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DROIT DES SOCIÉTÉS - REVUE MENSUELLE LEXISNEXIS JURISCLASSEUR - OCTOBRE 2015
SOCIÉTÉS COMMERCIALES
Dorothée GALLOIS-COCHET,
agrégée des facultés de droit,
professeur à PSL, Université Paris Dauphine
RÉFORME LÉGISLATIVE – LOI MACRON
▲
167 SEL et SPFPL
La loi Macron assouplit les règles de composition du
capital des SEL et des SPFPL. Elle accroît, notamment, les
possibilités de participation des professionnels exerçant en dehors de la SEL ou, pour les SPFPL, en dehors de
leurs filiales. L’ouverture se fait également au profit des
professionnels européens et, pour les professions juridiques ou judiciaires, des autres professionnels du
secteur.
L. n° 2015-990, 6 août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des
chances économiques, art. 67 : JO 7 août 2015, texte n° 1
NOTE : D’inspiration libérale, la loi du 6 août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques, dite loi
Macron, apporte d’importants assouplissements à la réglementation des SEL et des SPFPL. La loi n° 90-1258 du 31 décembre 1990 en
ressort substantiellement modifiée. Ce sont, en premier lieu, les
règles de composition du capital des SEL qui sont sensiblement
assouplies. Pour l’essentiel, on retiendra la possibilité, sauf pour
les SEL du secteur de la santé, que la majorité du capital et des
droits de vote soit détenue par des professionnels exerçant la
profession constituant l’objet de la SEL en dehors de celle-ci, ainsi
que, pour les seules professions judiciaires ou juridiques, la possibilité d’une détention majoritaire par des professionnels exerçant
une autre profession juridique ou judiciaire que celle dont l’exercice constitue l’objet de la SEL. Les professionnels européens se
voient également ouvrir le capital de ces sociétés. En ce qui
concerne, en second lieu, les SPFPL, on retiendra surtout l’ouverture du capital des sociétés interprofessionnelles aux professionnels n’exerçant pas leur profession au sein des sociétés détenues
par la SPFPL, ainsi que la possibilité pour les professionnels européens d’être associés.
Tous les articles mentionnés ci-après sans autre précision
renvoient à la loi du 31 décembre 1990.
1. SEL
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Nouvelle présentation des textes. – Sur le plan purement
formel, la loi Macron modifie la présentation des règles relatives
à la composition du capital des SEL. Jusqu’à présent, la règle de
détention majoritaire du capital et des droits de vote par des
professionnels figurait dans l’article 5 (au premier alinéa), de
même que la liste des catégories de personnes autorisées à
détenir le complément (alinéas suivants). L’article 5-1 exposait la
dérogation concernant la détention majoritaire du capital par
des professionnels exerçant la profession constituant l’objet de
la SEL en dehors de celle-ci et par des SPFPL détenues par ces
mêmes professionnels. Enfin, l’article 6 envisageait la détention
libre d’une partie plafonnée du capital. Dorénavant, l’article 5
énonce la règle de détention majoritaire au I, A et celle relative à
la détention du complément au I, B. L’article 6 prévoit les
dérogations à la règle de détention majoritaire, aux I et II, et
envisage la règle relative à la détention libre, au III. L’article 5-1
est, en conséquence, abrogé. L’ensemble gagne assurément en
lisibilité.
Ouverture de la détention minoritaire aux professionnels européens. – Le principe de la détention majoritaire du capital et des
Myriam ROUSSILLE,
agrégée des facultés de droit,
professeur à l’université du Maine,
IRJS (Sorbonne Finance)
droits de vote par les professionnels en exercice au sein de la
SEL, que ce soit directement ou indirectement, n’est pas modifié
(art. 5, I, A). Quant à la détention du solde (ou complément), une
sixième catégorie de personnes est ajoutée aux cinq existantes
(professionnels en exercice en dehors de la SEL, anciens professionnels ayant cessé leur activité, ayants droit d’associés décédés, sociétés constituées en vue du rachat d’entreprise par les
salariés dont les associés exercent leur profession au sein de la
SEL ou SPFPL et autres professionnels du même secteur). La
sixième catégorie vise les professionnels européens exerçant la
profession constituant l’objet social de la SEL en ces termes :
« Toute personne physique ou morale légalement établie dans
un autre État membre de l’Union européenne ou partie à
l’accord sur l’Espace économique européen ou dans la Confédération suisse qui exerce, dans l’un de ces États, une activité
soumise à un statut législatif ou réglementaire ou subordonnée
à la possession d’une qualification nationale ou internationale
reconnue et dont l’exercice constitue l’objet social de la société
et, s’il s’agit d’une personne morale, qui répond, directement ou
indirectement par l’intermédiaire d’une autre personne morale,
aux exigences de détention du capital et des droits de vote
prévues par la présente loi » (art. 5, I, B, 6°).
Suppression du plafonnement des participations des professionnels du même secteur, sauf pour les professions de santé. – Jusqu’à
présent, la loi autorisait les décrets propres aux différentes
professions à limiter le nombre de SEL dans lesquelles une
même personne physique ou morale, faisant partie de la
première ou de la cinquième catégorie, pouvait détenir des
participations (anc. art. 5, al. 8). Il était ainsi possible de limiter le
nombre de participations des professionnels exerçant en
dehors de la SEL la profession constituant l’objet de celle-ci ou
de ceux exerçant une autre profession du même secteur (juridique, de santé, ou technique). Dorénavant, cette faculté de
limiter la participation des professionnels faisant partie des
première et cinquième catégories est cantonnée aux professions de santé (art. 5, I, C).
Ouverture de la détention majoritaire en droits de vote aux
professionnels exerçant en dehors de la SEL. – Jusqu’à présent, la
possibilité de déroger au principe de détention majoritaire en
capital et en droits de vote par des professionnels en exercice au
sein de la SEL ne concernait que la détention du capital (anc.
art. 5-1). En effet, la majorité du capital de la SEL pouvait être
détenue par des professionnels exerçant en dehors de la SEL la
profession constituant son objet ou par des SPFPL dont la
majorité du capital et des droits de vote étaient détenues par des
personnes exerçant ladite profession. Il n’était pas possible, en
revanche, que ces professionnels exerçant en dehors de la SEL
détiennent la majorité des droits de vote (anc. art. 5-1, al. 1 et 2).
Dorénavant, c’est non seulement la majorité du capital, mais
aussi la majorité des droits de vote (art. 6, I, 1°) qui peut être
détenue par des professionnels exerçant en dehors de la SEL la
profession constituant son objet ou par des SPFPL dont la
majorité du capital et des droits de vote est détenue par des
professionnels exerçant cette même profession. Cette dérogation bénéficie aux professionnels français comme aux professionnels européens, tels que définis à l’article 5, I, B, 6°.
On notera qu’il est dérogé à la règle d’une détention majoritaire de la SPFPL par des professionnels exerçant la profession
constituant l’objet de la SEL pour les SPFPL dont l’une au moins
des filiales exerce une profession juridique ou judiciaire et pour
celles dont les filiales exercent exclusivement des professions
juridiques, puisque l’article 6, II, 1° s’applique sous réserve du III
de l’article 31-1 et l’article 6, II, 2°, sous réserve du III de
DROIT DES SOCIÉTÉS - REVUE MENSUELLE LEXISNEXIS JURISCLASSEUR - OCTOBRE 2015
l’article 31-2 (sur ces dérogations concernant la détention des
SPFPL, V. infra).
Conséquences concernant la direction de la SEL (et l’identité des
commandités). – Lorsqu’il est fait application de la dérogation
relative à la détention majoritaire du capital et des droits de vote,
la règle obligeant à choisir les dirigeants (gérants, président et
autres dirigeants de SAS, président du conseil d’administration,
membres du directoire, président du conseil de surveillance et
directeurs généraux) ainsi que deux tiers au moins des membres
des conseils d’administration ou de surveillance parmi les
professionnels en exercice au sein de la SEL est écartée (art. 12,
al. 5). Est de même écartée la règle obligeant le(s) commandité(s) d’une SELCA à être un (des) professionnel(s) en exercice au
sein de la société (art. 13, al. 7).
Non-application au secteur de la santé. – Cette nouvelle
dérogation à la détention majoritaire des droits de vote par les
professionnels en exercice au sein de la SEL ne s’applique pas
aux professions de santé (art. 6, I, 1°, 1re phrase). Pour ces
dernières, l’étendue de la dérogation à la règle de détention
majoritaire demeure inchangée : il s’agit exclusivement d’une
dérogation à la détention de la majorité du capital (art. 6, I, 2°).
Dérogation à la détention majoritaire spécifique au secteur
juridique ou judiciaire. – Pour les professions juridiques ou
judiciaires, la loi va encore plus loin puisqu’elle autorise la
détention majoritaire du capital et des droits de vote par des
professionnels exerçant une autre profession que celle constituant l’objet de la SEL (art. 6, I, 3°). Pour ces SEL, plus de la moitié
du capital et des droits de vote peut ainsi être détenue par des
personnes exerçant l’une quelconque des professions juridiques ou judiciaires, que ces personnes soient établies en
France ou qu’il s’agisse de professionnels européens tels que
définis à l’article 5, I, B, 6°. La seule exigence (assez peu
contraignante) est que la SEL comprenne au moins une
personne exerçant la profession constituant son objet social
parmi ses associés.
Conséquences concernant la direction de la SEL (et l’identité des
commandités). – Lorsqu’il est fait application de cette dérogation, la règle obligeant à choisir les dirigeants ainsi que deux
tiers au moins des membres des conseils d’administration ou de
surveillance parmi les professionnels en exercice au sein de la
SEL est écartée (art. 12, al. 6). Toutefois, le cas échéant, le conseil
d’administration ou le conseil de surveillance de la SEL doit
comprendre au moins un membre de la profession constituant
l’objet social de la société exerçant sa profession au sein de
celle-ci (idem). Par ailleurs, ce ne sont plus tous les commandités de la SEL, mais seulement l’un d’entre eux au moins, qui doit
être une personne physique exerçant sa profession au sein de la
société (art. 13, al. 8).
Possibilité d’une interdiction par décret des dérogations. –
L’application de chacune de ces dérogations – dérogation
générale (autorisation de la détention de la majorité du capital
et des droits de vote par des professionnels exerçant la profession en dehors de la SEL) comme dérogation spécifique aux
professions juridiques ou judiciaires – peut être écartée par un
décret propre à chaque profession, compte tenu des nécessités
propres à celle-ci et dans la mesure nécessaire à son bon
exercice, au respect de l’indépendance de ses membres ou de
ses règles déontologiques propres (art. 6, IV, 1°).
Plafonnement du nombre de participations détenues par des
professionnels dans des SEL du secteur de la santé. – Pour les
professions de santé, les décrets propres à chaque profession
sont autorisés, en tenant compte des nécessités propres à
celle-ci et dans la mesure nécessaire à leur bon exercice, au
respect de l’indépendance de ses membres ou de ses règles
déontologiques propres, à limiter le nombre de SEL exerçant
ladite profession dans lesquelles une même personne exerçant
cette profession ou une même SPFPL peut détenir des participations directes ou indirectes (art. 6, IV, 2°). Ce plafonnement se
distingue de celui mentionné ci-dessus en ce qu’il tient compte
de toutes les participations, y compris celles dans la SEL où
l’intéressé exerce sa profession, alors que le précédent ne
concerne que les participations détenues au titre du solde du
capital, comme professionnel n’exerçant pas dans la société.
Cette disposition n’est pas nouvelle, elle était précédemment
prévue pour l’ensemble des SEL, à l’exception des professions
judiciaires ou juridiques (anc. art. 5-1, al. 4).
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Fin de la possibilité de plafonnement du nombre de participations détenues par des professionnels pour les SEL des autres
professions. – Il résulte de l’article 6, IV, 2° qu’en dehors des
professions de santé, les décrets propres aux différentes professions n’ont plus la possibilité de plafonner le nombre de
participations qu’une même personne physique ou morale
exerçant la profession peut détenir dans des SEL exerçant cette
profession. Cette impossibilité de plafonnement s’appliquait
déjà aux professions judiciaires ou juridiques mais pas aux
professions du secteur technique.
Absence de modification des règles relatives à la détention libre.
– Les conditions de la détention libre ne sont pas modifiées (anc.
art. 6, al. 1,2 et 4, devenus art. 6, III et V). Rappelons que pour les
SELARL, SELAS et SELAFA, les décrets propres aux différentes
professions peuvent autoriser la détention d’une partie du
capital par n’importe quelle personne physique ou morale, dans
la limite du quart, pour les professions de santé et de la moitié
pour les autres professions. Pour les SELCA, les statuts peuvent
autoriser cette détention libre, dans la limite de la moitié du
capital. Ces dispositions ne sont pas applicables aux professions
juridiques et judiciaires.
Plafonnement et interdiction des participations au titre de la
détention libre. – Ces règles ne sont pas modifiées. Les décrets
propres aux différentes professions peuvent limiter le nombre
de participations détenues dans des SEL constituées pour
l’exercice d’une même profession par des personnes autorisées
à détenir une partie du capital au titre de la détention libre (anc.
art 6, al. 3 devenu art. 6, III, 3°). Ils peuvent aussi interdire la
détention d’une partie du capital des SEL soit par des professionnels exerçant une autre profession relevant du même
secteur, soit par des catégories de personnes déterminées,
lorsque cette détention serait de nature à mettre en péril
l’exercice des professions concernées dans le respect de l’indépendance de leurs membres et de leurs règles déontologiques
propres (anc. art. 7 devenu art. 6, IV, 4°).
Droits de vote double. – La loi Macron introduit dans l’article 8
un nouvel alinéa ainsi rédigé : « Les dispositions des deuxième,
troisième et quatrième alinéas de l’article 8 ne sont pas applicables aux cas mentionnés aux 1° et 3° du I de l’article 6 » (art. 8,
al. 6). Les trois alinéas visés contiennent les dispositions relatives aux droits de vote double. Les 1° et 3° du I de l’article 6
mentionnent des catégories de personnes autres que des
professionnels en exercice au sein de la SEL autorisées, par
dérogation, à détenir la majorité du capital social et des droits de
vote de la SEL. Il s’agit, d’une part, des professionnels n’exerçant
pas leur profession au sein de la SEL ou des SPFPL dont la
majorité du capital et des droits de vote sont détenues par des
professionnels n’exerçant pas leur profession au sein de la SEL
et, d’autre part, dans les SEL ayant pour objet l’exercice d’une
profession juridique ou judiciaire, des professionnels exerçant
une profession juridique ou judiciaire autre que celle constituant l’objet de la SEL. Ainsi faut-il, semble-t-il, comprendre que
les dispositions dérogatoires relatives aux droits de vote double
ne s’appliquent pas à ces catégories de personnes, lesquelles
peuvent se voir attribuer un droit de vote double dans les
conditions de droit commun (conditions restrictives des articles
L. 225-123 et 124 du Code de commerce pour les SELAFA et
SELCA et librement pour les SELAS). Notons que si ces catégories de personnes viennent à bénéficier d’un droit de vote
double, ce même droit doit également être attribué aux professionnels en exercice au sein de la SEL (sous réserve le cas
échéant d’une condition d’ancienneté), conformément à
l’article 8 alinéa 3 qui impose d’attribuer un droit de vote double
à tous les professionnels en exercice au sein de la SEL dès que
les statuts prévoient un droit de vote double.
Agrément des cessions. – La loi Macron introduit dans
l’article 10 un dernier alinéa, ainsi rédigé : « Les troisième à
avant-dernier alinéas du présent article ne sont pas applicables
aux cas mentionnés aux 1° et 3° du I de l’article 6 ». Les alinéas
concernés sont ceux qui prévoient des conditions de majorité
impératives et dérogatoires pour l’agrément des cessions dans
les SEL (3/4 des professionnels en exercice au sein des SELARL,
2/3 des professionnels en exercice au sein des SELAFA et des
SELAS et 2/3 des commandités au sein des SELCA). Le sens de la
nouvelle disposition est ambigu, dès lors que ce ne sont pas des
« cas » que mentionnent les 1° et 3° du I de l’article 6, mais des
catégories de personnes autres que des professionnels en
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exercice au sein de la SEL autorisées, par dérogation, à détenir la
majorité du capital social et des droits de vote de la SEL. On peut,
semble-t-il, comprendre que sont en réalité visées certaines
cessions : d’une part, dans toutes les SEL sauf celles ayant pour
objet l’exercice d’une profession de santé, les cessions de la
majorité du capital et des droits de vote consenties à des
professionnels n’exerçant pas leur profession au sein de la SEL
ou à des SPFPL dont la majorité du capital et des droits de vote
sont détenues par des professionnels n’exerçant pas leur
profession au sein de la SEL et, d’autre part, dans les SEL ayant
pour objet l’exercice d’une profession juridique ou judiciaire,
les cessions de la majorité du capital et des droits de vote à des
professionnels exerçant une profession juridique ou judiciaire
autre que celle constituant l’objet de la SEL. La disposition
signifierait que pour toutes ces cessions, l’agrément n’est pas
donné dans les conditions de majorité spéciales prévues par
l’article 10, mais dans les conditions de majorité légales (pour les
SELARL) ou, le cas échéant, statutaires (pour les SELARL, les
SELAS ou les SELAFA). C’est dire, en pratique, que les conditions
de majorité requises pour agréer ce type de cessions peuvent
être renforcées par rapport aux règles dérogatoires qui
demeurent applicables aux autres hypothèses de cessions.
2. SPFPL
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Ouverture du capital des SPFPL aux professionnels européens. –
Les personnes mentionnées au 6° du B du I de l’article 5,
c’est-à-dire les professionnels européens, sont dorénavant
autorisées à être associées des SPFPL (art. 31-1, I, al. 1).
Extension de l’objet social autorisé. – Jusqu’à présent, les SPFPL
étaient autorisées, outre à détenir des participations dans des
SEL ayant pour objet l’exercice d’une même profession ou dans
des groupements étrangers ayant le même objet, à avoir des
activités accessoires en relation directe avec leur objet. Dorénavant, les SPFPL peuvent exercer toute autre activité, la seule
limite étant, comme précédemment, que cette activité soit
destinée exclusivement aux sociétés ou aux groupements dont
elles détiennent des participations (art. 31-1, I, al. 1). Les SPFPL
pourraient, notamment, détenir les parts d’une SCI qui louerait
des locaux à ses filiales SEL (V. en ce sens, D. Velardocchio,
aperçu rapide, Adoption de la loi Macron : réformes du droit des
sociétés : JCP E 2015, 612).
Nouvel objet spécifique pour les SPFPL du secteur juridique. –
Les professionnels du secteur juridique ou judiciaire étant
dorénavant autorisés à exercer leur activité dans le cadre de
sociétés commerciales classiques (V. Dr. sociétés 2015, comm.
167, note M. Roussille), l’objet des SPFPL est modifié en conséquence, afin d’autoriser ces dernières à détenir des parts ou
actions de ces sociétés lorsque celles-ci exercent une même
profession juridique ou judiciaire (art. 31-1, III). Dans ce cas, le
capital social et les droits de vote de la SPFPL doivent être
détenus par des personnes exerçant une profession juridique
ou judiciaire, y compris des professionnels européens au sens
de l’article 5,I, B, 6°. La minorité du capital et des droits de vote
peut, le cas échéant, être détenue soit par des anciens professionnels en exercice au sein de la société ayant cessé toute
activité professionnelle – pendant un délai de dix ans (catégorie
visée à l’art. 5, I, B, 2°), soit par des ayants droit d’anciens associés
professionnels en exercice ou non au sein de la SEL pendant un
délai de 5 ans (catégorie visée à l’art. 5, I, B, 3°) (art. 31-1, III, al. 2).
Les organes de contrôle de la SPFPL doivent alors comprendre
au moins une personne exerçant la même profession que celle
exercée par les sociétés faisant l’objet de la détention des parts
ou actions (art. 31-1, III, al. 3).
Disparition du renvoi aux décrets adoptés pour chaque profession. – Jusqu’à présent, la possibilité de constituer des SPFPL
mono-professionnelles, c’est-à-dire détenant des participations
dans des SEL ayant pour objet la même profession, était subordonnée à l’adoption, pour chaque profession, d’un décret
précisant les conditions d’application du titre IV de la loi, relatif
aux SPFPL (anc. art. 31-1 al. 9). Le Conseil d’État avait certes jugé
que l’application de ces dispositions n’était pas manifestement
impossible en l’absence de décrets, tout en précisant qu’il
appartenait cependant au Gouvernement de vérifier si le
respect de l’indépendance des membres de chacune de ces
professions et les règles déontologiques les gouvernant impliquaient, le cas échéant, l’édiction de règles particulières d’appli-
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cation de la loi pour certaines d’entre elles (CE, ss. 1 et 6 réunies,
28 mars 2012, n° 343962, Bergeyron : JurisData n° 2012-005841).
Toute référence aux décrets d’application disparaît dans la
nouvelle rédaction de l’article 31-1 (V. l’article 67, 11, h) de la loi
prévoit la suppression du dernier alinéa de l’article 31-1). En
pratique, il en résulte la possibilité pour les professionnels de
santé autres que les vétérinaires et les pharmaciens d’officine de
constituer des SPFPL mono-professionnelles.
SPFPL interprofessionnelles : précision concernant les professionnels européens. – Il est précisé que les personnes visées à
l’article 5, I, B, 6°, c’est-à-dire les personnes physiques ou
morales légalement établies dans un autre État membre de
l’Union européenne ou partie à l’accord sur l’Espace économique européen ou dans la Confédération suisse qui exercent,
dans l’un de ces États, une activité soumise à un statut législatif
ou réglementaire ou subordonnée à la possession d’une qualification nationale ou internationale reconnue et exerçant les
professions d’avocat, de notaire, d’huissier de justice, de
commissaire-priseur judiciaire, d’expert-comptable, de
commissaire aux comptes ou de conseil en propriété industrielle sont considérées comme exerçant ces professions pour
l’application de l’article 31-2 relatif aux SPFPL interprofessionnelles.
Ouverture de la détention majoritaire des SPFPL interprofessionnelles aux professionnels n’exerçant pas au sein des SEL détenues
par la SPFPL. – Jusqu’à présent, la majorité du capital et des droits
de vote des SPFPL interprofessionnelles devait être détenue par
des personnes exerçant leur profession au sein des sociétés
faisant l’objet d’une prise de participation (anc. art. 31-2, al. 2).
Quant au complément, il devait être détenu par des personnes
appartenant à 5 catégories dont le contenu n’est pas modifié
(art. 31-2, al. 2 et s.). Seule change la règle relative à la détention
majoritaire. Dorénavant, plus de la moitié du capital et des droits
de vote doit être détenue par des personnes exerçant la ou les
mêmes professions que celles exercées par les sociétés faisant
l’objet d’une prise de participation (art. 31, II, al. 1°). Il n’est donc
plus requis que les associés majoritaires de la SPFPL exercent
leur profession au sein des SEL –ou groupements étrangers–
détenues par la SPFPL.
En revanche, et à notre avis, il demeure nécessaire que les
associés majoritaires en capital et en droits de vote couvrent
l’ensemble des professions exercées par les sociétés faisant
l’objet d’une prise de participation par la SPFPL. Dans l’ancienne
rédaction du texte, cette exigence était difficilement contestable, puisqu’étaient visées « des personnes exerçant leur
profession au sein des sociétés faisant l’objet d’une prise de
participation », ce qui laissait entendre que toutes ces sociétés
(filiales) étaient concernées, de sorte que toutes les professions
exercées par ces sociétés devaient être exercées par les professionnels associés de la SPFPL (V. dans le même sens, M.
Roussille : Dr. sociétés 2011, comm. 111). On peut penser,
malgré l’ambiguïté de la nouvelle rédaction, que la finalité du
texte est d’ouvrir le capital des SPFPL aux professionnels en
exercice en dehors des filiales de la SPFPL, sans pour autant
abandonner l’exigence relative à la représentation de chacune
des professions exercées par celles-ci. Dans ce sens, on relèvera
que, si tel n’était pas le cas, le III de l’article 31-2 relatif aux SPFPL
dont toutes les filiales exercent une profession juridique
rendrait inutile la précision apportée au II, alinéa 1 du même
article pour l’hypothèse où l’une au moins des filiales de la
SPFPL exerce une profession juridique (sur ces deux règles
particulières, V. infra).
Règle particulière en cas d’exercice par l’une au moins des filiales
d’une profession juridique ou judiciaire. – Lorsque l’une au moins
des participations détenues par la SPFPL exerce une profession
juridique ou judiciaire, la majorité du capital et des droits de
vote de la SPFPL peut également être détenue par toute autre
personne admise à détenir la majorité du capital social et des
droits de vote de ladite société. Cela signifie que les personnes
exerçant, le cas échéant, une autre profession juridique ou
judiciaire que celle exercée par la filiale de la SPFPL sont prises
en compte pour satisfaire la condition de détention de la
majorité du capital et des droits de vote de la SPFPL.
Cas particulier des SPFPL interprofessionnelles dont les filiales
exercent exclusivement des professions juridiques ou judiciaires. –
Lorsque la SPFPL ne détient que des parts ou actions de sociétés
ayant pour objet l’exercice de plusieurs des professions juri-
Commentaires
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diques ou judiciaires, le capital social et les droits de vote
peuvent être détenus par toute personne exerçant une ou
plusieurs des professions juridiques ou judiciaires, qu’il s’agisse
de professionnels français ou européens (art. 31-2, III). Cette
dérogation signifie à notre avis que le capital de la SPFPL peut
être détenu par n’importe quels professionnels du secteur
juridique ou judiciaire, sans qu’il soit nécessaire que chaque
profession dont l’exercice constitue l’objet des filiales soit
exercée par l’un des professionnels associés de la SPFPL.
3. Dispositions communes
Information de l’ordre sur la composition du capital. – La loi
Macron introduit l’obligation, pour les sociétés, d’informer une
fois par an l’ordre dont elles relèvent de la composition de leur
capital social. Cette obligation concerne aussi bien les SEL (art. 3,
al. 4) que les SPFPL (art. 31-1, IV, al. 3, in fine). Cette information
devrait permettre à l’ordre de faire plus facilement respecter
l’obligation de mise en conformité si les règles de composition
du capital venaient à ne plus être satisfaites en cours de vie
sociale.
Délai de mise en conformité. – Les sociétés disposent d’un
délai de deux ans pour se mettre en conformité avec plusieurs
décrets (art. 34). Sont en premier lieu visés les décrets prévus
aux deuxième et troisième alinéas de l’article 5-1, dans sa
rédaction antérieure à la loi du 6 août 2015 (sans doute faut-il
comprendre qu’il s’agit des troisième et quatrième alinéas). Les
décrets concernés sont ceux pouvant interdire la dérogation à la
détention majoritaire du capital des SEL au profit des professionnels n’exerçant pas leur profession au sein de la SEL et ceux
pouvant plafonner le nombre de SEL exerçant une profession
dans lesquelles une même personne exerçant cette profession
ou une même SPFPL peut détenir des participations. Cette
disposition figurait déjà précédemment dans l’article 34. Sont
en second lieu visés les décrets prévus aux III et IV de l’article 6,
dans sa rédaction résultant de la loi du 6 août 2015. Il s’agit des
décrets pouvant autoriser la détention libre d’une partie du
capital des SEL, de ceux pouvant écarter la dérogation à la
détention de la majorité du capital et des droits de vote par des
professionnels en exercice au sein de la SEL, de ceux pouvant,
pour les seules professions de santé, limiter le nombre de SEL
dans lesquelles une même personne exerçant la profession ou
une même SPFPL peut détenir des participations, de ceux
pouvant plafonner le nombre de participations au titre de la
détention libre, de ceux pouvant interdire la participation de
certains autres professionnels du secteur ou de catégories de
personnes déterminées. La société dispose d’un délai de deux
ans, qui court à compter de l’entrée en vigueur du décret
concerné, pour se mettre en conformité avec tous ces plafonnements ou interdictions.
Le régime applicable à l’issue de ce délai n’est pas modifié : la
société peut imposer un rachat des parts ou actions par réduction de son capital. En outre, tout intéressé peut demander la
dissolution, laquelle ne peut toutefois être prononcée si la
composition du capital a été régularisée.
Toilettage. – Un certain nombre d’articles sont modifiés pour
mettre à jour les renvois jusqu’alors opérés dans la loi de 1990
aux articles de la loi du 24 juillet 1966, au profit des articles du
Code de commerce. Aucune modification substantielle n’en
résulte. Il en est ainsi de l’article 8, concernant les droits de vote
double, de l’article 10 concernant les conditions de l’agrément
dans les SELARL, de l’article 13 concernant la responsabilité de
l’actionnaire commanditaire. Par ailleurs, différents renvois faits
aux articles de la loi de 1990 sont modifiés pour tenir compte de
la nouvelle numérotation des articles.
Entrée en vigueur. – Faute de disposition particulière, ces
dispositions sont entrées en vigueur le lendemain de la publication de la loi au Journal officiel, soit le 8 août 2015.
Dorothée GALLOIS-COCHET
Mots-Clés : Réforme législative - Loi Macron - SEL - SPFPL
Textes : L. 1990, art. 5, 6, 31-1 et 31-2
JurisClasseur : Sociétés Traité, Fasc. 192-10 et 192-25
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Ouverture des sociétés commerciales aux
professions juridiques : les SEL
concurrencées ?
La loi Macron ouvre la possibilité aux professionnels du
droit de constituer des sociétés commerciales, dont le
capital ou les droits de vote ne seront pas nécessairement détenus par des professionnels de la profession
objet de la société. Cette nouvelle forme de société
comporte quelques contraintes de structure du capital
social et de détention des droits de vote, ainsi que de
composition des conseils si elles se constituent sous
forme de SA. Mais elle offre plus de souplesse que les
sociétés d'exercice libéral, même dans leur régime
assoupli par la loi Macron.
L. n° 2015-990, 6 août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des
chances économiques, art. 63 : JO 7 août 2015, texte n° 1
NOTE : Nouvelles sociétés à régime spécial. - Et que fleurissent,
fleurissent, les sociétés spéciales... L'objectif de libéralisation des
professions réglementées conduit le législateur à créer un énième
régime de sociétés pour les différentes professions du droit. À dire
vrai, la loi n’institue pas de nouvelles formes sociales puisqu'au
contraire, ce sont les formes classiques des sociétés commerciales
qui sont désormais ouvertes aux professionnels du droit. Mais
cette ouverture s'accompagne de règles particulières en termes
de capital social, de droits de vote et de direction. On retrouve là
– et c'est bien normal – un air de famille avec les sociétés d'exercice libéral (ci-après « SEL »). Mais les contraintes posées sont
moins nombreuses, de sorte que les SEL vont se trouver concurrencées par des sociétés dont le régime spécial sera moins restrictif que celui de leur aïeul (sur les nouvelles règles relatives au SEL
également réformées par la loi Macron, supra : Dr. sociétés 2015,
comm. 167).
Professions concernées. - L'ensemble des professions réglementées du droit sont concernées : huissier, notaire, commisseurpriseur judiciaire, avocat, avocat à la Cour de cassation et au
Conseil d'État, administrateur judiciaire et mandataire judiciaire.
Tous les textes régissant ces professions intègrent désormais une
disposition les autorisant expressément à constituer une société
commerciale. Il y a autant de textes retouchés que de professions
concernées (pour les huissiers : ord. n° 45-2592, 2 nov. 1945, art.
1er bis AA ; pour les notaires, ord. n° 45-2590, 2 nov. 1945, art. 1 bis ;
pour le commissaires-priseurs judiciaires : ord. n° 45-2593, 2 nov.
1945, art. 1er bis ; pour les avocats : L. n° 71-1130, 31 déc. 1971, art.
7, art. 8 et art. 87 ; pour les avocats à la Cour de cassation et au
Conseil d'État : ord., 10 sept. 1817, art. 3-2 ; pour les administrateurs
judiciaires : C. com., art. L. 811-7 ; pour les mandataires judiciaires :
C. com., art. L. 812-5).
Sociétés pouvant être constituées. - Désormais tous les professionnels du droit concernés pourront constituer une société commerciale, sans être tenus de se plier au régime de la SEL. Si les divers
allégements opérés par la loi Macron conduisent à rapprocher les
deux régimes, les SEL conservent un régime plus spécifique, voire
plus contraignant sur certains aspects. Par exemple, l’immatriculation d'une SEL ne peut intervenir qu’après l’agrément de celle-ci
par l’autorité ou les autorités compétentes ou son inscription sur
la liste ou les listes ou au tableau de l’Ordre professionnel dont les
professionnels en exercice dépendent (L. n° 90-1258, 31 déc. 1990,
art. 3 al. 3). Une telle règle n'est pas légalement prévue pour les
nouvelles sociétés commerciales de professions juridiques, mais
il est possible que le décret d'application qui devrait intervenir
d'ici peu adopte un système similaire. De même, le régime des SEL
a été construit pour tenir compte de la spécificité des professions
qu'elles permettent d'exploiter et notamment de leur caractère
civil, de sorte que les litiges impliquant des SEL relèvent exclusivement de la juridiction civile, même en cas de procédure collective (L. n° 90-1258, 31 déc. 1990, art. 15). Or, rien de tel n'est prévu
pour les nouvelles sociétés.
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Commentaires
DROIT DES SOCIÉTÉS - REVUE MENSUELLE LEXISNEXIS JURISCLASSEUR - OCTOBRE 2015
Les seules formes sociales qui restent fermées aux professions
du droit sont les sociétés conférant à leurs associés la qualité de
commerçant, c'est-à-dire la société en nom collectif et la société
en commandite.
Place résiduelle faite aux professionnels en exercice au sein de la
société. - Dans les SEL, il est désormais possible que la majorité du
capital et des droits de vote soit détenu par des professionnels
extérieurs à la société, la seule contrainte étant en principe que ces
professionnels exercent la même profession que celle objet de la
SEL. Un aménagement est toutefois introduit dans le secteur juridique, les professionnels extérieurs détenant la majorité du capital ou des droits de vote pouvant appartenir à d'autres professions
du droit que celle objet de la SEL (supra : Dr. sociétés 2015, comm.
167). Le régime des nouvelles sociétés commerciales de professions juridiques est à cet égard complètement aligné sur le
nouveau régime des SEL. Une cohérence bienvenue.
Mais il semble subsister une différence : dans les SEL, il faut
malgré tout que parmi les associés ou actionnaires, l'un exerce la
profession au sein de la SEL, même en qualité de minoritaire. Or
cette condition ne semble pas requise pour les nouvelles sociétés
commerciales de professions juridiques. Aussi, un cabinet d'avocats, un cabinet d'huissiers ou un cabinet de notaires peuvent être
détenus à 100 % par des extérieurs. La seule contrainte est que l'un
des professionnels en exercice au sein de la société soit membre
du conseil d'administration ou du conseil de surveillance de la
société. Cette règle ne s'applique évidemment qu'aux SA, de sorte
que la place des professionnels en exercice au sein de la direction
des futures SAS ou SARL de profession juridique n'est pas assurée.
Ouverture capitaliste et politique de ces sociétés : structure européenne. - La loi Macron prévoit que le capital et les droits de vote
des nouvelles sociétés puissent être détenus, comme en matière
de SEL, par des étrangers, dès lors qu'ils sont légalement établis
dans un autre État de l'UE, de l'EEE ou de la Confédération suisse,
et qu'ils disposent d'une qualification nationale ou internationale
équivalente, ainsi que le prévoit la directive 2005/36/CE relative à
la reconnaissance des qualifications professionnelles, telle modifiée en 2013 (PE et Cons. UE, dir. 2013/55/UE, 20 nov. 2013 : JOUE n°
L 354, 27 nov. 2013, p. 132). L'unique condition qui semble résulter
du texte est que ces professionnels extérieurs soient de professions juridiques et judiciaires et surtout qu'ils soient en exercice,
c'est-à-dire qu'ils ne soient pas à la retraite.
Ouverture capitaliste et politique de ces sociétés : structure transprofessionnelle. - Par ailleurs, on l'a dit, les professionnels détenant
la majorité du capital et les droits de vote peuvent donc non seulement être des extérieurs, mais ils peuvent – comme dans les SEL
- en outre tout à fait relever d'une profession juridique autre que
celle exploitée dans la société. Ceci permet d'envisager a minima
des structures trans-professionnelles, c'est-à-dire associant des
professionnels de diverses branches, quelle quoi soit la répartition du capital et des droits de vote entre eux. On se rapproche ici
du régime des SPFPL qui étaient jusqu'ici les seules structures
d'accueil permettant de réunir des professions réglementées de
divers horizons (V. notamment suite à la loi n° 2011-331, 28 mars
2001 sur les professions juridiques : Dr. sociétés 2011, comm. 111,
note M. Roussille). Il semble même envisageable a maxima que les
nouvelles sociétés puissent être détenues à 100 % par des
personnes d'une autre profession. Les notaires (ou un notaire via
une EURL) pourraient ainsi par exemple créer un cabinet d'huissiers ou d'avocats, les avocats (ou un avocat) créer un cabinet
d'avocats au Conseil. Ici, aussi l'unique exigence est que l'un des
professionnels en exercice au sein de la société siège au conseil
d'administration ou au conseil de surveillance de la société.
Un garde-fou est tout de même posé : un décret en Conseil
d'État précisera les conditions d'application du texte, dans le
respect des règles de déontologie applicables à chaque profession. Ce décret imposera notamment des conditions d'inscription
ou d'omission de la société auprès des autorités compétentes.
Mais il pourrait aussi restreindre toutes les possibilités qui
semblent actuellement offertes par ces nouvelles structures...
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Myriam ROUSSILLE
Mots-Clés : Réforme législative - Loi Macron - Sociétés commerciales - Ouverture aux professions juridiques
Textes : Ord. n° 45-2592, 2 nov. 1945. – Ord. n° 45-2590, 2 nov.
1945. – Ord. n° 45-2593, 2 nov. 1945. – L. n° 71-1130, 31 déc.
1971, art. 7, art. 8 et art. 87. – Ord., 10 sept. 1817. – C. com., art. L.
811-7 et art. L. 812-5
JurisClasseur : Sociétés Traité, Fasc. 192-10, Fasc. 193-20 et Fasc.
193-40
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Loi Macron – Cumul des mandats dans
les SA cotées
La loi Macron réduit à trois le cumul des mandats
exécutifs dans les sociétés cotées dépassant un plafond
d’effectif salarié.
L. n° 2015-990, 6 août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des
chances économiques, art. 211 : JO 7 août 2015, texte n° 1
NOTE : Parmi les mesures ponctuelles de la loi n° 2015-990 du
6 août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances
économiques, dite loi Macron, son article 211 durcit le régime du
cumul des mandats dans les sociétés anonymes cotées en instaurant un nouveau plafond global de trois mandats au lieu de cinq.
Nouveau plafond global dans les sociétés cotées dépassant un
certain effectif salarié. – Le plafond dit « global » du cumul des
mandats interdit à une même personne physique d’exercer simultanément plus de cinq mandats de directeur général, de membre
d’un directoire ou de directeur général unique, d’administrateur
ou de membre d’un conseil de surveillance de sociétés anonymes
ayant leur siège sur le territoire français (C. com., art. L. 225-94-1,
al. 1er). Dorénavant, ce plafond global est réduit à trois pour les
mandats « exécutifs » exercés dans des sociétés cotées dépassant
un plafond d’effectif salarié. Lorsqu’une personne exerce un
mandat de directeur général, directeur général unique ou
membre du directoire dans une société cotée dépassant un
plafond d’effectif salarié, cette personne ne peut pas exercer plus
de deux autres mandats, de quelque nature que ce soit (y compris
d’administrateur ou membre du conseil de surveillance), dans une
société cotée. La règle est formulée de la manière suivante : « Ce
nombre est réduit à trois pour les mandats sociaux exercés au sein
de sociétés dont les titres sont admis à la négociation sur un
marché réglementé par les personnes exerçant un mandat de
directeur général, de membre du directoire ou de directeur général unique dans une société dont les titres sont admis aux négociations sur un marché réglementé et qui emploie au moins cinq mille
salariés permanents dans la société et ses filiales, directes ou indirectes, dont le siège social est fixé sur le territoire français, ou au
moins dix mille salariés permanents dans la société et ses filiales,
directes ou indirectes, dont le siège social est fixé sur le territoire
français et à l’étranger ».
L’effectif salarié, apprécié au niveau de la société et de ses filiales,
directes ou indirectes, est fixé alternativement à 5 000 salariés sur
le territoire français ou 10 000 en France et à l’étranger. Ces seuils
sont ceux de la désignation obligatoire d’administrateurs représentant les salariés, introduits dans l’article L. 225-27-1 du Code de
commerce par la loi n° 2013-504 du 14 juin 2013 relative à la sécurisation de l’emploi. Il convient donc de se reporter à l’application
de cette disposition pour leur appréciation.
Dérogation applicable à l’administrateur assumant la direction
générale. – L’articulation de ce nouveau plafond avec la dérogation
prévue au profit de l’administrateur assumant la direction générale de la société pose question. En effet, l’alinéa 1er de l’article
L. 225-94-1 prévoit que « pour l’application de ces dispositions,
l’exercice de la direction générale par un administrateur est
décompté pour un seul mandat ». Or, cette précision, située juste
après l’énoncé du plafond global, précède dorénavant la règle
relative au plafond réduit, qui a été ajoutée à la fin du premier
alinéa. On peut donc se demander si le décompte pour un seul
mandat de l’exercice de la direction générale par un administrateur de la société ne vaut que pour le plafond de droit commun de