Classes polaires associées aux distributions holomorphes de sous
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Classes polaires associées aux distributions holomorphes de sous
“main” — 2006/5/3 — 23:49 — page 29 — #1 Bull Braz Math Soc, New Series 37(1), 29-48 © 2006, Sociedade Brasileira de Matemática Classes polaires associées aux distributions holomorphes de sous-espaces tangents∗ Rogério S. Mol Résumé. Nous définissons des classes polaires associées à une distribution holomorphe singulière de sous-espaces tangents d’une variété projective lisse. Nous prouvons que ces classes polaires peuvent être calculées en fonction des classes de Chern-Mather du faisceau tangent de la distribution et réciproquement. Nous utilisons leurs degrés pour borner les degrés de certaines classes polaires associés à une variété invariante. Mots-clés: Feuilletages holomorphes, classes polaires, cycles de Schubert, classes de Chern, variétés invariantes. Abstract. We define polar classes associated to a singular holomorphic distribution of tangent subspaces of a projective manifold. We prove that these polar classes can be calculated in terms of the Chern-Mather classes of the tangent sheaf of the distribution and reciprocally. We use their degrees to establish a bound for the degrees of some polar classes associated to an invariant variety. Keywords: holomorphic foliations, polar classes, Schubert cycles, Chern classes, invariant varieties. Mathematical subject classification: Primary: 32S65; Secondary: 14M15. 1 Introduction Soit M ⊂ Pn une variété analytique complexe, éventuellement singulière, de dimension m. On note Sing(M) son ensemble singulier. Soit D : L n ⊂ L n−1 ⊂ ∙ ∙ ∙ ⊂ L j ⊂ ∙ ∙ ∙ L 1 ⊂ L 0 = Pn (∗) un drapeau de sous-espaces linéaires de Pn , où codim L j = j. Dans ce travail, “dim” et “codim” se rapportent, respéctivement, aux dimensions et codimensions Received 10 August 2005. ∗ Ce travail a été soutenu par l’Accord de Coopération France-Brésil (CNRS/CNPq) et par la Fondation CAPES-Brésil. “main” — 2006/5/3 — 23:49 — page 30 — #2 30 ROGÉRIO S. MOL complexes. En chaque point lisse x ∈ M, l’espace tangent complexe à M est bien défini et correspond à un sous-espace linéaire de dimension m de Pn . On l’appelle espace tangent projectif à M en x, et on le note TxP M. L’ensemble Pk = Adh{x ∈ M \ Sing(M); dim(TxP M ∩ L m−k+2 ) ≥ k − 1}, où l’adhérence Adh est prise dans M, s’appelle le k-ième lieu polaire de M par rapport au drapeau D (voir [LT] et [Pi]). On remarque que le lieu polaire est la clotûre de l’ensemble des points où le plan de codimension m − k + 2 du drapeau et la variété M ne son pas transverses. R. Piene [Pi] a démontré que, si L m−k+2 est suffisamment générique dans la grassmannienne des n − (m − k + 2)-plans de Pn , alors Pk est une variété analytique de codimension k dont la classe dans le groupe de Chow Am−k (M) est bien définie. Cette classe, notée [Pk ], s’appelle la k-ième classe polaire de M. R. Piene a aussi prouvé la formule de Todd, qui relie les classes polaires et les classes de Chern-Mather de la variété M, notés c•M (M): [Pk ] = k X k−i (−1) i=0 m +1−k +i 1 M c (O(1)|M )i ∩ cm−k+i (M), i (1) où O(1)|M désigne la restriction à M du dual du fibré universel de Pn . Nous remarquons que, au cas où la variété M est lisse, les classes de Chern-Mather sont les classes de Chern homologiques usuelles et l’expression ci-dessus coïncide avec une formule obtenue par Todd [To]. Nous pouvons, en plus, inverser formellement les expressions ci-dessus pour obtenir M (M) cm−k = k X (−1) k−i i=0 m +1−k +i 1 c (O(1)|M )i ∩ Pk−i , i ce qui montre que les classes de Chern-Mather de M sont determinées par les classes polaires. Dans cet article, nous travaillons avec une variété analytique lisse, plongée dans un espace projectif, pourvue d’une distribution holomorphe singulière de sous-espaces de son fibré tangent. Cet objet, défini dans la section 3, est consisté d’un sous-faisceau analytique cohérent du faisceau tangent à M. Il engendre une distribution de sous-espaces de l’espace tangent à M hors de l’ensemble singulier de la distribution, un ensemble analytique de codimension 1. Cet objet est une généralisation de la notion de feuilletage de Baum et Bott [BB], de laquelle on supprime l’hypothèse d’intégrabilité. Bull Braz Math Soc, Vol. 37, N. 1, 2006 “main” — 2006/5/3 — 23:49 — page 31 — #3 CLASSES POLAIRES 31 En utilisant les espaces définis par la distribution et un drapeau comme en (∗), nous définissons des lieux polaires associés à la distribution. Nous prouvons, dans la section 3, que ces lieux polaires définissent, pour un choix générique du drapeau, des classes dans le groupe de Chow de la variété ambiante: ce sont les classes polaires associées à la distribution. Nous prouvons dans la section 4 une formule analogue à (1), reliant les classes polaires de la distribution et les classes de Chern-Mather de son faisceau tangent. Dans la section 5, dans le cas où la distribution est définie par un fibré vectoriel et un morphisme de celui-ci sur le fibré tangent à la variété ambiante, nous obtenons une expression des classes polaires en fonction des classes de Chern de ce fibré vectoriel. Finalement, dans la section 6 nous utilisons les degrés des classes polaires de la distribution pour établir des bornes pour certains degrés des classes polaires associées à une variété analytique invariante. Je remercie vivement Jean-Paul Brasselet, qui a accompagné tout le développement de ce travail, pour m’avoir montré, à plusieurs reprises, la bonne direction à suivre. Je remercie aussi l’Institut de Mathématiques de Luminy à Marseille pour m’avoir procuré des conditions de travail idéales pendant la préparation de ces notes. 2 Cycles de Schubert Tout au long de ce travail, les classes considérées sont éléments du groupe de Chow de la variété concernée. Nous notons c• et c• les classes de Chern cohomologiques et homologiques, respectivement. Soit G = G( p, n) la grasmannienne des espaces linéaires de dimension p, aussi appelés p-plans, dans Pn . On sait que G est une variété analytique lisse de dimension g = (n − p)( p + 1). Soit D un drapeau comme en (∗). Considérons, pour chaque k = 1, . . . , p + 1, l’ensemble défini par la relation σk = {3 ∈ G( p, n); dim(3 ∩ L p−k+2 ) ≥ k − 1}. Cet ensemble est une sous-variété analytique de G de codimension k, appelée la k-ième variété de Schubert. Sa classe dans le groupe de Chow de G, appelée k-ième cycle de Schubert, est indépendante du drapeau choisi [GH]. Nous fixons la notation suivante: pour L sous-espace linéaire de Pn , on note VL le sous-espace vectoriel de Cn+1 de dimension dim L + 1, qui lui correspond. Bull Braz Math Soc, Vol. 37, N. 1, 2006 “main” — 2006/5/3 — 23:49 — page 32 — #4 32 ROGÉRIO S. MOL On a 3 ∈ σk ⇐⇒ dim (V3 ∩ VL p−k+2 ) > k − 1 ⇐⇒ dim (V3 + VL p−k+2 ) < dim V3 + dim VL p−k+2 − (k − 1) = ( p + 1) + (n + 1 − ( p − k + 2)) − (k − 1) = n + 1. Donc, les éléments de σk sont précisément les éléments de G( p, n) dont les espaces affines correspondants ne sont pas, par rapport à VL p−k+2 , en position suffisamment générale pour engendrer Cn+1 . Pour un sous-espace vectoriel V ⊂ Cn+1 , considérons l’espace dual V ∗ = HomC (V, C) comme sous-espace de (Cn+1 )∗ . Remarquons que V ∗ = {γ ∈ (Cn+1 )∗ ; γ|V ⊥ ≡ 0}, où le symbole “⊥ " indique le complément orthogonal dans Cn+1 par rapport à un produit intérieur hermitien choisi. Notons W = VL⊥p−k+2 et W ∗ son dual. Nous notons par b S le fibré universel, ou tautologique, sur G, c’est-à-dire le fibré de rang p + 1 dont la fibre au dessus de 3 ∈ G est V3 , [ [ n+1 , où C n+1 est l’ensemble des vecteurs de 3. L’inclusion de fibrés b S ,→ C n+1 le fibré trivial de fibre C et de base G, induit, par dualité, une projection ∗ ∗ [ b ∗ de fibre W ∗ Cn+1 → b S . La restriction de cette projection au fibré trivial W ∗ ∗ b →b sur G est un homomorphisme holomorphe de fibrés ρ b: W S . Si nous notons ρ b3 la restriction de ρ b à la fibre au dessus de 3 ∈ G, nous avons 3 ∈ σk ⇐⇒ dim (V3 + VL p−k+2 ) < n + 1 ⇐⇒ dim (V3∗ + VL∗p−k+2 ) < n + 1 ⇐⇒ dim ρ b3 (W ∗ ) < p − k + 2 p−k+2 ⇐⇒ ^ p−k+2 ρ b3 : C ∼ ^ p−k+2 W∗ → Nous venons de prouver le lemme: ^ V3∗ est l’application nulle. Lemme 2.1. σk est consisté des points 3 ∈ G pour lesquels l’homomorphisme p−k+2 ^ p−k+2 ρ b: b C ∼ ^ b∗ → W p−k+2 ^ ∗ b S est identiquement nul, où b C est le fibré trivial de fibre C sur G. En conséquence du lemme ci-dessus et de la formule de Thom-Porteous [Fu, Th.14.4, Ex.14.4.1], nous obtenons [σk ] = ck (S ∗ ) ∩ [G]. Bull Braz Math Soc, Vol. 37, N. 1, 2006 (2) “main” — 2006/5/3 — 23:49 — page 33 — #5 CLASSES POLAIRES 33 3 Classes polaires pour une distribution holomorphe singulière Soit M une variété analytique complexe lisse connexe. On note T M son fibré tangent, O son faisceau structural, et 2 = O(T M) son faisceau tangent. Une distribution holomorphe singulière de sous-espaces tangents F , ou tout simplement distribution, est défini comme un sous-faisceau analytique cohérent T F de 2, appelé faisceau tangent à F . Le faisceau quotient N F = 2/T F s’appelle faisceau normal à la distribution. On a une suite exacte de faisceaux: 0 −→ T F −→ 2 −→ N F −→ 0. D’une manière générale, l’ensemble singulier d’un faisceau analytique cohérent S, noté Sing(S), consiste en les points de M où la fibre Sx n’est pas un O x -module libre. On appelle Sing(N F ) l’ensemble singulier de la distribution F et on le note Sing(F ). Evidemment Sing(T F ) ⊂ Sing(F ). Il suit de la définition que Sing(F ) est un ensemble analytique de codimension au moins 1. Soit p le rang de la partie localement libre de T F . On appelle ce nombre la dimension de F . Au-dessus de M0 = M \ Sing(F ) le faisceau T F |M0 est localement libre. Il correspond donc à un fibré vectoriel T F de rang p, sous-fibré de T M|M0 , qu’on appelle fibré tangent à la partie regulière de la distribution. On note Tx F la fibre de T F au-dessus de x ∈ M0 . Dans le cas où le faisceau T F est involutif, la distribution de sous-espaces vectoriels de dimension p dans T M|M0 est intégrable, d’après le théorème de Frobenius. On obtient donc un feuilletage holomorphe régulier de M0 , dont l’espace tangent à la feuille passant par x ∈ M0 est Tx F , fibre de T F audessus de x. On a donc dans M un feuilletage holomorphe singulier (voir [BB]). Cependant, l’hypothèse d’intégrabilité ne sera pas necéssaire au long de ces notes, ce qui nous permettra de considérer la classe plus générale des distributions holomorphes singulières. Supposons maintenant que M soit une sous-variété de Pn . Dans ce cas, pour chaque x ∈ M0 , le sous-espace Tx F ⊂ Tx M définit de manière unique un pplan de Pn contenant x, noté TxP F . Cette correspondance définit l’application de Gauss pour la distribution F : 8F : M0 −→ G( p, n) x 7−→ TxP F . C’est un morphisme analytique qui, en tant qu’application définie sur M, est une application rationnelle. Bull Braz Math Soc, Vol. 37, N. 1, 2006 “main” — 2006/5/3 — 23:49 — page 34 — #6 34 ROGÉRIO S. MOL Soient M ⊂ Pn une variété analytique lisse de dimension m et F une distribution holomorphe singulière de dimension p sur M. Supposons que Pn soit pourvu d’un drapeau D comme (∗). Pour k = 1, . . . , p + 1, le k-ième lieu polaire de F par rapport à D est défini par F Pk = Adh x ∈ M \ Sing(F ); dim (TxP F ∩ L p−k+2 ) ≥ k − 1 , où l’adhérence Adh est prise dans M. Celui-ci peut être aussi défini par l’application de Gauss associée à F : F P k = Adh (8F )−1 (σk ) , où σk est la k-ième variété de Schubert dans G( p, n). Remarquons que, en analogie à ce qui se passe pour les variétés de Schubert, un point x ∈ M \Sing(F ) F appartient à P k si et seulement si VTxP F et VL p−k+2 n’engendrent pas Cn+1 . Nous F étendons la définition ci-dessus à k = 0 en posant P 0 = M. Exemple 3.1. Analysons la situation où M = Pn et k = p = 1. Dans ce cas, la condition d’intégrabilité est immédiate et F est un feuilletage holomorphe F singulier. On peut supposer que codim(F ) ≥ 2. On a x ∈ P 1 ∩ (M \ Sing(F )) si et seulement si dim(TxP F ∩ L 2 ) ≥ 0. Cela veut dire que la droite TxP F doit rencontrer l’espace linéaire L 2 de codimension 2 du drapeau et, par conséquent, TxP F et L 2 définissent un hyperplan tangent à la feuille passant par x. Un calcul F direct montre que Sing(F ) est dans l’adhérence de P 1 ∩ (M \ Sing(F )) et donc F F Sing(F ) ⊂ P 1 . Ces remarques nous permettent de construire P 1 à partir du pinceau d’hyperplans H = {Ht }t∈P1 d’axe L 2 : pour chaque Ht ∈ H , nous C définissons Div(Ht , F ) comme l’ensemble des points x ∈ Ht où Ht et F ne sont pas transverses, c’est à dire, Div(Ht , F ) = (Sing(F ) ∩ Ht ) ∪ x 6∈ Sing(F ); TxP ⊂ Ht . Nous avons alors: F P1 = F [ t∈P1C Div(Ht , F ). L’ensemble P 1 apparaît en [So1], où il est appelé diviseur de tangences de F par rapport à H et noté DH . Soit Ht ∈ H un hyperplan générique, alors Div(Ht , F ) est une hypersurface algébrique dans Ht ∼ Pn−1 de degré d0 . Ce F nombre s’appelle le degré du feuilletage F . Remarquons que P 1 est une hypersurface de Pn de degré d0 + 1, puisque l’axe L 2 est entièrement contenu F dans P 1 . Bull Braz Math Soc, Vol. 37, N. 1, 2006 “main” — 2006/5/3 — 23:49 — page 35 — #7 CLASSES POLAIRES 35 Soit G M = G M ( p − 1, m − 1) le fibré des grassmanniennes des sous-espaces vectoriels de dimension p associé au fibré tangent à M. C’est un fibré de base M dont la fibre au-dessus de x ∈ M est la grassmannienne des sous-espaces vectoriels de dimension p de Tx M. Le fibré π : G M → M admet au-dessus de M0 = M \ Sing(F ) une section s0 définie par s0 (x) = Tx F , x ∈ M0 . e est La transformée de Nash de M par rapport à la distribution F , notée M, e0 = s0 (M0 ) dans G M (voir [Se],[BS]). Nous remarquons que l’adhérence de M e M est une variété analytique de dimension m, éventuellement singulière [Wh, Th.16.4]. e notée e La restriction de la projection π à M, π , est une application analytique propre, puisque π est une fibration à fibres compactes. Le lieu singulier de e0 → M0 est un e est contenu dans e M π −1 (Sing(F )) et la restriction e π| Me0 : M biholomorphisme entre variétés lisses. Observons que, puisque M est plongée dans Pn , on a un plongement G M ,→ M × G( p, n) construit de la façon suivante: à un élément V ∈ G M au-dessus de x ∈ M, c’est à dire, à un sous-espace vectoriel de dimension p de Tx M, nous associons l’unique p-plan de Pn qui passe par x et de direction determinée par V . e dans M × G( p, n) par ce plongement et π : M → M e Notons M l’image de M l’inverse de l’isomorphisme analytique correspondant. Nous avons donc un diagramme d’applications analytiques ψ M ⊂ M × G( p, n) −→ G( p, n) πy e ⊂ GM M e πy M où ψ dénote la restriction à M de la projection naturelle M ×G( p, n) → G( p, n). e0 ) est une variété lisse et que π ||M : M 0 → M e0 Observons que M 0 = π −1 ( M 0 est un biholomorphisme. Avec les notations précédentes, nous avons F (e π ◦ π )−1 (P k ∩ M0 ) = ψ −1 (σk ) ∩ M 0 . Il résulte de (3) et du lemme (3.2) ci-dessous que F Pk = e π ◦ π (ψ Bull Braz Math Soc, Vol. 37, N. 1, 2006 −1 (σk )). (3) “main” — 2006/5/3 — 23:49 — page 36 — #8 36 ROGÉRIO S. MOL −1 F F F Notons P k = ψ (σk ) ⊂ M, ce qui nous donne P k = e π ◦ π (P k ). L’application de Gauss s’écrit 8F = ψ ◦ (e π ◦ π )−1 . |M 0 F L’ensemble P k , bien que contenu dans une variété possiblement singulière, a l’avantage d’être l’image inverse de l’objet analytique σk par le morphisme F analytique ψ. Par contre, le lieu polaire P k est, lui, contenu dans une variété lisse, mais est défini par 8F , une application au mieux rationnelle. e, restriction à M e du fibré universel de G M , Observons que le fibré vectoriel T est une “extension" du fibré tangent à la partie regulière de F . En effet, nous avons e| Me = e T π ∗|Me0 T F . 0 En tenant compte de ce que M est plongée dans Pn , on peut construire un e e de la façon suivante: pour chaque x ∈ M fibré vectoriel e S de rang p + 1 sur M n au-dessus de e π (x) ∈ M, nous prenons l’unique p-plan de P qui passe par e π (x) ex . Ce p-plan, à son tour, correspond à un sous-espace dans la direction de T vectoriel de dimension p + 1 de Cn+1 qui sera la fibre au-dessus de x du fibré e S. Le fibré e S peut être relevé en un fibré S = π ∗e S sur M. Remarquons que ∗ S=ψ b S, où b S désigne le fibré universel sur G( p, n). En outre, puisque b S est sous-fibré du fibré trivial de fibre Cn+1 sur G( p, n), e S et S sont des sous-fibrés fn et de Cn , fibrés triviaux de fibre Cn+1 et de base M e et M, respectivement. de C La démonstration du résultat suivant se trouve dans [Pi]: Lemme 3.2. [Lemme de transversalité] Soient V une variété analytique réduite et équidimensionnelle et 8 : V → G( p, n) un morphisme analytique. Pour un drapeau générique D comme en (∗) et pour chaque k = 1, . . . , p + 1 la variété de Schubert σ = σk a les propriétés suivantes: (i) L’ensemble 8−1 (σ ) est soit vide, soit équidimensionel, et sa codimension dans V est égale à celle de σ dans G( p, n) ; (ii) 8−1 (σ ) est réduit ; (iii) si U ⊂ V est un ouvert dense, 8−1 (σ )|U est dense dans 8−1 (σ ) ; (iv) le cycle 8∗ [σ ] est bien défini et égal à 8−1 (σ ) . Dans le même esprit que ce qui a été fait pour les variétés de Schubert, il F est possible de définir P k comme l’ensemble de zéros d’un homomorphisme de fibrés. Considérons, de nouveau, le complément orthogonal W de VL p−k+2 Bull Braz Math Soc, Vol. 37, N. 1, 2006 “main” — 2006/5/3 — 23:49 — page 37 — #9 CLASSES POLAIRES 37 dans Cn+1 et W ∗ son dual. Soit W le fibré trivial de base M et de fibre W . La ∗ ∗ ∗ restriction de la projection Cn+1 → S à W définit un homomorphisme ∗ ∗ ρ:W →S . (4) Un raisonnement semblable à celui de la démonstration du lemme 2.1 nous amène F à conclure que P k consiste en les points x de M pour lesquels l’homomorphisme V p−k+2 ρ : C ∼ V p−k+2 W ∗ −→ V p−k+2 S ∗ (5) est identiquement nul, en notant C le fibré trivial de fibre C et base M. En fait, ∗ ∗ b∗ → b nous avons ρ = ψ ρ b, où ρ b: W S a été défini dans la section 2. Proposition 3.3. Pour un choix d’un drapeau D comme en (∗) et pour h générique i F k = 1, . . . , p + 1, la classe P k ∈ Am−k (M) est indépendante du drapeau choisi. Démonstration: Prenons un drapeau, génériquement choisi de façon que le F lemme de transversalité 3.2 s’applique. Des propriétés (i) et (ii) du lemme, P k est une variété réduite, ou vide, ou de codimension k. La propriété (iv), appliquée à ψ : M → G, montre que h Fi h −1 i ∗ P k = ψ (σk ) = ψ [σk ] ∗ ∗ = ψ (c k (b S ) ∩ [G]) ∗ ( par (2) ) ∗ ∗ = c k (ψ b S ) ∩ [ψ G] ∗ = c k (S ) ∩ [M]. h Fi Donc, P k ne dépend pas du drapeau générique choisi. La propriété (iii) appliquée à l’ouvert M 0 et le fait que e π ◦ π |M 0 : M 0 → M0 soit un biholomorphisme impliquent que h i h i F ekF . Pk = e π∗ P h i F Ceci démontre, à son tour, l’indépendance de P k par rapport au drapeau eF générique. D’autre h i part, de la remarque faite concernant la dimension de P k , il F résulte que P k ∈ A(m−k) (M). Bull Braz Math Soc, Vol. 37, N. 1, 2006 “main” — 2006/5/3 — 23:49 — page 38 — #10 38 ROGÉRIO S. MOL 4 Formule de Todd L’objectif central de cette section est de prouver une formule analogue à (1) pour les classes polaires associées à une distribution. Commençons par la proposition suivante: Proposition 4.1. Il existe une suite exacte courte de fibrés e⊗e 0 −→ e π ∗ O(−1)|M −→ e S −→ T π ∗ O(−1)|M −→ 0, (6) où O(−1)|M désigne la restriction à M du fibré universel de Pn . Démonstration: De la suite d’Euler de fibrés sur Pn 0 −→ C −→ (O(1))n+1 −→ T Pn −→ 0, (7) (voir, par exemple, [GH]), nous obtenons, après tensorisation par O(−1), une suite exacte courte α 0 −→ O(−1) −→ Cn+1 −→ T Pn ⊗ O(−1) −→ 0. (8) Remarquons d’abord que, pour obtenir le sous-espace vectoriel de Cn+1 correspondant à x ∈ Pn et à un sous-espace V ⊂ T Pn , il suffit de prendre l’image inverse de V ⊗ O(−1)x par l’homomorphisme α. L’image réciproque de (8) π donne par e n ] n+1 −→ e 0 −→ e π ∗ O(−1)|M −→ C π ∗ T PC |M ⊗ e π ∗ O(−1)|M −→ 0. ] n+1 de T e⊗e Alors, d’une part la pré-image en C π ∗ O(−1)|M est e S, d’autre part ∗ e e le noyau de la projection S → T ⊗ e π O(−1)|M est évidemment e π ∗ O(−1)|M . Cela termine la démonstration. Nous sommes donc en mesure de prouver le résultat central de cette section: Théorème 4.2. La k-ième classe polaire de F s’écrit h F Pk i = k X i=0 (−1) k−i p+1−k +i 1 M c (O(1)|M )i ∩ cm−k+i (T F ), i où c M • désigne la classe de Chern-Mather (voir [Sc] et [K]). Bull Braz Math Soc, Vol. 37, N. 1, 2006 “main” — 2006/5/3 — 23:49 — page 39 — #11 CLASSES POLAIRES 39 Démonstration: Nous avons vu dans la démonstration de la proposition 3.3 que h Fi ∗ P k = ck (S ) ∩ [M]. En prenant l’image réciproque par π de la suite exacte duale de (6), nous obtenons ∗ π ◦ π )∗ O(1)|M −→ S 0 −→ T ⊗ (e ∗ −→ (e π ◦ π )∗ O(1)|M −→ 0, qui, par la propriété de la somme de Whitney, nous donne ∗ ck (S ) = k X j=0 ∗ ck− j (T ⊗ (e π ◦ π )∗ O(1)|M ) ∪ c j ((e π ◦ π )∗ O(1)|M ) ∗ = ck (T ⊗ (e π ◦ π )∗ O(1)|M ) ∗ + ck−1 (T ⊗ (e π ◦ π )∗ O(1)|M ) ∪ c1 ((e π ◦ π )∗ O(1)|M ). Nous avons ∗ π ◦ π )∗ O(1)|M ) = ck (T ⊗ (e k X p−k +i ∗ ck−i (T ) ∪ c1 ((e π ◦ π )∗ O(1)|M )i i i=0 ∗ ck−1 (T ⊗ (e π ◦ π )∗ O(1)|M ) = k X p−k+i ∗ ck−i (T ) ∪ c1 ((e π ◦ π )∗ O(1)|M )i−1 . i −1 i=1 ∗ Ces expressions, avec le fait que c j (T ) = (−1) j c j (T ), nous donnent la relation h F Pk i = k X (−1)k−i i=0 p+1−k +i (c1 ((e π ◦π )∗ O(1)|M )i ∪ck−i (T ))∩[M], i e nous donne qui, projetée par π sur M, h ekF P i = k X i=0 (−1) k−i p+1−k +i e)) ∩ [ M]. e (c1 (e π ∗ O(1)|M )i ∪ ck−i (T i On achève la démonstration en prenant l’image de cette dernière expression par M e) ∩ [ M]). e e π et en tenant compte de ce que cm−• (T F )) = e π ∗ (c • (T Bull Braz Math Soc, Vol. 37, N. 1, 2006 “main” — 2006/5/3 — 23:49 — page 40 — #12 40 ROGÉRIO S. MOL Par inversion de l’expression du théorème ci-dessus, il est possible de calculer les classes de Chern-Mather du faisceau tangent à la distribution F à partir de ses classes polaires. C’est le contenu du Corollaire 4.3. Pour k = 0, . . . , p, nous avons M (T F ) cm−k = k X (−1) i=0 k−i h i p+1−k +i 1 F c (O(1)|M )i ∩ P k−i . i 5 Distributions localement repérées Pour une classe importante de distributions, on peut écrire une formule explicite reliant les classes polaires d’une distribution et les classes de Chern usuelles de son fibré tangent. Nous avons la définition suivante: Définition 5.1. Soit F une distribution holomorphe singulière de dimension p dans une variété analytique lisse M. Nous disons que F est localement repérée si elle est définie par un fibré vectoriel de rang p, c’est-à-dire s’il existe un fibré E de rang p sur M et un homomorphisme de fibrés f : E → T M, injectif sur M0 = M \ Sing(F ), tels que, pour tout x ∈ M0 , l’image de la fibre E x par f est Tx F . On appelle E le fibré tangent à F et on le note T F . La proposition suivante caractérise les distributions localement repérées tout en justifiant cette terminologie: Proposition 5.2. Soit F une distribution de dimension p dans une variété analytique lisse M. Si F est localement repérée alors il existe un recouvrement ouvert {Uα } de M et, pour chaque α, des champs de vecteurs vα,1 , . . . , vα, p tels que: (i) vα,1 (x), . . . , vα, p (x) engendrent Tx F , si x ∈ M \ Sing(F ) ; (ii) vα,1 (x), . . . , vα, p (x) sont linéairement dépendants, si x ∈ Sing(F ). Réciproquement, s’il existe un tel recouvrement et des tels champs de vecteurs satisfaisant (i) et (ii) et si, en plus, codimSing(F ) ≥ 2, alors F est localement répérée. Démonstration: Supposons, d’abord, que F soit localement repérée. Soient T F le fibré vectoriel de rang p sur M et f : T F → T M l’homomorphisme de fibrés donnés par la définition. Considérons un recouvrement {Uα } de M par des ouverts de trivialisation de T F . Notons {e1 , . . . , e p } la base canonique de C p et sα,i , pour i = 1, . . . , p, la section de T F au dessus de Uα qui correspond, dans Bull Braz Math Soc, Vol. 37, N. 1, 2006 “main” — 2006/5/3 — 23:49 — page 41 — #13 CLASSES POLAIRES 41 la trivialisation Uα × C p , à la section constante ei . Il suffit donc de prendre pour vα,i l’image de sα,i par l’homomorphisme f . Réciproquement, supposons que la propriété de l’énoncé soit vraie. Pour Uαβ = Uα ∩ Uβ 6 = ∅, considérons un point x de Uαβ \ Sing(F ). Il existe donc un unique isomorphisme linéaire G αβ (x) ∈ G L( p, C) tel que vα,i (x) = G αβ (x)vβ,i (x) pour i = 1, . . . , p. Cela définit une application analytique G αβ : Uαβ \ Sing(F ) → G L( p, C). Puisque Sing(F ) a codimension au moins 2, cette application s’étend en une application analytique définie sur tout Uαβ , et notée de la même façon. Il résulte de leur définition que les fonctions G αβ obéissent à la condition de cocycle, soit: (i) G αβ (x)G βα (x) = I p ∀ x ∈ Uαβ , si Uαβ 6= ∅ ; (ii) G αβ (x)G βγ (x)G γ α (x) = I p ∀ x ∈ Uαβγ = Uα ∩ Uβ ∩ Uγ , si Uαβγ 6= ∅, t −1 où I p désigne l’identité de G L( p, C). Les fonctions (G αβ ) , où “ t " désigne la transposition, sont donc les fonctions de transition d’un fibré vectoriel de rang p noté T F . Pour définir l’homomorphisme f : T F → T M on procède de la manière suivante: pour chaque α, nous prenons une trivialisation locale Uα × C p de T F et nous définissons f (x, (t1 , . . . , t p )) = t1 vα,1 (x) + ∙ ∙ ∙ + t p vα, p . Cette t −1 définition locale est compatible avec le cocycle défini par les fonctions (G αβ ) et produit l’homomorphisme f désiré. Il est clair que f n’est pas injectif sur, et seulement sur, Sing(F ). Le faisceau tangent T F associé à une distribution localement repérée F de rang p sur une variété lisse M est le sous-faisceau de 2 = O(T M) engendré par les “sections" de l’image du fibré T F dans T M. Autrement dit, T F est engendré par les germes de champs de vecteurs vα,1 , . . . , vα, p donnés par la proposition 5.2. Le faisceau T F est donc localement libre de rang p et ses classes de Chern-Mather coïncident avec les classes de Chern homologiques usuelles M du fibré T F (voir [K]): cm−• (T F ) = c• (T F ) ∩ [M]. De manière réciproque, une distribution dont le faisceau tangent est localement libre et dont l’ensemble singulier a codimension au moins 2 est localement repéré. On remarque que la proposition 5.2 est une version en dimension plus haute du théorème 1 de [G]. Exemple 5.3. Une distribution de dimension 1 – donc un feuilletage holomorphe singulier – dont l’ensemble singulier a codimension au moins 2 est localement repérée. En fait, il suffit de vérifier qu’une tel feuilletage est localement engendré par un champ de vecteurs analytique. Le problème étant local, Bull Braz Math Soc, Vol. 37, N. 1, 2006 “main” — 2006/5/3 — 23:49 — page 42 — #14 42 ROGÉRIO S. MOL nous pouvons le considérer dans un polydisque 1 ⊂ Cn . Pour chaque point x ∈ 1 \ Sing(F ), considérons w(x) = (w1 (x), . . . , w p (x)) un vecteur tangent à la feuille qui passe par x. Supposons que la coordonée w p (x) ne soit pas identiquement nulle. Nous définissons ainsi des fonctions méromorphes w p−1 (x) w1 (x) , . . . , ϕ p−1 (x) = w p (x) w p (x) ϕ1 (x) = sur 1 \ Sing(F ). Puisque Sing(F ) a codimension au moins 2, ces fonctions s’étendent en des fonctions méromorphes sur 1. Ces extensions peuvent être écrites comme des quotients des fonctions analytiques définies sur 1 de la manière suivante: ϕ1 = f1 f p−1 , . . . , ϕ p−1 = . g1 g p−1 Nous définissons v p comme le plus petit commun multiple de g1 , . . . , g p−1 . Finalement, nous posons v1 = ϕ1 v p , . . . , v p−1 = ϕ p−1 v p . Le champ analytique v = (v1 , . . . , v p−1 , v p ) engendre F sur 1. Nous avons le résultat suivant: Théorème 5.4. Soit F une distribution localement repérée de fibré tangent T F . Alors sa k-ième classe polaire s’écrit h F Pk i = k X i=0 (−1) k−i p+1−k +i (c1 (O(1)|M )i ∪ ck−i (T F )) ∩ [M]. i Exemple 3.1. [Revu] Un feuilletage F de dimension 1 et de degré d0 dans M = Pn a pour fibré tangent O(1 − d0 ) [MS]. Du théorème précédent, nous obtenons h i F P1 = (−1) 01 c1 (O(1 − d0 )) ∩ [Pn ] + 21 c1 (O(1)) ∩ [Pn ] = (d0 + 1)c1 (O(1)) ∩ [Pn ], F d’où nous concluons que P 1 est une hypersurface analytique de degré d0 + 1. 6 Variétés invariantes par une distribution H. Poincaré, en 1891, a consideré la question suivante: étant donnés un feuilletage F de P2 et une courbe algébrique 0 invariante par F , est il possible de borner le degré de V en fonction du degré de F [Po]? En général, cette question Bull Braz Math Soc, Vol. 37, N. 1, 2006 “main” — 2006/5/3 — 23:49 — page 43 — #15 CLASSES POLAIRES 43 a une réponse négative. Considérons, par exemple, le feuilletage F de P2 défini par l’équation pyd x + q xdy = 0, où p et q sont des entiers positifs. F a degré 1 et pourtant la courbe d’équation x p − y q = 0 est F -invariante et son degré est max{ p, q}. Cependant, des réponses affirmatives ont été obtenus dans certains cas, tels que le cas où la courbe admet seulement des singularités nodales [CL] (voir exemple 6.6 ci-dessous) et celui où la courbe ne contient pas des singularités dicritiques du feuilletage [Ca]. Pour les dimensions plus grandes, on cite [BM], où le degré d’une hypersurface de Pn est borné par le degré d’une distribution de dimension quelconque qui la laisse invariante. M. Soares a obtenu en [So] et [So1] des bornes pour les degrés de certaines classes polaires d’une variété analytique lisse invariante par un feuilletage de dimension 1 de Pn en fonction du degré du feuilletage. En ce qui suit, nous généralison ce résultat pour une distribution holomorphe singulière de dimension quelconque de Pn laissant invariante une variété éventuellement singulière. Soit F une distribution holomorphe singulière de Pn de dimension p. Nous disons qu’une variété analytique V ⊂ Pn de dimension q ≥ p est invariante par F si V 6⊂ Sing(F ) et Tx F ⊂ Tx V pour tout x ∈ V \ Sing(F ). Supposons qu’une telle variété V existe et qu’elle soit compacte. Les degrés polaires de V sont les degrés des classes polaires associés à V . En fait, on considère le degré des images de ces classes dans A• (Pn ), induites par l’inclusion V ,→ Pn . On les note ρkV = deg[PkV ], k = 0, . . . , q. Puisque P0V = V , alors ρ0V est le degré de V . D’une manière similaire, nous définissons les degrés polaires de F comme étant les degrés des classes polaires associées. F F On les note ρk = deg[P k ], k = 0, . . . , p. Choisissons un drapeau comme en (*) suffisamment générique. Considérons les lieux polaires de V et de F par rapport à ce drapeau. On a Lemme 6.1. Dans la situation décrite ci-dessus, on a PqV ⊂ P Fp . Démonstration: Rappelons les définitions: PqV = Adh x ∈ V \ Sing(V ); dim (TxP V ∩ L 2 ) ≥ q − 1 ; P Fp = Adh x ∈ M \ Sing(F ); dim (TxP F ∩ L 2 ) ≥ p − 1 . Puisque V est F -invariant, on a TxP F ⊂ TxP V partout où ces deux espaces sont définis. L’ensemble PqV est constitué de points isolés et donc, par (iii) du lemme de transversalité 3.2, on peut supposer que PqV ⊂ V \ (Sing(V ) ∪ Sing(F )). Soit x ∈ PqV , si TxP V ⊂ L 2 Bull Braz Math Soc, Vol. 37, N. 1, 2006 alors TxP F ⊂ TxP V ⊂ L 2 , “main” — 2006/5/3 — 23:49 — page 44 — #16 44 ROGÉRIO S. MOL et donc F x ∈ Pk ; si TxP V 6⊂ L 2 alors dim(TxP V ∩ L 2 ) = q − 1 , c’est à dire, TxP V ∩ L 2 a codimension 1 dans TxP V . On a donc dim(TxP F ∩ L 2 ) = dim(TxP F ∩ (TxP V ∩ L 2 )) ≥ dim(TxP F ) − 1 = p − 1, F ce qui implique x ∈ P k . F Quitte à modifier le choix de L 2 , on peut supposer que V 6⊂ P p . Puisque P0V = V , le lemme ci-dessus implique qu’il existe j, 0 ≤ j ≤ q − p, tel que F F V V Pq− j ⊂ P p mais Pq− j− p 6 ⊂ P p . En fait, il peut y avoir plusieurs – p au plus – V V choix possibles de j satisfaisant cette propriété. Du fait que Pq− j ⊂ Pq− j− p , on déduit que V V F Pq− j ⊂ Pq− j− p ∩ P p . V Remarquons que le choix de j implique en particulier que Pq− j− p est non vide, V n et donc ρq− j− p 6 = 0. Une comparaison de degrés dans P nous donne V V F ρq− j ≤ ρq− j− p ρ p , ce qui nous nous permet d’établir une limitation pour le p-ième degré polaire de F en fonction des degrés polaires de V . C’est le contenue du théorème suivant, qui généralise le Théorème 1 de [So1]. Théorème 6.2. Soit F une distribution holomorphe singulière de dimension p de Pn admettant une variété analytique compacte invariante V . Alors V ρq− j V ρq− j− p ≤ ρF p , F F V V où j est un nombre compris entre 0 et q − p tel que Pq− j ⊂ P p et Pq− j− p 6 ⊂ P p . Si V est une sous-variété analytique lisse de Pn de dimension q, définie par l’intersection des ensembles de zéros de n−q polynômes de degrés d1 , . . . , dn−q , alors les degrés polaires de V sont donnés par les expressions suivantes ([To] ; voir aussi [So]): (n−q) ρkV = (d1 . . . dn−q ) W k où (n−q) Wk (X 1 , . . . , X n−q ) = Bull Braz Math Soc, Vol. 37, N. 1, 2006 (d1 − 1, . . . , dn−q − 1), X i 1 +...+i n−q =k i n−q X 1i1 . . . X n−q “main” — 2006/5/3 — 23:49 — page 45 — #17 CLASSES POLAIRES 45 est la fonction symmetrique complète de degré k en n − q variables. Cela nous donne le corollaire suivant: Corollaire 6.3. Soit F une distribution holomorphe singulière de dimension p de Pn admettant une variété analytique compacte invariante V de dimension q. Si V est lisse et défini par l’intersection des ensembles de zéros de n − q polynômes de degrés d1 , . . . , dn−q alors (n−q) W q− j (d1 − 1, . . . , dn−q − 1) (n−q) W q− j− p (d1 − 1, . . . , dn−q − 1) ≤ ρF p , F F V V où j est un nombre compris entre 0 et q − p tel que Pq− j ⊂ P p et Pq− j− p 6 ⊂ P p . Dans le cas où V est une hypersuface lisse de degré d, on a alors V ρq− j V ρq− j− p (1) = W n−1− j (d) (1) W n−1− j− p (d) = (d − 1) p . On obtient donc Corollaire 6.4. Soit F une distribution holomorphe singulière de dimension p de Pn admettant une hypersurface invariante lisse de degré d. Alors (d − 1) p ≤ ρ F p . En particulier, si p = 1, on obtient d ≤ d0 + 2, où d0 est le degré de F . Dans le cas où la variété invariante V est de même dimension que le feuilletage F , le nombre j ci-dessus est nul. On a donc l’inclusion PpV ⊂ V ∩ P F p . Cela nous donne Corollaire 6.5. Soit F une distribution holomorphe singulière de dimension p de Pn admettant une variété analytique compacte invariante V de degré d et de dimension p, alors ρ Vp ≤ ρF p . d Bull Braz Math Soc, Vol. 37, N. 1, 2006 “main” — 2006/5/3 — 23:49 — page 46 — #18 46 ROGÉRIO S. MOL Exemple 6.6. Supposons que F soit un feuilletage de dimension 1 et de degré d0 de P2 admettant une courbe analytique invariante 0 de degré d. Remarquons que, dans ce cas, Sing(F ) est constitué de points isolés. On a F P10 ⊂ 0 ∩ P 1 . F Comme par ailleurs, Sing(0) ⊂ Sing(F ), il vient Sing(0) ⊂ P 1 . On conclut donc que F P10 ∪ Sing(0) ⊂ 0 ∩ P 1 . Par le théorème de Bézout, nous avons X F ρ10 + m q ≤ d ρ1 , q ∈ Sing (0) où m q désigne la multiplicité de q. On a la formule suivante (voir [Pi1]): X ρ10 = d(d − 1) − (μq + m q − 1), q ∈ Sing (0) F où μq est le nombre de Milnor de 0 en q ∈ Sing(0). Puisque ρ1 = d0 + 1, nous obtenons X (μq − 1) ≤ d(d0 + 1), d(d − 1) − q ∈ Sing (0) résultat prouvé par [So]. Dans le cas d’une courbe 0 avec singularités nodales, i.e. telle que μq = 1 pour tout point q ∈ Sing(0), nous avons d ≤ d0 + 2, inégalité obtenue par Cerveau et Lins Neto [CL]. References [BB] [BS] [BM] [Ca] P. Baum and R. Bott, Singularities of holomorphic foliations, J. Differential Geometry, 7 (1972), 279–342. J.-P. Brasselet and T. Suwa, Nash residues of singular holomorphic foliations, Asian J. Math., 4 (2000), 37–50. M. Brunella and L.G. Mendes, Bounding the degree of solutions to Pfaff equations, Publ. Mat., 44 (2000), 593–604. M. Carnicer, The Poincaré problem in the nondicritical case, Ann. of Math., 140 (1994), 289–294. Bull Braz Math Soc, Vol. 37, N. 1, 2006 “main” — 2006/5/3 — 23:49 — page 47 — #19 CLASSES POLAIRES 47 [CL] D. Cerveau and A. Lins Neto, Holomorphic foliations in P2 having an invariant algebraic curve, Ann. Institut Fourier 41 (4), 883–904. [Fu] [G] W. 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