Personnalité dépendante et dépendance affective : stratégies
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Personnalité dépendante et dépendance affective : stratégies
L’Encéphale (2012) 38, 170—178 Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com journal homepage: www.em-consulte.com/produit/ENCEP THÉRAPEUTIQUE Personnalité dépendante et dépendance affective : stratégies psychothérapeutiques Dependent patient and interpersonal dependency: Psychotherapeutic strategies C. Versaevel EPSM Lille Métropole, rue du Général-Leclerc, BP 10, 59487 Armentières cedex, France Reçu le 5 janvier 2011 ; accepté le 9 juin 2011 Disponible sur Internet le 7 octobre 2011 MOTS CLÉS Article synthèse ; Dépendance relationnelle ; Personnalité dépendante ; Personnalité borderline ; Personnalité évitante ; Psychothérapie KEYWORDS Interpersonal dependency; Dependent personality disorder; Borderline personality disorder; Résumé Cet article propose de faire le point sur les approches psychothérapeutiques chez les patients souffrant de personnalité dépendante et de dépendance relationnelle pathologique. Nous mettons en exergue les psychothérapies ayant fait l’objet d’une évaluation. La recherche évaluative sur le sujet est pauvre : seules huit études permettent d’évaluer des psychothérapies dans cette indication en 2005. Nous abordons les thérapies d’inspiration analytique, les psychothérapies comportementales, cognitives, humanistes et systémiques brèves. Nous considérons la dépendance comme étant une façon de s’adapter, de compenser une estime de soi altérée. En ce sens, la psychothérapie devra également s’attacher à restaurer l’estime de soi. L’évaluation du type de dépendance aiguille l’approche thérapeutique. Il faut rechercher les comorbidités et leur apparition dans le temps par rapport à la dépendance. Ainsi, la dépendance primaire, « héritée de l’enfance », précède les autres troubles psychiques. Dans cette situation, la thérapie se centre principalement sur l’estime de soi. La dépendance secondaire fait suite à un événement altérant l’estime de soi, comme une maladie mentale par exemple. Dans cette situation, outre le fait de favoriser la rémission de la maladie mentale, la thérapie visera l’accompagnement du patient vers l’autonomie et le « rétablissement ». © L’Encéphale, Paris, 2011. Summary Objectives. — This article is a review of psychotherapies for patients suffering from dependent personality and interpersonal dependency. Method. — We synthesized articles making reference to this question, notably those written by Bornstein, author who refers to the dependent personality. We highlighted the psychotherapies that have been the object of an evaluation. The research on the subject is sparse: only eight studies permitting assessment of psychotherapies in this indication in 2005. Besides these psychotherapies, we detailed other approaches which are used by practitioners in these indications. Adresse e-mail : [email protected] 0013-7006/$ — see front matter © L’Encéphale, Paris, 2011. doi:10.1016/j.encep.2011.08.006 Personnalité dépendante et dépendance affective Avoidant personality disorder; Psychotherapy 171 Results. — The therapy does not aim at autonomy ‘‘at all costs’’, but that the patient finds a dependence ‘‘adapted’’ to his/her environment. Before starting a therapy, an evaluation is useful to specify the type of dependence. First of all, is there a ‘‘pathological’’ dependence? Is the suffering of the patient secondary to his personality or not supportive enough? Does insight exist? What is the reaction of the patient if we suggest the hypothesis of a dependence on his/her part? Does he/she consider this idea or reject it? Finally, is the dependence primary or secondary? For that purpose, it is necessary to study the biography of the patient and the appearance of the comorbidity over time. The primary dependence is seen in childhood and precedes the other psychological disorders. The secondary dependence follows after the comorbidity and events of life that alter self-esteem (depression, for example). Various therapeutic strategies arise from various currents. The therapies of analytical inspiration recommend replaying the relationship of object and explicitly evoking the transfer. The behavioural and cognitive psychotherapies aim at making the patient identify the cognitions which underlie the dependence, then leading the patient to modify his/her cognition and to behave in a more autonomous way, using the theory of learning. The humanist therapies aim at a therapeutic relationship of acceptance and respect for the patient, so that he/she increases self-esteem and finds autonomy. The brief systemic therapy develops tools to deviate from the relationship of dependence in the therapy. It aims at the change through a modification in the beliefs of the patient. The dependence can be envisaged as a way of adapting itself, of compensating for altered self-esteem. In this way, the psychotherapy must also attempt to restore self-esteem in an implicit or explicit way. Conclusion. — The evaluation of the type of dependence helps the therapeutic approach. It is necessary to look for the comorbidity and its appearance over time with regard to the dependence. So, in primary dependence, the therapy focuses on the increase of self-esteem. In the secondary dependence, the therapy focuses on the adaptation to this event, the treatment of the mental illness, and then to the accompaniment in restoring and autonomy. If the patient doesn’t have insight, it is necessary either to enhance it, or to work in an indirect way. © L’Encéphale, Paris, 2011. Introduction Cet article propose une synthèse sur les approches psychothérapeutiques dans les problématiques de personnalité dépendante et de dépendance relationnelle (affective). L’objectif du traitement des patients souffrant de dépendance n’est pas une autonomie « à tout prix », mais vise à retrouver une dépendance adaptée lui permettant de moins souffrir dans son environnement. Le plus souvent, les patients dépendants se sentent mieux et rassurés par leur suivi et imaginent difficilement une rupture de la relation thérapeutique. Si le patient se sent mieux dans un suivi « au long cours », pourquoi ne pas l’accepter ? Parce que premièrement sur les plans éthique et déontologique, la question de la privation de liberté du patient qui reste sous l’influence forte du thérapeute est problématique. Ensuite, sur ce même plan, l’objectif de tout thérapeute n’est-il pas de viser l’autonomie du patient ? Enfin, parce que le psychiatre qui accepte une dépendance au long cours de ces patients n’a progressivement plus de temps pour rencontrer de « nouveaux patients », tant il est accaparé par sa clientèle de « dépendants chroniques ». Liens entre clinique et psychopathologie Du normal au pathologique Chaque personne est plus ou moins dépendante sans que cela soit « pathologique ». Aussi, pour un même individu, la dépendance à l’autre fluctue au cours de sa vie. En proie aux souffrances de l’existence, les individus adultes recherchent à nouveau une figure d’attachement pour se reconstruire. Dans chaque situation, la question suivante devra toujours être posée : la personne qui souffre en demande-t-elle trop à son entourage ou est-ce son entourage qui n’est pas assez étayant ? En période de crise, le simple fait que le psychiatre sollicite le soutien de l’entourage du patient peut suffire (fonction de médiation). Cependant parfois, l’intensité de la dépendance à autrui inscrit le sujet dans la pathologie. Les classifications médicales définissent la personnalité dépendante [16]. Il s’agit d’une catégorie diagnostique et le patient qui se voit ainsi « étiqueté », n’est pas censé « guérir », puisque la personnalité est stable par définition dans ce modèle. Si l’on s’écarte des nosographies psychiatriques catégorielles, certains auteurs développent le concept de dépendance affective (dont la dépendance amoureuse) [4,33], comprise comme une dimension de la personnalité en lien avec une altération de l’estime de soi. Cet abord dimensionnel de la dépendance psychique semble mieux rendre compte de la dynamique psychique des patients rencontrés en clinique [43]. Liens entre clinique et psychopathologie Livesley et al. ont identifié deux dimensions comme étant le socle des phénomènes de dépendance psychique [26]. Cette hypothèse a été étayée sur un plan expérimental par Gude et al. [20]. En effet, certains critères de la personnalité dépendante se rapprochent de ceux de la personnalité évitante dans un spectre commun qu’il est possible de nommer : 172 « dépendance/incompétence », tandis que d’autres critères se rapprochent de ceux de la personnalité borderline dans un autre spectre nommé : « attachement/abandonnique ». Psychopathologie du spectre « attachement/abandonnique » : manque d’amour de soi et insécurité affective Deux types de pensées récurrentes traduisent ce spectre psychopathologique. La première est : « Je ne mérite pas d’être aimé ». La seconde est : « On ne m’aime pas ». La relation à l’autre n’est donc jamais pleinement sécurisante, mais de type anaclitique. La personne met en place des mécanismes de compensation de l’amour de soi en cherchant à conserver l’amour de l’autre : attitude séductrice active (histrionisme), asservissement passif, dévouement ou relation d’emprise. Si la personne présente constamment ce fonctionnement de façon intense, on peut évoquer le trouble de la personnalité de type état-limite ou borderline [16] : « Efforts effrénés pour éviter un abandon réel ou imaginé ». Psychopathologie du spectre « dépendance/incompétence » : manque de confiance en ses capacités Des idées récurrentes traduisent ce spectre : « Je ne suis pas à la hauteur, je suis nul(le), je vais rater ». En conséquence, plusieurs réactions peuvent s’observer : La personne peut se persuader du fait de ne pas être capable et se dévalorise. Elle a peur d’affronter seule le monde. Elle est inhibée, indécise et reste dans l’évitement. Ce sentiment amène la personne à peu entreprendre et à l’échec, ce qui renforce ce sentiment. Si la personne présente constamment ce fonctionnement de façon intense, on peut évoquer une personnalité évitante [16]. Cette inquiétude peut également induire une dépendance à l’autre. La personne recherche un individu, une institution capable de la sécuriser, de pallier ses carences supposées. Pour établir et garder le lien avec cette personne, elle est prête à se soumettre et à accepter un manque de respect, voire d’être maltraitée [28]. Si la personne présente constamment ce fonctionnement de façon intense, on peut évoquer une personnalité dépendante [16]. Mais l’évitement et la dépendance ne sont pas les seules voies chez ces personnes. Elles peuvent mettre en place des mécanismes de compensation de l’estime de soi pour répondre à leur besoin de valorisation étayant leur manque interne. Elles se réfugient dans des domaines où elles sont reconnues et compétentes. Le perfectionnisme et le besoin de contrôle les caractérisent. L’expression de la dépendance ne se réduit donc pas à la passivité, comme le soutiennent Morgan et al. [32] dont les travaux identifient deux facteurs : un facteur « passif/soumis » se caractérisant par un manque d’assertivité et un facteur « actif/émotionnel » se manifestant par une recherche active de soutien émotionnel. En ce sens, Bornstein propose une autre définition de la personnalité dépendante [8] : « Vision de soi même comme faible qui pousse le sujet à s’engager dans des comportements actifs ou passifs pour maintenir la relation protectrice ». C. Versaevel Évaluation préalable à la psychothérapie : dépendance consciente ou inconsciente/primaire ou secondaire Une évaluation est utile avant d’engager la thérapie d’un patient dépendant. Dépendance consciente ou non consciente Pour évaluer la dépendance dont le patient a conscience, il est possible d’envisager des autoévaluations. L’Interpersonal Dependency Inventory (IDI) d’Hirschfeld et al. [21], validé en français par Loas et al. [27], comporte 48 items et évalue différents sous-types de dépendance relationnelle. Avec 19 items, la sous-échelle « EmotionalReliance » est corrélée au pôle « actif/émotionnel » de la dépendance selon Morgan et al. (coefficient de corrélation : 0,86) [32]. Avec huit items, le questionnaire pour personnalité dépendante (QPD) de Tyrer et al. [41], validé en version française par Loas et al. [30], est plus souple d’utilisation, mais ne dépiste que les personnalités dépendantes au sens du DSM [16]. Le QPD est corrélé au pôle « passif-soumis » de la dépendance selon Morgan (coefficient de corrélation : 0,71), de même que la sous-échelle « Lack of Social SelfConfidence » de l’IDI (coefficient de corrélation : 0,86) [32]. Synthétiquement, deux dimensions principales de la dépendance émergent des recherches empiriques, corroborant les constatations cliniques : • un manque de confiance en soi (en ses capacités) dans un registre passif/soumis ; • une insécurité affective qui s’exprime dans une recherche active de soutien. Si le patient présente des traits de dépendance dont il n’a pas conscience, il est possible de l’objectiver en réunissant des éléments cliniques (aspects discursifs, cognitifs, émotionnels, motivationnels et comportementaux), voire en réalisant un test projectif : le ROD (Rorscharch Oral Dependency) de Masling, Rabie et Blondheim [31]. Dépendance primaire ou secondaire Dans l’optique de traiter ces patients, Bornstein conseille de différencier les dépendants de type primaire et les dépendants de type en secondaire [9,10]. En effet, ces patients présentent de nombreux troubles comorbides [3] (anxiété, troubles de l’humeur, troubles de l’adaptation, addictions avec ou sans drogues [troubles du comportement alimentaire]). Mais dans certains cas, l’expression de la dépendance précède les symptômes (dépendance primaire dans le cas de l’apparition d’une boulimie sur une personnalité dépendante, par exemple). Dans d’autres, elle est consécutive à l’expression de ces comorbidités (dépendance secondaire). Des études démontrent que pour de nombreux troubles de l’axe 1 du DSM (dépression, trouble panique, phobie sociale, trouble obsessionnel-compulsif, troubles psychotiques), les traits de dépendance s’intensifient au moment de leur expression. Mais ce qui pose problème, c’est Personnalité dépendante et dépendance affective 173 que ces traits restent exacerbés après l’amélioration de ces troubles de l’axe 1 [5,10,19,35]. Cela montre l’importance de rechercher et de traiter la dépendance secondaire chez chaque patient. En effet, si le traitement est uniquement ciblé sur le trouble de l’axe 1, il sera incomplet puisqu’il ne permettra pas au patient de recouvrer la pleine jouissance de son autonomie et de ses capacités fonctionnelles. accompagner le patient vers l’autonomie ou le rétablissement dans un second temps. Si la dépendance n’est pas consciente, la thérapie consistera à en faire prendre conscience au patient ou à utiliser des outils de psychothérapie permettant une approche indirecte. Causes de la dépendance primaire Nous n’avons pas la place pour développer les hypothèses psychopathologiques riches et multiples issues de ce courant. Les stratégies psychothérapeutiques sont détaillées par Coen [12] et Van Sweden [42]. Les causes de la dépendance primaire pathologique se retrouvent dans l’interaction entre le ressenti de la personne et son environnement dans le passé. On peut parler d’altération de l’estime de soi « héritée du passé ou de l’enfance ». C’est dans les interactions avec son entourage, dans l’enfance le plus souvent, que se construit ce qui s’exprimera par une psychopathologie de type attachement/abandonnique ou dépendance/incompétence à l’âge adulte. Mais déjà dans l’enfance de la personne, on retrouve dans 70 % des cas un attachement non sécurisant ou une angoisse de séparation [29]. Deux facteurs interagissent pour construire ces spectres psychopathologiques : • d’un côté, on distingue les facteurs exogènes. Il est démontré que les parents qui ont des comportements surprotecteurs ou très autoritaires ont des enfants qui présentent de forts taux de dépendance [10]. Il y a aussi la confrontation à des événements de vie altérant l’estime de soi ou à valeur traumatique : maltraitance (abandon, dévalorisation), agression sexuelle, deuil, maladie grave, handicaps. . . Les théories sur lesquelles reposent les différents courants de psychothérapie expliquent comment ces facteurs interagissent avec le psychisme pour induire une dépendance psychique pathologique ; • de l’autre côté, on distingue les facteurs endogènes. L’hypersensibilité de la personne qui lui fera ressentir avec une intensité émotionnelle forte les événements. Cette hypersensibilité émotionnelle repose sur un corrélat neurobiologique inné (transporteur de la sérotonine [7]) ou acquis (modification de l’expression des gènes par un phénomène épigénétique [45]). De nombreux facteurs biologiques jouant un rôle dans l’attachement peuvent être incriminés [11] : dopamine, opioïdes, ocytocine, vasopressine. . . Orientations de la thérapie Si de nombreux articles évoquent les psychothérapies adaptées aux patients dépendants, en revanche l’évaluation scientifique est pauvre. Seules huit études contrôlées étaient relevées en 2005 [10]. Deux d’entre-elles montrent des résultats positifs : celle d’Alexander et Abeles axée sur la prise de conscience en 1968 [2] et celle de Rathus et al. axée sur le travail cognitif en 1995 [34]. De ce bilan, aucun type de psychothérapie ne s’est vraiment imposé comme étant le traitement de choix des patients dépendants. L’évaluation préalable permet cependant de guider la psychothérapie. Si la dépendance est primaire, la thérapie devrait se centrer sur le traitement de la dépendance et de l’estime de soi [10]. Si la dépendance est secondaire, la thérapie devrait d’abord s’attacher à améliorer le trouble primaire, puis Le courant psychanalytique/psychodynamique Analyser les thèmes relationnels fondamentaux Lors de la verbalisation du patient, le thérapeute doit l’accompagner pour dégager les problématiques récurrentes. Cela amène le patient, en prenant de la distance, à mieux prendre conscience de ses schémas relationnels dysfonctionnels et à remettre en cause ses interprétations. Rejouer la relation d’objet Le thérapeute doit créer une relation thérapeutique qui ne pourra pas s’altérer face aux schémas destructeurs que met en place le patient dans les autres secteurs de sa vie. Ainsi, le patient fait pour une fois l’expérience d’un nouveau schéma relationnel et sort de la répétition, ce qui est sécurisant et promeut l’autonomie. Winnicott [44] estime indispensable de laisser certains patients s’installer dans un état de dépendance vis-à-vis du thérapeute : « Quand le sujet est dans un tel état qu’il ne peut plus exprimer quoi que ce soit, la première chose à faire est de satisfaire son besoin de dépendance. Sinon il y a le risque de reproduire une situation de carence primitive ». C’est un « holding », qui permet la mise en place de la confiance, de la réciprocité, en évitant le recours à toute parole ou tout geste qui pourrait être perçu comme autant d’empiétements sur sa liberté. C’est dans un second temps qu’il pourra se rendre compte qu’il est dépendant et trouver une motivation pour s’autonomiser. Comme le pense Bornstein, la dépendance, dans le fait de rechercher une figure d’attachement fiable pour être soutenu et conseillé, peut être un comportement adapté à « dépathologiser » [8]. Évoquer le transfert Les patients dépendants idéalisent souvent le thérapeute et le perçoivent comme un puissant substitut parental qui délivre de bons soins. En réaction à ce transfert du patient, le thérapeute peut ressentir de la valorisation, se sentir poussé au paternalisme, ressentir de la frustration devant la passivité du patient ou devant l’impression que la thérapie stagne. . . Ces réactions peuvent à leur tour être nuisibles au patient. Évoquer explicitement cette réaction transférentielle avec le patient serait une clé de la thérapie. Le courant comportemental Ce courant pense que les patients expriment des comportements de dépendance parce que ces derniers ont été conditionnés par une combinaison de conditionnements opérants (réponses positives à ce comportement), de conditionnements vicariants (par l’observation de modèles). 174 Les comportements de dépendance seraient maintenus par renforcement positif (récompenses pour montrer un comportement dépendant). Les comportements autonomes se raréfient par un renforcement négatif (anxiété qui résulte du comportement autonome). Kazdin [24], Turkat et Maisto [40] proposent des stratégies de soins découlant de ce modèle. Remplacer le comportement dépendant par des comportements autonomes Les techniques d’extinction des comportements dépendants seront toujours couplées à un programme de traitement qui augmentera la fréquence des comportements autonomes. Non pas uniquement parce que l’autonomie est l’objectif du traitement, mais parce que l’augmentation des comportements autonomes inhibe d’elle-même les comportements dépendants. Ne pas rassurer Le courant comportemental considère que le soulagement secondaire à un comportement de dépendance (réassurance par un tiers) est un renforçateur positif de ce comportement. La personne a peur, elle établit un lien avec autrui pour se rassurer, ce qui diminue sa peur. Ce faisant, elle n’utilise pas ses ressources internes de réassurance. Elle est donc plus encline à s’inquiéter et à redemander qu’on la rassure. Une circularité négative existe. Pour en sortir, il est nécessaire de demander au patient de stopper ces comportements dans le cadre thérapeutique (« J’ai peur. . . ça ira mieux Docteur ? » —– « Non ! Ça ira mieux si vous acceptez que je ne vous rassure pas »), puis dans l’environnement proche du patient. Utiliser la désensibilisation des stimuli qui induisent un comportement dépendant Bien souvent, les comportements dépendants sont exacerbés chez le patient lors des situations de gêne, d’abandon ou de critiques. Il s’agit d’abord de les repérer. Ensuite, la technique de désensibilisation systématique de Wolpe, décrit par Cottraux [13] (relaxation et exposition en imagination, puis in vivo) peut être utilisée pour gérer l’anxiété issue de ces situations. Le courant cognitif Ball, Young et al. ont travaillé sur la thérapie cognitive des patients dépendants [6,47]. Le courant cognitif conceptualise la dépendance comme la production de schémas cognitifs dysfonctionnels précoces qui font douter les patients de leurs capacités et exagérer les conséquences de leurs erreurs. Ces schémas diminuent l’estime de soi, augmentent l’anxiété et induisent des distorsions cognitives qui maintiennent les patients dans leurs croyances préexistantes. Différentes distorsions cognitives sont particulièrement retrouvées chez les patients dépendants : • les lectures de pensées (le patient imagine savoir ce que les autres pensent : leurs défauts sont perçus, ce qui peut amener un évitement ou un abandon) : « Tout le monde voit que je ne suis pas à l’aise et que je ne suis pas capable » ; C. Versaevel • des autoévaluations négatives (le patient se blâme luimême, ce qui diminue le manque de confiance en lui) : « Je suis un bon à rien. . . personne ne peut m’aimer ou m’accepter tel que je suis ». Le patient se dit alors qu’il doit plaire et faire plaisir à l’autre pour être apprécié ; • des biais d’attribution : le patient attribue à une cause externe ses évènements de vie, il ne se félicite pas de ses réussites qu’il attribue à autrui, ce qui amène un schéma de dépendance : « J’ai eu l’examen parce que j’ai été aidé par un ami : je ne peux pas réussir seul ». Ces thérapies utilisent les ingrédients suivants : • mettre en évidence les troubles cognitifs et les modifier : les programmes des traitements cognitifs visent à faire connaître au patient ses distorsions cognitives à propos de situations concrètes (à l’aide du tableau à cinq colonnes de Beck [13]) et ses schémas cognitifs dysfonctionnels (technique de la flèche descendante [13]) pour ensuite les modifier ; • utiliser une guidance active et directive du patient au début du traitement : quand le patient progresse dans sa thérapie, le thérapeute donne graduellement plus de responsabilités au patient. De cette façon, y compris dans le cadre thérapeutique, le patient fait l’apprentissage de l’autonomie ; • promouvoir une autonomie par l’entraînement aux techniques de résolution de problèmes : pour faciliter cet objectif, le thérapeute utilise la méthode socratique pour aider le patient à générer par lui-même des prises de conscience et des solutions. Des stratégies de résolution de problème sont apprises au patient pour qu’il puisse de façon autonome et en pleine conscience gérer les situations problématiques plutôt que de faire appel à autrui. Il faudra cependant aider le patient à identifier les situations où la demande d’aide et de soutien reste appropriée, de façon à ce qu’il ne culpabilise pas et ne se mette pas en danger en refusant toute aide au delà de la thérapie ; • anticiper une rechute lors des dernières phases du traitement : à la fin de la thérapie, on apprend au patient à repérer les situations à fort risque de rechuter dans ses cognitions et ses comportements dépendants. Les alternatives sont discutées et anticipées. Le thérapeute insiste sur le fait que les « rechutes » à certains moments ou dans certains domaines de la dépendance ne signent pas un échec global de la thérapie. Elles sont envisagées comme des occasions d’apprendre de nouvelles choses et la thérapie peut reprendre sur un temps limité. Le courant humaniste Ce courant défend le fait que le regard des parents sur l’enfant conditionne les comportements de dépendance. L’enfant construit une vision altérée de lui-même en percevant les regards des autres le concernant. L’enfant s’y adapte : il conçoit l’autonomie comme inacceptable et se construit sur un faux soi centré sur le désir des autres. Schneider et May [38] et Yalom [46] définissent les grandes lignes de cet abord thérapeutique qui se calque sur la thérapie centrée sur la personne développée par Rogers [36]. Personnalité dépendante et dépendance affective Un regard positif inconditionnel et de l’empathie de la part du thérapeute Rogers a développé une approche relationnelle centrée sur l’empathie et l’acceptation sans conditions du patient [36]. En s’écartant de la peur du jugement, le patient accède à des aspects inconnus de son soi. Le thérapeute fait aussi en sorte de ne pas apparaître comme un gourou omniscient. Le thérapeute reformule et sert de miroir au patient, ce qui lui permet d’approfondir son vécu émotionnel. Il doit faire émerger la solution du patient, mais ne jamais donner de conseils. Le thérapeute doit également être animé par la certitude que le patient a un potentiel et des ressources qu’il peut utiliser. La conséquence est que le patient intègre ces éléments : il se connaît mieux, il s’accepte davantage tel qu’il est et il prend confiance en ses capacités. Promouvoir des expériences, dans et en dehors du cadre de la thérapie L’élément principal de cette thérapie est de faire vivre au patient des expériences où il ne pourra pas utiliser ses retranchements défensifs habituels et devra réinventer une nouvelle relation au monde. Il existe une liste d’exercices thérapeutiques à cette fin : des exercices pour construire des habilités, des scénarios de jeux de rôle dans et en dehors de la thérapie. La gestalt-thérapie a développé des « jeux gestaltistes » dans cette optique [22]. Durant ces jeux, le patient est accompagné par le thérapeute pour « déconstruire » son ancien rapport au monde, de façon à reconstruire un nouvel ajustement induisant moins de souffrance. Toujours dans la mouvance humaniste, durant la phase de conclusion de la thérapie de type analyse transactionnelle, le thérapeute veille à mettre fin à la relation de manière à ce que le patient ne se trouve pas abandonné [15]. Les problèmes d’abandon non résolus chez le patient peuvent ici impliquer un nouveau cycle important de travail de deuil avant l’arrêt effectif de la thérapie. Autres thérapies brèves Notons que les thérapies décrites ci-après (le courant de la thérapie systémique brève, l’EMDR, le travail de restauration de l’estime de soi) n’ont pas fait l’objet d’évaluation dans cette indication. Le courant de la thérapie systémique brève Tenir compte du système Ce courant considère que les relations entre les personnes sont définies par les lois des systèmes. Lors de la thérapie, même individuelle, il faudra donc tenir compte des relations entre les différents membres qui gravitent autour du patient, pour contourner les résistances au changement. Une vision des problèmes et une méthodologie de changement Ce courant explique qu’une personne réagit toujours de la même façon devant un problème. Si le problème persiste, la personne augmente l’intensité de sa solution, en accord avec ses croyances, mais ne changera pas de gamme de solutions. Il peut en résulter une causalité circulaire, dans le 175 sens où la tentative de solution réalisée par la personne entretient en fait le problème. C’est bien souvent en raison d’une souffrance émotionnelle faisant suite à des conflits interpersonnels que la personne vient consulter. L’étude de ces conflits, sous l’éclairage systémique, peut mettre en évidence l’expression de comportements dépendants comme tentative de solution. Il faudra donc lui faire modifier sa gamme de réaction habituelle (la dépendance), en utilisant la technique de recadrage de ses croyances (de façon plutôt indirecte en employant des métaphores) ou en prescrivant au patient d’autres comportements (plus autonomes) qui vont lui permettre, de par cette expérience, de modifier ses croyances [14]. Les thérapeutes systémiques brefs partagent dans une certaine mesure les enseignements de la théorie de l’engagement développée par Joule et Beauvois [23] : seuls les actes nous engagent et nous font changer. Si l’on veut qu’un patient aille vers le changement, rien ne sert de le convaincre. Il faut mettre l’accent sur les modifications comportementales. Ce n’est que dans un second temps, après le vécu de cette expérience, que les croyances se modifient. Différentes techniques peuvent être utilisées pour augmenter la probabilité que le patient effectue les « tâches thérapeutiques » et modifie son comportement : • rendre le libre choix : un patient est beaucoup plus engagé s’il croit qu’il a pris lui-même la décision de réaliser un acte. Si le thérapeute propose une tâche, il peut ajouter : « Réfléchissez bien, vous avez le choix de le faire ou pas. Faites-le seulement si vous pensez que c’est bénéfique pour vous » ; • le pied-dans-la-porte (le phénomène du premier pas) a été décrit en premier par Freedman et Fraser [17] ; si l’on demande à une personne une action très peu coûteuse, le fait qu’elle l’effectue entraîne qu’elle réalisera beaucoup plus facilement une action qui lui coûte un peu plus. En théorie, il faudrait commencer à « prescrire des tâches thérapeutiques » qui ne coûtent rien au patient, pour qu’il effectue ensuite les « tâches » réellement thérapeutiques. Lutter contre le risque de relation de dépendance Le courant systémique bref refuse que la relation thérapeute-patient s’oriente vers une relation de dépendance. La thérapie s’inscrit dans une durée limitée : dès la première consultation, le thérapeute peut fixer un nombre précis de séances. Pour motiver le patient à agir et prendre une place active dans sa thérapie, le thérapeute lui fait prendre conscience de sa responsabilité dans les interactions conflictuelles : « La relation, c’est comme du tennis : la balle ne revient que si on la renvoie ! ». Il lui attribue la propriété de son problème : « C’est votre problème ! ». Il reconnaît et augmente la perception de la souffrance du patient pour le motiver aux soins. Il exige la réciprocité et la rapidité : « Je ne vous abandonnerai jamais si. . . vous faites tout pour me rendre inutile aussi vite que possible ». Il vise l’amélioration de l’estime de soi en s’appuyant sur les ressources propres du patient en s’inspirant de l’hypnose ericksonnienne [14]. Ici, les problématiques de l’estime de soi et de la dépendance ne sont jamais abordées explicitement puisque c’est le « langage du patient » qui est utilisé par le thérapeute. Le travail s’effectue de façon indirecte. 176 L’Eyes Mouvements Desensibilisation and Restructuration (EMDR) Le syndrome de stress post-traumatique (SSPT) est une pathologie invalidante et chronique qui peut conduire à une altération de l’estime de soi et une dépendance secondaire. Il est utile ici d’utiliser l’EMDR (Eyes Mouvements Desensibilisation and Restructuration) [14,39]. En effet, les travaux démontrent un fort taux de rémission et une rapidité d’action de ce procédé thérapeutique [37]. Outre la disparition des symptômes du SSPT amenant une restauration de l’estime de soi, il semble logique de considérer que ce qui explique la diminution de la dépendance secondaire résulte préférentiellement du travail sur les cognitions. Au cours de la thérapie en effet, le patient doit énoncer une conviction négative qu’il a de lui-même et qui résulte de l’événement traumatique (par exemple : Je suis faible/Je ne sais pas me défendre/Je ne vois pas le danger). Il doit ensuite donner son degré de conviction à cette cognition sur une échelle analogique. Nous voyons comment ces cognitions liées au traumatisme dictent le rapport du patient envers lui-même et autrui, et sous-tendent les comportements de dépendance. Le patient doit également énoncer une cognition positive en répondant à la question : « Que préféreriez-vous penser de vous-même à la place de cette conviction négative ? » (par exemple : Je peux me faire confiance/Il peut m’arriver des choses positives dans ma vie/J’aimerais lâcher prise) et également évaluer son degré de conviction envers cette cognition. Après le traitement, une restructuration cognitive est constatée. Le souvenir de l’événement n’est plus associé à des émotions douloureuses et des croyances négatives et dépréciatives sur soi. L’association du souvenir avec des cognitions positives les renforce jusqu’à ce que le patient les perçoive comme vraies sur un plan rationnel et émotionnel. En résumé, quand les distorsions cognitives à la base d’une dépendance semblent reliées à un psychotraumatisme, l’EMDR paraît un traitement de choix de par son aptitude à les modifier. Le travail de restauration de l’estime de soi Nous considérons la dépendance psychique comme une façon de s’adapter, de compenser des altérations dans différents secteurs de l’estime de soi [43]. Une composante fondamentale du travail de psychothérapie consiste donc à restaurer l’estime de soi. Les étapes ci-dessus tracent cette restauration [4]. La thérapie peut se faire en individuel ou en groupe. Les thérapies de groupe accélèrent l’évolution thérapeutique en utilisant l’émulation du groupe, l’identification à d’autres membres du groupe, le soutien au sein du groupe, l’apprentissage par jeux de rôle. Apprendre à se connaître La personne qui souffre de dépendance a tellement besoin de reconnaissance, que sa vie est dirigée sur les besoins et les désirs des autres. Il existe donc chez eux une grande fragilité identitaire. Il est donc proposé à ces patients d’apprendre à se connaître en parlant d’eux, en vivant de nouvelles expériences, en écrivant un « journal intime ». C. Versaevel Respecter ses besoins et s’affirmer Une fois que la personne se connaît un peu plus, il lui est demandé de se respecter et se faire respecter. Lorsqu’elle y arrive, cette expérience nourrit considérablement l’estime de soi et le sentiment d’efficacité personnelle et pousse la personne à s’affirmer davantage (cercle vertueux). Construire des frontières avec autrui Une réflexion sur le fonctionnement relationnel du patient amène le constat qu’il a des difficultés à protéger son espace personnel et qu’il a tendance à envahir celui des autres. Dans cette optique, la méditation en pleine conscience, en identifiant et en procurant une position « méta » sur ses propres pensées, peut favoriser une meilleure connaissance de soi et l’accès à l’intersubjectivité. Promouvoir l’autothérapie par « bibliothérapie » Il est possible de proposer au patient de lire des ouvrages sur l’estime de soi [1] ou la dépendance affective [4,33] pour ensuite échanger sur ces lectures : « En quoi s’est-il reconnu dans les descriptions ? Qu’est-ce qu’il pourrait appliquer ? » Goudreau et Côté suspectent que la « bibliothérapie » nuise à l’alliance thérapeutique [18]. C’est précisément ici ce qui est recherché : une déliaison patient-thérapeute dans la thérapie. De cette façon, le patient n’a pas l’impression d’« aller mieux » grâce à quelqu’un, ce qui pourrait renforcer sa dépendance. Le mode de vie Tant que les patients sont en couple, ils ont tendance à répondre aux besoins de l’autre et à compenser, par leurs relations, leurs manques. Arkady [4] conseille de ne pas s’investir dans de nouvelles relations tant que la personne n’a pas « comblé elle-même sa coquille vide ». Dans le cadre d’une dépendance secondaire Nous l’avons évoqué, à la suite d’un trouble de l’axe 1 ou des événements de vie difficiles (deuil, par exemple), la dimension « dépendance » de la personnalité tend à augmenter. Aussi, elle ne régresse pas systématiquement après la résolution des symptômes du trouble ou après l’adaptation à l’événement de vie [5,10,19,35]. Il est donc important de veiller à évaluer les soins sur la dimension dépendance-autonomie pour chaque patient, de façon à proposer, en plus des soins visant le centre de la scène (trouble de l’axe 1 ou trouble de l’adaptation, par exemple), des stratégies psychothérapeutiques amenant le patient vers la récupération de son autonomie antérieure. Nous pouvons nous demander si le système soignant n’a pas une part de responsabilité dans le phénomène de dépendance secondaire. Le patient n’est-il pas parfois étayé ou surprotégé plus qu’il n’aurait besoin pour conserver son autonomie ? Les soins ne favorisent-ils pas parfois la rupture du patient avec son réseau de soutien habituel, le fragilisant davantage ? Les arrêts de travail sont-ils toujours bénéfiques ? Le thérapeute joue-t-il pleinement sa fonction en acceptant la seule mission de soutien (souvent la seule demande qu’un patient en souffrance peut effectuer), en perdant de vue les objectifs de rémission et de réautonomisation ? Personnalité dépendante et dépendance affective Dans les troubles mentaux plus invalidants (psychoses et troubles bipolaires), la dépendance secondaire est d’autant plus envahissante. Dans cette situation, la personne retourne souvent les préjugés sur elle-même et s’auto-stigmatise. Elle pense ne plus être capable « comme avant » et perd l’espoir de concrétiser ses projets. Altérée dans son estime de soi, elle reste dépendante des soignants ou d’une institution. Le paradigme du « rétablissement » lutte contre ce processus comme l’expliquent Lagueux et al. [25]. C’est une façon d’insuffler à la personne un nouvel état d’esprit en se positionnant différemment vis-à-vis de la maladie. Il s’agit de ne plus donner tout pouvoir à la maladie pour contrôler sa vie. Tout en gérant sa maladie et en acceptant ses limites, la personne doit redécouvrir ses capacités, ses rêves, reprendre une position d’acteur de sa vie en réalisant des choix et en prenant des risques. Le soignant n’est pas le mieux placé pour cet accompagnement au rétablissement car il fait partie du problème. Dans l’idéal, cet accompagnement s’appuie sur des professionnels qui sont des ex-usagers eux-mêmes rétablis : les pairs-aidants/médiateurs de santé. Ils forment un partenariat avec les soignants. Leur expérience de type « je suis passé par là » et leur position décentrée des soins font que leur influence est très bénéfique. Une place pour les psychotropes ? Seule l’étude de Lauer en 1976, citée par Loas et al. [27] a montré qu’un traitement antidépresseur donné à un groupe de patients présentant des traits passifs dépendants améliorait ces traits. Aussi, l’association entre la dépendance, la dépression et les personnalités limites et impulsives pose la question de la chimiothérapie au long cours (antidépresseurs, thymorégulateurs, antipsychotiques. . .), bien que l’absence d’études ne permette pas de recommander ces pratiques. Conclusion Au-delà des diverses stratégies thérapeutiques se dégagent des éléments consensuels : il convient d’évaluer le type de dépendance. Il faut différencier la dépendance primaire et secondaire et savoir si la dépendance est consciente ou pas pour le patient. Les stratégies thérapeutiques divergent par moment : tout d’abord, la dépendance au thérapeute doit-elle être acceptée dans un premier temps (thérapie analytique et Winnicott) ou combattue (thérapie brève systémique) ? Ensuite, si le patient n’a pas conscience de sa dépendance, faut-il l’accompagner dans une thérapie de type indirecte (thérapie brève systémique et approche Ericksonnienne) ou s’attacher à lui faire prendre conscience de ses troubles (thérapies cognitives et comportementales, travail sur l’insight en thérapie analytique) ? L’évaluation scientifique ne permet pas encore de répondre à ces questions. Le thérapeute doit s’inscrire dans l’éclectisme, s’adapter au patient et à son contexte de vie. Déclaration d’intérêts L’auteur déclare ne pas avoir de conflits d’intérêts en relation avec cet article. 177 Références [1] André C, Lelord F. L’estime de soi. S’aimer pour mieux vivre avec les autres. Paris: Éditions Odile Jacob; 1999. [2] Alexander JF, Abeles N. Dependency changes in psychotherapy as related to interpersonal relationships. J Consult Clin Psychol 1968;32:685—9. [3] American Psychiatric Association. 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