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N°22) LE MASQUE
Verbatim :
« La première fois qu’il m’a parlé de CLEARSTREAM, c’était en juin 2003, il était très
excité car il me disait bénéficier d’une pénétration informatique contrôlée par la
DGSE. Il me disait qu’il avait ses informations sur la Banque Julius Baer grâce à la
pénétration informatique sur la chambre de compensation CLEARSTREAM au
Luxembourg. Il disait tenir ces informations d’une source du Général RONDOT
totalement fiable et validée par RONDOT, et contrôlée par la DGSE » (audition de
Gérard Willing (D 2890).
« Il fondait également ses inquiétudes sur le fait que les oligarques russes
envisageaient de prendre très prochainement le contrôle du Groupe LAGARDÈRE
grâce à l’appui de l’un de ses anciens collaborateurs, Monsieur DELMAS et de
Monsieur Alain GOMEZ. J’ai ainsi acquis la conviction que Monsieur GERGORIN
était envoyé par la direction du Groupe EADS dont les intérêts paraissaient
gravement menacés » (audition de Monsieur Renaud Van Ruymbeke D 729/2),
confirmée par Jean-Louis GERGORIN : « J’indiquais également dès le début de
l’entretien que la raison immédiate de mon souhait de voir M. VAN RUYMBEKE était
la menace que me paraissait constituer le fonds HIGHFIELDS pour le groupe
LAGARDÈRE » (D1158/17).
Commentaires :
En juin 2003, la procédure le démontre, Monsieur GERGORIN ne peut invoquer une
source validée par le Général RONDOT, ce dernier n’ayant été saisi de l’affaire
CLEARSTREAM qu’en octobre de la même année.
Guère plus, ne peut-il sérieusement invoquer le contrôle qu’exercerait la DGSE sur
une opération de pénétration informatique dont elle n’a pas pris l’initiative et, mieux
encore, dont elle ignore l’existence.
En second lieu, quand il rencontre le Juge Van Ruymbeke, il est plus qu’évident que
Monsieur GERGORIN n’est pas le représentant des intérêts du Groupe EADS,
comme il le laisse croire au Juge d’instruction.
À travers ces deux exemples, on voit que Jean-Louis GERGORIN n’hésite jamais à
prendre un masque.
Pour convaincre Monsieur Willing de ses dires, il invoque l’autorité du Général
RONDOT et le contrôle de la DGSE.
Pour être plus assuré que sa démarche auprès du Juge Van Ruymbeke connaîtra
une suite, il met en avant un groupe qui, à l’échelle nationale et européenne, a un
poids énorme.
À chaque fois, il induit gravement en erreur ses interlocuteurs.
Problématique : L’instruction que l’on m’impute d’aller voir un juge, est-elle prouvée
au seul motif qu’une note du Général RONDOT en porte la trace ?
En premier lieu, le verbatim daté du jour où Jean-Louis GERGORIN indique au
Général RONDOT qu’il a saisi le juge Van Ruymbeke (du 4 mai 2004) est muet sur
cette prétendue instruction ; il en est de même du verbatim du 11 mai et surtout de
celui du 13 mai 2004 rapportant un entretien avec Imad LAHOUD, censé connaître à
cette date l’existence de ladite instruction.
Par ailleurs, le libellé même de la note du Général RONDOT démontre qu’il doute de
l’information que lui transmet Jean-Louis GERGORIN : « j’ai appris que, après avoir,
selon lui, reçu des instructions de Dominique de VILLEPIN, huit jours auparavant, il
avait été décidé de « parler au juge Renaud Van Ruymbeke » ».
La phrase précédente de cette note mentionne que Jean-Louis GERGORIN « a pris
un certain nombre d’initiatives », ce qui démontre aussi que dans l’esprit du Général
RONDOT, le premier a agi de son propre chef plutôt qu’en vertu d’un ordre.
Mais la question cruciale qui se pose en l’espèce, est celle de savoir si Jean-Louis
GERGORIN, ayant agi de son propre chef, peut l’avouer au Général RONDOT ?
La réponse est clairement négative.
L’on ne doit pas oublier que c’est Jean-Louis GERGORIN qui va saisir le Général
RONDOT de cette affaire de fichiers CLEARSTREAM, ce qui le conduira à
demander à son Ministre de le missionner pour des vérifications.
Si depuis l’automne 2003, le Général RONDOT consacre une partie de son temps à
cette mission, c’est du fait de l’initiative de Jean-Louis GERGORIN et de l’insistance
que met ce dernier à le convaincre de l’existence d’opérations financières suspectes.
On sait également que Jean-Louis GERGORIN déplore une certaine inaction du
Général RONDOT et qu’il lui reproche de ne pas faire intervenir la DGSE.
La réunion du 25 mars a laissé une mauvaise impression au Général RONDOT et, le
14 avril, il a clairement exprimé son scepticisme sur toute l’affaire.
L’impatience de Jean-Louis GERGORIN, sa déception à l’égard de l’enquête
RONDOT, l’état d’esprit de ce dernier, l’auront convaincu de trouver une autre
solution.
Il optera pour celle consistant à aller voir le juge Van Ruymbeke, cette idée lui ayant
déjà traversé l’esprit à deux reprises ainsi qu’il ressort de la procédure.
Mais la relation somme toute amicale qu’il entretient avec le Général RONDOT,
exclut qu’il le contourne ouvertement, c’est-à-dire en l’en prévenant.
Pour minimiser autant que possible et la déception et la colère du Général RONDOT,
il s’abrite donc derrière une autorisationjamais donnée.
Car il est bien évident que le Général RONDOT a moins à redire si Jean-Louis
GERGORIN n’a pas agi de sa propre initiative.
Mieux encore, à partir du moment où il dit avoir agi sur l’instruction d’un Ministre, il
n’a pas à redouter que Philippe MARLAND le convoque pour l’engueuler, comme ce
fut le cas après le 25 mars.
Par ailleurs, pour que le masque s’avère efficace, il importe que l’instruction présente
un caractère irréversible. Il ne faut donc pas soumettre au Général RONDOT les
autres éléments qui, ont véritablement décidé Jean-Louis GERGORIN à voir un juge.
C’est la raison pour laquelle Jean-Louis GERGORIN ne parle au Général des
soupçons qu’il nourrit à l’égard du fonds Highfields, ni surtout de sa frustration devant
son enquête minimaliste : « Début avril, j’étais donc préoccupé par la convergence
entre les informations provenant de la source sur les transferts financiers occultes
dont aurait bénéficié HIGHFIELDS et l’action officielle de contestation de
LAGARDÈRE que ce fonds spéculatif avait entreprise. Dans le même temps, j’avais
une frustration devant l’évolution des investigations conduites par le Général
RONDOT en raison de leur lenteur et du refus persistant d’utiliser les moyens
techniques qui auraient permis de confirmer ou d’infirmer rapidement les
informations de la source. » (D 1158/15) ou encore « Avec tout le respect que j’ai
pour le Général RONDOT, je tiens à rappeler que pour moi, en avril 2004, il n’avait
procédé qu’à des investigations extrêmement limitées et d’une efficacité
problématique. » (D 1158/21).
Conclusion :
Dans la note IPAC du 26 mai, l’on ne saurait donc voir la preuve de l’existence d’une
instruction dont je veux répéter solennellement que je ne l’ai pas donnée. Le Général
RONDOT, le premier, fut le mieux placé pour apprécier la facilité de Jean-Louis
GERGORIN à invoquer des protections qu’il n’a pas. À son Ministre, le 21 avril 2004,
il rapporte : « un incident, survenu le 23 mars 2004, ; est venu prouver que les deux
initiateurs de la démarche d’octobre 2003 m’avaient instrumentaliser, à mon insu,
pour couvrir leurs activités à travers un document stipulant que celle-ci, protégée par
le « secret de défense », avait la caution du Ministère de la Défense ».
Déjà le Général RONDOT avait constaté que Jean-Louis GERGORIN n’hésitait pas
à invoquer, abusivement, le paravent du « secret défense », et la couverture d’un
Ministère … !
Enfin, l’on se souviendra que Jean-Louis GERGORIN n’a pas hésité à prendre le
masque de la victime. En effet, il avait déposé une plainte pour faux, plainte qui visait
un rapport de la DST le désignant comme étant le corbeau…
Cette plainte témoigne de l’aplomb avec lequel Monsieur GERGORIN se montre
capable d’instrumentaliser tout le monde y compris la justice.
N°24) LA JOURNÉE DU 14 AVRIL 2004 DE JEAN-LOUIS GERGORIN
Problématique : A ce stade de l’instruction, le lien n’a pas été fait entre différents
évènements survenus le 14 avril 2004. Leur mise en rapport est pourtant riche
d’enseignements.
Les évènements du 14 avril :
Une « réunion de mise au point » réunit, le 14 avril à 9H00, outre le Général, JeanLouis GERGORIN et Imad Lahoud au Ministère de la Défense.
Sur cet entretien, le Général RONDOT s’est longuement expliqué. Il s’agissait pour
lui d’indiquer fermement à Jean-Louis GERGORIN et à Imad Lahoud qu’il ne croyait
pas au listing ( « Je leur ai dit clairement que cette affaire ne me semblait pas tenir la
route ». « Je suis ressorti de cette mise au point un peu mal à l’aise parce que je
n’étais pas plus avancé. Moi, j’étais sûr à ce moment-là que c’était une opération de
désinformation et mon interlocuteur continuait à m’assurer que je me trompais et
qu’on était dans le vrai »).
De cette réunion, Jean-Louis GERGORIN ne conserve pas le même souvenir. Il
explique que le Général RONDOT se trompait dans l’interprétation de certaines
transactions et qu’il s’est attaché à lui donner des explications techniques. JeanLouis GERGORIN ajoute qu’ « en tous les cas la réunion de mise au point du 14 avril
2004 n’a eu aucun impact sur la décision que j’avais prise de rencontrer Monsieur
Van Ruymbeke à la suite de « l’instruction du Président de la République » transmise
par Monsieur de VILLEPIN. J’avais, me semble t-il, déjà pris rendez-vous pour
l’après-midi de la même journée avec Maître de MONTBRIAL, et c’est lors de cette
deuxième rencontre du mois d’avril, avec Maître de MONTBRIAL, que je lui ai
demandé s’il était possible de rencontrer Monsieur Van Ruymbeke ».
Le deuxième événement de cette journée du 14 avril est effectivement ce rendezvous avec l’Avocat au cours duquel Jean-Louis GERGORIN lui demandera de
rencontrer le juge Van Ruymbeke. Ce rendez-vous s’est tenu à 17H30.
Le troisième événement est la remise de décoration par mes soins à Jean-Louis
GERGORIN à 19H00 au Ministère de l’Intérieur.
Observations :
A l’issue de la réunion du matin, et quelles que soient les divergences entre les
souvenirs de Jean-Louis GERGORIN et ceux du Général RONDOT, rien n’a été
décidé (« A l’issue de cette réunion, rien n’a été décidé. Je leur ai dit ce que je
pensais et ils sont repartis. »).
Jean-Louis GERGORIN, après ce rendez-vous, est cependant fondé à croire que le
Général RONDOT n’entend pas pousser plus loin ses vérifications, faute d’être
convaincu par les listings.
Il est d’autant plus fondé à le croire, que depuis qu’il l’a saisi, à l’automne 2003, il
déplore son immobilisme et essuie ses refus réitérés de saisir les services
techniques de la DGSE. Obsédé par la vérification des listings, archi-convaincu de
l’existence d’un réseau industrialo-mafieux de blanchiment, Jean-Louis GERGORIN,
le 14 avril, se trouve donc dans la situation d’avoir à rechercher une alternative à
l’enquête RONDOT.
Il décide donc à ce moment-là, de saisir le juge Van Ruymbeke.
Que le rendez-vous ait été fixé avec l’avocat avant le 14 avril n’infirme en rien ce qui
précède.
En effet, ce rendez-vous avait initialement un autre objet :
« Dans ce contexte, j’eus l’idée de faire étudier les moyens légaux dont pouvait
disposer EADS ou LAGARDÈRE pour obliger un fonds spéculatif qui aurait cherché
à mettre en cause le contrôle de LAGARDÈRE et donc directement celui d’EADS, à
révéler l’identité de ses actionnaires. Je décidai de poser la question à Thibault de
MONTBRIAL avec l’arrière pensée d’en profiter pour voir s’il y avait du nouveau dans
l’affaire des Frégates qui le passionnait beaucoup. J’eus un premier contact à son
cabinet autour du 10 avril 2004, me semble t-il, où je lui posai la question précise et
où nous eûmes également une discussion générale où il évoqua ses excellentes
relations avec le juge VAN RUYMBEKE. A la suite de ce premier entretien, et dans
un contexte marqué par mon inquiétude sur l’affaire HIGHFIELDS et par mon
sentiment que rien n’avancerait rapidement du côté du Général RONDOT, je décidai
de chercher à voir Renaud VAN RUYMBEKE par l’intermédiaire de Me de
MONTBRIAL. C’est la demande que je fis à ce dernier lors d’un second entretien,
suivant d’environ une semaine le premier et qui était destiné à me présenter les
premiers éléments de réponse à la question juridique que je lui avais posée. »
Conclusion : La décision de Jean-Louis GERGORIN de rencontrer le juge Van
Ruymbeke ne résulte nullement d’une instruction. Elle s’inscrit, fort logiquement,
dans les relations de Jean-louis GERGORIN avec le Général RONDOT.
Quand le second, déjà fort mécontent de ce qu’il a appris le 25 mars, se montre de
plus en plus sceptique sur le fond de l’affaire, il limite ses vérifications, et refuse toute
intervention de la DGSE, le premier, obsédé du complot, écartant toute objection à
ses convictions, décide, seul, dans ce contexte, d’aller voir un juge. Il placera en lui
des espoirs qu’il avait d’abord placés dans le Général RONDOT et la DGSE.
N°25) UN PARADOXE INSURMONTABLE
Problématique :
On me prête d’avoir donné à Jean-Louis GERGORIN l’instruction de saisir un juge.
Cette instruction que je nie fermement est-elle compatible avec l’attitude que j’ai eue
avec le Général RONDOT au mois de juillet 2004 ?
Rappel :
Le 12 juillet, je le convoque et le verrai le 19, pour la première fois depuis le 9 janvier.
Je l’informe que j’ai saisi la DST. Je souhaite qu’il la rencontre. Ce faisant, j’entends
que la DST prenne ainsi connaissance de tout ce que sait le Général.
À ce stade, il convient de revenir aux dires de Jean-Louis GERGORIN. Invité à
commenter la note du Général RONDOT du 26 mai 2004, il explique : « Quant à la
mention sur la sécurité de Madhy, elle reflète la réaction de Dominique de VILLEPIN
lorsque je l’avais informé de ma conversation du 4 mai avec le Général RONDOT.
J’avais demandé à Dominique de VILLEPIN, de quelle façon, dans le nouveau
contexte, le Général RONDOT devait poursuivre son enquête … ».
Etant soi-disant informé de la conversation de Jean-Louis GERGORIN et du Général
RONDOT du 4 mai, je suis censé savoir que le Général RONDOT n’ignore pas sa
démarche auprès d’un juge et possiblement même sait qu’elle se sera faite sur mon
ordre.
Dès lors, en invitant le Général RONDOT à aller voir la DST, je l’inciterai à dire à ce
service, avec un degré de certitude absolu, que Jean-Louis GERGORIN est le
corbeau et, peut-être, mieux encore, qu’il l’est devenu sur mon ordre…
C’est totalement illogique.
Conclusion :
Il n’est pas utile d’insister, si je ne vois aucun inconvénient à ce que le Général
RONDOT rencontre la DST, c’est que je n’ai rien à craindre de ce qu’il pourra lui
révéler. J’ignore à cette époque que GERGORIN est le corbeau. A fortiori, j’ignore
que le Général RONDOT le sait.
N°27) IL N’Y A PAS EU DE RENDEZ-VOUS AVEC JEAN-LOUIS GERGORIN
APRÈS LE 9 JANVIER
Problématique :
Jean-Louis GERGORIN, qui veut s’abriter derrière une instruction qu’il n’a jamais
reçue, souhaite établir une relation suivie avec moi. Sans être précis, et pour cause,
il avance que nous nous serions rencontrés une fois en février, une ou deux fois en
mars, une fois en avril, une fois en mai, une fois en juin et deux fois en juillet. Pour
les deux seules réunions qu’il date précisément, j’ai déjà démontré qu’elles n’avaient
pu avoir lieu. Selon Jean-Louis GERGORIN, dans le cadre de cette prétendue
relation, il aurait joué le rôle d’intermédiaire entre moi et le Général RONDOT. L’objet
de la présente note est de démontrer que c’est impossible.
1°) Si j’entends convoquer le Général RONDOT :
On le sait, ma relation avec le Général RONDOT est excellente. En témoignent les
courriers qu’il m’adresse aux mois de janvier et avril. Après la réunion du 9 janvier, il
appartient au Général RONDOT de revenir vers moi dans l’hypothèse où ses
vérifications aboutiraient à une conclusion significative quelle qu’elle soit. Quant à
Jean-Louis GERGORIN, je ne lui ai donné aucune mission le 9 janvier et je n’attends
donc aucun suivi ni compte-rendu de sa part.
Si le Général RONDOT a estimé qu’il était dans une position embarrassante vis-à-vis
de sa hiérarchie de la défense après la réunion du 9 janvier, il ne s’en est jamais
ouvert à moi alors même que notre relation l’y autorisait. Au contraire, après son
courrier du 12 janvier, je reste dans l’idée qu’il poursuit ses investigations et surtout,
que ce qui a été décidé le 9 janvier, ne lui pose aucune difficulté. Je n’ai jamais
convoqué le Général RONDOT après le 9 janvier, et ce, jusqu’au mois de juillet. En
effet, à cette époque, un article de presse est paru, et n’ayant eu aucune nouvelle de
sa part, je veux savoir où il en est dans cette affaire qui défraye la chronique.
Lorsque je veux convoquer le Général RONDOT, je le convoque. C’est vrai le 9
janvier. C’est encore vrai au mois de juillet. C’est toujours vrai quand je le verrai
avant son départ en Irak. En aucune de ces occasions, le fait que je le convoque, n’a
posé la moindre difficulté au Général RONDOT. Au demeurant, on trouvera la trace
de ces trois convocations dans les notes du Général RONDOT. En revanche, nulle
trace d’une convocation pour une réunion fin janvier ou début février ; et, de fait, le
Général RONDOT admet qu’il n’a pas été convoqué.
2°) Si j’avais convoqué le Général RONDOT et qu’il n’était pas venu :
Le récit de Jean-Louis GERGORIN implique que j’accepte que le Général RONDOT,
convoqué par moi-même, refuse de se rendre à ce rendez-vous sans m’en prévenir,
sans me donner une raison, et sans même s’en excuser. Dans le cadre de nos
relations, c’est parfaitement inconcevable.
Est-il utile de le préciser ? Si j’avais convoqué le Général RONDOT et qu’il n’était
pas venu, je n’aurai pas manqué de le contacter pour avoir avec lui une explication
directe.
La lecture attentive de la déposition de Jean-Louis GERGORIN montre qu’en réalité
il n’y a jamais eu de convocation. En effet, Jean-Louis GERGORIN, qui se dit motivé
par la tenue d’une réunion à trois, dit qu’il l’a suggéré tant à moi-même qu’au
Général RONDOT. On peut avancer qu’à partir du moment où le Général RONDOT
avait décidé, comme il l’explique, de s’en tenir à sa hiérarchie, il aurait
immédiatement fait savoir à Jean-Louis GERGORIN qu’il ne souhaitait pas se rendre
à une telle réunion. Dès lors, Jean-Louis GERGORIN est libre d’inventer une réunion
et de dire au Général RONDOT qu’il y fut attendu.
On attend pas quelqu’un qui a prévenu qu’il ne viendrait pas.
Comme à son habitude, Jean-Louis GERGORIN, désireux de faire pression sur ce
dernier, dont il n’obtient pas ce qu’il attend, invente une réunion qui n’a pas eu lieu et
vraisemblablement me prête des instructions destinées au Général RONDOT auquel
il les rapporte et que je n’ai, et pour cause, jamais données (comme par exemple de
faire intervenir la DGSE).
Conclusion :
En analysant les dépositions de Jean-Louis GERGORIN et du Général RONDOT, on
peut donc rétablir les faits tels qu’ils se sont vraisemblablement déroulés :
-
GERGORIN fait part au Général RONDOT de son souhait d’une nouvelle
réunion au Ministère des Affaires Etrangères.
-
Le Général RONDOT lui indique qu’il ne souhaite pas une telle réunion et qu’il
ne s’y rendrait pas.
-
GERGORIN, que je n’ai nullement convoqué, pour maintenir une pression sur
le Général, lui aura fait part d’une réunion me mettant en scène ainsi que le
Président de la République.
N°31) LA LOYAUTÉ DE MONSIEUR GERGORIN
Citations :
« D’autre part, moment très difficile, mais qu’en conscience je jugeais indispensable,
l’information du Général RONDOT le 4 mai sur l’action que j’avais entreprise à la
demande de Monsieur de VILLEPIN » (D 2732/25).
« J’ai décidé que la seule façon que j’avais de résoudre le conflit de loyauté évident
entre l’instruction spécifique de secret de Dominique de VILLEPIN et la relation de
confiance à laquelle je tenais par dessus tout avec le Général RONDOT était
d’informer le Général RONDOT le plus tôt possible après la transmission de la lettre
au juge Van Ruymbeke » (D 2751/4).
« J’ai fait part à Monsieur Imad Lahoud, avec qui j’avais une relation de grande
confiance, de ma décision de voir un juge et de sa mise à exécution soit juste avant,
soit juste après son voyage au Liban en compagnie du Général RONDOT. A mon
avis, plutôt après. A mon souvenir, ce voyage est intervenu du 26 au 30 avril 2004. »
« J’ai toujours eu pour principe, dans ma vie professionnelle, de ne pas cacher à
mes collaborateurs toute prise de risque pouvant résulter pour eux des décisions que
j’étais amené à prendre. » (D 2751/9)
« Je n’ai pas donné cette information avant tout, évidemment parce que j’avais reçu
une instruction formelle de garder le secret le plus absolu sur cette origine de ma
démarche et sur le contexte dans lequel celle-ci s’inscrivait. En deuxième lieu, je
tiens à le dire, je n’avais pas le sentiment de manquer en l’espèce de loyauté envers
Monsieur Van Ruymbeke puisque je lui avais indiqué le maximum d’éléments
possibles sur la source des renseignements que je lui donnais et le contexte de
renseignement dans lequel ces informations avaient été recueillies sans toutefois
nommer le Général RONDOT ». (D 2751/10)
« J’étais dans une situation pénible où, par loyauté envers lui, je devais lui rendre
compte de mes conversations avec Dominique de VILLEPIN tout en sentant combien
les informations que je lui donnais à ce sujet l’irritaient, compte tenu du respect total
de la hiérarchie du Général RONDOT, cette irritation devait avant tout se diriger
contre moi. » (D 2751/11)
Problématique :
Tout au long de ses auditions, Jean-Louis GERGORIN n’a de cesse d’affirmer, non
seulement sa bonne foi, mais également sa loyauté envers tous les autres acteurs
du dossier, le Général RONDOT, Imad Lahoud, le juge Van Ruymbeke, ou moimême.
Pourquoi ce besoin de souligner sa loyauté ? Parce que Jean-Louis GERGORIN
veut convaincre de tout et de son contraire. Ainsi, il doit expliquer et justifier
comment, étant soi-disant lié par le secret que je lui impose sur l’instruction donnée,
il s’en ouvre à Imad Lahoud et au Général RONDOT, n’ignorant pas que ce dernier
est censé rendre compte à sa hiérarchie.
En effet : « Je précise que Monsieur de VILLEPIN m’avait indiqué que cette
instruction était totalement secrète et il visait, je ne me souviens plus si c’était
explicite ou implicite, le Général RONDOT par cette précision. En clair, je ne devais
pas dire au Général RONDOT que Monsieur de VILLEPIN m’avait dit que sur
instruction du Président de la République, je devais saisir un juge ». (D 2732/23)
Observations :
Il faut croire que la loyauté a ses limites.
Le 14 avril au matin, Jean-Louis GERGORIN débat longuement avec le Général
RONDOT.
Le même jour, en fin d’après midi, il rencontre Thibault de MONTBRIAL à qui il
demandera de l’introduire auprès du juge Van Ruymbeke.
Bien entendu, au Général RONDOT il ne dit rien du processus qu’il mettra en œuvre
l’après-midi même … !
Mieux, Jean-Louis GERGORIN dit qu’il a démarré ce processus « après mûres
réflexions », ce qui laisse supposer l’écoulement d’un certain temps entre la
prétendue instruction et le 14 avril ; laps de temps qu’il ne mettra pas à profit, en
dépit de son désir d’être loyal à l’égard du Général, seul investi d’une mission, pour
le consulter … !
Il ne préviendra pas le Général RONDOT de l’envoi de la première lettre.
Il ne le préviendra guère plus de l’envoi de la seconde.
Déjà, en janvier 2004, Jean-Louis GERGORIN me saisit de cette affaire sans en
prévenir préalablement le Général RONDOT.
Par ailleurs, sa « relation de grande confiance » avec Imad Lahoud, dont Jean-Louis
GERGORIN se targue, ne le conduira guère plus à lui rapporter l’instruction
présidentielle soi-disant reçue, ni à le prévenir du dialogue entamé avec le juge Van
Ruymbeke !
Ni à lui demander s’il voit un inconvénient à ce que son nom, en tant que source, soit
cité !
La loyauté selon Jean-Louis GERGORIN consisterait donc à prévenir après plutôt
qu’avant…
Il est certain que c’est sans doute la meilleure manière de ne pas être empêché de
faire ce que l’on a décidé de faire, seul.
Pour être complet, il faut s’interroger sur la loyauté de Monsieur GERGORIN à
l’égard d’EADS.
A ce sujet, il indique : « de la même façon, à partir de fin mars, j’ai mentionné à
divers responsables du Groupe Lagardère mes inquiétudes quant à l’action du même
fonds d’investissement et sur la nécessité de se préparer juridiquement à obliger ce
fonds à identifier ses éventuels actionnaires cachés. Ces actions « de précaution »
que j’évoque n’impliquent en aucune façon un contact avec un juge d’instruction pour
lui transmettre des informations résultant des recherches d’Imad Lahoud sur le
réseau occulte CLEARSTREAM ».
Le fonds dont il est question est Highfields, actionnaire minoritaire du Groupe
Lagardère.
Le premier courrier adressé à Monsieur Van Ruymbeke se termine par ce
paragraphe conclusif : « Une manifestation particulièrement scandaleuse de ce
système est le transfert, le 17 octobre 2003, par Mikaïl Khodorkovski (à partir du
84601) de 150.000.000 de USD sur le compte 83656 de Alain GOMEZ. Ce dernier
transfert 250.000.000 € à un autre de ces comptes n°2.87032 City Trust Bogota. De
ce dernier, il vire le 24 octobre 2003 le même montant au profit du 03778 de Philippe
DELMAS. Celui-ci effectue le 11 novembre 2003 deux virements, 35.000.000 USD
au profit du 89492, compte détenu à CLEARSTREAM par le célèbre fonds américain
Carlyle via un trust (Pacific International Trust à Vanuatu) et 200.000.000 USD au
profit du compte 51179 détenu à CLEARSTREAM par la Boston Safe Deposit, mais
en fait au bénéfice du sous-compte détenu dans cette banque de Boston par le
Hedge-Fund Highfields Capital Limited établi à Grand Cayman. Il n’est donc pas
surprenant que le grand capitalisme américain se soit autant mobilisé pour Monsieur
Khodorkovski ! »
Jean-Louis GERGORIN a donc pris l’initiative de dénoncer à un juge la participation
à « un système de blanchiment », d’un actionnaire du groupe pour lequel il travaille.
Ce, bien entendu, puisque la loyauté l’y oblige, sans en avertir quiconque au sein du
Groupe Lagardère !
Conclusion :
Monsieur Jean-Louis GERGORIN, sur la bonne foi duquel je n’ai pas à me
prononcer, n’a pas eu à se montrer loyal envers qui que ce soit puisqu’il a toujours
agi de son propre chef sans prévenir personne.
N°33) INCOHÉRENCE ENCORE
Problématique :
Jean-Louis GERGORIN affirme « En clair, je ne devais pas dire au Général
RONDOT que Monsieur de VILLEPIN m’avait dit que sur instruction du Président de
la République, je devais saisir un juge ». (D 2732/23).
Quelques jours plus tard, évoquant un autre sujet, il explique : « Quant à la mention
sur la sécurité de Madhi, elle reflète la réaction de Dominique de VILLEPIN lorsque
je l’avais informé de ma conversation du 4 mai avec le Général RONDOT »
(entretien qui aurait eu lieu le 19 mai). (D 2751/14)
Ces déclarations sont-elles compatibles ?
Observations :
En quoi consistait l’entretien de Jean-Louis GERGORIN du 4 mai avec le Général
RONDOT ? : Le premier informe le second de la saisine d’un juge sur ma prétendue
instruction.
Ainsi, dès le 19 mai, j’aurais été informé par Jean-Louis GERGORIN lui-même qu’il
n’aurait pas respecté la consigne que je lui aurais transmise de conserver le secret
sur l’instruction de saisir un juge !
Mais ma confiance en Jean-Louis GERGORIN ayant été trahie, cela ne
m’empêcherait pas de le revoir par la suite à de nombreuses reprises ?!
Mieux, je continuerais à exiger un secret illusoire « Je me souviens que, comme à
chacune de nos réunions, il insistait sur le secret le plus absolu à observer » (à
propos d’une prétendue réunion au mois de juin 2004 (D 2732/29).
Conclusion :
Je n’ai pas rencontré Monsieur GERGORIN au mois de mai. Il ne m’a donc rien dit
de sa rencontre avec le juge Van Ruymbeke, ni a fortiori, qu’il en a parlé avec le
Général RONDOT, ce qui eut nécessairement signifié pour moi que ce dernier en
aurait informé sa hiérarchie.
34°) LA MENTION : « UN COMPTE COUPLE ( ?) N SARKOZY
Stéphane Boksa (op)
à préciser ».
Problématique :
Le Général RONDOT, à plusieurs reprises, a précisé que ce passage de sa note
faisait référence à des propos tenus par Jean-Louis GERGORIN. Ce dernier n’en
ayant pas conservé le souvenir forme une hypothèse au sujet de cette mention.
L’objet de la présente note est de démontrer qu’en l’absence de souvenirs, toute
hypothèse est un non sens.
L’hypothèse : « cette mention reste pour moi une interrogation comme je vous
l’avais déjà indiqué il y a un an. En effet, je n’ai aucun souvenir d’une discussion
portant sur ce point, qui aurait évidemment été centrale dans la discussion, ce qui
n’apparaît pas dans la note du Général RONDOT ni dans mes souvenirs. En sens
inverse, je constate que les notes du Général RONDOT et mes propres souvenirs
coïncident très souvent. Je fais donc l’hypothèse suivante : à la veille de cette
réunion du 9 janvier 2004, j’ai dû faire un point avec Imad LAHOUD et comme
souvent, il a dû mentionner toute une série d’informations ou de rumeurs qu’il disait
tenir de sa source humaine au sein du service informatique de CLEARSTREAM et il
m’a peut être mentionné un compte couple Boksa-Sarkozy, sous forme de vagues
rumeurs et j’aurais donné cette indication à la réunion en disant que c’était élément
récent, purement verbal et donc non étayé et qu’il aurait été indiqué par Dominique
de VILLEPIN qu’il fallait le vérifier. C’est une reconstitution logique donc je n’ai aucun
souvenir, alors que je me souviens de façon précise de l’apparition au mois de mars
2004 entre les mains d’Imad LAHOUD d’une liste de comptes concernant M
Stéphane Boksa, Paul de Nagy, et d’autres comptes supposés liés et qu’au moment
de cette information donnée par Imad LAHOUD au mois de mars, cela ne m’a
rappelé en aucune façon un souvenir antérieur » (D 2732/11).
Commentaires :
Il faudra demander à Monsieur GERGORIN pourquoi, d’après lui, si la question d’un
compte couplé Nicolas SARKOZY/Stéphane BOKSA avait été abordée, elle eût été
un point « central dans la discussion ».
Jean-Louis GERGORIN avance que la veille (pourquoi la veille ?), Imad LAHOUD a
dû lui faire part d’une rumeur. Puis il ajoute, hypothèse sur hypothèse, qu’il a dû dire
qu’il s’agissait d’un « élément récent, purement verbal et donc non étayé ». S’il a tout
oublié de cette rumeur, il tombe sous le sens qu’il ne peut se souvenir ni de la
manière dont il l’a rapportée, ni des précisions qu’il aurait données.
Pourquoi, enfin, suggère t-il, toujours sur la foi de son hypothèse, « qu’il aurait été
indiqué par Dominique de VILLEPIN qu’il fallait le vérifier », alors même que le
Général RONDOT, très clair sur cette mention, indique que les termes « à préciser
signifient que, n’ayant pas saisi qui était Boksa, il entendait éclairer cette
question ? ».
De manière générale, peut-on croire à « une reconstitution logique », aussi précise,
mais qui ne ferait appel à aucun souvenir ?
Tout lecteur du dossier le croira d’autant moins qu’à maintes reprises Monsieur JeanLouis GERGORIN, très prolixe, fait preuve d’une mémoire impressionnante.
Enfin, et c’est capital, quelle que soit la manière dont Jean-Louis GERGORIN a été
alerté sur ce compte couplé, cela n’a pu que le marquer, s’agissant d’une information
importante.
Il n’y a par conséquent aucune place pour une simple hypothèse. Ne peuvent exister
que des souvenirs.
Conclusion :
Pourquoi une hypothèse plutôt que des souvenirs ?
Pour éviter que l’on puisse instruire efficacement non pas seulement sur la mention
figurant sur la note du Général mais plus largement sur l’apparition, avant que je ne
sois saisi, de ce compte couplé.
On peut interroger une personne sur ses souvenirs, pas sur une hypothèse.
Indéniablement, Jean-Louis GERGORIN ne tient pas à dire ce qu’il a su de ce
compte couplé avant le 9 janvier 2004.
36°) A PROPOS DE LA MORT DE JEAN-LOUIS LAGARDERE
Jean-Louis Gergorin était convaincu que Jean-Luc Lagardère avait été assassiné par
la mafia russe. Cette conviction, bien que totalement négligée dans l’instruction sur
l’affaire Clearstream, est en fait une dimension importante de l’affaire.
Jean-Luc Lagardère exerçait une véritable fascination sur Jean-Louis Gergorin et le
lien entre les deux hommes confortait la position de ce dernier au sein de EADS.
C’est Jean-Luc Lagardère qui avait recruté Jean-Louis Gergorin au sortir du Centre
d’Analyse et de Prévision du Quai d’Orsay. C’était un homme de vision et
d’anticipation qui aimait à comprendre les grands enjeux de géopolitique où JeanLouis Gergorin excellait. C’est dire qu’à sa mort, le 14 mars 2003, Jean-Louis
Gergorin a pu se sentir orphelin, voire menacé au sein de son Groupe.
Mon amitié avec Jean-Luc Lagardère était une amitié ancienne, d’autant plus forte
que les relations entre Jacques Chirac et lui-même avaient connu des moments
difficiles, qui m’avaient conduit fréquemment à jouer un rôle de médiateur.
Le 7 mars 2003, quelques heures avant qu’il ne tombe dans le coma, je l’ai appelé
depuis New York après avoir pris la parole au Conseil de Sécurité des Nations Unies
pour m’opposer, une nouvelle fois, à la guerre en Irak. Jean-Luc Lagardère dînait, ce
soir-là, chez Emanuel Ungaro avec sa femme Bethy et mon épouse, Marie-Laure.
Tout au long des mois qui ont suivi son décès, j’ai été très proche de Bethy
Lagardère, confrontée au chagrin et aux innombrables problèmes familiaux et
matériels de la succession de Jean-Luc Lagardère.
A plusieurs reprises, Jean-Louis Gergorin, qui connaissait ma proximité avec JeanLuc Lagardère, a voulu me contacter pour me fournir des éléments sur cette mort
qu’il considérait comme suspecte. A l’automne 2003, sa conviction d’un assassinat
se fit d’autant plus forte qu’un grand professeur de médecine sollicité pour une
expertise par le Groupe Lagardère, avait conclu, en première analyse, avec une très
forte probabilité, à un assassinat. Le contact avec ce professeur de médecine avait
été pris par l’intermédiaire de Maître Lombard. Pourtant le rapport final remis au
Parquet conclut à une mort naturelle. L’enquête préliminaire lancée le 18 mars 2003
par le Parquet de Paris aboutit donc à un classement sans suite.
On peut estimer sans risquer de se tromper que les péripéties liés à l’enquête sur la
mort de Jean-Luc Lagardère n’ont fait que renforcer la conviction de Jean-Louis
Gergorin d’un grand complot international lié à Clearstream, aux rivalités anciennes
Thomson/Lagardère et à l’affaire des frégates de Taiwan.
38°) Y A-T-IL EU DEFAILLANCE DE LA DIRECTION DE EADS
QUI POURRAIT EXPLIQUER LE DEVELOPPEMENT
DE L’AFFAIRE CLEARSTREAM ?
L’affaire Clearstream est au croisement de plusieurs facteurs liés à EADS : les
rivalités personnelles pour la présidence de la Société ; les rivalités industrielles au
sein du monde de l’aéronautique et de l’armement ; la mort de Jean-Luc Lagardère.
On doit se demander si cette affaire aurait pu se développer avec un management
soucieux de mieux contrôler les activités des différents responsables, en particulier
les choses se seraient-elles passées ainsi du vivant de Jean-Luc Lagardère.
L’opération « couper les ailes à l’oiseau », comme je l’ai indiqué, est la première
manche d’une rivalité ancienne et les obsessions de Jean-Louis Gergorin étaient
bien connues de la direction du Groupe. Chacun avait pu être témoin, à l’occasion de
divers conseils d’administration, de ses engagements et prises de position. Faut-il
donc penser qu’il y a eu au minimum du laxisme ou peut-on imaginer que de hauts
responsables de l’entreprise ont pu rapidement être informés de menées qu’ils
auraient pu arrêter ? Seul un examen attentif des comptes des différentes branches
ainsi que des relations au sein de la haute hiérarchie de EADS pourrait permettre de
répondre à cette question.
Je dois pour ma part souligner que l’entretien que j’ai eu avec Arnaud Lagardère à
l’automne 2004 a été plus explicite que le laisse penser l’audition d’Arnaud
Lagardère. En effet, j’ai clairement indiqué à cette occasion les soupçons qui
pesaient sur Jean-Louis Gergorin. Le président de EADS m’a confié qu’il était
conscient de la situation, comme des conséquences possibles des rivalités internes
sur l’avenir de l’entreprise. Il a même évoqué une mission de longue durée qu’il
pensait donner à l’intéressé en Chine. Il est vrai qu’à aucun moment je n’ai fait
référence à la mission de la DST, car j’estimais, dans ma responsabilité de Ministre
de l’Intérieur, n’avoir à donner aucune indication de source, d’autant moins que la
DST ne disposait, selon ses dires mêmes, d’aucun élément concret et probant.
N°40) LE TRAITEMENT DE L’AFFAIRE CLEARSTREAM AU PLAN
GOUVERNEMENTAL A PARTIR DE JUILLET 2004
Quand j’apprends au début juillet 2004 que la presse va rendre publique des
« révélations » mettant en cause de nombreuses personnalités, dont des membres
du Ministère de l’Intérieur, j’informe aussitôt le Premier ministre, Jean-Pierre Raffarin,
et le Président de la République, Jacques Chirac. Je leur précise que j’ai demandé
au directeur de la DST, Pierre de Bousquet de Florian, de me faire le point du
dossier. Compte tenu du fait qu’un membre de la famille de Nicolas Sarkozy serait
cité, je propose au Président de la République de l’en informer personnellement,
mais celui-ci me fait valoir qu’il appartient au Garde des Sceaux, Dominique Perben,
de le faire.
A la suite des publications de presse, j’ai confirmé au Président de la République et
au Premier ministre la nécessité d’un travail de vérification des services pour que les
agents concernés puissent être rapidement dédouanés. J’ai donc demandé pour ma
part à la DST une mission de vérification et d’évaluation. La question s’est posée
d’une éventuelle enquête de nature judiciaire à confier à la DST, mais cette
possibilité a été écartée ; il paraissait en effet difficile de demander à un service
d’enquêter sur lui-même.
Dans ce contexte, il y avait d’un côté, un travail administratif confié aux services et
de l’autre, un suivi judiciaire multiforme ; le juge Van Ruymbeke avait été saisi des
listings dès le mois de mai et enverra des commissions rogatoires au mois d’août ; le
Parquet de Paris avait adressé une demande d’entraide internationale au
Luxembourg dès le 13 juillet ; et enfin, le juge d’Huy avait été saisi du chef de
dénonciation calomnieuse au mois de septembre. Dès la mi-octobre, j’ai demandé au
directeur de la DST de prendre contact avec Monsieur Yves Bot, Procureur de Paris
pour porter à sa connaissance les éléments dont il disposait. Durant toute cette
période, j’ai tenu informé le Premier ministre, dans le cadre de nos rendez-vous
mensuels, et le Président de la République, dans le cadre de nos rendez-vous
hebdomadaires, des éléments fournis par la DST. Je rappelle qu’au mois de
décembre, la DST a indiqué qu’elle ne disposait sur le fond de l’affaire d’aucun
élément concret et probant et qu’elle m’avait recommandé, la justice étant saisie,
d’attendre ses conclusions. Tant le Premier ministre que le Président de la
République se sont ralliés à cette position.
Tout au long du deuxième semestre 2004, le gouvernement à travers ses différentes
composantes n’a cessé de se poser la question de la meilleure réponse possible
dans cette affaire. Le Garde des Sceaux, informé par le Parquet de l’évolution du
travail du juge Van Ruymbeke, estimait qu’il fallait laisser la justice faire son travail,
d’autant que rien n’indiquait que la détention de comptes au Luxembourg dans une
éventuelle chambre de compensation puisse être frauduleuse. De son côté, le
Conseiller technique pour la justice du Président de la République, Laurent Le Mesle,
estimait qu’il n’y avait pas d’urgence à prendre des initiatives compte tenu du
lancement des procédures judiciaires. L’évaluation sur le fond mettait en avant des
éléments à la fois vrais et faux, sans que, techniquement, nous disposions
d’éléments précis pouvant expliquer un montage. Selon certaines sources bancaires
françaises, il pouvait y avoir en effet des éléments vrais mêlés à des informations
erronées, telles que les dates de clôture de comptes. Selon Laurent Le Mesle, la
demande d’entraide judiciaire internationale adressée par le Procureur de la
République à son homologue luxembourgeois était la bonne réponse. Il était, selon
lui, difficile d’envisager des vérifications intérieures approfondies sans que l’on
puisse suspecter un délit, qu’il s’agisse de fraude fiscale ou de blanchiment. En
l’absence de constitution de partie civile pour dénonciation calomnieuse ou usage de
faux par la plupart des personnes mises en cause, il estimait difficile d’envisager
d’aller plus loin.
Fin août/début septembre 2004, le Procureur de la République a indiqué à l’Elysée
qu’il était prêt à ouvrir une enquête sur l’éventuelle origine frauduleuse des CD-Rom,
mais cela supposait l’accord du Garde des Sceaux et que l’on puisse s’appuyer sur
la déposition d’une plainte pour dénonciation calomnieuse. Les listings n’ayant pas
été publiés, il pouvait apparaître difficile à nombre de victimes de se constituer partie
civile. Le 3 septembre 2004, la plainte déposée par Philippe Delmas permit au bout
du compte l’ouverture d’une information judiciaire pour dénonciation calomnieuse
confiée au juge d’Huy. Mais ce n’est qu’en 2006 que Nicolas Sarkozy ainsi que les
principales personnalités politiques de droite et de gauche se constitueront parties
civiles.
Au mois d’octobre 2004, lors de ma rencontre avec Nicolas Sarkozy en présence de
Pierre de Bousquet de Florian, le Ministre d’Etat, ministre de l’Economie et des
finances, a souhaité que soit rendu publique le prétendu rapport d’enquête de la DST
et demandé, comme il l’avait fait auprès de Dominique Perben, qu’on aille au-delà de
l’ouverture d’une information judiciaire. Je lui ai indiqué qu’il n’y avait pas de rapport
d’enquête de la DST et que nous souhaitions travailler en pleine transparence. Nous
allions donc transmettre au Procureur de Paris les informations disponibles, mais les
choses seraient facilitées s’il acceptait de se constituer dès maintenant partie civile.
Compte tenu de la pression exercée par Nicolas Sarkozy, convaincu qu’à l’origine de
cette affaire il y avait Jacques Chirac et moi-même, j’étais soucieux d’adopter une
ligne de conduite irréprochable tant pour le Ministère de l’Intérieur que pour le
Gouvernement et la Présidence de la République. D’où le choix d’une réponse
administrative et judiciaire combinée qui me paraissait être la meilleure réponse
possible.
N°41) SUR LA SAISINE DE LA DST
Problématique : Pour quelles raisons et dans quelles conditions ai-je
saisi la DST ?
* *
*
Le 8 juillet 2004 paraissait dans LE POINT, un article révélant l’envoi au juge VAN
RUYMBEKE de lettres anonymes mettant en cause des personnalités politiques, du
monde des affaires et de divers personnages mêlés à des trafics d’armes.
Tous dénoncés comme ayant ouvert des comptes secrets douteux au Luxembourg.
L’article évoque « un vaste système de blanchiment présumé qui passe par la
« banque des banques », CLEARSTREAM… ».
Selon LE POINT, parmi les personnalités anonymement visées se trouvaient : « deux
anciens ministre socialistes, un de la droite libérale, un ex-patron de la DST, un
Préfet, un ex-flic des renseignements généraux, le fils d’un ancien ministre de
l’intérieur, le père d’un membre du Gouvernement, un essayiste-homme d’affaires en
vue… ».
Dès que j’ai eu vent de cet article, seulement quelques jours avant sa parution, j’ai
brièvement évoqué le sujet avec Monsieur Pierre de BOUSQUET, Directeur de la
DST, en lui demandant de m’éclairer sur cette affaire.
J’en ai tenu informé Monsieur Jean-Pierre RAFFARIN, Premier Ministre du
Gouvernement, au sein duquel j’exerçais alors les fonctions de Ministre de l’Intérieur,
ainsi que Monsieur Jacques CHIRAC, Président de la République.
Les 7 et 8 juillet 2004, connaissance prise du détail de l’article, j’ai revu Monsieur
Jean-Pierre RAFFARIN qui, suivant mes recommandations, m’a donné son accord
pour saisir la DST, service qui a précisément pour mission de veiller à la sécurité
économique de notre pays et de parer aux risques de déstabilisation de nos intérêts.
Le Premier Ministre souhaitait que soit vérifiée la véracité des informations
contenues dans l’article du POINT.
Lors de mes entretiens avec Jean-Pierre RAFFARIN, il nous est également paru
probable que le « père du membre du Gouvernement » évoqué par le journal LE
POINT, était le père de Nicolas SARKOZY.
Jean-Pierre RAFFARIN m’a alors dit qu’il se chargerait d’en informer Nicolas
SARKOZY.
C’est dans ce contexte que j’ai confirmé à la DST, service placé sous mon autorité,
de mener les investigations qui s’imposaient afin de vérifier la crédibilité des
informations évoquées dans l’article du POINT.
Il s’agissait pour la DST de recueillir tous éléments utiles sur cette affaire, ses
fondements éventuelles et son origine (rivalités industrielles, rivalités de services,
existence d’un ou plusieurs corbeaux, etc).
Monsieur Pierre de BOUSQUET m’a rendu compte des éléments recueillis par la
DST : j’en ai tenu informé le Premier Ministre et le Président de la République.
CONCLUSION :
La saisine de la DST s’est opérée en toute transparence gouvernementale.
Compte tenu des informations du POINT, elle s’imposait d’évidence, ce dont est
immédiatement convenu le Premier Ministre, Jean-Pierre RAFFARIN et le Président
de la République.
N°42) NICOLAS SARKOZY, UNE PARTIE CIVILE PAS COMME LES AUTRES
Depuis juillet 2004, date à laquelle l’affaire Clearstream a été révélée
médiatiquement, et bien avant donc que Nicolas Sarkozy se constitue partie civile
(début 2006), le dossier n’a cessé d’être « impressionné » par le rôle prépondérant
de l’intéressé.
En effet, dès le mois de juillet, Nicolas Sarkozy et son entourage ont clairement
rendu responsables Jacques Chirac et moi-même d’une affaire, pour eux
d’inspiration politique. Alors même qu’aucune campagne de diffamation ne fut jamais
orchestrée contre celui qui était alors Ministre d’Etat, Ministre de l’Economie et des
finances, s’est installé progressivement à travers les médias un triple sentiment : il
s’agissait d’une affaire de rivalité politique ; Nicolas Sarkozy en était la cible ;
l’opération était dirigée par la « chiraquie » pour empêcher ce dernier d’accéder à la
Présidence de l’UMP, voire d’être candidat à l’élection présidentielle.
La lecture de l’affaire tout au long des mois qui suivirent fut profondément marquée
par cette inflexion initiale au point que les grandes étapes de cette affaire furent
toutes appréciées à l’aune de ce prisme déformant, avec à l’appui un choix sélectif
de violations du secret de l’instruction :
-
-
-
-
Le premier épisode fut celui du prétendu rapport de la DST. On a voulu voir là
la preuve d’une manipulation visant à salir Nicolas Sarkozy ou à tout le moins
à refuser de l’innocenter, alors même que la DST n’avait été saisie que d’une
vérification administrative, du fait même qu’il lui était difficile d’enquêter sur
elle-même. Cet incident contribua à ancrer l’idée que j’avais voulu nuire à
Nicolas Sarkozy, comme Ministre de l’Intérieur, de même qu’on voulait croire
que je l’avais fait comme Ministre des Affaires étrangères à travers la mission
Rondot.
Le deuxième épisode fut celui des carnets Rondot qui, compte tenu du
nombre et de la diversité des écrits, permettaient là encore de diriger le tir
vers Jacques Chirac et moi-même. C’est ainsi qu’on ne retint dans les notes
diverses que ce qui paraissait alimenter la thèse politique sans en prendre
toute la mesure et en oubliant au passage que ce qui me concernait n’était
que marginal, alors que l’essentiel de ces écrits concernait la mission qui lui
avait été confiée par le Ministère de la Défense.
Le troisième épisode fut celui des notes Ipac qui auraient été originellement
effacées de l’ordinateur du général Rondot puis retrouvées. Là encore on a
voulu voir la confirmation d’une manipulation, alors que ces notes ne faisaient,
pour l’essentiel, que reprendre les déclarations de Monsieur Gergorin luimême. On fut là aveuglé par une fausse concordance de vue qui ne traduisait
en fait qu’un effet miroir, le général Rondot se contentant de noter les
indications qui lui étaient données par Jean-Louis Gergorin.
Le quatrième épisode fut celui du revirement de Jean-Louis Gergorin
s’appuyant sur une pseudo instruction présidentielle pour expliquer la saisine
du juge Van Ruymbeke. On a voulu voir là une intervention justifiée par des
arrières-pensées politiques en négligeant le fait qu’elle n’était ni possible ni
réalisable et que la décision de Jean-Louis Gergorin avait été manifestement
prise en dehors de toute implication extérieure.
-
Le cinquième épisode est constitué aujourd’hui par les interventions que
j’aurai effectuées en faveur de Monsieur Lahoud et de sa famille, dont il n’est
pas difficile de vérifier qu’elles n’ont jamais existé.
Ces accusations répétées montrent bien que la thèse politique s’est non seulement
imposée pour une part dans l’opinion à force de martelage et de répétition, mais a
été intégrée aussi par les acteurs du dossier eux-mêmes qui ont compris que cette
thèse les dédouanait de toute responsabilité en renvoyant à des échelons politiques
plus élevés la charge de la faute. C’est la logique bien connue du défaussage et du
bouc émissaire. Autant on pourrait y accorder quelques crédits dans une logique
administrative ou militaire, autant dans la logique d’un dossier industriel tout cela ne
repose sur aucun fondement.
A cette « impression » du dossier de l’intérieur s’ajoute une impression dans le
déroulement même de l’instruction :
-
-
Il ne m’appartient pas d’apporter un jugement sur l’instruction judiciaire
proprement dite, mais à l’évidence l’interférence médiatique à l’automne 2004
est prouvée par l’évolution du dossier elle-même. Le questionnement même
montre bien par ailleurs que la cible politique est largement privilégiée sur
toute autre option.
Plus grave sans doute, l’environnement général de l’instruction m’apparaît
profondément marqué par l’orientation politique choisie. Comment le Parquet,
la Chancellerie ou encore la Police judiciaire pourraient-ils faire abstraction de
ce choix initial et constamment répété surtout quand le Président de la
République, qui est en même temps partie civile, intervient lui-même pour
accréditer cette thèse ? On me dira que l’affaire n’est pas nouvelle puisque tel
était le cas lorsque Nicolas Sarkozy était Ministre d’Etat, Ministre de l’Intérieur.
Ce qui était inacceptable hier, l’est encore plus aujourd’hui dans un Etat de
droit, quand on sait que le Président de la République est aussi Président du
Conseil Supérieur de la Magistrature et peut, à ce titre, donner à tout moment
les instructions qu’il souhaite au Parquet via le Garde des Sceaux qui s’est
revendiqué « Chefs des Procureurs ». S’il n’y a pas une incompatibilité de
fond entre être partie civile et exercer une autre responsabilité publique,
ministérielle ou présidentielle, encore faut-il qu’à chaque étape, il soit fait
preuve de prudence, de vigilance et surtout d’éthique pour ne pas peser sur le
cours de la justice !
o La dernière intervention du Président de la République au 20 heures de
TF1 et de France 2 me paraît de ce point de vue bien illustrer le risque
d’une confusion des genres loin de la sérénité nécessaire à l’instruction
d’un tel dossier.
o A la pression directe s’ajoute l’influence auprès des médias dont
témoigne la longue sortie faite par Nicolas Sarkozy à l’Elysée, en
apparté, pour justifier ses déclarations précédentes, et me mettre
davantage encore en cause. Plusieurs journalistes ou membres des
chaînes de télévision m’ont rapporté la virulence des propos tenus.
Dans le magazine Challenges du 27 septembre, Airy Routier et Patrick
Fauconnier évoquent ses propos, parlant d’un dossier « accablant »
pour moi, condamné à m’agiter tel « une guêpe furieuse prise dans une
bouteille de pastis ». Dans Le nouvel Observateur du 27 septembre,
-
-
Nicolas Sarkozy développe son argumentation en revendiquant ma
mise à l’écart (« Je n’ai pas de haine, mais je veux que lui et tous ceux
qui lui ressemblent débarrassent le plancher ») et dénonçant la
décoration que j’ai remise à Jean-Louis Gergorin : « il l’a décoré luimême dans son bureau. Moi, le seul que j’ai décoré dans mon bureau,
c’est Martin Bouygues, parce que c’est mon meilleur ami ». Nicolas
Sarkozy feint d’oublier les circonstances particulières de cette
décoration qui devait être remise successivement par Jean-Luc
Lagardère, décédé, et Alain Richard, empêché. De surcroît, les
relations entre Nicolas Sarkozy et Martin Bouygues, qui s’appellent
tous les jours, ne sont en rien comparables à celles que j’avais avec
Jean-Louis Gergorin, avec lequel j’ai pour seul lien d’avoir été membre
du Centre d’Analyse et de prévision en même temps que lui, comme le
général Rondot ou… Philippe Delmas. Le petit nombre des invités moins d’une dizaine, dont Arnaud Lagardère - justifiait par ailleurs
qu’un salon ne soit pas requis. Je ne crois pas que quiconque puisse
avoir à me le reprocher.
Les choses se compliquent encore davantage quand à l’interventionnisme
médiatique s’ajoute un interventionnisme politique. Si je comprends, sans me
l’expliquer, qu’on puisse me fixer un contrôle judiciaire m’interdisant de
rencontrer l’ancien Président de la République, Jacques Chirac ou mon
ancien collaborateur, Bruno Le Maire, devenu député UMP de l’Eure, je
m’interroge sur le bien-fondé d’une telle mesure, quand Nicolas Sarkozy peut
très tranquillement s’inviter dans les bureaux de Jacques Chirac et évoquer
avec lui l’affaire Clearstream ou encore convoquer Bruno Le Maire pour
l’entretenir longuement de cette affaire.
Il me revient par ailleurs que, devant certains de ces interlocuteurs, le
Président de la République a évoqué précisément de nouveaux éléments qui
pourraient venir me mettre en cause, se référant en particulier à des
documents informatiques qui concerneraient ses proches, comme Brice
Hortefeux. J’ignore ce que sont ces éléments, dont je ne trouve aucune trace
au dossier. Je ne peux donc qu’être surpris de la connaissance que semble
en avoir Nicolas Sarkozy. Si le Président de la République, s’appuyant sur des
éléments hors procédure présentés à charge, désigne lui-même le coupable,
quelle sérénité est-on en droit d’attendre de la Justice ? Je m’empresse de
préciser à cet égard que ma sérénité est entière. On peut, dans un Etat de
droit, désigner un faux coupable, mais on ne peut transformer un innocent en
coupable. J’ai répondu jusqu’à ce jour à l’ensemble des attaques dont j’ai été
victime et je continuerai de le faire puisque, je le répète, je n’ai aucune
responsabilité dans une quelconque dénonciation calomnieuse.
Pourtant, pendant le même temps, je constate qu’on s’éloigne de la vérité du
dossier : qui a falsifié les listings et pour quels motifs ?
Combien de nouvelles attaques devrai-je supporter avant que chacun puisse se
rendre à l’évidence qu’il y a, au cœur de ce dossier, une « impression » vive et une
instrumentalisation inacceptable ? Quand on désigne du doigt un faux coupable et
qu’on se désigne soi-même comme une victime politique, on enclenche, dans un
pays comme le nôtre, une véritable chasse à l’homme où tous les moyens sont bons,
rumeurs, délation, calomnie, désinformation… Comme le souhaite le Président de la
République, j’entends bien m’expliquer auprès de la justice sur l’ensemble des points
qui me concerne, mais je n’entends pas être le seul. La justice en France doit être
égale pour tous. Et comme le dit très bien Nicolas Sarkozy, un citoyen quel qu’il soit,
ne doit être « ni au-dessus ni au-dessous des lois ». Cela est vrai bien sûr pour lui
même s’il utilise en l’occurrence cet argument à mauvais escient puisqu’il n’a jamais
été « sali » ni à eu à s’expliquer devant un juge. Mais c’est d’autant plus vrai pour
moi qui fait l’objet d’accusations injustes depuis maintenant trois ans.
N°43) SUR LES VERIFICATIONS DE LA DST
Problématique : Quels sont les éléments d’information recueillis par la
DST ?
A quelle conclusion est-elle parvenue ?
Dans quelles conditions en ai-je été informé et quelle
Initiative ai-je alors prise ?
* *
*
Conformément à mes instructions et en accord avec le Premier Ministre, la DST va
partir de l’article du POINT.
En témoignent les deux notes internes des 9 et 13 juillet 2004 (D.137 et D.138 du
dossier).
La note du 9 juillet analyse l’article du POINT qu’elle résume.
Celle du 13 juillet fait état des premiers éléments recueillis auprès d’une « source » :
« Selon la source, les magistrats seraient persuadés que les courriers ont été
envoyés par un seul et même corbeau. Les envois au juge se détailleraient comme
suit. Une première lettre puis un cd rom ou une autre lettre contenant un listing de
895 comptes, comptes fermés chez Clearstream après le passage du Ministère
Public Luxembourgeois. Selon la source, les noms de GOMEZ, FALCONE,
GAYDAMAK, MADELIN, du père de Nicolas SARKOZY, du fils PASQUA, MINC,
ENIN, MARCHIANI, PARENT (op), DELMAS, figuraient entre autres dans ces
listings ».
Cette note se conclut ainsi :
« Sur l’origine du document la source évoque le nom de Denis ROBERT, le
journaliste auteur d’un livre sur la structure Clearstream qui serait resté en contact
avec les anciens employés de Clearstream. Ernest BACKES, l’ancien cadre de la
banque luxembourgeoise et coauteur du livre retient également l’attention des
journalistes du POINT. Des listings anciens sortis par l’intéressé de la structure
bancaire auraient pu être récupérés voire manipulés par le ou les corbeaux ».
* *
*
Le 19 juillet, je tiens informé le Général RONDOT de l’intervention de la DST.
2
Le 21 juillet, Monsieur Pierre de BOUSQUET adresse une note à mon Directeur de
Cabinet.
Monsieur de BOUSQUET y relate son entretien avec son supérieur hiérarchique,
Monsieur MARTINI, dont le nom apparaît sur les listings.
Monsieur MARTINI nie ni toutes implications dans cette affaire.
Il y voit une « intention de lui nuire », un « montage ».
La note de la DST indique que Monsieur MARTINI « hasarde (avec beaucoup de
précautions), que Jean-Louis GERGORIN, Vice-Président d’EADS, pourrait en être
l’initiateur. En effet, parmi les personnalités citées mais non précédemment connues
comme affairistes ou politiques, il note que plusieurs ont en commun d’être opposés
à Jean-Louis Gergorin ou de lui avoir à un moment déplu.On pourrait expliquer ainsi
la présence sur la liste de MM. Gomez, Delmas, Martinez, Joulin, voire du Préfet
Parant (directeur du service au moment de l’affaire Gomez/William Lee/Matra) et de
Jean Jacques Martini lui-même, sèchement mis en cause l’an passé par Gergorin
pour avoir laissé passer son nom lors de la levée du secret défense sur des notes de
la DST pouvant impliquer l’intéressé dans un ABS prescrit, mais caractérisé (affaires
Gomez/Lee/Matra) ».
Diverses autres hypothèses de « corbeaux » ont été passées en revue par M. Martini
(préfet Marchiani, ex-DST Ramat, Martinez) mais lui semblent plus nébuleuses ».
Monsieur Pierre de BOUSQUET conclut pour sa part avec circonspection :
« Je poursuis discrètement mes investigations sur cette affaire, son environnement et
ses développements (dont j’observe qu’ils sont demeurés très limités
médiatiquement). Peut être en présence d’un « montage », complet ou partiel, dont il
serait alors nécessaire de connaître les commanditaires et les opérateurs, je
recommande pour l’heure la plus grande prudence dans les conclusions qu’on peut
en tirer, en attendant le retour des coopérations judiciaires sollicitées par le juge Van
Ruymbecke et le Parquet auprès des autorités luxembourgeoises et suisse ».
Dans la deuxième quinzaine de juillet, je demande au Général RONDOT de se
rapprocher de Monsieur Pierre de BOUSQUET.
* *
*
3
Les investigations de la DST vont se poursuivre sans avancée notable.
En septembre, Monsieur Pierre de BOUSQUET, confirme que plusieurs de ses
sources convergent vers Jean-Louis GERGORIN, mais sans preuve tangible.
Ce qu’il rappellera lors de son audition du 15 octobre 2006, lorsque évoquant ses
sources, il indique : « Aucune ne nous avait fourni de preuves formelles » (voir
également l’audition de Monsieur GAUDIN, Directeur Général de la Police Nationale
qui évoque des « éléments qui établissent de manière non catégorique et sans
preuve irréfutable, que Jean-Louis GERGORIN était le corbeau » (D.1966).
A la fin du mois de septembre 2004, les investigations de la DST n’avaient abouti à
aucune conclusion définitive.
Ni sur la crédibilité des informations contenues dans l’article du POINT, la DST
envisageant toujours la possibilité d’un montage « complet ou partiel », ni sur
l’identité du ou des « corbeaux », Jean-Louis GERGORIN étant à ce titre visé mais
sans preuve nette.
Le 23 octobre suivant, Monsieur Pierre de BOUSQUET me faisait parvenir une note
de synthèse.
Sur l’origine de l’affaire, il formule différentes hypothèses :
-
« Pourquoi tant de cadres supérieurs du groupe EADS figurent-ils dans cette
liste ? Pourquoi ceux-ci appartiennent-ils majoritairement à un des clans entre
lesquels, de notoriété publique, se partage l’état-major du groupe ? S’agit-il
d’une affaire purement interne au groupe EADS ? d’une manœuvre de
déstabilisation dans le cadre d’une lutte pour le pouvoir à sa tête ? ».
-
« Plusieurs noms n’évoqueraient-ils pas des affaires plus anciennes, ayant
notamment opposées MM. Lagardère et Gomez ? A-t-on voulu ainsi relancer,
élargir, éclairer ou au contraire obscurcir l’ancienne affaire des frégates de
Taïwan ? Se pourrait-il qu’il ait plusieurs « tiroirs » dans l’affaire ? Et peut-être
plusieurs dénonciateurs ? ».
-
« Certains se veulent plus précis quant à l’origine de la dénonciation et
pointent du doigt un haut cadre de EADS, expert en stratégie. Pourrait-il avoir
été, directement ou indirectement, à l’origine du montage ? On le dit
psychologiquement fragile : aurait-il dérivé ? S’il a agi, aurait-il agi seul ou
avec son entourage ? Avec le soutien technique d’une équipe à sa main ?
Aurait-il pu être instrumentalisé ? Par qui ? ».
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-
« Des partenaires étrangers du groupe ainsi que d’anciens membres de
services de renseignements étrangers semblent être informés de certains
aspects de l’affaire. Comment le sont-ils ? Jusqu’où le sont-il ? Pourraient-ils
être à l’origine d’une manipulation ? Dans quel but ? Par quel truchement ? »
-
« Des hommes politiques sont cités, sans que rien à ce stade ait attesté la
réalité des comptes qu’on leur reprocherait de posséder à l’étranger ; pourquoi
apparaissent-ils dans cette liste ? Leurs noms n’y auraient-ils pas simplement
été introduits pour assurer un retentissement médiatique plus large à l’affaire
(le dénonciateur s’étant vraisemblablement chargé de saisir de ses
accusations certains journaux en même temps qu’il écrivait au juge Van
Ruymbecke ?) ».
-
« De même, la liste comprend plusieurs noms notoirement liés au crime
organisé ou en délicatesse avec la Justice. Pourquoi ? Ces noms ne sont-ils
pas là seulement pour donner de la vraisemblance, du crédit à l’ensemble ? ».
On le voit, plus de questions que de réponses…
Enfin, Monsieur de Bousquet m’informe de l’ouverture d’une enquête préliminaire
« pour traiter des autres aspects de cette affaire Clearstream, c’est à dire tous ceux
qui ne seraient pas a priori rattachables à une société au dossier des frégates.
L’objectif principal du Parquet paraît être l’identification du ou des dénonciateurs. Ce
sera donc au service saisi par l’autorité judiciaire qu’il appartiendra désormais
d’entreprendre des investigations opportunes ».
Nonobstant l’absence de résultat notable, j’ai demandé à Monsieur Pierre de
BOUSQUET de transmettre les éléments en sa possession à Monsieur Yves BOT,
Procureur Général près la Cour d’Appel de PARIS.
Ce qui sera fait fin octobre 2004.
* *
*
Les incertitudes de la DST transparaissent également du courrier adressé par
Monsieur DE BOUSQUET le 22 novembre 2004 à Monsieur le Juge d’instruction
d’HUY dans lequel il précise « que compte tenu des personnalités de premier plan et
des entités économiques stratégiques (EADS, AIRBUS, ex-THOMSON, DASSAULT)
mises en cause, ainsi que de la tonalité des courriers, l’hypothèse d’une opération de
déstabilisation – éventuellement ourdie par des intérêts étrangers – devait être
envisagée ».
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Ce même courrier rappelle que les informations recueillies par la DST « sont
apparues parfois contradictoires et l’origine des courriers n’a pu être établie
formellement. Dans un contexte où toutes les manipulations de l’information étaient
envisageables, j’ai donné à mes services des instructions afin de ne pas prendre le
risque d’être instrumentalisés par l’un ou l’autre des intérêts en présence ».
Et s’il relève que « certains observateurs se sont montrés plus précis en désignant
comme auteur d’une ou des lettres Monsieur Jean-Louis Gergorin, haut cadre du
groupe EADS et expert en stratégie. Ce nom était évoqué par plusieurs personnes
dès avant la manifestation de notre intérêt pour l’affaire, vraisemblablement dès
l’interpellation de M. Philippe DELMAS », il ajoute : « pour autant, nous n’avons
recueilli aucun élément suffisamment probant pour mettre en cause cette
personne ».
* *
*
Le 9 décembre suivant, dans sa note de synthèse, Monsieur Pierre de BOUSQUET
résume les conclusions auxquelles est parvenue la DST.
Cette note finale se conclut comme suit :
« L’évolution de cette affaire au grand jour depuis un mois me paraît confirmer le
sentiment initial qui était le nôtre, que la clé principale était à chercher dans les
haineux combats que se livrent depuis des mois les dirigeants (clans
CAMUS/GERGORIN contre FORGEARD/DELMAS) d’EADS – AIRBUS : lutte pour le
pouvoir, règlements de comptes, querelles de succession, égos malmenés et
meccano industriel ».
« De ce contexte pourrait être tiré un scénario dans lequel, à une première lettre de
dénonciation très ciblée, adressée au juge Van Ruymbecke (très possiblement par
Jean-Louis Gergorin et peut être en vertueuse indignation « post-frégates »), aurait
répondu une deuxième lettre, enrichie de dizaines de noms. Cette deuxième lettre
pourrait (nous n’avons sur ce point aucune certitude) émaner de l’entourage de
Philippe Delmas, persuadé comme la plupart de ceux qui se sont intéressés à
l’affaire que Gergorin est à l’origine du premier envoi, envoi dont la conséquence
plus visible et immédiate fut son placement en garde à vue en mai sur instruction du
juge Van Ruymbecke ».
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« Dans cette deuxième lettre figurent la plupart des « ennemis » réels ou supposés
de Gergorin, ceux dont il est obsédé et qu’il dénonce depuis des années comme
étant autant d’adversaires du groupe Lagardère, ayant même pu aller jusqu’à faire
assassiner Jean-Luc Lagardère patron auquel il était passionnément attaché. Cette
lettre désigne tellement le vice-président d’EADS comme scripteur que tous les
regards se tournent spontanément vers lui. Mais justement, n’est-elle pas un peu trop
dans son style pour être de lui ? Plusieurs personnes de son entourage, abreuvées
de ses confidences et de ses fantasmes,le connaissent assez pour avoir pu,
manipulés par d’autres, en dicter le contenu… ».
« Plaident aussi pour l’idée d’un deuxième scripteur les grossières erreurs faites sur
le report de plusieurs numéros de compte entre un envoi et l’autre ; elles font penser
à un recopiage laborieux plus qu’à une reprise enrichie par le même opérateur ».
« Pour incomplet qu’il soit, ce scénario ne serait pas contradictoire avec les
informations précises recueillies cet été dernier par deux sources du service, sources
trop finement renseignées pour être complètement extérieures à la boucle, mais sur
la motivation réelle et l’inspiration desquelles nous sommes toujours restés très
prudents ».
« Le « service après-vente » de cette opération pourrait avoir été appuyé par
plusieurs conseils mandatés par les hommes d’EADS et AIRBUS. On parle
ainsi, comme pivots des relations avec les médias, de MM. Stéphane FOUKS
(président d’Euro-RSCG, conseil de M. FORGEARD), ou Alain BAUER (ami de
GERGORIN mais prestataire de service pour AIRBUS). On dit aussi que trois agents
privés de recherche, MM. Frédéric BAUER, Pierre MIALLOT et Hervé SEVENO (des
cabinets Sécurité Sans Frontière et I2F) auraient pu (mais au profit de qui ?)
déployer des moyens techniques en relation avec l’affaire et répandre dans des
lettres confidentielles la rumeur d’agissements illégaux (y compris mettant en cause
la DST !). Ces agissements pourraient du reste avoir contribuer à désinformer M.
SARKOZY ».
Au terme de cette note, Monsieur Pierre de BOUSQUET précise :
« A ce stade, nous avons donc toujours beaucoup plus de questions que de
réponses. Seule une enquête approfondie et conduite avec les moyens de recherche
adéquats permettrait de vérifier les hypothèses avancées et de progresser de façon
sûre et judiciairement exploitable ».
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CONCLUSION :
Au terme de ses investigations, la DST n’a pas de certitude.
Parmi les hypothèses avancées, celle d’une rivalité industrielle notamment liée à
EADS lui paraît la plus crédible.
Pour autant, la DST ne conclut pas à l’existence d’un montage dont la réalité
n’apparaîtra clairement qu’au vu du retour des commissions rogatoires initiées par
Monsieur le Juge VAN RUYMBEKE.
La DST penche pour l’existence de plusieurs « corbeaux » et n’a pas recueilli
d’éléments suffisamment probants pour affirmer que Jean-Louis GERGORIN était
l’un d’entre eux.
De simples présomptions ne sont pas des preuves.
La thèse selon laquelle je me serais efforcé de dissimuler des preuves ou d’étouffer
des informations reçues de la DST, est donc sans fondement.
Loin de m’affranchir des conclusions de la DST, je me suis au contraire rangé à son
avis, adoptant ses recommandations, à savoir :
-
d’une part, attendre le retour des commissions rogatoires lancées par le juge
VAN RUYMBEKE,
-
d’autre part, ne pas interférer sur l’enquête judiciaire concernant les envois
anonymes.
J’a régulièrement tenu informé le Président de la République et le Premier Ministre
des conclusions de la DST.
J’ai également demandé au Général RONDOT de se rapprocher de la DST et à
Monsieur Pierre de BOUSQUET de prendre attache avec le Parquet en la personne
de Monsieur Yves BOT, pour le tenir informé des conclusions de son service,
initiatives, l’on en conviendra, qui ne viennent pas au soutien des accusations
portées contre moi.
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Si j’étais, comme le voudraient mes accusateurs, à l’origine des envois anonymes,
gageons que je n’aurais pas favorisé les investigations de la DST ni ne l’aurais incité
à coopérer avec le Parquet.