action urgente - Amnesty International

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action urgente - Amnesty International
ACTION URGENTE
DOCUMENT PUBLIC
AU 212/04
AMR 51/107/2004 – ÉFAI
Avertissement : Amnesty International défend des individus sans prendre position ni sur leurs idées
ni sur les organisations auxquelles ils pourraient adhérer.
PEINE DE MORT / PRÉOCCUPATIONS D’ORDRE JURIDIQUE
ÉTATS-UNIS
(LOUISIANE)
Lawrence Jacobs (h), noir, 24 ans
________________________________________________________________________________________________________
Londres, le 25 juin 2004
Le parquet du comté de Jefferson, dans l’État de Louisiane, entend requérir la peine de mort contre Lawrence Jacobs, ou tout au
moins utiliser la menace de l’exécution capitale afin de contraindre cet homme à accepter une peine d’emprisonnement à
perpétuité sans possibilité de libération conditionnelle. Lawrence Jacobs était âgé de seize ans lorsqu’il a été arrêté et inculpé de
meurtre avec circonstances aggravantes. Le droit international, reconnu par la quasi totalité des gouvernements du monde, interdit
cependant l'application de la peine capitale ou l’emprisonnement à perpétuité sans possibilité de libération pour les infractions
commises par des personnes âgées de moins de dix-huit ans.
Della Beaugh, soixante-quinze ans, et son fils Nelson Beaugh, quarante-cinq ans, ont été abattus au domicile de ce dernier le
31 octobre 1996. Lawrence Jacobs et Roy Bridgewater, qui avait dix-sept ans au moment des faits, ont tous deux été déclarés
coupables de meurtre avec circonstances aggravantes et condamnés à mort.
la Cour suprême de Louisiane a annulé en 2001 la déclaration de culpabilité et la sentence capitale de Lawrence Jacobs. La Cour
avait estimé qu'il avait été privé de son droit à un jury impartial dans la mesure où certains jurés s'étaient montrés fortement
prédisposés à appliquer la peine de mort. La Cour ne s’était pas prononcée sur la constitutionnalité de l’exécution de personnes
âgées de seize ans à la date des faits, ni sur l’absence de preuves directes attestant que Lawrence Jacobs avait utilisé une arme à
feu (il maintient qu’il a quitté les lieux avant les coups de feu), ni sur la discrimination raciale qui a manifestement présidé à la
sélection des jurés. Néanmoins, la Cour avait fait observer à ce sujet : « [La] discrimination raciale imputée au procureur lors de la
sélection des jurés […] semble également jeter de sérieux doutes sur la régularité de la procédure de sélection des jurés dans cette
affaire ». Le parquet avait écarté quatre des cinq jurés potentiels Afro-Américains en exerçant son droit de récusation non motivée.
Il avait également tenté d'exclure le cinquième, mais en avait été empêché par le juge du tribunal de première instance. Lawrence
Jacobs est noir (tout comme Roy Bridgewater) et les deux victimes étaient blanches.
L’État tente d’obtenir que Lawrence Jacobs soit rejugé. Le ministère public a fait comprendre à ce dernier que s’il refuse la
transaction qui consisterait à plaider coupable et à être condamné à une peine d’emprisonnement à perpétuité sans possibilité de
libération conditionnelle, la peine de mort sera de nouveau requise contre lui. Les audiences de mise en état sur la légalité de
l’exécution d’une personne âgée de seize ans au moment du crime dont on l’accuse se tiendront en juillet 2004.
Avant d’être arrêté pour ce crime, Lawrence Jacobs avait été incarcéré dans le Tallulah Correctional Center for Youth (TCCY), en
Louisiane, un centre de détention pour mineurs géré par des fonds privés qui a été fermé à la suite d'une enquête du Service des
droits civils du ministère fédéral de la Justice. Cette enquête a conclu que tous les établissements de ce centre étaient le théâtre
« de mauvais traitements systémiques infligés par le personnel et mettant en danger la vie des détenus, ainsi que de violences
entre jeunes ». D’autres anciens détenus du TCCY ont également été jugés pour des crimes emportant la peine de mort (voir USA:
Indecent and internationally illegal: The death penalty against child offenders, AMR 51/143/2002, p.58-59).
INFORMATIONS GÉNÉRALES
L’exécution de mineurs délinquants (les personnes accusées ou reconnues coupables d'infractions perpétrées alors qu'elles
avaient moins de dix-huit ans) est prohibée par le droit international. Les Conventions de Genève, le Pacte international relatif aux
droits civils et politiques (PIDCP), la Convention relative aux droits de l'enfant – ratifiée par 192 pays –, la Convention américaine
relative aux droits de l'homme et les Garanties pour la protection des droits des personnes passibles de la peine de mort (ONU)
contiennent tous des dispositions excluant le recours à la peine capitale contre cette catégorie de délinquants. Depuis 1990,
Amnesty International a recensé 36 exécutions de mineurs délinquants dans le monde, dans huit pays : Arabie saoudite, Chine,
États-Unis, Iran, Nigéria, Pakistan, République démocratique du Congo (RDC) et Yémen. Dix-neuf d’entre elles ont eu lieu aux
États-Unis, qui compte ainsi plus d’exécutions de mineurs que tous les autres pays confondus. En octobre 2004, la Cour suprême
fédérale procèdera au réexamen d’une de ses décisions de 1989, qui autorise l’exécution de personnes qui avaient seize ou dixsept ans au moment du crime qu’on leur impute. Ses conclusions devraient être connues début 2005.
Parmi les 38 États ayant rétabli la peine de mort, la Louisiane est celui qui détient le pourcentage le plus élevé d’Afro-Américains
dans le couloir de la mort. En avril 2004, 67 p. cent des détenus condamnés de cet État étaient noirs. La population totale de la
Louisiane est constituée de 32,5 p. cent de Noirs et de 64 p. cent de Blancs. Quatre-vingt-cinq p. cent des détenus exécutés en
Louisiane depuis 1977 (soit 23 sur 27) avaient été déclarés coupables d’avoir tué un ou des Blancs. L’un de ces condamnés,
Dalton Prejean, a été exécuté en 1990 ; il avait été reconnu coupable du meurtre d’un policier blanc, commis lorsqu’il était mineur.
Le jury qui l’a condamné à mort était exclusivement composé de Blancs ; cela a également été le cas pour au moins six des
12 Afro-Américains exécutés en Louisiane depuis 1977. D’après les informations recueillies, les procès de tous les mineurs
délinquants exécutés en Louisiane depuis la fin de l’esclavage ont réuni les éléments suivants : un accusé noir, une victime
blanche et un jury entièrement blanc. Ryan Matthews, un Noir, a été condamné en première instance à la peine capitale dans le
comté de Jefferson par un jury composé de 11 Blancs et un Noir, pour le meurtre d’un homme blanc commis alors qu’il avait dixsept ans. Le 18 juin 2004, il a été libéré sous caution, dans l’attente d’un nouveau procès, quatre tests ADN distincts ayant permis
d’étayer ses déclarations d’innocence. Au cours d'une audience précédant le procès de Lawrence Jacobs, en 2002, un
représentant du parquet portait une cravate sur laquelle figurait un nœud coulant, image évocatrice du passé raciste de Jefferson,
et notamment des lynchages (voir USA: Death by discrimination – the continuing role of race in capital cases, AMR 51/046/2003)
Environ 70 mineurs sont actuellement condamnés à mort aux États-Unis. On ignore le nombre de mineurs qui purgent une peine
d’emprisonnement à perpétuité sans possibilité de libération conditionnelle, mais il est beaucoup plus élevé. Certains n’avaient pas
plus de douze ans au moment des faits qui leur sont reprochés. Selon des informations communiquées à Amnesty International,
plus de 300 détenus purgent une peine de réclusion à perpétuité sans possibilité de libération conditionnelle en Louisiane pour un
crime commis lorsqu’ils avaient entre quinze et dix-sept ans. Les trois-quarts d’entre eux sont noirs. Le cas de Lawrence Jacobs a
déjà fait l’objet de l’EXTRA 66/02 (AMR 51/014/2002 du 22 août 2002) et suivantes (AMR 51/156/2002 du 3 octobre 2002 et
AMR 51/007/2003 du 15 janvier 2003).
ACTION RECOMMANDÉE : dans les appels que vous ferez parvenir le plus vite possible aux destinataires mentionnés ciaprès, et que vous rédigerez (en anglais ou dans votre propre langue) en utilisant vos propres mots et en vous inspirant
des recommandations suivantes :
– faites part de votre compassion pour les proches de Nelson et Della Beaugh, et expliquez que vous ne cherchez aucunement à
excuser les actes qui leur ont coûté la vie ;
– rappelez que le droit international prohibe l'application de la peine capitale ou de l’emprisonnement à perpétuité sans possibilité
de libération conditionnelle à des personnes âgées de moins de dix-huit ans à la date du crime qui leur est reproché ;
– exprimez votre préoccupation devant le fait que la position des États-Unis sur cette question est extrêmement minoritaire au
niveau international ;
– faites valoir que cette interdiction repose sur la reconnaissance de l'immaturité des jeunes et de leur capacité de réinsertion, et
signalez que lorsqu’il se trouvait au Tallulah Correctional Center for Youth, Lawrence Jacobs n’a bénéficié ni de propositions de
réinsertion, ni de mesures de protection de la part de l’État de Louisiane ;
– exhortez le procureur à renoncer à requérir la peine capitale contre Lawrence Jacobs ou à se servir de celle-ci comme d’une
menace afin de le contraindre à adopter une défense qui lui vaudra l’emprisonnement à vie sans possibilité de libération
conditionnelle.
APPELS À :
Procureur de district chargé du dossier :
District Attorney Paul Connick
Jefferson Parish District Attorney's Office
200 Derbigny Street
Gretna, LA 70053, États-Unis
Fax : + 1 504 361 2585
Formule d'appel : Dear District Attorney, / Monsieur le Procureur,
COPIES aux représentants diplomatiques des États-Unis dans votre pays.
Vous pouvez également écrire de brèves lettres (pas plus de 250 mots) faisant état de vos motifs de préoccupation au
rédacteur en chef du journal suivant :
Letters to the Editor, The Times-Picayune,
3800 Howard Avenue
New Orleans, LA 70125,, États-Unis
Fax : + 1 504 826 3812
Courriers électroniques : [email protected]
PRIÈRE D'INTERVENIR IMMÉDIATEMENT.
APRÈS LE 6 AOÛT 2004, VÉRIFIEZ AUPRÈS DE VOTRE SECTION S'IL FAUT ENCORE INTERVENIR. MERCI.
La version originale a été publiée par Amnesty International,
Secrétariat international, 1 Easton Street, Londres WC1X 0DW, Royaume-Uni.
La version française a été traduite et diffusée par Les Éditions Francophones d'Amnesty International - ÉFAI Vous pouvez consulter le site Internet des ÉFAI à l'adresse suivante : http://www.efai.org

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