A ccéder à l`étude A ccéder à l`étude

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I° Une activité complémentaire (indispensable) aux
formes traditionnellement diversifiées
On trouve également des moulins à vent et à eau qui étaient à usage
alimentaire2.
1
2
J. BAYLE, Les industries du Pays de Mirepoix au XVIème siècle.
Histoire et patrimoine en Pays Mirepoix, 1999.
Toutes ces industries avaient en commun, en plus de
l'utilisation de l'eau comme force motrice, la transformation
de matières premières locales substituées peu à peu par
des matières premières importées.
De plus, jusqu'au XIXème siècle, les activités industrielles,
excepté celle de la métallurgie du bois, constituaient des
activités complémentaires du secteur agricole, sources
de revenus. Elles employaient bon nombre " d'ouvrierspaysans " travaillant à façon pour le compte de la
bourgeoisie des négociants " fabricants ".
Par ailleurs, elles se répartissaient originellement le long
de tous les cours d'eau. Or, la tendance à la
concentration et à la spécialisation des usines au
XIXème siècle les ont faites disparaître dans les vallées les
plus reculées et les plus mal desservies, telles que celle du
Douctouyre ; tandis que d'autres vallées se sont
spécialisées dans la fabrication de certains produits : le drap
à Montferrier, Villeneuve, Lavelanet, Laroque, où les eaux
talqueuses du Touyre conviennent parfaitement au
travail de la laine ; le peigne à corne, substitué au peigne
de buis, dans la vallée de l'Hers et ses abords, de Fougax et
de Bélesta à La Bastide-sur-l'Hers, au Peyrat et à Léran.
Ainsi, les deux axes industriels du pays d'Olmes ont été
Des constructions économiques et sociales traditionnelles
conditionnées par les entités naturelles
En Pays d'Olmes, les nombreux cours d'eau, la
présence d'une main-d'œuvre importante, les vastes forêts et
les quelques gisements de minerais sur le Front pyrénéen et
le Plantaurel, la relative facilité de desserte, ont constitué
autant d'avantages pour la constitution d'une activité
industrielle initialement diversifiée.
De plus, le piémont pyrénéen, ne bénéficiant pas de la grande
activité pastorale de la montagne, a dû se tourner vers
l'industrie pour subvenir à ses besoins.
De nombreux moulins ont en effet jalonné les cours
d'eau, la force motrice hydraulique ayant été la seule énergie
utilisée pour l'industrie jusqu'au XXème siècle.
Ainsi, des " moulins à fer " sont implantés vers le milieu du
XVIIème siècle, servant aux forges seigneuriales.
Les moulins à jais de Lagarde, Léran, La Bastide sur l'Hers,
Le Peyrat, servent à polir à la meule les pierres de lignite
extraites parmi les grès et les marnes dans les mines du
Plantaurel.
Les scieries débitent le buis utilisé pour la fabrication de
peignes, industrie florissante au XVIème siècle, centrée sur la
Bastide sur l'Hers.
Enfin, l'emplacement des " moulins battants ", servant aux
travaux de finition de l'industrie textile, dessine la carte
d'implantation du textile. Vers 1673, on en trouve sur le
Touyre à Laroque, Léran et sur l'Hers à Lagarde et Mirepoix 1.
Ils étaient destinés soit au commerce : " moulins de commerce " de
Mirepoix et de Moulin Neuf; soit aux ménages : " moulins à façon " de
Belloc, Dun, Engraviès, Manses, Mirepoix, Le Peyrat, St Quentin, Patris
d'en bas. Ce dernier, qui date d’environ 1850, a été reconverti en
restaurant. On peut encore y voir, dans la salle à manger, les deux
meules intégrées au décor avec leurs déversoirs.
Le moulin ou ancienne minoterie de Besset est une grande bâtisse,
située sur les bords de l'Hers, en ruine et dont le canal d'alimentation est
cassé. La toiture est en partie écroulée. Il y avait trois meules pour la
minoterie, qui servait au commerce, et deux meules dans la partie plus
ancienne sui servait au particulier. C'était un moulin à farine. Déjà utilisé
au XVIIème siècle, son activité a cessé au début du XXème siècle.
La plupart de ces moulins sont en ruine et se situent sur des terrains
privés.
Les fondements du paysage -
C - L'INDUSTRIE
VOIES D’EAU ET INDUSTRIE
5
Cours d’eau
1
2
1 : Canal d’amenée d’eau dans la partie abandonnée de l’usine de peigne en corne de Lesparrou.
2 : Le Touyre traverse Montferrier, Villeneuve-d’Olmes, Lavelanet et Laroque-d’Olmes. Le long de ce trajet, sont
3
4
implantées les usines textiles qui recevaient anciennement les eaux talqeuses, propices au travail de la laine.
3 : Chute d’eau de l’ancienne usine Dumons à Lavelanet.
4 : Canal des moulins de Mirepoix.
5 : Carte réalisée par M. CHEVALIER, correspondant à l’implantation de l’industrie dans le pays, aux alentours de
1950.
En Ariège, ce sont surtout les protestants - la
pénétration du protestantisme datant du XVIème siècle - qui
ont lancé l'industrie du peigne ainsi que celle du jais.
L'industrie du jais est très ancienne en Pays
d'Olmes : dès le XVIème siècle, les mines de jais autour de
Peyrat et de La Bastide sur l'Hers ont été exploitées. Ce
lignite d'un noir brillant servait à faire des perles de chapelet
et des ornements de deuil.
Restée trop archaïque, cette industrie ne fit que végéter tout
au long du XIXème siècle et ne résista pas à la concurrence
des verres noirs de Bohême et d'Allemagne.
Le dernier moulin à jayet a fermé ses portes en 1914. La
Bastide sur l'Hers conserve encore en 1931 une fabrique de
bijoux à jais.
A côté du jayet, l'industrie d'extraction de minerai
avait peu de consistance et la plupart des petites carrières et
mines (calcaire à Troye, Manses, Teilhet, argile à Regat
alimentant la tuilerie à St Quentin, pierres meulières à la
carrière de léran, talc et fer à Montferrier, lignites et bauxite
à Péreille) se sont vite épuisées, laissant quelques traces
dans le paysage.
C’est le cas notamment de celle du col de Porteille
(Montferrier), qui a servi, de 1895 à 1969, à extraire le talc,
dont le massif est riche.
Une excavation entaille encore une " serre " calcaire à
Péreille.
Les lignites de Péreille ont alimenté pendant la guerre une
petite exploitation destinée aux établissements industriels de
la région ; elle a fermé dès le retour aux conditions normales.
La bauxite des Prépyrénées a servi essentiellement à la
1
MORERE Ph. Les forgeurs, notes sur l'Ariège avant le régime démocratique.
Bulletin de la Société Ariégeoise, Sciences, Lettres et Arts. 1915. p.201-223.
Des constructions économiques et sociales traditionnelles
conditionnées par les entités naturelles
La métallurgie au bois a été l'une des principales
industries de l'Ariège du XIXème siècle ; elle a même été
exceptionnellement concentrée dans la seigneurie du duc
de Lévis Mirepoix qui en comporte quatre à la fin du
XVIIIème siècle.
Pourtant, cette activité n'a laissé dans le Pays d'Olmes que
peu d'héritage : quelques amas de charbon de bois et des
replats dans les forêts, des vestiges de forges effondrées et
embroussaillés (chaussée, canaux, bassins, bâtiments,
outils (marteau, enclume)), notamment à Teilhet.
La particularité de la forge à la catalane était de ne se
charger que de la transformation du fer brut en acier
utilisable, sous forme de barres, travaillé ensuite par les
forgerons au sein de forges traditionnelles. Les forges
étaient alimentées par le charbon produit directement dans
les forêts de chênes et de hêtres. Le minerai provenait de la
mine de Rancié (Vicdessos).
Les maîtres de forges étaient des aristocrates, propriétaires
de domaines sylvo-pastotaux. La plupart louaient leur forge
à des fermiers.
Cette industrie a disparu en 1884 car elle n'a pas pu résister
à la concurrence des fers étrangers. "La disparition des
forges à la catalane dans l'Ariège marque la fin d'un monde
industriel, politique et social"1
Les fondements du paysage -
principalement la vallée Countirou-Touyre, de
Montferrier à Mirepoix, et celle de l’Hers, entre La
Bastide-sur-l’Hers et Bélesta.
Par ailleurs, la concentration technique, l'intensification de la
production, l'élargissement des débouchés et la
concurrence des nouveaux marchés ont aussi fait
disparaître nombre d'entreprises pratiquant le travail à la
main au profit d'usines relativement puissantes, pourvues
d'un outillage moderne, telles que les filatures et tissages de
Laroque-d'Olmes et quelques fabriques de peignes. En
outre, les industries ont dû recourir de plus en plus à des
matières premières d'origine exotique.
Une forge à la catalane est un moulin à eau qui permet d'actionner
une soufflerie (trompe des Pyrénées), permettant de réduire le
minerai de fer en métal, et le mail de la forge, servant à former des
barres de métal.
LOCALISATION DES FORGES A LA CATALANE DU PAYS
D’OLMES-MIREPOIX AU
XIXEME
SIECLE
Teilhet
Saint-Quentin
Carla-de-Roquefort
Villeneuve d’Olmes
Vilhac
Bélesta
Source : M. SIMON, à partir de la carte de la répartition départementale des forges à la
catalane au XIXème siècle, J. BONHOTE et J. CANTELAUBE.
E
E
D
A : Bâtiment où l’on tient le
charbon.
B : Magasin du fer.
C : Laboratoire.
D : Grand marteau.
E : Arbre de la roue.
F : Soufflet.
T : Païchere ou grand bassin.
U : Païcherou ou petit bassin.
Plaque disposée au-dessus d’une porte de la rue principale de Camon et portant l’inscription “JAMMES - CHARBON FORGERON”.
L'activité industrielle principale a toujours été,
dans le Pays d'Olmes-Mirepoix, le textile. En effet, la
tradition textile y est très ancienne : elle débute dès le
Moyen Âge. A cette époque, elle est souvent réduite à une
activité domestique réservée à une consommation privée et
familiale, excepté quelques ventes sur les marchés locaux.
Seule, Laroque d'Olmes se démarque grâce à ses draps de
laine de grande renommée à partir du XVème siècle.
Il faut attendre la fin du XVIIème siècle pour qu'une véritable
industrie textile se profile. Elle est pilotée par les fabricants
audois, les ouvriers-paysans du Pays d'Olmes n'effectuant
qu'une partie des nombreuses étapes de la fabrication des
draps.
" Dans ce pays […], le monde actuel, qu'il s'agisse de
la diversité et de la complexité des activités locales, est
presque toujours en recul par rapport à celui d'autrefois "1.
Au début du XIXème siècle, le Languedoc se tourne
vers la vigne, aux dépens de la draperie qui devient la
spécialité du Pays d'Olmes. L'industrie se concentre peu
à peu autour de la commune de Lavelanet, alors qu'il ne
fait que végéter dans le secteur de Mirepoix.
De plus, l'économie industrielle a tendance à s'axer
essentiellement sur le textile qui se modernise : " la
grande draperie " se développe, l'électricité remplace la
force hydraulique, les filatures mécaniques, puis les ateliers
de teinture et d'apprêt, se multiplient ; d'abord à Lavelanet
puis dans les communes voisines (Laroque d'Olmes,
Montferrier…).
Dans la première moitié du XIXème siècle, le déclin de
l'industrie du jayet, mais surtout la surpopulation et les
difficultés agricoles qui en découlent, facilite le reflux de la
main-d'œuvre paysanne vers le textile, qui compte plus de
2600 salariés en 1848. Lavelanet et Laroque-d'Olmes
passent de 2120 habitants en 1804 à 4350 en 1846.
Encore au milieu du XXème siècle, selon Michel Chevalier,
l'industrie textile fonctionne grâce à l'association de deux
modes de travail : le travail à domicile (tissage) et le travail
mécanique en atelier (filature et teinture/apprêt). Mais,
originellement activité secondaire après l'agriculture, elle
devient l'activité principale pour une part de plus en plus
importante de la population.
1
M. CHEVALIER, 1953.
Des constructions économiques et sociales traditionnelles
conditionnées par les entités naturelles
La fabrication de peignes est connue dès le XVème
siècle, en particulier dans la vallée de l'Hers, en rapport avec
la Suisse, à laquelle le procédé de fabrication a pu être
emprunté. Le buis, matière première originellement utilisée
pour la confection des peignes, s'est assez vite épuisé et a
progressivement été remplacé au cours du XVIIIème siècle
par la corne, importée de Turquie, de Hongrie et du Maroc.
La fabrication du peigne en corne a donc été très tôt une
industrie de main-d'œuvre indépendante des ressources
locales et ses débouchés se sont étendus dès le XVIIème
siècle à l'Espagne et l'Italie. En 1930, 35 entreprises
familiales s'échelonnaient le long de l'Hers, de Bélesta à La
Bastide sur l'Hers.
Cette industrie a cependant décliné avec l'invention du
plastique.
II° Une économie reposant peu à peu sur l'industrie
textile à partir du XIXème siècle
Les fondements du paysage -
fabrication des abrasifs. Dès 1914, l'exploitation s'était fixée
à Roquefixade et à Péreille.
Carrière de talc abandonnée depuis 1969, en partie revégétalisée, au col de Porteille (Montferrier).
Une carrière, à fort impact visuel, entaille encore le Plantaurel, à
l’embouchure des gorges de Péreille.
2
4 : Azéma-Bigou, dernière usine de peignes en corne.
5 et 6 : Exemples de peignes en corne.
5
1
3
Le buis (1) se redéveloppe
largement depuis qu’il n’est
plus exploité pour la
confection de peignes.
2 et 3 : exemples de
peignes en buis.
6
4
Les fondements du paysage -
Laineuse à chardons métalliques, Archives départementales de l’Ariège
Machine à fouler et à lever le drap, Archives départementales de l’Ariège.
Retordage et moulinage des fils, Archives départementales de l’Ariège.
Des constructions économiques et sociales traditionnelles
conditionnées par les entités naturelles
Carde briseuse, Archives départementales de l’Ariège.
5
1
Etapes de fabrication d’un
tissu : cardage, filage,
ourdissage, tissage.
1 : Cardage naturel
2 : Cardage mécanique
3 : Filage manuel
4 : Filage mécanique
5 : Ourdissage
6 : Tissage mécanique
7 : Métier à tisser “Jacquard”
8 : Cartes perforées de Jacquard,
inventées dans les années 1800 et
ayant permis la reproduction
mécanique de la croisure, par la
répétition de motifs géométriques.
8
2
3
6
Photos prises au musée du textile et du peigne
en corne
4
7
Des usines et des cités ouvrières ont été bâties
entre le Touyre et la route départementale 625.
Les cités ouvrières ont été construites par les patrons
des usines, selon une politique paternaliste appliquée
jusqu'à la Seconde Guerre Mondiale, pour répondre au
besoin de loger dans de bonnes conditions une population
ouvrière croissante. Les cités ouvrières typiques se
présentent sous forme de bandes de maisons, pourvue
chacune d'un jardin.
Les deux plus importantes cités ouvrières du pays étaient
rattachées à l’usine de peignes Azéma-Bigou et à l’usine
textile Récalens, à Laroque-d’Olmes.
L'usine devient un quartier autonome, avec toutes sortes de
services mis en place également par le patron.
Les usines, implantées depuis le XIXème siècle, de
Montferrier à Laroque-d'Olmes, se signalent de loin par leur
cheminée de brique et se distinguent nettement par leurs
toitures à sheds.
Usine
SotapCarol à
Montferrier
Des constructions économiques et sociales traditionnelles
conditionnées par les entités naturelles
C'est autour de l'axe industriel textile - s'étendant,
du sud au nord, le long du Touyre, de Laroque d'Olmes à
Montferrier et, d'ouest en est, de Lavelanet à Bélesta - que
s'est faite l'urbanisation liée à l'essor industriel du
XIXème siècle.
A Laroque d'Olmes, la ville a franchi le Touyre et une ville
basse s'est construite autour des Quatre Chemins, au
carrefour de la route de Lavelanet à Mirepoix et celle menant
à la Bastide sur l'Hers.
Lavelanet a également atteint la rive gauche du Touyre ; son
développement a cependant pris un autre aspect : du fait du
resserrement conféré par la cluse, son extension s'est faite
par divergence au sud de la cluse, le long des routes
principales.
Elles peuvent se mêler au tissu urbain (Lavelanet et
Laroque) ou se trouver à proximité du bourg (Montferrier).
Leur architecture, jusqu'au début du XXème siècle, se situe
à la charnière entre tradition et innovation ; celle-ci apparaît
au travers des matériaux industriels employés (fonte, fer,
verre, brique) et des nouvelles formes de bâti qu'ils
engendrent. L'innovation est en effet nécessaire pour
répondre aux nouvelles contraintes imposées par le progrès
industriel et ses attributs volumineux. Afin d'optimiser
l'espace en augmentant la portée, le bois est remplacé par
des matériaux plus légers (fonte ou fer) pour la confection
des charpentes. En outre, le béton permet d'accorder la
forme des bâtiments à des besoins très spécifiques. L'usage
de ces matériaux permet aussi un coût moins élevé de
construction.
L'utilisation du verre associé à l'acier sous forme de sheds a
eu pour finalité de résoudre la question de l'éclairage, en
privilégiant la lumière du nord, constante et sans chaleur.
La recherche à travers l'architecture de
l'optimisation du travail industriel a conduit à
l'implantation de bâtiments stéréotypés de grandes
dimensions, constitués d'éléments répétitifs et
préfabriqués, ayant pour seul point commun avec le
reste du bâti l'usage de la brique.
Les fondements du paysage -
III° Essor de l’industrie textile et urbanisation
1
1 : Les toitures à sheds, motifs architecturaux
répétitifs, présentent leurs ouvertures
préférentiellement au nord ; laroque d’Olmes.
2 : maisons de contre-maîtres à Lavelanet.
3 : Fonte, fer, verre et brique : les premiers
matériaux industriels ont permis la construction de
bâtiments de gros gabarits.
4 : Cheminée d’évacuation en briques, symbole
d’une technicité remarquable.
2
3
4
UN
TERRITOIRE ENCORE EMPREINT DE SON
PASSÉ MOYENÂGEUX
L'héritage moyenâgeux du Pays d'Olmes ne se limite
pas aux centres des paroisses et aux villages, fixés dès la fin
du XIIIème siécle, mais à de nombreux vestiges, témoignant
des grands évènements historiques qu'a connus le Pays
d'Olmes.
A - CATHARISME
1
J. DUVERNOY, 1976.
Un territoire encore empreint de son passé moyenâgeux
L'Eglise, qui est à l'origine du progrès agricole du
XIIème siècle, n'a pas su remplir avec la même efficacité sa
mission spirituelle. Au contraire, sa puissance, acquise en
tant que grand propriétaire de domaines et de fiefs, a suscité
une vague d'anticléricalisme.
Tout au long du XIIème siècle, les hérésies se sont
multipliées. L'une d'elle, le catharisme, s'est propagée avec
une grande force dans le Midi.
Cette religion, dite des "bons chrétiens" ou des
"pures", se fonde sur une interprétation dualiste de
l'Evangile, en totale contradiction avec l'orthodoxie romaine :
"l'homme procède par son âme du royaume du Dieu bon et
par son corps du monde visible, transitoire, où le mal se
manifeste. Pour libérer son âme, il doit pratiquer l'ascèse en
se détachant du monde matériel."1
Les ministres de ce culte, les "bonshommes" ou "parfaits",
observant une rigoureuse chasteté et vivant dans la
pauvreté, donnaient l'exemple du retour aux pratiques de
l'Eglise chrétienne primitive. C'est sans doute la raison
principale de l'efficacité de leur prédication qui a fait de
nombreux adeptes, les "croyants".
Le catharisme a gagné toutes les couches de la
société. Mais sa prospérité dépendait beaucoup de la
protection que lui accordait une nombreuse aristocratie
avide de biens d'Eglise. C'est le cas dans le Pays d'OlmesMirepoix à l'époque complètement gagné par l'hérésie.
Les co-seigneurs de Mirepoix, les Péreille et les Rabat,
les Congoust de Villefort, Hugues de Léran, les
seigneurs de Roumengoux, d'Arvigna et de Dun,
qualifiés de "chevaliers de Dun" figurent dans les
registres de l'Inquisition pour avoir été adeptes ou
protecteurs de l'hérésie.
C'est Mirepoix, plus que Lavelanet, lieu de rencontre
entre le Pays de Sault et le comté de Foix, qui semble en
être le centre principal.
Une croisade est lancée contre les " albigeois " en
1209 par le Pape Innocent III, afin d'extirper l'hérésie, mais
ça n'a pas été la seule raison: les motivations économiques
- essentiellement pillage et acquisition de terres - des
seigneurs du Nord ont joué un rôle déterminant.
C'est lors de "La croisade des chevaliers", conduite par
Simon de Montfort, que les croisés s'emparent de Mirepoix
le 22 septembre 1209.
Le premier décembre 1212, l'établissement des chevaliers
du Nord est officiel et Guy de Lévis reçoit en fief la
seigneurie de Mirepoix.
A partir de 1216, c'est la Reconquête. La guerre, qui s'est
muée en une lutte inégale du Midi contre le Nord, tourne en
faveur des cathares.
Le déclin du catharisme commence réellement en
1226, quand Louis VIII, dépositaire des droits de Montfort,
dirige une nouvelle croisade qui lui permet de récupérer ses
possessions perdues. Les comtes de Toulouse et de Foix
capitulent et l'unification peut commencer. Les cathares se
Les fondements du paysage -
Troisième chapitre :
VESTIGES MEDIEVAUX EN PAYS
D’OLMES-MIREPOIX
St félix-de-Tournegat
Ste-Foi
Manses
Vals
Mirepoix
Teilhet
La Bastide de bousignac
Lagarde
Dun
Camon
Queille
Léran
Dreuilhe
Roquefixade
Lavelanet
Montségur
Source fond : conseil général de
l‘Ariège, 2001.
Source graphique : M. SIMON.
La Bastide-sur-l’Hers
Un territoire encore empreint de son passé moyenâgeux
La répression a poussé les hérétiques à se réfugier dans
les forteresses les plus élevées et les plus inaccessibles, les plus
puissamment fortifiées.
Roquefixade (roca fisada, roche fissurée) :
La forteresse, qui
fut rattachée aux
comtes
de
Toulouse jusqu'au
milieu du XIème
siècle, constituait
un site de défense
privilégié
:
perchée sur un
éperon rocheux,
elle
comportait
une double enceinte et concentrait un certain nombre d'éléments
de défense sur le côté le plus vulnérable, c'est-à-dire le Nord-Est.
Ayant servi de refuge à quelques cathares lors de la croisade
contre les albigeois, Roquefixade fut rasé par les troupes de
Simon de Montfort.
Le château est repris en 1272 par le roi Philippe le Hardi, qui y
voit, comme à Montségur, un site stratégique essentiel, situé à la
frontière du royaume de France et de l'Aragon. Il devient alors un
site militaire de surveillance de la route qui mène à Foix en
contrebas du château, et ce, pendant plus de quatre siècles. Puis,
abandonné en 1632 par Louis XIII et Richelieu, il ne sert plus que
de carrière de pierres.
Montségur (Mons securus, la montagne sûre) :
Le château se dresse
comme un étrange cercueil
de pierre, nu, vide, sur un
" pog ", piton calcaire de
1060 mètres d'altitude. Il
comporte uniquement une
cour
pentagonale
très
allongée, de 54 mètres
d'ouest en est, au bout de
laquelle se rattache à l'ouest un donjon rectangulaire dont il ne
reste que le rez-de-chaussée et les murs du premier étage, si tant
est qu'il ne fut jamais plus élevé.
Sa façade est plus celle d'un temple que celle d'une forteresse, on
n'y trouve aucun aménagement défensif, son enceinte est
totalement dépourvue d'archères.
En effet, cet édifice a été construit sur le site d'un château
abandonné, à la demande de cathares, en 1204, époque où il
n'était pas encore question de répression (déposition devant le
tribunal d'Inquisition du seigneur de Montségur, Raymond de
Péreilhe).
Il reste au Nord-Est du château des tas d'énormes boulets de
calcaires taillés sur place, munitions inutilisées lors du siège de
Montségur mené par les croisés, du 13 mai 1243 au 14 mars 1244;
et à la fin duquel de nombreux cathares, refusant de se convertir,
furent brûlés. Ce bûcher, bien que remis en doute par certains
historiens, est un tournant politique et militaire qui marque
traditionnellement la fin de la résistance armée des cathares.
Le château a été remis à Guy de Lévis II, qui en fit hommage
l'année suivante au roi de France. Montségur fut pourvu d'une
garnison royale et d'un chapelain. Puis, n'étant plus d'un grand
intérêt stratégique, il fut peu à peu abandonné. Il n'en reste
maintenant que ce qui n'a pas pu être emporté : les fondations.
Autour de Montségur rayonnent une certaine fierté occitane, ainsi
que mystères, mythes et légendes.
Ainsi, l'orientation et les dimensions des murs et la situation des
archères du donjon ont mené à une stupéfiante hypothèse de la
part de l'ingénieur et historien Fernand Niel : tout se passe comme
Les fondements du paysage -
retrouvent privés de la protection des seigneurs, désormais
ralliés au roi. Ils doivent passer à la clandestinité.
C'est alors que pour démanteler cette dernière et rétablir la
foi catholique, le pape Grégoire IX prêche l'Inquisition en
1233, à la fois sous la forme de la répression, mais aussi de
"l'exemple" et de l'action missionnaire des "ordres
mendiants". Les bûchers successifs - de Montségur, de
Vérone et de Pèire Autier - ont peu à peu forcé les cathares
à la reconversion.
Roquefixade
Montségur
1
1 : A gauche, Roquefixade; à droite, Montségur : les forteresses,
en covisibilité, pouvaient communiquer à distance.
2 : Le sentier “cathare”, reliant Foix à Roquefixade et
Roquefixade à Montségur, se poursuit jusqu’à l’Aragon.
3 : Roquefixade sur son éperon rocheux : une vue imprenable sur
la vallée de Lesponne et la route départementale 117.
4 : Le “pog” de Montségur “lance son appel” de toutes parts.
2
3
4
Peinture de J. COTTE
LIGNÉE
LÉVIS
A la fin de l'Inquisition, par l'article 10 du traité de
paix de Paris de 1229, qui règle le sort du comté de
Toulouse, le pays tombe presque entièrement sous les
mains de Guy de Lévis I, maréchal des croisés. En
réalité, la "terre du Maréchal" déborde largement sur
d'autres circonscriptions. Mais elle exclut St-Quentin,
Queille, Belloc, Camon et Montbel.
A partir de 1300, les héritages successifs donnent lieu à
d'importants remaniements de ce territoire, ayant finalement
conduit à deux principales baronnies : les Lévis-Mirepoix
et les Lévis-Léran, qui constituent les marquisats les plus
puissantes du XVIIème et XVIIIème siècles.
Après plus de quatre siècles d'aléas successoraux, la "terre
du Maréchal" est finalement reconstituée à la fin du
XVIIIème siècle.
Cependant, la Révolution l'a faite éclater sur trois
départements : l'Ariège, l'Aude, la Haute Garonne.
Le régime seigneurial appliqué par les Lévis sur leur
domaine, empreint du droit féodal du Nord, est le plus
contraignant des pays d'Ariège : peu de droits d'usage, droit
de prélation (préemption), banalités (taxes) omniprésentes,
aucune délégation de la justice sauf à Mirepoix (C. Pailhès).
Ce régime a été source, jusqu'à la Révolution, de combats
pour la défense des libertés communales et pour
l'assouplissement des droits féodaux.
Au XVIIème siècle, les Lévis-Mirepoix, face aux
oppositions des communautés d'habitants et du
pouvoir épiscopal, se sont appliqués à donner à leurs
attributs une superbe apparence afin d'affirmer leur
pouvoir : le château de Lagarde, " petit Versailles du
Languedoc ".
A la Révolution, ce dernier et impressionnant symbole de la
Un territoire encore empreint de son passé moyenâgeux
" Et de la pierre qui monte, toujours un avec le rocher que je contemple, s'arcboutent, transpercés de tous les rayons de la lune, les contreforts des vieux
châteaux d'Aquitaine et d'ailleurs, en arrière plan desquels celui de montségur,
qui brûle toujours. " (A. BRETON, Arcane 17)
B - LA
Les fondements du paysage -
si Montségur était un immense calendrier astronomique, une sorte
de temple solaire. En effet, tous les points privilégiés de
construction - angles, diagonales, milieu des murs… - permettent
de repérer avec précision la position du soleil levant chaque fois
qu'il entre dans un nouveau signe du zodiaque. Les archères des
murs Nord-Est et Sud-Ouest, qui ne sont pas en face, sont
traversés par les rayons du soleil uniquement le matin du solstice
d'été.
Ceci est à mettre en rapport avec le dualisme symbolique de la
Lumière et des Ténèbres, qui est resté au cœur de toutes les
idéologies manichéennes et de toutes les doctrines initiatiques.
Le château de Lagarde se composait de quatre tours d’angle, de forme carrée,
reliées entre elles par des courtines et des bâtiments d’habitation auxquels on
accédait par une tour ronde. Quatre bastions défendaient l’entrée des grandes
tours et des souterrains faisaient communiquer toutes les défenses entre elles.
Un double fossé protégeait l’approche du château qui reposait sur une terrasse.
Archives départementales de l’Ariège
Le château de Lagarde (à gauche) et celui de léran (à droite) sont tous deux visibles de loin, dans les coteaux
valonnés de l’est du pays.
Lagarde intrigue par la disposition de ses tours en “couronne”, tandis que Léran impose sa masse au village
qui l’entoure.
Le style néogothique des
parties hautes
du château de
Léran.
L’encadrement du château de lagarde par son double fossé est encore net.
Une partie des dépendances (à droite de la photo), ainsi que le jardin-potager, ont été
restaurés. Mais seules deux tours du château devraient être prises en charge par
les Monuments Historiques. (photo de J. JANY)
CITÉ MÉDIÉVALE
" Mirepoix, petite capitale historique, est une capitale
déchue, sans grand rayonnement. […] La ville restaure et
met en valeur son héritage architectural exceptionnel :
elle reste Mirepoix la médiévale. "1
Née au XIème siècle au pied du château fort de
Terride - dominant au nord la vallée de l'Hers pour surveiller
la route de Carcassonne à Pamiers et pour commander le
débouché de l'ancienne vallée du Touyre - Mirepoix fut
détruite en 1289 par une crue (provoquée par la
destruction du barrage naturel de Puivert) et reconstruite
1
F. TAILLEFER, 1985.
Un territoire encore empreint de son passé moyenâgeux
C - MIREPOIX,
sur la basse terrasse de l'Hers, du côté sud de la vallée,
selon les plans réguliers d'une bastide, à l'intersection
de deux axes principaux de communication.
Elle forma un carré de 400 mètres de côté que des rues
d'égale largeur divisent en îlots rectangulaires. Au lieu où
devait se trouvait l'îlot central, une place fût aménagée,
bordée au sud par l'église.
Celle-ci fut érigée en cathédrale de 1317 à 1506, dans le
contexte de reconquête catholique et donc marquée par
l'influence gothique du Nord. Elle témoigne donc d'un nouvel
élan de la foi, mais aussi d'une certaine prospérité
économique. Elle concrétise aussi l'élévation de la
commune, par le pape Jean XXII en 1317, au rang d'évêché.
L'évêque Philippe de Lévis est à l'origine du somptueux
clocher de plus de 60 mètres de la cathédrale de Mirepoix et
du palais épiscopal, édifiés à la fin du XVème et au début du
XVIème siècle. Il a également agrandi la nef, qui, avec ses
22 mètres, est l'une des plus larges de France.
La cathédrale a aussi bénéficié de la riche décoration
intérieure dans le goût baroque du XVIIème siècle, dont les
églises se sont parées suite aux guerres de religion entre
protestants et catholiques. Pierre de Donnaud a fait réaliser
un autel et une balustrade de marbre rougen, un jubé et un
ensemble de statues dorées et a mis en place sept grands
tableaux de peintres flamands.
Les troubles liés aux conflits franco-anglais de la Guerre de Cent
Ans et aux guerres féodales ont rendu nécessaires certaines
fortifications, telles que celle de Mirepoix (et de Camon), où un
quadrilatère défendu par quatre portes et entouré de fossés a
été aménagé. Il en reste une partie près de la porte d'Aval, du
côté de Pamiers. Des promenades plantées de platanes
occupent l'emplacement des fossés, comblés en 1680.
Au XVème siècle, la place centrale fut entourée de
couverts, galeries de bois formant des portiques sous le
premier étage des maisons.
Les fondements du paysage -
domination de l'Ancien Régime va subir les ressentiments
populaires et la volonté de rupture avec le passé. Après
avoir été pillé en 1792, il est démoli en 1794, avant d'être
vendu comme bien d'émigré en février 1795. Il devient alors
peu à peu une carrière de matériaux.
Au XIXème siècle, les Lévis-Mirepoix n'ont pas
cherché à relever les ruines de Lagarde, mais se sont
plutôt retranchés au château de Léran, possédé par la
branche cadette des Lévis-Léran et construit à la fin du
XIVème siècle.
Entre 1875 et 1883, le duc de Lévis fit refaire les parties
hautes de l'édifice dans le style néo-gothique
(mâchicoulis, tourelles en poivrières, girouettes).
Ce château qui renfermait le second fonds d'archives
privées de France, fut habité jusqu'en 1982. Après la mort
du duc Antoine de Lévis-Mirepoix, il a été vendu, son
mobilier dispersé et ses archives remises aux Archives
Nationales.
Ainsi a pris fin une histoire qui, pendant plus de
sept siècles, avait lié la famille de Lévis et le Pays
d'Olmes-Mirepoix.
2
3
1 : La cathédrale St Maurice, gigantesque, avec son clocher de 60 mètres et sa nef de 22 mètres ; photographie de Mas, photographe
du Service des archives photographiques (décennies 1920 à 1950).
2 : La porte d’Aval, vestiges des fortifications de Mirepoix.
3 : Le château de Terride, surplombant au nord la cité médiévale.
1
Gravure de la ville de Mirepoix datant d’entre 1835 et 1837; Archives
départementales de l’Ariège.
Au centre du grand couvert, sur le côté nord de la place, s'élève la maison des consuls,
avec son extraordinaire décor sculpté sur les têtes de solives.
D - CAMON,
PRIEURÉ MÉDIÉVAL
E - L'ART
ROMAN
Les églises romanes, construites entre le XIème et le
XIIème siècles, correspondent à la naissance de la plupart
des paroisses en Ariège.
Les premières églises romanes méridionales,
datant du XIème siècle, correspondent à un grand
mouvement de reconstruction du début du Moyen Âge.
Les églises sont construites selon une technique
importée d'Italie par des maçons Lombards vers la
Catalogne : en moellons concassés au marteau, liés dans
un mortier peu couvrant et posés en assises régulières à la
manière de lits de brique.
Leur plan est en général simple. Les plus anciennes
possèdent une nef unique s'ouvrant sur un chœur
quadrangulaire, héritage préroman. Par la suite, le chœur
devient semi-circulaire. Dès le milieu du XIème siècle, le
plan devient plus complexe, avec l'ajout de deux
chapelles latérales de même forme ; le chœur s'ouvre
alors sur trois nefs ou sur une travée de chœurs qui les
précèdent.
La voûte, technique venue de Catalogne, a rapidement
supplanté le plafond charpenté originel. En berceau plein
cintre (voûte de forme semi-cylindrique), elle est associée à
des murs très larges qui réduisent le problème des
poussées; les ouvertures à simple ou à double ébrasement
(élargissement en biais de la fenêtre permettant la diffusion
de la lumière) sont peu nombreuses, ce qui explique la
quasi-obscurité qui règne dans les édifices. L'utilisation de
l'arc doubleau (arc qui soutient la voûte en plein cintre) a
élevé la voûte et l'a rendue plus régulière.
Le premier art roman se caractérise aussi par l'emploi quasi-
Un territoire encore empreint de son passé moyenâgeux
Le village
de Camon s'est
constitué autour
d'une abbaye
bénédictine,
dépendant de
l'abbaye
de
Lagrasse (Aude)
du XIème siècle
au
XIVème
siècle.
En 1316, le
Pape Jean XXII érige Camon en prieuré conventuel
indépendant.
Le village et l'abbaye, complètement détruits par
l'inondation provoquée par la rupture du barrage de Puivert
en 1279, sont reconstruits entre 1280 et 1316.
Suite aux périodes de troubles des XIVème et XVème
siècles, Camon connaît au XVIème siècle une période
d'apogée artistique et intellectuelle.
Philippe de Lévis, évêque de Mirepoix, reconstruit, de 1505
à 1526, tous les bâtiments tels qu'on peut les voir à l'heure
actuelle. De 1526 à 1535, il procède à l'édification du mur
d'enceinte du village et de la tour carrée.
Entre 1560 et 1570, le Cardinal Georges d'Armagnac
restaure et réhausse les fortifications et fait édifier une tour
ronde du côté ouest.
En 1791, l'ensemble des constructions, abandonnées
par les moines, est vendu comme bien national et devient
propriété privée familiale.
Les fondements du paysage -
Cette place, ainsi que le pont monumental réalisé par le
même architecte-mathématicien, Mercadier, que celui de la
Concorde de Paris, témoignent de l'ancienneté du rôle
commercial de Mirepoix.
Les belles absides romanes en grès de
l’église de Manses sont surmontées d'un
bandeau de corniche.
Photographie tirée de l’ouvrage de A. JACQUET, 1991.
Notre-Dame-du-Vals, par sa richesse architecturale et ornementale, se
détache nettement des autres églises. L'accès à cette église rupestre
bâtie sur un roc de poudingues se fait par un escalier étroit placé dans une
faille du rocher. Ses deux nefs superposées (construites à deux époques
différentes) et son clocher donjon font déjà de cette église un monument
rare. Mais la partie la plus rare est sans doute celle qui, découverte
seulement en 1956 dans l'abside, est tapissée de fresques de style
roman catalan typique, réalisées au début du XIIème siècle par Maître de
Pedret, peintre originaire de Catalogne.
L’église gothique de
Teilhet possède un
portail conservant des
éléments romans : sans
tympan, il est couronné
d'une
corniche
de
modillons ornés de
masques.
Le clocher rappelle le
style du bassin de la
Garonne.
Sur l’abside de l’église de St Sernin de Bensa court une corniche de modillons ornés
de motifs animaux et végétaux sculptés.
BASTIDES
Les bastides se limitent à une aire géographique
et culturelle précise : les pays de Langue d'Oc du SudOuest de la France.
Le mouvement de création des bastides se situe
essentiellement aux XIIème et XIVème siècles, avec une
période particulièrement riche entre 1250 et 1350.
Les facteurs qui entraînent la création des bastides sont
nombreux: fixer les populations (en augmentation depuis le
Xème siècle), développer l'agriculture et le commerce et
créer des points d'appui en cas de guerre (luttes francoanglaises de la Guerre de Cent Ans).
Elles se situent donc dans la continuité des Sauvetés
(Camon et Lapenne), qui, un siècle avant les bastides, ont
assuré sous la tutelle d'une abbaye ou d'un monastère, la
distribution de l'habitat et du travail de colonies agricoles, en
fixant les populations sur le territoire à cultiver, et, par làmême, ont créé un réseau d'étapes sûres pour le
développement des relations commerciales et des
pèlerinages de St-Jacques de Compostelle.
Les bastides naissent d'un accord de paréage:
contrat établi entre le seigneur du lieu, ou l'abbé, et le
souverain représenté par son sénéchal; l'engagement
consiste au partage équitable des charges et des bénéfices.
En apportant les terres, seigneurs ou abbayes permettent
l'implantation d'une population, source de richesse agricole
et commerciale, tandis que le roi affermit son pouvoir dans la
région et s'assure la fidélité des habitants dont il garantit la
sécurité et la liberté.
Ainsi, Gui de Lévis, Seigneur de Mirepoix, fut l'auteur de
nombreux contrats avec le comte de Foix; ce dernier
apportait, en échange des terres, sa garantie politique et sa
sécurité.
La position des bastides du Pays d'Olmes révèle
Un territoire encore empreint de son passé moyenâgeux
Plan type inspiré de celui de Saint-Hilaire d’Arquizat (Miglos) ; A. Jacquet, 1991.
F - LES
Les fondements du paysage -
systématique d'un campanile : tours carrées à étages
percées de fenêtres à arcades géminées (groupées deux à
deux) qui servent à la fois de signal d'appel aux fidèles et
assurent la sécurité de ceux-ci vis à vis des intempéries.
L'art roman classique se développe au XIIème
siècle, sous l'impulsion des grands chantiers de
l'Europe romane, tels que celui de St Sernin à Toulouse.
Bien que les techniques antérieures soient maintenues, il se
différencie des églises du XIème siècle par son plan à
chevet tripartite et l'apparition de la sculpture, d'une
certaine naïveté (motifs schématisés végétaux et animaux).
Roquefixade a été fondée
par le Sénéchal de
Briatexte, sous le nom de
La Bastide de Montfort,
en souvenir de la victoire
de Simon de Montfort sur
les quelques cathares
retranchés au château,
lors de la croisade contre
les albigeois.
Elle est construite selon
un plan régulier orthogonal, comme toutes les bastides, et possède une place carrée. Celle-ci
ne comporte pas de couverts, ce qui indique que, dès l’origine, la vocation de la bastide n’est pas
commerciale. En revanche, c’est un site stratégique, en frontière avec le royaume d’Aragon.
Plan extrait de la Charte esthétique et de préconisations pour l'embellissement des
villages du Pays de Mirepoix et de la vallée moyenne de l'Hers
Rares sont les bastides de plaines qui, comme Mirepoix, ont à la
fois un quadrillage et une enceinte régulière.
Cette bastide a été fondée par Gui de Lévis, en paréage avec le
comte de Foix.
La place de Mirepoix, très vaste, est rectangulaire, bordée
par des couverts de bois ; la halle métallique récente s’inscrit
sur un des côtés sans ampiéter l’espace central.
Lagarde, bastide établie sous l’autorité de Gui de Lévis,
seigneur de Mirepoix, en paréage avec le comte de Foix.
DIVORNE F., GENDRE B., LAVERGNE B., PANERAI P., 1983
Mirepoix, photo de J. JANY
Ainsi, il est rare de voir le tracé en quadrillage d'origine de la bastide se
prolonger au-delà de l'enceinte.
Il est à noter que Limbrassac et Léran ont la forme d'une
bastide, sans en avoir le statut.
Un territoire encore empreint de son passé moyenâgeux
prolongent, ces couverts ne se rejoignent pas dans l'angle,
mais laissent un passage en biais qui permet l'accès des
charrettes sur la place : les cornières. Lieu des marchés, la
place accueille en général une halle, au centre ou sur l'un
des côtés.
L'enceinte
conditionne
toujours
le
développement de l'agglomération au-delà de la bastide
d'origine.
En séparant la ville des terres cultivées et de la campagne,
l'enceinte, qu'elle ait été maintenue ou non, constitue une
limite entre deux types de rues : celles qui se raccordent aux
routes et aux chemins et donnent naissance à des faubourgs
quand l'agglomération se développe, et celles qui, sans
communication avec l'extérieur, restent des rues de
lotissement.
Les fondements du paysage -
un rôle plus économique que militaire. En effet, si ce n'est
Roquefixade, les bastides ne sont pas implantées en
hauteur, mais plutôt dans les vallées et le long des rivières.
En outre, dans les régions d'habitat dispersé, les seules
fermes ou métairies ne suffisent pas à constituer des
villages, de réels lieux d'échange ; il leur manque marchés,
foires et services. Les bastides ont répondu à ce besoin en
constituant des petits centres d'approvisionnement et de
distribution des produits, des lieux de commerce et de
gestion administrative. Certaines bastides, telles que
Mirepoix, sont aujourd'hui des chefs-lieux de canton.
Les bastides ont été édifiées sur un plan régulier
à trame quadrillée.
La procédure d'établissement des villes en grille orthogonale
n'est pas nouvelle: elle est utilisée depuis l'Antiquité, car elle
est l'organisation la plus efficace des territoires coloniaux.
Le plan quadrillé facilite une prise de possession rapide et
ordonnée du territoire, il permet la construction de la voirie
et l'attribution de lots égaux à bâtir ou à cultiver; le tracé de
la ville traduit en effet l'aspect communautaire et égalitaire
de la colonie.
Le plan orthogonal des bastides s'articule autour d'une
place carrée centrale (exceptionnellement rectangulaire,
comme à Mirepoix) sous forme d'un maillage formé d'îlots,
le plus souvent rectangulaires, entre lesquels circulent les
rues principales.
Lieu de rassemblements, la place symbolise une
conception égalitaire de l'espace qui marque une
rupture avec l'image de la cité médiévale rassemblée
autour de l'abbaye ou dominée par le château ou la
cathédrale.
Elle est bordée de quatre îlots et longée par quatre rues. Les
maisons construites sur arcades en avant de l'alignement
des îlots courants forment des rues couvertes : les
couverts. Un peu moins larges que les rues qu'ils