana
de
l’Association
Modeste et Innocent - AMI, Rwanda, a
rappelé le concept « Ubuntu », ce qui veut
dire « Nous sommes », ce qui inclut qu’il n y
a pas d’avenir sans le passé, mais aussi qu’il
n’y a pas de sens de répéter sans cesse le
passé. Nous devrons trouver « l’essence » et
sans le présent, il n y a pas non plus de
l’avenir.
d’Imbuto qui ont, dans un séminaire ayant
eu lieu avant le symposium, préparé
ensemble les ateliers concernant la jeunesse et sa préparation pour l’avenir. Il
recommande que les jeunes doivent avoir
une place dans la prise des décisions et
souhaite la poursuite de telles possibilités
d’analyse et de réflexions surtout aussi pour
la jeunesse.
Patrick V. Dias, Professeur éméritus à
l’Université de Frankfurt, fait dans un long
discours référence à l’exposé de MarieAimable Umurerwa « Un long trajet pour un
éveil conciliant » et aussi de Esther
Mujawayo. Quand Marie-Aimable dit que
rien ne sert à rien de ruminer le passé, il faut
à un moment donné dire STOP et vider tout
dans la poubelle pour retrouver la paix
intérieure. Patrick Dias a souligné la nécessité de placer les personnes comme des
sujets historiques, aider à la promotion de
l’humanité, créer des réseaux d’échanges
dans le but d’une humanité commune.
Joseph Chiko Sanane, Président de la Ligue
des Droits de la Personne dans la Région
des Grands Lacs tire cette conclusion : Il
faut approfondir l’analyse du contexte
géopolitique dans laquelle se trouve la
Région des Grands Lacs ; reconstruire les
Etats ; la pauvreté étant un danger majeur
pour
rétablir
la
paix ;
l’explosion
démographique, l’accès à la terre (au
Rwanda les terres sont accordés aux
grands investisseurs). La leçon à tirer : la
nécessité de restructurer les institutions de
l’Etat est impérieuse ; la société civile a
besoin de se redéfinir ; la jeunesse est
manipulée, et entraînée dans la violence,
la haine, il faut des barrières contre cette
violence.
Il faut noter que toutes les personnes ont
remercié les organisateurs du symposium
pour leur bonne initiative et l’organisation
de la conférence et ont souhaité l’organisation d’une autre conférence à la suite de
celle-ci.
Ulrich Wagner, du Centre des Recherches
sur les Conflits, Marburg, a souligné qu’il a
appris beaucoup sur des conflits durant ce
symposium. Les conclusions ont permis de
reconnaître qu’il y a beaucoup de
questions qui restent en suspens - mais
c’est souvent le cas dans les Sciences.
Au nom des organisateurs de la conférence il a remercié les participants de la
conférence et a souhaité un bon retour.
Roberto Garretón, Chili, membre du Comité des Nations Unies pour la prévention des
génocides : Très brièvement comme le
temps était limité, Roberto est revenu sur le
rôle de la Communauté Internationale
dans la Région des Grands. Il fait ce
constat : L’ONU fui les génocides et en
même temps, il fait remarquer que le
génocide est plus facile à prévoir mais plus
difficile à prévenir !!! Il ajoute que le grand
débat de l’ONU est la paix, le respect des
droits de l’homme mais le débat sur le
génocide est une affaire des Etats.
Eugène Rutembesa, Université Nationale du
Rwanda,
invité
par
Marie
Grâce
Gasinzigwa Kagoyire, Ibuka, de prendre la
parole, a beaucoup apprécié la présence
des personnes de diverses disciplines, avec
des
approches
différentes,
et
des
perspectives variées.
Bernard Niyomugabo, Association des
étudiants en psychologie clinique et pour la
santé mentale, Université Nationale du
Rwanda, remercie les organisateurs de la
conférence, et remercie leur partenaire
Imbuto pour son invitation. Ce sont les
membres de l’AEPCSM et les étudiants
A 14h 00 la conférence fut officiellement
clôturée et tous et toutes sont partis dans
les différents coins du monde.
183
Evaluation of the Symposium – Moderators – Organisation Committee
Evaluation du Symposium – Modérateurs – Comité d’Organisation
Evaluation du symposium
dieses Urteil von den anderen Teilnehmerinnern und Teilnehmern weithin geteilt wird.
- Je t’écris tout d’abord pour te remercier
pour l’excellent colloque que nous venons
de tenir à la belle ville de Marburg. Tous les
participants ont été heureux d’avoir été
partie de la rencontre. Je te prie de
transmettre mes félicitations et remerciements.
- The all-important Hutu-Tutsi conflict was by
no means shoved under the rug. However
sensitive, the subject was approached by
the participants to the conference with a
rare openness of mind and tolerance for
opposing views.
Evaluation du symposium
Evaluation of the symposium
En
général,
l’évaluation
écrite
du
symposium avec une centaine de
participants et participantes a été très
positive. Le fait d’organiser une telle conférence a été très apprécié et par après
beaucoup de commentaires positifs ont
été communiqués :
In general, the written evaluation and
comments of the speakers and participants
of the symposium turned out to be very
positive. The mere fact that this conference
was held was appreciated:
Ce qui a été souligné :
Le bon choix des thèmes, qui étaient très
diversifiés et multidisciplinaires, bonne
structure du programme. Des contenus
bien choisis et présentés ont été mentionnés comme très bien.
Très peu ont trouvé que les contenus
n’apportaient rien de nouveau ou se penchaient trop sur l’histoire et la politique et
que l’économique et la culture manquaient.
- brillante idée, eindrucksvolle Tagung, sujet
fondamental, choice of topics very good,
très instructive et intéressant, très bonne
initiative, beaucoup d’émotions, était
nécessaire, very
interesting, situation
devienne plus claire si elle est discutée
avec et entre de nombreux spécialistes
- There was room for looking at the future of
the region from different vantage points
and disciplines - history, anthropology,
sociology, religion - but also for taking the
measure of the individual tragedies that
have swept across the region. Most
poignant were the accounts of their own
tragedies volunteered by some of the
participants.
- C'était génial, chouette, intéressant, et
surtout convivial... en plus professionnel.
- Je saisis l'occasion de vous féliciter, vous
et vos partenaires allemands/es, pour votre
engagement dans l'organisation de la
conférence internationale.
- Vous avez fait un travail remarquable au
niveau de l'organisation de cette très
intéressante conférence. Et pour cela je
tiens à vous remercier. Outre la qualité des
papiers présentés, j'ai été très content de
faire la connaissance des participants
venus de la région des Grands Lacs.
- meinen Glückwunsch zu der gelungenen
Veranstaltung in Marburg. Ich fand sie
spannend und interessant und glaube, dass
Quelques-uns ont remarqué que la diversité
était trop grande et ne permettait pas de
discuter en profondeur.
The following points were emphasised:
A fine choice of topics which were diverse
and multi-disciplinary, the nicely structured
programme, contents that were well
selected and presented.
Very few remarked that the conference did
not contribute any new insights and that
historical and political topics were
discussed too much, while topics regarding
economic and cultural aspects were
neglected.
La diversité des conférenciers et participants (scientifiques et praticiens, témoignages personnels) :
Concerning the diversity of the speakers
and participants (scientists, practitioners,
individual testimonials):
- des conférenciers très compétents,
neutres avec de très bonnes contributions
(impeccables),
184
Evaluation of the Symposium – Moderators – Organisation Committee
Evaluation du Symposium – Modérateurs – Comité d’Organisation
- conférenciers de haut niveau,
- des personnes très compétentes de la
Région des Grands Lacs,
- invités éminents et impressionnants, je leur
adresse ma gratitude et mon admiration
- « Génial - que les Rwandais, Burundais et
Congolais se parlent sans s’attaquer »
- bon équilibre entre hommes et femmes,
- toutes les ethnies du Burundi et du
Rwanda étaient là.
D’autres critiques se réfèrent au manque
de temps pour les débats, et qu’il y avait
trop d’ateliers parallèles.
With the exception of a few hiccups, the
conference was very well organised, the
general atmosphere was pleasant, social
and amicable, there was an absence of
politicised competitions, everyone was
received with conviviality, and the
programme was well structured.
The fact that summaries were presented
during the plenary sessions was appreciated, although these summaries were
sometimes too long and not always of high
quality. The last session was perceived to
be too long.
The possibility for exchange between
participants, between different disciplines
and between academics and practitioners
was appreciated.
A translation into both languages during
the entire conference would be very
desirable.
It was also criticised that there was too little
time for discussions and that there were too
many parallel workshops.
La diversité d’opinions, les débats contradictoires :
Concerning the variety of (not necessarily
contradictory) opinions and the discussion
of opposed viewpoints:
„In a friendly climate many many difficult
and painful subjects were discussed with
much energy and ‘Hingebung’“.
“I came away with a sense of genuine
commitment on the part of the participants
to overcome ethnic hatreds and take a
fresh start.”
En général, la modération a été très bien
faite (au total douze modérateurs et modératrices) :
In general, the moderation of the sessions
was perceived to have been done very
well (12 moderators in total):
professionnelle, très compétent, aussi en
tant que médiateurs, bon travail avec
subtilité et respect, bien informé sur les
sujets – mais quelques fois, il y avait des
difficultés de bien gérer le temps ou des
participants qui prenaient beaucoup de
temps.
Plusieurs personnes ont souligné que la
conférence a changé leurs perspectives :
Many emphasised that attendance of the
conference had changed their perspective:
« du conflit, de l’histoire, not a big “gap”
between academics and practionners, ma
manière de penser, vision plus étroite, une
compréhension plus ample qu’avant,
mieux comprendre, questionnement sur
moi-même, mieux comprendre les conflits,
le symposium était très nécessaire, very
interesting, je dois voir mes propres
responsabilités, m’a inspiré à continuer mes
recherches ».
L’organisation a été très bonne avec de
petites difficultés, il régnait une bonne
ambiance,
pas
de
compétitions
«
politiciennes », très sociale, amicale,
accueillant avec convivialité, bonne
structure du programme.
Le fait de faire des restitutions des ateliers
en plénière a été apprécié, mais ces
restitutions étaient trop longues et la qualité
ne pas toujours assurée. De plus, la dernière
séance fut trop longue.
Les possibilités d’échange entre les
participants ont été très appréciées,
également la rencontre de diverses
disciplines et académiques et praticiens.
Une traduction dans les deux langues
utilisées durant toute la conférence est fort
souhaitable.
Pour l’avenir et concernant des recommandations les participants mentionnent :
Concerning the future and recommendations, the participants mentioned:
- I came back with a renewed optimism
about the future of the Great Lakes,
tempered by the enormity of the pending
problems.
- The continuing efforts to come to terms
with the genocidal past in the GLR”
- Désespoir : tâche énorme et complexe
mais aussi Espoir : un grand nombre de
185
Evaluation of the Symposium – Moderators – Organisation Committee
Evaluation du Symposium – Modérateurs – Comité d’Organisation
personnes de bonne volonté et il y a de
nombreux chemins à emprunter.
- Espoir mais aussi le sentiment que le
chemin est encore très long pour guérir les
blessures, arrêter les groupes violents et
l’exploitation des ressources pour des fins
de guerre.
- Il est possible de reconstruire un autre
Rwanda.
- Will to help to build a positive future.
- Hoffnung für Zukunft
- L’espoir que la paix reviendra.
- Que l’espoir d’un avenir meilleur est
permis.
- Espoir que les conclusions seront réalisées.
- Je dois continuer à chercher la paix
intérieure en moi, que je pourrais partager
avec les autres.
- Je suis réconcilié avec moi-même.
Broaden the agenda to include more
attention to regional issues as seen from the
perspective of regional organisations.
One should disseminate the results of the
conference.
Recommandations
De nombreuses personnes ont recommandé de :
faire un suivi du symposium, d’organiser
d’autres conférences, avec les mêmes
participants pour évaluer ce qui s’est fait
entre temps.
De plus, plusieurs participants ont suggéré
qu’il faudrait davantage associer les jeunes
et aussi les femmes.
Organiser
des
apprentissages,
des
formations pratiques pour les jeunes.
Construire la société des Grands Lacs en
associant toutes les ethnies (Hutu, Tutsi, Twa)
et penser à leur équilibre.
Broaden the agenda to include more
attention to regional issues as seen from the
perspective of regional organisations.
Vulgariser les résultats de la conférence.
Recommendations
Many recommended the following:
There should be a follow-up to the conference, there should be further conferences, with the same participants in order
to evaluate what has changed in the
meantime.
Many participants have underlined that
youths and women should be involved in
future activities.
There should be trainings and further
education for the young people.
Build a common society in the Great Lakes
Region involving an equilibrium of all ethnic
groups (Hutu, Tutsi, Twa).
186
Evaluation of the Symposium – Moderators – Organisation Committee
Evaluation du Symposium – Modérateurs – Comité d’Organisation
Moderators / Modérateurs et Modératrices du symposium
Ananie Bizimana, né au Rwanda, est formateur et conseiller en gestion
socio-économique, médiation et résolution des conflits et gestionnaire des
projets. Depuis 1994, il est Consultant-Directeur de l’Agence APTE,
Regensburg – Allemagne, il a fait plusieurs missions d’expertise et d’évaluation en Afrique et Amérique Latine en matière de politique de développement, suivi de projet, modération et accompagnement des
processus de gestion, de dé-escalation et de résolution des conflits. 19831994: Responsable national des projets, de l’administration et de gestion
de l’Association des Scouts au Rwanda, responsable pour l’organisation
des conférences, ateliers nationaux et internationaux, chargé national de
la coordination d’aide d’urgence à l’ASR, 1973-1982 Responsable de
comptabilité et du secrétariat à la Commune Urbaine de Ngoma, Butare, Rwanda.
Facilitateur de la rencontre internationale Imbuto – AEPCSM 2008.
Anna-Maria Brandstetter is senior lecturer in Social and Cultural
Anthropology at the Institute of Ethnology and Africa Studies of the
Gutenberg University Mainz. Her main fields of interests are political
anthropology, collective memory, public history, metaphor theory,
consumption and material culture. She has done fieldwork in the DR
Congo, Rwanda and Southern Ethiopia. Her most recent projects are
“Memory, politics and culture in post-genocide Rwanda”, “French
Colonial Soldiers in the Mainz Area after World War I” and “Alliances and
cultural neighbourhood - Comparative studies of changing cultural
contact in Southern Ethiopia”.
Selected Publications
• Gewalt, Trauma, Erinnerung / Violence, trauma, memory (2006). In: Marjorie
Jongbloed for the VolkswagenStiftung (ed.): Entangled. Annäherungen an zeitgenössische Künstler aus Afrika / Entangled: Approaching contemporary African artists.
Hannover: VolkswagenStiftung, 122-155.
• Erinnern und Trauern: Über Genozidgedenkstätten in Ruanda (2005). In: Speitkamp,
Winfried (ed.): Kommunikationsräume – Erinnerungsräume. Beiträge zur transkulturellen
Begegnung in Afrika. München: Martin Meidenbauer, 301-332.
• Erinnerung, Politik und Genozid in Ruanda (2005). In: Kößler, Reinhart; Daniel Kumitz
and Ulrike Schultz (eds.): Gesellschaftstheorie und Provokationen der Moderne.
Gerhard Hauck zum 65. Geburtstag. Münster: Dampfboot, 139-152.
• Die Rhetorik von Reinheit, Gewalt und Gemeinschaft: Bürgerkrieg und Genozid in
Rwanda (2001). In: Sociologus 51: 48-84.
• Ethnic or socio-economic conflict?: Political interpretations of the Rwandan crisis
(1996/97). In: International journal on minority and group rights 4, 3-4: 427-449.
• Leben im Regenwald. Politik und Gesellschaft bei den Bolongo (Demokratische Republik Kongo) (1998). Hamburg: Lit.
187
Evaluation of the Symposium – Moderators – Organisation Committee
Evaluation du Symposium – Modérateurs – Comité d’Organisation
Luise Lehmann is a German psychologist and communication specialist
working as independent consultant in international development
cooperation since more than 20 years. She knows the Great Lakes Region
from working visits in the early 1990s and again in 2004. Her main focus is
reproductive health including HIV and AIDS, but also other social aspects
(professional training, child labour and trafficking) and institutional
development. She has carried out a number of project progress reviews,
cross-country studies, ex-post final assessments and policy development
consultancies. Ms Lehmann has successfully led interdisciplinary and
international consulting teams. For the last five years, she has frequently
been working in regional contexts, such as the West and Central African Economic
Communities (ECOWAS and CEMAC) and the Caribbean CARICOM. Apart from audiovisual
media, she has published a study on the Social Marketing approach with regard to Family
Planning commodities.
Luise Lehmann est une psychologue allemande spécialisée en communication et travaillant
comme consultante indépendante dans la coopération internationale de l’aide au
développement depuis plus de 20 ans. Elle connaît la Région des Grands Lacs à partir des
visites de travails dans les années 1990 et en 2004. Son sujet principal est la santé de la
reproduction, y compris le VIH et le SIDA, mais elle couvre également d’autres aspects
sociaux comme la formation professionnelle, le trafic et les pires formes de travail des enfants
et le développement institutionnel. Elle a mené nombre d’évaluation de projets, d’études
inter-pays, d’évaluations ex-post et des consultances en matière de développements de
politiques. L. Lehmann a une bonne expérience dans le pilotage d’équipes interdisciplinaires
et internationales. Au cours des dernières années, elle a souvent travaillé dans des contextes
régionaux, tels que les Communautés Economiques en Afrique de l’Ouest et en Afrique
Centrale (CEDEAO et CEMAC) et le CARICOM aux Caraïbes. A part des médias audiovisuels,
Mme Lehmann a publié une étude sur l’approche du Marketing Social en matière des
commodités de Planning Familial.
Selected Publications
• Unnamed author of policy documents in the area of reproductive health incl.
HIV/AIDS, numerous unpublished feasibility and evaluation studies in development
cooperation, reproductive health incl. HIV/AIDS and Social Marketing.
• “Contraceptive Social Marketing in the Context of Family Planning Programmes –
Recommendations for German Development Cooperation“, BMZ Research Report n°
121, Weltforum Verlag Köln (co-authors: Gerlinde Bartels and Julien Biere) 1997.
• “Love stories from Africa” in profamilia magazin 'Beruf & Sexualität' 2/93.
• "The IEC Family Health Project in Zimbabwe" in 'Family Planning for Life:
Experiences and Challenges for the 1990s' (Ed. M. Bouzidi and R. Korte) 1990.
• Slide shows in the fields of "Developing Countries", "Social Learning", "Health", such as:
"Appropriate Technology for Developing Countries" for GTZ / gate; "The Labour
Movement in Hamburg before World War I" for FWU - Institute for Film and Images in
Science and Education; "The Disco Slide Show" for BzgA / BMJFG - Federal Ministry for
Youth, Family, Women and Health (Prevention of drug abuse among adolescents);
"Cancer - I can talk about it" for German Red Cross, Stuttgart
188
Evaluation of the Symposium – Moderators – Organisation Committee
Evaluation du Symposium – Modérateurs – Comité d’Organisation
René Lemarchand is Emeritus Professor at the University of Florida. He has
written extensively on the Great Lakes region. His book on “Rwanda and
Burundi” (1971) received the Herskovits Award from the American
Association of African Studies in 1971. He is the author of “Burundi: Ethnic
violence and genocide” (1995), and “Political awakaning in the former
Belgian Congo (1964). He served with USAID as Regional Advisor on
Governance and Democracy for West Africa in Abidjan (1992-1996) and
Accra (1997-1998).
His book on The Dynamics of violence in Central Africa” (University of
Pennsylvania Press) will be published in October 2008. He has served as
visiting lecturer at the University of California at Berkeley, Brown University, Concordia
University in Montreal, Smith College and the universities of Helsinki, Bordeaux, Copenhagen
and Antwerp.
He is currently working on a collaborative volume tentatively titled, “Forgotten genocides: The
interplay of memory and oblivion”.
Dieter Magsam, criminal defense lawyer; laureate, Price for Democracy and
Human Rights of the Werner Holtfort Foundation, 2003; project director and
judiciary, “Democracy and Reconciliation” in Rwanda, June 2003 to March
2005; advisor, Transitional Justice and Democratisation in Sub-Saharan
Africa.
Konrad Melchers, Dr., journalist; certified political economist and Dr. rer. pol.;
1969 postgraduate course at the German Development Institute (GDI-DIE);
1970-75 advisor at the Federal Ministry for Economic Cooperation and
Development (BMZ), division of East-Africa; afterwards publicist and
consultant in the field of development policy; 1983-2007 editor; since 2005
head
editor
at
the
specialised
periodicals
“Zeitschrift
epdEntwicklungspolitik” and “eins Entwicklungspolitik”, Frankfurt/M.
Selected Publications
• Die Sowjetische Afrikapolitik von Chruschtschow bis Breschnew, Berlin, 1980, S. 325.
• Gutachten zur Evaluierung der Länderprogramme des Deutschen Entwicklungsdiensts
(DED) in Simbabwe 1980/81 (Planungsgutachten), Kenia 1986, Tansania 1987.
• Herausgeber der Dokumentation des Kongresses von Heinrich Böll Stiftung und Bündnis
90/Die Grünen "Afrika zwischen Krise und Hoffnung", Oktober 1995, Berlin, S. 264.
• Von der Neuen Weltwirtschaftsordnung zur Globalisierung – Deutsche Wirtschafts- und
Entwicklungspolitik im Lichte der großen Debatten, in Deutsche Gesellschaft für die
Vereinten Nationen (Hg.), 25 Jahre Deutsche Mitgliedschaft in den Vereinten Nationen: Der Beitrag zur multilateralen Entwicklungszusammenarbeit, DGVN-Text 50, 1998,
S. 18-28.
• with Uschi Eid, Eritreas eigenständiger Weg, in Winfried Pinger (Hg.), Armutsbekämpfung - Herausforderung für die deutsche Entwicklungspolitik, Bad Honnef 1998, S. 153168.
• Die Neue Partnerschaft für die Entwicklung Afrikas (NEPAD). Ein Programm zur Erneuerung Afrikas? Erste Erfolge und Kritik, in: Entwicklung & ländlicher Raum. Beiträge zur Internationalen Zusammenarbeit, 1/2005, S.7-9.
189
Evaluation of the Symposium – Moderators – Organisation Committee
Evaluation du Symposium – Modérateurs – Comité d’Organisation
Liberate Nicayenzi, Présidente de l’association « Unions Nous pour la Promotion des Batwa –
UNIPROBA » et membre du Parlement, Burundi.
Eugène Rutembesa, Doctorat en Psychologie clinique et Psychopathologie à l’Université Paris
8, France; Doyen de la Faculté de Psychologie et Sciences de l’Education, Domaine de
Recherche: Psychotraumatisme et résilience, Thérapies traditionnelles au Rwanda, Les effets
post-traumatismes du génocide des Tutsi au Rwanda (Cohabitation entre victimes et
bourreaux).
Jean-Baptiste Sadiki, né au Rwanda, marié et père de 3 enfants. 1978-1983: Faculté des
Sciences de l’Education de l’Université Nationale du Rwanda. Licence en Sciences de
l’Education (1983). 1993-1997: Département Education et Développement International de la
Faculté des Sciences de l’Education de l’Université Johann Wolfgang Goethe de Francfort
sur le Main (Allemagne), Doctorat en Sciences de l’Education (1997).
Novembre 2005 – aujourd’hui: Coordonnateur du Programme Education de « Save the
Children » Suède en Côte d’Ivoire, 2003-2005: Expert au sein de la Coopération Technique
Belge, coresponsable du projet « Education de Base du Programme Plurisectoriel OubriténgaKourwéogo-Kadiogo » au Burkina Faso, 1998-2002: Spécialiste de Programme, Education de
Base à l’UNESCO, Paris, 1985-1991: Assistant d’enseignement à la Faculté des Sciences
Sociales et de Gestion de l’Université Nationale du Rwanda. Enseignant à l’Ecole Vétérinaire
de Kabutare, 1983-1985: Enseignant de cours sociaux à l’Ecole Sociale de Karubanda
(Rwanda).
Hildegard Schürings holds a PhD and master in sciences of education,
subsidiary subjects: sociology, philosophy, economics sciences and adult
education. She has been working in the Great Lakes Region in Africa since
1978 and has published widely on Rwanda, its history and colonial period,
the genocide, crimes against humanity, peace-promotion and youth. Since
1972, she has worked as project-director, advisor, researcher and teacher in
Germany and in development cooperation in Rwanda, Tunisia and as
international consultant in the areas of Vocational and Educational Training,
distance studies and e-learning, promotion of civil society, gender
mainstreaming, crisis prevention and peace-promoting projects in Europe, Maghreb, West
Africa and Central Africa. She works as researcher, lecturer, thesis advisor and trainer for
International governmental organisations, European and African non-governmental
organisations and has lectured at the Universities of Bilbao, Darmstadt, Frankfurt, Freiburg,
Kassel, Louvain-la-Neuve, Strasbourg and Tübingen. She is managing director of Imbuto e.V.
(www.imbuto.net) and the coordinator of the symposium.
Hildegard Schürings, Allemagne, doctorat et licence en sciences de l’éducation, matières
secondaires : sociologie, philosophie, sciences économiques, éducation des adultes. Depuis
1972 elle travaille dans les domaines de l’éducation des jeunes et adultes, de la formation
professionnelle et la promotion de l’économie, des études à distance, de la promotion de la
société civile, formation en genre, prévention des conflits et promotion de la paix. Depuis
1978 chercheure et conseillère dans la Region des Grands Lacs, elle a fait de nombreuses
publications sur le Rwanda et la région, l’histoire, la période coloniale, le génocide et les
crimes contre l’humanité et sur la promotion de la paix. Elle a travaillé pour de nombreux
organismes internationaux, des ONG européennes et africaines et comme professeure et
encadreure des thèses dans les Universités de Bilbao, Darmstadt, Frankfurt, Freiburg, Kassel,
Louvain-la-Neuve, Strasbourg, Tübingen. Elle est secrétaire exécutive de Imbuto asbl et
coordinatrice du symposium.
190
Evaluation of the Symposium – Moderators – Organisation Committee
Evaluation du Symposium – Modérateurs – Comité d’Organisation
Ulrich Wagner is Professor of Social Psychology and head of the
Department of Psychology at Philipps-University Marburg in Germany. He
heads the special graduate school addressing Group Focused Enmity,
sponsored by the German Science Foundation. Wagner’s research
interests include intergroup relations, ethnic prejudice and intergroup
violence.
Fra Zeller, Zurich, Teacher training, education in dramatic art in
Switzerland, USA, Great Britain, education in expressive art
therapy (Lesley College, Cambridge, USA). Playback Theatre
Practitioner (PB-School, New York, Jonathan Fox).
Several years of experience as drama teacher, personal coach,
trainer for communication (trying out of real-life on stage),
expressive art therapist, conductor of “Interaktives TheaterKnotenpunkt Zürich” since 1995 (Theatre of Oppressed, Augusto Boal), conductor and actor
in “Playback Theater Bumerang Zürich” and co-founder and co-leader of “Schule für
Playback Theater”, Germany, Switzerland and Austria. Trainer in the international exchange
Imbuto – AEPCSM 2008.
Jean-Louis Bisangwa is an International Business student at Manchester
Metropolitan University, Great Britain, he has been member of Imbuto since
its foundation in 2000. He participated in difference actions organised by
Imbuto, in Europe and Rwanda, promoting peace and reconciliation as
well as presenting Imbuto’s work.
Andrea Pabst studies political science, law, peace and conflict studies at the University of
Marburg and works as an assistant at Imbuto e.V.
Andrea Pabst est étudiante en sciences politiques, gestion des conflits et droit à la PhilippsUniversität Marburg, Allemagne. Elle travaille depuis 2007 pour Imbuto asbl et écrit
actuellement son mémoire sur la gestion du passé au Rwanda par les juridictions gacaca.
191
Evaluation of the Symposium – Moderators – Organisation Committee
Evaluation du Symposium – Modérateurs – Comité d’Organisation
The participants of the international exchange: Visions des Jeunes pour l’avenir
– Youth Visions for the Future » AEPCSM Rwanda – Imbuto Europe, August 2008
Denyse Amahirwe, AEPCSM - Rwanda
Eva Anderson-Park, Imbuto asbl - Allemagne
Jean-Louis Bisangwa, Imbuto asbl - Angleterre
Ananie Bizimana – Modérateur, Allemagne
Bernard Niyomugabo, AEPCSM Rwanda
Evalde Nteziryayo, AEPCSM Rwanda
Anne Gisèle Nimbona, Imbuto asbl- Allemagne
Xaverine Niwemutoni, Imbuto asbl - Rwanda
Marie Reine Nizeyimana, Imbuto asbl - France
Veronika Ott, Imbuto asbl - Allemagne
Andrea Pabst, Imbuto asbl - Allemagne
Jeanne d’Arc Uwimbabazi, AEPCSM Rwanda
Sang-Min Park, Imbuto asbl - Allemagne
Jasmin Scholle, Imbuto asbl - Allemagne
Hildegard Schürings, Imbuto asbl – Allemagne, Responsable du programme
Fra Zeller – Modératrice, Suisse
192
Evaluation of the Symposium – Moderators – Organisation Committee
Evaluation du Symposium – Modérateurs – Comité d’Organisation
Organisation Committee
Comité d'Organisation du Symposium
Magnus Adler lives in Marburg and studies political science at the University of Marburg.
Tatjana Anderson lives in Bellnhausen and is a retired teacher of psychology and arts.
Currently she works as an assistant at Imbuto e.V.
Eva Anderson-Park lives in Fronhausen and studies sciences of education, sociology, English
language and literature studies at the University of Mannheim.
Markus Bayer lives in Marburg and studies political science, sociology and peace and
conflict studies at the University of Marburg.
David Bodensohn lives in Langen and is doing a Voluntary Year of Social Service at a rest
home. He is going to study social sciences at the University of Marburg.
Gunnar Fischer lives in Marburg and studies political science, philosophy and peace and
conflict studies at the University of Marburg.
Aimée Frank is a student of the University of Marburg and works at Imbuto e.V.
Jana Groth lives in Leipzig and studies political science and philosophy. Currently she is an
internship at the centre for conflict studies (CCS).
193
Evaluation of the Symposium – Moderators – Organisation Committee
Evaluation du Symposium – Modérateurs – Comité d’Organisation
Sebastian Otto Günther lives in Marburg and studied political science, geography and peace
and conflict studies at the University of Marburg. He works as an assistant at the University of
Marburg and at Imbuto e.V.
Toni Hassenmeier lives in Lilienthal and studied commercial economics / business
administration in Essen and Vlissingen (Netherlands). Currently he is studying international
development studies at the University of Marburg.
Daina Hues lives in Marburg and studies peace and conflict studies at the University of
Marburg.
Sarah Koch lives in Hamburg and studies psychology at the University of Hamburg. She is also
a sign language interpreter.
Klaas Kunst studied political science. Currently he works as a research assistant at the Faculty
of Social Science and Philosophy at the University of Marburg. His main fields of interest are
democratisation, development and dealing with the past in Africa, especially South Africa,
Angola and the Great Lakes Region.
Kai Lipfert lives in Münchhausen and works at the centre for conflict studies (CCS).
Johannes Melzer lives in Marburg and studies political science, sociology and peace and
conflict studies at the University of Marburg.
Anne-Gisèle Nimbona lives in Bonn and studies sciences of education. She is the chairwoman
of Imbuto e.V.
Kaveh Omaraie-Hamedani lives in Marburg and studies sociology and economics at the
University of Marburg.
Kirsten Orschulok lives in Fuldabrück and studied political science, history and philosophy at
the University of Bielefeld. Currently she is in internship at the centre for conflict studies (CCS).
Veronika Ott lives in Marburg and studies sociology, sciences of education and peace and
conflict studies at the University of Marburg. She also works at Imbuto e.V.
Andrea Pabst lives in Marburg, studies political science, law and peace and conflict studies
at the University of Marburg and works as an assistant at Imbuto e.V.
Steffi Pohl lives in Marburg, studies psychology at the University of Marburg and works as an
assistant at the centre for conflict studies (CCS).
Jasmin Scholle lives in Fronhausen and studied sciences of education and German as a
foreign language at the University of Marburg. She also works at Imbuto e.V.
Carla Schraml lives in Marburg and studied sociology at the Universities of Dresden and Trento
(Italy). Currently she works as a research assistant at the department of sociology and the
centre for conflict studies (CCS).
Marion Vohla lives in Fronhausen and is a retired teacher of French, biology and arts.
Currently she works at Imbuto e.V.
Gudrun Werding lives in Lohra and is a retired teacher of English and biology. Currently she
works at Imbuto e.V.
194
Evaluation of the Symposium – Moderators – Organisation Committee
Evaluation du Symposium – Modérateurs – Comité d’Organisation
Coordination of the Symposium
Hildegard Schürings, PhD and master in sciences of education, subsidiary
subjects: sociology, philosophy, economics and adult education. She has
worked in the Great Lakes Region in Africa since 1978 and has published
widely on Rwanda, its history and colonial period, the genocide, crimes
against humanity, peace-promotion and youth. Since 1972, she has worked as
project-director, advisor, researcher and teacher in Germany and in
development cooperation in Rwanda, Tunisia and as international consultant
in the areas of Vocational and Educational Training, distance studies and elearning, promotion of civil society, gender mainstreaming, crisis prevention and peacepromoting projects in Europe, Maghreb, West Africa and Central Africa. She works as
researcher, lecturer, thesis advisor and trainer for International governmental organisations,
European and African non-governmental organisations and has lectured at the Universities of
Bilbao, Darmstadt, Frankfurt, Freiburg, Kassel, Louvain-la-Neuve, Strasbourg and Tübingen. She
is managing director of Imbuto e.V. (www.imbuto.net) and the coordinator of the symposium.
Selected Publications related to the Great Lakes Region
• „Wiederaufbau in Ruanda – dreizehn Jahre nach dem Genozid“, Dossier „eins – Entwicklungspolitik, Information Nord-Süd“, 5-2007, Frankfurt, 24 p. (Co-editor)
• 12 years after genocide in Rwanda - Youth between hope and suffering.
Traumaresearchnetwork-Conference, St. Moritz, 14.-17. September 2006, Hamburger
Institut für Sozialforschung, Germany
• Versagen im Angesicht des Völkermords – Die unabhängige Untersuchung zur Verantwortlichkeit der internationalen Gemeinschaft in Rwanda 1994. In: Vereinte Nationen,
Bonn, 2/2000
• Kann Wissenschaft zu Gerechtigkeit in der Region der Großen Seen in Zentralafrika beitragen? In: Aithal, Vathsala/ Schirilla, Nausikaa/ Schürings, Hildegard/ Weber, Susanne
(Hg.): Wissen, Macht, Transformation – Internationale und interkulturelle Perspektiven.
Frankfurt am Main, Mai 1999
• Verdeckte Fronten - Zu den Hintergründen des Konflikts in Ostzaire. In: Blätter für deutsche und internationale Politik. Bonn, Januar 1997, p. 74-82
• Ein Volk verlässt sein Land - Krieg und Völkermord in Ruanda. Köln 1994/1995
• Rwandische Zivilisation und christlich-koloniale Herrschaft. Forschungsreihe: Erziehung
und Gesellschaft im internationalen Kontext. Frankfurt 1992.
Johannes M. Becker; Administrative Director and Coordinator of
the Centre for Conflict Studies (CCS) at the Philipps University of
Marburg; Lecturer at the European School of Business (ESB) in
Reutlingen (Advanced Technical College for Technology
Reutlingen); Senior Researcher in the Department of Social
Science and Philosophy of the Philipps University of Marburg;
Guest Professorship at the Humboldt's University of Berlin.
Publications
• Feindbilder im Dienste der Aufrüstung. Beiträge aus Psychologie und anderen Humanwissenschaften. (Hrsg. zus mit G. Sommer, R. Zimmermann u. K. Rehbein) Marburg
(Schriftenreihe der IAFA, Universität Marburg), 3. Aufl. 1991.
• Militär und Legitimation. Eine vergleichende Studie zur Sicherheitspolitik Frankreichs
und der Bundesrepublik Deutschland. Marburg (IAFA) 1997.
• Der Jugoslawienkrieg - Eine Zwischenbilanz. (Hrsg. mit Gertrud Brücher). Münster (LITVerlag) 2. Aufl. 2002.
195
Evaluation of the Symposium – Moderators – Organisation Committee
Evaluation du Symposium – Modérateurs – Comité d’Organisation
•
•
•
Jugend, Streitkräfte und Europäische Sicherheit/Jeunesse, Défense et Sécurité en Europe. Arbeitstexte des Deutsch-Französischen Jugendwerkes/Office Franco-Allemand
pour la Jeunesse (DFJW/OFAJ) 21. Berlin/Paris 2003 (Mit-Hrsg.).
European Integration. Lehrbuch für die European School of Business (ESB) in Reutlingen.
Reutlingen 2004 (www.fh-reutlingen.de).
Zerstörter Irak – Zukunft des Irak. Der Krieg, die Vereinten Nationen und die Probleme
des Neubeginns. (Hrsg. mit Herbert Wulf). Münster (LIT-Verlag) 2008 (im Erscheinen).
Ulrich Wagner is Professor of Social Psychology and head of the
Department of Psychology at Philipps-University Marburg in Germany. He
heads the special graduate school addressing Group Focused Enmity,
sponsored by the German Science Foundation. Wagner’s research
interests include intergroup relations, ethnic prejudice and intergroup
violence.
Selected Publications
• Wagner, U., Tropp, L., Finchilescu, G., & Tredoux; C. (eds.) (2008). Improving intergroup
relations: Building on the legacy of Thomas F. Pettigrew. Oxford: Blackwell.
• Wagner, U., Christ, O., & Pettigrew, T.F. (2008). Prejudice and group related behaviour
in Germany. Journal of Social Issues, 64, 403-416.
• Wagner, U. & Farhan, T. (2008). Programme zur Prävention und Veränderung von Vorurteilen gegenüber Minderheiten. In L.E. Petersen & B. Six (Hrsg.), Stereotype, Vorurteile
und soziale Diskriminierung Theorien, Befunde und Interventionen (23-282). Weinheim:
Beltz.
• Becker, J., Wagner, U. & Christ, O. (2007). Nationalismus und Patriotismus als Ursache
von Gruppenbezogener Menschenfeindlichkeit. In W. Heitmeyer (Hrsg.), Deutsche
Zustände. Folge 5 (131-149). Frankfurt: Suhrkamp.
• Pettigrew, T.F., Christ, O., Wagner, U. & Stellmacher, J. (2007). Direct and indirect
intergroup contact effects on prejudice: A normative interpretation. International
Journal of Intercultural Relations.
• Wagner, U. & Christ, O. (2007). Intergroup aggression and emotions: A framework and
first data. M. Gollwitzer & G. Steffgen (Hrsg.), Emotions and aggressive behaviour (pp.
133-148). Göttingen: Hogrefe & Huber.
196
Participants of the Symposium
Participants du Symposium
Participants of the Symposium / Participants du Symposium
1
2
3
Family Name/
Nom
Adam
Adler
Amahirwe
First Name/
Prénom
Fabrice
Magnus
Denyse
4
5
Anderson
Anderson
Eva
Tatjana
6
Bachmann, Dr.
Ursula
7
8
9
Becker, PD Dr.
Bayer
Beyer
Johannes
M.
Markus
Edgar
10
Bisangwa
Jean-Louis
11
12
13
Ananie
Rüdiger
David
14
15
Bizimana
Blumoer Dr.
Bodensohn
Bonacker, Prof.
Dr.
Brandstetter, Dr.
16
17
18
19
Bucyalimwe,
Prof.
Carandanis
Claar
Dahlmanns
20
21
Devos
Dias, Prof. Dr.
Thorsten
University of Marburg CCS
Anna-Maria University of Mainz
Centre d'Etude de la
Mararo
Région des Grand Lacs
Stanislas
africains, Antwerp
Emmanuelle University of Frankfurt
Simone
University of Marburg
Erika
University of Mainz
Stichting/Fondation Michel
Albert
Kayoya, Belgium
Patrick
University of Frankfurt
22
23
Dietz
Diomède
Martin
M.-Louise
24
25
Engel
Fischer
Jens
Gunnar
26
27
Frank
Frey
Aimée
Christine
28
Garretón
Roberto
Institution/Institution
University of Marburg
AEPSCM - Rwanda
Imbuto, University of
Mannheim
Imbuto
University of Marburg CCS,
coordinator of the
Symposium
University of Marburg
Imbuto, University of
Manchester - GB
APTE, Peace University Africa,
Regensburg
GTZ
University of Marburg CCS
NGO "New Life in the Congo"
Otto-von-Guericke-Universität
Magdeburg
University of MarburgCCS
Imbuto, University of Marburg
CCS
University of Marburg
Conseil de l’organisation
féministe chilienne, Institut de
la Femme, Chili
197
Profession
Interpreter/Interprète
Student
Psychologist
Student - Sciences of
Education
Teacher
Doctor for
Psychiatry und
Psychotherapy
Student
Interpreter/Interprète
Student
Formateur
Team Leader
Student
Anthropologist
Research assistant
Student
PhD student
PhD student
Professor emeritus
Consultant en aide
humanitaire
Interpreter/Interprète
Student
Student
Student
PhD student
Avocat consultant en Droits
de l?Homme, former
Special UN-Adviser for the
Participants of the Symposium
Participants du Symposium
Zaire/ Congo
29
30
Gasinzigwa
Kagoyire
Groth
Marie
Grâce
Jana
31
Guesnet
Lena
32
33
34
35
36
37
38
39
40
41
42
Günther
Hartwich
Hassenmeier
Henkinet
Hues
Iburg
Ingelaere
Janetschek
Janusch
Koch
Kunst
Sebastian
Colette
Toni
Laurence
Daina
Nicola
Bert
Hannah
Johanna
Sarah
Klaas
University of Marburg CCS
University of Marburg
University of Antwerp
University of Stuttgart
Imbuto, Hamburg
University of Hamburg
University of Marburg CCS
43
Luise
Moderator
44
45
46
Lehmann
Lemarchand,
Prof. Dr.
Lipfert
Magsam
René
Kai
Dieter
47
Martin, Dr.
Nicola
48
49
Mbuzukongira
Melchers
Gracieux
Nina
University of Florida
University of Marburg CCS
Lawyer, Hamburg
Bundesanstalt für
Geowissenschaften und Rohstoffe, Braunschweig
Max-Planck-Institut
Heidelberg
Berlin
50
51
52
53
Melchers, Dr.
Melzer
Mercier
Merkx
Konrad
Johannes
Muriel
Elisabeth A.
54
Mugemana
Clement
Ibuka - Rwanda
University of Marburg CCS
Bonn International Center for
Conversion - BICC
University of Marburg,
Imbuto
University of Marburg
Moderator, Berlin
University of Marburg CCS
GTZ
University Louvain-la-Neuve,
Belgium
55
56
Mujawayo
Mukamukama
Esther
Spéciose
57
58
59
Mukarusanga
Musangwa
Mwema
Therapist, writer
Brussels, Belgium
Université Nationale du
Rwanda, Université de
M.Ignatiana Toulouse
Remy
University of Frankfurt
Pascal
GTZ-Rwanda
60
Ndaywel è
Nziem, Prof. Dr.
Isidore
61
Ngarambe
Joseph
CEMAF/ Paris I – Sorbonne;
Université de Kinshasa
Tribunal Pénal International
pour le Rwanda
198
Coordinatrice du project
Gacaca et Trauma
Student
Research assistant
Research assistant
Interpreter/Interprète
Student
Interpreter/Interprète
Student
Student
Researcher
Student
Communic. Scientist
Student
PhD student
Psychologist/ International
Consultant
Professor Emeritus
International Consultant
Project Coordinator Central
Africa/BGR
PhD student/Researcher
International Consultant,
Journalist
Student
Interpreter/Interprète
Advisor
Ecrivaine, Thérapeute pour
le traumatisme, founder of
AVEGA
Chef de département de
psychologie clinique
Student
Sociologue/ Pedagogue
Professeur, Historien
Economiste/ Chercheur
Participants of the Symposium
Participants du Symposium
Unions Nous pour la
Promotion des Batwa,
Burundi
62
Nicayenzi
Liberate
63
Nimbona
64
65
68
Nimubona, Dr.
Niwemutoni
Niyomugabo
Rubangura
Nizeyimana
Nobirabo,
Dr.habil.
Anne-Gisèle Imbuto, University of Bonn
Université de Bujumbura,
Institut de Développement
Julien
Economique (IDEC)
Xavérine
Imbuto
69
Ntamahungiro
Joseph
70
71
Ntezimana, Dr.
Nteziryayo
72
73
74
Okoro
Omaraieh
Orschulok
Laurien
Evalde
Cyprian
Friday
Kaveh
Kirsten
University of Marburg
University of Marburg CCS
University of Marburg CCS
Animation Théologique
Student
PhD Candidate in Political
Science
Student
Student
75
Ott
Veronika
Imbuto, University of Marburg
Student
76
77
Pabst
Parduhn
Andrea
David
Imbuto, University of Marburg
University of Berlin
Student
Student
78
79
Park
Pohl
Sang-Min
Steffi
PhD student
Student
80
Rieder
Heide
81
Rutembesa, Dr.
82
Sadiki, Dr.
Eugène
JeanBaptiste
Imbuto, University of Marburg
University of Marburg CCS
Service civil de paix
(ZFD) du Service Allemand de
Développement (DED)
Université Nationale du
Rwanda
83
Sanane Chiko
Joseph
84
85
86
Scholle
Schraml
Schröer
Jasmin
Carla
Nicole
87
Schürings, Dr.
Hildegard
88
Sibomana
René
89
90
Thibodeau
Tillmann
91
Umurerwa
Jovette
Carolin
MarieAimable
66
67
Bernard
Marie-Reine
Prosper
Musafiri
AEPCSM - Rwanda
Imbuto, University of Lille
Faculté de droit de
l’Université de Berne
Réseau Européen pour
l’Afrique Centrale EURAC
Association Modeste et
Innocent, Rwanda
AEPCSM - Rwanda
Moderator, Bruxelles
LDGL- Ligue des Droits de la
personne dans la région des
Grands Lacs
Presidente de l`Association
MA in Sciences of
Education
Professeur de Science
politique
Juriste, Pedagogue
Psychologist
Student
Assistant à l’Université
Journaliste
Assistante technique
Doyen de la Faculté de
l'Education
Psychopédagogue,
International Consultant
Stichting/Fondation Michel
Kayoya, Belgium
University of Marburg
Lawyer-Avocat/Président
de la LDGL
Diploma in Sciences of
Education
PhD student
Student
International Consultant,
Sciences of Education
Secrétaire exécutif,
Educateur
Membre du conseil de
direction – coordinateur
(2004 à 2008)
Student
Amabilis, Belgium
Pedagogue
Imbuto, University of Marburg
University of Marburg CCS
University of Marburg
Imbuto, coordinator of the
symposium
Action jeunesse et
environnement, Senegal
199
Participants of the Symposium
Participants du Symposium
92
93
94
95
Uwimbabazi
Viebach
Vohla
Wagner
Jeanne
d'Arc
Julia
Marion
Andreas
96
97
Wagner, Prof.
Dr.
Werding
Ulrich
Gudrun
98
99
Weyel, Dr.
Wohlfarth
Volker
Charlotte
University of Marburg CCS
Imbuto
Global Policy Forum EuropeGPF, Bonn
University of Berlin
Franziska
Brigitta
Knotenpunkt, Zürich
Association Sembura, Luzern
100 Zeller
101 Züst
AEPCSM - Rwanda
INEF-University of Duisburg
Imbuto
DED/ZFD-Rwanda
200
Student
PhD student
Teacher
Peace Advisor
Professor of Social
Psychology, Head of the
Department of Psychology
at Philipps-University
Marburg
former editor-in-chief
"Vereinte Nationen"
Student
Drama educator,
Switzerland
Switzerland