La généalogie des combattants congolais de la liberté.
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La généalogie des combattants congolais de la liberté.
La généalogie des congolais de la liberté. combattants L'état indépendant du Congo fut créé en 1885, faisant suite aux divers accords avec les puissances occidentales qui espéraient voir dans cette région une vaste zone de libre échange, comme stipulé dans l'acte de Berlin. Léopold II, roi des Belges, en assumait la souveraineté et allait rapidement se déclarer propriétaire du pays, de ses habitants et de ses produits. Il se révélerait ainsi être l'antithèse du roi philanthrope qu'il prétendait représenter. Pendant une vingtaine d'années, les agents territoriaux, la force publique, et les milices armées des sociétés privées, allaient répandre la terreur dans les régions de l'Équateur, de l'Aruwimi, du Lomarni, du MaiNdombe, de l'Itimbiri, de l'Uele, du Kasaï et de la Mongala. Esclavagisme, déportations, guerres, massacres, pillages, captures, emprisonnements et tortures étaient les moyens et les méthodes utilisés pour forcer la population à récolter le caoutchouc et à le livrer aux autorités coloniales. Ce régime de terreur ne sera jamais dénoncé par les missionnaires catholiques qui participaient à la prétendue mission civilisatrice du roi. Le régime colonial "Léopoldien" a entraîné la mort des millions de congolais. Jan Vansina, professeur émérite d'Histoire et d'Anthropologie à l'Université du Wisconsin, estime que la population du Congo a diminué de moitié entre 1880 et 1920. En 1924, la population du Congo était estimée à 10 millions d'habitants. Les consciences nobles telles que le Britannique Edmund Morel, se vouèrent à combattre les atrocités commises à l'endroit des indigènes. Avec sa plume, il étala au grand public les brutalités des Belges au Congo. Ses révélations provoqueront un tollé de protestations à travers le monde. Grâce notamment à ce travail de Morel et de la CRA et de la pression des gouvernements britanniques et américains, des négociations entre le gouvernement belge et le Roi Léopold II s'organisèrent en 1907 pour la reprise du territoire du Congo par l'Etat belge. Le 20 août 1908, la Chambre des Représentants belge approuva la Charte Coloniale et le traité de reprise du Congo qui seront entérinés au Sénat en septembre et sanctionnés par le roi en octobre. Le Congo passera ainsi sous la colonisation belge. Il est à noter que le système d'exploitation et de traitement des populations indigènes mis en place depuis 1885 demeurera intact, à part quelques amendements mineurs. La lutte n'était donc pas finie. C'est dans un tel contexte qu'apparaîtront les premiers germes des combattants congolais de la liberté. Génération I: Kimbangu Mvuluzi Kimbangu est né le 12 septembre 1887 à Nkamba dans le BasCongo. Doué d'un pouvoir spirituel immense, il donne la preuve de l'approbation divine à son ministère en guérissant une femme de son village par imposition des mains. Sa prédication est basée sur un très puissant message de réveil de la conscience de l'homme en général, et noir congolais en particulier. Fait exceptionnel dans ce monde colonialiste extrêmement intolérant à l'égard du noir. Kimbangu a le courage de dénoncer les injustices des blancs à l'endroit de ses compatriotes considérés et utilisés simplement comme des machines à production sous la conduite du blanc (belge). L'équation se résumant : le blanc est le cerveau tandis que le noir est la machine exécutante. Cette politique dégradante et blessante ne pouvait laisser indifférent une âme aussi pure et assoiffée de justice que celle de Kimbangu. Le rapport des forces est apparemment en faveur du colonialiste belge qui a tout à son avantage : l'argent, la force militaire, mais et surtout, la mainmise sur tout ce qui appartenait à l'homme noir sur le sol de ses propres ancêtres. C'est dans un tel univers que Kimbangu, tout démuni se lance dans un combat sans quartier contre l'injustice du belge. Le combat de Mvuluzi Kimbangu prend une tournure décisive le 6 avril 1921 quand il prononce dans une de ses prêches pour la première fois dans l'histoire du noir d'Afrique, le mot tabou : dipanda dia nzole = Seconde Indépendance. La prédication de ce jour, très passionnée et suggestive lançait un véritable défi au pouvoir colonialiste belge, car réclamant l'indépendance du peuple congolais. Ainsi débutait la lutte entre les oppresseurs colonialistes et les combattants nègres farouchement motivés et déterminés à mettre un terme à toutes les injustices et reconquérir la dignité du peuple congolais. Les autorités belges, alertées par les missionnaires catholiques et protestants, font arrêter Kimbangu, ainsi que ses plus proches fidèles, en septembre 1921. Condamné à mort, mais gracié par la suite par Albert ler Roi des Belges, ce combattant de liberté de la génération 1 verra sa sentence commuée en détention à perpétuité. Il meurt le 12 octobre 1951 à la prison d'Elisabethville. Le Congo belge de cette époque continue à être un véritable camp de concentration où le travail forcé est toujours d'actualité. Aucune infrastructure vouée au développement interne. Le fonctionnement du système étant uniquement conçu pour l'exportation vers la Belgique colonialiste. Même les structures éducatives sont conformées aux besoins du service à la Métropole. C'est ainsi que la première Université ne sera construite que vers 1954, 6 ans à peine avant l'accession du pays à l'indépendance. Génération II: Patrice Lumumba Le Congo belge s'est révélé un univers des injustices invivables de la part des colonisateurs à l'endroit des indigènes. Les âmes nobles ne pouvant se retenir, ont dû exprimer leur mécontentement et opter pour combattre le système. Patrice Lumumba est né le 02 juillet 1925 à Onalua, territoire de KatakoKombe dans le Sankuru. Jusqu'en 1954(année de la fondation d'un réseau d'enseignement laïque et de la première université) la Belgique coloniale n'a que peu développé le système d'éducation, entièrement confié aux missions religieuses, l'école ne donne qu'une éducation rudimentaire et vise plus à former des ouvriers ou des clercs, mais Lumumba autodidacte, se plongera dans des manuels d'histoire pour étudier plus en profondeur la Révolution française, l'histoire d'Haiti, des Etats-Unis et de la Russie. Il travailla comme employé de bureau dans une société minière de la province du Sud Kivu jusqu'en 1945, puis comme journaliste à Léopoldville (aujourd'hui Kinshasa) et Stanleyville (Kisangani), période pendant laquelle il écrivit dans divers journaux. En 1955, il crée une association "APIC" (Association du personnel indigène de la colonie) et aura l'occasion de s'entretenir avec le Roi Baudouin en voyage au Congo, sur la situation des Congolais. Le ministre du Congo de l'époque, Auguste Buisseret veut faire évoluer le Congo et notamment mettre en lace un enseignement public. Lumumba adhère au parti libéral belge avec d'autres notables congolais. Avec plusieurs d'entre eux, il se rend en Belgique sur invitation du premier ministre. Le combat pour l'indépendance En 1956, il est emprisonné un an. Libéré par anticipation, il reprend ses activités politiques et devient directeur des ventes d'une brasserie. Le gouvernement belge prend quelques mesures de libéralisation : syndicats et partis politiques vont être autorisés en vue des élections municipales qui doivent avoir lieu en 1957. Les partis politiques congolais sont parrainés par ceux de Belgique et Lumumba est d'abord inclus dans l'amicale libérale. En 1958, à l'occasion de l'exposition universelle, des Congolais sont invités en Belgique. Outrés par l'image dégradante du peuple congolais qui est véhiculée par l'exposition, Lumumba et quelques compagnons politiques nouent des contacts avec les cercles anti - colonialistes. Dès son retour au Congo, il crée le Mouvement National Congolais (MNC), à Léopoldville le 5 octobre 1958 et, à ce titre, participe à la Conférence panafricaine. Il peut organiser une réunion pour rendre compte de cette conférence au cours de laquelle il revendique l'indépendance devant plus de 10 000 personnes. Premiers démêlés politiques en octobre 1959: le MNC et d'autres partis indépendantistes organisent une réunion à Stanleyville. Malgré un fort soutien populaire, les autorités belges tentent de s'emparer de Lumumba c'est l'émeute et une trentaine de morts. Lumumba est arrêté quelques jours plus tard, est jugé en janvier 1960 et condamné à 6 mois de prison le 21 janvier. En même temps les autorités belges organisaient des réunions avec les indépendantistes auxquelles participe finalement Lumumba, qui est donc libéré de facto le 26 janvier. A la surprise générale, la Belgique accorde au Congo l'indépendance qui est fixée au 30 juin 1960. Lors de la cérémonie d'accession à l'indépendance du pays, le 30 juin 1960, il prononce un discours virulent dénonçant les abus de la politique coloniale belge depuis 1885. Au lieu de s'adresser au Roi présent à la cérémonie, Lumumba commença son allocution par une salutation "aux Congolais et Congolaises, aux combattants de l'indépendance..." Son discours proclamait vivement que l'indépendance marquait la fin de l'exploitation. Une très brève carrière politique Le MNC et ses alliés remportent les élections organisées en mai et, le 23 juin 1960, Patrice Émery Lumumba devient le 1er Premier Ministre du Congo indépendant. Mais, quelques mois après, suite à un coup d'Etat, Joseph Désiré Mobutu, le destitue et l'assigne à résidence. En décembre, s'échappe de la capitale pour tenter de gagner Stanleyville. Il est arrêté alors qu'il passait la Sankuru à Mweka, et transféré au camp militaire de Thysville sur ordre de Mobutu. Le 17 janvier 1961, Patrice Lumumba, Maurice Mpolo et Joseph Okito sont conduits par avion à Elisabthville (Katanga) et livrés aux autorités locales. Ils seront conduits dans une petite maison sous escorte militaire où ils seront ligotés et humiliés par les responsables katangais comme Moise Tshombe, Munongo, Kimba, Kibwe, Kitenge mais aussi les Belges Gat et Vercheurel. Ils sont fusillés le soir même par des soldats sous le commandement d'un officier belge. Génération III: Etienne Tshisekedi Étienne Tshisekedi wa Mulumba, né à Kananga (anciennement Luluabourg) en 1932. Tshisekedi obtient son diplôme de docteur en droit à l'université Lovanium de Kinshasa en 1961, devenant ainsi le premier diplômé en Droit du Congo. Déjà en 1960, il est membre du Collège des Commissaires Généraux, gouvernement provisoire mis en place par Joseph Mobutu après un coup d'état, en tant qu'adjoint du commissaire à la Justice, Marcel Lihau. Il prend part à la rédaction de la Constitution congolaise de 1967. Cette même année, au conclave de Nsele, Tshisekedi rédige, avec Mobutu, Justin Bomboko et Singa Udjuu, le manifeste de la Nsele, créant ainsi le Mouvement Populaire de la Révolution. Rupture avec Mobutu et le MPR : Septembre 1969 Suite aux sérieuses divergences d'options politiques (M. Mobutu amorçait un revirement vers un monolithisme politique et faisait preuve d'intolérance face aux manifestations pacifiques des citoyens en ordonnant notamment le massacre des étudiants de Lovanium, le 4 juin 1969) M. Tshisekedi fut définitivement écarté du gouvernement. Combat pour la Démocratie (1979 à 1999) et Calvaire sous Mobutu Le régime de M. Mobutu ayant radicalisé son option dans la chosification de l'homme Zairois (congolais), M. Tshisekedi amorce le combat pour la démocratie et un Etat de droit. Il se retrouve parmi les 13 parlementaires cosignataires le ler juillet 1979 de la lettre au Président Mobutu, dénonçant les violations des Droits de l'homme à l'occasion du massacre en masse des congolais dans la province du Kasai. Il connaît alors arrestations, tortures, brimades, pressions, bannissements, relégations et résidences surveillées A la longue le peuple congolais se reconnaît dans la résistance qu'il mène et, ensemble, ils se lancent à l'assaut du régime oppressif du Maréchal Mobutu qui clochardise le peuple. Brève prise de responsabilités publiques La résistance populaire aura enfin raison du régime et, Mobutu se voit forcé d'accepter la tenue de la Conférence Nationale Souveraine, qui élira Tshisekedi Premier ministre le 15 Août 1992. Pendant les 2 mois et demi de ses fonctions, M. Tshisekedi redonne au Zaire un nouveau souffle, mais il ne peut mener à bien sa mission de remise du pays sur pied: les occidentaux lui préfèrent Kengo wa Dondo et Mobutu le hait. En violation des résolutions de la Conférence nationale, Mobutu le démet de son poste de Premier ministre le 5 février 1993 et, Tshisekedi se voit interdit d'accès à son bureau par un arsenal militaire. Mobutu et le Zaïre sont bannis en 1997 par Laurent Désiré Kabila et ses amis rwandais Bizima, Bugeira, James Kabarebe. Tshisekedi refuse d'entrer dans leur gouvernement. Bravant la terreur de la gâchette facile, il exige (juillet 97) le retour des rwandais chez eux et en appelle au peuple de continuer la résistance contre la nouvelle dictature téléguidée de Kigali. Il confronte la nouvelle formule de gouvernement, le fameux 1+4 et proclame haut et fort en 2005 :" la parenthèse Afdl doit se refermer au 30 juin de la même année(Mot d'ordre qui sera suivi par le peuple congolais de partout au monde, avec des manifestations monstres devant les instances dirigeantes des pays hôtes, tandis qu'à Kinshasa et dans les provinces, la répression se fera de plus atroce) Il rejette et boycotte le référendum sur la constitution du 18/12/2005 et demande au peuple de ne pas participer aux élections de 2006. Le combat d'Etienne Tshisekedi se situe au niveau des principes : pour lui, il faut que le peuple congolais, souverain primaire, participe réellement à la gestion de son propre destin. Imperturbable et fidèle à sa méthode de lutte, il réclame toujours pour le Congo, l'avènement d'un Etat de droit et d'une démocratie véritable. Par sa détermination, sa ténacité, et son sérieux, Etienne se classe aux rangs des grands combattants congolais de la liberté.