mémoire - ENvironnement JEUnesse

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mémoire - ENvironnement JEUnesse
Stimuler le développement d'une conscience environnementale et
d'une pensée critique auprès des jeunes afin qu’ils exercent des
actions citoyennes pour un avenir viable
POUR UN AVENIR SANS LE NUCLEAIRE
MÉMOIRE
MEMOIRE DEPOSE DANS LE CADRE DES AUDIENCES PUBLIQUES DE LA
COMMISSION CANADIENNE DE SURETE NUCLEAIRE SUR LE RENOUVELLEMENT
DU PERMIS D'EXPLOITATION DE LA CENTRALE NUCLEAIRE GENTILLY-2 PAR
HYDRO-QUEBEC ET SUR LE PROJET DE MODIFICATIONS DES INSTALLATIONS DE
STOCKAGE DES DECHETS RADIOACTIFS ET DE REFECTION DE LA CENTRALE
Octobre 2006
Mémoire préparé par :
Amélie Trottier-Picard, 19 ans
Vice-présidente - Politique et Communications d'ENvironnement JEUnesse
Étudiante au CÉGEP Édouard-Montpetit
Dans le programme de sciences de la nature
Mémoire révisé par :
Gabrielle Charbonneau-Jodoin, présidente
René Coignaud, ancien président
I- Présentation d’ENvironnement JEUnesse
Créé en 1979, ENvironnement JEUnesse est un réseau québécois de jeunes, de groupes de jeunes et
d’intervenants qui oeuvrent à la protection de l’environnement en menant des actions pour, par et avec
les jeunes. ENvironnement JEUnesse c’est un organisme d’éducation relative à l’environnement et de
loisir scientifique qui vise à stimuler le développement d’une conscience écologique chez les jeunes, à
les soutenir dans leurs actions environnementales et à développer chez eux une vision critique des
sciences sur un plan principalement environnemental, mais aussi économique, social et culturel.
ENvironnement JEUnesse, c’est la voix des jeunes environnementalistes au Québec, qui y sont réunis
pour faire connaître leurs positions, leurs espoirs, leurs préoccupations et leurs solutions concernant les
enjeux environnementaux actuels.
Nos principaux objectifs sont les suivants :
◊ Développer les connaissances, les attitudes et les habiletés des jeunes pour qu’ils puissent
agir en tant qu’agents multiplicateurs dans leur milieu;
◊ Informer et former les jeunes et les intervenants sur des enjeux environnementaux;
◊ Rassembler et motiver les jeunes, les groupes de jeunes et les intervenants dans un réseau
dynamique et favoriser les échanges à l’intérieur et à l’extérieur de ce réseau;
◊ Concevoir, diffuser et mettre à jour des outils pédagogiques et de soutien à l’action pour les
jeunes;
◊ Participer à des consultations et des débats publics sur les enjeux environnementaux et y
promouvoir la place des jeunes et de l’éducation relative à l’environnement.
Plusieurs thématiques sont couvertes par nos activités de formation. Parmi celles-ci, nous abordons les
thèmes des enjeux alimentaires, de la gestion des déchets, des changements climatiques, du transport
durable, de l’eau, de la gestion environnementale dans les milieux scolaires, etc.
II- Notre intérêt
Pourquoi souhaitons-nous contribuer à ces audiences de la Commission canadienne de la sûreté
nucléaire? ENvironnement JEUnesse a un vif intérêt pour les questions énergétiques depuis très
longtemps. Depuis notre création, en 1979, nous avons été actifs dans l’essentiel des débats portant sur
les questions énergétiques au Québec. Nous avons notamment participé aux audiences du BAPE sur
l’énergie en 1995 et à celles portant sur la centrale au gaz le Suroît d’Hydro-Québec en 2002.
Les jeunes ont également fait entendre leurs préoccupations sur les enjeux liés à l’énergie nucléaire par
le biais d’ENvironnement JEUnesse lors des audiences du BAPE sur le stockage à sec du combustible
nucléaire irradié de la centrale Gentilly-2 en 1994. Plus récemment, nous avons également contribué
aux audiences de la Commission Canadienne de la Sûreté Nucléaire sur le renouvellement du permis
d’exploitation d’Hydro-Québec pour Gentilly-2 en 2002 ainsi qu'aux audiences du BAPE de 2004 sur
le projet de modification des installations de stockage de déchets radioactifs et de réfection de la
centrale Gentilly-2 par Hydro-Québec.
Plus fondamentalement, nous agissons concrètement sur le terrain dans nos milieux scolaires et nos
communautés pour mettre en oeuvre le développement durable. Nous croyons que notre avenir sera
viable uniquement si nous mettons tous la main à la pâte pour améliorer notre environnement. Nous
travaillons à promouvoir des solutions aux changements climatiques par le développement d’un avenir
énergétique viable pour notre planète et la vie qu’elle abrite.
L’énergie nucléaire illustre malheureusement trop bien ce que l’on tente de changer puisqu’il s’agit à
notre avis d’une technologie sans issue, notamment en raison de ses déchets dont on ne sait que faire.
En tant qu’organisation de jeunes, nous avons la responsabilité de rappeler avec la pertinence de notre
témoignage de génération montante que nous ne pouvons faire abstraction des intérêts futurs pour des
considérations présentes.
III- Notre opinion
A- Les fondements sur le nucléaire
À trop regarder les détails, on en vient parfois à oublier des éléments de base. Nous tenons donc à
débuter par quelques prémisses générales par rapport à l’énergie nucléaire.
Éminemment dangereux
Que l’énergie nucléaire n’est pas dangereuse est fondamentalement faux et en soi-même très
dangereux. Au mieux, il est possible de contenir les dangers qui lui sont inhérents. Il ne faut
jamais perdre ceci de vue. Qu’est-ce qui justifie de s’exposer à de pareils risques? C’est une
question qui doit au minimum faire l’objet d’un débat. Une approche responsable nécessite de
s’assurer que les gens s’exposant à ces dangers en soient pleinement informés. Faire oublier une
situation n’est pas une manière appropriée de la traiter.
Les déchets
Il y a plus de cinquante ans que l’on produit des déchets nucléaires au Canada et ailleurs dans le
monde. Il y a 50 ans que l’on recherche des solutions permanentes pour la gestion de ces déchets.
Malgré les investissements substantiels pour résoudre le problème, rien de bien convainquant n’a
été offert. Fondamentalement, il n’est pas convenable de produire des déchets sans être en
mesure d’en assurer la gestion appropriée à long terme.
Le programme CANDU
Les CANDU dans leur ensemble ont connu plus d’un incident. Parmi les incidents significatifs,
mentionnons qu’il y a eu quelques pertes de caloporteur, dont une ayant nécessité l’inondation du
cœur d’un réacteur, au complexe de Pickering. Rappelons également la fermeture de 8 centrales en
1998 pour raisons de sécurité.
Le nucléaire au Québec
Gentilly-1
L’échec cuisant de la centrale Gentilly-1 nous a légué une centrale qu’il faudra bien démanteler un
jour ou l’autre. Peut-être faudrait-il régler le sort de cette centrale avant d’envisager prolonger
l’opération de la seconde?
Gentilly-2
Nous savons que l’histoire de cette centrale a commencé avec un dépassement de coûts de plus
d’un milliard de dollars. Sans compter la centrale thermique construite spécialement pour Gentilly2. L’ampleur des travaux nécessaires à cette centrale âgée d’un peu plus de 20 ans, devrait soulever
de sérieuses questions à savoir s’il vaut la peine d’investir pour en prolonger la vie ou s’il ne s’agit
pas purement et simplement d’un gouffre sans fond.
B- Renouvellement du permis d'exploitation de la centrale nucléaire Gentilly-2
La centrale nucléaire Gentilly-2 arrive au terme de sa vie utile et ses installations sont
vieillissantes. Il est par conséquent souhaitable d'effectuer un suivi très serré de la qualité de son
exploitation ainsi que des défaillances qui pourraient survenir. La demande actuelle d’HydroQuébec concerne un renouvellement de leur permis d’exploitation d’une durée de quatre ans.
Considérant l’état actuel des installations, nous croyons qu’il serait plus approprié de leur accorder
un renouvellement de leur permis d’exploitation pour une période de deux ans au lieu de quatre, ce
qui assurerait un suivi plus serré de leurs activités.
Recommandation :
ENvironnement JEUnesse recommande que dans le cas où le renouvellement du permis
d’Hydro-Québec pour l’exploitation de la centrale nucléaire Gentilly-2 soit renouvelé,
qu’il le soit pour une période de deux ans seulement afin d’assurer un suivi plus serré de
leurs activités.
C- Évaluation environnementale
1- Agrandissement des installations de stockage des déchets radioactifs
Il est inquiétant de constater que nous n'avons toujours pas décidé du destin des déchets
produits par la production d'énergie nucléaire. Des sommes importantes ont été investies dans
les dernières dizaines d'années pour tenter de résoudre ce problème, mais aucune solution
convaincante n'a été proposée. Les seules actions auxquelles nous assistons actuellement sont
de l'entreposage centralisé en surface près des centrales. Est-ce une solution durable?
Sûrement pas puisque les laisser à cet endroit nécessiterait une surveillance durant
d'innombrables années. Combien de temps cela durera-t-il?
Toutes les solutions qui nous sont proposées portent des problèmes d'importance : elles
nécessitent des coûts astronomiques que le fonds constitué au fil des ans par Hydro-Québec
n'est pas prêt à supporter. De plus, elles nécessitent souvent un transport du combustible
irradié. Finalement, elles nécessitent une surveillance sur une très longue période de temps.
Cette demande d'agrandissement relance à nouveau le débat sur l'entreposage permanent des
déchets radioactifs. On sait que le Québec est plutôt froid à l'idée de créer un tel site dans notre
belle province. Pourtant, il serait difficile de décider simultanément d'aller de l'avant dans le
prolongement de la vie utile de la centrale et de refuser catégoriquement de disposer de nos
déchets par nous-mêmes, de refuser d'assumer les conséquences de nos choix. Nous ne
pouvons pas imposer les conséquences de nos choix aux habitants d'autres provinces ou pays
parce que nous ne voulons pas les assumer. Cette attitude à adopter serait hypocrite. Mieux
vaut stopper le plus rapidement possible la production de déchets radioactifs et ainsi réduire au
minimum le problème.
Le rapport du BAPE pour ce dossier faisait une demande claire à Hydro-Québec :
« La commission est d’avis qu’Hydro-Québec devrait proposer une solution réaliste et
acceptable socialement pour gérer à long terme les déchets radioactifs de la centrale de
Gentilly-2. »
Le problème du stockage permanent reste entier. Les déchets actuels posant assez de
problèmes suffisamment complexes, il ne nous semble pas nécessaire d'en rajouter. Pour la
suite, on nous propose d'attendre. Il faudra un jour disposer de ces substances et si ce n'est pas
vous qui le faites, ce sera notre génération qui devra le faire.
Recommandation :
ENvironnement JEUnesse demande qu'Hydro-Québec propose une solution réaliste et
socialement acceptable pour gérer à long terme les déchets radioactifs de la centrale
Gentilly-2.
Environnement JEUnesse recommande que le développement de cette solution soit
conditionnel à la poursuite des activités d'Hydro-Québec dans le cadre de son
exploitation de la centrale nucléaire Gentilly-2.
2- Réfection de la centrale nucléaire Gentilly-2
Revenons aux dangers reliés à l'exploitation d'une centrale nucléaire. Ces dangers sont réels et
nécessitent une attention accrue au niveau de tous les travaux effectués dans la centrale, au
niveau de l'exploitation quotidienne de la centrale ainsi qu'au niveau du démantèlement de la
centrale. Pourquoi allonger la période durant laquelle nous exposons la population
environnante, les travailleurs ainsi que tout l'écosystème entourant l'environnement physique
de la centrale à ces dangers plutôt que de réduire cette même période?
La réfection de la centrale nucléaire Gentilly-2 pour prolonger sa durée de vie est un gros
engagement si on tient compte de la durée du projet. En s'engageant dans ce projet, on permet
à la centrale d'être opérée jusqu'en 2035, après quoi il faudra la démanteler et disposer des
déchets qui découleront de ces activités. De plus, nous ne cessons pas d'allonger la durée
d'entreposage centralisé en surface. Ce n'est pas forcément une mauvaise chose, mais nous
engageons ainsi de plus en plus de générations à venir.
Les centrales à l'énergie nucléaire ont une durée de vie plus courte que d'autres sources
d'énergie exploitées au Québec. Pourtant, il s'agit d'une forme d'énergie qui engage de
nombreuses générations à venir par sa production de déchets hautement radioactifs, et
présentement éternellement durable, mais dans le sens contraire du développement durable.
Cet aspect est particulièrement inquiétant parce qu'une réponse positive à la réfection de la
centrale n'assurerait pas l'avenir énergétique pendant très longtemps par rapport à la durabilité
d'autres sources d'énergie, mais elle imposerait toutefois un lourd fardeau aux générations à
venir. On leur lègue les aspects négatifs et on se garde les aspects positifs.
Il serait donc plus logique de profiter de cette occasion qu'est la fin de la vie utile de la
centrale nucléaire Gentilly-2 pour faire le choix qui s'impose : démanteler la centrale. À ce
niveau, la centrale Gentilly-1 nécessiterait également des travaux majeurs. Les prochaines
années pourraient servir à développer une expertise par rapport au démantèlement des
centrales nucléaires de type CANDU.
Recommandation :
Considérant que la centrale nucléaire Gentilly-2 arrive au terme de sa vie utile;
Considérant qu'aucune solution durable n'a encore été trouvée par rapport au stockage à
long terme des déchets hautement radioactifs;
Considérant que l'exploitation d'une centrale nucléaire est reliée à des risques qu'il est
possible de limiter, mais qu'il est impossible d'éliminer;
Considérant que les centrales nucléaires ont une courte durée de vie mais qu'elles
produisent des déchets dangereux pour une période beaucoup plus longue;
Considérant que la réfection de la centrale nucléaire Gentilly-2 placerait les prochaines
générations dans une position particulièrement mauvaise;
ENvironnement JEUnesse recommande de ne pas autoriser Hydro-Québec à s'engager
dans la réfection de la centrale nucléaire Gentilly-2.
ENvironnement JEUnesse demande à Hydro-Québec de s'engager dans le démantèlement
de la centrale nucléaire Gentilly-2.
IV- Conclusion
Le Québec doit profiter de la fin de la vie utile de la centrale nucléaire Gentilly-2 pour se sortir de la
filière nucléaire. Comme il n'y a toujours pas de solution durable quant au stockage de déchets
radioactifs, on ne doit pas s'obliger à accumuler davantage de ces déchets alors qu'on ne sait pas que
faire de ceux dont nous sommes présentement accablés. De plus, la réfection de la centrale Gentilly-2
engagerait trop de prochaines générations pour que ce projet soit acceptable. Hydro-Québec doit
s'engager dans le démantèlement d'abord de Gentilly-1 pour ensuite s'attaquer à Gentilly-2. Les
prochaines années devraient être consacrées au développement d'une expertise au niveau du
démantèlement des centrales nucléaires de type CANDU. Il en va de notre avenir!!!