De l`Angélique à sa liqueur

Transcription

De l`Angélique à sa liqueur
Liqueur
De l’Angélique
à sa liqueur*
De la vertu, en veux-tu en voilà…
L’angélique dans toutes ses
composantes, tige, ombelles,
feuilles, fleur, graines…
E
Il y a angélique et angélique…
* L’abus d’alcool est dangereux
pour la santé, à consommer
avec modération.
1. Ces nombreux romans nous
content la vie aventureuse, sous
le règne de Louis XIV, d’Angélique
de Sancé de Monteloup, dont le
père, nobliau déchu, exploite des
mines argentifères et élève des
baudets du Poitou.
2. Bernard Bertrand
(voir bibliographie).
S’il existe plusieurs espèces d’angélique à l’état
naturel en France, dont la plus commune est l’angélique sauvage, celle dont nous croisons la route
ici est l’angélique archangélique. Cultivée en nos
contrées, elle y est ou fut également appelée angélique officinale, herbe du Saint-Esprit, herbe aux
fées…et, nous l’avons déjà dit, herbe aux anges.
Ses préférences vont aux « lieux frais et ombragés,
aux sols profonds, généralement riches en
matières organiques : rives des cours d’eau, fossés
frais et fréquemment inondés, prairies et forêts
clairsemées humides »2. On comprend qu’avec de
telles exigences elle se trouve parfaitement chez
elle en Marais poitevin. Précisons cependant
qu’en Centre-Ouest, elle peut aussi côtoyer l’angélique des marais, localement abondante mais
que l’on rencontre uniquement sur les berges des
fleuves subissant l’influence des marées.
46 | Le Picton n° 215 | Septembre Octobre 2012 |
COLL. P
Niort
nfant, elle « cueillait des fleurs et des
racines, les faisait
sécher, bouillir, les
écrasait, les enfermait en sachets. […] Avec
Valentin elle allait en barque,
en niole, au long des chemins
d’eau, bordés de myosotis,
de menthe et d’angélique.
Valentin cueillait à pleins
rameaux cette plante haute
et à l’odeur exquise. Il allait
ensuite la vendre aux moines
de l’abbaye de Nieul qui en faisaient avec la racine
et les fleurs une liqueur de médecine et avec les
tiges de la confiserie ».
Ces quelques lignes évoquent l’enfance poitevine
de l’héroïne éponyme d’une série de romans 1
populaires célèbres et dont on tira des films à
succès : Angélique, surnommée la « marquise des
Anges ». Un nom qui fait ici précisément référence
à une fleur cultivée et transformée en Poitou :
l’angélique, dite aussi… herbes aux anges.
RIVÉE
Adrien HUBERT
L’angélique est la plus grande plante aromatique
connue. Sa robuste tige creuse et rougeâtre peut
pousser ses grandes ombelles d’une quinzaine de
centimètres de diamètre jusqu’à quelque deux
mètres de haut. Elle fleurit de fin juin à août « mais
les régions de production sont peu nombreuses.
Aujourd’hui [même si les choses bougent], deux
centres de production importants sont connus, la
région de Clermont-Ferrand et celle de Niort »2.
Une cité qui reste historiquement la capitale de
l’angélique, même s’ils ne sont plus que quelques
rares producteurs ou producteurs-distillateurs à y
maintenir la tradition.
Des vertus innombrables
Dans son Théâtre d’agriculture, Olivier de Serre
(1539-1619) insiste sur les vertus de la plante qui
leur devrait même son nom : « Tel nom a esté
donné à ceste plante, à cause des vertus qu’elle a
contre les venins. […] Ceste herbe contrarie à
toutes infections. Est très-utile en temps de peste,
tenant en la bouche de sa racine : et à ce que cela
soit agréablement, on la confit avec sucre, au sec,
corrigeant par ce moyen, la sauvagine de son
goust. Guérit les morsures des serpens et chiens
enragés. Fait cracher les humeurs superflues
nettoyant l’estomach. L’eau qui en est distillée
sert aux choses susdites, et à venir la personne
joyeuse. Ses feuilles appliquées au front, chassent
le mal de teste ».