Les années 50 : la mode en France (1947-1957)

Transcription

Les années 50 : la mode en France (1947-1957)
Analyse
Les années 50 : la mode en France (1947-1957)
Organisée par le Palais Galliera du 12 juillet au 2 novembre 2014, l'exposition "Les années 50 : la mode
en France (1947-1957)"
met l'accent sur la cohabitation de la Haute Couture et du Prêt-à-porter.
De la Haute Couture au Prêt-à-porter : Paris, Capitale de la
mode.
Les grands couturiers / Le Prêt-à-porter
Les grands couturiers
•
Christian Dior
En 1945, au lendemain de la Seconde Guerre mondiale,
la France se remet doucement des
blessures provoquées par des bombes meurtrières. En
1947, une bombe, toute pacifique, est déclenchée par
Christian Dior : un ensemble de cocktail intitulé "Bar".
Dior invente une nouvelle silhouette qui ravit les femmes
privées de séduction pendant la dernière guerre. Lors de
son premier défilé, le 12 février 1947, Carmel Snow ,
journaliste américaine de la revue Harper's Bazaar,
s'exclame : "Dear Christian, your dresses have such a
new look !". Le ton est lancé. Dior se souvient des
jardins de son enfance pour créer des robes, jupes,
manteaux à motifs fleuris. Ses clientes adorent le
romantisme et la fluidité de ses créations. Bien que
magnifiques, ses toilettes ne sont pas toujours
confortables parce que très cintrées.
Il utilise un nombre incroyable de mètres de tissus pour
réaliser ses jupes en corolle. Avec humour, la
romancière anglaise Nancy Mitford fait étaler à son
héroïne lorsqu'elle s'assoit les 20/30 mètres de tissus de
sa jupe Dior dans son diptyque "La poursuite de l'amour"
et "L'amour dans un climat froid".
Quelques citations de Christian Dior :
"En étant naturel et sincère, on fait les révolutions sans les avoir
cherchées" ; "Même dans l'extravagance, la mode doit avoir du sens" ;
"C'est ainsi, dans le brouhaha des félicitations qui suivent le défilé, que
commence à naître la mode nouvelle" ; "Paris, c'est le sens du fini, du
parfait. C'est là que du monde entier on vient chercher cette qualité
artisanale que l'on ne trouve pas ailleurs, et que nous devons avant tout
conserver"
En 1957, Yves Saint Laurent succède à Christian Dior suite à sa disparition. Yves Saint Laurent continue
à suivre les mêmes lignes de Dior au début de sa carrière. Mais insensiblement, Yves Saint Laurent va
aller encore plus loin en bouleversant lui aussi les codes de la mode lorsque qu'il va fonder sa propre
maison de couture dans la décennie à venir.
• Et les autres...
D'origine espagnole, Cristóbal Balenciaga s'oppose à Christian
Dior dans l'architecture de ses créations. Balenciaga n'utilise pas
comme Dior les artifices, baleines, bustiers, jupons pour
maintenir la structure de ses toilettes. Il privilégie des matières
qui lui permettent de les "sculpter" pour leur donner du volume.
Surnommé "le couturier des couturiers", Balenciaga imagine des
formes déstructurées, minimalistes et très avant-gardistes pour
l'époque : lignes Tonneau, Ballon pour ne citer qu'elles. Les
femmes qui portent ses vêtements se sentent belles et
hiératiques comme sorties des tableaux de Velázquez ou Goya.
Balenciaga se définit comme "Architecte pour les plans, sculpteur
pour la forme, peintre pour la couleur, musicien pour l'harmonie
et philosophe pour la mesure".
Hubert de Givenchy fait ses classes chez Jacques Fath, Robert Piguet
, Lucien Lelong et Elsa Schiaparelli avant de fonder sa propre
maison en 1953. Il rencontre Balenciaga pour qui il éprouve
beaucoup d'admiration. Il partage sa philosophie Haute Couture.
Toutefois, Givenchy pressent que la mode doit devenir plus
accessible et être prête à porter sans négliger la qualité,
l'opulence. Aux clientes moins fortunées, il conseille d'avoir
moins de vêtements mais de bonne coupe et de les accessoiriser avec sac, chaussures, chapeau,
bijoux selon la situation et le moment.
Ayant fermé sa boutique vers 1944 et constatant le succès de Christian Dior, Gabrielle Chanel décide
d'ouvrir de nouveau ses portes en 1954. Elle lance ses fameux tailleurs en tweed et son sac matelassé.
Chanel avantage le confort et la liberté des mouvements de ses créations pour les femmes actives. Elle
clame "qu'il n'y a pas de mode si elle ne descend pas dans la rue". Mais Coco Chanel refuse le prêt-àporter pour privilégier le sur-mesure, quintessence de la Haute Couture. Cristóbal Balenciaga s'accorde
avec elle à telle enseigne qu'il préfère fermer sa boutique en 1968 parce qu'il ne se reconnaît plus dans
l'évolution de la société. Bien qu'appartenant à la Haute
Couture, les stylistes, Jacques Fath, Pierre Balmain, Pierre Cardin
, Carven, Jacques Heim entre autres décident de créer dans leur
maison un département destiné à la demi-mesure et au prêt-àporter haut de gamme plus abordable. Ces couturiers y
compris Christian Dior admettent que sans le prêt-à-porter ils
rencontreraient des difficultés dans la gestion de leur maison
de couture. De plus, ils diversifient leurs activités en concevant
des accessoires : ceintures, foulards, sacs, chaussures, bijoux,
parfums, des produits sous licence qui deviennent des
marques commercialisant leurs noms. Ils organisent des
défilés, ouvrent des boutiques de prêt-à-porter de luxe à New
York, Londres ou autres villes étrangères, une façon d'exporter
leurs somptueuses créations prêtes à porter à l'échelle
mondiale. Dans les années 50, Paris demeure toujours le pilier
de la créativité et de l'élégance de la Haute Couture à travers
le monde.
Mais une femme, en avance sur son temps, va bouleverser et
populariser le Prêt-à-porter. Même le mot "Prêt-à-porter" va
être employé par toutes les couches sociales. Cette femme
s'appelle Gaby Aghion. Au lieu d'entrer dans le monde de la
Haute Couture, elle préfère ouvrir toutes grandes les portes du
Prêt-à-porter cependant haut de gamme. En 1952, Gaby
Aghion fonde la maison de couture "Chloé". Le fait d'être née en Egypte tout en étant française, Gaby
Aghion possède une vision internationale de la mode. Sachant que les femmes deviennent de plus en
plus actives et voyagent de plus en plus loin, Gaby Aghion privilégie les vêtements confortables,
élégants, ne nécessitant pas d'essayages et de retouches ou si peu et surtout prêtes à porter.
Haut de page
Le Prêt-à-porter
En venant sauver la France de l'invasion allemande en 1945,
les américains ont modifié sensiblement le mode de vie des
français. Ils ont importé chez nous le Coca cola, la cigarette,
le chewing-gum... Ces petits détails de la vie quotidienne
provenant des Etats-Unis introduisent la décontraction dans
l'art de vivre des Français. Grâce aux nouvelles technologies
qui apparaissent dans les années 1950 facilitant le progrès
industriel et social, l'économie mondiale connaît un essor
certain. L'univers du vêtement n'échappe pas à cette
mutation. Dans le domaine du tissu, des matières
synthétiques apparaissent durant les années 50 : le
polyester, le polyamide et l'acrylique.
C'est en 1947 que deux hommes vont participer à la
naissance du prêt-à-porter : Albert Lempereur, président de la
Fédération de l'industrie des vêtements féminins, et JeanClaude Weill, petit-fils du fondateur de la Maison Weill (1892)
et concepteur du Ready to wear, notion révolutionnaire
venant des Etats-Unis, pays de la grande consommation.
L'apparition du prêt-à-porter engendre la très grande
distribution en série des vêtements dans toutes les tailles et
en maintenant l'exigence du glamour et de l'élégance. Dans
ce contexte, le vocabulaire de la couturière change aussi.
"Confection", "industrie du vêtement féminin" deviennent
"Prêt-à-porter". A cause de cette transformation sociale et
économique, la Haute Couture, devenant de plus en plus
élitiste et onéreuse, se transforme en laboratoire et en vitrine
des tendances des modes qui défilent deux fois par an : Printemps/Eté, Automne-Hiver.
Alors que le prêt-à-porter se réalise industriellement et en série, la Haute Couture relève de l'artisanat.
Du croquis du modéliste à la réalisation, en passant par la coupe, la broderie, la passementerie,
l'assemblage des diverses pièces de la robe, tout se coud à la main et en très petite quantité, parfois en
un seul exemplaire. Ces créations sont considérées comme des œuvres d'art inaccessibles à la grande
majorité de la population. Selon la catégorie sociale, la
presse, "Vogue", "Haper's Bazaar", "Life", "Elle", MarieClaire",… présente les premiers modèles tout faits et tout
prêts à porter haut de gamme mais accessibles. Les
photographes, les illustrateurs de mode (Willy Maywald,
Richard Avedon, Gruau…) et la publicité jouent un rôle
important pour la grande diffusion des créations des
couturiers en France et à travers le monde. D'autre part, une
nouvelle génération, celle du baby-boom, lance une mode
plus décontractée et sportive. Ils veulent ressembler aux
stars du cinéma, de la chanson et du sport paraissant dans
leurs magazines préférés. Tout en piochant les idées dans la
mode, ils inventent leur propre style.
La Haute Couture et le Prêt-à-porter ne peuvent pas se
passer l'un de l'autre. Uniquement accessible à l'élite aisée,
la Haute Couture a besoin du Prêt-à-porter pour survivre.
Tandis que le Prêt-à-porter a besoin de la Haute Couture
pour s'inspirer de la mode imaginée par les grands couturiers
et la répandre en très grand nombre et à moindre coût.
Haut de page
Pour ceux qui ne peuvent se déplacer au Palais Galliera pour visiter l'exposition, il est possible de
visionner la vidéo suivante réalisée par Paris-Musées. Olivier Saillard, directeur du Palais Galliera, la
commente :
En complément, un diaporama pour avoir un aperçu des créations des grands couturiers :
Haut de page
Sélection de références
Les années 50 : la mode en France (1947-1957) :
exposition au Palais Galliera du 12 juillet au 2 novembre
2014; Exposition. Paris, Palais Galliera. 2014
Alexandra Bosc
Paris-Musées, 2014, FRANCE
Histoire de la haute couture française des années 50 qui correspond à
la trajectoire de Christian Dior, créateur du New Look. Ceci en regard
avec Balenciaga, Fath, Balmain, Givenchy, Cardin, Chanel. Est
évoquée aussi l'apparition inéluctable du prêt-à-porter en France
durant cette période.
1 vol. (272 p.) : illustrations en noir et en couleur , Papier
743.9(44) ANN
Palais Galliera, musée de la mode de la Ville de Paris
Le Palais Galliera, musée de la mode de la Ville de Paris, est localisé 10
avenue Pierre Ier de Serbie dans le 16e arrondissement.
Il renferme une riche collection de costumes, vêtements, accessoires
datant du 18e siècle jusqu'à nos jours ainsi que d'art graphique et de
photographies. Ces "archives" de mode sont exhumées par rotation lors
des expositions à thèmes.
Publié
le
29/10
/2014
ARTS
20e siècle
-
Tags
:
mode
-
Paris et Ile-de-France
BT
Voir aussi
Bibliographie sélective sur la mode des années 50
232
KB
A propos de l'auteur