Médicaments, reproduction, grossesse et allaitement : Actualités 2007
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Médicaments, reproduction, grossesse et allaitement : Actualités 2007
Médicaments, reproduction, grossesse et allaitement : Actualités 2007 Christine Damase-Michel, Isabelle Lacroix Unité « Médicaments reproduction, grossesse et allaitement », Service de Pharmacologie Clinique, Centre Midi-Pyrénées de PharmacoVigilance, de Pharmacoépidémiologie et d'Informations sur le Médicament Faculté de Médecine 37 Allées Jules-Guesde 31000 TOULOUSE Tél : 05 61 25 51 12 Fax : 05 61 25 51 16 Mail : [email protected] Sites Internet : www.pharmacovigilance-toulouse.com.fr www.bip31.fr 1 Nous envisagerons différents points d’actualité concernant les risques de la prise de médicament sur la reproduction : fertilité, grossesse et allaitement. Fertilité Les inhibiteurs calciques pourraient provoquer une atteinte réversible de certaines fonctions de spermatozoïdes. Ils pourraient être à l’origine d’échec de fécondation in vitro (FIV) en perturbant la fixation des spermatozoïdes sur la zone pellucide par dysfonctionnement de la réaction acrosomique ce qui empêcherait la fécondation. Une dizaine de cas ont été publiés. Cet effet semble réversible après l’arrêt de l’inhibiteur calcique puisque certains patients ont pu concevoir après changement pour un inhibiteur de l’enzyme de conversion. On retrouve le même effet in vitro après incubation de spermatozoïdes en présence de nifédipine. Ces éléments sont encore insuffisants pour conclure mais ils apparaissent néanmoins suffisants pour proposer une attitude de prudence vis-à-vis de la prise de ces médicaments chez les couples devant avoir recours à une assistance médicale à la procréation ou même désirant procréer (si des difficultés de conception sont évoquées). Grossesse Valproate et grossesse : La prise de valproate de sodium (DEPAKINE°, DEPAKINE CHRONO, DEPAKOTE°…) par une femme enceinte est associée à un risque de malformation 2 à 5 fois supérieur à celui de la population générale. Les malformations portent le plus souvent sur le tube neural, le cœur, la face (dysmorphies, fentes labiales et/ou palatines, craniosténose), les membres, le système uro-génital. Le risque d’anomalie de fermeture du tube neural est voisin de 2 à 3 % (versus 0,1% dans la population générale) et augmente avec les posologies et la co-prescription d’autres 2 anticonvulsivants. Une supplémentation en acide folique (5 mg/jour) un mois avant et deux mois après la conception est recommandée. Plusieurs études récentes mettent en évidence une diminution du QI verbal chez les enfants exposés in utero à l’acide valproïque en mono ou polythérapie, expliquant un recours accru au soutien scolaire et à la rééducation orthophonique. Quelques troubles du comportement sont également signalés chez ces enfants justifiant une thérapie adaptée. Ces résultats sont issus d’équipes différentes et prennent en compte les facteurs confondants principaux : QI maternel, niveau socio-économique et d’instruction de la mère, nombre de crises épileptiques pendant la grossesse ... Ces éléments, portant sur le développement psychomoteur et les fonctions cognitives des enfants exposés au valproate de sodium in utero, méritent d’ores et déjà d’être pris en compte lors du choix d’un traitement antiépileptique ou normothymique chez une femme en âge de procréer. Penser à réévaluer les prescriptions de valproate instaurées dans l’enfance à l’adolescence. Préférer si possible d’autres alternatives médicamenteuses : olanzapine ou à défaut carbamazepine ou lithium comme normothymique, lamotrigine (cf paragraphe suivant) ou clonazepam dans l’épilepsie en prévoyant une surveillance adaptée de la grossesse. Lamotrigine et grossesse: Les résultats de l’analyse des données concernant des grossesses sous lamotrigine montrent que le taux de malformations majeures chez les nouveau-nés exposés à la lamotrigine lors du premier trimestre de grossesse est similaire à celui de la population générale et largement inférieur à celui observé chez les nouveau-nés exposés in utero à l’acide valproïque. Cependant l’analyse des données Nord-américaines suggère une augmentation du risque de fentes labiales et palatines. Six autres études utilisant d’autres registres de grossesse ne retrouvent pas ce risque. Compte tenu de ces résultats (à confirmer), la lamotrigine représente l’antiépileptique pour lequel on possède le plus de recul pendant la grossesse (plus de 2000 grossesses exposées). Une surveillance échographique (du palais) pourra être réalisée, par précaution, chez les patientes exposées à la lamotrigine. Inhibiteurs de l’enzyme de conversion (IEC) et grossesse : Une étude publiée dans le New England Journal of Medicine s’est intéressée au risque lié à l’utilisation des IEC au premier trimestre de grossesse. Elle porte sur 209 enfants exposés au premier trimestre à un IEC, 202 enfants exposés à un autre antihypertenseur et 29 096 enfants non exposés. 18 enfants (7,2%) sont porteurs d’une malformation dans le groupe exposé aux IEC contre 1,7% et 2,6% respectivement dans les 2 autres groupes. Les risques de malformation 3 cardiovasculaire et du système nerveux central sont respectivement multipliés par 3,72 [1,89-7,30] et 4,39 [1,37-14,02] sous IEC. Malgré quelques limites méthodologiques, ces résultats soulignent la nécessité d’éviter l’exposition à un IEC tout au long de la grossesse. Pour mémoire, les inhibiteurs de l’enzyme de conversion (IEC) tout comme les antagonistes des récepteurs à l’angiotensine II sont contre-indiqués au 2nd et 3ème trimestre de grossesse en raison d’une foetotoxicité touchant essentiellement le rein. Dans la mesure du possible, mieux vaut prescrire à toute femme en âge de procréer susceptible d’être enceinte un antihypertenseur compatible avec une grossesse (alpha-methyldopa, labetalol…). Allaitement Vaccin contre la coqueluche : La vaccination contre la coqueluche pour le nourrisson est préconisée dès l’âge de 2 mois selon le schéma suivant ; primovaccination à 2, 3, 4 mois et rappel à 16-18 mois. Compte tenu de la recrudescence des cas de coqueluche observée chez de très jeunes nourrissons contaminés par des adolescents ou de jeunes adultes (chez qui la protection acquise après la maladie ou la vaccination a disparu), le calendrier vaccinal a introduit en 1998, un rappel de vaccin coquelucheux entre 11 et 13 ans. Ce rappel s’effectue avec le vaccin coquelucheux acellulaire en même temps que le 3ème rappel Diphtérie-Tétanos-Poliomyélite. En 2004, le Conseil Supérieur d’Hygiène Publique de France a émis un nouvel avis qui recommande : - de vacciner les adultes susceptibles de devenir parents dans les mois ou années à venir ; - de vacciner, à l’occasion d'une grossesse, des membres du foyer (enfant qui n'est pas à jour pour cette vaccination, adulte qui n’a pas reçu de vaccination contre la coqueluche au cours des dix dernières années), selon les modalités suivantes : père et enfants : durant la grossesse de la mère mère : le plus tôt possible après l'accouchement. Pour la revaccination des adultes, on utilise un vaccin contenant une dose réduite en anatoxine diphtérique. En effet, l’anatoxine diphtérique peut causer des réactions locales et fébriles sévères 4 mais passagères dont la fréquence augmente avec l’âge, la dose d’anatoxine et le nombre de doses administrées. Se pose donc le problème de la possibilité de vaccination des femmes allaitant. Or le libellé actuel du Résumé des Caractéristiques du Produit (RCP) du Vidal est le suivant: « Il est préférable d'éviter l'utilisation de ce vaccin pendant l'allaitement. » Le vaccin acellulaire contre la coqueluche (seul disponible en France) est un vaccin inactivé composé d’antigènes coquelucheux. Il n’a pas de pouvoir infectant et n’expose donc pas l’enfant allaité à un risque infectieux. On ne retrouve pas de publication concernant des femmes ayant été vaccinées contre la coqueluche pendant la période d’allaitement. Aucun effet indésirable n’a été signalé chez des enfants allaités par des mères ayant été vaccinées en post partum. Le CDC stipule que « les vaccins inactivés, recombinants, contenant des sous-unités ou des polysaccharides, les vaccins conjugués et les anatoxines sont sans risque pour les mères qui allaitent et pour leurs enfants » (recommandations générales sur la vaccination, 2002) et précise que les femmes, y compris celles qui allaitent, devraient recevoir le vaccin dans le post-partum immédiat (avant la sortie de la maternité si possible) si elles ne l’ont pas reçu avant la grossesse (décembre 2006). Compte tenu de ces éléments, l’information allaitement du RCP et de la notice est donc modifiée en ce sens : « La vaccination contre la coqueluche est possible au cours de l’allaitement » Méthadone : La méthadone, médicament de substitution de la pharmacodépendance aux opiacés, est bien évaluée au cours de la grossesse et peut être utilisée chez la femme enceinte substituée. Le passage dans le lait maternel de la méthadone avait conduit à préconiser aux femmes traitées d’éviter d’allaiter leur enfant. Des données nouvelles permettent d’analyser un plus grand nombre d’enfants exposés (plus de 200 rapportés dans la littérature). Le passage de la méthadone dans le lait est faible : ces faibles quantités ne permettent pas de prévenir un syndrome de sevrage du nouveau-né mais peuvent retarder l’apparition de ce syndrome. Par ailleurs, rappelons que des cas de torsades de pointes et d’allongement du QT ont été rapportés chez des adultes traités par méthadone ainsi que des modifications du rythme fœtal lors d’exposition in utero. Au vu de ces différents éléments, l’allaitement maternel par une patiente traitée par méthadone est envisageable sous réserve d’une évaluation individuelle des facteurs de risque : dose de méthadone, consommations associées (médicamenteuses ou non), interaction avec des médicaments allongeant l’espace QT pris par le nourrisson : erythromycine, cisapride….). 5 References: - Abdel-Latif M.E. et al, Effects of breast milk on the severity and outcome of neonatal abstinence syndrome among infants of drug-dependant mothers. Pediatrics. 2006; 117: e1163-9. - Adab N. et al. J. The longer term outcome of children born to mothers with epilepsy. Neurol Neurosurg Psychiatry, 2004, 75, 1575-1583 - AFSSAPS, Laboratoires Bouchara-Recordati. Lettre d’information aux médecins prescripteurs, cardiologues, pharmaciens et acteurs de soins auprès de patients usagers de drogue. Chlorhydrate de methadone : information importante de pharmacovigilance, 2 Janvier 2007. - Benoff S et coll. 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MMWR December 15, 2006 / 55(RR17);1-33 - Cooper W et al, « Major Congenital Malformations after first-trimester exposure to ACE inhibitors » ; NEJM 2006 354 ; 23 : 2443-2451. - Holmes LB et al. Increased risk for non-syndromic cleft palate among infants exposed to lamotrigine during pregnancy. Birth Defects Res A Clin Mol Teratol 2006;76(5)318. - Jansson L.M. et al. Fetal response to maternal methadoneadministration. Am J Obstet Gynecol. 2005; 193 : 611-7. - Jansson L.M. et al. Methadone maintenance and lactation : a review of the literature and current management guidelines. J. Hum. Lact. 2004; 20 : 62-71. - Patrat C et coll. Zona pellucida from fertilized human oocytes induces a voltage-dependent calcium influx and the acrosoma reaction in spermatozoa, but cannot be penetrated by sperm. BMC Developmental Biology 2006, 6:59 - PhilippB.L. et al. Methadone and breastfeeding : new horizons. Pediatrics. 2003; 111 : 1429-30. - Wheeler A.D., Tobias J.D. 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