Lire la transcription du discours de Pierre

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Discours de Pierre-René Lemas
Directeur général du groupe Caisse des Dépôts
Lancement du bicentenaire de la Caisse des Dépôts
Grand Palais – Mardi 12 janvier 2016
Monsieur le président de la République, mesdames et messieurs les ministres,
mesdames et messieurs les parlementaires, mesdames et messieurs les élus,
mesdames et messieurs les membres de la Commission de surveillance, mesdames
et messieurs les présidents et directeurs généraux, mesdames et messieurs, très
chers collègues, chers amis.
Votre présence ici, ce matin, monsieur le président de la République, à ce
rassemblement des personnels et des partenaires de la Caisse des Dépôts pour
célébrer l’année de son Bicentenaire, est un immense honneur et un immense
bonheur, dont chacun de nous mesure le prix. Merci de votre présence qui nous rend
très fiers.
Nos pensées vont d’abord ce matin vers le président Emmanuelli qui n’a pu être
présent parmi nous. Défenseur intransigeant de l’intérêt général, avocat vigoureux du
rôle du Parlement, armé de fortes convictions, homme d’Etat et de combat, ses
paroles seront prononcées tout à l’heure par Marc Goua, mais le timbre de sa voix
nous manque ce matin.
Au nom de tous les collaborateurs de la Caisse des Dépôts, je veux lui dire notre
affection, notre respect et notre amitié. Nous lui souhaitons de se rétablir très vite.
Nous avons besoin de lui, de sa rigueur et de son exigence bienveillante.
Depuis ses origines, monsieur le président de la République, qui juridiquement
viennent de la monarchie, mais qui, historiquement, remontent au Consulat et à
l’Empire, la Caisse des Dépôts est présente aux côtés de l’Etat. Elle n’existe que par
la loi qui a voulu la placer sous la protection du Parlement. La loi dit : sous la
surveillance et la garantie de l’autorité législative, représentée par la Commission de
surveillance, dont je salue les anciens Présidents et les Commissaires surveillants.
Il est peu de lois dont le texte n’a guère changé depuis 200 ans, ni d’institutions qui
ont traversé les régimes et les épreuves, solidement ancrées sur les mêmes valeurs :
la foi publique qui nous vient du droit romain, et l’intérêt général.
Les épreuves, notre pays les traverse à nouveau aujourd’hui. Dans cette guerre qui
nous est faite, monsieur le président de la République, les Français sont rassemblés
autour des institutions et du chef de l’Etat.
Et je veux dire simplement que la Caisse des Dépôts, avec ses 120000
collaborateurs du Groupe dans le monde, ses 60000 collaborateurs en France et ses
5 500 collaborateurs au sein de l’Etablissement public, est entièrement mobilisée
dans les combats menés pour notre avenir.
La Caisse des Dépôts, on la connait bien dans chacune de nos villes, de nos
départements et de nos régions : les équipements publics, les logements sociaux, les
quartiers nouveaux, les autoroutes, les éoliennes et les pépinières d’entreprise. Il n’y
a guère d’investissements publics auxquels la Caisse des Dépôts n’ait contribué par
ses prêts, ses financements ou son ingénierie.
La Caisse des Dépôts, on la connait bien. Mais en réalité, on la connait très peu.
Coffre-fort pour les uns, tiroir-caisse pour les autres, on la sait solide et robuste. Mais
son modèle demeure mystérieux.
Il est au fond très simple. Depuis 2 siècles, le législateur lui a donné la mission de
garantir l’épargne populaire et les dépôts qui lui sont confiés, et d’en faire bon usage
au service de l’intérêt général.
Dès lors, la Caisse des Dépôts ne se confond pas avec les services de l’Etat – qui le
regrettent parfois – non plus qu’avec les institutions financières classiques – qui la
critiquent de temps en temps. Elle est dans son fondement même et dans son action
quotidienne au croisement du service public et du monde concurrentiel. Elle en
respecte les doubles règles. Elle en accepte les doubles contrôles. Elle s’est
organisée avec son Etablissement public et ses filiales pour s’y adapter, au prix
parfois de la complexité. Et elle ne trouve son équilibre que dans le mouvement.
Depuis 2 siècles, on la dit parfois trop puissante, mais on se tourne vers elle,
autrefois pour soutenir la rente, hier pour apporter des liquidités à une économie
asséchée par la crise, aujourd’hui pour contribuer à la relance de l’investissement.
Et les entreprises reconnaissent aujourd’hui le succès de Bpifrance à qui la Caisse
des Dépôts a apporté, aux côtés de l’Etat, ses capitaux et ses outils.
Depuis 2 siècles, on la dit aussi trop indépendante, mais elle demeure au travers du
temps l’une des institutions majeures de l’Etat, comme le Trésor Public ou la Banque
de France, sans se confondre avec aucune autre.
Et c’est cette autonomie qui lui permet, comme le veut la loi, d’accompagner le
Gouvernement dans la mise en œuvre de ses politiques, d’agir comme mandataire
de l’Etat, mais aussi comme banquier du service public de la justice ou de la Sécurité
sociale, et enfin comme opérateur de marché dans un univers concurrentiel, avec le
double souci de la bonne gestion et de l’intérêt général.
C’est vrai de l’Etablissement public comme de ses filiales qui ont été créées par
l’Etablissement public, et avec lequel elles forment un ensemble qui est le groupe
Caisse des Dépôts.
La Caisse des Dépôts, depuis son origine, a ainsi su accompagner et faciliter les
mutations de la France et du monde.
C’était au lendemain de la guerre, la reconstruction, puis le logement après l’appel
de l’Abbé Pierre, l’aménagement du territoire au début de la Vème République, la
décentralisation après les grandes lois de 1982, l’adaptation de la France à un
monde globalisé et financiarisé à l’aube de ce siècle.
Pour demain, le cap que nous nous sommes fixé correspond, monsieur le président,
aux grandes orientations que vous avez définies au service de l’emploi, du
développement économique et de la croissance verte. Cela nous impose de
demeurer robuste et d’être déterminé, sélectif et agile dans un monde économique et
financier plein d’incertitudes.
La première des transitions dont nous voulons être les serviteurs est la transition
écologique et énergétique. L’accord de Paris qui a conclu avec succès la Cop 21,
fixe des objectifs ambitieux. Nous nous sommes inscrits, comme vous l’avez
souhaité, dans cette stratégie avec des décisions fortes sur la décarbonation de nos
portefeuilles, avec la mobilisation inédite de l’industrie financière que nous avons
initiée, et avec la croissance de nos financements en prêts et en fonds propres.
Nous voulons contribuer à rendre les flux financiers compatibles avec l’objectif d’un
réchauffement climatique bien inférieur à 2°.
Notre ambition est de devenir un créateur d’actifs verts.
Nous souhaitons prolonger encore cet engagement en nous mobilisant aussi au
service du développement des pays du Sud et des pays émergents, comme vous
l’avez annoncé en août dernier, avec l’ambition de devenir une grande institution
financière publique ouverte sur le monde.
La transition numérique est aussi pour nous une priorité. Avec nos filiales, nous nous
sommes engagés résolument vers le financement, mais aussi la mise en œuvre
concrète de ses filières d’avenir, celles du digital dans toutes ses dimensions,
comme nous nous mobilisons plus généralement en faveur de l’innovation.
Depuis longtemps aussi, la Caisse des Dépôts est engagée en faveur de la
construction des réseaux de très haut débit comme elle l’a fait autrefois pour
l’électrification du pays. Nous souhaitons pouvoir le faire demain plus encore, aux
côtés des collectivités territoriales.
La Caisse des Dépôts a, dans ce cadre, l’ambition d’accompagner les territoires qui
développent des « smart cities », ces villes intelligentes qui seront la réalité urbaine
de demain.
L’accompagnement des réformes sociales constitue un autre axe, moins connu, de
notre contribution au progrès du pays. La Caisse des Dépôts a conçu et géré les
premiers fonds de retraite, les premiers fonds de prévoyance, les premiers régimes
d’assurance.
Aujourd’hui encore, une retraite sur cinq est gérée par la Caisse des Dépôts.
Les mutations économiques sont en train de bouleverser les parcours professionnels
et même le parcours de vie des Français. Moins linéaires, plus divers, plus éclatés,
ces nouveaux parcours requièrent de nouvelles protections, de nouveaux droits.
La Caisse des Dépôts a réussi à développer, en moins d’un an, le Compte personnel
de formation. Elle aspire maintenant à participer à la grande aventure du Compte
personnel d’activité, c'est-à-dire à accompagner l’évolution des droits sociaux
professionnels vers une gestion centrée sur chaque personne, tout au long de sa
carrière.
Enfin, et c’est là où notre avenir rejoint encore notre histoire, la Caisse des Dépôts
doit devenir ou redevenir, nous semble-t-il, la Caisse des Dépôts des territoires.
Le 1er janvier, la carte de France que nous avons connue, épinglée au mur des salles
de classe, a changé. Nous voulons accompagner le monde local dans cette immense
transformation que vous avez décidée et initiée, monsieur le président.
C’est vrai pour le logement, bien sûr, grâce à nos prêts et à l’investissement de nos
filiales, qui couvrent la gamme complète du besoin social : depuis le logement très
social, jusqu’au logement social et au logement intermédiaire.
En 2015, nous avons atteint un nouveau record historique avec la construction de
plus de 130 000 logements financés, la rénovation de 310 000 autres et plus de 800
chantiers en cours cette année pour la seule SNI.
Mais c’est vrai aussi pour l’ensemble des investissements territoriaux, la rénovation
urbaine, les projets de développement comme l’accompagnement des entreprises.
La Caisse des Dépôts s’est engagée à mobiliser dans les 5 ans qui viennent plus de
26 Md€ en capital et 100 Md€ en prêts, pour le logement, les infrastructures et les
équipements publics.
Nous sommes présents et nous le serons plus encore pour le tourisme, pour les
infrastructures, pour les projets de croissance verte. Nous avons signé en un an plus
de 40 conventions de partenariat global avec les collectivités locales. Et c’est
pourquoi nous souhaitons demeurer de manière pérenne un financeur des territoires
parce que nous sommes depuis toujours leur premier partenaire.
Monsieur le président de la République, la Caisse des Dépôts a été conçue sous le
sceau de la « foi publique », c'est-à-dire avec les mots d’aujourd’hui de la
« confiance »,mais aussi de la « fidélité » : confiance des Français qui lui confient la
protection de leur épargne ; confiance des acteurs économiques qui savent qu’elle
est un partenaire de long terme, vigilant et robuste ; confiance des territoires et
confiance des pouvoirs publics, c'est-à-dire de l’Etat qu’elle seconde et accompagne
en appui des politiques publiques, dit la loi. C’est ce rôle d’« auxiliaire du
Gouvernement, qui ne fait rien qui lui déplaise, sans faire nécessairement tout ce qui
lui conviendrait », rôle qu’a défini François Bloch-Lainé dans une formule qui n’était
pas impertinente.
C’est cette confiance qui lui a permis, à travers le temps, en cohérence avec les
objectifs fixés par le Gouvernement, et sous le contrôle du Parlement, d’user de la
liberté d’élargir le champ des possibles, d’exprimer la diversité des approches,
d’expérimenter des alternatives, d’innover avec les territoires et, en définitive, d’agir
en complémentarité avec l’Etat.
Mais la confiance, qui ne se décrète pas, disait le législateur de 1816, n’est rien sans
la fidélité. Je veux saluer devant vous le dévouement, l’expertise et la fidélité de nos
collaborateurs. Ils sont l’âme de notre maison.
Avec eux, avec nos partenaires que je salue, avec nos anciens directeurs généraux
et présidents que je remercie de leur présence, nous souhaitons rester fidèles ;
fidèles à notre mission d’intérêt général, car nous devons des comptes aux Français ;
fidèles à nos valeurs qui se confondent avec celles de la République, fidèles à nos
traditions qui sont, même si cela paraît paradoxal, d’abord celles du changement ;
fidèles enfin aux orientations que vous fixez pour le pays, monsieur le président de la
République, en espérant être dignes, demain comme hier, de bien servir la France.
Je vous remercie.

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