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Séminaire d’actualité L’immobilier au Maroc, Crise ou pas crise ? William Simoncelli Casablanca, le 22 mai 2015 Sommaire 1. Crise ou pas crise ? Si le nombre global des transactions a baissé, selon les baromètres de Banque Al Maghrib et Statimmo Maroc, le constat dans les grandes villes demeure diversifié et montre que la situation est encore fragile. 2. Quelle est l’ampleur de cette fragilité des marchés immobiliers ? Et quelle est la réalité des valeurs d’actif ? Y’a-t-il des signes de reprise ? Quelle relation entre offre, demande et besoin ? 3. Un nouvel outil d’information et de calcul des droits et taxes vient d’être mis en œuvre par la Direction Générale des Impôts (DGI). Il s’applique désormais à l’ensemble des cessions de biens immobilier à usage d’habitation à Casablanca et sera élargi à d’autres villes. 2 Crise ou pas crise ? La grande question dont nous allons parler aujourd’hui… c’est la crise. Sommes-nous en crise ? Vivons-nous une période de crise dans l’immobilier au Maroc ? Ou alors, faut-il plutôt qualifier cette période de ralentissement, voire de léthargie du marché ? Avons-nous des raisons d’être optimistes ? Bref faut-il pleurer ou espérer que le ciel redevienne un peu plus bleu dans le Royaume, je parle évidemment d’immobilier et pas de météo. Quelques chiffres récents pour commencer, ils proviennent de l’étude trimestrielle de Bank Al Maghrib et vous allez voir que ces chiffres ne sont pas si alarmants que ça…en tous cas, ils sont très intéressants… En ce qui concerne le 1er trimestre 2015, l’indice des prix des actifs a enregistré une légère hausse si on compare à la même période de l’année précédente. Le prix des actifs à usage commercial a diminué de 1,6% et ceux du foncier ont augmenté de 0,4%. Pour les locaux professionnels, d’une année à l’autre, les prix ont reculé de 1,6%, avec une baisse plus significative de 6 % pour les bureaux et seulement de 1 % pour les locaux commerciaux. En ce qui concerne les transactions, leur nombre aurait augmenté d’après Bank Al Maghrib de 7%. 3 Crise ou pas crise ? Si on parle maintenant des biens résidentiels, leurs prix ont seulement augmenté de 0.1%, ce qui pourrait peut-être expliquer notre morosité aujourd’hui… Ca baisse, ça stagne plutôt, on se rappelle du dynamisme du marché il y a 4 ou 5 ans et on regrette cette période ! Dans les grandes villes, les baisses les plus importantes ont été observées à Rabat (6,5%) et à Marrakech (4,1%), ce qui est accompagné en termes de transactions par une baisse de 21.3 % à Marrakech, c’est beaucoup ! Les augmentations les plus notables ont été enregistrées à Kénitra (1,4%) et à Agadir (2,1%). D’ailleurs, le cas d’Agadir est plutôt intéressant… l’indice des prix des bureaux à Agadir a enregistré une hausse de 53,9% par rapport au premier trimestre 2014. C’est la même chose pour les terrains urbains avec une progression de 9,9% d’une année à l’autre. Il faudra donc bien surveiller Agadir le trimestre prochain. Tout à l’heure, je vous parlais de « crise ou pas crise »… Si on regarde les chiffres de Bank Al Maghrib, de ce trimestre et si on les compare au trimestre précédent, on remarque que les prix ont augmenté de 5,5% à El Jadida et de 1,4% à Fès et à Kenitra. 4 Crise ou pas crise ? A l’inverse, les baisses ont été comprises entre 0,9% à Tanger et 2,9% à Rabat. Quant au volume de transactions, à l’exception de la hausse de 9,1% observée à El Jadida, nouveau petit paradis avec un point d’interrogation… les autres principales villes ont enregistré des baisses notamment ; • à Kenitra avec 26,7% • à Tanger avec 17,9% • à Marrakech avec 13,3% • et à Casablanca avec 11,8%. J’en terminerai maintenant avec les chiffres avec une petite donnée très concrète qui provient du GIE Statimmo Maroc, qui réunit 4 sociétés du conseil en immobilier d’entreprise, à savoir ; • Carré Immobilier • CBRE • Colliers • JLL Et qui propose régulièrement des données dans une newsletter que je vous enverrai avec plaisir. La demande placée de bureaux dans le Grand Casablanca (c’est à dire le volume des transactions locatives et ventes à utilisateurs) s’élève à 3 334 m2 sur le 1er trimestre 2015, soit une baisse de près de 67% par rapport au 4ème trimestre 2014 et une baisse de 4% par rapport au 1er trimestre 2014. 5 Quelle est la réalité des valeurs d’actif ? Alors, voilà pour les chiffres…. Crise ou pas crise ? C’est la question. Bizarrement, si on revient au résidentiel, on n’avait jamais connu de taux de crédits immobiliers aussi bas dans les banques marocaines depuis 7 ans… On est à 5.98 % ce mois-ci, mais pas pour tout le monde… Les banques ont tendances à continuer à privilégier leurs clients les plus solvables. La clientèle « premium » surtout, dispose d’un pouvoir de négociation assez fort. L’augmentation des mauvais payeurs et des champions de la traite au « lance pierre » a poussé les banques à tout de même limiter les crédits immobiliers et on s’en doutait, augmenter les taux pour certains profils qui auraient pourtant bien besoin du soutien des banques, d’autant plus que, « bonne nouvelle », les impayés des foyers marocains ont diminué de 0,3 % par rapport au dernier trimestre 2014. Bref, les salariés des grandes entreprises ou les fonctionnaires ont donc plus de chance de devenir propriétaires. Ce qu’on remarque, nous dans la profession, c’est que le fait que le taux de crédit baisse, ne suffit pas à donner une marge de manœuvre suffisante pour acheter un bien. Il manque toujours au ménage marocain de classe moyenne supérieure, qui travaille, qui consomme, qui est obligé de vivre en ville… la capacité d’endettement, ou les premiers dirhams pour pouvoir s’engager dans un achat, il leur manque de la liquidité et même si les taux sont plus bas…là où on vous prêtait 100 % voire plus, il y a quelques années avec des taux plus élevés, aujourd’hui on dépasse rarement les 80 % de financement par la banque. 6 Quelle est la réalité des valeurs d’actif ? Vous connaissez la chanson, si on prête à 80 %, ça veut dire qu’on considère que le marché peut se retourner de 20 % dans les 6 mois. On est assez malin du côté des banques… d’accord, on a baissé les taux, mais on n’a pas facilité pour autant l’accès au crédit et ça c’est une situation un peu préoccupante qui évidemment se retrouve au final sur le volume des transactions. Pour en finir avec les banques, les crédits accordés aux promoteurs ont tendance à diminuer, et à mon avis, ça ne va pas s’arranger avec les récentes affaires dans la profession. En 2014, c’était presque moins 7 % et on pouvait déjà constater l’année dernière, une baisse de 8 % pour les mises en chantiers de logements et jusqu’à moins 13 % pour le social. L’offre est malgré tout, toujours plus importante que la demande… alors pourquoi ces baisses soulignée par Bank Al Mahgrib ? On ne va pas accuser les banques de tous nos malheurs…, on ne va pas critiquer ici la politique économique du Gouvernement mais il faudra du temps pour « sécuriser » cette fameuse classe moyenne supérieure qui veut devenir propriétaire… c’est le dure travail des pays émergents. Moi j’ai envie de vous parler de l’offre. Est-ce que finalement, les produits qui sont sur le marché actuellement correspondent bien à la demande ? Est-ce que finalement, ceux qui construisent, ceux qui vendent ont bien renouveler leur logiciel depuis la fin des années 80 ? 7 Quelle est la réalité des valeurs d’actif ? Je vais vous donner un exemple sur de l’ancien et sur ce qu’il ne faut plus faire. Je passe tous les matins, et j’ai l’impression que ça dure depuis des années, devant une pancarte sur un grand Boulevard de Casablanca et qui propose 2 appartements à la vente, un de 392 m2, et l’autre de 248 m2. D’après le nouveau référentiel des biens immobiliers du Ministère de l’Economie et des Finances dont je vous parlerai tout à l’heure, on est à peu près dans ce quartier à 20 000 dh le m2, vous faites le calcul. Est-ce que ce type de bien rencontre encore des acheteurs en 2015 ici au Maroc ? Non ! Incontestablement, je le disais tout à l’heure et les chiffres le montrent, il y a toujours une demande mais les prix ont augmenté entre 2003 et 2008. Ces prix n’ont pas baissé, et le pouvoir d’achat lui, n’a pas évolué. Alors on sait tous qu’il y a eu un frémissement entre 2009 et 2012 mais depuis on stagne et le marché n’est pas reparti. Pourquoi ? Les gens qui construisent depuis 5, 6 ans n’ont pas été assez à l’écoute de la demande. Maintenant au Maroc, on veut pouvoir acheter des studios de 40 m2 en ville, des 2 pièces de 80 m2 et évoluer comme ça d’achat en achat vers du plus grand. On a trop longtemps dissocié l’offre et la demande, la demande et le besoin et certains, c’est même le plus grand nombre, ont continué à produire des biens qui ne trouvent plus preneurs sur le marché. 8 Quelle est la réalité des valeurs d’actif ? Quand vous produisez un 3 pièces avec salon de 220 m2 à 4 millions de dh, comme on le fait depuis des années à Casablanca par exemple, et ben, vous vous retrouvez face à un marché potentiel qui va se réduire de plus en plus. Si par contre, on est pour la même configuration, donc 3 pièces et un salon à 140 m2, on revient dans des proportions plus acceptables. Certains promoteurs commencent à rationaliser les espaces, et commencent à réfléchir à la taille idéale de l’appartement notamment pour les primo acquéreurs et donc aux besoins de la demande. Et aujourd’hui, ces gens-là vendent et s’en sortent plutôt bien. On veut acheter… c’est sur… mais la capacité d’endettement a été réduite, donc il faut trouver des solutions pour répondre à cette demande. La société marocaine a changé, le besoin a changé. La famille est moins nombreuse, les femmes travaillent. Tous les invendus qui sont aujourd’hui sur la place sont des appartements qui en terme de surface ne correspondent plus à ce que veulent les clients. Même si on brade le prix au M2 pour mettre par exemple un appartement de 250 m2 au niveau d’un 150 m2…vous savez cette fameuse règle de 3 « magique »…on va se retrouver avec des frais de travaux de rénovation, d’aménagement, de chauffage, de climatisation, d’électricité, qui restent au niveau d’un 250 m2, et ça ne passe plus. On est beaucoup plus dans la notion de calcul qu’auparavant. 9 Quelle est la réalité des valeurs d’actif ? En résumé, les marocains sont beaucoup plus prêts de leurs sous qu’avant et ils veulent un investissement raisonné ! On ne peut pas leur reprocher. Il faut donc réfléchir un peu mieux à ce nouveau profil des acheteurs et attirer les promoteurs et les constructeurs immobiliers sur ce segment du milieu de gamme qui à mon avis est très porteur et également sur le segment des habitations à bas prix, où on a, quand même, un déficit de presque 650 000 logements au Maroc donc là on est face à un vrai levier de croissance pour les prochaines années. En résumé, et je crois que vous l’avez compris, chacun souffre de son côté que ce soit les investisseurs, les promoteurs, les entreprises, et nous aussi … Mais il n’y a pas de blocage comme cela a pu être le cas dans des vraies crises ou comme ça peut l’être actuellement sur le secteur du Luxe, parce que là justement, on dépend à Marrakech notamment, de la crise internationale et des événements malheureux dans les pays arabes. Si on reste sur Marrakech, les investisseurs étrangers ou les marocains de l’étrangers se sont retirés en masse du marché de Marrakech et de Tanger par exemple depuis un an ou deux.. c’est une clientèle qui permettait de faire monter les prix…le marché était donc un peu surévalué et là, il est en train de se retourner et les professionnels n’ont pas le choix. 10 Quelle est la réalité des valeurs d’actif ? Le marché manque de dynamisme, ça on l’a tous remarqué, mais il s’est peut-être ajusté finalement à la réalité, à nous de le booster et de tirer parti de nos forces car nous en avons encore. L’immobilier est encore une valeur refuge pour beaucoup de gens, mais il faut être patient, prendre son temps. Alors cette année, on se pose beaucoup de questions, « Crise ou pas crise »…est-ce que ça va durer ? Combien de temps ? Est-ce que les investisseurs étrangers vont revenir ? Et malheureusement, je ne lis pas l’avenir, sinon je ne travaillerais plus dans l’immobilier… je vous rassure. 11 Le nouvel indicateur de la DGI Je voulais revenir maintenant sur un nouvel indicateur dont je vous ai parlé tout à l’heure, le fameux référentiel des prix de l’immobilier à Casablanca, cadeau du début d’année du Ministère de l’Economie et des Finances. Le but étant, c’est ce qui est dit dans le document officiel du Ministère, je cite «d’aller vers une relation de partenariat et de confiance avec le contribuable ». Ils ont donc élaboré un référentiel de prix très précis suivant les quartiers et les arrondissements de Casablanca, des prix qui serviront de base pour le calcul des droits et des taxes. Alors , c’est bien… ça va apporter une objectivité supplémentaire de l’administration fiscale par rapport aux transactions à Casablanca. Avant, je vous le rappelle… quand quelqu’un vendait un terrain ou un bien immobilier, l’administration se permettait de redresser de façon un peu aléatoire le vendeur et l’acheteur, parce que quasiment à chaque fois, on les soupçonnait d’avoir dissimulé une partie de la transaction. Il y avait cette suspicion à chaque fois, à tort ou à raison. Et ben théoriquement, avec ce référentiel, c’est fini ! Ils ont créer une règle avec des prix affichés par zone. Et si vous ne respectez pas ce référentiel… sans raison, parce qu’on peut avoir des raisons de ne pas le respecter, un appartement trop ancien, trop dégradé… c’est là que vous risquez d’être redressé, mais attention, ça n’est qu’un barème et vous pourrez toujours aller discuter à la DGI ou aller au tribunal Administratif pour contester le prix qui est indiqué sur ce barème. 12 Le nouvel indicateur de la DGI L’aspect positif de tout ça, c’est qu’on a enfin un indicateur précis des prix, sur lesquels vont se baser l’administration. Avant, on était dans le flou total. Maintenant, même si on peut trouver que ce référentiel est une réelle avancée pour les professionnels que nous sommes, pour les vendeurs et les acheteurs, on peut regretter que la DGI n’ait pas beaucoup communiqué sur la méthodologie de cette étude. On sait que c’est un rapprochement de données qui proviennent de la DGI, de la FNPI, la Fédération Nationale des Promoteurs Immobiliers, de l’Agence Nationale de la Conservation Foncière du Cadastre et de la Carthographie, on sait que certains notaires ont été consultés…mais c’est tout ! On remarque quand même que les prix dans certains quartiers sont un peu élevés, d’autre sousévalués… Nous professionnels, nous le disons intuitivement… c’est notre expérience qui nous pousse à dire cela… mais comment voulez-vous juger un barème quand vous n’avez pas d’information sur la méthodologie qui a été mise en place pour calculer tous ces prix ! Donc le barème c’est bien, mais on aurait apprécié de la DGI, l’organisation d’une petite commission avec autour de la table, tous les acteurs du secteur, ça se fait dans d’autres domaines, et comme ce référentiel ne concerne que Casablanca pour l’instant, on peut imaginer que cela aurait été très facile à organiser. 13 Le nouvel indicateur de la DGI Aujourd’hui, il existe des évaluations par quartiers que nous faisons, nous professionnels et que nous diffusons d’ailleurs… c’est vrai que nous avons l’expérience du terrain, et une réelle connexion avec le marché, cela aurait pu enrichir les données de ce référentiel. Attention, nous ne sommes pas contre ce barème mais comment voulez-vous définir des règles qui vont être appliquées par tout le monde si tous les acteurs du marché immobilier ne valident pas la méthodologie ? Malgré toutes ces réserves, cette démarche est bonne car elle « fige », elle fixe des règles qui valent pour tout le monde, et ce n’est pas une loi, donc elle permet aussi un recours tout aussi transparent. Voilà…courage et merci de votre attention. William Simoncelli Directeur général Carré Immobilier [email protected] Gsm. 06.61.19.41.42 14