gaston chaissac

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gaston chaissac
GASTON CHAISSAC
BIOGRAPHIE
Gaston Chaissac2 naît à Avallon dans l’Yonne, le 10 décembre 1910.
Il est le benjamin d’une fratrie de quatre enfants, de parents corréziens. Son père est cordonnier.
En 1916, il accompagne Georgette, sa sœur, qui prend des cours de dessins avec Melle
Guignepied, une châtelaine de Saint-Moré dans l’Yonne près d’Avallon.
En 1919, divorce de ses parents.Le jeune Chaissac demeure avec sa mère.
Sa scolarité est, comme il le dira lui-même, « courte et chétive ». L’école ne lui convient guère.
Sa santé se révèle fragile. Souvent malade, il développe peu à peu un style de vie frileux et
ascétique. On observe d’ailleurs que les personnages de ses tableaux — et même de ses
« totems » — ont un corps fréquemment atrophié, et que leur visage exprime parfois un sentiment
de souffrance.
À 13 ans, Chaissac quitte l’école. Apprend le métier de marmiton, puis travaille dans une
quincaillerie et chez un bourrelier.
En 1926, la famille Chaissac s'installe à Villapourçon (Nièvre).
En 1931, il est durement éprouvé par la mort de sa mère. Le mariage de sa sœur, qui quitte dès
lors la cellule familiale, constitue également un choc pour lui. Il mettra longtemps à surmonter ce
double traumatisme. Exerce le métier de cordonnier.
En 1932, à l’occasion d’une fête druidique au mont Beuvray, il est chargé de fabriquer les
déguisements. Outre son intérêt pour le druidisme, il se sent pour la première fois intégré
socialement.
PARIS ET LA TUBERCULOSE
En 1934, il tente de s’établir à Paris, où son frère Roger, devenu brigadier de police, lui ouvre une
échoppe de cordonnier rue Mouffetard et l'accueille chez lui rue Henri Barbusse. La grande ville,
avec l’animation grouillante de ses rues, lui plait, mais ne réussissant pas à gagner sa vie, il quitte
une première fois la capitale pour y revenir en 1937. Dans le même immeuble que les Chaisac
habite le peintre abstrait Otto Freundlich. Ce dernier et sa femme, qui est aussi peintre,
encouragent Chaissac à dessiner. Les premiers résultats de cette activité leur paraissent pleins
d’avenir. « Un maître nous est né » aurait alors dit Freundlich. Quoi qu’il en soit, ce dernier ne
cessera plus, jusqu’à sa mort en déportation (1957), d’aider et de conseiller Chaissac.
À l’automne 1937, Chaissac tombe gravement malade. Une tuberculose est diagnostiquée. Il est
envoyé au sanatorium de la Musse à Arnières-sur-Iton, dans l’Eure. Le traitement ne l’empêche
pas de continuer de peindre : en décembre1938 a lieu sa première exposition personnelle
à Paris. Albert Gleizes et Robert Delaunay s’intéressent vivement aux travaux qu’il y présente.
De 1939 à 1942, Chaissac achève de guérir au Sanatorium des Clairvivre en Dordogne, où il
deviendra chef d'atelier de la cordonnerie. C’est là que, à Noël 1940, il rencontre sa future
femme, Camille Guibert.
En 1942, à l’invitation de Gleizes, il part pour Saint-Rémy-de-Provence. Tout en travaillant chez un
bourrelier, il peint dans l’atelier de Gleizes grâce auquel il fait la connaissance d’André Lhote. Il se
marie à la fin de l’année et Camille accouche trois jours plus tard de leur unique enfant, Annie.
En 1943, Chaissac présente sa deuxième exposition à Paris, à la Maison des
Intellectuels. Raymond Queneau, amené par Jeanne Kosnick-Kloss (veuve deFreundlich), la voit
et l’apprécie. La même exposition est signalée — avec enthousiasme — à Jean Paulhan.
LA VENDEE
En 1943 la femme de Chaissac, qui est institutrice, est nommée à Boulogne en Vendée. Le couple
s’y installe pour cinq ans. Chaissac, désormais débarrassé du souci de sa survie, peut enfin se
consacrer entièrement à ses activités artistiques. En 1944, il participe au Salon des indépendants.
En juin 1945 commence une correspondance avec Paulhan qui séduit Jean Dubuffet ; ce dernier
lui écrit alors à son tour et se porte acquéreur de certaines de ses œuvres.
Son premier texte est publié : Oasis Fleuries dans la revue Pierre à Feu d’Aimé Maeght.
En 1947, nouvelle exposition personnelle à Paris, à la galerie Arc-en-ciel. La préface est
signée Dubuffet, où ce dernier compare l’art de Chaissac à celui des bédouins qui, dans le Sahara,
jouent de la flûte en se moquant de la civilisation.
En 1948, sa femme est nommée dans une autre commune vendéenne, Sainte-Florence-de-l’Oie.
Publication de sa première lettre dans les Cahiers de la Pléiade, aux éditions Gallimard.
Le couple y demeurera treize ans. Années difficiles pour le peintre qui, refusant de jouer le jeu du
parisianisme alors même qu’il aspire à être reconnu par ses pairs, rejeté par la majorité des
habitants de sa commune qui le prend pour un sorcier ou un fou, se trouve en proie à une terrible
solitude. Sa créativité s’en ressent et dans les années 1956-1958, il ne peint presque pas.
Cette solitude est pourtant rompue de loin en loin : visite d’Anatole Jakovsky en 1948 (qui publiera
un livre sur Chaissac peu après) et de Dubuffet, qui invite le peintre à participer à l’exposition d'art
brut de la galerie René Drouin ; visite du photographe Gilles Ehrmann en 1955 lequel,
enthousiasmé, revient en compagnie du poète surréaliste Benjamin Péret. En 1956, Chaissac
effectue un bref séjour dans la maison de Dubuffet à Vence. Après cette date, leurs rapports iront
en s’espaçant. La dernière lettre de Dubuffet à Chaissac citée dans Prospectus et tous écrits
suivants, date de 1961.
Après l’envoi d’un texte de Chaissac à la NRF en 1954, celle-ci publiera régulièrement
de 1957 à 1960 ses « Chroniques de l’Oie », articles humoristiques entrecoupés de réflexions
poétiques.
Ce n’est qu’en 1961, avec l’installation du couple à Vix (Vendée), que Chaissac commence à sortir
de son isolement. Cette même année il reçoit la visite d’Iris Clert qui lui organise une exposition
personnelle dans sa galerie, celle-là même d’Yves Klein et des nouveaux réalistes…
En 1962 sort le livre de Gilles Ehrmann, Les Inspirés et leurs demeures, dans lequel Chaissac se
trouve en compagnie d’autres autodidactes. Il occupe toutefois une place prépondérante dans le
livre grâce aux textes d’André Breton et de Benjamin Péret. Dans les mois qui suivent, l’Allemagne,
l’Italie, les États-Unis s’intéressent soudain à lui… Mais hélas, il est trop tard. Miné par l’anxiété,
les difficultés matérielles, les ennuis de santé, Chaissac meurt à 54 ans d’une embolie pulmonaire
à l’hôpital de La Roche-sur-Yon.
CHAISSAC ET L’ART BRUT
Les relations entre Gaston Chaissac et Jean Dubuffet ont été pour le moins tumultueuses, mais
hautement symptomatiques de l’histoire et de l’évolution de l’art brut3.
Chaissac est très tôt intégré à la collection de Dubuffet, et exposé dès 1948 avec les autres
créateurs du Foyer de l’Art brut (qui deviendra la Compagnie de l’art brut, puis la Collection de l'art
brut). Mais en 1963 est créée la seconde Compagnie de l’art brut, au moment du retour de la
collection d’Amérique. Dubuffet doit alors revoir les fondements idéologiques qui définissent l’art
brut, ce qui aboutit à la création d’une « Collection annexe » (qui prendra le nom définitif de Neuve
Invention en 1982) dans laquelle il place Chaissac :
« Le silence et le secret restent pour Jean Dubuffet les fondements inhérents à la véritable
production artistique ; le créateur autodidacte œuvre pour son propre usage, sans aspirer à la
communication ni à la diffusion de ses travaux. Dubuffet pousse alors sa théorie socio-esthétique
à ses limites et dénonce la contradiction existant entre la production d’art et la reconnaissance
sociale. »
« Vous ne pouvez pas être un créateur et être salué par le public de ce titre. […] Il faut choisir entre
faire de l’art et être tenu pour un artiste. L’un exclut l’autre. »
— Lettre à Pierre Carbonel
Dubuffet retire alors quelques créateurs du groupe de l’art brut et transfère leurs productions dans
les collections annexes – tel est le cas pour Gaston Chaissac, Philippe Dereux et Ignacio CarlesTolra.
Plus que tout autre, le transfert de Chaissac a été et reste un sujet de polémique. Nombreux sont
ceux qui ont accusé Dubuffet de l’avoir enrôlé dans l’art brut, de l’avoir pillé et plagié pour
finalement le renier en le reléguant dans les collections annexes. Dans un premier temps, Dubuffet
a vu en Chaissac l’homme du commun créateur, cette figure essentielle de sa conception
philosophique et artistique. Puis il a révisé son jugement, tenant compte non seulement du bagage
culturel de Chaissac mais aussi de sa connaissance et de ses liens toujours plus importants avec
la vie parisienne. Chaissac est « trop informé de ce que font les artistes professionnels »4
CONSECRATION
Après sa mort, Gaston Chaissac sera finalement intégré dans l'histoire de l’art moderne5
Des institutions muséales lui ont accordé des rétrospectives :
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Musée des beaux-arts de Nantes - 1965 & 1998
Musée des beaux-arts de Lyon - 1968
Musée Sainte-Croix des Sables-d'Olonne - 1969-1972-1978-1993
Musée national d'Art moderne - 1973
Musée des beaux-arts de La Rochelle - 1976
Musée Unterlinden, Colmar - 1985
Musée des beaux-arts d'Alençon - 1985
Musée des beaux-arts de Carcassonne - 1989
Palais des beaux-arts de Charleroi (Belgique) - 1999
Musée Fabre de Montpellier - 1999
Galerie nationale du Jeu de Paume - 2000
Musée de Grenoble - 2009
Des artistes reconnus comme Georg Baselitz ou Robert Combas revendiquent son influence
directe.
La bibliothèque-médiathèque de la ville de ses origines, Avallon, porte son nom depuis le 19
octobre 2001.
Sa fille, Annie Raison-Chaissac, devenue agricultrice en Vendée, s'est investie toute sa vie très
activement pour la reconnaissance de l'œuvre de son père. Et, de nos jours, sa petite-fille, Nadia
Raison, sociologue, prend la relève…
EN PERMANENCE :
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On peut voir un ensemble significatif de peintures de Gaston Chaissac au musée de l'Abbaye
Sainte-Croix des Sables-d'Olonne, qui possède l'un des fonds les plus importants du peintre
(dû à une donation de sa veuve, et entièrement restauré en 2004).
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Présentation très originale et libre de la vie et de l'œuvre de Gaston Chaissac à la Boîte à
sucre bleue à Sainte-Florence (Vendée), espace scénographique avec près d'une dizaine
d'ateliers pédagogiques à destination du public scolaire.
COTE
Une peinture datée de 1961-1962, intitulée Femme de Vix, a été vendue pour 90 000 euros
à Cologne6.]
BIBLIOGRAPHIE]
ECRITS DE CHAISSAC
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Hippobosque au Bocage, Paris, Gallimard, 1951 - Réédition 1995.
Très Amicalement Vôtre, Belgique, La Louvière, 1965 - Réédition 1996.
Le Laisser-Aller des Éliminés – Lettres à l’abbé Coutant, Bassac, Plein-Chant, 1979
Trente et une Lettres à Pierre Boujut, Bassac, Plein-Chant, 1979
Je cherche mon éditeur, lettres, contes, documents, Rougerie, Mortemart, 1998
Correspondances, Les Sables d’olonne, Musée de l’Abbaye Sainte-Croix, 2004
ODE au Saint Frusquin raté et une lino, dans le numéro 1 de DIRE, revue littéraire , 1962
Lettres 1944-1963 à Jean Paulhan, Edition établie, introduite et annotée par Dominique Brunet
et Josette-Yolande Rasle, coll. "Correspondances de Jean Paulhan", Editions Claire Paulhan,
2013.
MONOGRAPHIE
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Dominique Allan-Michaud, Gaston Chaissac, puzzle pour un homme seul, Paris,
Gallimard, 1974 - Réédition en 1992.
Henri-Claude Cousseau, Gaston Chaissac « cordonnier in partibus » ; Œuvre graphique,
Paris, Jacques Damase, 1981
(en) Barbara Nathan-Neher, Chaissac, Londres, Thames and Hudson, 1987
Johannes Gachnang et Françoise Brütsch, Gaston Chaissac, Neuchâtel, Ides et
Calendes, 1988
Anatole Jakovsky, Gaston Chaissac, l’homme-orchestre, Paris, Les Presses Littéraires de
France, 1952 - Réédition à L’Echoppe, Caen, 1992.
Collectif, Gaston Chaissac, Les Sables d’Olonne, Musée de l’Abbaye Sainte-Croix, 1993 Catalogue d’exposition.
Collectif, Gaston Chaissac, Paris, Réunion des Musées Nationaux, 1998 - Catalogue
d’exposition.
Serge Fauchereau, Gaston Chaissac : environs et apartés, Paris, Somogy, 1998
Thomas Le Guillou, Gaston Chaissac, Neuchâtel, Ides et Calendes, 2000
Collectif, Chaissac, Paris, Galerie Nationale du Jeu de Paume, Réunion des Musées
Nationaux, 2000 - Catalogue d’exposition.
Eric Chevillard, D’Attaque, éditions Argol, collection Entre-Deux, 2005.
Collectif, Gaston Chaissac, homme de lettres, Paris, École nationale supérieure des beauxarts & Musée de la Poste, 2006.

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