le_monde_2005/pages 22/02/07

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France
FRONT NATIONAL
Jean-Paul Huchon condamné à un an
d’inéligibilité pour « prise illégale d’intérêts »
Jean-Marie Le Pen
qualifie les attentats
du 11-Septembre
d’« incident »
SELON Jean-Marie Le Pen, les attentats
du 11 septembre 2001 perpétrés par Al-Qaida contre les tours jumelles du World Trade Center à New York ne seraient qu’un
« incident ». Au journal La Croix, qui lui
demande, dans son édition du 21 février,
ce qu’il pense « de l’initiative commune prise par les responsables des grandes religions
– islam compris – de dénoncer les attentats
de New York de 2001 », le président du
Front national répond : « C’est une excellente chose. Mais elle fait partie de ces pétitions de principe qui ont une influence éphémère. Sur le moment, l’événement du 11-Septembre, pour ne pas dire l’incident, a conduit
un certain nombre de gens à prendre leurs
distances pour ne pas tomber sous le coup des
accusations qui étaient alors lancées. »
Les journalistes de La Croix s’étonnant
de l’utilisation du mot « incident » pour
parler de l’attentat qui fit près de
3 000 morts, Jean-Marie Le Pen déclare :
« 3 000 morts, c’est ce qu’il y a en un mois en
Irak, c’est beaucoup moins que les bombardements de Marseille ou de Dresde à la fin de la
seconde guerre mondiale, qui étaient aussi
des actes terroristes car ils visaient expressément des populations civiles pour faire capituler des militaires. »
Adversaire de la politique américaine
dans le Golfe, opposant de l’intervention
en Irak, Jean-Marie Le Pen a toujours minimisé les attentats. Après avoir pris la précaution de préciser qu’il a « toujours
condamné sans équivoque la pratique du terrorisme, de tous les terrorismes », le président du FN avait ainsi estimé, le 21 septembre 2001, que les attentats du 11-Septembre étaient « directement liés » à la politique américaine.
Sabler le champagne
Une justification politique qu’il avait
réitérée par la suite et notamment lors de
son discours de clôture de la fête de BleuBlanc-Rouge, le 23 septembre 2001 à
Paris. « Nous ne devons pas nous aligner
comme le premier des serfs ou des vassaux
des Etats-Unis » qui paient leur « politique hégémonique dans le monde », avait-il
déclaré avant de conseiller à la France de
se préoccuper de sa situation interne.
« Certains seront tentés d’adopter le point
de vue à la mode et réduiront l’analyse à la
lutte contre le terrorisme islamique (…)
mais là n’est pas l’essentiel. Le risque pour
la France est celui de la submersion et de la
subversion à partir d’une folle politique
d’immigration qui a fait entrer chez nous
des millions d’étrangers tandis qu’on poussait à la désintégration de la nation et de la
République », avait-il poursuivi.
A l’époque, le FN avait été partagé
entre ceux qui souhaitaient une solidarité de l’Occident et ceux qui estimaient
que les Etats-Unis payaient le rôle de
« gendarme du monde qu’ils s’étaient assignés ». Certains, parmi ces derniers,
avaient été jusqu’à sabler le champagne,
le 11 septembre 2001, au siège du FN,
avant que Jean-Marie Le Pen, qui avait
alors commencé sa campagne présidentielle de 2002, ne calme leurs ardeurs. a
Christiane Chombeau
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Jeudi 22 février 2007
sonnel sur l’intérêt général, dont il est pourtant le garant », et qu’il a « porté atteinte à
l’indispensable devoir d’impartialité que doivent présenter les élus », en utilisant ses
fonctions pour faciliter le recrutement de
son épouse « de telle sorte qu’elle pouvait
ainsi percevoir les Assedic entre chaque période d’embauche en sa qualité d’intermittente
du spectacle ». Mme Le Texier a été condam’est un jugement au scalpel que celui née, pour sa part, à quatre mois avec sursis
rendu, mardi 20 février, par la et 20 000 euros d’amende, tandis que le
11e chambre correctionnelle de Paris dirigeant de l’une des sociétés qui l’avait
condamnant Jean-Paul Huchon à six mois embauchée et l’ancien directeur de la comd’emprisonnement avec sursis, un an munication du conseil régional, Dominid’inéligibilité et 60 000 euros d’amende. que Merchez, ont été relaxés.
L’attitude de M. Huchon, observe le triLe président (PS) du conseil régional d’Ilede-France faisait l’objet de deux poursui- bunal, « participe inévitablement à la dégradation de l’image des responsables politiques
tes pour « prise illégale d’intérêts ».
La première visait le fait d’avoir facilité et nuit à l’indispensable confiance que les
le recrutement de son épouse Dominique citoyens doivent avoir dans leurs représenLe Texier, par des entreprises attributaires tants ». Anticipant sur un appel de cette
de marchés publics de la région. La secon- condamnation – une décision aussitôt
de portait sur l’embauche, à compter de annoncée par le président de région –, le
tribunal semble recommander
2004, de Mme Le Texier, à son
à M. Huchon d’amender sa
cabinet. Seule la première pourL’attitude
ligne de défense, en observant
suite lui vaut d’être condamné.
de M. Huchon
que « ses vaines tentatives, partiLa relaxe sur le deuxième chef
« participe
culièrement maladroites eu égard
devrait intéresser les élus qui
inévitablement
à ses fonctions et à son parcours
s’entourent de conseillers memà la dégradation
professionnel, pour convaincre
bres de leur famille.
de l’image
qu’il ignorait tout des activités
Le tribunal, présidé par Olides responsables professionnelles de sa femme et
vier Leurent, a en effet relevé
politiques »,
qu’il s’en désintéressait (…) ne
que si M. Huchon « a vraisema jugé le tribunal sont pas de nature à atténuer sa
blablement attendu de disposer
responsabilité ».
d’une majorité stable au sein du
Restait la question de l’inéligibilité.
conseil régional pour mettre un terme à la
précarité de l’emploi de son épouse », le droit En suivant les réquisitions de l’avocate
de la recruter à son cabinet lui était recon- générale, Marie-Aimée Gaspari, le tribunu par la loi du 26 janvier 1984 qui permet nal applique la jurisprudence établie par
à l’autorité territoriale de « s’entourer libre- la cour d’appel de Versailles contre Alain
ment de collaborateurs de son choix », dès Juppé et rappelle l’importance donnée
lors qu’il ne s’agit pas d’un « emploi fic- par le législateur à la sanction du délit de
tif ». Or, souligne le tribunal, « la réalité du « prise illégale d’intérêts ».
De la lecture de ces attendus, dont ils
travail fourni par Dominique Le Texier et ses
compétences professionnelles n’ont jamais semblent avoir anticipé la sévérité, ni
été contestées ». Le « lien de parenté » exis- M. Huchon, ni son épouse, ni leur avocat
tant entre un président de région et un de commun, Me Philippe Dehapiot, n’ont été
ses collaborateurs, ajoute le tribunal, « ne les témoins. La dernière fois qu’un élu s’est
peut venir restreindre cette liberté ».
dispensé d’assister au prononcé d’un jugeLe jugement est en revanche plus sévè- ment le concernant, c’était, dans cette
re sur la première période, d’autant qu’il même salle des criées du Palais de justice,
était apparu à l’audience que dans une affaire mettant en cause le prédéMme Le Texier n’avait travaillé, pendant cesseur (RPR) de M. Huchon à la tête de la
toutes ces années, qu’avec des sociétés qui région Ile-de-France, Michel Giraud. Il
bénéficiaient de marchés publics de la s’agissait du député (UMP) de Seine-etrégion. Le tribunal considère que Marne, Guy Drut. a
M. Huchon « a fait prévaloir un intérêt perPascale Robert-Diard
Le tribunal correctionnel de Paris
a estimé que le président
de la région Ile-de-France avait
facilité le recrutement de son
épouse par des entreprises
attributaires de marchés publics
C
Jean-Paul Huchon ne s’est pas rendu au Palais de justice de Paris pour entendre
la lecture du jugement le condamnant lui et sa femme. J. SAGET/AFP
Les proches de Mme Royal ne se mêlent pas de cette « affaire personnelle »
« ON ne va pas tout ramener à la campagne et à Ségolène Royal », a réagi Stéphane Le Foll, directeur de cabinet de François Hollande, à l’issue de la condamnation de Jean-Paul Huchon à six mois de
prison avec sursis et à un an d’inéligibilité
pour « prise illégale d’intérêts », mardi
20 février. L’éventualité que Mme Royal
demande au président (PS) de la région
de démissionner était balayée par les proches de la candidate. « C’est une affaire personnelle. En aucun cas un événement politique qui concerne le financement du parti »,
fait-on valoir dans son entourage.
La volonté des ségolénistes de « cloisonner » est d’autant plus forte que
M. Huchon a soutenu Dominique StraussKahn pendant les primaires au PS. A propos des « jurys citoyens » que Mme Royal a
défendus lors de la campagne interne,
M. Huchon avait déclaré, en novembre 2006, selon Le Parisien : « Cette idée,
c’est le mariage de Gringoire, de Je suis partout et du Petit livre rouge de Mao. » La
formule a laissé des traces.
« Enfoncer le bonhomme »
M. Huchon a, certes, reçu des témoignages de solidarité de M. Hollande, d’Anne Hidalgo, première adjointe (PS) de Bertrand Delanoë et conseillère régionale, ou
de Manuel Valls, maire (PS) d’Evry. Pierre
Mauroy a jugé « la peine très lourde », lors
du bureau national, mardi. M. StraussKahn a été le premier à l’appeler.
Mais les soutiens de M. Huchon sont
plus manifestes à la région qu’au PS. Les
élus PC et PS régionaux sont soudés
autour du président du conseil régional et
se taisent à l’extérieur. A la tête du groupe
Verts, Jean-Vincent Placé estime le « jugement très sévère ». L’UMP régionale « ne
veut pas enfoncer le bonhomme ». « Si
jamais Huchon quittait la région, je serais
inquiète pour l’avenir, s’exclame Brigitte
Kuster, conseillère régionale (UMP). C’est
quelqu’un qui respecte son opposition. » Ni
Bernard Lehideux, président du groupe
A 60 JOURS
DU 1er TOUR...
UDF ni Marine Le Pen, chef de file du FN
dans la région, n’ont souhaité réagir.
« Huchon tire profit de sa gestion consensuelle de la région et de son caractère affable », assure un élu Verts.
Une guerre de succession larvée oppose toutefois la première vice-présidente
(PS), Marie-Pierre de la Gontrie, au président du groupe (PS) à la région, Jean-Paul
Planchou. M. Huchon pourrait être
contraint de quitter ses fonctions si la peine d’inéligibilité était confirmée en appel.
Ce qui impliquerait que le conseil régional
élise un nouveau président… Dans plusieurs mois. a
Béatrice Jérôme et Isabelle Mandraud
PARLONS-NOUS
Le grand forum DE LA PRÉSIDENTIELLE
animé en direct et en public par Jérôme Dorville et Fabienne Le Moal en présence de
Rachida Dati, Marylise Lebranchu, Dominique Perben et Henri Weber
Jeudi de 18h00 à 21h00
europe1.fr

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