Situation de la formation de base en Suisse romande La formation
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Situation de la formation de base en Suisse romande La formation
Situation de la formation de base en Suisse romande La formation des apprentis libraires en Suisse romande est assurée par l'entreprise formatrice pour la partie pratique et par l'école professionnelle commerciale de Lausanne (EPCL) pour la partie théorique. L'enseignement a été centralisé à Lausanne mais les apprentis dépendent de la formation professionnelle de leur canton respectif. L'apprentissage est de 3 ans comprenant 1 jour d'école la 1ère année, 2 jours la 2e, et à nouveau 1 jour la 3eme année. Les détenteurs de la maturité fédérale ou un diplôme jugé équivalent peuvent effectuer leur apprentissage en 2 ans. Il existe aussi la possibilité d'appliquer l'article 41 pour des employés non-qualifiés travaillant au moins depuis 4 ans dans la branche. Depuis 1999, la confédération nous a demandé de mettre en place des cours d'introduction sous la responsabilité des associations patronales. Ceux-ci ont lieu chaque début d'année scolaire. En janvier 2000, l'ASDEL et Le SBVV ont édité un "guide méthodique" basé sur le règlement d'apprentissage. Une méthode qui coordonne une formation idéale en entreprise avec le programme d'enseignement professionnelle et qui donne l'obligation à l'entreprise formatrice ne pouvant pas assumer entièrement tous les articles du règlement d'apprentissage de trouver une convention interentreprise. Cette année-là, également, l'EPCL a recomposé son collège d'experts. Ceux-ci ont revu le contenu des examens pour l'obtention du CFC de libraire, en l'adaptant aux nouveaux cours, par exemple celui de "connaissances marchandise" ou "connaissances de l'entreprise". A été rajouté à l'examen de vente, "le coup de cœur" qui implique la défense d'un des romans non scolaires aimé par l'apprenti au cours des 3 ans. Je vais aujourd'hui vous faire un état des lieux, empirique hélas. L'ASDEL n'arrivant pas à collecter les informations inhérentes par exemple à l'engagement des apprentis titulaires du CFC de libraire et désirant rester dans la profession. Je suis experte aux examens pour l'obtention du CFC depuis 5 ans. Le nombre d'apprentis varie assez peu, entre 25 et 30 chaque année (environ 5 échecs). Pour la plupart, ils décident de continuer une formation soit par le biais de la maturité professionnelle, soit en bifurquant vers la formation AID (assistant en information documentation bibliothécaire). Rarissimes sont ceux qui se lancent dans l'ouverture d'une librairie. Nous n'arrivons pas à connaître le nombre de libraires voulant poursuivre en librairie et qui seraient au chômage. Dans l'absolu, le tableau du métier est plutôt sombre. Les librairies indépendantes sont de plus en plus rares. Et les postes offerts par les grandes chaînes présentent quelques problèmes. Sur Genève, FNAC et Payot engagent (sans équivalence) des frontaliers. D'autre part, les librairies Payot qui sont les plus grandes pourvoyeuses et de places d'apprentissage et d'emploi, engagent les apprentis que l'entreprise a formés. Malgré cela, je reste persuadée de la nécessité absolue d'une formation spécifique à ce métier et qui resterait d'une durée de 3 ans. Cela pour diverses raisons. EVOLUTION ET ADAPTATION DE L'ENSEIGNEMENT La formation scolaire s'est adaptée au fil des ans à la profonde mutation que subit le métier de libraire, signe vitalité ! Elle donne aux apprentis la meilleure des possiblités d'acquérir des outils essentiels à la pratique du métier. Il faut souligner que les enseignants des branches professionnels s'interrogent constamment sur l'évolution de la branche de manière à mieux adapter leurs cours. L'exemple du cours "connaissance marchandise" est extrêmement probant. Les apprentis approfondissent la connaissance d'un domaine spécifique en présentant un dossier écrit ainsi qu'un exposé oral. Les enseignants de cette branche ont mis un site Internet (avec liens) à leur disposition. Par ex. Le roman policier ou la cuisine etc. Le bénéfice que peut retirer un apprenti dans ses cours théoriques peut représenter un atout pour l'entreprise dans laquelle il travaille. Nous constatons que les librairies indépendantes, financièrement fragilisées, n'évoluent que très peu. Il n'existe aucune formation continue de la branche. La contribution d'un apprenti formé théoriquement au plus près de son métier devient dès lors une contribution à un dynamisme de plus en plus nécessaire. La formation théorique de l'apprenti telle qu'elle est conçue lui permet d'acquérir les outils, l'esprit de synthèse et d'analyse, l'appareil critique, le vocabulaire, afin de simplement savoir où et comment commencer (conseiller, créer, dynamiser, compter) LES DEMANDES DE L'ENTREPRISE Le fait que l'apprenti fréquente des élèves formés dans d'autres librairies, lui permet une mise à distance de son entreprise formatrice dans une comparaison bien comprise de différents fonctionnements. Un métier ne peut évoluer et s'adapter sans une formation inhérente. Le métier de libraire est un métier extrêmement complexe, dans lequel il faut tenir compte de l'aspect commercial, avec les connaissances spécifiques que cela implique. Les petites structures ne peuvent souvent pas engager un comptable, encore moins un analyste financier sans parler d'un publicitaire. Ces connaissances ne s'acquièrent pas complètement empiriquement. C'est aussi un métier qui exigence des connaissances dans tous les domaines. Comment monter un rayon cohérent qui contentent à la fois des spécialistes mais aussi des néophytes, dans des disciplines aussi variées que la philosophie, l'ésotérisme, la médecine ou le livre jeunesse ? Comment répondre aux demandes de recherches diversifiées de notre clientèle ? Comment faire de sa librairie ce lieu à la fois accueillant, représentatif de la diversité des courants de pensée. Cet endroit dont le fond doit exister pour lui donner sa personnalité sans être trop lourd, dans une maîtrise des instruments de gestion. Ce lieu enfin, qui doit être une entreprise rentable pour perdurer, alors que c'est le seul commerce devant faire face au concurrent le plus redoutable : la gratuité ? Toutes ces questions doivent trouver une réponse dans la formation donnée par l'entreprise pour sa mise en application mais aussi par l'école, pour son aspect théorique. Dans ce sens l'enseignement pratiqué y est tout fait adéquat. EVOLUTION DE LA LIBRAIRIE Il n'est pas inutile de rappeler les grands changements qui se sont opérés entre la librairie (plus élitiste) de l'époque et celle d'aujourd'hui. Des érudits ouvraient ces temples du savoir et souvent faute de connaissances commerciales ou simplement d'intérêt, devaient fermer sans bien comprendre le processus. Il faut souligner que ces librairies-là se définissaient moins comme des commerces que comme des endroits où la pensée circulait. Ces propriétaires n'imaginaient pas gagner correctement leur vie (la situation a peu changé de ce côté-là). La vocation de la librairie qui fait et défait les courants de pensées semble aujourd'hui peu réaliste. Le livre est devenu une marchandise, et le libraire doit développer des qualités marketing proches d'un niveau professionnel. La librairie n'en reste pas moins cet endroit où devrait se rencontrer le monde réel et le monde des idées. Là se situe la plus grande ambivalence de ce métier ! POURQUOI UNE FORMATION SPECIFIQUE Une formation spécifique et adaptée permet à l'apprenti d'aborder le monde du travail en général de manière plus adéquate. La transmission et l'enseignement donnent du sens. Un apprenti formé devrait dans l'idéal être demain cet employé qui sait comment apprendre, comment comprendre sans trop être désarçonné. L'apprentissage et son évolution est une des plus belles manières de perpétuer une profession. L'apprentissage offre la combinaison idéale de la gestion des rapports avec la clientèle et la formation théorique d'un métier. 3 ans ne sont pas trop longs pour apprendre à analyser, synthétiser, comprendre un livre ou un texte, s'en approcher, savoir comment en parler et à qui. Le métier de libraire est un métier de lecture (ce qui ne va pas toujours de soi), c'est un métier qui déborde. Comment vendre sans savoir conseiller ? Je finirai en disant que sans véritable volonté politique, par exemple dans la reconnaissance du statut particulier du livre, formations scolaires et pratiques ne résoudront pas tous les problèmes. Il semblerait qu'inéluctablement les librairies indépendantes ferment. Mais contrairement aux disquaires, profession aujourd'hui disparue, les libraires avec cet apprentissage de 3 ans, maîtrisent de plus en plus les outils qui leur permettront de ne pas avoir peur de s'adapter à la nouvelle demande des consommateurs dans le respect de ceux-ci, mais aussi dans le respect d'une qualité professionnelle. Apprendre un métier, c'est être libre de (se) créer un avenir professionnel. Marie-Jeanne Muheim