tables - Revue de Médecine Vétérinaire
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Les urgences en ophtalmologie vétérinaire C. DECOSNE-JUNOT1*, S. JUNOT2 ET I. GOY-THOLLOT1 1 Unité 2 SIAMU, École Nationale Vétérinaire de Lyon. 1, avenue Bourgelat – 69280 Marcy l’étoile – France Unité d’Anesthésie Réanimation Analgésie. Ecole Nationale Vétérinaire de Lyon. 1 avenue Bourgelat – 69280 Marcy l’étoile – France * Auteur assurant la correspondance : Email : [email protected] RÉSUMÉ Le vétérinaire urgentiste est confronté fréquemment dans son exercice à des urgences ophtalmologiques car les signes d’appel sont rapidement détectables par les propriétaires. L’œil est un organe très sensible car très exposé, qu’il convient de savoir bien traiter car la perte de sa fonctionnalité entraîne un handicap sérieux pour l’animal et pour l’usage que l’homme peut en faire. En urgence, il est conseillé de déterminer la nature de la lésion observée pour en déterminer la gravité et le pronostic fonctionnel afin d’établir un plan thérapeutique approprié. Les urgences oculaires concernant les annexes, les anomalies de positionnement du globe, du segment antérieur et du segment postérieur de l’œil sont envisagées dans cet article. Les mesures d’urgence à mettre en place sont décrites de façon à préserver les meilleurs chances de récupération des fonctions visuelles de l’animal. Dans certains cas, l’urgence consiste à mettre en place les conditions idéales pour référer l’animal à un spécialiste en ophtalmologie. Les actes réalisés en urgence sont souvent déterminant pour le pronostic visuel de l’animal. SUMMARY Veterinary ocular emergencies The veterinary surgeon is frequently confronted in his practice to ophthalmologic emergencies. The eye is a very sensitive organ because it is very exposed to injuries. It is important to have a good knowledge of the right treatment to carry out because the loss of its functionality involves a serious handicap for the animal. In ocular emergency, it is advised to determine the nature of the lesion and its gravity and the functional forecast of it in order to establish a suitable therapeutic plan. The ocular emergencies concerning the adnexals, the anomalies of positioning of the globe, the anterior segment and the posterior segment of the eye are successively considered in this paper. The emergency care to carry out is described in order to provide the best chances of recovery for the visual functions of the animal. In certain cases, the emergency care consists in setting up the ideal conditions to refer the animal to a specialist in ophthalmology. The techniques, which are carried out in emergency, are often determining for the visual prognosis of the animal. Mots-clés : Urgences – Ophtalmologie – Œil – Carnivores – Equidés – Animaux de rente Keywords : Emergencies – Ophthalmology – Eye – Small animals – Horses – Large animals Introduction oculaire ? Que ne faut-il surtout pas faire pour ne pas perdre de chances de récupération visuelle ? De combien de temps disposons nous pour gérer un problème oculaire et quel pronostic pouvons nous proposer au propriétaire ? L’œil est un organe très accessible pour le propriétaire d’un animal. C’est un motif de consultation en médecine d’urgence qu’il faut savoir gérer comme toute autre urgence. Le triage (c’est le terme classiquement utilisé en médecine d’urgence) commence par la reconnaissance de la vrai urgence oculaire (tout ce qui va nuire au fonctionnement de l’œil). La démarche diagnostique doit conduire le clinicien à se poser la question de ses limites de compétence en ophtalmologie et le référé est indiqué dès que le diagnostic est incertain par manque de moyen et le traitement inapproprié sans structure spécialisée. Les urgences oculaires peuvent être abordées de différentes façons : la plus commune est de considérer les modifications physiques de l’œil (syndrome de l’œil rouge, de l’œil blanc ou de l’œil sec [1]). Certains auteurs parlent aussi d’urgences médicales versus les urgences chirurgicales [2]. Ces appellations nous paraissent restrictives car elles ne permettent pas une compréhension raisonnée et scientifique du problème. L’expérience clinique montre qu’il est préférable de déterminer la localisation et la nature du problème pour comprendre sa genèse et construire un plan thérapeutique alors raisonné [4]. En médecine d’urgence, plus qu’ailleurs, il ne faut pas confondre vitesse et précipitation; ceci est particulièrement vrai pour les urgences oculaires [13]. Que faut-il savoir absolument faire pour diagnostiquer et traiter un problème Revue Méd. Vét., 2006, 157, 12, 579-589 Considérations générales Une urgence oculaire est définie comme toute atteinte concernant au moins l’un des deux yeux et entraînant une douleur oculaire aigue, une anomalie de positionnement du globe, une cécité brutale ou une modification de l’aspect de l’œil [2, 3, 11, 17]. Le recueil des commémoratifs et de l’examen clinique général est un préalable indispensable. De plus, avant de s’intéresser à une urgence oculaire, il est impératif de s’assurer que les fonctions cardio-vasculaires, pulmonaires et neurologiques centrales sont stables. Les urgences oculaires regroupent des affections en relation avec des modifications de positionnement du globe, des anomalies des annexes, de la sclère, de la cornée, de la chambre antérieure, du cristallin ou du segment postérieur (voir Schéma 1). Si le motif de consultation est une cécité aigüe, la démarche consiste à savoir si ce problème est d’origine strictement oculaire (qui doit alors être localisé) ou s’il correspond à une affection supra-oculaire (atteinte des voies visuelles ou optiques sans atteinte de l’œil). L’amau- 580 DECOSNE-JUNOT (C.) ET COLLABORATEURS Schéma 1. Coupe transversale d’un œil de chien. 1 : Cornée ; 2 : Sclère ; 3 : angle irido-cornéen ; 4 : Corps ciliaires ; 5 : Zonules cristalliniennes ; 6 : Fente pupillaire ; 7 : Iris ; 8 : Cristallin ; 9 : Vitrée ; 10 : Choroïde ; 11 : Artérioles et veinules rétiniennes ; 12 : Nerf optique ; 13 : Rétine ; 14 : Segment antérieur ; 15 : Segment postérieur. rose qui entre dans cette dernière rubrique est intégrée aux syndromes de neuro-ophtalmologie [10,15]. Dès qu’un traitement oculaire est envisagé, des mesures hygiéniques doivent être systématiquement mises en œuvre : faire porter des protections oculaires (collerette, pansement, bonnet, collier selon les espèces) (voir photo 1 ; auteur C. DEBOUCHE - ENVL), éviter les environnements poussiéreux, secs ou lumineux et nettoyer avec des solutions oculaires adaptées à l’œil dès que nécessaire. Ces mesures sont complémentaires des autres traitements plus spécifiques du problème en lui même [22]. Le recours à un spécialiste en ophtalmologie vétérinaire doit se faire dès que le diagnostic est incertain par faute de moyen ou de connaissances et lorsque le traitement le plus adapté passe par l’utilisation d’outils non accessibles à un praticien généraliste (voir tableau 1). Les urgences concernant la position du globe oculaire La position de l’œil dans la cavité orbitaire (constituée selon les espèces des os frontaux, zygomatiques, ethmoïdaux et nasaux) dépend des muscles mobilisateurs du globe (7 muscles), des muscles lisses de la péri-orbite et du volume occupé par les autres organes ou tissus présents dans cette même cavité (tissu adipeux, glande zygomatique, nerf optique…) (voir Schéma 2). Lorsque les structures péribulbaires sont anormales (suite à un traumatisme, une inflammation…), le globe oculaire n’a plus alors sa position physiologique et peut même être luxé [5, 9, 16]. L’enophtalmie aiguë est souvent la conséquence d’un traumatisme orbitaire (cheval, chien), il convient de s’assurer rapidement que les fonctions lacrymales sont préservées (test Photo 1. Protections oculaires chez un cheval. de Schirmer) et que les structures oculaires n’ont pas été endommagées (ulcère, uvéite, décollement rétinien) (voir Photo 2 et 3). L’enophtalmie aiguë se rencontre en urgence même si elle reste plus rare que l’exophtalmie aigue, le propriétaire a du mal à préciser ce qui ne va pas. En général, il décrit un regard « différent ». L’enophtalmie aiguë survient aussi lors du syndrome de Claude Bernard Horner (paralysie du système nerveux organo-végétatif sympathique) qui associe une enophtalmie à un myosis, une ptose palpébrale et à une procidence de la troisième paupière. Les lésions neurologiques doivent être recherchées sur tout le trajet du système sympathique innervant l’œil et ses annexes : hypothalamus, vertèbres cervicales, premières vertèbres thoraciques, la région du cou, de l’oreille moyenne et la région rétro-bulbaire [15]. L’exophtalmie aigue est la conséquence d’un processus inflammatoire (myosite des masticateurs, cellulite, hémorragie rétro-bulbaire) ou infectieux (embole septique ou migration de corps étrangers). Une échographie oculaire peut être effectuée si le clinicien dispose de cet outil diagnostique. Dans le cas où le diagnostic étiologique ne peut être établi par l’imagerie médicale, il est impératif d’effectuer une ponction rétrobulbaire (par voie buccale chez les carnivores, par voie cutanée ou conjonctivale chez les herbivores) à visée diagnostique et afin d’adapter le plan thérapeutique (Schéma 3). De plus, un traitement visant à préserver la transparence cornéenne doit être mis en place le plus vite possible (substitut de larmes, blépharorraphie temporaire). Il faut intervenir immédiatement si la cornée n’est plus recouverte par les paupières lors des mouvements réflexes [4,18,22]. Revue Méd. Vét., 2006, 157, 12, 579-589 LES URGENCES EN OPHTALMOLOGIE VÉTÉRINAIRE 581 Vétérinaire généraliste avec matériel et connaissances Vétérinaire généraliste de base Vétérinaire spécialiste (loupe, tonomètre, matériel pour chirurgie extra-oculaire) Urgences de la position du globe oculaire Enophtalmie aigue Prise en charge possible Prise en charge possible Prise en charge possible Exophtalmie aigue Prise en charge possible Prise en charge possible Prise en charge possible Luxation du globe oculaire Référé conseillé Prise en charge possible Prise en charge possible Urgences des annexes Plaies conjonctivales Prise en charge possible Prise en charge possible Prise en charge possible Plaies palpébrales Référé conseillé Prise en charge possible Prise en charge possible Conjonctivite, blépharite Prise en charge possible Prise en charge possible Prise en charge possible Hématome, hémorragie Prise en charge possible Prise en charge possible Prise en charge possible Urgences du segment antérieur Pertes de substances cornéennes Prise en charge possible Prise en charge possible Prise en charge possible superficielles Pertes de substances cornéennes Référé conseillé Prise en charge possible Prise en charge possible profondes Pertes de substances cornéennes Référé conseillé Référé conseillé Prise en charge conseillée perforantes Plaies sclérales Référé conseillé Référé conseillé Prise en charge conseillée Uvéite Référé conseillé Prise en charge possible Prise en charge possible Glaucome Référé conseillé Prise en charge possible Prise en charge possible Atteinte aigue du cristallin Référé conseillé Référé conseillé Prise en charge conseillée Urgences du segment postérieur Hémorragies Référé conseillé Prise en charge possible Prise en charge possible Décollement rétinien Référé conseillé Prise en charge possible Prise en charge possible Névrite optique Référé conseillé Prise en charge possible Prise en charge possible Dégénérescence rétinienne aigue Référé conseillé Référé conseillé Prise en charge conseillée Chorio-rétinite aigue Référé conseillé Prise en charge possible Prise en charge possible Comment doit se dérouler le référé ? Le plus vite possible Avec un traitement adapté (concertation préalable avec le vétérinaire spécialiste dans la mesure du possible) A minima, le transfert doit se faire en respectant les mesures hygiéniques de base: Protection mécanique de l'œil Lacrymomimétiques Eviter l'exposition à la poussière et à la lumière TABLEAU I. Le référé d'urgence en ophtalmologie vétérinaire est envisageable selon les affections et le niveau de compétence estimé du vétérinaire urgentiste En cas de luxation du globe oculaire, il est nécessaire de remettre en place le plus rapidement possible le globe (dans les deux heures). Le pronostic de récupération visuel est d’autant plus sombre que les réflexes photomoteurs sont absents, que l’œil est en mydriase, qu’un œdème cornéen est présent et qu’un chémosis est présent. Toutefois, il est souvent préférable de repositionner le globe dans un premier temps et d’effectuer une blépharorraphie temporaire, quitte à procéder à une énucléation secondaire si l’œil est non fonctionnel et douloureux (photo 4 et 5) [14]. Certains auteurs conseillent l’énucléation d’emblée si la luxation a plus de 48 heures, si des complications septiques sont évidentes, si le Revue Méd. Vét., 2006, 157, 12, 579-589 nerf optique est visiblement lacéré ou rompu, si l’intégrité du globe n’est plus respectée (plaie cornéenne ou sclérale) et si au moins trois muscles moteurs de l’œil sont rompus [4]. Un traumatisme crânien doit toujours être suspecté lors de prolapsus du globe oculaire chez une espèce ou une race non prédisposée (chat, cheval, ruminants, chiens dolichocéphales) [3]. Le traitement médical à entreprendre est la mise sous antibiothérapie par voie générale et sous antiinflammatoires (AINS ou glucocorticoïdes) (voir tableau 2). Une injection sous-conjonctivale de glucocorticoïdes est préconisée par certains auteurs [4] avant la fermeture de la blépharorraphie pour limiter l’apparition d’une névrite 582 DECOSNE-JUNOT (C.) ET COLLABORATEURS Voie générale Catégorie Molécule Antibiotiques Anti-inflammatoires Espèces concernées Posologie Indications Amoxicilline-acide clavulanique Carnivores, bovins 12,5 mg/kg/12h Blépharite infectieuse Céfalexine Carnivores 20 mg/kg/12h Endophtalmie bactérienne Oxytétracycline Bovins 20 mg/kg/j Affection à Moraxella bovis Sulfamides-triméthoprime Toutes selon espèce Endophtalmie bactérienne Lincomycine Carnivores, bovins 10 mg/kg/j Endophtalmie bactérienne Enrofloxacine, marbofloxacine Toutes selon fluoroquinolone Endophtalmie bactérienne Stéroïdiens Prednisolone Toutes 0,5 à 1 mg/kg/j Chorio-rétinite, uvéite, névrite optique Dexaméthasone Toutes 0,1 mg/kg/j Chorio-rétinite, uvéite, névrite optique Flunixine méglumine Equidés 1-2 mg/kg Uvéite en phase aigue Mannitol Toutes 1-2g / kg en 30mm Glaucome Acétazolamine Toutes 5-10mg / kg / j IV morphiniques Toutes Selon produit AIS /AINS Toutes Selon produit Douleur ophtalmique Vitamine C Toutes 10mg/kg/j Pertes de substance cornéenne Lysine Carnivores 250 mg/j par chat / 4 semaines Kératite herpétique Interféron alpha Carnivores 25 unités par chat PO / 4 semaines Kératite herpétique Non stéroïdiens Anti-glaucomateux Antalgiques Divers Douleur ophtalmique Voie locale: collyre ou pommade ophtalmique Catégorie Molécules Espèces concernées Posologie Indications Lacrymomimétiques Carbopol Toutes Aussi souvent que nécessaire Dès que l'œil est atteint Polycarbophile Toutes Antibiotiques selon présentation première intention Cloxacilline Bovins, équidés Kératite, conjonctivite Oxytétracycline Carnivores, bovins Kératite à chlamydies, mycoplasmes Chloramphénicol Carnivores Kératite à chlamydies, mycoplasmes Néomycine, framycétine, gentamicine Toutes Kératite, conjonctivite Polymyxine B, bacitracine Toutes Kératite, conjonctivite deuxième intention Antimycosiques selon présentation Céfazoline Toutes Kératite ulcérative Tobramycine Toutes kératite, conjonctivite Norfloxacine, ofloxacine Toutes Kératite gram négatif, chlamydies, mycoplasmes Amphotéricine B (0,10 - 0,25%) Equidés selon présentation Kératomycoses Natamycine Equidés Kératomycoses Nystatine Equidés Kératomycoses Miconazole Equidés Kératomycoses Voie locale: collyre ou pommade ophtalmique TABLEAU II. Liste des médicaments utilisables lors d'urgence oculaire (liste non exhaustive) Revue Méd. Vét., 2006, 157, 12, 579-589 583 LES URGENCES EN OPHTALMOLOGIE VÉTÉRINAIRE Catégorie Anti-inflammatoires Molécules Espèces concernées Kétoconazole Equidés Kératomycoses Fluconazole Equidés Kératomycoses Itraconazole Equidés Kératomycoses Sulfadiazine argentique Equidés Kératomycoses Anti-glaucomateux Anti-collagénases Anti-viraux Autres Indications Selon présentation Stéroïdiens Phosphate de prednisolone Toutes Conjonctivite, sclérite ou kératite non ulcérative et non infectieuse Phosphate de dexaméthasone Toutes Conjonctivite, sclérite ou kératite non ulcérative et non infectieuse Acétate de prednisolone Toutes Uvéite Acétate de dexaméthasone Toutes Uvéite Non stéroïdiens Cycloplégiques Posologie sur 24-48 heures maximum Conjonctivite, sclérite ou kératite en phase aigue Indométhacine 0,1 % Toutes 1 goutte / 8 h Flurbiprofène Toutes 1 goutte / 8 h Diclofénac 0,1 % Toutes 1 goutte / 8 h Fluorométhalone Toutes 1 goutte / 4-8h Rimexolone Toutes 1 goutte / 8 h Atropine 0,3-1% Toutes 2 fois par jour après Uvéite, kérato-uvéite obtention d'une mydriase Tropicamide Carnivores 4 fois par jour Cyclopentolate Toutes 1 fois par jour après Uvéite, kérato-uvéite obtention d'une mydriase Uvéite chez le chat Dorzolamide Toutes 1 goutte / 8h Glaucome Pilocarpine 2% 4% Toutes 1 goutte / 8h Glaucome Echothiopate iodure Toutes 1 goutte / 8h Glaucome Phospholine iodide Toutes 1 goutte / 8h Glaucome Adrénaline 1% 2% Toutes 1 goutte / 12h Glaucome Timolol Toutes 1 goutte / 8h Glaucome Latanoprost Toutes 1 goutte / 24h Glaucome N acétyl cystéine Toutes 1 goutte / 8h Ulcères à collagénase EDTA Toutes 1 goutte / 8h Ulcères à collagénase Idoxuridine Carnivores 6 fois par jour / 3 semaines Kératite herpétique Trifluridine Carnivores 6 fois par jour / 3 semaines Vidarabine Carnivores 6 fois par jour / 3 semaines Aciclovir Carnivores 6 fois par jour / 3 semaines Acide cromoglicique Toutes 1 goutte / 4-8 H Anti-allergique Abréviations AIS : Anti-inflammatoires stéroïdiens AINS : Anti-inflammatoires non stéroïdiens En règle générale les spécialités sous forme de collyres s'administrent au moins quatre fois par jour et les pommades deux fois par jour. TABLEAU II. (suite) Liste des médicaments utilisables lors d'urgence oculaire (liste non exhaustive) Revue Méd. Vét., 2006, 157, 12, 579-589 584 DECOSNE-JUNOT (C.) ET COLLABORATEURS Schéma 2. Structure ostéologique de l’orbite chez le cheval (pièce préparée par l’unité d’anatomie de l’ENVL). Schéma 3. Sites de ponction rétrobulbaire sur un chat (pièce préparée par l’unité d’anatomie de l’ENVL). Site 1 : ponction rétrobulbaire par voie transconjonctivale. La ponction passe tangentiellement au globe, entre la conjonctive bulbaire et l'orbite. Site 2 : ponction rétrobulbaire par voie buccale. La ponction passe par la zone du palais dépressible en arrière de la dernière molaire. Site 3 : ponction rétrobulbaire transcutanée. La ponction passe par l'arrière du processus zygomatique, en avant de l'articulation temporo-mandibulaire. Photo 2. Enophtalmie de l’œil droit chez un chien. Photo 4. Luxation du globe oculaire chez un chien de type brachycéphale. Photo 3. Enophtalmie de l’œil droit chez un cheval. Photo 5. Blépharorraphie temporaire sur une luxation du globe oculaire. Revue Méd. Vét., 2006, 157, 12, 579-589 585 LES URGENCES EN OPHTALMOLOGIE VÉTÉRINAIRE optique secondaire à la luxation du globe. Dans tous les cas, la ponction du globe oculaire est contre-indiquée car elle peut être à l’origine de lésions iatrogènes (luxation du cristallin, décollement de rétine, hémorragie intra-oculaire…) [4]. Le pronostic visuel est modéré : à minima un strabisme divergent persiste mais l’apparition de kératoconjonctivite sèche secondaire ou d’une cécité ne sont pas rares [22]. Les urgences concernant les annexes de l’œil Les annexes de l’œil sont les paupières, la conjonctive et la membrane nictitante [5]. Ces structures ont pour fonction d’assurer une protection mécanique de l’œil, de produire et de permettre l’étalement du film lacrymal. Lorsque les paupières, la conjonctive ou la membrane nictitante sont atteintes, il faut suppléer ces fonctions essentielles en utilisant des substituts de larmes, en utilisant une protection oculaire (collerette pour les petits animaux, bonnet ou pansement pour les grands animaux) et en traitant, si possible, spécifiquement le problème. Lorsque les annexes de l’œil sont touchées, il convient de s’assurer que le globe en luimême n’a pas subi de lésions [3,17,22]. Concernant les plaies des annexes, le débridement doit être minimal de façon à pouvoir avoir une apposition des marges de la plaie la plus parfaite possible. Les plaies parallèles au bord libre des paupières doivent être suturées, points simples séparés, en veillant à limiter les tractions sur le bord libre (sinon apparition d’un ectropion). Les plaies conjonctivales parallèles au limbe et les plaies de la membrane nictitante parallèles au bord libre peuvent ne pas être suturées. Un traitement antibiotique local suffit et la cicatrisation se fait en 2472 h (voir tableau 2). Par contre les plaies palpébrales concernant le bord libre doivent être suturées dans les six heures qui suivent le traumatisme, par des points simples (deux plans) ou un point en lacet de bottine (un plan). De même les plaies du bord libre de la membrane nictitante et les plaies conjonctivales perpendiculaires au limbe doivent elles aussi être suturées dans les six heures à l’aide de points simples (système grossissant conseillé). Les points lacrymaux doivent être repérés et cathétérisés (fil monofilament irrésorbable 2-0 à 4-0) lorsque le traumatisme les concerne. Si ces règles ne sont pas respectées, le pronostic visuel peut être sombre à long terme par apparition de malposition palpébrale (entropion, ectropion), de kératite d’exposition… [4,17,22] Lors d’inflammation et d’œdème aigus des annexes, une cause allergique (insectes, réaction médicamenteuse, aliments…), inflammatoire (corps étrangers de petite taille), toxique (gaz lacrymogène) ou infectieuse (Staphylocoque, Chlamydiose, herpes virose, …) doit être recherchée afin de définir un plan thérapeutique étiologique. Pour cela, un frottis conjonctival effectué à l’aide d’une spatule de Kimura ou d’une cytobrosse doit être réalisé avant toute instillation de collyre. Le traitement est le plus souvent local, il est à mettre en place dans les 24 heures et le pronostic est en général bon [4]. Revue Méd. Vét., 2006, 157, 12, 579-589 En présence d’une hémorragie ou d’un hématome sur les annexes, et après avoir vérifié les temps de coagulation, un traitement local à base de corticoïdes et d’antibiotiques peut être mis en place dans les 24 heures. L’évolution est le plus souvent favorable et dure en moyenne sept jours [3,4,17]. Les urgences concernant la cornée et la sclère La cornée et la sclère sont les tuniques fibreuses de l’œil, elles assurent son soutien mécanique : en cas de rupture, les chances de récupération visuelles sont minimes. Si la cornée perd sa transparence, l’œil n’est plus visuel. La gestion des urgences cornéennes et sclérales est donc primordiale pour le pronostic visuel. Il est important de limiter les processus inflammatoires et douloureux afin de préserver les structures endo-oculaires. Les brûlures cornéennes peuvent être d’origine chimique ou thermique. Les brûlures par des bases sont les plus graves car elles ont une action activatrice des collagénases qui peut évoluer jusqu’à quatre jours après la brûlure. Les collagénases sont des enzymes protéolytiques sécrétées en quantité importante lors de toute lésion de l’épithélium cornéen et elles provoquent la dégradation des fibres polypeptidiques du collagène cornéen. Dans tous les cas, un rinçage cornéen d’au moins trente minutes avec de l’eau pour préparation injectable ou du sérum physiologique à 25 ˚C doit être réalisé le plus tôt possible, sous anesthésie générale en cas de douleur trop intense. Ensuite, l’administration locale d’antibiotiques, d’anti-inflammatoires non-stéroïdiens, d’anti-collagénases et de cycloplégiques est nécessaire (voir tableau 2). Un traitement systémique de l’uvéite est aussi recommandé. Le pronostic dépend de la précocité de mise en place du traitement, de la nature et de l’étendu de la brûlure. Un traitement chirurgical peut être envisagé dans un deuxième temps [4,7,22]. Les plaies et ulcères cornéens doivent être classés en deux catégories : ceux superficiels qui ne nécessitent qu’un traitement médical et ceux profonds (dont la profondeur dépasse les deux tiers du stroma) qui peuvent nécessiter un traitement chirurgical. Dans les deux cas, la prise en charge doit être rapide, dans les deux à six heures. Le diagnostic passe par la réalisation d’un test de Schirmer, par l’utilisation d’une lampe à fente, de colorants cornéens (vert de Lissamine, fluorescéine) et par la réalisation de frottis cornéens (cytobrosse pour recherche bactériologique, mycosique ou virologique). Le traitement médical est basé sur l’utilisation d’antibiotiques locaux (et généraux si profond), de cycloplégiques et d’anti-collagénases (si kératomalacie ou bactéries de type Pseudomonas suspectées). L’utilisation de corticoïdes par voie locale est contre-indiquée. Chez les grandes espèces, il peut être intéressant de positionner un cathéter trans-palpébral qui permet l’administration à distance du champ visuel des collyres dont la fréquence journalière est élevée (quatre à douze fois par jour) et dont la durée de traitement peut s’avérer de plus de trois semaines (kérato-mycoses par exemple) (voir photo 6 ; auteur JL CADORE - ENVL). 586 DECOSNE-JUNOT (C.) ET COLLABORATEURS La mise en place de lentilles hydrophiles permet de suivre la cicatrisation cornéenne tout en traitant l’animal (ce qui n’est pas possible lors de fixation de la membrane nictitante ou de blépharorraphie, selon les espèces). L’utilisation d’une colle cyanoacrylate chirurgicale doit être réservée aux ulcères de petite taille (≤ 3 mm de diamètre). La réalisation d’une greffe cornéenne, d’une greffe conjonctivale pédiculée ou d’une greffe de biomatériau de type sous-muqueuse intestinale de porc (Vetbiosist®) nécessite l’utilisation de techniques et de matériel de microchirurgie oculaire (voir tableau 3). Le pronostic visuel doit être réservé sur les plaies cornéennes profondes : à minima une taie cornéenne (cicatrice blanche sur la cornée) persiste et peut gêner si elle est dans l’axe visuel de l’animal [20]. Photo 6. Cathéter trans-palpébral. Pertes de substance cornéenne superficielle Traitement hygiénique Collerette Protection de la poussière Protection du soleil Nettoyage oculaire dès que nécessaire Traitement médical Lacrymomimétiques Collyres antibiotiques de première intention Local Collyres cycloplégiques +/- Collyres ou pommades antiviraux Antalgiques (AINS, AIS ou opiacés) Systémique +/- Anti-viraux Pertes de substance cornéenne profonde non perforante Traitement hygiénique Collerette Protection de la poussière Protection du soleil Nettoyage oculaire dès que nécessaire Traitement médical Lacrymomimétiques Collyres antibiotiques forts Collyres cycloplégiques Local Collyres anti-collagénases si nécessaire Si diamètre restreint : Pose d'une lentille de collagène Pose de colle cyanoacrylate Antibiothérapie Anti-inflammatoires Systémique Antalgiques Vitamine C Traitement chirurgical Suture cornéenne Greffe conjonctivale pédiculée Greffe cornéenne (Blépharorraphie et fixation de la membrane nictitante sont à éviter) { { TABLEAU III. Principe thérapeutique des pertes de substance cornéenne Revue Méd. Vét., 2006, 157, 12, 579-589 587 LES URGENCES EN OPHTALMOLOGIE VÉTÉRINAIRE Pertes de substance cornéenne perforante Traitement chirurgical Parage de l'iris si nécéssaire Reformation de la chambre antérieure Puis: Suture cornéenne greffe conjonctivale pédiculée Greffe cornéenne Traitement médical Lacrymomimétiques Collyres antibiotiques Local Collyres cycloplégiques Collyres anti-collagénases si nécessaire Antibiothérapie Anti-inflammatoires Systémique Antalgiques Vitamine C Traitement hygiénique Collerette Protection de la poussière Protection du soleil Nettoyage oculaire dès que nécessaire TABLEAU III. (suite) Principe thérapeutique des pertes de substance cornéenne (suite) Les plaies cornéennes perforantes se manifestent par un test de Seidel positif (décoloration rapide de quelques gouttes de fluorescéine concentrée à l’endroit où s’écoule l’humeur aqueuse par la brèche cornéenne), par un iris qui apparaît déformé (dit en goutte d’eau) et par une chambre antérieure moins profonde. Les plaies sclérales perforantes se traduisent par une zone noire en région de la sclère, d’où s’échappe un liquide plus ou moins visqueux et hémorragique et le globe est dépressible. Une uvéite est présente (myosis serré, dilatation des vaisseaux iriens) et le pronostic visuel est sérieusement mis en cause, à court et à long terme (uvéite aigue puis chronique) si le clinicien ne prend pas rapidement les mesures thérapeutiques adaptées. Le traitement immédiat doit être de rétablir la rigidité du globe par des sutures cornéennes ou sclérales (sous microscopie opératoire), et de mettre en place un traitement par voie locale (antibiotiquesmydriatiques-cycloplégiques +/- anti-collagénases) et par voie générale (antibiotiques, anti-inflammatoires +/- vitamine C) (voir tableaux 2 et 3). La fréquence d’administration des collyres étant élevée les premières 24 heures (toutes les une à deux heures), il est conseillé d’hospitaliser l’animal ou de mettre en place un cathéter transpalpébral chez les herbivores [3,4,7,9,17,21,22]. Les corps étrangers cornéens et scléraux doivent être retirés de préférence sous microscopie opératoire afin d’éviter un passage de tout ou partie du corps étranger dans la chambre antérieure et de pouvoir réaliser des sutures cornéennes si celles-ci sont nécessaires. Le retrait peut être fait dans les 24 heures [3]. Revue Méd. Vét., 2006, 157, 12, 579-589 Les atteintes de la chambre antérieure de l’œil Lors d’urgences liées à l’atteinte de la chambre antérieure de l’œil, il est important de gérer rapidement la douleur et l’inflammation endo-oculaire, tout en privilégiant la recherche étiologique. Les séquelles peuvent être à l’origine de cécité : il est donc fondamental de connaître les moyens thérapeutiques à instaurer afin de limiter ces séquelles. L’hyphéma est la présence de sang dans la chambre antérieure de l’œil. Il peut être la conséquence d’une inflammation endo-oculaire, d’un traumatisme, d’un trouble de l’hémostase, d’une hypertension intra-oculaire ou d’un processus néoplasique. Un examen clinique général et oculaire complet doit être effectué. Le traitement est avant tout étiologique. L’animal doit être placé au repos, des collyres myotiques (vasoconstriction) ou mydriatiques (limite les conséquences des synéchies éventuelles sur l’axe visuel) peuvent être utilisés en fonction de la pression intraoculaire (PIO). Des injections intra-camérulaires de tPA (activateur tissulaire du plasminogène) peuvent être réalisées par des ophtalmologistes vétérinaires afin de limiter l’inflammation intra-oculaire. Le pronostic dépend de l’affection initiale et la résorption du sang dure environ une semaine, pendant laquelle un suivi de PIO est nécessaire (risque d’uvéite hypertensive) [4,17]. L’uvéite est une inflammation de la tunique vasculaire de l’œil (iris, corps ciliaire et choroïde). L’uvéite antérieure est 588 aussi appelée iritis ou iridocyclite. L’uvéite postérieure est aussi appellée choroïdite. Le terme de panuvéite est utilisé lorsque l’ensemble de la tunique vasculaire de l’œil est concernée. Une uvéite peut être due à un traumatisme, à une affection bactérienne, parasitaire ou virale, à une affection à médiation immune (syndrome uvéo-cutané), à une inflammation (corps étranger, uvéites liées au cristallin – phacolytiques ou phacoclastiques) ou à une processus néoplasique (lymphome). Plus le traitement est précoce, plus les chances de récupération visuelle sont grandes et moins les synéchies (adhérences cicatricielles entre l’iris, le cristallin et/ou la cornée) sont fréquentes. Une uvéite doit être traitée de façon étiologique et symptomatique (association de mydriatiquecycloplégique, corticoïdes locaux et généraux, d’AINS locaux, d’antibiotiques locaux et généraux) (voir tableau 2). Un monitorage de la PIO est conseillé dans les 48 premières heures [4,6,9,23]. Le glaucome aigu est une augmentation brutale de la pression intraoculaire (supérieure à 30 mm de Hg). Il peut être la conséquence d’une anomalie congénitale (glaucome primaire à angle ouvert ou fermé) ou d’une affection antérieure (uvéite hypertensive, tumeur de l’angle irido-cornéen, luxation du cristallin). C’est une affection très douloureuse. Le pronostic dépend de la rapidité de mise en place du traitement et de son efficacité : si la PIO est supérieure à 50 mm de Hg pendant plus de 48 heures, la fonction visuelle est considérée comme perdue. Le traitement général du glaucome dans sa phase aigue passe par l’utilisation d’inhibiteur de l’anhydrase carbonique (acétazolamide- systémique, dorzolamidelocal…), de diurétiques osmotiques (mannitol- systémique), de vasoconstricteurs (adrénergiques et béta-bloquant - local), de myotiques (pilocarpine - local) et d’analogues des prostaglandines (latanaprost- local) (voir tableau 2). Le traitement consiste en l’instillation répétée de toute ou partie de ces collyres et le monitorage de la PIO doit être rapproché les premières 48 heures. En cas d’échec, des techniques chirurgicales spécialisées peuvent être proposées (dans les 48 premières heures) [4,19]. Le corps étranger intra camérulaire provoque des réactions très variables selon sa constitution (Végétaux, fer > plomb > verre, plastique, caoutchouc) et selon l’onde de choc à l’origine de son entrée (plomb de chasse). Le retrait de ce corps étranger nécessite une microchirurgie. Un traitement de l’uvéite associée doit être mis en place dès que possible et l’animal est laissé au repos jusqu’à la chirurgie. Le pronostic visuel est mauvais [4,9]. Les atteintes du cristallin Les vraies urgences concernant le cristallin sont celles qui sont dues à la luxation du cristallin et à la rupture traumatique de la capsule antérieure du cristallin. Les cataractes peuvent avoir une apparition rapide (diabète) mais la prise en charge de l’affection cristallinienne ne nécessite pas de traitement en urgence. La luxation peut être antérieure, sur place ou postérieure. Elle peut être due à un traumatisme, à une inflammation endo-oculaire chronique (glaucome, uvéite, atrophie rétinienne…) ou à une anomalie héréditaire des zonules cris- DECOSNE-JUNOT (C.) ET COLLABORATEURS talliniennes. Le traitement est conservateur si la luxation est en place ou postérieure (limiter les mouvements de l’animal et le contrôler régulièrement) ; il est chirurgical si la luxation est antérieure (risque de glaucome secondaire). La chirurgie doit être effectuée dans les 48 heures suivant la reconnaissance du problème, sur un œil le plus calme possible (sans uvéite ni glaucome) [4,22]. Lors de rupture traumatique de la capsule antérieure du cristallin (corps étranger pénétrant, griffade de chat, onde de choc), une uvéite qualifiée de phacoclastique s’installe très rapidement. Le traitement consiste à prendre en charge dès que possible l’uvéite et à référer l’animal pour une exérèse du cristallin. Le pronostic visuel dépend de la rapidité d’intervention. Les atteintes du segment postérieur de l’œil Lors d’atteinte du segment postérieur de l’œil, le but thérapeutique est de préserver la fonctionnalité du nerf optique et de la rétine. Les hémorragies du vitré et de la rétine peuvent être dues à un trouble de l’hémostase, à un traumatisme, à un décollement rétinien, à une uvéite, à une névrite optique, à une hypertension artérielle, à un diabète sucré ou à un processus tumoral. La perte de vision n’est pas forcément irréversible mais les séquelles sont fréquentes (décollement rétinien) [17]. Le traitement est essentiellement étiologique en plus de la mise au repos de l’animal [4]. Le décollement rétinien peut être d’origine exsudatif (processus infectieux, tumoral, hypertension artérielle…), par traction (processus inflammatoire, hémorragique, luxation postérieure cristallin…) ou par déchirure de la rétine (rhegmatogène, processus dégénératif) [22]. En deux à trois jours les cellules photoréceptrices (cônes et bâtonnets) commencent à dégénérer lorsqu’elles sont séparés de l’épithélium pigmentaire. Le traitement doit avant tout être étiologique ; des diurétiques (furosémide, mannitol) sont conseillés lors de l’apparition du décollement rétinien [4]. La névrite optique n’est observable en urgence que si elle est bilatérale. La cause peut être virale, parasitaire, mycosique, tumorale, inflammatoire… Si la névrite est postérieure à la papille, le diagnostic différentiel d’avec le syndrome de la rétine silencieuse ne peut se faire que par l’établissement d’un électrorétinographe (ERG). Le traitement consiste en la mise en place précoce d’une corticothérapie (prednisolone 24 mg/kg/j pendant 3-4 semaines) plus ou moins une antibiothérapie systémique si une cause infectieuse est suspectée (voir tableau 2) [22]. La dégénérescence rétinienne aigue (ou syndrome de la rétine silencieuse ou Sudden Acquired, Retinal Degeneration Syndrome) est une affection qui peut évoluer vers la cécité complète en quelques heures : toutes les cellules photoréceptrices dégénèrent subitement sans que la cause précise soit connue. L’examen du fond d’œil est normal lorsque survient la cécité, mais l’ERG est anormal. Les chiennes, de profil "cushingoïdes" sont plus fréquemment atteintes. Il n’y a pas de traitement et la perte de vision est irréversible [12]. Revue Méd. Vét., 2006, 157, 12, 579-589 LES URGENCES EN OPHTALMOLOGIE VÉTÉRINAIRE Les chorio-rétinites aigues peuvent faire l’objet de consultation d’urgences lorsque l’atteinte est multifocale et bilatérale (péritonite infectieuse féline, leptospirose, erhlichiose…). La différence doit être établie avec une atrophie rétinienne qui se révélerait lors d’un changement environnemental de l’animal sur l’aspect du fond d’œil (œdème, hémorragie, différent stade inflammatoire…). Le traitement est étiologique (corticothérapie et antibiothérapie par voie générale selon les cas) [8]. Conclusion L’œil est un organe fragile car exposé à l’environnement. Il est aussi un révélateur de nombreuses affections systémiques. Pour ces raisons, les urgences oculaires doivent être considérées rapidement. La recherche étiologique du problème est l’élément fondamental et nécessaire à la mise en place de tout plan thérapeutique à la fois pour la gestion de la douleur, pour la sauvegarde de la fonction visuelle de l’œil et pour l’aspect esthétique de l’animal. Il est nécessaire de savoir référer précocement afin d’assurer le meilleur pronostic visuel pour l’animal concerné par une urgence oculaire. 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