LA PRÉPARATION DES ENSEIGNANTS EN LECTURE ET EN

Transcription

LA PRÉPARATION DES ENSEIGNANTS EN LECTURE ET EN
Projet de Recherche sur la Formation Initiale
et Continue des Enseignants en Afrique
(FICEA)
LA PRÉPARATION DES
ENSEIGNANTS EN LECTURE ET
EN MATHÉMATIQUES ET SON
INFLUENCE SUR LA PRATIQUE
DANS LES ÉCOLES
ELEMENTAIRES DU SÉNÉGAL
Rapport Pays
2
LA PRÉPARATION DES ENSEIGNANTS
EN LECTURE ET EN MATHÉMATIQUES
ET SON INFLUENCE SUR LA PRATIQUE
DANS LES ÉCOLES ELEMENTAIRES DU
SÉNÉGAL
Rapport Pays du Projet de Recherche sur la Formation
Initiale et Continue des Enseignants en Afrique (FICEA)
Dr. Mbarou Gassama Mbaye
Alhousseynou Sy
Momar Sambe
Dr. John Pryor et Dr. Kattie Lussier
3
Remerciements
Ce document est le résultat d’un projet de recherche intitule « Formation Initiale et Continue des Enseignants en
Afrique » FICEA, financé par la Fondation William and Flora Hewlett. Le Centre for International Education,
School of Education and Social Work, University of Sussex a mis en place ce projet de recherche pour combler
une lacune sur les connaissances sur l’efficacité des programmes de formation initiale et continue à améliorer
l’enseignement. La réunion entre Dr. John Pryor et le Secrétaire General du Ministère de l’Education Mr. Touré
avant le démarrage du projet a confirmé l’urgence de cette étude dont les résultats vont permettre de mieux
informer les politiques en matière de formation initiale et continue.
Pour conduire ce travail, l’équipe nationale de chercheurs s’est appuyé sur le Groupe National de Référence
pour documenter et analyser l’enseignement et l’apprentissage dans les institutions de formation des
enseignants, les écoles primaires et les programmes de développement professionnel continu. Elle a examiné
la manière dont les enseignants mettent en pratique les différents éléments des programmes de formation.
Une équipé internationale en collaboration avec une équipe nationale a conduit cette recherche. L’équipe de
l’Université de Sussex dirigée par Dr Pryor Dr. Kwame Akyeampong et Dr. Jo Westbrook,, comprenait
également D, Kattie Lussier. L’équipe du Sénégal était composé des chercheurs dirigés par Dr. Mbarou
Gassama Mbaye, et comprenait Mr Alhouseynou Sy et Mr Momar Sambe sous la supervision de la Direction de
l’Enseignement Elémentaire, dirigée par Mr Abdou Diaw, de l’INEAD, dirigée par la Directrice Mme Niang et du
Groupe National de Référence composé par le Cabinet du Ministre, le Directeur de la Planification et de la
Reforme (DPRE), le Directeur de l'Enseignent Elémentaire (DEE), le Secrétariat Permanent du Curriculum
(STPC), la Coordination de la Formation Initiale et Continue (CENFIC), la Direction du projet des volontaires,
l’Inspection générale de l’Education IGEN, l’INEAD, les Inspecteurs (IA): St Louis, Dakar (2), Thiès, Fatick et
IDEN impliquées, Département Education de l’Université, FASTEF, le coordonateurs Directeur du Projet
PREMST, le coordonateur du projet SARENA. Nous remercions tous les membres des deux équipes.
Nous remercions sincèrement le Ministère de l’Enseignement Préscolaire, de l’Elémentaire, du Moyen
Secondaire et des Langues Nationales, particulièrement le Ministre, Professeur Kalidou Diallo, le Secrétaire
General du Ministère Mr. Mafakha Touré pour leur soutien constant qui ont permis la réussite du projet. La
Direction de l’Enseignement Elémentaire et l’Institut National d’Etude et d’Action pour le Développement de
l’Education (INEADE) méritent une reconnaissance particulière en tant institutions d’ancrage du projet.
Nous remercions sincèrement les Inspecteurs d’Académie ont été nos principales portes d’entrées dans les
différentes régions ainsi que les Inspecteurs départementaux de l’Education qui nous facilité la collecte des
données et nous ont introduits auprès des écoles ciblées. Les coordonateurs des projets de formation continue
PREMST et SARENA ainsi que les points focaux dans les IDEN sont associés a ces marques de gratitudes
Nos remerciements vont aux Directeurs de quatre EFI (Dakar, Fatick, Saint Louis, et Thiès), aux directeurs des
Etudes et leur staff qui ont facilité la collecte des données dans les EFI et se sont prêtés aux entretiens, ainsi
que les Directeurs de Pôles Régionaux de Formation des trois régions de Thiès, Saint Louis et Fatick.
Naturellement, nous ne pouvons pas oublier tous les directeurs d’écoles, tous les enseignants qui ont été
observés ainsi que les élèves maitres. Nous associons à notre remerciement Mme Astou Soumare NDiaye,
assistante du projet et tout le personnel du Centre d’ Incubation de Dakar pour le soutien logistique.
Nous souhaitons que les résultats de cette recherche stimulent le débat sur la façon dont la formation des
enseignants peut améliorer la qualité de l'apprentissage dans les écoles, surtout celui des mathématiques et de
la lecture.
4
Table des matières
REMERCIEMENTS .................................................................................................................................................... 4
GLOSSAIRE ............................................................................................................................................................ 7
LISTE D’ACRONYMES................................................................................................................................................ 8
INTRODUCTION ............................................................................................................................................... 9
CHAPITRE 1: REVUE DE LA LITTÉRATURE ET MÉTHODES DE RECHERCHE ....................................................... 11
1.1 ÉDUCATION POUR TOUS ET QUALITÉ DE L’ÉDUCATION: L’IMPORTANCE DE LA FORMATION DES ENSEIGNANTS..................... 11
1.2.1 Qu’est-ce que la lecture? .................................................................................................................... 12
1.2 L’enseignement de la lecture ................................................................................................................. 13
1.2.2 Apprendre à lire dans sa langue maternelle ....................................................................................... 13
1.2.3 PÉDAGOGIES POUR ENSEIGNER LA LECTURE ....................................................................................................... 13
1.2.4 Pédagogies pour les classes pléthoriques ........................................................................................... 14
1.3 L’ENSEIGNEMENT DES MATHÉMATIQUES.............................................................................................................. 14
1.4 QUESTIONS DE RECHERCHE ............................................................................................................................... 16
1.5 CONCEPTION ET MÉTHODE DE RECHERCHE .......................................................................................................... 17
1.5.1 Base de Données et Méthodes ........................................................................................................... 17
1.5.2 Résumé des données recueillies ......................................................................................................... 21
1.5.3 Analyse des Données .......................................................................................................................... 23
1.6 Défis et Limites de l’Étude ..................................................................................................................... 23
CHAPITRE 2 : LES PROGRAMMES DE FORMATION DE MAÎTRES ET LES PROGRAMMES SCOLAIRES ............... 25
2.1. LE PROGRAMME DE FORMATION INITIALE ET SES RELATIONS AU CURRICULUM SCOLAIRE ............................................... 26
2.2 LA LECTURE DANS LA FORMATION INITIALE ........................................................................................................... 28
2.3. LA LECTURE DANS LES PROGRAMMES SCOLAIRES ................................................................................................... 29
2.4. LES MATHÉMATIQUES DANS LA FORMATION INITIALE............................................................................................. 32
2.5 LES MATHÉMATIQUES DANS LE PROGRAMME SCOLAIRE........................................................................................... 33
2.6 PRÉSENTATION DES PROGRAMMES DE FORMATION CONTINUE ................................................................................. 34
2.6.1 La formation en Curriculum de l’Education de Base ........................................................................... 34
2.6.2. Stratégie Active pour la Réussite d’une École Novatrice en Afrique (SARENA) ................................. 34
2.6.3 Projet de Renforcement de l‘Enseignement des Mathématiques, des Sciences et de la Technologie
(PREMST) ..................................................................................................................................................... 35
CHAPITRE 3 : APPRENDRE À ENSEIGNER LA LECTURE .................................................................................... 36
3.1 LA FORMATION INITIALE ................................................................................................................................... 36
3.1.1 Les formateurs .................................................................................................................................... 36
3.1.2 Connaissances, compréhension, pratiques des élèves-maîtres .......................................................... 39
3.1.3 Conclusions ......................................................................................................................................... 45
3.3 CONNAISSANCES, COMPRÉHENSION, PRATIQUES DES ENSEIGNANTS RÉCEMMENT QUALIFIÉS ......................................... 46
3.3.1 Conclusions ......................................................................................................................................... 52
3.4 LES PROGRAMMES DE FORMATION CONTINUE ...................................................................................................... 52
CHAPITRE 4: APPRENDRE À ENSEIGNER LES MATHÉMATIQUE ...................................................................... 56
4.1 LA FORMATION INITIALE ................................................................................................................................... 56
4.1.1 Les formateurs .................................................................................................................................... 56
4.1.2 Connaissances, compréhension, pratiques des élèves-maîtres .......................................................... 59
4.2 LES ENSEIGNANTS RÉCEMMENT QUALIFIÉS (ERQ) ................................................................................................ 64
4.3 LA FORMATION CONTINUE ............................................................................................................................... 68
CHAPITRE 5 COUTS, RENTABILITE ET EFFICACITE DE LA FORMATION ............................................................ 73
6.1 INTRODUCTION............................................................................................................................................... 73
6.2 SUPPOSITIONS ................................................................................................................................................ 73
6.3 LES QUESTIONS DE LA RENTABILITÉ ET D’EFFICACITÉ DE LA FORMATION DES ENSEIGNANTS AU SÉNÉGAL ............................ 73
CHAPITRE 6 : CONCLUSIONS ET RECOMMANDATIONS .................................................................................. 76
6.1 CONCLUSIONS ................................................................................................................................................ 76
6.2 CONSTATS ET RECOMMANDATIONS .................................................................................................................... 79
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Écoles de formation des instituteurs ........................................................................................................... 79
Les stages pratiques .................................................................................................................................... 80
Le contenu du programme de formation initiale......................................................................................... 80
Relations entre formation initiale et continue............................................................................................. 81
La méthode d’enseignement de la lecture .................................................................................................. 81
La méthode d’enseignement des mathématiques...................................................................................... 81
La mise en cohérence des innovations et l’augmentation du nombre de maîtres formés .......................... 81
RÉFÉRENCES .................................................................................................................................................. 83
ANNEXE 1: MÉTHODE D’ANALYSE DES COUTS ET DE LA RENTABILITÉ ............................................................................... 87
6
Glossaire
Compréhension (en lecture) : La compréhension est l’habileté à interagir cognitivement avec un texte
continu, une phrase ou une petite histoire afin d’en faire du sens.
Connaissance disciplinaire : Ensemble des savoirs concernant la matière et les sujets à enseigner
Connaissance pédagogique de contenu : Connaissances spécifiques qui relient les contenus à la
pédagogie comme la connaissance de ce qui est difficile pour les élèves, les représentations les plus utiles pour
enseigner une idée ou une procédure, et les façons de développer une idée particulière (Ball, 2000). La CPC
incorpore la capacité d’évaluer la pensée des élèves de façon à planifier des opportunités d’apprentissage
appropriées ainsi qu’à modifier, combiner et utiliser du matériel d’instruction pour développer la compréhension
des concepts (Darling-Hammond et al., 1999).
Curriculum : (Au sens large): l’ensemble des dispositifs (finalités, programmes, emplois du temps, matériels
didactiques, méthodes pédagogiques, modes d’évaluation) qui, dans le système scolaire et universitaire, permet
d’assurer la formation des apprenants. (Au sens spécifique au Sénégal) :le Curriculum de l’Enseignement de
Base, nouveau programme dans les écoles élémentaires..
Didactique : Discipline qui s’intéresse aux processus d’enseignement et d’apprentissage.
Élève-maître : Étudiant d’un institut de formation des maîtres.
Fluidité : Habileté à lire à haute voix ou silencieusement de façon rapide et juste, avec une expression
adéquate et en contribuant à la compréhension
Graphème : La transcription d’un son ou phonème. Ex : on peut proposer les graphèmes o – au – eau pour le
phonème [o].
Guide : Guide de formation initiale du volontaire de l’éducation
Petites classes : Les petites classes concernent les quatre premières années du primaire. Les chercheurs ont
ainsi défini le domaine de la recherche en se conformant aux deux étapes du nouveau curriculum de l’éducation
de base (Etape 1 CI &CP ; Etape 2 CE1 & CE2)
Phonème : Un phonème constitue la plus petite unité sonore du langage oral. Si on observe la lettre, un
phonème correspond au son de celle-ci. Ex : la lettre f correspond au phonème ffff (la manière dont elle chante).
Phonémique : Relations entre les lettres et les sons
Quota sécuritaire : Recrutement à partir du cabinet ministériel. Les élèves-maîtres sont recrutés sur la base
de leur dossier, sans concours
Quota IDEN : Recrutement basé sur les résultats au concours d’entrée
Volontaire de l’éducation : Sortant de l’école de formation des instituteurs
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Liste d’acronymes
ASEI
ASS
BFEM
CAP
CEB
CNFIC
CPC
DEE
DFC
DPVE
EFI
EM
EPT
ERQ
FEEB/APC
FICEA
IA
IDEN
INEADE
IRA
JICA
NICCHD
OA
OS
PACEB
PDEF
PDRH
PDSI
PFC
PRF
PREMST
Technologie
SACMEQ
SARENA
SEA
SSI
UNESCO
VE
activité, apprenant, expérience, improvisation
Afrique sub-saharienne
Brevet de fin d’études moyennes
Cellules d’animation pédagogique
Curriculum de l’éducation de base
Coordination Nationale de la Formation Initiale et Continuée
Connaissance pédagogique de contenu
Direction de l’Enseignement Élémentaire
Direction de la Formation et de la Communication
Direction du Projet des Volontaires de l’Éducation
École de formation des instituteurs
Élève-maître
Éducation pour tous
Enseignants récemment qualifiés
Formation des enseignants de l'éducation de base en approche par les compétences
Formation Initiale et Continue des Enseignants en Afrique
Inspection d’académie
Inspection départementale de l’éducation nationale
Institut national d’étude et d’action pour le développement de l’éducation
Association internationale pour la lecture
Agence de coopération internationale du Japon
National Institute of Child Health & Human Development
Objectif d’apprentissage
Objectif spécifique
Projet d'appui au curriculum de l'éducation de base
Programme Décennal de l’Éducation et de la Formation
Projet de développement des ressources humaines
Planifier, mettre en œuvre, évaluer, améliorer
Programme de formation continue
Pôle régional de formation
Projet de Renforcement de l‘Enseignement des Mathématiques, des Sciences et de la
Consortium africain méridional pour l'évaluation de la qualité de l'éducation
Stratégie active pour la réussite d’une école novatrice en Afrique
Situation d’enseignement apprentissage
Situation significative d’intégration
Organisation des Nations Unies pour l’éducation la science et la culture
Volontaire de l’éducation
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Introduction
Le Sénégal a connu plusieurs systèmes de formation initiale des enseignants, mais a toujours souffert d’un gros
déficit de personnel enseignant. Pour y faire face, depuis 1994 l’état a recruté des « volontaires de l’éducation »
qui entraient en service sans diplôme après une courte formation. Depuis 2000, les candidats enseignants
subissent un test d’entrée dans les écoles de formation d’instituteurs. L’Etat du Sénégal, comme beaucoup
d’états africains a été davantage préoccupé par la mise en place d’infrastructures et le recrutement de maîtres
en quantité suffisante pour faire face à la forte demande d’éducation. En outre, des programmes de formation
continue en maths et lecture ont été dispensés aux enseignants, mais il n’existe pas d’information sur l’impact
réel de ces formations sur la pratique enseignante et l’amélioration des apprentissages des élèves.
Le projet de recherche sur la Formation Initiale et Continue des Enseignants en Afrique (FICEA)1, financé par la
fondation William et Flora Hewlett, a été mis sur pied afin de combler un manque de connaissances actuelles sur
la façon dont la formation initiale et continue influence les pratiques enseignantes par une étude dans six pays
africains : le Sénégal, le Ghana, le Mali, le Kenya, l’Ouganda et la Tanzanie. Ce rapport présente la recherche
effectuée au Sénégal. Étant donné l’extrême importance de l’acquisition d’aptitudes en lecture et en
mathématiques dès les premières années du primaire, ce rapport mettra l’accent sur la formation que reçoivent
les maîtres qui enseignent dans les petites classes2 et sur le soutien dont ils bénéficient pour enseigner ces
matières par le biais de la formation continue et d’autres initiatives. Une question centrale est de savoir si le
processus d’apprentissage de l’enseignement de la lecture et des mathématiques durant les premières années
du primaire permet de développer un type de compétences pédagogiques. On sait que ces compétences sont
importantes pour le développement des aptitudes en lecture et la compréhension des concepts mathématiques
de base chez les élèves des petites classes. Le projet de recherche a développé un portrait détaillé de la
formation des maîtres en relation avec la lecture et les mathématiques dans les premières années de l’école
primaire. Il a cherché à identifier les facteurs qui contribuent aux pratiques efficaces menant à une amélioration
des apprentissages des élèves. Il a aussi cherché à identifier les barrières spécifiques et les contraintes qui
sapent les pratiques des enseignants ainsi que la progression des élèves en lecture et en mathématiques de
base. Les résultats de la recherche seront utilisés pour suggérer des solutions réalistes pour améliorer la
préparation des enseignants au Sénégal.
Le présent rapport se présente comme suit :
Chapitre 1 : Brève revue de la littérature et présentation des méthodes de recherche. La revue de la littérature
met l’accent sur la faiblesse des résultats d’apprentissage malgré les investissements réalisés dans le secteur
de l’éducation pour atteindre les objectifs de l’éducation pour tous ainsi que le lien qui existe entre la qualité des
apprentissages d’une part et la formation initiale et continue des enseignants de l’autre. Ce chapitre présente les
questions et méthodes de recherche et définit le cadre conceptuel ainsi que l’échantillonnage.
Dans les pays anglophones, le projet s’appelle TPA – Teacher Preparation in Africa.
Les petites classes concernent les quatre premières années du primaire. Les chercheurs ont ainsi défini le domaine de la
recherche en se conformant aux deux étapes du nouveau curriculum de l’éducation de base (Etape 1 CI &CP ; Etape 2 CE1
&CE2)
1
2
9
Chapitre 2 : Programme de formation initiale et programmes scolaires : À la suite de la présentation du système
de formation des enseignants, le chapitre analyse le programme de formation des EFI à travers l’analyse du
"Guide de formation initiale du volontaire de l’éducation" (guide) en relation avec les deux disciplines concernées
par la recherche : les mathématiques et la lecture. Dans ce chapitre sont analysés les liens entre le "Guide" et
les manuels scolaires d’une part et les liens implicites ou explicites entre le guide et les différents programmes
scolaires (Curriculum de l’Education de Base [CEB], et programmes du décret 79-1165).
Chapitre 3 : Apprendre à enseigner la lecture. Ce chapitre analyse l’enseignement de la lecture à trois niveaux :
École de Formation des Instituteurs, (formation initiale avec comme cible les formateurs et élèves-maîtres), au
niveau des écoles élémentaires, et enfin au niveau de la formation continue en lecture (avec comme cible les
enseignants récemment qualifiés). Au niveau des EFI, les profils des formateurs, en relation avec leurs
connaissances, compréhension et pratique enseignantes en lecture est présenté ainsi que les connaissances,
compréhension et pratiques des élèves-maîtres. Au niveau des écoles élémentaires, ce chapitre présente le
niveau de connaissance, compréhension et pratiques de classe en lecture des enseignants récemment qualifiés
(ERQ). La troisième partie de ce chapitre présente le programme de formation continue en lecture et son impact
sur la pratique enseignante.
Le Chapitre 4 : Apprendre à enseigner les mathématiques : Ce chapitre analyse l’enseignement des maths à
trois niveaux : École de formation des instituteurs (formation initiale), enseignants récemment qualifiés et
formation continue en lecture. Au niveau des EFI, ce chapitre décrit les profils des formateurs en relation avec
leurs connaissances, compréhension et pratique enseignante en mathématique. Il présente aussi les
connaissances, compréhension et pratiques des élèves-maîtres en mathématiques. Au niveau des écoles, ce
chapitre présente le niveau de connaissance, compréhension et pratiques de classe en mathématiques des
enseignants récemment qualifiés. La troisième partie de ce chapitre présente le programme de formation
continue en mathématiques et son impact sur la pratique enseignante.
Le chapitre 5 : Conclusions et recommandations : Résume les points saillants de l’étude et présente les
conclusions de la recherche ainsi que les recommandations des chercheurs.
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Chapitre 1: Revue de la littérature et méthodes de recherche
1.1 Éducation pour tous et qualité de l’éducation: L’importance de la formation des
enseignants
En février 2000, le Gouvernement du Sénégal a adopté la lettre de politique générale pour le secteur de
l'éducation (couvrant la décennie 1999 - 2008), révisée en août 2005 et dont le Programme Décennal de
l’Éducation et de la Formation (PDEF) est le cadre d'opérationnalisation. Ce programme s’inscrit dans le cadre
de l’objectif d’atteindre l’éducation pour tous d’ici 2015 qui a mobilisé la plupart des pays d’Afrique subsaharienne (ASS) depuis 2000 et les a incités à confronter leur taux d’enrôlement scolaire historiquement bas.
Les initiatives de ces pays pour attirer beaucoup plus d‘enfants à l’école ont connu un succès remarquable
(UNESCO, 2008). Toutefois, remplir les salles de classe n’est pas suffisant. Pour avoir des effets positifs sur le
plan social et économique, l’Éducation pour tous doit, au minimum, faire en sorte que les enfants apprennent les
compétences de bases en lecture, en écriture et en calcul. Ces compétences sont en effet nécessaires pour que
les enfants puissent bénéficier de leur éducation et contribuer au développement de la société dans laquelle ils
vivent. Malheureusement, de nombreuses études suggèrent que nombre d’enfants qui fréquentent l’école
n’apprennent pas beaucoup. UNESCO (2008 p.2) rapporte des apprentissages relativement bas et inégaux dans
les domaines langagiers et en mathématiques dans plusieurs pays, et plus particulièrement en ASS. Ces
maigres résultats se retrouvent dans l’ensemble de l’éducation de base, mais il devient de plus en plus clair que
les premières années d’école sont particulièrement importantes. En effet, les expériences d’apprentissage dans
les petites classes déterminent l’attitude des enfants face à l’éducation. Ainsi, ce qui se passe dans les petites
classes détermine le futur de l’éducation des enfants. S’ils ne réalisent pas des progrès important à ce stade, ils
sont enclins à cesser de fréquenter l’école, à retomber dans l’analphabétisme ou à devenir des ‘exclus
silencieux’ qui ne sont pas capables d’accéder au travail de plus en plus exigeant des classes supérieures
(Liddell & Rae 2001; Lewin 2009; UNESCO 2010; Glick & Sahn 2010). Il est alors important que les élèves
maitrisent la lecture et les mathématiques dès les premières classes. Pour les élèves qui ne réussissent pas à
lire à ce niveau, les leçons des classes suivantes deviennent de plus en plus difficiles à comprendre, car le
matériel pédagogique est de plus en plus sous forme imprimée ou écrite et non orale : la lecture est le pilier de
l’apprentissage réussi (Pretorius 2000). L’apprentissage des mathématiques est également une compétence clé,
nécessaire à la compréhension de beaucoup d’autres matières.
Les recherches sur la qualité de l’enseignement confirment la forte corrélation entre la pauvre qualité de
l’apprentissage des élèves et la pauvre qualité de l’enseignement dispensé par les maîtres. La réussite et
l’apprentissage efficace des élèves sont entravés par les mauvaises pratiques éducatives et les faibles
connaissances pédagogiques du contenu des enseignants (Pontefract & Hardman 2005; Akyeampong, et al.
2006, Moon et al. 2005; Byamugisha & Ssenabulya, 2005 et autres rapports pays du SACMEQ). La formation
des maîtres a été identifiée comme faisant partie à la fois du problème et de la solution. L’accroissement de
l’enrôlement des élèves s’est accompagné d’une forte demande d’enseignants et la priorité a été de trouver les
moyens d’accroître le nombre de maîtres affectés dans les écoles soit par l’augmentation du recrutement du
nombre d’élèves-maîtres dans les cours existants, soit en créant de nouvelles voies d’accès vers la profession
enseignante, soit en combinant les deux stratégies (UNESCO, 2005). Les politiques et les plans assument
souvent que la formation initiale et le développement professionnel des enseignants font une différence dans les
aptitudes et les connaissances pédagogiques de ces derniers et que cela se traduit par des résultats
d’apprentissage accrus (Dembélé & Lefoka, 2007). Toutefois, dans plusieurs pays d’Afrique sub-saharienne il y
11
a peu de données systématiques sur les contenus et les processus d’acquisition des connaissances et des
aptitudes par les étudiants des EFI et les enseignants récemment qualifiés. Il y a encore moins de données
établissant un lien entre les apports fournis et les résultats en termes d’améliorations pédagogiques et
d’accroissement des résultats d’apprentissage en lecture et en mathématiques. Nous n’en savons pas assez sur
la façon dont les enseignants travaillant dans différents environnements et contextes éducationnels adoptent et
adaptent les connaissances et les aptitudes acquises lors de la formation formelle pour répondre aux besoins
d’apprentissage particuliers des jeunes élèves dans leurs écoles actuelles.
Pour améliorer la qualité de l’éducation primaire, certains pays d’Afrique sub-saharienne ont plutôt ciblé
l’infrastructure scolaire (salles de classe, équipement, matériel d’apprentissage) et la provision d’un nombre
adéquat d’enseignants que la mise en place d’un système de formation initiale et continue pour promouvoir des
compétences qui répondent aux besoins des élèves dans de salles de classe (Moon 2007; Bernard, Tiyab, &.
Vianou, 2004). Bien qu’il y ait des évidences montrant que la formation initiale et la formation continue des
enseignants du primaire jouent un rôle clé dans la façon dont les maîtres apprennent à enseigner (DarlingHammond, Wise & Klein 1999: Lewin & Stuart 2002), d’autres recherches indiquent que les enseignants en
début de carrière sont très peu soutenus et qu’un « effet d’effacement » se produit en conséquence (Lewin and
Stuart, 2003). La socialisation dans les pratiques existantes de l’école peut rapidement submerger les effets de
la formation. C’est particulièrement le cas dans les systèmes où le statut hiérarchique est fondé sur la séniorité
et où l’on encourage les enseignants récemment qualifiés à se conformer aux pratiques établies (Westbrook et
al. 2009).
1.2.1 Qu’est-ce que la lecture?
Lire est l’aptitude à décoder des marques sur une page (graphèmes) qui représentent des sons parlés
(phonèmes), en mots, phrases et textes continus. Les lecteurs doivent leur donner un sens afin que le processus
cognitif impliqué dans le décodage ait une certaine valeur (Meek 1994; Ehri 2002). L’acte de lire fait
schématiquement appel à l’interaction de deux composantes essentielles dans le traitement de l’écrit : 1 / une
composante de traitement de bas niveau, la reconnaissance des mots écrits, et 2 / une composante de
traitement de plus haut niveau, la compréhension (i.e. l’accès au sens avec intégration syntaxique, sémantique
et textuelle) (Demont & Gombert 2002 : 246). Décoder et lire pour faire du sens sont par conséquent deux
processus psycholinguistiques développés à partir de racines différentes mais entrelacées (Gough and Tunmer
1986; Oakhill, Cain et al. 2003). Cette intégration se produit alors que l’enfant commence à apprendre la lecture
auprès d’un enseignant ou d’un parent qui établit des liens entre la langue orale et la conscience phonique. La
lecture est un processus enraciné dans le contexte social et culturel dans lequel un enfant apprend à parler
(Brice Heath 1983; Stanovich 1986; Street 1999; Barton, Hamilton et al. 2000).
Les résultats des grandes revues de la littérature de recherche tels que présentés par l’association internationale
pour la lecture (IRA 2007) et le National Reading Panel des Etats-Unis (NICHHD 2000), mettent en évidence le
fait que les élèves ont besoin des six compétences suivantes pour une bonne initiation à la lecture:
1. Le langage oral comme base d’apprentissage
2. La conscience phonémique
3. La connaissance phonétique
4. La fluidité
5. La connaissance du vocabulaire
6. Des stratégies de compréhension (NRC 2010 p.81 traduction avec l’addition des
nombres par les auteurs)
Ces aptitudes s’orchestrent simultanément et travaillent ensemble de façon à ce que la croissance d’un
domaine supporte les autres (Stanovich 1986). En effet, la conscience phonologique mène à l’indentification
des sons et des lettres ce qui conduit aux syllabes et aux mots ou vice versa. La compréhension est
l’aptitude à interagir cognitivement avec un texte continu, une phrase ou une petite histoire afin d’en faire du
sens. Ceci demande un vocabulaire visuel de 95% des mots sur la page, une certaine fluidité dans la
lecture silencieuse ou à haute voix ainsi que des connaissances de la syntaxe apprises de la grammaire du
langage oral (Ehri 2002; Malatesha 2005). Cain considère que trois aptitudes de lecture d’ordre supérieur
sont nécessaires : l’intégration et la cohérence; le suivi de la compréhension; et la connaissance de la
structure du texte (Cain, 2011). Les lecteurs doivent faire des liens entre les idées exprimées dans le texte
12
et leurs propres connaissances et expériences tout en questionnant le texte : «qu’est-ce que le texte dit? »
« qu’est-ce que cela veut dire? ». Lorsque le texte ne fait pas sens, les lecteurs doivent réagir et adopter
des stratégies d’auto correction comme prononcer le mot phonétiquement, identifier des groupes de
syllabes, relire, continuer à lire, deviner, chercher des petits mots dans les grands, etc. La connaissance de
la structure du texte supporte ce processus.
1.2 L’enseignement de la lecture
Les enfants qui réussissent à lire tôt pendant leur scolarisation ont plus de chances de rester plus longtemps à
l’école puisqu’ils bénéficient immédiatement du fruit de leurs efforts alors que ceux qui ne développent pas ces
aptitudes et n’en voient pas l’utilité risquent d’abandonner très tôt et de retomber dans l’analphabétisme
(Psacharopoulos and Woodhall 1985; Chabbott 2006). Quatre années d’études sont requises afin de devenir un
lecteur autonome, mais en Afrique Sub-saharienne la moitié de tous ce qui abandonnent quittent l’école après la
première année n’ayant pas réussi à maitriser les aptitudes de base en lecture (UNESCO, 2010).
1.2.2 Apprendre à lire dans sa langue maternelle
Un pré requis pour l’apprentissage de la lecture est la compétence et l’aisance dans la langue utilisée pour
enseigner la lecture. Apprendre à lire dans sa langue maternelle supporte le transfert vers une langue seconde
alors qu’apprendre à lire dans une langue seconde ou même une troisième langue désavantage les lecteurs qui
peuvent ne pas avoir suffisamment de conscience phonologique et de vocabulaire oral pour faire du sens de
l’écrit peu importe l’approche de lecture utilisée (Commeyras and Inyega 2005). Sans un enseignement efficace,
les enfants de classes multilingues qui parlent une langue différente de la langue d’instruction peuvent tout
simplement ne pas apprendre à lire. Maîtres et élèves ‘sauvent la face’ en utilisant des stratégies telles que la
mémorisation routinière et la répétition en chorale à travers lesquelles les enfants peuvent facilement se cacher
derrière d’autres élèves ou tout simplement répéter ce que le maître dit sans jamais vraiment lire (Mwinsheikhe
2009; Opoku-Amankwa 2009; Pretorius and Currin 2010; Wedin 2010).
1.2.3 Pédagogies pour enseigner la lecture
Les enfants doivent pratiquer la lecture avec une variété de textes dans le but de comprendre le sens et on doit
simultanément et systématiquement leur enseigner les sons et la structure des mots à l’oral ainsi que les
aptitudes telles que la phonique et comment relier des parties de textes. Mettre l’accent sur une aptitude de
lecture au détriment des autres affaibli le développement de la lecture (NICHHD 2000). Certaines de ces
aptitudes recouvrent celles de pré-lecture dans la langue d’instruction telles que le développement langagier, le
vocabulaire, la grammaire, la connaissance de l’alphabet, la reconnaissance automatique de lettres et d’images.
Elles devront être enseignées dans les premières années d’école si plusieurs enfants n’ont pas reçu un
enseignement préscolaire (Chabbott 2006; Lonigan and Shanahan 2006). Ces aptitudes développent aussi la
mémoire visuelle et auditive dont les enfants ont besoin pour reconnaître le vocabulaire et lire les textes plus
longs.
Il existe différentes approches pour enseigner la lecture. Dans une approche syllabique (ou phonique), on
apprend aux enfants à découvrir les mots en faisant d’abord prononcer les sons illustrés par les lettres puis en
passant aux syllabes jusqu’à ce qu’ils arrivent au mot complet puis à la phrase et au texte. L’approche syllabique
est synthétique. Joindre des syllabes ensemble et faire des rimes sont des exemples d’activités utilisées avec
cette approche (Ehri 2002; Alcock, Ngorosho et al. 2010). L’approche globale, qui est encouragée au Mali et au
Sénégal, est une approche analytique. On commence par lire un texte complet comme une histoire courte ou
une phrase et ensuite ce texte est divisé en mots, en syllabes, en combinaisons de voyelles et consonnes et en
lettres avant de revenir au texte dans une perspective de construction de sens. Les stratégies comme l’utilisation
d’étiquettes mots pour encourager la reconnaissance globale des mots et augmenter le vocabulaire visuel des
enfants ainsi que faire comprendre des histoires en reliant des images à du texte sont des exemples d’activités
associées à l’approche globale. Chaque approche a ses propres mérites; une approche mixte est sans doute
plus efficace. La compréhension en lecture doit être enseignée de façon interactive et par un dialogue à travers
lequel des histoires, rimes et textes réels sont lus plusieurs fois à voix haute par le maître ou les élèves afin de
13
développer la fluidité et l’aisance (Dombey 2011). Certaines stratégies devraient être enseignées explicitement
par le questionnement et la modélisation des maîtres lorsqu’ils racontent des histoires et elles sont apprises plus
facilement au tout début de l’apprentissage de la lecture. Celles-ci incluent le résumé, l’utilisation de diagrammes
ou de dessins pour représenter le sens du texte, les prédictions et la clarification du texte par les inférences ainsi
que les aptitudes pour s’approprier les mots (Cain and Oakhill 1999; NICHHD 2000; Bentolila and Germain
2005; Trudell and Schroeder 2007).
1.2.4 Pédagogies pour les classes pléthoriques
Un tel modèle de connaissances de la lecture et de sa didactique doit être résumé à l’aide de ce que l’on sait de
la pédagogie appropriée aux classes d’Afrique Sub-saharienne afin de développer des connaissances
pédagogiques du contenu. Une approche constructiviste centrée sur l’enfant n’est pas toujours appropriée dans
une classe Africaine s’il n’y a pas de cadre culturel pour la supporter (Vavrus 2008: p.306). Il peut être plus
profitable de penser à diversifier les approches plus traditionnelles centrées sur le maître qui fonctionnent avec
des groupes de petits enfants très nombreux apprenant dans des classes ayant très peu de ressources
(O'Sullivan 2004; Barratt 2007; Nakabugo, Opolot-Ukurut et al. 2007; 2008; Vavrus 2008; Wedin 2010).
Nakabugo et al. (2007) ont identifié des stratégies viables pour les classes pléthoriques telles que le travail de
groupes, les stratégies basées sur les apprenants et l’utilisation d’équipes d’enseignants et les stratégies non
viables qui incluent la prolongation des leçons, l’augmentation des devoirs à faire à la maison, la réduction du
temps d’enseignement effectif pour donner des travaux écrits et augmenter le temps de classe. O’Sullivan
(2006a) suggère aussi qu’une bonne organisation de classe s’appuyant sur des routines de classe efficaces est
utile ainsi que les aptitudes d’enseignement génériques telles que le questionnement habile, l’emploi de
méthodes variées (afin d’éviter une dépendance et une application non critique d’une séquence établie
d’activités) et un enseignement de grand groupe interactif efficace. Utilisées de façon adéquate, la mémorisation
et la répétition peuvent être des stratégies efficaces puisque la répétition de lecture orale guidée permet
d’accroître la rapidité et la fluidité de lecture tout en supportant l’enrichissement du vocabulaire (Ehri 2002;
Cutting and Scarborough 2006).
1.3 L’enseignement des mathématiques
La qualité de la formation des maîtres est particulièrement importante afin de déterminer l’efficacité de
l’enseignement des sujets tels que les mathématiques de base dans les petites classes (Darling-Hammond et
al., 1999). La recherche internationale sur la préparation des maîtres à enseigner les mathématiques dans les
premières années du primaire suggère que les connaissances pédagogiques des enseignants en
mathématiques sont importantes et influencent la manière dont les élèves apprennent les maths. (Fennema &
Franke 1998). En plus, le niveau d’exposition des élèves-maîtres et leur compréhension du matériel curriculaire
(y compris les manuels) façonnent leur niveau d’efficacité à enseigner les mathématiques à l’école (Ma, 1999).
Les élèves-maîtres débutent leur formation avec une certaine idée de ce qu’est apprendre et faire des maths,
idée basée sur leur propre expérience à l’école. Plusieurs programmes de formation des maîtres assument
qu’une bonne base de connaissances du sujet est essentielle celle de l’enseignement des maths au primaire ou
au secondaire (Ball, 1990, 2000). Dans les systèmes de formation initiale des maîtres où ces connaissances de
contenu sont considérées faibles, il y a une tendance de remédiation à travers des cours sur les contenus
mathématiques ou des renforcements des connaissances en mathématiques. Il n’y a rien de mal à renforcer les
connaissances mathématiques des maîtres. Toutefois, la recherche sur la formation démontre que la capacité
des enseignants à représenter et à formuler des concepts et procédures mathématiques de façon à faciliter la
compréhension des maths chez les apprenants est encore plus importante (Darling-Hammond et al. 1999).
La recherche sur l’enseignement suggère que les connaissances des contenus sont importantes jusqu’à un
certain point seulement et que l’augmentation du nombre de cours en mathématiques n’est pas en relation
linéaire avec la qualité de l’enseignement des mathématiques des maîtres (Darling-Hammond et al., 1999).
Comme Ball (2000) le mentionne, « savoir que la soustraction est une idée particulièrement difficile à maitriser
pour les élèves n’est pas quelque chose qui peut provenir de la connaissance des ‘grandes idées’ de la
discipline » (traduit de la page 245). Selon Hill et Ball (2004) la manière dont les maîtres se procurent leurs
connaissances peut être beaucoup plus importante que la quantité de connaissances qu’ils possèdent.
Toutefois, maitriser seulement les connaissances de contenu que les élèves devront apprendre a aussi des
14
limites en termes de la capacité à enseigner le sujet de façon significative. Ce qui est important c’est comment
les maîtres représentent les connaissances des disciplines scolaires, et des mathématiques en particulier, de
façon à aider les élèves à très bien comprendre. Ball (2000) croit que pour atteindre ceci, nous devons
commencer avec la pratique, comprendre le travail que les enseignants font ainsi qu’analyser le rôle joué par les
connaissances de contenu dans ce travail. L’approche de plusieurs programmes de formation des maîtres en
Afrique fait le contraire. Comme le démontre la figure 1.1 ils commencent avec de la connaissance
propositionnelle théorique et décontextualisée comme base de connaissances sur l’apprentissage de
l’enseignement (Lewin & Stuart 2002; Stuart, Akyeampong & Croft 2009). Il est rare qu’une grande part du
curriculum de formation des maîtres intègre des connaissances de l’enseignement tirées de la pratique
consistant à aider les élèves à apprendre un sujet de façon significative et considère la démarche des
enseignants pour atteindre cet objectif.
Figure 1.1: Modèle unidirectionnel de l’apprentissage de l’enseignement
Formation Initiale des Maîtres
(Connaissance propositionnelle de l’enseignement)
Pratique
(Connaissance de l’enseignement acquise lors de la formation initiale)
Les pratiques de certains enseignants assument souvent que le contenu mathématique dans les écoles
primaires n’est pas difficile et qu’une bonne maîtrise des contenus et une connaissance des méthodes
d’enseignement des mathématiques à l’école sont suffisantes pour devenir un bon maître de maths. Souvent,
cela mène à la perception que tout ce que les maîtres ont besoin de savoir c’est un ensemble de faits et de
règles et que faire des mathématiques est simplement suivre des procédures préétablies pour arriver à une
réponse (Ma, 1999). Les recherches de Ball (2000), démontrent les limites de cette hypothèse. En effet, même si
un maître est capable de faire des maths, il ou elle peut ne pas avoir le type de compréhension mathématique
qui peut aider les élèves à apprendre de façon à faire du sens. La recherche de Ma (1999), qui explorait la
connaissance de contenu d’enseignants chinois et américains, a aussi révélé que les premiers avaient une plus
grande capacité à expliquer les mathématiques à l’élémentaire parce qu’ils avaient étudié le matériel
d’enseignement intensément et comprenaient de façon plus approfondie l’apprentissage du contenu de leurs
propres élèves.
La façon dont Shulman (1987) conceptualise la connaissance pédagogique de contenu (CPC) souligne
l’importance d’une sorte de connaissances spéciale qui s’intéresse à la manière dont les maîtres peuvent utiliser
un ensemble de connaissances sur l’enseignement pour aider les élèves à développer leur compréhension des
concepts mathématiques. Ball (2000) décrit la CPC comme :
un amalgame spécial de connaissances qui relient les contenus à la pédagogie comme la
connaissance de ce qui est typiquement difficile pour les élèves, les représentations qui sont les plus
utiles pour enseigner une idée ou une procédure spécifique, et les façons de développer une idée
particulière. (Ball, 2000 traduit de la page 245).
La CPC incorpore la capacité d’évaluer la pensée des élèves de façon à planifier des opportunités
d’apprentissage appropriées ainsi qu’à modifier, combiner et utiliser du matériel d’instruction pour développer la
compréhension des concepts (Darling-Hammond et al., 1999). Ball suggère qu’identifier les activités principales
de l’enseignement telles que faire ressortir ce que les élèves savent, choisir et gérer la représentation des idées,
décider différentes alternatives pour la suite des actions, et analyser les connaissances des sujets sont des
éléments essentiels à la connaissance des contenus pour enseigner les mathématiques. En même temps, les
développeurs de curriculum pour la formation des maîtres n’ont pas accordé suffisamment d’attention à la
relation entre la connaissance des contenus et la pédagogie de manière flexible et en tenant compte du
15
contexte de la pratique. Ball (2000) souligne que le défi auquel fait face la formation des maîtres est « comment
créer des opportunités d’apprentissage des matières qui rendraient les enseignants capables non seulement de
savoir mais aussi d’apprendre à utiliser ces savoirs dans les contextes variés de la pratique » (traduit de la page
246).
Le développement de la CPC chez les futurs maîtres de maths a connu des manquements dans plusieurs
systèmes de formation des maîtres en Afrique (Akyeampong, 2003). On s’aperçoit que le paradigme
behavioriste établi persiste aussi bien dans la conception des programmes que dans les classes et que ce que
les futurs enseignants devraient savoir est souvent réduit à un ensemble d’idées, de procédures et d’utilisation
de matériel d’instruction prescriptif (Lewin & Stuart, 2002). La recherche sur l’enseignement a démontré que les
futurs maîtres doivent être en mesure d’utiliser des compétences multiples et être très sensible au fait que la
tâche d’enseignement est très dépendante du contexte au lieu de se fier à des comportements et procédures
uniformes dans toutes les circonstances. La façon dont les maîtres enseignent et le contenu enseigné doivent
refléter les différences dans la manière dont les élèves comprennent le sujet (Darling-Hammond et al., 1999).
La recherche sur l’enseignement et sur la formation des maîtres suggère que les connaissances mathématiques
des maîtres et la formation qu’ils reçoivent jouent un rôle important dans la manière dont ils perçoivent et
rationnalisent leur compétence en enseignement (Ball, 1990; Hill & Ball, 2004). Si nous devons comprendre
pourquoi plusieurs enfants Africains dans les premières années du primaire ne réussissent pas à s’approprier les
connaissances de base en mathématiques, alors il est important de rechercher ce qui se passé dans
l’apprentissage de l’enseignement de cette matière, et comment cette apprentissage détermine ce que les futurs
enseignants savent et font lorsqu’ils commencent à enseigner. Comprendre ceci est un préalable nécessaire à
l’amélioration de l’efficacité des maîtres à enseigner les mathématiques de façon à ce que les élèves
comprennent la discipline.
1.4 Questions de Recherche
La recherche a abordé les questions suivantes:
1. Comment les programmes de formation initiale préparent-ils les élèves-maîtres à
l’enseignement de la lecture et des mathématiques dans les petites classes du primaire?
a. Quelles suppositions sur l’apprentissage de l’enseignement de la lecture et des mathématiques
peuvent être déduites de la structure et du contenu des programmes de formation des maîtres du
primaire et des manuels utilisés dans les écoles primaires?
b. Comment les programmes de formation des enseignants et leurs fondements théoriques
implicites et explicites sont-ils reliés au programme d’enseignement des écoles primaires en lecture
et en mathématiques?
2. Comment les élèves-maîtres développent-ils leur compréhension de l’enseignement de la
lecture et des mathématiques dans les petites classes du primaire?
Quel est le lien entre cette compréhension et les cours de formation et/ou l’expérience de stages
pratiques?
3. Comment les enseignants récemment qualifiés enseignent-ils la lecture et les
mathématiques au cours de leurs premières années d'enseignement?
a. Quel est le lien entre leurs pratiques et ce qui a été enseigné et appris lors de la formation
initiale?
b. Sur quels appuis comptent-ils pour améliorer leurs pratiques?
c. Quelle différence y a-t-il entre ce que la littérature de recherche nous apprend concernant
l’initiation à la lecture et aux mathématiques au primaire et ce que les enseignants débutants font
réellement en classe?
4. Quelles sont les caractéristiques des programmes de formation continue (PFC) centrés sur
les mathématiques et / ou la lecture, qui ont été mis en œuvre au cours des trois dernières
années?
16
Pour quels enseignants ces programmes ont-ils été conçus, et comment ces enseignants ont-ils
été sélectionnés?
5. Comment les maîtres qui ont suivi un programme de formation continue enseignent-ils la
lecture ou les mathématiques aux élèves du primaire?
a. Quels changements dans les pratiques des enseignants peuvent être liés à leur participation aux
programmes de formation continue?
6. Quelles compétences et aptitudes pédagogiques devrait-on intégrer dans les programmes
de formation des enseignants du primaire et lesquelles devraient être le point focal des
activités de leur formation continue?
7. Quel est la rentabilité des principaux programmes de formation initiale et continue centrés
sur les mathématiques et la lecture?
a. Quelle est la relation entre le coût unitaire par élève-maître et le niveau de compréhension
et d’application des pratiques souhaitées chez ces derniers?
8. Comment peut-on disséminer efficacement les connaissances et les aptitudes
professionnelles nécessaires à l’enseignement de la lecture et des mathématiques au sein
des principaux programmes de formation et auprès des enseignants débutants?
1.5 Conception et Méthode de Recherche
1.5.1 Base de Données et Méthodes
La recherche s’articule sur l’installation des compétences attendues des enseignants pendant leur préparation et
la comparaison avec celles qui sont effectivement démontrées à différent moments de leur formation et de leur
carrière. Nous conceptualisons la compétence en termes de connaissance, compréhension et pratique. La
pratique est centrale à un enseignement de qualité, mais la pratique aveugle ne suffit pas. La recherche sur
l’enseignement est en accord avec ce que disent les bons maîtres: une bonne pratique pédagogique ne peut pas
découler de l’application irréfléchie de techniques (Darling-Hammond, Wise & Klein 1999: Lewin & Stuart 2002;
Schwille & Dembélé 2007). Enseigner est un processus complexe qui requiert une multitude de connaissances.
Enseigner requiert une connaissance disciplinaire, c’est-à-dire les savoirs concernant la matière et les sujets à
enseigner; enseigner requiert aussi des connaissances pédagogiques, c’est-à-dire savoir comment interagir
avec les apprenants et gérer une salle de classe. Toutefois, comme Shulman (1987) l’a démontré le premier,
pour que ces deux types de connaissances informent la pratique enseignante, une troisième catégorie de
connaissances est nécessaire. Il s’agit des connaissances pédagogiques du contenu qui impliquent une
connaissance de la manière de représenter et formuler la matière à enseigner, et de la manière de la faire
comprendre aux élèves, dans le cas qui intéresse l’étude, ce sont les notions de base en mathématique et en
lecture. Le projet a par conséquent étudié les différents types de connaissances acquises pendant le processus
de la formation des enseignants et comment les maîtres les appliquent pour construire leurs pratiques en salle
de classe (Schwille et Dembélé 2007). Les points de comparaison sont résumés dans la Figure 1.2.
La méthode mixte a été utilisée pour recueillir les données. Un questionnaire a été préparé par l’Université de
Sussex pour collecter les données quantitatives sur les élèves-maîtres (enseignants en formation initiale) et sur
les enseignants récemment qualifiés (ERQ). Le questionnaire était pareil dans tous les pays, mais chaque
équipe de recherche a adapté le questionnaire au contexte national. Le questionnaire a été testé et validé par
les chercheurs locaux. D’autres outils de recherches, des guides d’interview et de focus group et des grilles
d’observations ont été développés par l’équipe nationale.
L’un des objectifs de l’enquête initiale était d’établir le type de compétences reliées à l’enseignement de la
lecture et des mathématiques que le programme de formation initiale des maîtres cherchait à développer chez
les élèves-maîtres. Cela a été réalisé grâce à une analyse de la documentation incluant l’analyse des buts et
objectifs des programmes, des standards attendus ainsi que par des entretiens avec les
organisateurs/responsables (rectangle bleu A, dans la Figure 1.2).
17
Le second groupe de données (rectangle vert B dans la Figure 1.2) cherchait à construire une image des
connaissances, compréhensions et pratiques des élèves-maîtres à la fin de leur formation. Une combinaison de
données quantitatives et qualitatives a été utilisée pour la développer. Les données qualitatives proviennent
d’entretiens de groupe et d’entretiens individuels approfondis faisant suite à l’observation de séquences
d’enseignement dans les EFI. Il peut s’avérer problématique de faire des inférences directement à partir des
observations de leçons. Cela n’est possible qu’à travers des observations fréquentes et réparties sur une longue
période de temps, une approche allant bien au-delà des moyens de ce projet de recherche. Par conséquent,
FICEA a utilisé les observations de leçons de mathématiques et de lecture en tant que données préliminaires
pour organiser des discussions de groupe avec un échantillon d’élèves-maîtres dans chaque EFI, après les
leçons de mathématiques et de lecture. L’échantillon a été sélectionné au hasard sur la base du volontariat de
façon à inclure, autant que possible les garçons et les filles. L’usage de la vidéo a permis de mieux cerner les
séquences qui ont été observées et a servi de base de discussion afin de faire ressortir les connaissances du
contenu, les connaissances pédagogiques du contenu et la compréhension de la pratique enseignante. Une
approche similaire a été suivie lors des entretiens avec les formateurs dont les sessions furent observées.
Les données quantitatives proviennent d’une enquête développée à partir d’un instrument ayant été utilisé avec
succès dans une étude antérieure (Akyeampong 2003) auprès d’élèves-maîtres en fin de formation (voir
annexe). Il a été administré à un échantillon d’élèves-maîtres provenant de quatre EFI situées en zones
urbaines et rurales. L’échantillon a inclus tous les élèves-maîtres des quatre EFI concernées. Au total, 835
questionnaires d’élèves-maîtres ont été analysés soit 457 hommes et 378 femmes (45 %). Le questionnaire
comprenait un groupe d’items communs à tous les pays mais il a été traduit et adapté de façon à ce que la forme
et la terminologie utilisée conviennent à la réalité sénégalaise.
18
Figure 1.2: Comparaisons des attentes et pratiques entre élèves-maîtres et ERQ
B Connaissances, compréhensions et
pratiques des élèves-maîtres à la fin de leur
formation
(Questionnaire; entretiens de groupe avec les
élèves-maîtres, observation de leçons suivies par
des entretiens avec les formateurs)
A Connaissances, compréhensions et
pratiques attendues des élèves-maîtres par
les programmes des EFI
(Analyse de documentation et entretiens avec le
personnel clé)
EFI: Relation entre attentes et
pratiques
C Connaissances, compréhensions et
pratiques des enseignants récemment
qualifiés (ERQ)
(Questionnaire; observation de leçons suivies par
des entretiens avec les ERQ)
PFC: Relation entre attentes et
pratiques
E Connaissances, compréhensions et
pratiques des enseignants qui ont suivi des
PFC
(Questionnaire; observation de leçons suivies
par des entretiens)
D Connaissances, compréhensions et
pratiques attendues des participants aux PFC
(Analyse de documentation et entretiens avec les
responsables de l’éducation)
Le questionnaire demandait des réponses relativement fermées et simples. Il comprenait une série de scénarios
auxquels on peut vraisemblablement faire face lorsque l’on enseigne dans l’une des classes des quatre
premières années du primaire. Les répondants devaient alors sélectionner les réponses décrivant le mieux la
méthode qu’ils utiliseraient pour enseigner un concept ou une aptitude particulière en lecture ou en
mathématiques. Ces réponses nous ont permis d’accéder aux connaissances pédagogiques du contenu des
élèves-maîtres ainsi qu’aux pratiques pédagogiques en lecture et en mathématiques qu’ils considèrent les plus
utiles.
L’âge moyen des élèves-maîtres se situe entre 21 et 30 ans (79% des élèves-maîtres). Les élèves-maîtres
peuvent être divisés en deux groupes: celui issu du concours d’admission à l’EFI (38% des effectifs) et ceux qui
sont cooptés à partir du ministère de l’éducation (sans passer par le concours) (62% des effectifs), appelés
« quota sécuritaire ». Le profil académique dans les deux groupes est très varié. La majorité des élèves-maîtres
ont le BFEM (53%), d’autres ont le BAC (32%), 13% ont eu une éducation universitaire et très peu ont des
diplômes dans des domaines techniques (2%).
Tableau 1.1: Répartition des élèves-maîtres dans les 4 EFI
REGIONS
Effectif
Pourcentage
19
EFI 1
213
25,51
EFI 2
184
22,04
EFI 3
231
27,66
EFI 4
207
24,79
Total
835
100
Tableau 1:2 Types de recrutements
Types de recrutements
Effectif
Pourcentage
Pourcentage cumulé
Concours
316
37,84
37,84
Quota
519
62,16
100
Total
835
100
Le niveau académique des élèves-maîtres issus du concours est plus élevé que celui du quota sécuritaire (plus
de 65.06% ont un niveau supérieur au BEFEM alors que pour le quota sécuritaire le taux est d’environ 36%). En
général, les élèves-maîtres n’ont pas eu d’expérience en matière d’enseignement avant de venir à l’EFI
(94.61%), seuls 5.39% ont un une expérience dans les écoles élémentaires privées, les écoles communautaires
de base ou le préscolaire.
Pour comprendre la mise en application de la formation initiale, les chercheurs ont collecté des données sur les
connaissances, les compréhensions et les pratiques des enseignants récemment qualifiés (ERQ) (rectangle
jaune C dans la Figure 1). Un échantillon d’écoles où travaillaient des enseignants dans leurs trois premières
années de carrière a été sélectionné. Dans chaque région, le questionnaire ciblait 50 enseignants récemment
qualifiés choisis au hasard parmi la cohorte des sortants des EFI durant les quatre dernières années. Dans
chaque région, 6 écoles ont été sélectionnées au hasard avec les critères suivants: avoir des ERQ qui
enseignaient dans une des 2 premières étapes et ayant suivi des programmes nationaux de formation continue.
Dans certaines régions les enseignants ont été observés sans préparation, par contre dans d’autres région,
l’inspecteur départemental a demandé à tous les enseignants ciblés de préparer une leçon de maths et de
lecture et les chercheurs ont choisi au hasard un enseignant.
Au total, 184 ERQ ont répondu à un questionnaire semblable à celui des élèves-maîtres soit 41 hommes (22%)
et 143 femmes (78%)3. Des leçons de mathématiques et de lecture données par 24 ERQ ont été observées et
capturées sur vidéo. Après avoir observé une leçon les chercheurs ont eu un entretien avec le maître en posant
des questions concernant des détails particuliers de ses pratiques, la séquence de la leçon, l’utilisation des
ressources, la progression pendant la leçon et vers la leçon suivante, ainsi que sur l’utilisation de la langue
d’instruction versus la langue maternelle ou locale. Cette forme d’entretien a été choisie afin de fournir une
meilleure compréhension de ce que les enseignants savent et peuvent faire plutôt que d’inférer à partir des
observations. Les entretiens ont été également enrichies par des données concernant les acquis des élèves
provenant des cahiers d’exercices, des registres d’évaluation et, lorsque cela fut possible, de discussions avec
les élèves. En outre, des entretiens ont été aussi conduits avec les directeurs des écoles ciblées sur le thème de
l’appui et de la gestion des enseignants récemment qualifiés, plus particulièrement en ce qui concerne la lecture
et les mathématiques.
La conception de cette recherche implique une approche similaire pour les programmes de formation
professionnelle et continue (PFC). Une étude préliminaire de ce qui était disponible au Sénégal a été réalisée
(rectangle rose D). Les programmes SARENA (lecture) et PREMST (mathématique) ainsi que le programme de
formation du Curriculum de l’Éducation de Base ont été étudiés et seront présentés dans les chapitres ultérieurs.
Le choix de ces programmes a été basé sur leur étendue, la clientèle ciblée et les sujets visés c'est-à-dire la
lecture et les mathématiques. Cette étude préliminaire a fourni un aperçu de ce que les programmes
souhaitaient atteindre. Pour bien mener la comparaison, le projet a examiné les données des ERQ ayant
récemment pris part à des programmes de formation professionnelle et continue (rectangle orange E dans la
Figure 1). En principe tous les enseignants, même les ERQ, sont obligés de participer à la formation continue
La disparité entre l’échantillon des ERQ (78% féminin) et des élèves-maîtres (45% féminin) est frappante et certaines
enseignantes ont montré une préférence pour les petites classes parce qu’elles se sentaient plus proches des enfants.
3
20
sous forme des cellules d’animation pédagogiques, organisées dans tous les départements. En réalité, 21 sur
184 ERQ de l’échantillon ont dit qu’ils n’avaient pas reçu de formation continue. Dans les départements où le
PREMST est actif, les cellules sont consacrées au programme PREMST. Dans les autres régions, les cellules
n’ont pas de programme commun et pour ces raisons, le projet n’a pas pu analyser leurs effets.
1.5.2 Résumé des données recueillies
Au total, le projet FICEA a recueilli des données à la fois qualitatives et quantitatives tel que présenté dans le
tableau 1 pour répondre aux différentes questions de recherche.
Tableau 1.3 Résume des données
1.
Questions de recherche
Sources des données
Types de données
Comment les programmes de formation initiale préparent-ils les élèves-maîtres à l’enseignement de la lecture
et des mathématiques dans les quatre premières années du primaire?
a. Quelles suppositions sur
l’apprentissage de l’enseignement
de la lecture et des mathématiques
peuvent être déduites de la structure
et du contenu des programmes de
formation des maîtres du primaire et
des manuels utilisés dans les écoles
primaires ?
Analyse documentaire
b. Comment les programmes de
formation des enseignants et leur
fondement théorique implicite et
explicite sont-ils reliés au
programme d’enseignement des
écoles primaires en lecture et en
mathématiques?
2. Comment les élèves-maîtres
développent-ils leur
compréhension de
l’enseignement de la lecture et
des mathématiques aux élèves
du primaire?
Analyse documentaire
3.
Guide de la formation initiale du
volontaire
Curriculum de l’Éducation d Base
Programme 79-11165
Guide de la formation initiale du
volontaire
Curriculum de l’Éducation d Base
Programme 79-11165
837 questionnaires recueillis – 835
questionnaires retenus
2 focus groups par EFI – soit 8 focus
groups
4 observations en mathématiques et 4
en lecture – 8 (2 dans chaque centre
de formation)
8 Interviews : entretiens approfondis
avec formateurs des 4 EFI en maths et
lecture
entretiens:
4 interviews de directeur EFI et 4
directeurs des études,
2 interviews de conseillers
pédagogiques Itinérants,
8 interviews d’inspecteurs
départementaux
Comment les enseignants récemment qualifiés enseignent-ils la lecture et les mathématiques dans leurs
premières années d'enseignement?
a. Quel est le lien entre leurs
pratiques et ce qui a été enseigné et
appris lors de la formation initiale?
Questionnaires et focus group des
élèves-maîtres
Observations des formateurs ;
interviews formateurs
Interviews staff EFI, Inspecteurs
d’académie et départementaux
Questionnaires et focus groups des
ERQ
Observations et interviews des ERQ ;
Focus groups des ERQ
21
Questionnaires: 170 ERQs et 14
enseignants expérimentés
26 entretiens avec directeurs écoles
24 observations suivies d’interviews :
dans les écoles dans 4 régions en
maths et lecture soit 48 observations
b. Sur quel appui comptent-ils pour
améliorer leurs pratiques?
Interviews ERQ
Focus group maîtres d’application
c. Quelle différence y-a-t-il entre ce
que la littérature de recherche nous
apprend concernant l’enseignement
de l’initiation à la lecture et aux
mathématiques au primaire et ce
que les enseignants débutants font
réellement en classe?
4. Quelles sont les
caractéristiques des
programmes de formation
continue, (PFC) centrés sur les
mathématiques et / ou la
lecture, qui ont été mises en
œuvre au cours des trois
dernières années?
Revue documentaire
5.
Comment les maîtres qui ont
suivi un programme de
formation continue enseignentils la lecture et les
mathématiques aux élèves du
primaire
Questionnaires ERQ
Quelles compétences et
aptitudes pédagogiques
devrait-on intégrer dans les
programmes de formation des
enseignants du primaire et
lesquelles devraient être le
point focal des activités de leur
formation continue?
Questionnaires
Quelle est la rentabilité des
principaux programmes de
formation initiale et continue
centrés sur les mathématiques
et la lecture?
Interviews
Comment peut-on disséminer
efficacement les connaissances
et les aptitudes
professionnelles nécessaires à
l’enseignement de la lecture et
des mathématiques au sein des
principaux programmes de
formation et auprès des
enseignants débutants?
Réunions
6.
7.
8.
Observations
Focus groups
Revue documentaire
Interviews
Observations de leçons suivies
d’interviews
Observations et interviews
Revue documentaire
ERQ (24 leçons de mathématiques et
24 de lecture)
3 focus group avec les maîtres
d’application et maîtres expérimentés
48 observations ERQ (24 leçons de
mathématiques et 24 de lecture)
3 Focus group avec les maîtres
d’application et maîtres expérimentés
48 observations ERQ (24 leçons de
mathématiques et 24 de lecture)
3 Focus group avec les maîtres
d’application et maîtres expérimentés
Documentation INEAD, Ministère de
l’éducation
3 Interviews de pôles régionaux de
formation (3), coordinateurs PREMST,
SARENA
153 questionnaires administrés
24 Observations et entretiens
approfondis
26 Entretiens avec les directeurs et
autres collègues
4 Entretiens avec les inspecteurs
d’académie
8 Entretiens avec les IDEN
3 Entretiens avec les Pôles Régionaux
de Formation
Questionnaires: 170 ERQs et 14
Enseignants expérimentés
Observations suivies d’interviews : 24
écoles dans 4 régions, 48 observations
ERQ (24 leçons de mathématiques et
24 de lecture)
2 Focus group avec les maîtres
expérimentés
3 Focus groups avec les maîtres
d’application
Interviews 4 Directeurs EFI,
Coordination de la Formation initiale et
continuée
Documents relatifs aux politiques
2 Réunions du groupe national de
référence
22
La collecte de données a eu lieu entre les mois de mars et mai 2010. L'équipe de recherche au Sénégal a choisi
4 régions où il y avait déjà des programmes nationaux de formation continue en lecture et mathématiques. Les
chercheurs ont choisi deux parmi les trois régions où le programme national de formation continue en
mathématiques était mis en application : Thiès et Fatick. En lecture, le projet a choisi 2 parmi les trois régions où
la SARENA (programme national sur la stratégie de lecture) était implanté : Dakar et Fatick. Dans chaque
région, le questionnaire a été administré à 50 enseignants nouvellement qualifiés choisis de manière aléatoire
parmi les 4 dernières cohortes des volontaires de l'éducation. Le questionnaire contenait des informations sur la
formation continue aussi bien que sur la formation initiale. Dans chaque région, 6 écoles ont été choisies de
manière aléatoire avec les critères suivants : avoir des enseignants récemment qualifiés qui tiennent des classes
dans l’une des 4 premières années de l’élémentaire, et avoir été dans un programme national de formation
continue. Par exemple, à Tivaouane, l’inspecteur départemental a demandé tous les enseignants récemment
qualifiés, enseignant dans l’une des 4 premières années de l’élémentaire, de préparer une leçon en
mathématiques ou en lecture pour la présenter à l'équipe du projet de recherche FICEA. Dans toutes les
régions, l’équipe a suivi le même schéma de collecte. Tous les questionnaires ont été structurés et les
chercheurs ont suivi un guide d'entretien, sauf pour les entretiens qui ont suivi les observations de salle de
classe.
Les focus groups ont été conduits autour d’un guide d’entretien préconçu (voir annexe). Pour les élèves-maîtres,
ils concernaient environ 10 à 15 personnes, pour les maîtres d’application en moyenne 5 personnes. En
moyenne, dans chaque région, 21 entretiens et deux focus groups ont été conduits et transcrits. En raison de la
courte durée de la collecte des données dans les quatre régions, les chercheurs ont strictement veillé à la
collecte de toutes les données avant la fin de l'année scolaire. Ainsi, les notes analytiques ont été écrites à la fin
de la collecte de toutes les données, utilisant un cadre analytique qui a été par la suite utilisé pour le logiciel
Nvivo.
1.5.3 Analyse des Données
L’analyse a essayé de regrouper tout ce que les chercheurs ont appris sur le terrain afin de mieux répondre aux
questions de recherches. En ce qui concerne les données qualitatives, les entretiens approfondis et les
entretiens de groupe ont été transcrits et importés dans le logiciel d’analyse qualitative Nvivo 8 ainsi que d’autres
sources de données textuelles telles que les notes d’observation et autres écrits recueillis. Les données furent
codées et regroupées à l’aide d’un système de catégorisations hiérarchiques au cœur duquel on retrouvait les
connaissances, compréhensions et pratiques. D’autres catégories qui ont émergé ont été codées (encadrement
pédagogique, motivation des formateurs, niveau des élèves, et recommandations). Ce système a permis
d’identifier des similarités et différences dans les types de comportements et de réponses et a facilité la
recherche d’information par requêtes. Des mémos analytiques ont été rédigés et intégrées dans Nvivo
Les données quantitatives ont été analysées à l’aide du logiciel STATA. Cela a permis au projet de travailler
avec une base de données très vaste et de produire des tableaux et graphiques utiles à l’interprétation des
réponses aux questionnaires.
L’analyse des différentes bases de données représentées par les rectangles de couleur dans la Figure 1 a
permis au projet de répondre aux questions de recherche en construisant une description détaillée des
connaissances, compréhensions et pratiques des enseignants au cours des différentes étapes de leur
préparation et en utilisant ces dernières comme base de comparaison entre ce qui se passe sur le terrain et ce
qui est attendu des maîtres
1.6 Défis et Limites de l’Étude
Les principaux défis rencontrés sont de deux ordres. D’abord, les difficultés reliées au calendrier scolaire, à la
séquence des activités de recherche et aux déplacements. En effet, afin de pouvoir visiter les EFI avant leur
fermeture, l’équipe sénégalaise a dû se rendre sur le terrain plus tôt que les équipes des autres pays ce qui a
réduit le temps de préparation et de raffinement des outils et des méthodes. Qui plus est, l’étendue du pays,
l’état des routes et les difficultés reliées au transport ont empêché l’accès aux écoles situées dans les zones les
plus éloignées. Ces difficultés ont aussi limité le temps disponible à chaque école pour recueillir les données.
23
Aussi l’échantillon des maîtres qui avaient suivi les programmes de formation continue, surtout la formation
SARENA, était plus petit que nous aurions désiré.
Un autre défi est que malgré le fait que les chercheurs aient expliqué que la recherche n’avait pas un but de
contrôle, certains enseignants n’étaient pas à l’aise. Ils ont présenté leurs leçons comme un examen
professionnel. Ils ont essayé de montrer leurs connaissances dans le domaine et ne se sont pas toujours
focalisés sur les objectifs d’enseignement de la leçon.
24
Chapitre 2 : Les programmes de formation de maîtres et les
programmes scolaires
Pour augmenter l’offre d’éducation, le Sénégal a décidé en 1995 d’adopter une politique de recrutement de
volontaires de l’éducation après une courte formation de quelques semaines. Depuis 2000, la formation se fait
dans les 11 écoles de formation d'instituteurs, dont une dans chaque région. Les EFI sont des centres
polyvalents de formation pédagogique théorique et pratique. En principe, les EFI forment en un an des élèvesmaîtres avec un niveau académique minimum du brevet de fin d'études moyennes (BFEM correspond à 10
années d’études). L’objectif de la formation initiale est de permettre aux sortants de tenir une classe d’éducation
préscolaire ou élémentaire. Le concours d’entrée à l’EFI comporte une série d’épreuves écrites dans les
domaines suivants:
- le français – portant sur un sujet d’ordre général visant à évaluer la cohérence de la pensée et l’aptitude
à l’expression écrite;
- les mathématiques – destinée à évaluer l’aptitude des candidats à calculer et à raisonner ;
- la dictée et les questions pour vérifier le degré de maîtrise de l’orthographe et de la grammaire ;
- l’étude du milieu – histoire ou géographie ou sciences naturelles – permettant d’évaluer la
compréhension de l’environnement (Décret 95-227 modifiant le décret 93530 portant sur les conditions
de recrutement).
A l’examen de sortie, les stagiaires sont évalués sur les épreuves suivantes: épreuve écrite de pédagogie,
soutenance du cahier de stage, questions orales de législation, et la critique de cahiers4.
Parallèlement au concours, d’autres élèves-maîtres sont recrutés sur la base de leur dossier, sans concours ;
c’est un « Quota sécuritaire » qui vient s’ajouter au quota qui a passé le concours (appelé « Quota IDEN »). Les
sortants sont tous appelés volontaires de l’éducation (VE). Il faut noter la décision ministérielle de supprimer le
quota sécuritaire à partir de l’année scolaire 2010-11.
Les structures de formation initiale relèvent de l’autorité de la Direction de l’Enseignement Élémentaire (DEE) et
sont coordonnées techniquement par le service de la Coordination Nationale de la Formation Initiale et Continue
(CNFIC)5 qui est rattachée à la DEE.
La formation à l’EFI est en principe une formation en alternance entre la théorie et la pratique selon les modalités
suivantes: démarrage de la formation en octobre, alternance théorie pratique jusqu’en avril (avec deux stages
pratiques dans les écoles d’application), mise en position de stage de responsabilité entière au niveau d’une
école de l’IDEN d’attache durant le mois de mai, et organisation de l’évaluation sommative, dans chaque EFI, au
mois de juin. Il faut noter que selon nos données, les cours démarrent dans la réalité en janvier pour se terminer
en juin-juillet.
La formation continue complète le dispositif de la formation initiale. En effet, le guide de formation initiale des
volontaires de l’éducation (le Guide) préconise que la formation continue joue un rôle important dans l’acquisition
des connaissances des enseignants. Le Guide prévoit l’autoformation et la formation continue comme
mécanismes pour compléter le dispositif pour générer des connaissances disciplinaires.
4
5
http://www.volontaires.sn/index.php?option=com_content&task=view&id=22&Itemid=38
La CENFIC a disparu en 2010 et est absorbée par la Direction de la Formation et de la Communication
25
Les résultats ainsi obtenus feront de nos élèves-maîtres des agents de développement
accomplis faisant montre de professionnalisme, de capacités communicationnelles avec tous les
partenaires de l’école et d’aptitude à l’autoformation renforcée par la formation continuée. (Guide
p.5).
Le programme de l’EFI envisage l’implication de l'inspection départementale de l'enseignement (IDEN) et du
Pôle Régional de Formation (PRF), qui sont également chargés de la formation continue, pour mieux intégrer les
préoccupations des enseignants dans la formation initiale. Les leçons apprises à ce niveau enrichiront donc les
formations initiales.
Il est aussi prévu un échange d’informations sur les stagiaires en cours de formation et ou en
activité ; et l’intégration de l’EFI au plan académique de formation. (Guide p. 5).
Le programme de formation continue est mis en œuvre à travers les programmes nationaux : le curriculum de
l’éducation de base, qui est en voie de généralisation, le PREMST en maths et en sciences et la SARENA en
lecture. Il faut noter que les programmes nationaux du curriculum de base et du projet PREMST ont été les
programmes les plus suivis au cours des deux dernières années. Les cellules d’animation pédagogiques (CAP)
complètent le dispositif de la formation continue. En effet, les CAP sont de deux ordres : les cellules internes qui
existent au niveau de chaque école et les cellules externes qui sont implantées au niveau des zones
pédagogiques. Ainsi, les enseignants, en relation avec les directeurs d’école, peuvent identifier les besoins de
formation continue, réfléchir sur les modules, les développer et les mettre en œuvre. L’IDEN appuie les CAP en
octroyant des moyens financiers et en envoyant les inspecteurs lors des sessions d’animation pédagogique pour
superviser (Interview IDEN Région 4).
L’Inspection d’académie (IA) coordonne la formation continue au niveau de la région et centralise les moyens et
les octroie en fonction des besoins exprimés. Les IA informent les IDEN sur les moyens disponibles et sur les
priorités nationales (Interviews IDEN Région 4). Les IDEN préparent et envoient aux IA les plans d’action qui
concernent toutes les écoles. Comme tous les enseignants doivent y participer, les cellules constituent un
programme national. Cependant, étant donné que le contenu et la méthodologie des séances d’animation
pédagogique sont déterminés au niveau local; le CAP ne peut pas être un « programme » en tant que tel. En
outre, selon plusieurs de nos informateurs la fréquentation des cellules n’est pas très régulière. Selon le chef de
division de la CNFIC, la plupart des séances des CAP ont porté sur la lecture et les maths, ce qui montre
l’ampleur des besoins de formation des enseignants dans ces matières. En outre, les conseillers pédagogiques
renforcent cette formation à travers l’appui conseil individuel aux enseignants.
2.1. Le Programme de formation initiale et ses relations au curriculum scolaire
Le programme de formation initiale dans les EFI se base sur le Guide de Formation Initiale des Volontaires de
l’Education (« le Guide »). Le document a été a élaboré en Janvier 2008 par la Coordination Nationale de la
Formation Initiale et Continuée (CNFIC) en collaboration avec la Direction du Projet des Volontaires de
l’Education (DPVE), sous la direction de la DEE. Son objectif principal est de mettre à la disposition des EFI un
document uniforme de référence pour les formateurs. En outre, il cherche à renforcer la qualité de la formation
des élèves-maîtres à travers un programme pédagogique harmonisé. Il a pour fonctions : d’intégrer les
nouveaux formateurs ; de favoriser la communication entre les formateurs d’une même équipe à l’échelle
nationale ; et de fournir des supports pour élaborer et mettre en œuvre les plans de cours.
Le Guide est cohérent dans la présentation des buts, objectifs et résultats. L’acquisition de compétences de
base est perçue comme étant le principal objectif et la finalité de la formation. Les objectifs de formation
accordent la priorité à des aptitudes transférables en formation professionnelle comme en formation générale.
Ces aptitudes doivent nécessairement être corrélées aux compétences pour permettre la résolution conséquente
des problèmes d’éducation.
En se basant sur une analyse du contenu du guide, on peut déduire que les connaissances des élèves-maîtres
se construisent à partir de celles des inspecteurs dans la mesure où le Guide définit les compétences à acquérir,
mais ne donne pas le contenu d’apprentissage des élèves-maîtres. Il est supposé que leurs connaissances,
compréhensions et pratiques seront construites à partir des connaissances des formateurs, des ressources
26
disponibles (cours théoriques, micro enseignement, travaux pratiques, Internet) et de la pratique dans les écoles
d’application (observations des maîtres d’application).
Le Guide se focalise sur les six compétences de base et le profil de sortie des élèves-maîtres, et laisse le soin
aux formateurs de dérouler leurs plans de cours.
Tableau 2.2 : Socle minimal de compétences de base
CB1 : Elaborer une planification pédagogique pour une durée déterminée à partir des programmes
en vigueur
CB2 : Construire une séquence d’enseignement – apprentissage
CB3 : Mettre en œuvre une séquence d’enseignement – apprentissage
CB4 : Elaborer un projet d’école
CB5 : Gérer une classe bilingue (langues nationales / français)
CB6 : Gérer la classe et l’école conformément aux textes en vigueur
Source : Guide p.7
La description des compétences reste générale, tant au plan théorique que dans le cadre pratique. Trois des
compétences sont liées directement à l’enseignement/apprentissage des disciplines, mais il faut noter que le
Guide ne mentionne ni le contenu ni la démarche pour l’enseignement de la lecture et des mathématiques. Ainsi,
il est supposé que les compétences pratiques pour enseigner la lecture et les mathématiques seront proposées
dans les cours de français et de mathématiques par les formateurs de l’EFI. Il est supposé que les formateurs
connaissent et maîtrisent le contenu et seront en mesure de produire des plans de cours.
En principe, le contenu doit être à l’image du curriculum de l’éducation de base (CEB); cependant le contenu du
CEB n’est pas effectivement articulé à celui du Guide tel que mentionné ci-dessous.
Dans ses finalités comme dans sa conception, le référentiel de compétences est articulé au
curriculum de l’éducation de base pour mieux répondre aux exigences et aux attentes du système.
Dans cette nouvelle optique, les EFI constituent des structures essentielles de formation, de
production, d’expérimentation, de recherche et de pérennisation de tous les programmes. (Guide
p. 5)
Le programme du décret de 1979, nommé le « 79-1165 » est le document de référence de l’enseignement
élémentaire. Il a permis de rédiger tous les programmes qui lui ont donné un contenu plus détaillé,
notamment: Le programme des classes pilotes (1987); le programme « progressions harmonisées » qui a été
conçu en1990 et le curriculum de l’éducation de base (CEB) consigné dans des « guides pédagogiques » : Le
CEB comporte deux étapes: l’étape 1 (classes de CI et CP) et l’étape 2 (CE1 et CE2). Il est entré en vigueur en
2009-2010 dans les classes de CI et CE 1. Le gouvernement a ajouté les classes CP et CE2 en 2010-2011 et la
généralisation totale dans le cycle élémentaire complet est prévue en 2012-13. Depuis 2009, tous les maîtres
des classes du CI et CE1 devraient avoir reçu la formation, et celles-ci sont appelées « classes curriculaires ».
Cela veut dire que tous les élèves-maîtres en formation pendant 2009-10 devront tenir une classe curriculaire
dès qu’ils entreront en service.
Tous ces programmes sont utilisés de manière implicite pour la formation initiale des futurs maîtres par les
formateurs mais ne figurent pas de manière explicite dans le Guide. L’analyse du guide de formation initiale en
relation avec les manuels scolaires a montré que Le Guide n’est pas articulé aux manuels scolaires. Il ne
mentionne aucun manuel scolaire, aucun niveau, ni aucun programme scolaire, mais fait référence au nouveau
curriculum (CEB). Il constitue un guide de référence pour les formateurs qui ont en charge la création de
contenu. Le lien entre le programme des EFI et les manuels scolaires est implicite, car le Guide définit le cadre
général et suggère aux formateurs d’utiliser le CEB.
« Dans ses finalités comme dans sa conception, le référentiel de compétences est articulé au
curriculum de l’école de base pour mieux répondre aux exigences et aux attentes du système »
(Guide p. 4).
27
De plus, malgré la volonté du Ministère de l’Education de généraliser le CEB en 2013, il n’est pas inclus dans les
principaux modules de formation des EFI.
Le programme enseigné semble éloigné du curriculum de base. On a du mal à dérouler le
curriculum de base alors que les élèves-maîtres devraient être préparés. Il faut une intégration
effective du curriculum dans la formation initiale pour une généralisation du curriculum. Le 79
1165 est une référence didactique (Interview Directeur EFI 2)
Est-ce que le curriculum est enseigné à l’EFI dans sa partie lecture pour prendre en charge cette
exigence pour les futurs maîtres de pouvoir enseigner dans cette perspective ? C’est là où le bât
blesse. … On se contente de donner des informations sur le curriculum, mais il n’y a pas de
temps, pour ce faire. (Interview formateur EFI 2)
Le Guide prévoit 3 types d’évaluation : une évaluation diagnostique, une évaluation formative et une évaluation
sommative.
L’évaluation diagnostique : Elle sert à identifier les besoins de formation en rapport avec les
compétences à installer. Elle a une fonction d’orientation de la formation.
L’évaluation formative : Elle permet d’établir le degré de maîtrise de compétence en précisant les
difficultés rencontrées par l’élève-maître à des fins de remédiation. Elle permet la régulation des
enseignements / apprentissages.
L’évaluation sommative : Chaque formateur appréciera le résultat de l’élève-maître à partir d’un seuil de
performance défini grâce à un encadrement rapproché.
2.2 La Lecture dans la formation initiale
La présentation de la lecture dans le programme de l’EFI à travers le Guide, indique le tableau de construction
d’une séquence d’enseignement apprentissage. Dans la colonne des « contenus associés » on retrouve l’étude
de la didactique des disciplines à côté de celle des pédagogies de l’intégration et des techniques de pédagogie
active. Cette didactique des disciplines est encore présente dans la colonne « Disciplines » du tableau déclinant
la mise en œuvre d’une séquence d’enseignement apprentissage. C’est ce qui est exposé, mais la démarche
n’est pas indiquée.
Tableau 2.5 : Enseignement de la lecture des langues nationales
Paliers de compétence
Objectifs d’apprentissage
Contenus associés
Maîtriser la
comparaison d’une
langue nationale avec
le français
-
OA 1 : Lire et écrire une
langue nationale
Alphabets
Règles de lecture et d’écriture
des mots
OA 2 : Comparer la
phonétique d’une langue
nationale avec celle du
français
Sons, graphèmes règles de
combinaison des
sons/phonèmes ;
Les interférences ;
Notions de
- Phonétique articulatoire
- Phonétique corrective
La phrase et ses
constituants ; syntagme
nominal, syntagme verbal
OA 3 : Comparer la
morphologie d’une langue
nationale avec celle du
français
Disciplines/Activités
d’accueil
Linguistique et Didactique
des langues
Source : Guide p. 12
Tel que présenté, des relations implicites existent entre le programme de formation initiale et le programme de
l’enseignement élémentaire. Le Guide ne décline pas de manière explicite le programme de lecture. Le
rédacteur est plus préoccupé par la gestion d’une classe bilingue. C’est dans le cadre de la compétence gestion
d’une classe bilingue que le Guide décline le contenu propre à cette classe bilingue. Il faut noter que la classe
bilingue est une classe où cohabitent l’apprentissage du français (langue officielle d’enseignement) et celui d’une
28
langue nationale parmi les 6 retenues. Ce n’est que de manière subsidiaire qu’on décline la compétence qui
n’est pas propre à la lecture.
Pour la compétence de base, « Gérer une classe bilingue » on retrouve dans la colonne « contenus associés »,
pour l’objectif d’apprentissage (OA) 1 : l’étude des alphabets, les règles de lecture et d’écriture des mots ; pour
l’OA2, l’étude des sons, graphèmes, règles de combinaison des sons/phonèmes, les interférences, les notions
de phonétique articulatoire et de phonétique corrective ; pour l’OA3, l’étude des phrases et ses constituants, du
syntagme nominal et du syntagme verbal.
Du reste, le Guide indique en nota bene :
« NB : En attendant que la formation des formateurs soit effective, la compétence de base se
limitera à l’objectif d’apprentissage lire et écrire une langue nationale. » (Guide p.12).
En sommaire, il existe un écart entre le programme de formation de l’EFI et les programmes scolaires. La nonarticulation des deux contenus rompt la cohérence dans l’enseignement de cette discipline. En ne prescrivant
que des compétences très générales et en laissant ouverts le contenu et l'approche pédagogique de lecture, le
Guide semble tenir ces derniers pour acquis. Par conséquent, l'acquisition de la connaissance pédagogique du
contenu qui rassemble à la fois le contenu et la pédagogie est considérée sans problème. Le seul lien explicite
se retrouve dans la gestion de la classe bilingue où les contenus sont déclinés.
2.3. La lecture dans les programmes scolaires
Le programme 79-1165, en vigueur avant le CEB, n’aborde pas le contenu de la discipline de lecture pour la
première étape (CI-CP -1re et 2me année). Pour la deuxième étape (CE1 et CE2, 3 me et 4me année), des
indications de contenus ont été évoquées et elles se résument à ceci :
Pour le CE1, tout ce qui est lu doit être compris et exprimé de façon intelligible.
Le but essentiel est l’acquisition d’une lecture vivante, naturelle et rapide. Tous les exercices
seront précédés d’une lecture silencieuse personnelle contrôlée par des questions qui devront
permettre la compréhension du texte et motiver la lecture à voix haute.
Les exercices devront porter sur des textes soigneusement choisis ou composés faciles à
comprendre, permettant souvent une lecture dialoguée et se rapportant à l’expérience
personnelle et au milieu de l’enfant.
(Décret 79 1165 portant organisation de l’enseignement élémentaire, p.19-20)
Le programme de lecture pour le CE2 porte sur les éléments suivants :
Quatre textes écrits dans une langue simple et claire autour de sujets susceptibles de stimuler chez
l’enfant la réflexion et le besoin de s’exprimer.
Un texte hebdomadaire de lecture récréative emprunté à un bon auteur.
Lecture silencieuse suivie de questions d’intelligence.
Explication de mots dont la connaissance peut favoriser la compréhension du texte.
Lecture dialoguée chaque fois qu’il est possible de le faire.
Interprétation de l’image qu’illustre le texte.
Lecture à haute voix, courante et naturelle.
Lecture par le maître de textes récréatifs.
Ces lectures donneront lieu à des comptes rendus, à des résumés de textes, à des rédactions portant
sur l’étude des personnages et le dénouement de l’histoire. Une bibliothèque de classe sera constituée
en vue de faire naître et de développer chez l’enfant le goût de la lecture.
(Décret 79-1165 portant organisation de l’enseignement élémentaire, p.31)
Selon ce programme du Décret 79-1165, à la fin de la quatrième année, l’élève doit pouvoir lire un texte simple,
le comprendre, et s’exprimer en français.
Le CEB décline de manière explicite les contenus de l’enseignement de la lecture, dans les deux étapes, en
partant pour chaque étape des compétences de base déclinées en paliers. Chaque palier articule les différentes
activités requises pour installer progressivement la compétence de base, à travers des apprentissages
ponctuels. Ceux-ci sont eux-mêmes déclinés en objectifs d’apprentissage (OA), objectifs spécifiques (OS) et en
29
contenus. Tout ceci permettant de rendre opérationnel l’enseignement de la lecture, selon une planification
maîtrisée.
Mais le CEB n’est pas seulement une liste de contenus, ni seulement un référentiel de compétences ; il est aussi
un curriculum qui spécifie une approche pédagogique fondée sur le principe de l’entrée par les compétences. Le
Guide pédagogique du CEB définie sa « pédagogie de l’intégration »
La pédagogie de l’intégration repose sur la mise en place d’un processus d’apprentissage qui ne
se contente pas de cumuler des connaissances et savoir-faire, mais qui apprend à mobiliser
dans un contexte social, éthique, moral etc. pour résoudre des situations problèmes qui ont du
sens pour l’élève.
(Guide pédagogique Etape 1 p. 14)
L’apprentissage est donc basé sur la résolution des problèmes dans des situations spécifiques. L’enseignant doit
créer une « situation d’entrée » qui pose le problème et mène à une « situation-problème didactique » ou
« situation d’apprentissage » où les élèves font des activités pour résoudre le problème, ce qui requiert des
connaissances qui sont l’objet de l’apprentissage ponctuel. Le maître enseigne les connaissances ciblées et
guide les enfants dans la résolution du problème. A la fin d’une série d’apprentissages ponctuels, l’enseignant
crée une « situation d’intégration » où les élèves peuvent intégrer les connaissances en essayant de résoudre
un nouveau problème. La situation d’intégration peut aussi servir comme situation d’évaluation : l’enseignant
observe et marque l’existence ou l’absence d’indicateurs des acquis ciblés chez chaque élève.
En plus, le CEB donne des informations didactiques sur la discipline, indique des démarches pour la leçon de
lecture pour chaque étape et propose des outils d’évaluation des apprentissages et de la compétence de base
ciblée. Le CEB définit la compétence comme : « la capacité que manifeste un élève, en situation de classe ou
ailleurs, de mobiliser et d’intégrer un ensemble, suffisant à un moment donné, de savoirs, de savoir-faire et de
savoir-être pour résoudre une situation problème nouvelle, familière et significative. » (Guide pédagogique, p.13)
En guise d’illustration le tableau 2.3 présente les contenus des deux étapes :
A titre d’exemple de déclinaison d’une compétence de base en lecture au CI et de planification des
apprentissages, le CEB indique comme compétence de base en lecture au CI-CP ce qui suit :
Intégrer les indices significatifs (syntaxiques, typographiques) et les mécanismes de base
(encodage/décodage) dans des situations de lecture de textes narratifs, descriptifs, informatifs et
injonctifs. (Guide pédagogique Etape1 p.64)
Tableau 2.3 Contenu de la première étape en lecture
Semaine Lecture CI
2-9
Acquisition globale :
bonjour, bonsoir, monsieur, madame ; Comment ça va, papa, maman ; Prénoms et noms des
élèves ; J’habite/tu habites, classe, cour, école ; voici/voilà, garçon/fille, frère/sœur, élève ;
c’est, livre, ardoise, craie, tableau ; au revoir, à demain, se lève, sort ; merci, sur/sous,
devant/derrière, la porte, la table
9
INTEGRATION (2 ou 3 jours)
10- 12
Lire des récits : + son a ; + son o ; + son t
13-15
16-17
17
18-20
21-23
24
1
2
Lire des contes : + son i ; + son l ; +son n
Lire des BD : + son e ; + sons p et d
INTEGRATION (2 ou 3 jours)
Lire consignes pour agir : + sons m et b, + sons f et u, + son ou
Lire des textes pour fabriquer + sons é, è, ê, et = é ; ai = ei = ê ; + sons s et r ; + sons au = eau = o
; on = om
INTEGRATION (2 ou 3 jours)
Lecture CP
Lire un texte narratif pour illustrer v, w, oi
Lire à haute voix un texte narratif + sons ch, é, es, er, ez ;
30
3-4
5-6
Lire des textes narratifs (récit, conte, BD) pour le raconter c, q, qu, k ; f, ph, / e = eu = oeu
Lire des textes narratifs (récit, conte, BD) pour répondre à des questions ss=c = ç = s ; s=z ; g, gu,
j, g ; Lire à haute voix un texte narratif gn, in, ain, ein
7
Lire une consigne pour exécuter une tâche tr, pr, dr, br, fr, cr, gr
8
Lire à haute voix une consigne pour faire exécuter une tâche +ac, oir, eur
9
Lire un texte pour réaliser quelque chose fl, pl, gl, bl, cl
10
Lire à haute voix un texte pour faire réaliser quelque chose er, el, ec, es
11
INTEGRATION
12
Lire une note pour répondre à une sollicitation ette, erre, esse, elle, enne
13
Lire une affiche pour se rendre à un événement ail, aille, euil, euille
14-15
Lire des cartes d’invitation pour se rendre à une cérémonie eil, eille, ouille, il, ill, i, y h, x
16
Lire à haute voix un texte informatif ier, ié, ied, iez
17
INTEGRATION
18
Donner l’information principale ien, oin, ion
19
Donner les différentes étapes de l’histoire ui, ieu, iau
20
Exécuter la tâche demandée sc, st, sp
21
Donner des renseignements à partir d’un texte lu ay, oy, uy
22
Donner des renseignements à partir d’un texte lu
23
Lire un texte pour donner des informations
24
Lire un texte pour faire exécuter une tâche Lire un texte pour raconter une histoire
25
Tenir sa place dans une lecture dialoguée préparée.
26
INTEGRATION/EVALUATION
Source : Guide pédagogique Etape 1, p.34-37
Ensuite, le CEB propose la planification des apprentissages pour le CI et ensuite pour le CP et celle-ci est
présentée palier après palier. A titre d’exemple, le palier 2 indique le niveau intermédiaire de la compétence à
installer :
Intégrer les indices significatifs (syntaxiques, typographiques) et les mécanismes de base
(encodage/décodage) dans des situations de lecture de textes narratifs
(Guide pédagogique Etape 1 p.66).
Après la présentation du palier 2, suit la planification des apprentissages ponctuels :
Tableau 2.4 : planification des apprentissages
Objectif d’apprentissage (OA)
Lire des récits
Lire des contes
Lire des bandes dessinées
(BD)
Objectifs spécifiques (OS)
Lire des récits pour comprendre
Etablir les correspondances phonèmes /graphèmes
(sons, syllabes, mots)
Lire à voix haute un récit - copier les lettres étudiées
(graphisme/écriture) – copier un récit (ou court
passage)
Lire des contes pour comprendre
Etablir les correspondances phonèmes /graphèmes
(sons, syllabes, mots)
Lire à voix haute un conte - copier les lettres étudiées
(graphisme/écriture) – copier un récit (ou court
passage)
Lire des BD pour comprendre
Etablir les correspondances phonèmes /graphèmes
(sons, syllabes, mots)
Lire à voix haute une BD - copier les lettres étudiées
(graphisme/écriture) – copier un récit (ou court
passage)
Contenus
Petits récits
Un son par semaine :
a, o, t
Petits contes
Un son par semaine :
i, l, n
Bandes dessinées
Un son par semaine :
e, p, d
Pour l’étape 2, la démarche est identique : les contenus sont planifiés selon le même schéma. Dans la démarche
du CEB, il est noté que la compréhension apparaît dans tous les objectifs d’apprentissage et que même si le
31
contenu est un son, l’élève doit l’acquérir en situation de lecture globale. Il faut remarquer aussi que les élèves
doivent apprendre à lire leurs premiers mots par acquisition globale et ils ne sont initiés à la décomposition /
composition qu’après la dixième semaine.
2.4. Les mathématiques dans la formation Initiale
En dehors de la spécification du nombre d’heures de cours, le Guide ne donne pas d’indication sur le
programme de mathématiques; le programme n’est pas pris en compte de manière spécifique et a pour objectif
de développer les six compétences de base nécessaires pour conduire correctement les différents types de
classes. En ce qui concerne les aptitudes ou compétences à développer, le programme de l’EFI vise plutôt la
maîtrise de la planification des apprentissages, l’élaboration et la mise en œuvre d’une situation d’enseignement
apprentissage (SEA). L’élaboration des séquences d’enseignement apprentissage est explicitement mentionnée,
mais la démarche ne figure pas dans le Guide. On peut noter du tableau 2.5, qui compare le programme de l’EFI
à ceux des écoles, que les différents programmes sont complémentaires. Le nouveau programme du CEB
fournit les détails sur le contenu en mathématiques et sur l’approche pédagogique préconisée. Néanmoins, il
n’existe pas de relation explicite entre le programme des EFI et les programmes scolaires. De plus, le Guide ne
comporte pas de module sur l’utilisation des manuels scolaires. Le rôle des manuels étant de traduire le
programme scolaire, comme il n’existe pas de liens explicites entre le programme scolaire et le Guide, il n’existe
pas en conséquence de lien entre les manuels scolaires et le Guide. Comme avec la lecture, le Guide ne prescrit
pas le contenu ni l'approche pédagogique des mathématiques. Pour cela, il ouvre la porte au hasard en ce qui
concerne la connaissance pédagogique du contenu des mathématiques.
Tableau 2.5 : Comparaison entre programme EFI et Programmes scolaires
Objectif
Cibles
Contenus
Aptitudes ou
compétences
développées
Elaboration
séquence
apprentissage
Programme de formation initiale
des futurs maîtres
Développer chez les futurs maîtres
les six compétences de base
nécessaires pour conduire
correctement une classe (Objectif
générique – voir référentiel de
compétence des EFI).
Futurs maîtres
Purement professionnels :
les connaissances disciplinaires ne
sont pas élaborées.
Aptitudes génériques :
Planifier des activités ;
Elaborer une SEA ;
Mettre en œuvre une SEA.
-
Pour le curriculum il faut ajouter : la construction et l’exploitation de
Situation Significative
d’Intégration (SSI); l’évaluation de lacompétence et la remédiation.
Pas de référence dans le Guide
Programmes scolaires
(79- 1165)
Développer chez les élèves
des aptitudes et des
capacités leur permettant de
résoudre des situations de
vie courante.
Élèves
Connaissances théoriques
et pratiques : spécification
générale, par exemple :
« Étude des nombres de 1 à
100 ; formation concrète,
composition et
décomposition des
nombres »
la mémoire
l’intelligence
l’attention,
la rigueur,
la capacité d’écoute
la rapidité d’exécution
la recherche,
l’esprit de créativité
le raisonnement, etc.
Fiche traditionnelle
32
Curriculum de l’Education
de base
Développer chez les élèves
des compétences (savoir,
savoir-faire et savoir être) que
les élèves mobilisent pour
résoudre des situations
problèmes.
Élèves
Connaissances théoriques et
pratiques :
Spécification détaillée, par
exemple : « nombres pairs,
nombres impairs, la moitié, le
double d’un nombre » ;
« divisibilité par 2 par 5 »
Activités numériques :
raisonnement
Activités géométriques :
observation, construction de
figures
Activités de mesure :
maniement d’instruments
Résolution de
problèmes : esprit logique
Fiche curriculaire : la
construction et l’exploitation
d’une situation significative
d’intégration (SSI)
2.5 Les mathématiques dans le programme scolaire
Le Curriculum de l’Education de Base (CEB) opérationnalise l’enseignement des mathématiques, selon une
planification maîtrisée. L’approche du CEB à l’enseignement des mathématiques est également celle de l’entrée
par compétences et la pédagogie de l’intégration que nous avons déjà décrite ci-dessus. Le curriculum englobe
non seulement les objectifs et les contenus des programmes d’études, mais également la méthodologie, les
stratégies d'évaluation, les manuels et les supports pédagogiques. A la fin de la deuxième étape (4éme année
de scolarisation), « l’élève doit intégrer des outils mathématiques simples (numération décimale de 0 à 100.000,
fractions simples et décimales, opérations arithmétiques, solides familiers, et figures planes, concrets ou
représentés, mesure de grandeurs et raisonnement) dans des situations familières de résolution de problèmes. »
(Guide Pédagogique 2me Etape p. 125).
Le contenu du programme de mathématiques du CEB consiste en quatre types d’activité : activités
géométriques, activités numériques, activités de mesure et résolution de problèmes. Le Tableau 2.6 offre un
résumé d’une partie du contenu de la première étape, c’est-à-dire les apprentissages ponctuels numériques et
géométriques.
Tableau 2.6 Exemple de l’approche pédagogique en mathématiques du CEB
Étapes de la démarche – activités mathématiques




Proposer aux élèves des situations familières qui les obligent à s’approprier de nouveaux outils.
Faire résoudre le problème individuellement, puis en groupe.
Les difficultés éprouvées par les élèves doivent leur permettre de construire les nouveaux savoirs.
Faire communiquer et analyser les solutions trouvées. Il s’agit des comptes rendus et des échanges sur les
stratégies de résolution. Faire retenir les solutions correctes.
 Faire analyser les solutions retenues en ayant recours à au moins une autre situation similaire pour dégager
les invariants dans les situations présentées
 Faire tirer la ou les règles (synthèse, institutionnalisation).
 Contrôler les acquis.
 Faire réinvestir dans d’autres situations.
(Source : Curriculum de l’Éducation de Base Guide Pédagogique 2me Etape p. 151)
Tableau 2.7 Résumé du contenu en numération et géométrie du CEB première étape
Numération :
Opérations
Calcul mental
Géométrie
Révision des nombres de 1 à 10, de la dizaine, des nombres de 10 à 20, de 20 à 99. La numération de
100 à 199, de 200 à 999 ; le nombre 1.000 ; et la numération de 1.000 à 10.000.
Sens et pratique de l’addition et de la soustraction – sens et pratique de la multiplication : table de
multiplication – sens et pratique de la division (en se limitant au cas où le diviseur à 2 chiffres).
Application des opérations a la résolution de problèmes très simples (gains, dépenses, prix d’achat,
valeur d’une part…)
Comptage de 2 en 2, de 4 en 4, de 3 en 3, de 5 en 5. Addition des nombres dont le total est inférieur à
20. Addition et soustraction de deux nombres représentant un nombre exact de dizaines (le total ou le
plus grand nombre étant inférieur à 100). Addition et soustraction d’un nombre, d’un chiffre à un nombre
de deux chiffres. Table de multiplication : contrôle régulier, en vue d’obtenir une connaissance aussi
parfaite que possible
Études de figures géométriques simples, par l’observation, le dessin, le pliage, le découpage. Emploi de
la règle, du double –décimètre, de l’équerre. Ligne droite, ligne brisée, ligne courbe
Notion d’angle : angle droit, angle aigu, angle obtus, verticale, horizontale, oblique. Présentation du
triangle, du carré, du rectangle. Etude concrète de leur périmètre – calcul du côté du carré, d’une
dimension du rectangle, d’un côté du triangle, quadrillage d’un rectangle, d’un carré. Notion de surface
Observations du cube
Pour l’étape 2, la démarche est identique : les contenus sont présentés de la même manière.
Les deux Guides Pédagogiques expliquent aussi les notions clés des différentes activités et fournissent des
suggestions spécifiques pour les situations d’intégration, d’évaluation et de remédiation. Ils offrent donc aux
enseignants, et aux formateurs, le moyen de planifier tout le programme.
33
2.6 Présentation des programmes de formation continue
Actuellement, le Sénégal met en œuvre trois principaux programmes de formation continue pour la lecture et les
mathématiques : le Curriculum de l’Education de Base qui couvre toutes les disciplines, la SARENA qui
concerne les stratégies de lecture et le PREMST qui concerne les mathématiques, la science et la technologie.
2.6.1 La formation en Curriculum de l’Education de Base
Le Sénégal a opté pour l'approche par compétences pour réformer son curriculum de l'éducation de base et sa
formation professionnelle et technique. L’approche est soutenue par Le projet « Formation des enseignants de
l'éducation de base en approche par les compétences (FEEB/APC) », financé par la coopération Canadienne.
Le projet FEEB/APC est une continuation du « Projet d'appui au curriculum de l'éducation de base » (PACEB)
qui a permis d'appuyer la phase pilote. L'objectif du FEEB/APC est d'améliorer la qualité de l'éducation des
enseignants de l'éducation de base de toutes les régions du Sénégal à travers la formation sur l'approche par les
compétences. Le projet vise à former plus de 35 494 enseignants de l'éducation de base formelle et non
formelle, ce qui bénéficiera à 1 895 230 élèves. Les activités incluent: la formation des formateurs et la formation
des enseignants de l'éducation de base.
La FEEB/APC est le principal programme de formation continue pour les enseignants du primaire: "Cette année,
les activités ont surtout porté sur le curriculum de base" (Interview IDEN Région 4). La formation est d’une durée
de 10 jours pendant lesquelles les enseignants sont initiés à l’approche par compétences : l’importance des
situations significative d’intégration ; comment planifier et gérer les apprentissages et comment évaluer une
compétence. La formation englobe tous les quatre domaines du CEB : Langue et communication,
Mathématiques, Éducation à la science et à la vie sociale et Éducation physique, sportive et artistique. Après la
formation, les enseignants devraient savoir utiliser le nouveau curriculum, gérer une classe curriculaire et mettre
en place d'un système d'évaluation des compétences des élèves, selon l'approche par les compétences.
2.6.2. Stratégie Active pour la Réussite d’une École Novatrice en Afrique (SARENA)
La SARENA a été développée par le cabinet-conseil privé canado-sénégalais ARTICHAUT/SARENA,
concepteur de la collection « L’île aux Baobabs ». La SARENA a été mise en œuvre dans plus de 900 classes
de CI, dans les zones à faible rendement scolaire de la banlieue de Dakar et les académies de Diourbel,
Kaolack et Fatick.
La formation SARENA a pour but d’amener l’enseignant « à s’engager activement dans un renouvellement de
leur pratique enseignante et à trouver le juste milieu entre leur façon de faire et une approche axée sur le
développement des compétences en français, comme outil de communication et de développement personnel et
social. » La stratégie de lecture est accompagnée de matériel pédagogique permettant de la rendre
opérationnelle. Il comprend du matériel collectif pour chaque classe composé d’un méli-mélo, d’un calendrier,
d’un alphabet phonologique, de cartons sons, de matériel individuel et un manuel « Moussa » pour chaque élève
des classes retenues pour le CI. Pour le CP, il y a un manuel « Aminatou », mais la formation à ce niveau n’est
pas encore achevée.
La stratégie consiste à former des enseignants dans la phase de pré lecture (maîtrise de l’espace et du temps,
l’apprentissage de l’alphabet, installation de la conscience phonologique, vocabulaire et construction d’un capital
de mots) et la phase de lecture (poursuite d’activités de langage liées à l’activité de lecture (partir d’un texte pour
découvrir le sens et comprendre en mobilisant les capacités acquises dans la phase antérieure). La méthode
SARENA met l’accent sur le langage en proposant des « activités réelles de communication au quotidien à l’aide
de matériels collectifs pour la classe » et « des apprentissages significatifs dans une approche communicative »
(Editions l’Artichaut 2008 p.2)
Alors que certains enseignants ont été formés directement durant les séminaires organisés par la SARENA,
d’autres ont été formés sur le tas par les enseignants qui ont suivi le séminaire ou les directeurs d’école à travers
un coaching. SARENA a formé 1 323 maîtres et directeurs en 2008-2009.
34
2.6.3 Projet de Renforcement de l‘Enseignement des Mathématiques, des Sciences et de la
Technologie (PREMST)
Le Projet de Renforcement de l‘Enseignement des Mathématiques, des Sciences et de la Technologie
(PREMST) est un projet financé par le gouvernement du Sénégal et la coopération japonaise (JICA). Il concerne
3 académies : Louga, Thiès et Fatick. Il cible 12 formateurs nationaux, 50 formateurs régionaux, 345 locaux, 10
351 enseignants et 434 000 élèves. Le coût du projet est de 600 millions sur 3 ans. Il est financé à 52% par l’Etat
du Sénégal et 48% par la coopération japonaise (JICA). La première année du projet a été consacrée à l'état des
lieux et l’élaboration du référentiel de compétences. Les formations ont démarré la 2e année.
La stratégie de la formation en cascade est utilisée, c’est-à-dire que l’équipe nationale de 10 personnes forme
les équipes des 3 régions composées de 20 personnes chacune et ces équipes régionales forment à leur tour
les équipes départementales au niveau des IDEN.
Tous les inspecteurs départementaux des 3 régions
pilotes ainsi que 50% des directeurs d’écoles ont
été formés dans le cadre du projet. Les formations
se déroulent souvent le samedi ou durant les
vacances scolaires.
Les modules suivants de mathématiques ont été
conçus et appliqués : Math 1 (constructions
géométriques, démarches pédagogiques centrées
sur l’apprenant, confection et utilisation du matériel
didactique), Math 2 (nombres complexes) et Maths
3 (fractions).
La formation PREMST se base sur une approche à l’enseignement des mathématiques et des sciences que la
JICA a piloté avec succès ailleurs. Les deux principaux piliers sont résumés par deux acronymes « le
mouvement ASEI » et « l’approche PDSI » ASEI ou Activity (Activité), Student (Apprenant), Experiment
(Expérience), Improvisation (Improvisation/ contextualisation) décrit les pratiques d’apprentissage de l’apprenant.
C’est une pédagogie d’activité centrée sur l’apprenant où la manipulation de matériels de récupération
disponibles est suivie par la réflexion, les discussions et les remarques. Ceci a pour but de susciter l’intérêt et la
curiosité de l’apprenant et surtout de lier les activités à l’apprentissage des concepts et compétences. La
consigne des apprenants est d’improviser des solutions aux problèmes. L’ASEI se gère de façon à permettre à
l’enseignant d’être en contact avec les processus d’apprentissage et de réflexion des apprenants et de corriger
tous les concepts mal compris.
PDSI ou Plan (Planifier), Do (Mettre en œuvre), See (évaluer), Improve (améliorer) décrit les pratiques de
l’enseignement. Le PREMST enseigne aux maîtres des moyens de planifier des leçons où l’action est partagée
entre les apprenants et l’enseignant qui ne dispense pas les connaissances mais facilite leur acquisition.
L’observation des activités des élèves par le maître encourage la rétrospection dans la leçon et une évaluation
diagnostique qui permet d’améliorer la leçon présentée.
« L’Amélioration doit être faite en incorporant les informations obtenues lors de la rétrospection
pendant et après la leçon. C’est une activité permanente qui assure que les compétences de
l’enseignant s’améliorent et que la confiance augmente à mesure que les programmes sont
enrichis. » (PREMST 2008 p. 4)
Le PREMST souligne l’importance de la « réflexion permanente sur les moyens, les stratégies et les techniques
d’enseignement qui améliorent la pratique pédagogique » (PREMST 2008 p. 6). Il permet aux enseignants
d’offrir les meilleures opportunités d’apprentissage aux apprenants.
Selon le coordonnateur du programme, il est noté une présence de 83% des enseignants dans les cellules
d’animation pédagogique et 97% des directeurs d’écoles. Il y a eu des améliorations significatives des
apprentissages. Beaucoup de points positifs ont été notés dans les IDEN et les IA. Durant les 2 ans du projet,
(2008-2010) 13.000 enseignants ont été formés. Le PDEF prévoit une ligne de crédit dans le cadre de la
formation continuée pour généraliser le modèle.
35
CHAPITRE 3 : Apprendre à enseigner la lecture
3.1 La formation Initiale
3.1.1 Les formateurs
Les formateurs en lecture des EFI sont tous des Inspecteurs de l’enseignement élémentaire. Certains ont une
autre qualité de professeur de français, d’anglais ou d’instituteur. Il n’existe qu’une seule femme parmi ces
formateurs. Les caractéristiques communes des quatre formateurs sont leur longue expérience dans
l’enseignement et leur qualité d’inspecteur.
Tableau 3.1 : Profil des formateurs en français
Qualification des formateurs en lecture
Inspecteur de l’Enseignement Élémentaire, Professeur d’Anglais, pas de
formation spécifique en lecture
Inspecteur de l’Enseignement Élémentaire, pas de formation spécifique en
lecture
Inspecteur de l’Enseignement Élémentaire, pas de formation spécifique en
lecture
Inspecteur de l’Enseignement Élémentaire, Professeur de Français, pas de
formation spécifique en lecture
Expérience
9 ans
Genre
Homme
10 ans
Femme
7 ans
Homme
6 ans
Homme
En tant qu’inspecteurs, ils ont reçu une formation en pédagogie et didactique générale, mais pas de formation
spécifique en didactique de la lecture. Du reste, la dénomination de leur matière n’est pas la lecture mais le
français. Donc la discipline enseignée est assez large et prend en charge des activités autres que la lecture.
Cependant, certains d’entre eux, pour avoir été enseignants de l’élémentaire et pour avoir accompli des tâches
de contrôle et d’évaluation des enseignants de l’élémentaire en tant qu’inspecteurs, ont accumulé une somme
d’expérience telle qu’ils arrivent effectivement à assurer la formation des élèves-maîtres.
Les formateurs ont différentes conceptions de la lecture. Selon le formateur de l’EFI 3, lire c’est « Comprendre,
déchiffrer et oraliser ».
Le formateur de l’EFI 3 connaît l’acte de lire, les composantes de la lecture ainsi que les démarches. Le
formateur de l’EFI 4 sait que le langage est la première étape pour la construction des connaissances en lecture.
Le langage permet de créer un réservoir ‘lexical’ à partir duquel sont tirés les mots dont on a besoin pour la
lecture. Il connaît l’importance du déchiffrage et de ‘l’oralisation’ en partant d’un texte. Il sait que l’enfant peut
utiliser les éléments oraux acquis, et pour passer de l’oral à l’écrit, on peut transcrire ces éléments oraux, puis
les afficher dans l’environnement de la classe.
L’enfant vit en permanence avec ces mots-là et finit par s’habituer à ces mots là qu’il pourra utiliser pour
la lecture. (Formateur EFI 4)
Pour le formateur EFI 1, l’acte de lire est de comprendre et déchiffrer un message. Il pense que les enfants dans
les petites classes ont besoin de déchiffrer une situation concrète de communication avant de la traduire
oralement. Il connait les étapes, sait que le langage doit précéder la lecture et que l’écriture est la représentation
abstraite :
36
Les enfants ont besoin de comprendre que lire c’est déchiffrer un message. Ce message peut
être délivré par l’auteur de plusieurs manières : oralement, par dessin, par écrit. Avant d’arriver à
ce déchiffrage écrit, l’élève doit pouvoir déchiffrer d’abord une situation concrète de
communication et pouvoir traduire cela oralement. Et plus tard, déchiffrer les signes parce qu’il
part du concret, il peut aussi déchiffrer des représentations pour aller maintenant au signe qui
est abstrait maintenant parce que le signe est abstrait pour lui d’où le besoin d’une longue
préparation. D’où la recommandation officielle de passer du langage à la lecture et à l’écriture
parce que l’écriture est abstraite.
(Formateur EFI 1)
Les sources des connaissances des formateurs en lecture sont variées, elles viennent surtout de la pratique et
de courtes formations. Pour le formateur de l’EFI 3, la pratique de classe et de supervision, sa formation à l’école
normale, et son expérience dans le pôle régional de formation sont importantes mais son expérience est la
principale source de ses connaissances. Aucun des formateurs n’a reçu une formation spécifique en lecture, il
répond :
Avez-vous reçu une formation spécifique en lecture ?
Pas du tout. J’ai été à l’école normale, là nous avons beaucoup travaillé sur les disciplines au
pôle régional de formation également et surtout en lecture parce que les enseignants rencontrent
souvent des problèmes par rapport à la lecture, donc j’ai beaucoup travaillé là-dessus (Formateur
EFI 3).
Les connaissances du formateur de l’EFI 4 viennent de la formation générale et de ses lectures. Il a une bonne
connaissance de la méthode globale, la méthode syllabique et la méthode mixte articulée à la combinatoire.
[Mes connaissances viennent de] la formation globale à l’inspectorat, mais [je n’ai] pas reçu une
formation spécifique, sinon les documents que nous rencontrons çà et là et des échanges entre
collègues. (Formateur EFI 4).
Les connaissances du formateur de l’EFI 1 viennent de sa formation générale d’instituteur de quatre ans, de la
formation continue en lecture, de son expérience pratique et de son implication dans l’élaboration de manuels :
[Mes connaissances viennent,] de la formation globale de l’instituteur que je suis, ensuite
l’expérience bien sûr parce qu’en tant qu’inspecteur et même conseiller pédagogique j’ai eu à
beaucoup travailler sur la lecture. D’ailleurs j’ai eu la chance aussi de travailler à l’élaboration de
manuels pendant le PDRH6 et c’était pendant la 1ère étape, j’ai reçu aussi une formation à
l’INEADE dans d’autres matières mais aussi en lecture. (Formateur EFI 1)
Les connaissances en lecture du formateur de l’EFI 2 viennent de ses cours universitaires et d’une formation
continue:
C’est lors de ma formation comme inspecteur et mon passage à la fac … à part les formations
initiées par le PDRH, séminaire de 3 jours (Formateur EFI 2)
Des observations et des entretiens avec les formateurs, on peut conclure que la méthode mixte à l’approche
globale reste la méthode la plus utilisée, mais ils mettent l’accent sur différents aspects de l’enseignement de la
lecture.
Nous les formons dans le sens de la méthode mixte à point de départ global. Elle vaut ce qu’elle
vaut. Elle est faite de ce que nous avons retenu de la méthode syllabique et de la méthode
globale. C’est le point de départ de la méthode syllabique qui nous pose problème. … nous
pensons qu’il faut la méthode globale qui nous règle la question. Avant d’arriver au son, passer
d’abord par le texte, la phrase. (Formateur EFI 4).
Nous avons observé chez les formateurs des EFI 3 et 4 une bonne compréhension théorique du rapport entre le
langage et la lecture et du passage de l’un à l’autre et de ce que l’un aide à entrer dans l’autre et à la conquérir.
C’est cette compréhension qui leur fait concevoir la nécessité de créer des outils pour fixer par écrit les
6
PDRH: Projet de Développement des Ressources Humaines, financé par la Banque Mondiale
37
acquisitions en langage. Le transfert de cette compréhension au niveau des élèves-maîtres est fondamental
pour permettre une bonne articulation des activités de pré-lecture avec celles de la lecture à proprement parler.
C’est dire que dans ce domaine précis, la connaissance pédagogique du contenu (voir 1.2.1) est bien installée.
Le formateur de l’EFI 4 a une compréhension des outils à utiliser pour assurer le passage de l’oral à l’écrit.
L’enfant peut utiliser les éléments oraux acquis. Il a une compréhension des étapes à suivre pour installer la
compétence en lecture :
Aussitôt que l’acquisition est faite, on transcrit et on fait figurer ces éléments du langage en
l’affichant dans l’environnement de la classe. L’enfant vit en permanence avec ces mots-là et
finit par s’habituer à ces mots là qu’il pourra utiliser pour la lecture (Formateur EFI 4).
Pour bien saisir le rapport entre le langage et l’écriture, le formateur de l’EFI 3 préconise la technique de
l’affichage ; ainsi, tout ce qui est acquis en langage est affiché sur le tableau et les murs ; il fait l’objet de reprise
à chaque fois pour permettre aux élèves de bien les maîtriser. Selon le formateur, la création d’une banque de
mots permet de reconstituer l’environnement écrit qui est absent au niveau de l’élève. Le formateur de l’EFI 4
parle aussi de l’utilité des mots, de la nécessité de créer une banque de mots après avoir montré très clairement
que les enfants viennent à l’école avec un certain bagage linguistique à exploiter. Cela signifie que la
connaissance et la compréhension dans ce domaine sont avérées. Le formateur de l’EFI 4 propose comme
première étape le langage avant la lecture, en se basant sur le fait que les activités en langage permettent de
construire les capacités en lecture. Il pense qu’il est possible que l’enfant lise sans connaître la combinatoire.
Les formateurs des EFI 1 et 2 ne parlent pas de l’apprentissage du vocabulaire dans l’acquisition des
connaissances nécessaires pour la compétence en lecture. Cette omission pourrait signifier une
incompréhension de la question ou alors une méconnaissance du domaine précis, de la nécessité de celui-ci
dans l’installation de la compétence en lecture pour les élèves et donc de la nécessité pour les élèves-maîtres
d’acquérir cette connaissance, d’en comprendre la nécessité pour avoir la connaissance pédagogique du
contenu à enseigner.
Le domaine de la combinatoire, c’est-à-dire- l’apprentissage de la formation des syllabes dans l’apprentissage
de la lecture, est bien connu et bien maîtrisé par les formateurs. Le formateur de l’EFI 4 a la connaissance
pédagogique du contenu pour l’apprentissage des sons pour l’installation de la compétence phonémique, mais il
dit qu’il ne la met pas en pratique « Du point de vue des compétences, il n’y a pas un travail dans ce domaine »
Selon un formateur, les élèves-maîtres ont des difficultés à comprendre la différence entre lettre et son :
Au départ y a des confusions. On essaie de les régler en leur faisant comprendre que toute
langue compte des sons qui permettent l’expression de la langue. Je donne souvent l’exemple
du son « ch » qui peut avoir une forme de représentation graphique. On attire leur attention sur le
fait que la lecture ne porte pas sur l’apprentissage des lettres. Que c’est à partir des sons qu’on
va vers les lettres. Chaque son peut avoir une correspondance terme à terme avec la
représentation graphique ou non qui n’est pas de terme à terme. (Formateur EFI 4)
Cela témoigne d’une connaissance effective de la différence entre la lettre et le son mais est-ce que cette
compréhension est une préoccupation centrale dans la formation de l’apprentissage à la lecture, assurant une
compréhension du contenu pédagogique ? Les données n’ont pas permis de le démontrer
Les formateurs sont conscients de la nécessité de différencier les enseignements parce que les sortants des EFI
sont appelés à enseigner dans les différents niveaux de l’élémentaire (cours d’initiation, cours élémentaires, et
cours moyens). Cependant, par manque de temps, ils préparent les maîtres de manière générale.
C’est un tout, l’enseignant est formé pour enseigner dans toutes les classes. On les forme de manière
globale (Formateur EFI 2)
Il est frappant de noter que les formateurs n’ont pas mentionné le fait d’avoir questionné les élèves-maîtres sur
leurs stages pratiques dans les écoles d’application. Il n’y a pas d’évidence que les formateurs utilisent les
expériences des élèves-maîtres et les leçons apprises lors des pratiques dans leurs cours.
38
Tous les formateurs ont noté le décalage qui existe entre la formation et les supports pédagogiques devant
servir aux élèves-maîtres qui seront demain les maîtres.
Il y a un décalage en lecture parce que les manuels actuels ne prennent pas en compte les
variations en lecture (poèmes, notices, etc.) Donc il faut une refonte de ces manuels. (Formateur
EFI 2)
En général, l’expérience des formateurs, qui sont tous des inspecteurs avec une longue expérience de
l’enseignement élémentaire, constitue une force de la formation initiale des enseignants. Cependant cette force
est amoindrie par la non-spécialisation des formateurs dans la didactique de la discipline enseignée et
l’insuffisance des formateurs. En effet, les EFI recourent aux IDEN, aux interventions extérieures, et aux retraités
utilisés à temps partiel pour pallier au manque de formateurs. En outre le matériel pédagogique fait aussi défaut
en maths et en lecture. Dans certaine EFI, un manque d’assiduité des formateurs est noté :
En termes d’assiduité des enseignants, les permanents sont assidus. Ils sont affectés à l’EFI.
Les vacataires viennent des IDEN des IA et du Pôle Régional de Formation. Nous avons 11
disciplines et 5 permanents. Quand ils ont d’autres activités, ils ne viennent pas assurer les
cours. Un autre formateur les prend pour leur assurer un cours dans son domaine. (Directeur
EFI région 2)
3.1.2 Connaissances, compréhension, pratiques des élèves-maîtres
Après leur formation initiale, les élèves-maîtres abordent l’enseignement de la lecture avec confiance. Une très
large majorité (96%) des élèves-maîtres qui ont répondu au questionnaire se disent confiants ou très confiants à
enseigner la lecture et la même proportion décrit son aptitude à enseigner la lecture comme très élevée ou
élevée. Ce résultat est très frappant car dans les focus groups les élèves-maîtres ont reconnu que la courte
durée de la formation initiale limite beaucoup leur apprentissage pédagogique et suggèrent que la formation
devrait être prolongée. Cependant, cette confiance ne semble pas être due aux connaissances qu’ils ont
acquises, mais plutôt á la surestimation de leurs prédispositions et qualités personnelles : Par exemple, à l’EFI 4,
certains élèves-maîtres se disent prêt à enseigner la lecture pour les raisons suivantes :
 j’ai confiance en moi et j’aime enseigner.
 j’ai la passion et l’audace.
 j’aime relever les défis et je pose des questions.
 c’est une fierté de pouvoir enseigner un savoir à des enfants.
 j’essaie d’avoir des connaissances autres que celles que je reçois à l’EFI (Focus group élèves-maîtres
EFI 4)
La confiance des élèves-maîtres vient aussi de leurs expériences pendant les stages pratiques dans les écoles
d’application. Ces stages sont une occasion pour connaître les conditions de travail dans les écoles
élémentaires et de pratiquer en tant que maître :
Le stage nous a permis de nous relaxer devant les élèves, beaucoup d’entre nous se sont vite adaptés
(Focus group élèves-maîtres EFI 1)
En général, les élèves-maîtres considèrent que la formation répond à leurs besoins« C’est très accéléré, mais
bien organisé » (Focus group EFI 1) et ils pensent que la pratique enseignante et les recherches personnelles
leur permettront de compléter leurs connaissances.
Les formateurs ne peuvent pas tout nous donner mais ils font de leur mieux. Ils nous donnent
l’essentiel, le reste c’est à nous de faire des recherches. (Focus group élèves-maîtres EFI 1).
Quand ils expriment des inquiétudes dues au manque de connaissances, il ne s’agit pas autant de la
connaissance pédagogique mais plutôt de la connaissance du contenu.
Je suis prête à enseigner à la première et à la deuxième étape car pour la pratique que j’ai faite
en CM2 je me suis rendue compte que j’ai oublié certaines notions et que je devrais me
ressourcer avant de prendre ces classes (Focus group élèves-maîtres EFI 3).
39
Il est difficile d’enseigner aux enfants des notions que l’on ne comprend pas nous-mêmes. Il faut
insister encore plus sur la formation pour mieux outiller les élèves-maîtres (Focus group élèvesmaîtres EFI 3).
Fondamentalement, les élèves-maîtres pensent qu’ils ne sont pas prêts à enseigner la lecture en langues
nationales parce que leur propre éducation a été faite en français : 95% disent qu’ils sont plus confiants à
enseigner en français parce que c’est la langue officielle et qu’ils la maîtrisent mieux. Les langues nationales font
partie du programme de l’EFI mais les cours commencent tardivement de telle sorte que les enseignants sortant
des EFI ne maîtrisent pas l’enseignement de ces langues. Le choix de la langue nationale pose problème du fait
de la courte durée du module sur l’alphabétisation.
On en parle mais on ne l’a pas encore fait… On en discute mais on ne l’a pas encore
programmé (Focus group, élèves-maîtres EFI 1).
Néanmoins, certains élèves-maîtres pensent utiliser les langues nationales afin de permettre à leurs élèves de
mieux comprendre la discipline enseignée.
On doit enseigner aux enseignants à être bilingue, c’est plus sûr. Tu peux arriver à un niveau où
l’explication en français ne suffit pas et pour que les élèves comprennent il faut leur parler leur
langue maternelle (Focus group élèves-maîtres EFI1).
Pendant les stages, les élèves-maîtres peuvent acquérir de l’expérience de différentes classes. Mais la courte
durée de cette expérience ajoutée à celle de la formation, font que les compétences pratiques qu’ils acquièrent
sont plutôt générales que spécifiques. Aussi la gestion des stages n’est pas toujours satisfaisante. Ainsi certains
élèves-maîtres n’ont jamais eu l’opportunité d’observer des leçons de lecture durant leurs différents stages
pratiques. « Pour moi, là où je suis passé, je n’ai pas eu la chance d’assister à une leçon de lecture » (Focus
group élèves-maîtres EFI 2). Dans ce cas, ils n’ont qu’une connaissance théorique de l’enseignement de la
lecture.
En général, les élèves-maîtres trouvent la pratique insuffisante à cause du nombre élevé de stagiaires par
rapport aux classes d’application disponibles (demande supérieure à l’offre). La préparation à l’EFI et la pratique
à l’école sont en déphasage : les élèves-maîtres veulent mettre en pratique ce qu’ils viennent d’apprendre à l’EFI
mais souvent quand le maître d’application leur demande de préparer une leçon, ils ne réussissent pas à mettre
correctement en pratique ce qu’ils ont appris en théorie
Les élèves-maîtres font aussi remarquer que dans les écoles d’application, ils sont sous l’autorité des directeurs
qui sont plus préoccupés par de la gestion de l’école que leur formation (Focus group, élèves-maîtres EFI 3).
Puisque les écoles d’application n’ont pas de liens avec l’EFI pour le suivi pédagogique, il est difficile de concilier
les pratiques auxquelles ils sont exposés avec les cours théoriques de l’EFI. En effet beaucoup d’élèves-maîtres
sont déçus par les leçons qu’ils observent dans les écoles d’application et trouvent la qualité de certaines
prestations assez pauvres en général : « [le niveau] est bas, même dans l’expression. Des fois y a des
déficiences » (Focus group élèves-maîtres EFI 2).
Selon un des formateurs interrogé, une bonne assise théorique permettrait aux élèves-maîtres de comprendre
ce que les maîtres font et de justifier leur pratique de classe parce que toute pratique a pour soubassement la
théorie. En réalité, la théorie n’est pas bien comprise de fait du manque de temps. La différence de méthodes
utilisées dans les stages pratiques et dans les cours théoriques de l’EFI crée une confusion dans l’esprit de
l’élève-maître.
Les fiches qu’on nous donne sur le terrain sont diamétralement opposées à celles enseignées
ici. On ne sait plus sur quel pied danser... (Focus group, élèves-maîtres EFI 2)
En général, les élèves-maîtres pensent que la pratique domine la théorie et en cas de confusion ils préfèrent
adopter les solutions pratiques :
Ce que tu apprends en théorie doit être pratiqué sur le terrain, mais parfois, la théorie peut être
très différente de la pratique. Personnellement je me fie plutôt à la pratique parce que le terrain a
ses réalités (Focus group élèves-maîtres EFI 3).
40
Quand on demande aux élèves-maîtres de se prononcer sur la méthode d’enseignement de la lecture
préconisée, certains parlent de la méthode mixte à l’approche globale (ou à point de départ global) et d’autres
parlent de l’approche globale.
La méthode mixte à point de départ global qui respecte les 3 moments de la pensée
intellectuelle : partir du global, passer par l’analyse et ensuite arriver à la synthèse. Dans cette
méthode, pour faire étudier un son, la leçon se déroule en 8 séances : on part d’une phrase,
ensuite le mot clé, le son clé, on vient à la combinatoire et à la formation syllabique en passant
par toutes ces étapes (Focus group élèves-maîtres EFI 2)
On nous enseigne la méthode globale, mais actuellement nous en sommes à la phase théorique
(Focus group élèves-maîtres EFI 1)
Les données remettent en question l’interprétation de l’approche et la compréhension des élèves-maîtres de la
lecture et de son enseignement. Pour presque tous, la méthode est quelque chose de nouveau, et elle n’est pas
familière à leur propre éducation élémentaire, leur « apprentissage par observation » (Lortie 1975) .On parle de
« la méthode nouvelle [qui] part d’un texte pour respecter le syncrétisme de l’enfant. ». L’idée du syncrétisme est
mentionnée plusieurs fois comme justification théorique de la méthode globale.
Pour enseigner la lecture aux petits enfants, on doit partir du global vers le détail à cause du
syncrétisme de l’enfant. (Focus group élèves-maîtres EFI 4)
C’est une justification abstraite liée à la nature de l’enfant, mais aucun élève-maître ne semble savoir lier une
approche globale à la conception de ce que c’est que lire. Aucun élève-maître n’a parlé de l’importance de la
compréhension globale du mot, de la phrase ou du texte.
La plupart des élèves-maîtres insistent sur l’importance de toujours partir du concret vers l’abstrait ou du global
vers le particulier.
Notre formation est une formation active, on est là que depuis un mois et demi, mais les gens
nous ont conseillé de partir des cas pratiques, on part du concret pour aller vers l’abstrait (Focus
group élèves-maîtres EFI 1)
Ils comprennent aussi, grâce à leurs cours de l’EFI, que le langage est à la base de l’apprentissage de la lecture:
Les formateurs nous ont dit qu’il faut partir du langage, c’est avec le langage qu’on apprend la
lecture. (Focus group élèves-maîtres EFI1)
Les résultats de l’enquête confirment que cette idée est largement répandue parmi les élèves-maîtres. Par
exemple, dans un des scénarios où il s’agissait de mettre des activités dans un ordre qui développe le mieux les
aptitudes de lecture des enfants dans une leçon ou une série de leçons qui visent à augmenter le vocabulaire en
lecture, la première activité choisie par le plus grand nombre d’élèves-maîtres était celle qui offrait plus de
possibilités orales que les autres choix qui passent plus directement par l’écrit (tableau 3.2, option c).
Tableau 3.2 : Priorisation des activités pour développer des compétences en lecture
Activité
(a) Dessiner une personne, mettre des étiquettes sur les parties du corps et demander
aux enfants d’écrire leurs propres phrases
(b) Donner des cartes portant des mots tels ‘cou’ ou ‘nez’ aux enfants en groupes de 6
et leur demander de dessiner des parties du corps et d'en former des phrases
(c) Montrer du doigt les parties du corps d'un enfant dans la salle de classe et écrire
les mots sur le tableau dans une phrase comme "J'ai deux mains"
(d) Écrire une liste de mots sur le tableau à côté de dessins et demander aux enfants
de lire les mots à haute voix ensemble puis individuellement
1er
23
2me
29
3me
20
4me
28
10
24
40
25
49
26
18
7
17
21
22
40
Les élèves-maîtres priorisent les activités concrètes. Ce résultat est confirmé par un autre item du questionnaire
qui demandait aux élèves-maîtres de décider du meilleur moment pour introduire des activités dans
l’enseignement de la lecture. Les réponses ont été ordonnées afin de mettre en tête du tableau celles que le plus
41
grand nombre d’élèves-maîtres avaient choisies. Encore une fois, il faut noter que la plupart préfère les activités
plus concrètes avec des opportunités pour le langage oral.
Tableau 3.3 : Identification de moments d’introduction de la lecture
Dès le
début
Un peu
plus tard
Beaucoup
plus tard
Jamais, l’activité
est inutile
(f) vous enseignez les salutations et les routines de la salle de
classe
(a) les élèves regardent des images d’objets familiers et en
parlent
(b) vous attachez une étiquette aux objets dans la salle de classe
77
10
7
6
66
23
7
4
48
30
11
12
(e) les élèves récitent les lettres de l'alphabet
47
28
15
10
(d) les élèves récitent les sons des lettres
28
40
20
12
(i) vous lisez aux enfants des contes avec des images
23
35
35
6
(g) vous enseignez des rimes et chants simples
20
34
34
12
(h) vous racontez des récits sur les situations familières que
vous illustrez avec des actions
(c) les élèves lisent au tableau des mots entiers et les récitent
20
35
32
13
11
39
35
14
L’interprétation de ces deux tableaux (3.2 et 3.3) confirme que beaucoup d’élèves-maîtres ont bien compris qu’il
faut commencer par le concret et qu’ils peuvent appliquer ce principe. Mais il y a un autre résultat intéressant
quand il s’agit de passer au-delà du mot, à des passages plus longs. Environ un tiers des élèves-maîtres veut
laisser de telles activités pour beaucoup plus tard (voir activités (i), (g) et (h)). Ce résultat est significatif parce
qu’il renforce la conclusion sur la compréhension de la lecture qui est ressortie des focus groups – beaucoup
d’élèves-maîtres considèrent qu’il faut maitriser la lecture au niveau des sons et des mots avant d’être exposé à
des textes plus longs.
Il faut donc noter une confusion dans la compréhension du concept de la méthode globale, méthode mixte, et
syllabique. Dans l’entendement des élèves-maîtres cités ci-dessous, la compréhension du texte ou de la phrase
n’est pas incluse dans leur démarche:
On part d’un texte pour poser les mots connus et à partir des mots connus on étudie le son. La
méthode globale permet d’acquérir des mots et de pouvoir lire. (Focus group élèves-maîtres EFI
2)
En général, les élèves-maîtres ne comprennent pas la signification de l’approche globale qui est d’établir le sens
du texte avant de passer aux unités plus détaillés que sont les mots, les lettres et les sons. Pour eux l’aspect
global ne semble être qu’un prélude au vrai objectif d’une leçon de lecture – l’identification et l’étude d’un son.
D’autres ont compris que l’objectif final est de faire acquérir les sons par la répétition.
Les formateurs nous apprennent comment enseigner la lecture, on apprend par le dialogue, on
écrit le texte au tableau pour identifier les mots difficiles, les sons surtout, pour les faire répéter
aux enfants. (Focus group élèves-maîtres EFI 1)
Un des élèves-maîtres cités ci-dessus a souligné qu’il faut partir du langage «pour prendre un mot, un son pour
en tirer le mot ». Seul un des élèves-maîtres que nous avons interrogé a poussé son raisonnement au-delà de
l’étude du son pour retourner vers le global en disant que :
À partir du global, si tu arrives à détailler le mot, à partir du moment où l’enfant reconnaît le
détail, vous pouvez lui faire reconstituer le global. Ce moment je l’ai jugé important. (Focus
group élèves-maîtres EFI 2)
Les difficultés à intégrer l’approche globale est confirmée par un item du questionnaire qui a permis d’informer
sur les difficultés à enseigner certains sujets dans les quatre premières années de l’école élémentaire (tableau
3.4).
42
Tableau 3.4 : Sujets difficiles à enseigner
Difficile 7
Facile 8
Inapproprié
La façon dont une histoire est construite
60
22
18
Comprendre le sens général d’une histoire, d’un poème ou d’un autre
texte écrit
Trouver le sens d’un mot placé dans une phrase
50
23
26
55
37
8
Lire à haute voix à une vitesse suffisante pour comprendre le sens de
l’écrit
Relier des histoires, des actions et des images avec de l’écrit
52
39
10
49
42
9
Reconnaître différentes parties dans un mot
39
53
8
Enseigner le son des lettres
26
68
6
Mettre la ponctuation et les lettres majuscules
24
73
3
Unir des sons ensemble pour former une syllabe
19
79
2
Les réponses ont été ordonnées par niveau de difficulté afin de mettre en tête du tableau les items que le plus
grand nombre d’élèves-maîtres a trouvé difficile à enseigner. Au-dessus de la ligne pointillée sont les aptitudes
qu’une majorité considère difficiles. Il faut remarquer que toutes ces aptitudes concernent la compréhension du
texte. Une large proportion d’élèves-maîtres trouve difficile la possibilité d’apprendre aux enfants à lire avec
compréhension et plus d’un quart des élèves-maîtres trouve que la compréhension d’une histoire est
inappropriée pour ce niveau. Par contre, les aptitudes techniques, qui concernent le déchiffrage, sont celles que
les élèves-maîtres trouvent plus faciles – par exemple, 4/5 des élèves-maîtres interrogés jugent facile
l’enseignement de la composition.
Tableau 3.5 Meilleure approche pour enseigner l'initiation à la lecture
Activité
(a) Écrire des mots entiers au tableau à côté des images et demander aux élèves de les lire à haute voix
plusieurs fois après vous
(b) Lire de petits contes et demander aux enfants de relire de courtes phrases pour vous
(c) Expliquer et donner des exemples des différents sons que les lettres donnent au début, au milieu et à la fin
des mots
(d) Combiner les lettres pour faire des syllabes qui peuvent former des mots simples
Aucune réponse
L’importance de la composition pour les élèves-maîtres est aussi évidente (Tableau 3.5), ainsi la majorité des
élèves-maîtres (57%) a choisi de combiner les lettres (méthode syllabique. Bien que les formateurs aient
expliqué l’importance du départ global pour ’établir le sens du texte du fait que la compréhension est au cœur de
la lecture, les élèves-maîtres n’en n’ont pas une bonne compréhension, ce qui se traduit par des pratiques sur le
terrain différentes de la théorie enseignée. Ainsi un des formateurs pense que malgré la formation initiale, les
enseignants une fois sur le terrain ne démontrent pas une bonne compréhension de l’enseignement de la
lecture.
Malheureusement l’activité lecture souvent dans nos classes élémentaires surtout au CI et CP, le
processus est parfois tronqué parce que la compréhension que nos enseignants devraient avoir
de la lecture n’est pas une compréhension qui est à la hauteur de ce que la lecture devrait
pouvoir fournir. (Formateur EFI 4)
Pour le formateur à l’EFI 2, l’expérience des stages, combinée à la préférence de la facilité et à la non-maitrise
de compétences apprises à l’EFI expliquent cette conception limitée de la lecture.
7
8
La catégorie difficile ici est composée des deux options dans l’enquête « très difficile » et « difficile »
La catégorie facile ici est composée des deux options dans l’enquête « très facile » et « facile »
43
%
26
4
12
57
1
Il faut aussi effacer l’idée que la lecture c’est le déchiffrage et installer chez eux la nouvelle
perception. Nous avons un problème, parce que ce que nous leur disons en théorie est balayé
par ce qu’ils reçoivent en stage. (Formateur EFI 2)
Les élèves-maîtres utilisent plus les modèles de leçons des maîtres d’application, qui sont plus
faciles, car généralement ils ne se sentent pas capables de faire ce qu’on leur apprend à
faire. (Formateur EFI 2).
La courte durée de la formation ne donne pas assez de temps aux formateurs pour discuter avec les élèvesmaîtres sur les pratiques observées dans les écoles d’application. Ces session de débriefing auraient permis de
mieux comprendre comment les stages pratiques s’accordent ou non avec la formation théorique à l’EFI :
Dans une formation initiale qui connaît des limites. Ici y a un minimum que nous installons et
pensons qu’il assure un minimum d’acquis pour tenir une classe, à la sortie. (Formateur EFI 4)
Pour l’enseignement de la lecture ce minimum est de connaître les étapes d’une leçon: Il s’agit, selon la
méthode mixte enseignée dans tous les EFI du schéma suivant :
Etape 1 : Lecture du texte, phrase clé ; acquisition globale de tous les mots de la phrase ; fixation,
mémorisation, photographie des mots
Etape 2 : Mot clé ; acquisition globale du mot clé, pour isoler et sortir la syllabe clé
Etape 3 : Syllabe clé à partir du mot clé, sortir la lettre (portant le son) du jour
Etape 4 : Lettre : fixation, acquisition auditive, visuelle, comparative de la lettre et du son
Etape 5 : Syllabe : formation syllabique à partir des lettres-sons
Etape 6 : Mot : Association syllabique pour la construction des mots, appui pour former des phrases
Etape 7 : Phrase : Construction de phrases simples et construction de texte au tableau
Etape 8 : Lecture du texte
Les élèves-maîtres semblent connaître les étapes, mais ils pensent que la procédure est trop longue par rapport
au temps de cours dédiés à la lecture ce qui ne permet pas de rentrer dans le détail pour toutes les étapes.
Cette situation ne permet pas d’adopter la démarche citée ci-dessus.
Pour moi c’est le déroulement global. C’est l’articulation des différentes étapes. L’élaboration de
la fiche avec les 7 étapes pour toute la semaine. Car les 7 étapes me paraissent relativement
longues par rapport à la leçon (Focus group élèves-maîtres EFI 2).
Il faut noter qu’il n’y a que sept étapes ici – la lecture finale étant supprimée. La confusion vient du fait que dans
les écoles d’application, les élèves-maîtres observent des maîtres qui, même s’ils commencent la séquence
avec la lecture du texte globale, ne se focalisent pas sur le sens du texte et après avoir étudié le son, ne
retournent pas au sens du texte. Il y a même des maîtres qui vont directement à la découverte du son clé.
Les élèves-maîtres à l’EFI 2 sont confus sur la méthode à appliquer et ont besoin de renforcement de capacités
pour l’élaboration de fiches.
Il faut insister sur l’élaboration des fiches. Les fiches qu’on nous donne sur le terrain sont
diamétralement opposées à celles enseignées ici. On ne sait plus sur quel pied danser... (Focus
group élèves-maîtres EFI 2)
L’introduction du nouveau curriculum a aussi augmenté la difficulté de la formation. Le CEB doit être généralisé
dans toutes les classes à partir de 2013, mais il n’est pas pris en compte dans le programme officiel de l’EFI.
Oui, les programmes c’est le décret 79 1165, portant sur l’organisation de l’enseignement
élémentaire. On essaie de leur faire comprendre comment lire ces programmes-là. … On se
contente de donner des informations sur le [nouveau] curriculum, mais il n’y a pas de temps,
pour le faire (Formateur EFI 2).
La connaissance du curriculum de l’éducation de base (CEB) vient en partie de la formation à l’EFI
(sensibilisation), mais elle vient surtout des stages pratiques dans les écoles d’application. En outre, les élèvesmaîtres font eux-mêmes des recherches afin de parfaire leurs connaissances du contenu pédagogique.
44
Avec cette formation on a déjà une approche par rapport au curriculum, la classe où on a fait
notre stage d’imprégnation déjà c’est une classe curriculaire. Avant de finir la formation on fera
encore un autre stage. Donc on aura des notions qui feront qu’on pourra tenir une classe
curriculaire. On fait des échanges de groupe, des échanges de paroles et d’idées. (Focus group,
Élèves-maîtres EFI 1)
Il faut noter une inégalité dans l’accès aux ressources et à la connaissance en général entre différentes EFI.
Certaines écoles ont accès à l’Internet et ont une bibliothèque alors d’autres n’en n’ont pas. Certains formateurs
organisent les élèves-maîtres en groupes et les initient à recherche alors que d’autres ne le font pas.
3.1.3 Conclusions
Malgré les écarts dans la disponibilité des ressources dans les différentes EFI, il est frappant de noter la quasisimilitude de l’éventail de réponses des élèves-maîtres des quatre EFI. Les graphiques produits par la
désagrégation des données quantitatives par EFI étaient assez similaires. À titre d’exemple le graphique 3.1 qui
correspond au tableau 3.5, indique que la seule différence apparait à l’EFI 1, où le taux d’élèves-maîtres qui ont
montré une préférence pour l’utilisation des images à côté des mots était le plus important, mais il faut noter que
cette différence n’est pas si grande.
Dans tous les focus groups, les élèves-maîtres, malgré la confiance déclarée, avaient des difficultés à discuter
de l’enseignement de la lecture d’une manière approfondie. À part les résultats que nous avons déjà analysés,
les données quantitatives ne révèlent pas de modèle fixe : par exemple dans le tableau 3.2 où les élèvesmaîtres devaient séquencer les activités, les résultats sont assez hétérogènes. Et cette tendance à la divergence
des réponses se retrouve dans les autres items. Les résultats ne nous permettent pas de décrire un modèle-type
d’enseignant en lecture que la formation a produit. Les connaissances et les pratiques des élèves-maîtres sont
assez générales et surtout les connaissances pédagogiques du contenu de la lecture ne sont pas consistantes
ou pas bien solides. La compréhension de la lecture et de la démarche de l’enseignement de la lecture est
différente de celle des formateurs.
Graphique 3.1 Meilleure approche pour initier une classe à la lecture
.
Moyenne
.6
.4
.2
0
EFI DAKAR
EFI FATICK
EFI SAINT LOUIS
EFI THIES
Écrire des mots entiers au tableau à côté des images
Lire de petits contes et demander aux enfants de relire
Expliquer et donner des exemples des différents sons des lettres
Combiner les lettres pour faire des syllabes
45
Vignette 1 : Résumé des connaissances, compréhension et pratique des élèves-maîtres
Connaissances : Ils savent que
Il faut partir du langage.
Il faut partir du global vers le particulier à cause de la nature syncrétique de l’enfant.
Une leçon ou une série de leçons en lecture consiste en sept ou huit étapes dont les plus importantes
concernent l’étude de la lettre/ son ou du mot.
Ils savent enseigner la lecture seulement en français.
Compréhension
La lecture est avant tout le déchiffrage du texte où les principales compétences sont la composition et
décomposition.
Pratiques
En pratique, ils savent qu’ils doivent commencer une leçon par la lecture d’un texte complet et qu’ils doivent
commencer par le concret.
3.3 Connaissances, compréhension, pratiques des Enseignants Récemment Qualifiés
L’origine de la compréhension et les connaissances de l’enseignement de la lecture des ERQ est diverse. Les
ERQ interrogés dans l’enquête disent qu’ils ont développé leur meilleure compréhension de l’enseignement de la
lecture durant la formation initiale (24% des répondants), en travaillant dans les écoles (21% des répondants) en
formation continue (21% des répondants), avec leurs collègues (20% des répondants). Pour les 13% qui ont
répondu autres, l’IDEN joue un rôle important dans la compréhension de la lecture. Le taux de réponses pour les
facteurs est environ le même. Pendant les entrevues, après les observations les ERQ ont mentionné les mêmes
sources de connaissances. Pour quelques-uns, ces différentes sources offrent la possibilité d’augmenter leur
compréhension et de développer la pratique. Une institutrice qu’on a observée dit qu’elle a acquis sa stratégie de
lecture « D’une part à l’EFI, mais c’était un peu différent de ce que je pratique à l’école. J’ai eu à appliquer les
mêmes techniques lues dans le rapport du séminaire organisé par l’IDEN et que mes collègues ont eu à suivre »
(ERQ Région 1). Mais pour d’autres, les différences entre les différentes approches sont plutôt problématiques :
« Je ne sais pas la façon exacte dont le cours de lecture doit se dérouler » (ERQ Région 4). La majorité des
enseignants interviewés disent qu’ils ont des difficultés à enseigner la lecture parce que leur connaissance est
insuffisante, n’ayant pas reçu de formation adéquate. « J’ai besoin d’une formation en lecture proprement dite »
(ERQ, Région 2). « J’ai des problèmes surtout en langage » (ERQ Région 4).
Presque tous les élèves-maîtres ont décrit leur aptitude à enseigner la lecture comme élevée ou très élevée,
mais une fois dans la classe cette confiance baisse. Ainsi, 44% des ERQ qui ont répondu au questionnaire
décrivent leur degré d’aptitude à enseigner la lecture dans les petites classes comme bas ou très bas. Aussi, les
observations suggèrent que dans plusieurs cas, la confiance des ERQ n’est pas bien fondée, car dans quelques
classes observées le maître se dit content de la leçon quoiqu’un échantillon d’élèves choisi par hasard n’ait pas
pu lire les mots clés.
La difficulté s’explique d’une part par le fait que les ERQ ont été trop optimistes en surestimant la capacité des
élèves à parler ou apprendre le français. Un ERQ dit que ce qui est difficile, c’est :
Surtout le fait de faire sortir les mots, ce qui n’est pas évident dans un milieu où l’élève n’entend
personne parler français dans son milieu. Alors arriver à ce qu’il y parvienne c’est difficile (ERQ
Région 3).
Dans la plupart des leçons observées, il est évident que le langage au début de beaucoup de leçons observées
n’était pas bien compris par une importante proportion de la classe. La stratégie la plus utilisée par les ERQ pour
faire face à ce problème était d’utiliser la langue maternelle des élèves lorsqu’il était évident ces derniers ne
comprenaient pas le français. Mais cela ne signifie pas que les ERQ, aient tenté d’enseigner la lecture en langue
nationale, mais qu’ils ont traduit des mots en langue locale comme stratégie de dépannage quand ils n’arrivaient
pas à bien expliquer une leçon ou une partie de la leçon. En effet, une très faible proportion des maîtres
interrogés, moins de 7%, disent qu’ils se sentent plus à l’aise à enseigner dans les langues nationales. Plusieurs
des maîtres ont aussi parlé de leurs difficultés en enseignant l’association syllabique et des sons du français : «
46
[Je me sens moins en confiance] au niveau de la discrimination auditive par exemple, un mot contenant le son
« e » et de mettre en relief le son » (ERQ Région 3).
Il faut noter que l’idée de partir du langage s’était bien ancrée dans la compréhension des élèves-maîtres amis
que ce n’est pas toujours le cas chez les ERQ. Toutefois, certains enseignants créent une situation concrète afin
de permettre aux élèves de retenir le son à enseigner:
Pour la lecture, par exemple pour l’imprégnation je fais tout pour que les élèves sortent la phrase
d’étude mais je fais tout pour que la phrase soit concrète. Par exemple pour le son « w », j’ai
appelé l’élève qui s’appelle Waly. Je lui ai donné un seau et je lui ai dit « vas chercher de l’eau
au puits » après j’ai dit « qui va chercher de l’eau au puits, qui ? » Ils me répondent : « Waly va
chercher de l’eau au puits ». À chaque fois j’essaie d’amener une situation concrète pour que les
élèves puissent fixer correctement le son. (ERQ à la Région 2)
Néanmoins, la majorité des enseignants observés se sont contentés d’écrire une phrase au tableau, de
décomposer et recomposer. Cette idée est renforcée par les données quantitatives. Par exemple, dans le
questionnaire, il a été demandé aux ERQ de mettre des activités dans un ordre qui permet de mieux développer
les aptitudes de lecture des enfants dans une leçon ou une série de leçons afin d’augmenter le vocabulaire en
lecture des élèves en choisissant de se concentrer sur les parties du corps humain.
.
L’option (c), (voir tableau 3.5) qui est le choix le plus populaire pour l’activité initiée au début de la leçon, est une
activité plus concrète qui exige le plus de langage. Cependant, il faut noter la diversité de réponses des ERQ. Ce
classement est un bon indicateur de la compréhension des ERQ, de la psychologie de l’enfant qui est à la base
de cette approche consistant à partir du concret vers l’abstrait : moins de 50%, c’est dire la majorité, n’est pas
arrivée à ce niveau de compréhension.
Tableau 3.5 : Choix des stratégies pour mieux développer les aptitudes en lecture
Activité
(a) Dessiner une personne, mettre des étiquettes sur les parties du corps et demander
aux enfants d’écrire leurs propres phrases
(b) Donner des cartes portant des mots tels ‘cou’ ou ‘nez’ aux enfants en groupes de 6
et leur demander de dessiner des parties du corps et d'en former des phrases
(c) Montrer du doigt les parties du corps d'un enfant dans la salle de classe et écrire
les mots sur le tableau dans une phrase comme "J'ai deux mains"
(d) Écrire une liste de mots sur le tableau à côté de dessins et demander aux enfants
de lire les mots à haute voix ensemble puis individuellement
1er
2me
3me
4me
23
27
23
27
9
33
36
22
48
25
18
9
21
15
23
42
La démarche de la leçon de lecture est, en général, la même partout, selon l’étape considérée. En effet, à la
première étape (CI-CP), la quasi-totalité des ERQ appliquent les étapes essentielles de la leçon de lecture :
lecture silencieuse d’un texte ou d’une phrase, lecture magistrale, isolement de la phrase clé ou du mot clé pour
arriver à l’isolement du son clé à étudier. À la deuxième étape (CE1-CE2), il s’agit de la lecture silencieuse d’un
texte par les élèves suivie de la lecture du maître, questions sur le texte pour la compréhension, analyse du
texte, selon une grille pour découvrir les caractéristiques du texte (exploitation du vocabulaire ou de la
grammaire).
D’abord les élèves ont fait une lecture silencieuse, la lecture silencieuse, vérification de la
lecture, après lecture magistrale, demander le nombre de phrases, poser des questions,
expliquer le texte et demander aux élèves de résumer le texte, de quoi parle le texte. (ERQ
Région 1)
Dans les classes élémentaires observées, l’enseignant faisait lire les élèves, et les chercheurs n’ont noté aucune
motivation pour intéresser l’apprenant. Et aussi dans les entretiens, éveiller l'intérêt chez les élèves n’était pas
mentionné comme considération importante. Souvent la démarche commençait par une lecture silencieuse des
élèves (ou du moins des moments silencieux), suivie d’une lecture magistrale de l’enseignant, et ensuite la
découverte du sens du texte (plus de la phrase que du texte).
J’ai commencé par la révision de la leçon précédente avec ON, aujourd’hui on fait la leçon avec
OM après la révision je commence par demander aux élèves de lire la phrase clé écrite au
tableau, ils identifient le son qui fait l’objet de la leçon, ils le répètent, je fais ressortir le son en
47
effaçant progressivement les syllabes jusqu’à obtenir le son qui fait l’objet de la leçon (ERQ,
Région 4).
En effet beaucoup de leçons des ERQ observées étaient pareilles à celles dont les formateurs se plaignaient –
la démarche était tronquée. Dans le déroulement de la leçon de lecture, certains enseignants estimaient devoir,
selon l’enseignement reçu à l’EFI, s’arrêter à l’isolement du son. Or une telle manière de procéder en rapport
avec le son est à même qu’’installer dans l’esprit des maîtres que l’isolement, l’étude du son est un objectif en
soi, une finalité. Cela crée même une rupture dans la démarche globale et dans l’esprit de l’élève. Cette
pratique confirme encore jusqu’à quel point la compétence de la lecture est mal comprise, installe effectivement
dans la « syllabation » et cristallise une telle approche.
Dans l’étape 1, (CI et CP), souvent, l’enseignant part d’une phrase, fait l’isolement du son à étudier et ensuite
applique la combinatoire. Il est noté que souvent la combinatoire est un objectif central dans la démarche en
lecture. Les chercheurs ont rarement observé un enseignant préoccupé par la conquête du sens de la phrase.
Cette étape est souvent escamotée et l’enseignant installe un rituel de la combinatoire. Dans les situations
observées, l'enseignant fait lire et répéter pour mémoriser. Ce rituel repose sur une compréhension erronée de
la lecture : on lit pour reconnaître les sons et les lettres et non pour faire du sens (comprendre le texte ou la
phrase).
Il y a acquisition globale, il y a isolement du son, formation et association syllabique [pour isoler
le son] Je vais faire séparer « PAPA » en syllabes, on efface le premier « PA » en leur faisant
répéter P+A=PA, c’est facile [après], on va faire la leçon sur « P » avec ses différentes écritures,
script et capital après on fait formation de syllabes (ERQ, Région 4)
Les différentes observations de séances de lecture ont montré une bonne connaissance du procédé de la
combinatoire. Les enseignants savent comment décomposer et recomposer. Ils ont compris que le procédé de la
combinatoire aide les élèves à lire. Bien qu’ils en aient cette connaissance, ils en ignorent la compréhension
pour une utilisation optimale et justifiée. Ils l’utilisent souvent de manière mécanique. La plupart des maîtres ont
dit qu’ils se sentent plus en confiance dans la décomposition et la recomposition des mots (combinatoire). Les
maîtres sont plus à l’aise dans cette technique qui ramène à la méthode syllabique qui est plus simple, plus
facile pour l’élève et le maître. La majorité des enseignants observés a parlé de cette activité en réponse à une
question sur le moment dans la leçon où ils se sentaient le plus à l’aise:
 Avec l’élimination pour trouver le son (ERQ, Région 2)
 Au moment de la reconstitution et de la reconnaissance des mots, de la phrase d’étude, là-bas,
[il n] y a pas de problème (ERQ Région 3)
 C’est surtout dans l’acquisition du mot et au niveau de la décomposition (ERQ, Région 2)
 La reconstitution, l’élimination des mots, le jeu des ardoises mobiles, après la séparation du
nombre de syllabes. (ERQ, Région 3)
En général, les maîtres observés se contentent de composer et décomposer, laissant de côté l’objectif de la
compréhension de la phrase et du texte. Comprendre que la combinatoire n’est pas le but, ni le seul procédé,
c’est comprendre ce qu’elle représente réellement. C’est une stratégie, une entrée parmi d’autres. Elle doit être
comprise comme une entrée graphophonologique (correspondance des graphèmes et phonèmes permettant la
décomposition en syllabes et la recomposition en mots).
Dans la pratique, les maîtres observés utilisent presque tous la technique des ardoises mobiles. Ce procédé est
souvent employé pour réaliser la procédure d’isolement des mots dans le processus de l’isolement du son à
l’étude. Or cette technique des ardoises mobiles bien comprise aurait permis de bien asseoir des règles
élémentaires, de manière implicite, de la syntaxe de la phrase française, en faisant comprendre aux élèves la
nature, la place et le rôle des différents mots employés. Utilisée de cette façon l'ardoise est également un outil
important pour une évaluation diagnostique et formative. Toutefois, il a été remarqué que les ardoises souvent
révélaient un grand nombre d'élèves qui n'avaient pas maîtrisé le sujet enseigné et le maître étaient prêt à
passer à l’étape suivante sans la compréhension de la majorité.
La combinatoire est un procédé qui permet de déchiffrer et de lire, mais ne permet pas de donner un sens au
texte lu. Il doit être utilisé comme procédé de dépannage quand les élèves butent. Quand la combinatoire est
utilisée et que les élèves n’arrivent pas à déchiffrer un mot, l’enseignant passe, et ne trouve pas de solution de
48
dépannage (Observation ERQ, Région 4). La plupart des enseignants observés ne comprenaient pas le rôle de
dépannage de la combinatoire. Or, cette question de la compréhension doit être la finalité à partir de laquelle on
doit construire toutes les stratégies et procédures, et mettre en œuvre les outils de lecture d’un texte. Elle est
une composante de la compétence de lecture. Mais la plupart des enseignants ne comprennent pas le rôle de la
lecture en tant discipline permettant l’installation de la compréhension.
Cette difficulté à enseigner la compréhension de la phrase et du texte est mise en évidence par l’item du
questionnaire qui demandait aux répondants de juger de la difficulté à conduire des activités en lecture.. En
effet, les réponses des ERQ ne sont pas très différentes de celles des élèves-maîtres. Le tableau 3.6 montre
que la plupart des maîtres continuent à trouver les activités techniques, surtout la composition et décomposition,
plus faciles que celles qui sont liées à la compréhension.
Tableau 3.6 : Aptitudes des ERQ à conduire des activités en lecture
La façon dont une histoire est construite
Lire à haute voix à une vitesse suffisante pour comprendre le sens de l’écrit
Trouver le sens d’un mot placé dans une phrase
Comprendre le sens général d’une histoire, d’un poème ou d’un autre texte
écrit
Relier des histoires, des actions et des images avec de l’écrit
Ponctuation et lettres majuscules
Reconnaître différentes parties dans un mot
Enseigner le son des lettres
Unir des sons ensemble pour former une syllabe
Difficile 9
62
58
56
51
Facile 10
13
22
27
35
Inapproprié
25
21
16
14
49
36
27
18
15
40
48
45
77
80
11
16
29
5
5
Le tableau 3.7 confirme les difficultés relatives à la compréhension. Les ERQ devaient choisir les deux
meilleures stratégies pour apprendre aux enfants à lire une petite histoire avec compréhension. Les réponses
des ERQ sont assez divergentes. L’emploi des images et la discussion en groupes peuvent aider les élèves des
petites classes à comprendre le sens d’un texte, mais l’option(e) que 38% des ERQ ont choisie exige beaucoup
d’un lecteur débutant.
Tableau 3.7 : Aptitudes relatives à la compréhension
%
(c) Faire des dessins sous forme de séquence de conte pour montrer ce qui est en train de se passer
45
(d) Demander aux enfants de lire le conte entre eux et de se poser des questions à propos du conte
44
(e) Demander aux enfants de lire le conte pour eux-mêmes et de répondre aux questions écrites au tableau.
38
(a) Expliquer ce qui se passe dans l’histoire pendant que vous enseignez
36
(b) Demander aux enfants de lire tout le conte et demander à un ou deux d'entre eux de vous dire ce qui se
passe dans le conte
36
Le tableau confirme que la majorité des ERQ a des difficultés relatives à l’enseignement de la compréhension.
Les résultats des enquêtes mettent en évidence que l’association de lecture des contes avec les images n’est
pas une priorité dans les activités de lecture. Le tableau 3.8 présente l’item où on doit décider du moment
d’introduction des activités dans l’enseignement de la lecture pour faciliter la compréhension. Les différentes
réponses renforcent la conclusion que beaucoup des ERQ ne priorisent pas la stratégie qui consiste à regarder
les images et à en parler. Il faut aussi noter l’éventail varié de réponses ce qui confirme l’inexistence d’un
modèle type de profil de connaissance lié à la formation.
La majorité des stratégies proposées sont appropriées pour développer une bonne connaissance des lettres
mais également celle du vocabulaire des élèves, cependant les faibles taux montrent que la majeure partie des
ERQ n’a pas une bonne compréhension de ces stratégies et techniques. Un tiers des ERQ pense que la lecture
des mots entiers est convenable à l’initiation de la lecture, et c’est l’activité la plus populaire pour le début. Les
9
La catégorie difficile ici est composée des deux options dans l’enquête « très difficile » et « difficile »
La catégorie facile ici est composée des deux options dans l’enquête « très facile » et « facile »
10
49
maîtres qui l’ont choisie ont compris l’esprit de l’approche globale ou de la méthode mixte. Mais ce qui est
frappant, c’est qu’il y a plus d’enseignants qui pensent que cette activité est inutile: plus de la moitié l’emploierait
beaucoup plus tard ou jamais. Cette réponse explique les leçons observées dans lesquelles l’instituteur n’a pas
dépassé l’étape de la décomposition.
Tableau 3.8 : Priorisation des séquences des activités en lecture
(c) les élèves lisent au tableau des mots entiers et les récitent
(h) vous racontez des récits sur les situations familières que
vous illustrez avec des actions
(e) les élèves récitent les lettres de l'alphabet
(i) vous lisez aux enfants des contes avec des images
(g) vous enseignez des rimes et chants simples
(d) les élèves récitent les sons des lettres
(b) vous attachez une étiquette aux objets dans la salle de classe
(a) les élèves regardent des images d’objets familiers et en
parlent
(f) vous enseignez les salutations et les routines de la salle de
classe
Dès le
début
Un peu
plus tard
Beaucoup
plus tard
Jamais, l’activité
est inutile
33
31
14
25
19
8
34
37
30
29
22
21
10
2
28
24
30
14
39
87
19
5
6
20
6
1
23
42
41
45
45
9
2
84
9
5
Le taux des ERQ qui considèrent ces différentes stratégies est peut-être le plus significatif par rapport à ces
données. Bien que ces stratégies soient utiles à l’enseignement de lecture et qu’elles puissent être introduites
dans une approche mixte, elles ne sont pas dans le cadre explicite de la démarche d’une leçon de lecture
comme on enseigne à l’EFI. Presque toutes les leçons qu’on a observées étaient similaires, comme on les a
décrites ci-dessus. C'est-à-dire qu’ayant appris un moyen d’exécuter la leçon, les ERQ ne comprennent pas la
nécessité de varier ce qu’ils font pour rendre la leçon plus intéressante et pour l’adapter aux compétences des
élèves. Le résultat des données montrent que la plupart des ERQ interprètent la compréhension de lecture
comme un processus de déchiffrage, ce même résultat a été trouvé chez les élèves-maîtres.
Pour tester la capacité des ERQ à intégrer des stratégies pour faciliter la fluidité et la compréhension globale, il
leur a été demandé de montrer la fréquence d’utilisation des activités mentionnées au tableau 3.9 en cochant la
case correspondante. Les résultats montrent qu’ils utilisent peu les stratégies qui peuvent faciliter la fluidité et
une compréhension globale. Une importante proportion des ERQ ne se sert pas de ces stratégies ou les juge
même inappropriées pour les premières quatre classes. Les stratégies choisies ont été triées dans le tableau
afin que celles que la plus grande proportion des ERQ considère inutiles soient en tête. Les recherches en
lecture ne s’accordent sur l’utilité relative des différentes méthodes de l’enseigner, mais elles s’entendent sur la
fait que la lecture fluide requiert la coordination de différentes entrées au texte (NRC 2010 ; NITL 2005). Bien
que les ERQ enseignent l’entrée graphophonologique par la combinatoire, beaucoup sont très réticents à
enseigner les autres entrées au texte : l’entrée pragmatique (e), l’entrée sémantique (c) et l’entrée syntaxique (a)
et (b).
Tableau 3.9 : Fréquence de l’utilisation des stratégies en lecture pour comprendre un texte
(e) Enseigner la structure d’un texte non fictif – table
des matières, lexique, etc.
(a) Montrer aux élèves comment identifier le sens d’un
mot par sa racine
(c) Demander aux élèves de prédire le contenu d’une
histoire à partir de son titre et de la première ligne
(f) Laisser les élèves choisir un livre ou une histoire
pour lire par eux-mêmes
(b) Aider les élèves à trouver le sens d’un nouveau mot
par sa position dans une phrase
(g) Demander aux élèves ce qu’ils aiment d’un texte
50
Presque
chaque jour
10
Parfois
29
Jamais ou non approprié
pour ce niveau
60
23
20
57
12
39
49
7
50
43
38
28
35
27
41
31
(d) Expliquer l’utilisation des signes de ponctuation
39
37
23
Les observations de leçons de lecture confirment une compréhension restrictive des stratégies de conquête du
sens du texte. Les maîtres, en général, laissent de côté nombre d’autres stratégies à mobiliser parmi lesquelles
l’entrée idéographique (mot en tant qu’image, silhouette, faisant appel à la mémoire auditive et visuelle de
l’élève), l’entrée sémantique (connaissance du sens du mot, à partir du contexte). La conséquence de cette
pratique c’est que les élèves lisent de manière mécanique en répétant et en lisant par cœur, mais ne
comprennent pas ce qu’ils lisent. On dit qu’ils « disent » au lieu de « lire ». La compréhension et la lecture
courante ne sont pas acquises. Un autre inconvénient est d’installer les élèves dans la lecture par déchiffrage et
association syllabique. Ils peuvent ainsi prendre l’habitude de lire en ânonnant, en syllabant. Cette manière de
procéder peut être un obstacle à la lecture fluide. Elle fait perdre beaucoup de temps aux élèves sur un mot. Et
focalisés sur cette opération, les élèves en arrivent à oublier ce qui est lu. Ils ne parviennent pas à faire le lien et
n’aboutissent pas à une compréhension de ce qu’ils ont lu. Cela nécessite d’installer chez les élèves la capacité
de lire rapidement un certain nombre de mots pour réaliser la compréhension du texte lu. Pouezevara et al.
(2010) suggère 40 mots par minute. La fluidité ne semble pas être une qualité désirée par les ERQ et un maître
qui a suggéré que la tâche d’un bon maître d’initiation à la lecture est « de donner beaucoup d’exercices en
lecture et avoir la fluidité et un bon débit pour lire et montrer les techniques qu’il faut adopter pour lire et agrandir
le visuel » (ERQ Région 3) est une rare exception.
Il est important d’enseigner aux élèves à faire des phrases, à en composer à partir des ardoises, des étiquettes
mots, de les dire avant de pouvoir en construire par écrit. Cela installe petit-à petit une capacité utile pour fixer
l’ordre des mots et en lire de semblables avant d’en produire eux-mêmes. Dans les classes observées, il a été
noté que les maîtres savent qu’ils doivent faire former des mots et faire trouver des mots par les élèves. Mais ils
ne comprennent pas toujours tout le bénéfice que ceux-ci peuvent en tirer et l’emploi qu’ils peuvent en faire.
C’est pourquoi, il n’y a pas une préoccupation à faire acquérir un maximum de mots par les élèves et à
constituer ainsi un capital de mots et à utiliser une banque de mots pour l’enrichissement permanent du
vocabulaire en tant qu’objectif dans toute activité de lecture. On dirait que leur enseignement focalise sur la
leçon observée et non sur l’apprentissage continuel des élèves. Nous avons déjà remarqué que les leçons de
lecture suivent un modèle peu varié ; on dirait que les ERQ avaient l’impression qu’il suffit d’appliquer cette
démarche pour que les élèves apprennent à lire automatiquement. Ils pensent avoir réussi une leçon quand ils
ont bien suivi le processus.
Vignette 2 : Résumé des connaissances, compréhension et pratique des ERQ
Connaissances
La connaissance des différentes composantes de la lecture à enseigner aux élèves pour installer la
compétence en lecture n’est pas toujours évidente : Faut-il enseigner :
- l’alphabet, les sons des lettres, le rapport entre phonèmes et graphèmes, le vocabulaire, la lecture fluide et la
compréhension ?
- le procédé de la combinatoire ?
- la démarche d’une leçon de lecture n’est pas toujours sue de façon exacte (les différentes étapes) ?
Les ERQ en général ne savent pas utiliser plusieurs entrées pour lire.
Compréhension
La compréhension de la lecture chez les ERQ est un processus mécanique qui consiste à déchiffrer le texte en
liant les sons à des lettres et les combinant pour former les mots.
Ils ont une faible compréhension:
- du lien entre langage et lecture.
- du lien entre l’acquisition à la fois auditive et visuelle de mots nouveaux et la lecture
- de créer une banque de mots pour un espace lettré permanent dans lequel doit baigner l’élève
- de la nécessité de la création d’une situation d’apprentissage pour motiver les élèves
- et surtout de l’objectif de compréhension du texte
Pratique
La démarche de la leçon de lecture est, en général, la même partout selon l’étape considérée. En effet, à la
première étape (CI-CP), le maître commence par une lecture silencieuse d’un texte ou d’une phrase, lecture
magistrale, isolement de la phrase clé ou du mot clé pour arriver à l’isolement du son clé à étudier.
Les étapes de la compréhension du texte sont escamotées. Le travail de décomposition et de recomposition
syllabique reste l’activité centrale. Il devient la finalité de l’apprentissage de la lecture.
51
L’évaluation formative et l’évaluation diagnostique sont omises.
Le programme des classes CI et CE1 au moment des observations était déjà celui du nouveau curriculum qui
est basé sur l’approche par compétences. Au moment de la rédaction de ce rapport le CEB sera installé dans les
autres classes des deux premières étapes. Ceci requiert une différente approche dans la gestion des cours ; où
la leçon se fera dans une situation d’apprentissage. Très peu d’ERQ ont utilisé une situation d’apprentissage
pour enseigner la lecture : partir de la réalité et faire participer les élèves. Un maître a tenté de faire sortir les
élèves, mais n’a pas réussi parce qu’il y avait d’autres personnes dans la cour de l’école. Mais il a réussi à
élaborer la phrase clé à partir d’une observation, à l’instar de celui qui a demandé à « Waly » d’aller puiser de
l’eau en lui remettant un seau. Par ailleurs un autre enseignant a réussi à créer une situation d’apprentissage, en
maths, où les élèves ont joué aux billes. Cela signifie une bonne connaissance de l’importance de créer une
situation d’apprentissage, mais les enseignants n’ont pas toujours l’opportunité d’appliquer leur connaissance.
Un autre enseignant a tenté de mettre en situation un élève pour exploiter cette situation et faire faire aux élèves
une phrase sur laquelle devait reposer la leçon du jour (ERQ, Région 1).
Néanmoins, la plupart des enseignants observés ne se préoccupent pas de créer une situation d’apprentissage.
Ils demandent directement aux élèves de regarder le texte au tableau ou, d’ouvrir leur livre à telle page et de lire.
Sans motivation, on s’engage dans la lecture de manière mécanique comme dans un rituel. L’enseignant
n’essaie pas d’embarquer les élèves dans la compréhension du texte et de mobiliser leur attention, mais il est
préoccupé par le fait de leur faire décomposer et recomposer.
3.3.1 Conclusions
Les origines des connaissances des ERQ relèvent plus de la pratique dans les écoles, avec l’accompagnement
des IDEN, l’assistance des directeurs et collègues que de la formation initiale dans les EFI. Du reste, les ERQ
avouent l’insuffisance de leurs connaissances et demandent un renforcement de la formation en lecture. Cela
explique pourquoi nombre d’entre eux ont peu de confiance dans leur capacité d’enseigner la lecture. Il s’y
ajoute une confusion acceptée dans la démarche d’une leçon de lecture : les différentes étapes à réaliser et
l’articulation cohérente entre ces différentes étapes ne sont pas maîtrisées. C’est pourquoi dans la pratique, on
note un ensemble d’actes, d’opérations sans liens cohérents pour un objectif précis préalablement conçu et bien
identifié.
Ainsi, les différents procédés ou techniques, justes en soi, deviennent entre leurs mains une sorte de rituel à
accomplir pour assurer un bon enseignement de la lecture. Il faudrait certainement identifier dans ces faiblesses
des réalités objectives vécues par les maîtres qui ont reçu une formation insuffisante, tant du point de vue de la
durée que de l’adéquation du contenue avec le programme et les compétences attendus pour faire d’eux de
bons enseignants en lecture.
Cette faible maitrise de l’enseignement de la lecture pourrait être expliquée par le niveau académique
relativement faible des élèves-maîtres. Les données quantitatives des EM nous révèlent un taux de 62% qui n’a
pas fait le concours, et la prédominance d’élèves-maîtres qui entrent à l’EFI avec le niveau du BEFEM (55.28%
de l’échantillon des 4 EFI). Ces données sont indicatrices du niveau des ERQ de l’année académique 20092010.
3.4 Les Programmes de formation continue
L’analyse des différents programmes de formation continue en lecture a été difficile à accomplir du fait du
nombre d’enseignants de l’échantillon. Malgré le choix des régions en fonction des zones d’intervention du
programme SARENA pour la collecte des données sur les ERQ, seulement six enseignants ayant reçu cette
formation ont été observés. Avec les données qualitatives cet échantillon nous permet de tirer des conclusions,
mais le faible échantillon des données quantitatives ne nous permet pas de faire des analyses statistiques
inférentielles. Néanmoins, les chercheurs ont noté les cas où les enseignants avaient suivi le programme
SARENA. En outre, l’autre programme qui pouvait influencer l’enseignement de la lecture est la formation en
curriculum (CEB). Parmi les enseignants qui ont rempli le questionnaire, on a noté vingt-six maîtres (26) qui
avaient suivi la formation SARENA et vingt-et-un (21) qui n’avaient suivi aucune formation continue.
52
Tableau 3.10 Enseignants sondés selon la formation continue suivie en lecture
Aucun
Curriculum
SARENA
Total
Inconnu
0
0
1
1
<21
0
0
1
1
21-25
3
1
0
4
Age
26-30
7
10
2
19
31-35
7
6
1
14
>35
4
9
1
14
Total
21
26
6
53
Mâle
Femelle
3
6
3
18
20
3
12
41
Nous avons désagrégé les résultats de l’enquête selon les programmes de formation continue que les maîtres
ont suivis. La conclusion la plus frappante est que, dans presque tous les cas, le profil des enseignants est
pareil. Que les enseignants aient suivi de la formation continue ou non, les réponses ne montrent pas de
différences marquées. Par exemple, le tableau 3.11 présente les réponses à un item qui demande aux
enseignants à quelle fréquence ils font des activités en lecture. On remarque le même schéma qu’on a déjà
noté : une importante proportion des maîtres n’est pas disposé à utiliser, ou ne connaît pas, les activités non
syllabiques. Mais dans presque tous les cas les résultats des trois différentes catégories ne divergent pas
beaucoup. Pour conclure qu’une différence est due au programme, il faudrait que tous ou presque tous les
enseignants qui ont suivi le même programme fassent le même choix et que ce choix soit différent de celui des
autres catégories.
Tableau 3.11 : Lien entre la fréquence d’utilisation des activités dans le cadre de l’apprentissage de la
lecture et la participation aux programmes de formation continue
Activités
a) Montrer aux élèves comment identifier le sens
d’un mot par sa racine
(b) Aider les élèves à trouver le sens d’un nouveau
mot par sa position dans une phrase
(c) Demander aux élèves de prédire le contenu
d’une histoire à partir de son titre et de la première
ligne
(d) Expliquer l’utilisation des signes de ponctuation
(e) Enseigner la structure d’un texte non fictif – table
des matières, lexique, etc.
f) Laisser les élèves choisir un livre ou une histoire
pour lire par eux-mêmes
g) Demander aux élèves ce qu’ils aiment d’un texte
Aucun programme|
Curriculum|
SARENA|
Aucun programme|
Curriculum|
SARENA|
Aucun programme|
Curriculum|
SARENA|
Aucun programme|
Curriculum|
SARENA|
Aucun programme|
Curriculum|
SARENA|
Aucun programme|
Curriculum|
SARENA|
Aucun programme|
Curriculum|
SARENA|
Chaque jour
Parfois
Jamais11
24%
35%
33%
52%
46%
50%
24%
23%
50%
10%
19%
17%
43%
31%
33%
5%
16%
33%
29%
50%
33%
38%
27%
33%
0%
0%
0%
0%
15%
0%
38%
38%
50%
5%
27%
0%
29%
0%
17%
10%
12%
0%
38%
39%
33%
47%
53%
50%
76%
61%
50%
53%
42%
33%
52%
43%
67%
67%
84%
50%
62%
39%
67%
Les résultats de la recherche montrent (voir tableau 3.11) que les programmes de formation continue ont peu
d’influence sur les enseignants. Ce résultat est confirmé par l’item demandant aux répondants d’identifier la
situation où ils ont développé leur meilleure compréhension de l’enseignement de la lecture : seul un des maîtres
SARENA a choisi la formation continue ; et 38% des enseignants qui ont fait la formation en curriculum l’ont
choisie, le même pourcentage qui a sélectionné le contact avec les collègues.
Des résultats de l’enquête pris dans l’ensemble, il faut noter les cas où les enseignants SARENA sont unanimes
et qui sont plus probablement dus à la participation à cette formation. :
11
Cette catégorie inclut « Non approprié à ce niveau »
53




Tous considèrent comme une bonne stratégie le fait de guider les élèves afin qu’ils reconnaissent les
mots et les phrases dans les chants, les poèmes et les histoires (81% des enseignants sans FC)
Aucun des maîtres ne trouve ces aptitudes inappropriées pour les classes CI à CE2 :
o Trouver le sens d’un mot placé dans une phrase
o Unir des sons ensemble pour former une syllabe
o Relier des histoires, des actions et des images avec de l’écrit
o Ponctuation et lettres majuscules
o Lire à haute voix à une vitesse suffisante pour comprendre le sens de l’écrit
Seul un des maîtres trouve difficile de faire comprendre le sens général d’une histoire (52% des
enseignants sans FC)
Concernant le meilleur moment pour introduire des activités en lecture, la majorité pense que faire
regarder aux élèves des images d’objets familiers et en parler est convenable au début du cours (81%
des enseignants sans FC) ; mais aucun ne considère que la lecture au tableau des mots entiers ou la
récitation des sons des lettres n’est appropriée pour l’initiation (10% des enseignants sans FC). Aucun
des enseignants ne trouve inutile de raconter des récits sur les situations familières que vous illustrez
avec des actions (14% des enseignants sans FC).
Du fait que l’échantillon des maîtres formés dans le curriculum est un peu plus large, les tendances dans les
données quantitatives sont encore moins prononcées. Les différences notables entre les enseignants qui n’ont
pas eu de formation continue et ceux qui ont suivi la formation du curriculum révèlent que ces derniers sont plus
susceptibles de faire réciter aux élèves les sons des lettres (31% contre 10%) et les lettres de l’alphabet (41%
contre 24%) dès le début.
Quant aux données qualitatives, on n’a pas remarqué de différences entre les enseignants qui ont suivi les
différents programmes ni pendant les observations ni pendant les interviews. Les connaissances, les
compréhensions et les pratiques semblaient à peu près les mêmes que celles décrites chez les ERQ. Il a été
noté sur le terrain que tant pour l’utilisation des supports du curriculum de l’éducation de base que celle de la
stratégie SARENA, il y a un problème : le manque de support. Le curriculum de base indique une démarche, un
contenu, des compétences à installer et met à la disposition des maîtres des supports comme les albums de
lecture pour atteindre les objectifs d’apprentissage, mais ce matériel fait souvent défaut, surtout dans les régions
autres que celle de la capitale. Souvent, les enseignants essaient de s’adapter en utilisant le matériel disponible,
mais les résultats d’apprentissage sont différents de ceux qui étaient initialement visés. La méthode du
curriculum n’est pas toujours mise en pratique parce que le matériel pédagogique qui s’y rapporte n’est pas
disponible.
La question de l’adéquation du matériel pédagogique (support) au programme officiel est importante parce que
c’est ce matériel qui concrétise le programme et qui rend opérationnel la méthodologie et la démarche
préconisée. C’est pourquoi, on note un décalage entre l’approche globale en lecture et la pratique en cours dans
les classes par les ERQ. Il en est de même du rapport entre la méthode SARENA et l’utilisation des manuels
traditionnels « Sidi et Rama ». Dans la région 2, par exemple, l’enseignant avait le livre du CEB mais ne
disposait pas du matériel. Il utilisait le livre "Sidi et Rama" (qui n’était pas adéquat) et ne disposait pas de l’album
de lecture qui met l’accent sur les différents types de textes. Il ne pouvait pas utiliser les consignes du (CEB). Il
était retourné à l’ancienne méthode par défaut de matériel. Les maîtres formés à la stratégie SARENA utilisent le
livre "Sidi et Rama" à la place du livre “Moussa". Il arrive aussi que plusieurs enseignants qui ont été formés à la
stratégie de lecture SARENA l’abandonnent par défaut de matériel, surtout pour le CP où le manuel
« Animatou » était absent.
On peut aussi conclure que la formation continue sur la SARENA n’a pas eu l’impact escompté à cause du faible
nombre d’enseignants touché. Les maîtres qui ont été formés à cette méthode constituent une infime minorité.
En effet, dans un département où nous avons conduit le travail de terrain par exemple, sur 220 écoles, seules 21
sont concernées. En outre, il existe un décalage entre la pratique des ERQ visités et la théorie. Il semble bien
que nombre d’entre eux bien qu’étant informés de la méthode et connaissant certains procédés et techniques de
SARENA, ont du mal à lier correctement les étapes de la démarche préconisée par SARENA. Par ailleurs,
certains enseignants reviennent à la méthode mixte, s’ils ne passent pas clairement à celle syllabique. Ainsi,
nous avons pu constater une déperdition de la méthode à cause de l’absence d’un suivi de la séance de
formation. En effet, le fait que ceux qui avaient été formés au CI n’ont pas pu continuer avec le manuel adapté
54
au CP a contribué à les ramener au support traditionnel de « Sidi et Rama ». Il s’y ajoute que le temps de
formation très court (2 jours) ne permet pas en réalité une bonne maîtrise d’une démarche en rupture avec celle
qui prévalait jusqu’ici.
L’évaluation du programme de formation continue SARENA (INEADE 2005) montre un décalage entre la
connaissance « déclarée » et la pratique de l’enseignement de la lecture. Il apparaît clairement que tous les
maîtres observés durant cette évaluation, à l’exception d’un seul, utilisent toutes les stratégies SARENA, selon
leurs déclarations, mais le déroulement de la leçon de lecture présentée aux évaluateurs fait apparaître une
grande disparité (INEADE 2005). Il en est de même de la formation sur le curriculum qui n’a duré qu’une
semaine pour l’ensemble des disciplines de l’élémentaire. C’est dire que la formation continue reste encore
insuffisante pour un accompagnement des ERQ dans le renforcement de leurs capacités à maîtriser
l’enseignement de la lecture. En outre la stratégie de lecture SARENA n’a pas touché une masse suffisamment
critique pour engendrer des changements dans la pédagogie de la lecture.
55
Chapitre 4: Apprendre à enseigner les Mathématiques
4.1 La formation Initiale
4.1.1 Les formateurs
Dans les EFI, les formateurs sont des inspecteurs de l’éducation avec des formations de base variées :
psychologie, instituteur, professeur de maths dans l’enseignement moyen et élémentaires. Cependant, le profil
académique du formateur en maths ne correspond pas toujours à la discipline du fait du manque de formateur
en maths :
J’ai toujours eu à enseigner la psychologie, mais à défaut d’encadrer et compte tenu du nombre
de classes pléthoriques dans l’établissement, j’ai ajouté l’enseignement des mathématiques car
de plus il manque des formateurs dans ce domaine. (Formateur EFI 4)
Tableau 4.1 : Profil des formateurs en Mathématiques
Qualification des formateurs en mathématique
Inspecteur de l’Enseignement Élémentaire, Professeur de
Psychologie, pas de formation spécifique en Mathématique
Inspecteur de l’Enseignement Élémentaire, pas de formation
spécifique en mathématique
Inspecteur de l’Enseignement Élémentaire, pas de formation
spécifique en mathématique
Inspecteur de l’Enseignement Élémentaire, Professeur de
Mathématiques au collège
Expérience
25 ans comme inspecteur
avec 2 ans en charge de la
didactique
22 ans comme inspecteur
avec 4 ans d’expérience
comme formateur à l’EFI
7 ans d’expérience dans
l’enseignement élémentaire et
7 ans comme formateur EFI
6 ans dans l’enseignement
secondaire et 6 ans comme
formateur EFI
Genre
Homme
Homme
Homme
Homme
Les connaissances des formateurs viennent de leur formation de base dans les écoles normales, dans les
universités, de leur recherche personnelle, de leurs pratiques réflexives tout au long des séries d’observation
des enseignants en évaluation réelle de classe, et lors des séminaires.
Dans la formation, nous avons fait un module de didactiques mais je ne me suis pas arrêté là,
j’ai continué à faire de l’autoformation en me documentant de façon permanente, en lisant des
ouvrages sur la didactique des mathématiques, en consultant régulièrement le net. (Formateur
EFI 2)
Les connaissances de formateurs en maths sont variées. Alors que certains maitrisent les approches
pédagogiques pour l’enseignement des maths dans les classes d’initiation, d’autres ont des connaissances
générales du contenu de la discipline.
Une des quatre observations dans une EFI a montré que cette connaissance concernait plutôt l’évolution des
mathématiques. Le professeur se focalisait pendant tout le cours sur l’histoire plutôt que sur la didactique des
56
mathématiques. Il affirmait que la connaissance de quelques notions de maths, combinée à une aptitude
individuelle permettait d’enseigner les maths et que les enseignants devaient faire eux-mêmes des déductions à
partir des connaissances apprises à l’EFI.
Pour pouvoir enseigner même au niveau de l’élémentaire cette discipline, il faudrait que le
formateur ait quelques notions de base et quelques aptitudes en maths ….Personnellement,
dans le souci de l’apprentissage, je privilégie les notions que je voudrais voir réinvesties sur le
terrain et la déduction pourrait être faite par les apprenants eux-mêmes (Formateur EFI 3),
En général, les formateurs observés connaissent plusieurs méthodes et savent que, quelle que soit l’approche
pédagogique choisie, le point de départ reste le concret. Ils ont une bonne compréhension de la nécessité de
passer par différentes phases : phase concrète, schématisation et phase abstraite, et ils ont insisté sur cet
aspect de la question, soit en situation d’entretien, soit pendant les leçons observées. Dans les cours de maths
observés, ils ont fait comprendre aux élèves-maîtres que dans la phase concrète, l’enfant manipule des objets
concrets qui peuvent être « pédagogiques » ou de la vie quotidienne. Le matériel est visuel ou tactile. Dans le
cadre de la leçon observée à l’EFI 4, le formateur a mis en évidence sa connaissance de la différence entre
système métrique et la mesure. L’objectif principal de son cours était d’amener les élèves-maîtres à bien saisir le
glissement conceptuel qui devait s’opérer sur la notion de système métrique. Il cherchait le changement de
comportement des enseignants en mathématiques. Il les préparait à inclure la manipulation dans leur stratégie
pédagogique.
C’est la notion de mesure qui est à l’honneur. Et sous ce rapport là Il faut changer complètement
d’attitude et de comportement pédagogique. L’essentiel ici n’est plus de livrer les élèves à des
conversions métriques mais de les livrer à des activités effectives de mesure. Les systèmes
métriques ne sont que l’application des activités effectives de mesure. (Formateur EFI 4).
Il sait que le concept d’activités de mesure est plus large que le concept de système métrique. Il décrit les
différentes étapes pour arriver à une bonne formation de l’esprit mathématique.
C’est pourquoi quand j’observe des maîtres qui sont dans la démarche pédagogique se livrer à une
manipulation purement mathématique, à une schématisation purement mathématique pour déboucher
maintenant sur l’abstraction vraiment je dis comme on est en train de former l’esprit mathématique.
(Formateur EFI 4)
La bonne connaissance des étapes de la construction de la connaissance en maths des formateurs est
renforcée par cet entretien du formateur de l’EFI 1 où il a souligné l’importance du concret en numération pour
permettre à l’enfant de fixer définitivement le nombre.
Les méthodes, les stratégies c’est ça, la 1ère des stratégies avec les maths, c’est la
concrétisation, si nous sommes au niveau du CI-CP, nous sommes en acquisition des nombres,
les nombres c’est très abstrait, les élèves sont trop petits pour l’acquérir comme ça, il faut
concrétiser, et ce n’est pas le maître qui concrétise mais c’est le maître avec les élèves
(Formateur EFI 1)
Pour le formateur de l’EFI 1, cette phase est absolument nécessaire dans la construction des connaissances en
mathématiques. Le formateur de l’EFI 4 a démontré ses connaissances du contenu de la discipline qu’il faut
enseigner.
Si nous prenons les activités numériques. Par exemple si nous venons en CI, CP on ne va pas
commencer par les nombres dès le début de l’année, on va commencer avec les notions de « peu »
« beaucoup » « rien », etc., qui sont des notions qui préparent l’enfant à l’initiation, à l’aspect cardinal
du nombre. Ce qui fait que plus tard il pourra comparer, ranger les nombres (Formateur Maths EFI 1).
Selon le formateur de l’EFI 4, la schématisation permet de représenter la situation ou le concept au tableau ou à
l’aide du manuel. La schématisation permet de développer une compréhension du concept. Il dit que cette
phase, parfois appelée « approche semi-concrète », permet de développer un esprit mathématique. Il affirme
que l’utilisation de différentes couleurs constitue une autre dimension importante pour distinguer la
représentation de la dizaine de celle de l’unité. Par ailleurs, il déconseille de représenter l’opération 4+1=5 sous
la forme d’une écriture qui associe de simples dessins à des symboles purement mathématiques. En lieu et
place il préconise l’approche ensembliste (Fiche de préparation leçon Maths EFI 4).
57
Dans la phase abstraite, il est demandé aux élèves de recourir aux symboles mathématiques comme les signes
des opérations : addition, soustraction, multiplication division (+ ; - ; X ; /). Les formateurs de maths dans les EFI
ont compris cette démarche et préparent les élèves-maîtres dans ce sens. Ainsi, le formateur de l’EFI 4
préconise d’articuler les signes conventionnels à la représentation (phase semi- abstraite) pour être conforme au
processus de la pensée de l’enfant (Interview EFI 4). Le formateur de l’EFI 2 dit également que ces méthodes
centrées sur l’apprenant peuvent améliorer l’efficacité des apprentissages en s’appuyant sur l’organisation de la
classe, sur le travail de groupe qui permet d’instaurer une relation horizontale (élèves-élèves). Le formateur de
l’EFI 4 a une connaissance de la relation entre la didactique des mathématiques et la psychologie de l’enfant
pour bien poser un acte d’éducation
Dans mon cours, c’est surtout les aspects théoriques parce que vous savez que dans chaque
didactique, y’a des aspects psychologiques qu’il faut revoir. Parce qu’avant de poser un acte
d’éducation qui tend à influer, influencer de façon positive l’enfant, il faut d’abord chercher à
connaitre cet enfant comme le disait Jean Jacques Rousseau : « commencer d’abord par
connaitre les enfants car très assurément, vous ne les connaissez point (Formateur EFI 4).
Dans leur pratique de classe, les formateurs organisent des cours magistraux et des travaux dirigés. Le
formateur de l’EFI 4 donne un travail dirigé pendant la leçon sous forme de travail de groupe, corrige avec les
stagiaires et les évalue. En plus, durant les travaux dirigés, les formateurs aident les élèves-maîtres à élaborer la
fiche raisonnée en parcourant toutes les rubriques en manipulant devant eux et avec eux le matériel. « J’ai choisi
de les initier par la fiche raisonnée, la fiche que je leur ai expliquée va leur permettre de mieux mettre en relation
la théorie qu’ils ont apprise et la pratique qu’ils feront plus tard en classe » (Formateur EFI 1,).
Les formateurs sont conscients de l’importance de l’acquisition de connaissance du contenu mathématique par
les élèves-maîtres. C’est pour cela que deux des quatre formateurs utilisent la langue locale pour mieux toucher
tous les élèves-maîtres et s’assurer ainsi que les cours sont bien compris.
Oui, parfois, je dis des mots wolofs, parce que quand je vois que l’explication est un peu difficile ;
vous savez que les enseignants qui viennent ici ont un niveau extrêmement bas. Quelquefois, le
formateur baisse tellement son tempo que finalement, il ne lui reste plus que son wolof pour faire
comprendre, pour faire passer sa leçon. Donc, j’en use mais je n’en abuse pas, et ceci dans le
souci de mieux me faire comprendre (Formateur, EFI 4)
Ils savent aussi que pour quelques élèves-maîtres qui ont choisi d’enseigner à l’école élémentaire, les
mathématiques ne sont pas toujours la matière où ils se sentent à l’aise. Dans sa pratique, un des formateurs
prépare psychologiquement les élèves-maîtres à démystifier les mathématiques et à les prendre comme toutes
les autres disciplines.
C’est un préjugé et ce préjugé est lié principalement à la manière dont les mathématiques sont
enseignées. On a eu des élèves qui ont rejeté les mathématiques parce qu’ils sont tombés sur
un professeur qui faisait mal les mathématiques, donc la manière de transmettre le savoir, de
gérer l’élève dans des situations précises le conduit à aimer ou à rejeter la discipline (Formateur
EFI 4).
En plus de la formation théorique, les élèves-maîtres sont encadrés par les maîtres d’application qui sont des
enseignants de l’élémentaire, sélectionnés pour leurs aptitudes pédagogiques. Bien que les formateurs
apprécient la formation de l’EFI, ils pensent que les écoles d’application ne renforcent pas toujours les
connaissances théoriques. Le formateur de l’EFI 2 affirme que, malgré les directives données par les EFI pour
encadrer les stagiaires, il y a une rupture entre ce que les élèves-maîtres reçoivent théoriquement et
l’encadrement qu’ils obtiennent sur le terrain.
Souvent ce sont des directives que l’on donne en général, ce n’est pas régulier. Il n’existe pas
d’articulation entre la théorie et la pratique. Quand ils [élèves-maîtres] viennent sur le terrain, ce
qu’on leur enseigne n’est pas en adéquation avec la théorie (Focus group maître application EFI
2)
Les chercheurs ont noté, en général, de bonnes connaissances, compréhensions et pratiques pédagogiques
chez les formateurs de maths dans les EFI. Cependant, les élèves-maîtres ne maitrisent pas toujours les cours
théoriques, ce qui peut créer des difficultés dans la mise en pratique des connaissances
58
Le lien [entre la théorie et la pratique] est naturel, ce qu’ils [élèves-maîtres] apprennent au
niveau de la théorie il doivent essayer de le mettre en pratique. Ce n’est pas toujours facile,
parce qu’il faudrait comprendre ce qu’on veut réellement dire au niveau de la théorie pour
pouvoir mettre en pratique (Interview, Formateur EFI 1)
4.1.2 Connaissances, compréhension, pratiques des élèves-maîtres
A l’EFI, les élèves-maîtres reçoivent une formation sur la planification et la mise en œuvre d’une leçon. Ils sont
formés sur le programme du décret 79-1165 en calcul mental, numération, géométrie, mesure et calcul pratique.
Les fiches de préparation qu’ils rencontrent et font eux-mêmes sont basées en principe sur ce programme. Les
formateurs apprennent aux élèves-maîtres les démarches de la leçon de maths en se focalisant sur le passage
du concret vers l’abstrait. Les focus groups organisés après la prestation du formateur de maths ont permis aux
élèves-maîtres de donner des explications claires sur ce sujet. « Oui, les programmes c’est le décret 79 1165,
portant organisation de l’enseignement élémentaire. On essaie de leur faire comprendre comment lire ces
programmes-là » (Interview formateur EFI 3).
La confiance des élèves-maîtres qu’on a déjà notée en lecture est présente aussi en maths. La grande majorité
décrit son aptitude et sa confiance à enseigner les maths comme très élevée ou élevée (94% pour l’aptitude et
93.% pour la confiance). Ils ont expliqué dans les focus groups que cette confiance vient surtout de
l’encadrement des formateurs de l’EFI de faire des élèves-maîtres des enseignants opérationnels à leur sortie.
« [Avec le] dévouement des formateurs on pense qu’on arrivera à bien enseigner les maths » (Focus group
élèves maître EFI 1).
Cette confiance est renforcée par la motivation personnelle des élèves-maîtres et les possibilités de trouver
d’autres ressources pédagogiques en dehors des cours théoriques qui leur permettront d’enseigner. « Je suis
prêt à enseigner, même si je ne suis pas à la hauteur; je pense qu’avant de prendre une classe il faudrait se
préparer en conséquence » (Focus group EFI 3). « Je suis prête parce que j’ai fait la formation pour être
enseignante et j’ai l’amour de l’enseignement et je sais que j’ai quelque chose à apporter aux élèves et en
faisant des recherches, j’espère être à la hauteur » (Focus group EFI 3).
En plus de l’optimisme par rapport à leurs qualités personnelles et leur motivation, cette confiance vient
également de la formation pratique qui leur a permis d’acquérir des connaissances sur les stratégies
d’enseignement des mathématiques qu’ils ont.
Je peux dire que j’avais des notions dans l’enseignement, mais je n’avais pas de pédagogie,
après les deux semaines d’immersion sur le terrain j’ai acquis une certaine technique. Les
formateurs nous ont donné une démarche à suivre pour préparer les fiches, car il faut préparer
une fiche avant chaque cours. Mais actuellement je suis capable de gérer ça, de faire une fiche
de préparation (Focus group EFI 1)
Les formateurs mettent l’accent sur l’importance pour l‘enfant de l‘expérience concrète pour le développement
des concepts mathématiques et nos données suggèrent qu’en principe la plupart des élèves-maîtres
comprennent bien la nécessité de commencer par des expériences concrètes.
L’activité de mesure n’est plus comme une activité d’antan comme ça se passait comme une
conversion, mais une activité d’action, là où les élèves doivent effectivement puiser de leurs
mains, de mesurer effectivement les poids et les volumes nouveaux. (Focus group EFI 4)
Ce résultat de recherche est renforcé par l’item du questionnaire qui leur demande de choisir les meilleures
activités pour aider les enfants à comprendre les concepts de base en mathématiques. Le tableau 4.1 montre
que presque tous les élèves-maîtres savent l’importance de l’utilisation d’exemples concrets et d’exercices
pratiques dans les classes d’initiation. Ils comprennent l’importance d’impliquer activement l’apprenant, ce qui
permet à l’enfant de participer activement à son apprentissage.
59
Tableau 4.1 Meilleures manières d’aider la compréhension des concepts de base
d'accord
(d) utiliser des exemples concrets et pratiques lors des leçons
(c) exiger qu’ils fassent beaucoup d'exercices
(b) leur enseigner à se rappeler les étapes importantes dans la résolution des problèmes de maths
(a) leur montrer beaucoup d’exemples résolus
pas
d'accord
1
8
26
67
99
92
74
33
Une autre question de l’enquête qui demandait aux répondants d’identifier les caractéristiques d’un bon maître
de mathématiques du primaire confirme aussi ce résultat. Encore une fois la majorité des élèves-maîtres a
privilégié les méthodes actives. Ils décrivent le bon maître comme celui qui préfère le concret : celui qui utilise du
matériel simple. Ils reconnaissent également l’importance de la relation entre le vécu de l’enfant et
l’apprentissage des concepts théoriques, ce qui correspond à l’approche par compétences du CEB.
Tableau 4.2 Un bon maître qui sait bien enseigner les maths dans les petites classes
d'accord
pas d'accord
(e) … explique les sujets en utilisant du matériel simple
95
5
(b) … donne beaucoup d’exemples mathématiques de la vie quotidienne
89
11
(a) … est bon lui-même / elle-même en mathématiques
86
14
(c) … peut enseigner aux enfants à se rappeler des faits importants
51
49
(d) … montre aux enfants des exemples résolus
37
63
Même dans les petites classes, la grande majorité des élèves-maîtres pense qu’un enseignant doit avoir une
bonne maitrise du contenu mathématique. Les deux tableaux montrent que deux tiers des répondants ne
considèrent pas que les exemples résolus peuvent être utiles. C’est peut-être parce qu’ils l’interprètent comme
activité passive. Ces résultats montrent une préférence pour les activités actives plutôt que passives. « Nous,
notre formation est une formation active, on est là que depuis un mois et demi mais les gens nous ont conseillé
de partir des cas pratiques, on part du concret pour aller vers l’abstrait » (Focus group élèves-maîtres EFI, 1).
Les élèves-maîtres de l’EFI 2 interrogés connaissent les étapes pour introduire les activités: « C’est la
schématisation qui vient avant, après la schématisation il faut symboliser » (Focus group élèves-maîtres, EFI 2).
Les élèves-maîtres ont aussi une connaissance théorique des types d’activités : « activité libre » et« activité
dirigée » ; « activité symbolisation / schématisation dirigée » qui sont des rubriques de la fiche de préparation
ainsi que les étapes à suivre pour dérouler une leçon de maths :
On commence par l’activité libre d’abord pour arriver à l’activité dirigée …« Activité libre » : on va
laisser les élèves s’activer librement c’est à dire plus exactement faire leur travail librement sans
l`aide du maître » ; « Activité dirigée »: l’activité sera dirigée par le maître qui va donner des
consignes et les élèves vont comprendre (Focus group, EFI 2).
Les élèves-maîtres ont bien défini les concepts d’activités libres ou dirigées mais n’ont pas parlé de leur utilité
pédagogique. Quelques élèves-maîtres pensent que l’expérience concrète ou les élèves manipulent le matériel
doit être une activité libre. Aussi les résultats de la recherche ne permettent pas de savoir si les élèves-maîtres
comprennent pourquoi le maître devrait initier des activités dirigées et comment les lier aux activités libres12. Les
résultats de la recherche montrent que les élèves-maîtres ont acquis une connaissance générale et une
compréhension des certains principes tels l’importance du concret depuis l’EFI, mais les données ne permettent
pas de dire que les élèves-maîtres sont capables de traduire les principes dans la pratique. Quant à la
schématisation, les élèves-maîtres interrogés en connaissent le contenu qui peut se traduire sous forme de
dessin ou de symbolisation d’un ensemble d’objets. Un des enseignants observés a pris l’exemple de bâtonnets
et de cahiers et un autre celui d’un cercle et un carré.
12
Il faut noter que la question est beaucoup discutée par les pédagogues en mathématiques. Il s’agit de l’interprétation du
constructivisme et des concepts tels l’échafaudage de la pensée. Voir par exemple Kirschner, et al. (2006).
60
On fait définir comme on a fait la présentation du nombre, on a fait définir un ensemble en
comptant 11 et on ajoute une à ces ensemble 11 bâtonnets ou bien 11 cahiers et on ajoute un à
ce même ensemble pour que cela nous donne un ensemble de 12. (Élève-maître, EFI 2).
Quand on symbolise on fait un ensemble et on fait des branches et sur ces branches on fait un
ensemble et on définit cet ensemble par un cercle plus un carrée qu’on va utiliser seulement
c’est ça qu’on nous appris pour la symbolisation. (Focus group élèves-maîtres EFI2)
Pour la majorité des élèves-maîtres l’utilisation de matériel pédagogique concret et simple permet aux enfants de
comprendre plus facilement les maths. Ce résultat est confirmé par un item du questionnaire qui demandait aux
élèves-maîtres de choisir une stratégie pour planifier une leçon pour aider ses enfants à comprendre ce que
c'est qu'un nombre
Tableau 4.3 Stratégies pour comprendre ce que c’est qu’un nombre.
Stratégie
%
(b) Présenter un nombre égal d'objets, par exemple, quatre oranges avec quatre tasses
58
(d) Organiser les enfants afin qu'ils mettent les objets en deux tas pour voir lequel des deux tas a plus ou moins d’objets. 26
(c) Écrire les nombres de 1 à 10, et demander aux enfants de répéter le comptage de 1 à 10
10
(a) Répéter une suite de nombres (par exemple, 1, 2, 3 etc.) dans le même ordre
6
Total 100
Dans cette situation qui est adapté aux premières semaines de la scolarisation, la majorité des élèves-maîtres a
choisi les activités de manipulation. Ces élèves-maîtres comprennent que les enfants apprennent en manipulant
et en regardant des ensembles d'articles. Mais les comparaisons à ce stade n'impliquent pas des nombres, mais
plutôt les similitudes. Il faut noter que cette assertion peut être modérée par le taux de réponses à l’item (d). Les
enfants en bas âge ont besoin d'expériences concrètes, de discuter de ce qu'ils font, et de pratiquer pour saisir
les relations et comprendre les idées. Une stratégie serait de distribuer les oranges et voir s'il y a en a assez. Si
tous les élèves reçoivent une orange, ils comprendront que le nombre d’élèves du groupe est le même que celui
d’oranges. La recherche a permis de mettre en évidence les sujets pour lesquels les enseignants éprouvaient
des difficultés à enseigner et ceux qui étaient assez faciles à enseigner.
Tableau 4.4 La difficulté d’enseigner les thèmes de mathématiques.
Thèmes
f) Comprendre les valeurs positionnelles (0 à 100) ex. unités, dizaines, centaines
j) Donner la signification des nombres, compter
a) Additionner des nombres à deux ou trois chiffres avec retenues
e) Multiplier des nombres (2 chiffres et 3 chiffres)
i) Soustraire des nombres à deux ou trois chiffres avec emprunt
g) Reconnaître des fractions
c) Effectuer des divisions
h) Résoudre des problèmes écrits
d) Estimer et mesurer des distances, volumes et poids
b) Comparer des fractions
Facile
78
67
60
57
Difficile
17
25
38
36
Non approprié
4
8
3
7
47
46
46
44
26
21
48
33
51
52
52
52
4
21
4
5
22
28
Les élèves-maîtres trouvent que l’enseignement des thèmes de numération sont les plus faciles, notamment la
compréhension des valeurs positionnelles, le comptage des nombres, l’addition à deux ou trois chiffres avec
retenues et la multiplication des nombres à deux et trois chiffres. Ces résultats peuvent être interprétés comme
une connaissance des notions de base en numération, impliquant des procédures simples. 67% des répondants
pensent que le thème (j) – donner la signification des nombres, compter est facile (thèmes qui est la base de
toute compréhension numérique) Cependant, une fois que les thèmes de maths deviennent plus complexes,
notamment la soustraction avec retenue, la reconnaissance et la comparaison des fractions, les élèves-maîtres
éprouvent plus de difficultés. Les difficultés peuvent s’expliquer par le faible niveau de connaissance des
concepts des élèves-maîtres lors du concours d’entrée à l’EFI.
Dans le tableau 4.4 les thèmes sont mis dans l’ordre par rapport au taux de répondants qui les ont trouvés facile
ou difficile. Tous les thèmes, sauf la comparaison des fractions, sont traités par le CEB dans les deux premières
étapes et en général, l’ordre dans le tableau suit celui dans lequel les thèmes sont introduits dans les
programmes de l’éducation élémentaire. Les exceptions sont les thèmes non numériques.
61
En effet dans le CEB le programme de mathématiques est divisé en quatre parties – les activités géométriques,
numériques, celles de mesure et de résolution des problèmes – Les 22% qui trouve le thème de l’estimation de
la mesure inapproprié témoignent de la mauvaise connaissance du curriculum de l’élémentaire. Seul 5% ont
marqué la résolution de problèmes comme inappropriée mais il faut remarquer que beaucoup la trouvent difficile.
Bien que les élèves-maîtres soient conscients du lien entre l’apprentissage et la vie quotidienne des enfants,
beaucoup n’ont pas démontré une aptitude à donner un contexte réel aux opérations mathématiques.
Tableau 4.5 Apprendre a enseigné les valeurs positionnelles
%
(b) Utiliser du matériel comme des paquets de bâtonnets ou des tas de cailloux pour enseigner la valeur numérique
et l'idée de dizaines et d'unités.
(a) Expliquer que le '3' représente en réalité trois dizaines, ainsi, ce n'est pas la même chose que l'unité '3' :
38
(d) Expliquer que le 3 en 35 est en réalité 30, donc plus que 5 :
(c) Échanger les trois dizaines en unités pour montrer que le 3 vaut plus que le 5
22
10
100
Total
30
Pour comprendre les stratégies utilisées pour enseigner les valeurs positionnelles, il a été demandé aux
répondants de choisir une stratégie pour montrer que le ‘3’ et le '5' dans le nombre ‘35’ ne valent pas la même
chose que ‘3’ et ‘5’ séparément. Les résultats ont montré que les élèves-maîtres ont aussi des difficultés à
traduire les concepts mathématiques en activités pratiques concernent la numération, si on a noté qu’en principe
les élèves-maîtres comprennent bien l’importance de l’activité concrète, on est moins certain qu’ils puissent
traduire ce principe en pratique. Ainsi, dans un des items du questionnaire qui s’intéressait à l’enseignement des
valeurs positionnelles ; le taux le plus élevé des élèves-maîtres a choisi l’option où le maître aide l’enfant à
comprendre le concept en utilisant un matériel concret, mais c’est seulement 38% et plus de la moitié ont préféré
une explication orale. Ce résultat traduit la préférence des élèves-maîtres pour les activités concrètes.
Tableau 4.6 Stratégies pour enseigner l'addition jusqu'au chiffre 9
Activité
Utile
Inutile
(d) Apprendre aux élèves à compter de 1 à 9, mettre des calculs au tableau et leur demander de trouver
les réponses
(a) Leur enseigner à compter de 1 à 9 et leur montrer au tableau des exemples d'additions de chiffres qui
font 9
(c) Grouper des nombres et réunir les groupes pour former un total de 9
80%
20%
77%
23%
74%
26%
(b) Utiliser un conte à problème (problème écrit ou oral)
33%
67%
Pour démontrer les stratégies pour enseigner l’addition jusqu’au chiffre 9, les élèves-maîtres ont recours à des
stratégies « classiques » qu’ils ont peut-être appris durant leur propre éducation élémentaire. Pour enseigner
l'addition jusqu'au chiffre 9, les plus importants taux de réponses d’élèves-maîtres est basé sur les calculs au
tableau, ce qui signifie que la compréhension de la combinaison d’ensemble d’objets est sautée pour aller
directement vers l’apprentissage des éléments symboliques de base de l’addition. Au contraire, ceux qui ont
choisi l’option de grouper des nombres et réunir les groupes pour former un total de 9 ont compris qu’il faudrait,
dans le processus d’apprentissage, que l‘enfant comprenne que l'addition est d’abord un processus de
combinaison d’un ensemble d’objets. Cette réponse a été trouvée par 77% des répondants, ce qui traduit une
connaissance des étapes du cheminement mathématique.
Enfin, dans le tableau 4.7 on voit des stratégies que les élèves-maîtres considèrent utiles pour expliquer la
soustraction 52-25. On pourrait dire qu’en général les élèves-maîtres savent que pour aider les enfants à
comprendre la soustraction avec retenue, l’explication théorique combinée avec le matériel concret de
démonstration sont les meilleures stratégies. Cependant une proportion considérable – à peu près un tiers –
juge inutile les stratégies (c) et (e) qui utilisent le matériel.
62
Tableau 4.7 Stratégies pour aider les enfants à soustraire 52 de 25?
Stratégie
a) Expliquer qu’il est impossible de soustraire un nombre plus grand d’un nombre plus petit, donc on
emprunte une dizaine pour avoir 12 et ainsi on peut en soustraire 5
(c) Utiliser des objets pour leur montrer comment convertir en dizaines et en unités et ensuite leur
montrer la soustraction avec retenue
(e) Écrire la soustraction verticalement au tableau et faire la soustraction
(d) Mettre 52 objets en ligne et en enlever 25
(b) Expliquer en utilisant un exemple: Par exemple, 'si on n'en a pas assez pour soustraire, on peut
emprunter 10 d’un ami et ainsi on peut faire la soustraction’
Utile
74%
Inutile
26%
71%
29%
68%
63%
48%
32%
37%
52%
Quelques élèves-maîtres ont une connaissance du contexte à travers les stages pratiques et le micro
enseignement. Dans les EFI, ceux qui suivent les stages pratiques sont imprégnés des réalités de terrains, mais
le stage peut être assez court (surtout pour certains élèves-maîtres qui viennent en retard). Quelques rares
élèves-maîtres ont affirmé durant les interviews qu’ils n’avaient pas eu la chance de suivre un stage pratique. Il
arrive aussi que les pratiques ne soient pas toujours en relation avec la formation théorique reçue à l’EFI.
Certaines EFI, du fait de leurs équipements, exposent mieux les élèves-maîtres au contexte. Une EFI dispose de
salles de micro-enseignement et possède un équipement informatique qui permet aux élèves-maîtres d’être plus
informés que les stagiaires des autres régions sur les réalités des écoles. C’est la seule école qui a
l’infrastructure pour le micro-enseignement.
Ainsi, les élèves-maîtres ont différentes expériences du contexte réel de la pratique de classe et de l’école. Il faut
noter le décalage et le manque de coordination entre les enseignements théoriques et la pratique de classe. Les
maîtres d’application ont un programme officiel à terminer et les élèves-maîtres sont obligés de s’adapter. Il faut
noter que l’EFI recommande aux maîtres d’application de mettre l’accent sur les maths et le français lors du
passage des stagiaires, mais cette consigne n’est pas toujours facile à respecter.
En conclusion, la formation initiale en mathématiques a réussi à donner aux élèves-maîtres des connaissances
de base. Presque tous ont une compréhension de l’enseignement des mathématiques basée sur le principe qu’il
faut approcher par le concret. La formation leur a donné les moyens de planifier des leçons qui respectent le
passage du concret vers la schématisation et ensuite vers l’abstrait. Mais les élèves-maîtres manquent
d’expérience pratique et n’ont pas toujours l’opportunité d’y réfléchir, ce qui signifie qu’ils ont ou auront des
difficultés à traduire leur compréhension et leur connaissance en pratiques pédagogiques. On peut dire que leur
connaissance pédagogique du contenu des mathématiques est encore faible. Cette dernière doit être encore
plus importante avec le CEB où la tâche de l’enseignant est de créer des situations d’apprentissage et
d’intégration. La compréhension de l’approche par les compétences n’était pas évidente dans nos données.
Cependant, l’existence du curriculum de base qui inclut les phases de préparation de la leçon semble rassurer
certains formateurs : « Dans l’ensemble ils réussissent les exercices qu’on leur donne hein. Surtout avec le
curriculum maintenant y a des leçons qui sont presque prêtes, il suffit juste de les prendre et de les adapter »
(Interview, formateur EFI 1). On pourrait se demander s’il s’agit seulement d’adapter ce qui est inscrit dans le
curriculum ou de bien de comprendre ses principes en d’en reconnaitre les stratégies et les mettre en pratique.
Vignette 3 : Connaissance, compréhension et pratiques des élèves-maîtres en mathématiques
Connaissances
Les élèves-maîtres ne connaissent pas bien les programmes en vigueur dans les écoles élémentaires surtout le CEB.
Ils ne connaissent pas bien la géométrie
Ils trouvent les thèmes non numériques difficiles à enseigner
Compréhension
Ils comprennent l’importance de l’entrée par le concret et l’importance de la schématisation pour approfondir
l’apprentissage.
Ils ne comprennent pas l’utilité de montrer les exemples résolus
Pratiques
Ils peuvent élaborer une fiche pédagogique adaptée pour le programme du décret 79-1165.
Ils ne connaissent pas les méthodes leur permettant de traduire l’enseignement des concepts en activités pratiques
et ils ont recours à de stratégies moins concrètes
63
4.2 Les Enseignants Récemment Qualifiés (ERQ)
Les connaissances des ERQ viennent de la formation initiale, de la formation continue, de la pratique
enseignante et surtout des directeurs et collègues.
A l’EFI on nous a appris comment élaborer une fiche de maths, c’est ça qu’on nous a appris à
l’EFI. Mais la pratique je l’ai apprise ici. (ERQ région 1)
A l’EFI on nous a donné une démarche pour la leçon de mathématiques. Avec l’aide du
Directeur je me suis amélioré un peu. (ERQ Région 3)
Oui j’ai discuté avec les collègues, ils m’ont conseillé de faire comme ça. Au début j’avais des
problèmes, compter 1, 2, 3 etc., un collègue m’a dit de prendre les grands bâtonnets pour les
dizaines et les petits bâtonnets pour les unités. Pour les coquillages aussi y a les gros et les
petits, les cailloux également (ERQ, Région 2)
Les observations des ERQ ont permis d’appréhender le niveau de difficultés des ERQ à bien gérer le temps bien
que la planification de la leçon occupe une place importante dans la formation initiale. En effet, certains maîtres
ont essayé d’aller au-delà de la leçon du jour – par exemple la découverte de plusieurs nombres ou l’introduction
à la découverte d’un nombre au niveau du CP avec toutes les quatre opérations arithmétiques (ERQ Region2).
Par contre, dans d’autres leçons observées, l’enseignant n’a pas réussi à introduire les points planifiés. Le
manque de temps obligeait souvent les enseignants à passer à l’étape suivante avant que les élèves ne
comprennent la leçon en cours. En plus, certains ERQ avaient des difficultés à reconnaître si les élèves avaient
compris ou non. Les observations n’ont pas permis de voir que les enseignants utilisaient l’évaluation formative
pour diagnostiquer les difficultés des élèves et y remédier
La majorité des ERQ pense que la formation initiale ne les prépare pas assez à enseigner les mathématiques.
En effet, les élèves-maîtres reçoivent des connaissances dans les démarches à suivre pour conduire une leçon,
mais pas assez de connaissances pour la mise en pratique de cette démarche. En plus, certains ont dit qu’ils
trouvaient l’enseignement des maths très difficile. Cette situation a été amplifiée par les grèves répétées. « Je ne
crois pas que j’ai reçu une formation à l’EFI qui puisse me permettre de faire cela. Je l’ai rencontrée sur le
terrain. J’ai essayé de voir quelle était la meilleure manière de faire et je l’ai appliquée » (ERQ, Région 1). « Oui
à l’EFI j’ai fait là-bas 6 mois mais on n’a pas appris grand-chose, les maîtres nous sortaient à 10h00. J’ai appris
… mais …avec les grèves …. » (ERQ, Région 2).
Pour ma formation personnellement ça restait beaucoup, en mathématiques il y avait beaucoup
de choses que je n’ai pas comprises. Quand je venais ici je n’étais pas dans le bain. D’abord
comment élaborer une fiche normalement, les différentes étapes d’une leçon de maths, je ne
maîtrise pas comme il faut. (ERQ, Région 4)
Quand je venais ici je n’étais pas dans le bain. D’abord comment élaborer une fiche
normalement, les différentes étapes d’une leçon de maths, je ne maîtrise pas comme il faut.
(ERQ, Région 1).
L’insuffisance des connaissances est due à la courte durée du stage pratique et celle de la formation initiale. La
formation initiale en mathématiques ne tient pas toujours compte des besoins d’enseigner dans des classes ou
étapes spécifiques. Quelques rares maîtres ont eu la chance de faire les différentes étapes afin d’être bien
préparés à enseigner dans toutes les classes de l’élémentaire. La pratique enseignante s’acquiert surtout sur le
terrain avec l’appui des directeurs, appelés « doyens ».
Ce n’est pas suffisant quand même : j’ai fait 6 à 7 mois à l’EFI, puis on faisait des pratiques et
moi j’ai eu la chance de faire la 1ere étape, donc c’est la 1ere fois que j’ai une classe de 2eme
étape. En tout cas ce que j’ai appris à l’EFI, il y a une grande différence. Souvent j’aborde les
doyens pour des conseils. (ERQ, Région 3)
Personnellement je n’ai jamais observé une classe de première étape durant ma formation.
(Enseignant Région 4)
64
La formation initiale ne prépare pas les ERQ à enseigner dans toutes les étapes de l’élémentaire à cause du
manque de temps pendant la formation théorique et cette situation est aggravée si l’élève-maître n’a pas eu la
chance de faire ses stages dans des classes spécifiques. La plupart des enseignants se sentent à l’aise en
général pour enseigner la numération (avec des difficultés à expliquer les retenues). Les observations ont
également permis de savoir que les ERQ ont des difficultés à enseigner la géométrie, et la résolution des
problèmes et ces difficultés sont accentuées par les barrières linguistiques. En effet les enfants en général ne
comprennent pas la langue d’enseignement qui est le français.
Les ERQ ont des difficultés à enseigner la résolution de problèmes qui se situent à deux niveaux : la première
est due au fait qu’ils n’ont pas reçu de formation spécifique en résolution de problèmes, mais l’enseignement par
les pairs leur ont permis de faire face à leurs difficultés. La difficulté s’explique aussi par le non maitrise des
textes écrits en français. Les élèves ne comprenaient pas l’énoncé pour résoudre le problème posé. « La
résolution me pose problème car je peine à expliquer clairement les solutions des problèmes » (ERQ Région 1).
Je ne l’ai pas appris à l’EFI mais c’est la cohabitation avec des collègues qui m’a aidé. A l’EFI on
nous apprend que la présentation et l’écriture additive, on n’a pas appris la résolution de
problème. Avant [j’écrivais l’énoncé] du problème au tableau les élèves comprenaient mais
avaient du mal à le réécrire dans leur cahier. (ERQ, Région 1)
En maths, les élèves ont des difficultés à développer un raisonnement mathématique. Cette
difficulté est accentuée par la difficulté de comprendre le libelle du problème qui est en français
(ERQ, Région 4)
Un autre enseignant a résolu ce problème en utilisant des exemples concrets, le jeu, et en encourageant les
élèves à utiliser leurs propres phrases pour comprendre l’énoncé du problème et le résoudre
Alors j’ai changé et j’ai commencé [proposer] des problèmes concrets où [les élèves] qui
[formulent] l’énoncé, je les fais jouer et j’ai remarqué que de cette façon ils comprennent mieux
car c’est leurs propres phrases et la plupart trouve [la réponse]. J’en ai parlé à un collègue et
c’est lui qui m’a dit que la pédagogie d’aujourd’hui veut que l’élève participe, ce n’est pas au
professeur de tout faire. (ERQ, Région 1)
L’utilisation d’une langue étrangère aux jeunes apprenants est un défi majeur pour l’acquisition de
connaissances. Les élèves ont une double difficulté : comprendre l’énoncé du problème en français et
comprendre le contenu de l’énoncé du problème ce qui en rend l’enseignement encore plus difficile. Certains
enseignants ont compris que la pédagogie active permet de contourner certaines difficultés.
Les entretiens et observations ont montré que la majorité des ERQ avaient des difficultés à enseigner la
géométrie du fait du manque de matériel pour concrétiser les leçons et de l‘insuffisance de formation initiale
spécifique à l’enseignement de la géométrie et de la mesure. Les ERQ n’ont pas une connaissance
pédagogique du contenu en géométrie. Ils ne savent pas comment enseigner les concepts théoriques aux
jeunes élèves.
En géométrie et en mesure… à l’EFI les cours étaient théoriques, pas de démarche typique pour
la fiche. Je n’ai pas appris la démarche pour les petites classes pour ces différentes activités
(ERQ, Région 1)
[Quel était votre problème ?]Décrire les figures quand on fait des rectangles ou des triangles, si
tu utilises des côtés ou des angles du rectangle ou du carré. Quand vous dîtes tracez un carré,
ils tracent un rectangle. (ERQ, Région 1)
[Pour le cercle quel était votre problème ?] Rayon, diamètre tout ça, je ne savais pas si on devait
construire le cercle seulement et montrer aux élèves le centre sans pour autant tracer le
diamètre etc. J’ai fait la leçon deux fois mais jusqu’à présent je ne la sens pas (ERQ, Région 1)
La plupart des ERQ ont trouvé l’enseignement de la géométrie difficile mais les chercheurs ont aussi observé
une minorité qui avait de difficultés encore plus grandes du fait du manque de soutien du directeur.
L’observation de classe d’une enseignante a montré une présentation confuse de la leçon et les élèves
interrogés n’ont pas compris les points principaux de la leçon. Interviewée à la fin de la leçon, elle a affirmé
65
qu’elle n’avait pas le temps d’assister aux séminaires de PREMST. Les difficultés des ERQ à enseigner la
géométrie sont dues aussi à la confusion des différents programmes proposés : le décret 79 1165 et le nouveau
curriculum (CEB). Les ERQ n’ont pas été assez bien formés pour appliquer le CEB
En géométrie et en mathématique. Si on pouvait nous faire un exemple de fiche sur le
curriculum en activités numériques intégralement, on aura moins de problème. Mais
franchement si on veut utiliser le curriculum et utiliser la fiche, moi j’ai des problèmes. Parce que
tu ne sais même que tu dois enseigner l’ancienne méthode ou la nouvelle méthode (ERQ,
Region1).
[Vous appliquez quel programme ?] Le curriculum mais aussi le programme qu’on faisait avant.
Mais pour le curriculum on n’a pas assez de bagages pour appliquer le curriculum (ERQ,
Region1).
La grande majorité des ERQ semble connaitre la démarche concrétisation-schématisation-symbolisation, mais
dans la plupart des leçons observées, ils ont montré des difficultés à appliquer la théorie apprise durant la
formation initiale et n’avaient pas des stratégies de remédiation pour mettre à niveau les élèves qui ne
comprenaient pas la leçon. Par exemple dans une leçon de numération au CI, il était évident pour le chercheur
que beaucoup des élèves n’avaient pas compris le concept de nombre et que l’enseignant ne les avait pas
préparés dans les activités de pré- numération, mais selon l’enseignant : « C’est un problème qui peut se gérer
au fil de la leçon, les élèves eux même rectifient les erreurs de leurs camarades » (ERQ, Région 1).
Aussi la gestion des activités concrètes présente un défi aux ERQ : cela exige une bonne préparation qui était
absente dans un nombre significatif des leçons observées. Il faut noter que dans les classes observées, les
maîtres ont démontré une bonne connaissance du programme du cours préparatoire en activités numériques, en
résolution de problèmes, et valeurs positionnelles :
[Et en mathématiques ?] Ici c’est la numération, normalement au CP on s’arrête au nombre 100.
Comme par exemple aujourd’hui je vais faire la composition additive, la décomposition, la
composition multiplicative et le partage aussi jusqu’au vendredi (ERQ, Région 4)
Je les présente en dizaine et en unité, les gros bâtonnets c’est les dizaines et les petits les
unités. Sinon ça prend du temps pour compter, par exemple le chiffre 91 c’est 9 dizaines et 1
unité. Pour compter 1, 2, 3 jusqu’à 90 ça prend du temps et dès fois même ils [ne] peuvent pas
garder tous les bâtonnets dans leur main (ERQ, Région 2)
Le tableau 4.8 ci-dessous résume les thèmes que les enseignants trouvent faciles, difficiles ou inappropriés pour
leur niveau d’enseignement. Le choix « inapproprié » est intéressant. Il montre le niveau de connaissance que
les ERQ ont sur les programmes en vigueur – le seul thème qu’une majorité des enseignants juge inapproprié
est les fractions.
Tableau 4.8 Estimation de difficulté à enseigner des thèmes en mathématiques
Facile
Difficile
Inapproprié
Donner la signification des nombres, compter
75
19
7
Comprendre les valeurs positionnelles (0 à 100) ex. unités, dizaines, centaines
70
15
15
Additionner des nombres à deux ou trois chiffres avec retenues
43
35
22
Soustraire des nombres à deux ou trois chiffres avec emprunt
40
38
22
Multiplier des nombres (2 chiffres et 3 chiffres)
35
32
33
Résoudre des problèmes écrits
31
54
15
Estimer et mesurer des distances, volumes `et poids
30
43
27
Reconnaître des fractions
29
16
54
Effectuer de divisions
25
64
11
Comparer des fractions
11
31
58
66
Les ERQ trouvent plus faciles les thèmes de numération comme l’enseignement du comptage et des valeurs
positionnelles. Ils ont trouvé plus facile d’enseigner la numération, mais ont des difficultés à expliquer les
retenues, certains ont trouvé des solutions grâce à la pratique de terrain
Mes élèves peuvent compter jusqu'à 100, mais ont des difficultés avec les retenues. Ils ont
tendance à oublier la retenue de la dizaine (ERQ, Région 4)
Je ne crois pas que j’ai reçu une formation à l’EFI qui puisse me permettre de faire cela. Je l’ai
rencontrée sur le terrain. J’ai essayé de voir quelle était la meilleure manière de faire et je l’ai
appliquée. Les élèves comptaient 90 bâtonnets, ils enlevaient 40 bâtonnets (ERQ, Région 1)
En ce qui concerne les connaissances sur le thème de la valeur positionnelle, il est noté une bonne
connaissance du thème. Certains enseignants ont démontré qu’il faut s’appuyer sur le tableau de numération
pour mieux faire ressortir les valeurs positionnelles des chiffres dans un nombre mais ne maîtrisent pas la
délimitation de la classe des unités simples de celle des mille. Un autre enseignant observé sur l’apprentissage
des valeurs positionnelles fait une confusion entre unité et dizaine dans le nombre 10
Je compte expliquer que la dizaine est un nombre composé de deux chiffres. Si j’ai 1, 2 jusqu’à 9 je
vais leur dire que c’est une unité jusqu’à ce que j’arrive à 10 c’est une dizaine. Y a le 1 et le 0. 1 unité et
0 dizaine (ERQ Région 2)
La majorité des ERQ observés ont cité la résolution de problèmes parmi les difficultés. Cependant, un des
maîtres observés dans un cours de résolution de problèmes a utilisé le problème comme support. Il a démontré
ses connaissances des différentes étapes de résolution de problème : Lecture de l’énoncé par le maître et par
quelques élèves, questions orales de compréhension du texte lu, schématisation et résolution. A l’instar des
élèves-maîtres, les ERQ éprouvent les mêmes difficultés qui sont liées à l’enseignement des divisions, la
résolution des problèmes, l’estimation des mesures et des poids. Comme les élèves-maîtres, les ERQ ont des
difficultés quand les problèmes deviennent plus complexes. Certains enseignants expliquent ce faible niveau de
connaissances par l’insuffisance de la pratique durant la formation initiale. « La formation qui est là-bas est une
formation qui est bien mais qui ne permet pas de tenir tout de suite une classe puisqu’on n’a pas d’expérience.
Sur le terrain vraiment y a à faire » (ERQ Région 2).
Les chercheurs ont noté une faible connaissance du contenu pédagogique des ERQ, ce qui se traduit par des
difficultés à articuler les différentes étapes de la leçon :
Pourquoi avoir vérifié la mémorisation de la table 6 étant donné que vous faites une leçon de
géométrie ? « C’est d’une part pour introduire avec le calcul mental et d’autre part pour voir si les
élèves l’ont bien mémorisé » ERQ, Région 2)
En général, on a noté une bonne connaissance des étapes pour l’introduction une leçon de maths : calcul
mental, révision, et introduction de la leçon du jour. Presque tous (les 23 ERQ observés) savent introduire une
leçon, cependant 3 d’entre eux n’ont pas fait le calcul mental. (Ils ont dit qu’ils n’avaient pas le temps). Certains
enseignants ne savent pas exactement ce qu’ils doivent faire pour chaque leçon. Certains ignorent le
programme de calcul mental alors que dans la réalité le CEB le prévoit. D’autres ne savent pas faire le lien entre
les activités préparatoires et l’introduction de la leçon du jour (observations région 4). Un enseignant a présenté
une leçon de calcul mental qui n’avait aucun lien avec la leçon du jour, ce qui traduit les difficultés à articuler les
différentes parties de la leçon de manière cohérente.
La formation à l‘EFI a donné aux ERQ une compréhension de la théorie tant qu’ils peuvent justifier certaines
actions pédagogiques. Mais cette compréhension de la théorie n’est pas très profonde et tend à développer chez
eux un automatisme. Ainsi, beaucoup des ERQ enseignent de manière mécanique. Ils ont appris une démarche
et ils l’appliquent sans compréhension. Par exemple, l’enseignant sait que la leçon doit commencer par le calcul
mental, donc on l’applique. C’est ainsi qu’un ERQ a proposé la mémorisation de la table 6 dans une leçon de
géométrie, et a justifié sa démarche par le fait de vérifier que les élèves ont bien minorisé le calcul mental sans
lien avec le cours du jour portant sur la géométrie. « C’est d’une part pour introduire avec le calcul mental et
d’autre part pour voir si les élèves l’ont bien mémorisé » (ERQ Region1). Malgré ces difficultés à mettre en
cohérence les étapes de la leçon de manière pratique, on peut noter en général une bonne maîtrise de
démarche théorique de la leçon.
67
Vignette 5 : Connaissance, compréhension et pratique des ERQ en mathématiques
Connaissances
Les ERQ savent utiliser les expériences concrètes pour développer des concepts mathématiques, mais ont des
difficultés quand il s’agit de thèmes mathématiques plus complexes comme la division, la résolution des
problèmes et les fractions.
Ils ne savent pas surmonter les problèmes d’une classe où le niveau de français est bas.
Ils sont confus dans la formulation des fiches pédagogiques à cause de la non maitrise des différents
programmes.
Compréhension
Ils comprennent l’importance de l’entrée par le concret et l’importance de la schématisation pour approfondir
l’apprentissage, mais l’appliquent d’une manière mécanique
Ils n’ont pas une bonne compréhension et une bonne connaissance du contenu pédagogique de la géométrie.
Pratiques
La majorité des ERQ à des difficultés à gérer le temps : plusieurs ERQ ne réussissent pas à compléter les
activités planifiées
La majorité des ERQ à des difficultés a bien gérer les activités de manipulation de matériel
Ils trouvent les thèmes non numériques difficiles à enseigner surtout la géométrie
4.3 La Formation Continue
Les deux principaux programmes de formation continue en maths sont le curriculum de l’éducation de base
(CEB) et le PREMST. La formation au CEB, organisé par le ministère, dure deux semaines et Il inclut les
mathématiques et d’autres disciplines. Le PREMST, organisé par le ministère de l’éducation en collaboration
avec la coopération Japonaise (JICA), se déroule dans les cellules d’animation pédagogiques (CAP) et a lieu
pendant toute l’année scolaire.
La formation continue en mathématiques que les enseignants observés et sondés ont suivies est diverse. En
principe, tous les enseignants devraient participer aux cellules d’animation pédagogique et chaque
circonscription organise ses sessions en fonction des besoins de ses enseignants ce qui contribue à la diversité
des cellules d’animation pédagogiques. Mais comme nous avons déjà dit ci-dessus, les CAP ne sont pas un
programme. Les mathématiques sont le focus de beaucoup des CAP organisés.
Dans l’échantillon des maîtres qui ont répondu au questionnaire, 78 avaient suivi le programme PREMST, 26 la
formation au curriculum d’éducation de base et 21 n’avait pas fait de formation continue. Le questionnaire
mesure le nombre d’enseignants qui optent pour une réponse particulière. Ainsi, si la grande majorité
d’enseignants d’une catégorie fait un choix différent des enseignants des autres catégories, on peut conclure
que l’influence du programme est forte et générale. Mais il faut remarquer que ceci est rare dans les données.
Très souvent les maîtres qui ont suivi un même programme ont sélectionné des réponses différentes. Surtout
avec les « scénarios » où il s’agit de trouver une solution à un problème pédagogique, les résultats de la
recherche ont montré une absence de modèle PREMST ou de modèle Curriculum qui se répète dans les
données. Il est donc possible d’affirmer que les programmes ont exercé une forte influence sur certains
enseignants et pas sur d’autres. Aussi, lorsque les réponses des maîtres s’accordaient, c’était souvent dans
toutes les trois catégories.
Par exemple dans le tableau 4.9 qui concerne la planification d’une leçon pour aider les enfants à comprendre le
concept d’un nombre, les répondants devaient choisir une des stratégies données comme point central du plan.
Les résultats montrent que 77% des enseignants qui ont fait la formation du curriculum présenteraient nombre
égal d'objets, c’est un pourcentage plus élève que pour les deux autres catégories de maîtres qui suivi le
PREMST ou qui n’ont suivi aucune formation. Il faut noter que toutes les trois catégories d’enseignants qui ont
suivi des formations différentes ont choisi en majorité cette réponse. Les résultats montrent que c’est le choix le
plus populaire.
68
Tableau 4.9: Comparaison des stratégies pour planifier une leçon de mathématiques
Aucun
PREMST
Curriculum
(a) Répéter une suite de nombres (par exemple, 1, 2, 3 etc.)
dans le même ordre
0
0
8
(b) Présenter un nombre égal d'objets, par exemple, quatre
oranges avec quatre tasses
67
65
77
(c) Écrire les nombres de 1 à 10, et demander aux enfants de
répéter le comptage de 1 à 10
5
4
0
(d) Organiser les enfants afin qu'ils mettent les objets en deux
tas pour voir lequel des deux tas a plus ou moins d'objets
29
31
15
S’il y a un modèle qui se répète, c’est que le taux d’enseignants qui ont fait une formation continue a la tendance
d’être différent de celui des maîtres qui ne l’ont pas fait. Par exemple le graphique 4.1 montre le degré de
difficulté à enseigner les fractions: il est clair que les enseignants n’ayant pas suivi une formation continue
trouvent ces concepts plus faciles. Cependant, la majorité de ceux qui sont formés à la méthode PREMST ou en
Curriculum les considèrent non appropriés – en effet la comparaison des fractions n’est abordée dans les
programmes qu’après les deux premiers niveaux.
Graphique 4.1 Difficulté à enseigner les fractions
Reconnaître des fractions
80
Comparer les fractions
68
67
60
20
18
40
19
14 15
68
60
46
38
40
80
29
20
14
54
48
6
15
26 31
24
0
Facile
0
Facile
Aucun
Difficile Non approprié
PREMST
Curriculum
Aucun
Difficile
Non approprié
PREMST
Curriculum
Étant donné la petite taille des échantillons, les chercheurs n’ont eu recours aux données de l’enquête que dans
les cas où les disparités étaient bien marquées. Ainsi, s’ils avaient sondé un échantillon beaucoup plus
important, ils auraient pu appliquer des tests statistiques qui pourraient expliquer la plus petite différence par la
fréquentation d’un programme de formation continue ou non. À ce titre, la confiance est un exemple. On a déjà
remarqué que l’optimisme des élèves-maîtres baissait après qu’ils aient commencé leur service. Cependant le
tableau 4.10 suggère que la perte de confiance n’est pas si forte parmi les maîtres qui ont suivi un programme
de formation continue. Trois quarts restent plutôt confiants. On peut noter aussi que la formation continue,
surtout en curriculum, semble renforcer la confiance dans les aptitudes à enseigner les mathématiques de la
grande majorité.
Tableau 4.10 Degré de confiance et niveau d’aptitude.
Degré de confiance
Niveau d’aptitude
Elevé
Bas
Elevé
Bas
Aucun
57
43
57
43
PREMST
74
26
68
32
Curriculum
77
23
88
12
La confiance qui provient de la formation continue est perçue aussi dans les données qualitatives. La formation
continue est d’un grand apport pour la planification des leçons. On a déjà noté que beaucoup d’ERQ trouvent
l'attention accordée à la préparation de fiches dans la formation initiale insuffisante. La formation au curriculum,
69
accompagnée par les guides du programme d'études, donnent des leçons « toute faites » a l'enseignant, lui
facilitant ainsi la tache de la préparation des fiches. Comme nous avons déjà vu, les ERQ trouvent cet appui
particulièrement utile. Les participants du PREMST ont aussi fait mention de la planification des leçons. La
séquence PDSI (plan - do - see - improve) est un pilier central de PREMST et met l’accent sur la planification.
Ces outils permettent aux ERQ d’apprendre à préparer des fiche pédagogiques moins compliquées, et plus
facile à utiliser
C’était très dur au début mais maintenant je trouve les nouvelles fiches meilleures, l’ancienne
fiche c’était la fiche détaillée … Mais on a vu qu’avec ces nouvelles fiches on ne peut pas tout
noter sur une fiche. (ERQ Region2)
Selon certains ERQ, les candidats aux examens professionnels sont plus réguliers pour les cellules d’animation
pédagogiques. Ils tiennent les séances un samedi par mois mais beaucoup de maîtres s’absentent. Les cellules
internes ont lieu le mardi ou le jeudi, une fois par mois. Dans les endroits où le PREMST se déroule, il prend la
place des cellules générales. Ainsi, chaque mois une séance externe se déroule pour les enseignants de
plusieurs écoles et une séance interne pour les enseignants d’une même école. Les directeurs d’école et les
inspecteurs sont des formateurs et ils ont été formés pour conduire les sessions internes et pour appuyer les
maîtres. Dans les écoles où les chercheurs ont observé des CAP, les directeurs exécutent cette fonction d’une
manière sérieuse. Les ERQ les plus confiants et les plus efficaces dans les leçons, ainsi que ceux qui
prétendent faire du progrès sont ceux qui ont l’appui du directeur de l’école. Ainsi, un maître fait remarquer : « Il
[le directeur] nous aide à tout moment, il exigeait que tu fasses ta fiche la veille et que tu lui présentes ça qu’il
corrige et rectifie si tu as des problèmes et au besoin il t’explique comment tu dois faire. » (ERQ Region2). La
formation des directeurs par le programme PREMST, introduite en 2009-2010, et le rôle qu’ils doivent jouer dans
l’école semblent renforcer l’efficacité de l’appui des collègues et surtout du directeur.
Si le mode d’organisation du PREMST semble être un avantage pour certains enseignants, les données
quantitatives ont montré que la fréquentation est très variable: certains enseignants ont participé à tous les dix
modules, tandis que d'autres n’ont suivi qu’un seul module. Cependant nos données renforcent la conclusion de
l’évaluation du PREMST13 que le taux de fréquentation est beaucoup plus élevé pour les cellules d’animation
pédagogique qui sont associées au PREMST que pour les cellules normales. Il semble que la cohérence de
l'organisation, l’efficacité et le suivi à l'école grâce à la participation des directeurs ont encouragé une meilleure
participation. Il faut noter que la combinaison de ces facteurs met la pression sur les autres enseignants.
Ainsi, le programme comporte des difficultés pour d’autres enseignants. Per exemple, une enseignante a mis en
contraste les programmes où les séances sont toutes externes avec le PREMST qui se déroule dans son
établissement. Elle pense que le fait que la formation se passe « à l’école même » a un aspect très positif.
Cependant, l’insuffisance du temps de formation est la critique la plus importante d’une collègue de la même
région. Mais pour d’autres, l’intensité du programme est un élément négatif. « Le PREMST nous prend tout notre
temps, je préfère la prestation dans les CAP » (ERQ, région 4).
En plus de la perte de temps qui est un facteur démotivant pour la participation aux séances du PREMST, la
réflexivité a été identifiée comme un facteur d’inquiétude pour le maître qui peut se sentir moins confiant à cause
des critiques des collègues lors des sessions de réflexion. « Je n’aime pas la critique publique où tu vois une
prestation et chacun essaie de voir les failles de la prestation et d’apporter des corrections » (ERQ Région 3).
Le PREMST ainsi que la formation au curriculum d’éducation de base visent la transformation de la
compréhension pédagogie ; mais en observant les enseignants et les interviewant, il est évident que pour eux,
ce sont les pratiques préconisées qui sont les plus importantes. Le travail en groupes demeure un des aspects
positifs du PREMST les plus évoqués et observés. Ceux qui ont suivi les formations du PREMST sont très
favorables à l’organisation de la classe en groupes de travail et estiment que la relation horizontale permet de
faire mieux passer la leçon. Chaque fois que nous avons observé l’utilisation efficace des sous-groupes, le
maître a attribué sa connaissance de la pratique au PREMST.
Evaluation du Projet pour le renforcement de l’enseignement des mathématiques, des sciences et de la technologie au
Sénégal (PREMST), Mars 2010
13
70
Je l’ai apprise au séminaire et je vois qu’avec ce type d’organisation on travaillait en groupes et on
choisit les meilleures productions, de plus les élèves comprennent mieux quand ils travaillent en
groupes parce que ce qui ont mieux compris peuvent expliquer aux autres (ERQ, Région 4)
Les ERQ ont connu cette forme d’organisation de la classe durant leur formation initiale mais le PREMST leur a
montré comment l’intégrer dans la leçon et comment gérer la supervision. Ils ont la notion du travail dirigé par les
élèves eux-mêmes mais supervisé par le maître. « C’est la même que je viens d’appliquer en travaillant par
étape, par groupe et de faire travailler les élèves, et l’enseignant supervise le travail dirigé par les élèves» (ERQ,
Région 4).
La formation à l’utilisation des ressources locales dans un environnement d’écoles rurales où les enseignants
sont confrontés au manque de matériel, a été jugée comme un aspect positif du PREMST.
Le PREMST a eu des impacts positifs. Avant le PREMST, on utilisait la démarche traditionnelle
avec l’équerre et le rapporteur. Maintenant, nous avons juste le compas et la règle. Le PREMST
a augmenté nos connaissances et rehaussé le niveau des enseignants en maths, SVT et
technologie. (ERQ, Région 4)
La géométrie, que les élèves-maîtres et beaucoup d’ERQ ont trouvée difficile, devient donc plus facile à
enseigner. Aussi les séances du PREMST facilitent la collecte de ressources et la fabrication de matériels qui
permettent de conduire des activités concrètes plus facile à gérer. « La formation continue joue un rôle important
elle permet de mieux faire la pratique de classe. Le PREMST nous aide beaucoup en maths et le matériel est
adéquat surtout avec l’utilisation des ressources locales » (ERQ. Région 4). La formation continue a donc permis
aux enseignants de faire une distinction entre le concept de mesure, où l’élève doit beaucoup manipuler – point
central du PREMST et du CEB – et la notion de système métrique où l’accent est mis sur des conversions
d’unités. Dans la région 4, nous avons observé une bonne leçon où un ERQ a fait comprendre à ses élèves que
10 fois le pot de 1 litre donnera 1 décalitre. En outre, elle a vérifié le résultat en manipulant avec les élèves.
Aussi bien dans le PREMST que dans le Curriculum, l’évaluation est très importante et se fait d’une manière non
traditionnelle. Les deux programmes insistent sur l’évaluation formative, qui se fait pendant que et pour que les
élèves travaillent. Ils mettent l’accent aussi sur l’évaluation authentique, qui a lieu dans la situation
d’apprentissage ou d’intégration. Mais durant les observations de classe, les chercheurs n’ont pas noté ce genre
d’évaluation: Seul un enseignant a mentionné l’amélioration de l’évaluation comme issue du PREMST et aucun
de ceux qui ont reçu la formation CEB ne l’a mentionné. La non mise en pratique de cette approche de
l’évaluation pourrait être liée au manque de compréhension des principes de base qui sous-tendent la formation.
Les résultats de la recherche montrent que les enseignants acquièrent la connaissance du contenu pédagogique
de trois sources principales : la formation initiale et le PREMST, le CEB et en travaillant avec les écoles, le
contact avec les collègues. Ce résultat est démontré par un item du questionnaire qui demandait dans quelle
situation les répondants ont acquis leur meilleure compréhension de l’enseignement des mathématiques. Ceci
révèle que pour les participants des deux programmes c’est seulement 19% qui l’ont acquis de la formation
continue. En effet, ils semblent développer leur compréhension de l’enseignement des mathématiques à partir
d'une variété de situations. L’un des maîtres questionné sur la démarche de la leçon observée a dit il l’a appris
pendant la formation initiale « … mais c’est dans les cellules [que] j’ai perfectionné l’enseignement des maths
avec le PREMST » (ERQ Region2). Il considère la formation PREMST comme continuation de ce qu’il a appris
à l’EFI ; l’emploi du mot « perfectionné » suggère encore une fois que ce sont ses pratiques qui ont changé
plutôt que sa compréhension.
Tableau 4.11: Source de la compréhension de l’enseignement des mathématiques
PREMST
Curriculum
Formation
Initiale
35
Formation
Continue
19
Contact avec
collègues
18
Travail à l’école
Autre
26
3
12
19
31
35
4
Dans l'ensemble, il faut se demander dans quelle mesure les enseignants, qui ont fait la formation continue, ont
vraiment compris ce qu'on leur a enseigné. Bien que des aspects de ce qui était préconisé par les programmes
soient évidents dans les leçons de la plupart des enseignants observés, quand ils ont été interviewés, ils ne
71
semblaient pas comprendre les principes qui soutiennent les différentes approches. Les connaissances qu’ils
semblent avoir apprises pendant ces cours étaient des procédés utiles plutôt qu’une méthodologie cohérente. En
plus, ils ne semblent pas voir les pratiques et les approches des programmes comme très différentes de ce qu'ils
avaient déjà apprises dans les EFI ou de ce qu’ils avaient faites eux même à l’école en tant qu’élève. Quand on
a demandé à une enseignante qui venait de donner une leçon qu’elle a considéré inspirée par le PREMST, s’il y
avait une différence entre cette leçon et celle qu’elle aurait donnée s’il elle n’avait pas de formation continue. Elle
a dit :
Traditionnel, PREMST, ce sont les démarches qui changent……Y a beaucoup de changement
c’est les mêmes finalités, y a que les démarches qui changent. Thèmes, sous thèmes,
justification... à part ça, y a rien de nouveau. Maintenant il faut justifier pourquoi tu apprends ça à
l’élève ? (ERQ Region2)
Un autre maître en parlant de la différence après avoir participé au PREMST a dit :
[il] y a une différence assez significative, mais pas très grande surtout sur le principe de
superviser et laisser les élèves diriger ; la seule différence est dans l’enseignement par groupe.
(ERQ, Région 4)
En conclusion, nous n’avons pas pu identifier de modèle PREMST ou de modèle Curriculum qui se répète dans
les données. La plupart des enseignants pensent que les deux programmes les aident à enseigner et ils les ont
bien accueillis avec un accent particulier pour le PREMST. Ils ont appris des pratiques utiles pour
l’enseignement des mathématiques. Mais seul un petit nombre des participants s’est bien approprié les idées
fondamentales des programmes. Un enseignant de la région 4 a suggéré que « les enseignants qui ont eu le
bac scientifique comprennent plus vite les modules de maths et sciences du PREMST » C’est un avis
intéressant qui offre une explication pour l’influence inégale du programme.
En sommaire le programme du curriculum semble avoir eu un effet positif mais limité sur l’enseignement des
mathématiques. Le PREMST aussi a changé les pratiques de beaucoup de participants mais son efficacité
dépend de la motivation des enseignants et leur assiduité à assister aux séances, de la motivation et de l’appui
que le directeur leur offre et aussi de leur niveau éducatif qui leur permet de comprendre les concepts
mathématiques et pédagogiques.
72
Chapitre 5 Coûts, rentabilité et efficacité de la formation
6.1 Introduction
L’analyse des coûts dans le cadre d’une étude sur la préparation des enseignants vise deux objectifs essentiels :
l’analyse des ratios formateur-élève maitres en relation avec les coûts par élève maitre d’une part, ainsi que les
implications pour l'amélioration de l'efficacité de la formation initiale d’autre part:. Quelle est la taille de la classe
qui permettrait d'optimiser la rentabilité de la préparation d'un enseignant du primaire en mathématiques ou en
lecture ? L’analyse des effectifs est importante, parce que la présence d’un certain nombre d’élèves maitres
dans une classe influe sur les possibilités de les engager dans les activités d’apprentissage pratique dans les
EFI et aussi sur les ressources qui lui sont associés. La promotion du travail de groupe et du soutien
pédagogique pour améliorer l'expérience professionnelle d'apprentissage des élèves maitres nécessite des
effectifs relativement petits et des ressources pédagogiques adéquats. L’analyse des coûts et de la rentabilité
examine la relation entre la taille de la classe, le ratio formateur /élève maitre, les heures d'enseignement par
semaine et le coût par élève maitre. L’état de la collecte de données ne permet pas de faire des affirmations
catégoriques au sujet de la rentabilité – chercheurs devraient collecter des données plus complexes. Néanmoins
l'analyse présentée ici soulève des questions qui pourraient permettre de démarrer une discussion entre les
décideurs politiques.
6.2 Suppositions14
Cette analyse porte sur les éléments de la formation à l’EFI qui sont spécifiques à la didactique de la lecture et
des mathématiques. Cette analyse doit aussi prendre en compte les questions soulevées dans les chapitres
précédents sur l'équilibre entre l’enseignement de la didactique et celui du contenu de la discipline.
Le coût par élève maitre (Ct) peut être représenté comme une fonction entre le salaire moyen des formateurs
et les ratios formateur-élève maitre (TTR). En général, dans le cadre de l’analyse cout efficience, les
économistes suggèrent de minimiser le AvTs et de maximiser TTR de manière à maintenir la qualité de la
formation. Mais cela dépendra du programme de formation en mathématiques et en lecture délivré aux élèves
maitres, qui en retour, dépendra aussi des coûts salariaux par élève maitre et de manière dont ces couts se
traduisent en termes d’horaires d’enseignement des formateurs et d’heures supplémentaires. Ainsi, par exemple,
un formateur peut enseigner à un groupe de 100 élèves maitres pour maximiser la rentabilité, mais cela se
traduirait par des contraintes sur les ressources et une « intensité de l’activité d'apprentissage pratique ». Ce
modèle serait réalisé au détriment de l’efficacité, qui exige beaucoup plus de pratiques avec des coûts stables.
La question clé sur la rentabilité et l'efficacité est de savoir si il est possible de réduire le coût salariaux des
formateurs par élève maitre et d’augmenter les ratios formateur/élève maitre sans diminuer le nombre d’heures
d’enseignement des élèves maitres et la qualité, et d'intensifier la pratique. Il est important d’aborder cette
problème et d'autres questions connexes à cause des implications pour la restructuration du programme de
lecture et de mathématiques, à cause des ressources nécessaires, et du nombre de formateurs qui serait
nécessaires pour optimiser l’effectif des classes. Les coûts récurrents de l'enseignement par élève maitre
augmenteront avec le salaire moyen des formateurs et diminueront avec un accroissement des ratios formateur /
élève maitre.
Les principaux éléments de coût peuvent être séparés en coûts récurrents salariaux et non-salariaux, et en
coûts fixes et coûts variables. Coûts salariaux récurrents sont dus au personnel enseignant et au personnel de
soutien (Lewin, 1999). Dans notre analyse, nous avons supposé que les salaires des non-enseignants dans les
EFI sont petits par rapport aux salaires des formateurs. Nous avons également exclu le coût du capital, du
matériel des fournitures, et d'autres coûts tels que la maintenance, les réparations etc.
6.3 Les questions de la rentabilité et d’efficacité de la formation des enseignants au
Sénégal
Le calcul du coût des salaires des professeurs des EFI au Sénégal est rendu complexe par le fait qu'ils ne sont
pas spécifiquement des formateurs. Ils sont plutôt des inspecteurs et conseillers pédagogiques qui ont été
Le méthode d’analyse des coûts et de la rentabilité est basé sur celui de Lewin (1999) pour le projet MUSTER (Voir
http://www.dfid.gov.uk/r4d/SearchResearchDatabase.asp?OutPutId=174008 )
14
73
détachés pour mener la formation pendant les périodes où les EFI sont en session ; en outre, ils perçoivent une
prime pour leurs efforts de formation. Or, ces coûts représentent des coûts d'opportunité - car ils travaillent en
tant que formateurs, ils ne peuvent pas s’occuper de leurs autres tâches de supervision en tant qu’inspecteurs.
Ils reçoivent leur salaire annuel ( de 5,4 millions CFA). Cependant, si les cours de formation excédent 24 heures
en une semaine, ce qui signifie qu'ils enseignent plus de quatre groupes d’élèves maitres, qui est le cas dans
tous les EFI, ils ont droit aux heures supplémentaires, payées au taux de 1916 FCFA par heure. Par
conséquent, le coût total annuel des heures supplémentaires de chaque formateur, s'élève à environ 900.000
francs CFA, payés à la fin de l'année scolaire. Le coût est encore gonflé par le fait que le travail des formateurs
est considéré comme un emploi à plein temps, et ils ne retournent pas à leurs autres tâches au niveau de l’IDEN
durant les vacances. Par rapport à leurs collègues qui ne sont pas impliqués dans la formation des enseignants,
leur temps de travail est considérablement réduit et en outre ils gagnent de l'argent supplémentaire. Certains
inspecteurs interviewés ont convenu que le modèle n'est pas rentable.
Pour mieux rentabiliser l’emploi des formateurs, on pourrait reconnaître que les heures supplémentaires où ils
travaillent pendant les mois où l’EFI est en session sont plus que compensées par le temps où l’EFI n’est pas en
session. Ainsi les paiements des heures supplémentaires ne seraient pas nécessaires.
Une autre façon de réduire le paiement des heures supplémentaires serait d'impliquer davantage d'inspecteurs
et de conseillers pédagogiques dans le travail de l’EFI mais de s’attendre de ce que tous les formateurs
retournent à leurs devoirs à l’IDEN durant les périodes où les EFI ne sont pas en session. Cela permettrait une
plus grande complicité entre collègues et un soutien mutuel pour les formateurs, mais il leur donnerait moins
d’occasion de se spécialiser et de développer leur expertise dans la formation des enseignants.
La charge d'enseignement est une indication de l'effort des formateurs qui tient compte des effectifs des classes
et du nombre d'heures enseignées. Du fait de l’existence d’un seul formateur pour chaque matière dans chaque
EFI, la charge d’enseignement est égale au nombre de groupes enseignés par le formateur. Le tableau 5.1
montre qu'il y a un écart considérable entre les différents EFI au niveau de la charge d'enseignement des
formateurs. Le formateur à l’EFI 4 doit enseigner plus de groupes et la taille des classes est aussi plus élevée. Si
on recrutait un autre formateur la charge d’enseignement sera à peu près égale à celle de l’EFI 2 et one pourrait
réduire la taille des classes et /ou le nombre de classes.
Puisque tous les groupes suivent des cours parallèles, on pourrait augmenter la rentabilité en augmentant les
effectifs. Cependant, cette ligne de conduite n'est pas conseillée pour des motifs éducatifs; les effectifs sont déjà
assez grands et la pédagogie active est plus difficile à faire dans les classes pléthoriques. A cela s’ajoute des
problèmes pratiques concernant la disponibilité des grandes salles dans les EFI en général.
Table 5.1: Indicateurs et variables de rentabilité en 4 EFI
EFI
Effectif
de l’EFI
Nombre de
formateurs
Ratio formateur /
élève maitre
(TTR) français et
mathématiques
Salaire moyen des
formateurs (incl.
heures supplémentaires)
Taille
moyenne
des
classes
Heures
d’enseignement
pour élèves
maîtres par
semaine
Charge
d’enseignement
EFI 1
EFI2
EFI 3
EFI 4
273
187
365
650
1
1
1
1
273
187
365
650
6.3 m CFA
6.3 m CFA)
6.3 m CFA)
6.3 m CFA
40
32
45
54
10
10
10
10
7
6
8
12
Si les ratios formateur-élèves maitres sont réduits, cela permettrait à plus de formateurs d’enseigner la
didactique des disciplines, par conséquent, les coûts récurrents d'enseignement par élève maitres
augmenteront, en considérant que le salaire moyen des formateurs soit maintenu (Ceci est basé sur le calcul du
coût par élève maitre : CS =
, voir annexe 1). Les avantages d’une réduction des effectifs des classes et
d’une augmentation du nombre des formateurs qui enseignent la didactique de la lecture ou des mathématiques
pourrait poser d’autres problèmes. En effet, si l’effectif est réduit sans pour autant que le nombre de formateurs
augmente, les charges d'enseignement augmenteront et cela pourrait réduire l'efficacité de l'apprentissage. Mais
74
si le nombre de formateurs recrutés augmente, cela pourrait réduire le ratio formateur / élève maitre TTR et
augmenter le coût par élève maitre.
Il est important de souligner que pour la formation initiale, les ratios élevés doivent être considérés comme
inadaptés pour un programme qui exige que les élèves maitres s'engagent dans des activités d'apprentissage
comme l'exploration du curriculum ou la réflexion approfondie sur les expériences dans les écoles d’application.
De telles activités amélioreront considérablement l'expérience et l’efficacité de la formation. Les observations
dans les différentes EFI ont mis en évidence des salles de classes pléthoriques qui rendent difficiles la conduite
de certaines activités.. Bien que cette démarche garantisse de faibles coûts par élève maitre, elle est peu
susceptible de produire les pratiques pédagogiques riches et diversifiées dont l'apprentissage actif est l'objet.
Les systèmes de formation devraient éviter les situations où les coûts sont élevés mais les charges
d'enseignement pour les formateurs et les heures d'enseignement pour les élèves faibles. L'analyse montre que
certains EFI peuvent fournir des heures enseignement en fonction des tailles de classe, mais il est possible pour
d’autre d'y parvenir à moindre coût en raison de charges d'enseignement plus importantes. La taille de la classe
et la charge d'enseignement devraient être les facteurs critiques. Pour prendre une décision sur la façon
d'améliorer les expériences d'apprentissage dans l’EFI, bien que la réduction des ratios puisse augmenter les
coûts par élève maitre, cela doit aussi être évalué en termes de potentiel d'amélioration de la qualité et de
l'efficacité de l'apprentissage à enseigner.
Cette analyse s'est concentrée sur les coûts de la formation dans l’EFI. Cependant Lewin et Stuart (2002)
soutiennent qu’en Afrique en général la partie la plus coûteuse de la formation des enseignants est le stage
pratique. Dans tous les pays du projet FICEA sauf le Sénégal, les écoles de formation sont résidentielles, donc
pour des raisons de rentabilité – les élèves maitres demeurent à la maison pendant le stage – le stage principal
est à la fin de la formation. L’analyse du projet dans les 5 autres pays concernés par le projet a montré que la
division de la formation théorique de la formation pratique n'est pas propice à une formation efficace des
enseignants. Or, l’alternance des stages et des cours d’EFI est un point fort de la formation au Senegal, mais
nos données suggèrent que la formation initiale n’en gagne pas autant en terme d’efficacité, parce que les
formateurs ne supervisent pas les stages pratiques et que le ratio école d’application par d’élèves maitres est
assez élevé. Pour améliorer le stage il faudrait augmenter le nombre des écoles d’application et demander aux
formateurs de maintenir le contact effectif avec les élèves maitres pendant les stages. En tenant compte de
l’organisation actuelle du personnel de formation, cela impliquerait une augmentation des fonds pour la
formation. Mais une réorganisation des horaires et des tâches des formateurs pourraient assurer une formation
de meilleure qualité en minimisant les coûts. Cette réorganisation doit être fait dans une manière à ce que :
 la taille de la classe soit appropriée à la pédagogie active qu’exige une formation efficace ;
 les charges d'enseignement des formateurs soient optimales ;
 les bienfaits de l’alternance des stages et des cours dans l’EFI soient maximisés en laissant du temps
aux formateurs de visiter les écoles d’application, de débriefer les stages pratiques et de les inclure
dans les travaux pratiques de la formation initiale ;
 la charge de travail et le salaire des formateurs soient égaux aux inspecteurs d’IDEN.
75
Chapitre 6 : Conclusions et recommandations
6.1 Conclusions
Les principaux résultats de la recherche sur la préparation des enseignants en lecture et en mathématiques et la
pratique enseignante montrent que les enseignants ne sont pas assez bien préparés pour enseigner à
l’élémentaire. Cette faiblesse de la préparation est due au mode de recrutement et à la courte durée de la
formation initiale. En effet, le recrutement des élèves-maîtres par voie de concours et quota sécuritaire
(recrutement à partir du cabinet ministériel) a été décrié par les principaux acteurs du système. En outre, la
formation initiale déjà de courte durée, est encore plus réduite pour les élèves-maîtres du quota sécuritaire qui
n’arrivent pas au début du cours (souvent 1 a 3 mois après le démarrage). La majorité des maîtres en exercice
interviewés pensent que la durée de leur formation ne dépassait pas 6 mois. Le décalage du début de la
formation constitue une perturbation pour tous les élèves-maîtres et ces difficultés sont aggravées pour les
stagiaires qui arrivent tard, car les formateurs continuent leurs cours et certains se rattrapent en recopiant les
cours des premiers arrivés. Cette situation crée une incohérence et des écarts dans le niveau de connaissances
des élèves-maîtres d’une même promotion. La gestion d’une classe avec un groupe d’élèves-maîtres de
différents niveaux académiques rend difficile la formation (niveau variant de la 10 e année d’étude à la licence ou
maitrise de l’université).
Les stages pratiques qui devaient exposer les élèves-maîtres à la pratique enseignante ne répondent pas
effectivement au besoin et ne préparent pas assez les élèves-maîtres à enseigner. En effet, les résultats des
enquêtes ont montré que ces stages ne répondaient pas toujours aux besoins pratiques tels que la bonne
connaissance de toutes les étapes de l’élémentaire. En principe, comme les futurs maîtres sont appelés à
enseigner à toutes les étapes de l’élémentaire, ces stages devraient leur fournir une connaissance globale de
l’école élémentaire. Le manque de coordination des stages empêche certains élèves-maîtres d’assister et
d’observer les classes du niveau pour lequel ils vont enseigner. Les chercheurs ont aussi rencontré des élèvesmaîtres dont les stages n’incluaient pas l’observation des leçons de lecture ou de maths.
L’alternance de la théorie et de la pratique dans la formation est en principe un point fort parce qu’elle permet
aux élèves-maîtres d’être en contact avec les réalités des classes de l’élémentaire dès le premier mois de la
formation initiale, mais les avantages de ce modèle ne sont pas pleinement exploitées parce que les parties
théoriques et pratiques sont séparées et ne sont pas articulées : les formateurs ne peuvent pas suivre les
stagiaires dans les écoles et les élèves-maîtres n’ont pas beaucoup d’opportunités de s’engager dans des
sessions de débriefing à l'EFI sur les questions résultant du stage. Aussi la qualité de l'enseignement dans les
stages n'est pas toujours celle espérée et l'approche des maîtres d’application est parfois en contradiction avec
ce qui se fait dans les EFI.
L’analyse des manuels scolaires et les interviews de différents responsables de l’éducation ont montré que le
Sénégal a opté pour l’approche par les compétences comme base du CEB. En choisissant cette approche, le
gouvernement sénégalais n’a pas choisi une option facile. Cette approche exige beaucoup de la part des
enseignants et requiert des professionnels bien formés qui peuvent comprendre les concepts théoriques qui la
soutiennent. Étant donné ces exigences, on se demande si le système actuel de formation avec une formation
initiale de courte durée, le faible niveau académique de quelques-uns des volontaires recrutés et le manque
d’articulation entre la formation initiale et la formation continue permet de combler les lacunes des futurs
enseignants.
76
Les interviews auprès des formateurs et des élèves-maîtres ont montré que les futurs maîtres ne sont pas
encore bien imprégnés du CEB qui en principe sera le nouveau curriculum pour l’ensemble de l’enseignement
élémentaire. Lors de la formation initiale, les élèves-maîtres ne sont pas exposés au contenu du curriculum et en
outre, ils ne sont pas initiés aux principes de l’approche par compétences. Les principaux résultats de la
présente recherche ont montré qu’aussi bien les ERQ que les élèves-maîtres n’en comprennent pas les
principes de base ; ils les considèrent comme de bonnes idées qui doivent se greffer sur leur pratique actuelle
plutôt qu’une approche intégrée qui exige une planification et des méthodes différentes. Les résultats de la
recherche ont clarifié que les formateurs n’ont pas rendu compte de la nécessité d’avoir une approche tout à fait
différente pour bien mettre en pratique le CEB.
Bien que les Sénégal ait opté pour une politique de promotion des langues nationales tous les supports
pédagogiques des élèves-maîtres et des élèves de l’élémentaire sont en français et presque tous les élèvesmaîtres s’attendent à enseigner en français. Les observations des leçons ont montré que presque tous les
maîtres ont eu recours aux langues nationales, mais il y a une différence entre ceux qui l’utilisent pour passer
d’une étape de la leçon à l’autre et ceux qui l’utilisent pour expliquer un concept ou une notion. Les uns
enseignent le français comme si les élèves ont déjà acquis la langue française et la connaissent; les autres
enseignent le français en tenant compte du fait que c’est une langue étrangère et que le vocabulaire doit être
appris. La question de la langue est problématique. La notion de la « Gestion d'une classe bilingue » est
importante, mais le guide de formation initiale des volontaires approche cette compétence comme s’il s’agissait
de l'enseignement des enfants dans les langues nationales. Pourtant, le CEB, ainsi que l’ancien programme du
79-1165, sont basés sur le français. En outre, le Sénégal a opté pour la politique qui fait du français la langue
d’enseignement. Pour gérer une classe bilingue un enseignant a donc besoin d’une appréciation réaliste des
stratégies pour enseigner le programme aux élèves dont le niveau de français est négligeable. C’est un
problème particulièrement aigu pour l’enseignement de la lecture où on attend que les élèves apprennent à lire
des mots et des phrases qu’ils n’ont jamais entendus et dont ils ne connaissent pas le sens. Si la formation
mettait l’accent en pratique sur la gestion d’une classe bilingue il est probable que moins d’élèves dans leurs
futures écoles se trouveraient parmi ceux qui assistent aux cours sans comprendre le discours oral ou écrit de la
classe. Les résultats des épreuves, dont le plus récent est L’EGRA (Pouezevara et al. 2010), suggèrent qu’ils
sont nombreux, même majoritaires.
La capacité de certains formateurs à anticiper sur la bonne préparation des futurs maîtres est aussi un point fort
de la formation initiale. En effet, bien que des écarts existent entre le Guide, les programmes scolaires et les
manuels scolaires, certains formateurs arrivent à combler cet écart en intégrant le curriculum de l’éducation de
base dans le déroulement des cours à l’EFI et à cadrer leurs cours par rapports aux besoins des manuels
scolaires. Le guide de formation initiale des volontaires de l’éducation étant plus un « Guide » qu’un « manuel »,
il est sous-entendu que les formateurs mettent en pratique les programmes scolaires à travers leurs plans de
formation afin de bien préparer les élèves-maîtres à enseigner. Par conséquent, le profil des maîtres sortants
dépendra de chaque EFI. En effet bien que le Guide soit unique, chaque EFI aura un programme spécifique qui
dépendra de la capacité du formateur. Cependant cette force est limitée par le manque d’assiduité de certains
formateurs et l’insuffisance des formateurs
Un des points faibles du Guide de formation initiale des volontaires, est qu’il ne met pas l’accent sur le
développement de compétences pratiques pour l’enseignement de la lecture et des mathématiques. Il n’y a pas
de lien explicite entre le programme de formation de l’EFI et le curriculum. Il n’existe pas de liens explicites entre
les manuels scolaires et le programme de l’EFI. Même s’il existe des liens implicites qui se traduisent par la mise
en œuvre du curriculum de base dans les leçons de certains formateurs, l’inconvénient dans une telle situation,
c’est qu’il n’y a pas de programme harmonisé et partagé pour l’ensemble des formateurs. Dans un système
national d’enseignement où les évaluations sont les mêmes pour tous les élèves, il est à craindre que le manque
de standards nationaux puisse avoir un impact négatif sur les enseignements. Les interviews, observation et le
questionnaire ont montré que les élèves-maîtres n’avaient pas assez de compétence pour enseigner à lire avec
compréhension.
Au début de ce rapport, nous avons noté les six compétences nécessaires pour une bonne initiation à la lecture :
Il est possible en principe d'établir ces compétences chez les élèves de l’école élémentaire en utilisant la
méthode mixte à l'entrée globale que la formation initiale préconise. Mais en pratique la présente recherche met
77
en évidence le fait que la plupart les élèves-maîtres ainsi que les ERQ ne comprennent pas l’importance de ces
compétences à l’exception la conscience phonémique et la conscience phonétique. De toute façon les
enseignants n’ont pas accordé beaucoup d’importance aux autres compétences ni dans les interviews ni dans
les leçons observées. La méthode mixte à l'entrée globale est apprise comme une procédure à suivre plutôt
qu'un moyen d'établir les compétences chez les élèves. Le résultat est que les répondants, enseignants et
élèves-maîtres, ont montré une mauvaise compréhension de la façon dont les différentes étapes de la méthode
peuvent être combinées pour permettre aux élèves d'acquérir toute la gamme des compétences nécessaires.
Ces résultats confirment ceux de N’Namdi (2005 p. 27) qui constate que « le but de l’enseignement de la
phonétique, comme d’autres techniques de décodage, est d’offrir des moyens additionnels pour améliorer la
capacité de l’apprenant de saisir le sens de ce qu’il lit ». Bien que les formateurs aient insisté sur ce point
pendant les interviews, cette compréhension était absente chez presque tous les élèves-maîtres et les ERQ
interrogés et observés. Le focus sur la lecture comme déchiffrage des sons sans référence au sens du texte est
un cercle vicieux : les élèves n’apprennent pas à associer la lecture au sens mais il leur est possible qu’ils
trouvent de bonnes réponses de sorte que le cours continue avec un succès apparent sans qu’ils comprennent
effectivement.
La position de la lecture comme compétence fondamentale n’est pas reconnue par la formation. Pour les élèves
du primaire, apprendre à lire est l’acquis le plus significatif de la scolarisation. Il faut donc accorder à la formation
en lecture une place beaucoup plus importante dans les programmes et les emplois du temps des EFI.
La formation ne semble pas avoir réussi à sensibiliser les élèves-maîtres à l’évaluation diagnostique et
formative. La recherche a montré l’importance de ces types d’évaluation l’une pour savoir si les élèves ont
compris pendant le déroulement de la leçon et l’autre pour remédier aux incompréhensions (OCDE/CERI 2008 ;
Black and Wiliam 1998; Torrance and Pryor, 1998). Nous avons remarqué que cette évaluation est absente dans
les classes des ERQ ; les chercheurs ont noté qu’en général, même quand une grande partie des élèves ne
comprenait pas un point important de la leçon, le maître les abandonnait et continuait. Les ERQ observés n’ont
pas mis en pratique l’évaluation formative pour corriger ; c’est-à-dire qu’ils sont susceptibles de prendre la
bonne réponse d’un élève qui s’est déjà montré capable de la trouver comme évidence suffisante pour
poursuivre la démarche de la leçon planifiée. Comme nous avons déjà fait remarquer, ce type de pratique
explique les résultats très faibles aux épreuves et aux études telles que celle d’EGRA (2010). L’intégration de
l’évaluation diagnostique et formative dans la praxis pédagogique des enseignants peut interrompre l’application
mécanique des procédures fixes qui rend l’enseignement sans sens pour beaucoup d’élèves. L’évaluation doit
devenir un focus très important pour la formation en lecture, en mathématiques et aussi dans les autres
matières.
La recherche internationale sur la formation des enseignants de mathématiques à l’élémentaire suggère que les
connaissances en mathématiques des enseignants, leur connaissance des procédures mathématiques et la
façon dont les maths sont représentées dans l’enseignement exercent une grande influence sur l’apprentissage
des mathématiques (Fennema & Franke, 1992). Il semble aussi que l’efficacité des maîtres débutants à
enseigner les mathématiques à l’école varie en fonction de leur degré d’exposition au curriculum et aux manuels
scolaires ainsi que de compréhension du matériel lié au curriculum (Ma, 1999). Les élèves-maîtres entament
leur formation avec un bagage de connaissances et de compréhension mathématiques acquis lors de leur
propre scolarisation. La recherche sur les connaissances des maîtres de mathématiques à l’élémentaire et leur
impact sur l’enseignement suggère que « lorsqu’un enseignant possède une compréhension conceptuelle des
mathématiques, cela influence l’instruction en salle de classe de façon positive » (Fennema & Franke, 1992 : –
traduit de la page 151). Les observations, interviews et focus groups ont permis de comprendre que beaucoup
d’ERQ avaient des difficultés dans des thèmes exigeant un niveau de conceptualisation.
La formation a insisté sur l’importance de la concrétisation et nous avons vu des ERQ essayer de faire participer
et d’impliquer activement les élèves dans leurs apprentissages. Mais ils ont trouvé difficile la gestion des
activités pratiques, et les consignes données aux élèves n’étaient pas toujours assez claires pour lier la
manipulation à l’apprentissage du concept cible. Nous avons eu l’impression que souvent l’engagement des
élèves était superficiel. C’est l’activité pour l’activité – une sorte de magie plutôt qu’un contexte où on peut
résoudre les problèmes et qui est lié à une compréhension conceptuelle. Les observations de classe confirment
ces résultats. En effet, dans les classes où les ERQ ont présenté des leçons, la construction personnelle de
connaissances n’était pas la préoccupation.
78
La base théorique de ces activités pratiques est essentiellement l’apprentissage centrée sur l’apprenant, qui met
l’accent sur la construction personnelle des connaissances mathématiques par l’apprenant (Kuh & Ball, 1986).
C’est un modèle d’enseignement qui s’insère dans une vision de résolution de problème ou constructiviste de
l’apprentissage des mathématiques (Thompson, 1992), ou une méthode d’enseignement guidée par le contenu
afin de mettre l’accent sur la compréhension des concepts (Kuh & Ball, 1986). En effet c’est la méthode que
préconise l’approche par compétences du CEB. On a donné l’exemple d’une leçon observée où l’ERQ a suivi les
pratiques prescrites par le guide du CEB et a construit une situation d’apprentissage liée à la vie quotidienne des
enfants, mais c’était un rare exemple. Le nouveau curriculum offre la possibilité de confronter les défis de
l’enseignement superficiel en mathématiques, mais avec le niveau académique actuel des enseignants, la
question qu’on peut se poser est de savoir si la formation permet aux futurs enseignants de comprendre les
principes qui le guident.
Nos conclusions sur les des programmes de formation continue sont assez décevantes. Si le FICEA avait eu
plus de ressources et surtout plus de temps à consacrer à la recherche sur les différents programmes nous
aurions pu faire une description plus complète. Mais les données telles que collectées n’indiquent pas une
grande influence sur les connaissances, la compréhension et les pratiques des enseignants qui les ont suivis. Le
programme du curriculum semble avoir eu un effet positif mais limité et le PREMST aussi a changé les pratiques
de beaucoup de participants. Il faut noter aussi que quelques ERQ ont mentionné que c’était le PREMST qui leur
a appris la gestion du travail en groupes, méthode utilisée aussi dans les leçons de lecture. Les chercheurs ont
trouvé que son efficacité dépendait de la motivation des enseignants et de leur empressement à assister aux
séances, de la motivation et de l’appui que le directeur offre aux enseignants qu’il supervise. Le modèle
PREMST qui déroule un programme cohérent qui s’appuie sur les cellules d’animation pédagogiques semble
bon.
Le démarrage et la généralisation du curriculum est un processus long et compliqué. Il est évident que la
formation telle que présentée actuellement ne suffit pas. Une série cohérente de modules qui pouvait servir
comme suivi à l’initiation au curriculum pourraient peut-être faciliter le processus. Ils peuvent peut-être influencer
les pratiques et les connaissances et, finalement la compréhension des enseignants. Comme le PREMST ces
modules pourraient être enseignés dans le cadre des cellules d’animation pédagogique.
6.2 Constats et Recommandations
Les principaux résultats de la recherche et les contraintes qui limitent la bonne préparation des enseignants
nous ont conduits à proposer sept catégories de recommandations : les recommandations basées sur les
difficultés des EFI, celles basées sur les stages pratiques et leur articulation au programme théorique, celles
liées au contenu du programme de formation initiale, les contrainte liées à l’enseignement de la lecture et celui
des mathématiques, et celles liées aux innovations dans la formation continue.
Écoles de formation des instituteurs
Les chercheurs ont observé différentes infrastructures d’EFI, allant des écoles construites et équipées par la
coopération bilatérale à des écoles où l’administration est distante de 5km du site de l’école qui est sans eau ni
électricité. Tous ces facteurs peuvent avoir un impact négatif sur la qualité et le confort dans les études.
Le retard dans l’inscription de certains élèves-maîtres ne permet pas d’avoir une cohorte homogène. Ainsi, les
IDEN qui reçoivent un groupe de nouveaux maîtres, sortant d’une même formation et ayant des niveaux de
connaissances différents, ont demandé la suppression du quota sécuritaire, ce que le Ministre de l’éducation a
lui-même accepté. En outre, la durée de la formation a été jugée trop courte aussi bien par les élèves, les
formateurs que les IDEN. En plus, le temps réservé au thème de l’évaluation formative et diagnostique dans la
formation des enseignants a été jugé trop court.
Il est recommandé d’investir dans les équipements et les infrastructures d’accueil des EFI pour mettre les
élèves-maîtres et les formateurs dans de bonnes conditions qui facilitent la transmission et l’acquisition du
savoir, de fixer un délai dans les inscriptions et d’allonger la dure de la formation à 12 mois au moins. En plus, il
79
faut augmenter le temps réservé au thème de l’évaluation formative et diagnostique dans la formation des
enseignants.
Bien que tous les formateurs soient des inspecteurs ayant de longues expériences du système, aucun n’a reçu
une formation spéciale dans les deux disciplines que sont les maths et la lecture. Il est recommandé de former
davantage les formateurs en math et lecture ou de recruter des formateurs ayant une spécialité de la discipline
enseignée.
Une réorganisation du volume horaire et des tâches des formateurs est recommandée , cela permettrait
d’assurer une formation de meilleure qualité tout en minimisant les coûts. Cette réorganisation devrait être fait
dans une telle manière que :
 la taille de la classe soit appropriée à des activités actives qu’exige une formation efficace ;
 les charges d'enseignement des formateurs soient optimales ;
 les bienfaits de l’alternance des stages et des cours dans l’EFI soient maximisés en laissant du temps aux
formateurs de visiter les écoles d’application ;
 et la charge de travail et le salaire des formateurs soient égaux aux inspecteurs qui assurent les tâches de
supervision dans les IDEN.
Les stages pratiques
La formation pratique a été jugée insuffisante par les élèves-maîtres, la plupart n’ont pas eu la chance
d’observer toutes les étapes de l’élémentaire et d’être exposé à toutes les disciplines que le futur maître va
enseigner. En plus, les connaissances théoriques reçues à l’EFI ne sont pas articulées aux stages pratiques.
Il est suggéré d’augmenter les stages pratiques et trouver les moyens de donner aux élevés-maîtres plus
d’occasions d’enseigner (par exemple en envoyant moins d’élèves-maîtres par classe d’application). Pour une
meilleure articulation entre la formation théorique et les stages pratiques, il faudrait donner aux stagiaires des
devoirs à faire dans les écoles d’application, c'est-à-dire qu’ils doivent rassembler des exemples de bonnes
pratiques, répertorier les difficultés ou leurs questions sur l’enseignement qu’ils peuvent discuter avec les
formateurs.
L’analyse et la critique des pratiques observées dans les écoles d’application pourraient être l’aspect central de
la formation à l’EFI qui rendrait et la formation théorique et la formation pratique plus pertinentes. La
systématisation des rencontres de coordination entre formateurs EFI et maîtres d’application pourrait faciliter ce
processus ainsi quel’organisation de groupe discussions réflexives basées sur des observations de leçons ou
des vidéos de salles de classe.
Il est recommandé de mieux contrôler la qualité de l’enseignement dans les écoles d’application. Il faut identifier
les écoles et les maîtres où l’enseignement n’est pas en adéquation avec la pratique recommandée et les
remplacer.
Le contenu du programme de formation initiale
Le Guide, dans sa structure actuelle, n’inclut pas les CEB. Le Guide doit être révisé pour offrir plus d’appui et de
ressources aux formateurs et pour l’harmoniser avec le CEB. En outre, le CEB n’est pas pris en compte dans la
formation initiale et les élèves-maîtres ne sont pas évalués sur ces modules lors des examens de sortie.
Nous recommandons de concevoir un manuel de l’EFI unique et harmonisé qui montre la démarche de la leçon
convenant à l’approche par compétences à tous les niveaux et prépare mieux les élèves-maîtres à articuler les
différentes étapes de la leçon. Il doit aussi inclure des fiches du formateur. Il est recommandé d'inclure le CEB
dans la formation initiale et de lui accorder une place centrale.
80
Relations entre formation initiale et continue
La plupart des acteurs de l’éducation interviewés dans les 4 régions ciblées ont reconnu une insuffisance des
relations entre formation initiale et continue: Les formations continues ne ciblent pas de manière spécifique les
sortants des EFI. Les formations continues ciblent plus les candidats aux examens professionnels que les
sortants de la formation initiale qui ont des besoins spécifiques. Les programmes nationaux sont standardisés et
ne se déroulent pas en fonction des besoins particuliers des enseignants. En général, les acteurs ont noté une
insuffisance de communication entre la formation continue et la formation initiale.
La formation continue est assurée par les inspecteurs, il a été noté un manque de temps et une insuffisance du
nombre d’inspecteurs qui suivent plus les enseignants candidats aux examens professionnels, ce qui constitue
une limite de la formation continue. Il est recommandé de spécialiser certains inspecteurs uniquement pour la
formation et de les rendre disponibles en fonction des besoins.
En ce qui concerne la formation continue sur le CEB, la plupart des enseignants reçoivent des « informations »
plutôt qu’une formation étant donné la courte durée de la formation par rapport au programme et au grand
nombre d’enseignants en exercice dans ces sessions de formations. Les IDEN pensent utiliser les CAP et les
directeurs comme relais afin de continuer à suivre les enseignants dans leurs classes. Il est alors recommandé
de mieux organiser ces sessions de formation sur le CEB vu son importance dans le système éducatif ou de
mieux les intégrer comme initialement recommandé dans la formation initiale. Une série cohérente de modules
enseignés dans le cadre des cellules pédagogiques pourraient servir comme suivi à l’initiation au curriculum.
La méthode d’enseignement de la lecture
La lecture est le pilier de l’apprentissage mais son importance n’est pas reconnue pas la formation initiale. Ce
résultat est confirmé par le faible temps consacré à la lecture en tant que discipline et le manque de formation
spécifique en lecture des formateurs. Le temps réservé à la didactique de la lecture dans la formation initiale
devrait être renforcé et des spécialistes en lecture formés.
L’approche de l’enseignement de la lecture préconisée par le CEB et la SARENA sont en accord avec la
recherche internationale. Le but de la lecture est de saisir le sens et pour atteindre cet objectif, l’enseignement
de la lecture doit inclure toutes les compétences nécessaires pour une bonne initiation à la lecture. Cependant,
aussi bien les élèves-maîtres que les enseignants observés ne maitrisent pas cette compétence. Il est
recommandé de renforcer ces programmes de formation continue afin de former une masse critique
d’enseignants pour un changement de pratique.
Pour la formation initiale il est recommandé que tout élève-maître reçoive des exemplaires du guide
pédagogique du CEB et que les cours en didactique de la lecture incluent l’étude des leçons préconisées par le
guide. L’importance de toutes les stratégies de lecture et surtout celles qui concerne la compréhension doit être
soulignée et renforcée.
La méthode d’enseignement des mathématiques
Il faut souligner la bonne compréhension de la concrétisation en mathématiques pour la résolution de problèmes
et les mesures pour les enseignants et les élèves-maîtres. Cependant, il faut noter les difficultés à mettre en
pratique la concrétisation. Les programmes de formation continue en maths (CEB et PREMST) mettent l’accent
sur ces concepts. Une meilleure articulation entre la formation théorique et les stages pratiques ainsi que l’étude
intensive du curriculum permettraient une bonne application du concept.
La mise en cohérence des innovations et l’augmentation du nombre de maîtres formés
Le système éducatif intègre une multiplicité d’innovations qui ne sont pas généralisées. Très souvent les
enseignants en exercice s’en plaignent. En plus, ces innovations ne touchent pas tous les enseignants ou le taux
d’enseignants formés est tellement faible que ces formations continues ne contribuent pas à changer les
pratiques enseignantes (à l’image de la stratégie de lecture SARENA qui est jugée bonne mais n’a pas touché
81
une masse suffisamment critique pour engendrer un changement de pratique en lecture). Il est recommandé une
meilleure coordination et plus de cohérence de toutes ces innovations.
82
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86
Annexe 1: Méthode d’analyse des couts et de la rentabilité 15
Ratio formateur / élève maitre = TTR = =
Nt = effectif des élève maitres dans l’EFI et NT = nombre de formateurs
Donc NT = TTR x Nt
Le coût salarial par élève maitre pour le personnel enseignant (Cs) est représenté par
Coût par élève maitre = Cs
=
La somme des salaries des formateurs x TTR
Nt
=
= la somme de tous les salaires des formateurs qui enseignent le français ou les mathématiques
Donc Cs =
Si
est approximativement égale à la moyenne de tous les formateurs enseignants en français (lecture) ou
en mathématiques (AvTs) x NT
Cs
=
Note:

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TTR is calculated when we know the number of tutors teaching the subject and the number of trainees
he/she is teaching
Recurrent teaching costs per trainee will rise with average tutors’ salaries and fall as the TTR increases
If is minimized and TTR maximized in ways consistent with maintaining quality, the economic concern
with cost efficiency would be satisfied. However, this will depend on what is delivered to trainees in the
TTC mathematics or English (reading) curriculum which will not only depend on salary costs per trainee,
but would need to be translated into tutors contact hours with trainees (teaching reading or
mathematics), and the work which surrounds these contact hours
What is delivered in terms of taught time (taught hours per week or periods per week) for a particular
cost, is a function of the number of trainees per tutor (TTR), the amount of teaching associated with the
teaching posts and the average teaching group size.
The formula for teaching load is
• TTR est calculé quand on sait le nombre de formateurs qui enseigne la matière et le nombre de élève maitres,
qu’ils enseignent.
• Les coûts récurrents d'enseignement par élève maitre augmenteront à mesure des salaires moyens des
formateurs réduiront à mesure que le TTR augmente
• La somme d’heures d'enseignement par semaine pour un coût particulier sont une fonction du nombre d’élèves
maitres par formateur (TTR), l’horaire attendu de chaque formateur et la taille moyenne de la classe.
• La formule de la charge d'enseignement est
Nombre de formateurs x TTR
Taille moyenne de la classe
Source: Lewin K (1999) Counting the Cost of Teacher Education: Cost and Quality Issues – MUSTER Discussion Paper,
University of Sussex, Brighton.
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