apport du travail cutane chez une patiente brûlee en phase de

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apport du travail cutane chez une patiente brûlee en phase de
INSTITUT DE FORMATION EN MASSO-KINESITHERAPIE DE
RENNES
APPORT DU TRAVAIL CUTANE CHEZ UNE
PATIENTE BRÛLEE EN PHASE DE
REMODELAGE CICATRICIEL
Marie HEMOND
2011
Selon le code de la propriété intellectuelle, toute reproduction intégrale ou
partielle faite sans le consentement de l'auteur est illégale.
Ministère de la Santé et des Sports
Région Bretagne
Institut de formation en Masso-kinésithérapie de Rennes
APPORT DU TRAVAIL CUTANE CHEZ UNE
PATIENTE BRÛLEE EN PHASE DE
REMODELAGE CICATRICIEL
Travail personnel présenté par :
Marie HEMOND
En vue de l’obtention du diplôme d’Etat de Masso-kinésithérapie
Année 2011
Sommaire
I.
Introduction ....................................................................................................................... 1
a) La peau ............................................................................................................................ 1
b) Epidémiologie des brûlures ............................................................................................. 2
c)
La brûlure ........................................................................................................................ 2
d) Concept H.A.R.A ............................................................................................................. 3
e)
Problématique ................................................................................................................. 4
II. Méthode ............................................................................................................................. 5
a) Bilan initial ...................................................................................................................... 5
1. Présentation de la patiente ........................................................................................... 5
2. Histoire De La Maladie ............................................................................................... 5
3. Déficiences de structure............................................................................................... 6
4. Déficiences de fonction ............................................................................................... 6
5. Limitation d’activité .................................................................................................. 11
6. Restriction de participation ........................................................................................ 11
7. Objectif de Mme L. ................................................................................................... 11
b) Diagnostic kinésithérapique .......................................................................................... 12
c)
Rééducation ................................................................................................................... 12
1. Principes .................................................................................................................... 12
2. Objectifs de rééducation ............................................................................................ 12
3. Prise en charge ........................................................................................................... 13
d) Bilan final ...................................................................................................................... 16
1. Déficiences de fonction ............................................................................................. 16
2. Limitations d’activité ................................................................................................. 19
III. Discussion......................................................................................................................... 20
1.
2.
Analyse des résultats de la prise en charge ................................................................ 20
Analyse de la prise en charge .................................................................................... 20
e) Conseils de règles de vie hygiéno-diététiques chez le brûlé : Vivre avec sa brûlure au
quotidien ............................................................................................................................... 24
1. Le prurit ..................................................................................................................... 24
2. Le soleil ..................................................................................................................... 24
3. Soins quotidiens ......................................................................................................... 25
4. Cure thermale ............................................................................................................ 25
IV. Conclusion ....................................................................................................................... 26
V. Bibliographie
Résumé
Ce mémoire de fin d’étude traite la prise en charge des brûlures en phase de
maturation cicatricielle, à la suite d’un accident domestique.
A travers l’étude d’une patiente adulte, présentant des cicatrices de brûlures et des
cicatrices de prise de greffes, à cinq mois post-accident, il a été mis en place différentes
techniques de travail du nouveau tissu cutané qui ont permis de récupérer en partie des
amplitudes articulaires au niveau des membres supérieurs. Ce travail cutané permet également
de récupérer souplesse et élasticité de cette nouvelle enveloppe cutanée.
Mots clés : brûlure, bride rétractile, tissu cicatriciel
Key words : burn, post burn contracture, scar tissue
I. Introduction
a) La peau
La peau est l’enveloppe du corps humain. C’est l’interface entre le mode extérieur et
l’être humain.
Elle est constituée de trois parties [1] :
-
L’épiderme qui est la partie superficielle et la plus mince. Il se divise en quatre
couches : basale, épineuse, granuleuse et couche cornée (citées de la plus profond à la plus
superficielle).
-
Le derme situé en dessous de l’épiderme. Il est formé principalement de tissu
conjonctif (fibres de collagène et élastine). Le derme contient les vaisseaux sanguins, les
nerfs, les glandes et follicules pileux.
-
L’hypoderme qui contient les fascias musculaires, le tissu adipeux. C’est le support
nutritif de la peau.
Figure 1 : structure de la peau
Dans le cas où la brûlure atteint la couche basale ou le derme, il y a nécessité de
greffes de peau. On observe une destruction des cellules germinatives contenues dans la
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couche basale de l’épiderme. Il n’y a donc pas de possibilité de régénération tissulaire. Un
remaniement de la peau ainsi que de ses cellules est nécessaire.
b) Epidémiologie des brûlures
En France, on dénombre 400 000 à 500 000 brûlures par an et dont 2 500 nécessitent
une hospitalisation en centre de grands brûlés. On évalue aussi le nombre de décès par an à
1000 [2].
Les causes de la brûlure sont multiples, mais les accidents domestiques (20%), les
accidents de travail et de la voie publique (70%) prédominent. Les brûlures thermiques
constituent la majeure partie des brûlures.
c) La brûlure
« La brûlure est une lésion causée par une chaleur excessive, électricité, radioactivité
ou substances corrosives qui dénaturent les protéines contenues dans les cellules cutanées. »
[1]
Les brûlures sont classées selon leur degré de gravité [3] :
-
Premier degré : atteinte unique de l’épiderme, ne touchant que la première couche.
Cette brûlure correspond au coup de soleil, avec présence de rougeur, chaleur et douleur. Il
n’apparaît pas phlyctènes. La cicatrisation se fait en trois à cinq jours.
-
Deuxième degré superficiel : il apparaît des phlyctènes remplies de liquide tissulaire,
qui séparent le tissu sain du tissu lésé. La membrane basale est épargnée. La cicatrisation se
fait en six à quinze jours.
-
Deuxième degré intermédiaire : la brûlure atteint en certains points la membrane
basale. Il apparaît des phlyctènes emplies de liquide tissulaire et de sang.
-
Deuxième degré profond : la lésion est épidermique. Il y a une atteinte de toute la
membrane basale. La greffe n’est pas toujours réalisée. En effet, s’il n’y a pas de formation
d’infection, la greffe n’est pas nécessaire. La cicatrisation est longue, elle peut durer jusqu’à
un mois, et laisse toujours des traces.
-
Troisième degré : c’est une destruction totale du derme et de l’épiderme, voire même
des tissus sous cutané. La régénération spontanée est inexistante. Il est alors effectué une
greffe qui favorise le bourgeonnement cellulaire et donc la cicatrisation.
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La gravité de la brûlure dépend de l’étendue corporelle (règle des 9% de Wallace), de
la profondeur et de l’état général du patient. De plus, des agents vulnérants viennent accroitre
la gravité de la brûlure. Les liquides gras augmentent le temps de contact avec la peau. Dans
les cas de brûlures électriques, il existe un point d’entrée et de sortie du courant où il peut
siéger des brûlures du deuxième ou troisième degré, mais les organes présents sur le trajet du
courant électrique sont également touchés.
La cicatrisation de la brûlure peut se faire seule, elle doit être inférieure à une durée de
vingt et un jours, sinon il existe un remaniement de la peau. La cicatrisation se fait en deux
phases :
-
La cicatrisation apparente, que l’on obtient en deux à trois semaines
-
La guérison finale qui aboutit sur le patchwork cicatriciel, qui met dix à vingt quatre
mois. C’est pourquoi la cicatrice d’une brûlure évolue durant dix-huit à vingt-quatre mois.
La régénération dermique se fait par différents mécanismes inflammatoires qui
aboutissent à la formation d’hypertrophies, adhérences, rétractions et attractions (H.A.R.A).
Ceci aboutissant à de nombreuses déformations cutanées, orthopédiques et à une atteinte
psychique. [4]
Lors d’une brûlure le derme se remanie, devient fibreux, plus épais, moins long et est
donc soumis plus rapidement à une tension.
d) Concept H.A.R.A
L’Hypertrophie est une augmentation en épaisseur de la couche dermique
superficielle, avec une synthèse de tissu conjonctif excessive, anarchique. La synthèse est
maximale à quatre-six mois post-brûlure. A la différence de la chéloïde, durant ces dix-huit à
vingt-quatre mois post-brûlure, l’hypertrophie est réversible.
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Figure 2 : Evolution dans le temps d’une cicatrice hypertrophique [5]
Les Adhérences sont dues à une absence de mobilité loco-régionale. Les fibroses sousdermiques envahissent les zones de glissement. La peau ou la greffe vient alors adhérer aux
structures sous-cutanées. Ce qui aboutit à une restriction de mobilité, un ancrage d’où il se
forme de nouvelles lignes de force.
La cicatrice de brûlure spontanée ou la greffe de peau est un tissu trop court. Ce qui
donne des Rétractions. On voit alors apparaître des brides et placards rétractiles qui limitent
les amplitudes articulaires.
Lorsque la peau cicatricielle se rétracte, la mise en sous tension de la peau saine à
distance crée une Attraction.
e) Problématique
En quoi le travail cutané du tissu cicatriciel de brûlure est-il important même
après installation de brides rétractiles limitant les amplitudes fonctionnelles ?
A travers l’étude du cas clinique d’une patiente des brides rétractiles axillaires à la
suite de brûlure, nous discuterons de l’élaboration du plan thérapeutique et de l’éducation du
patient à l’auto gestion de ses soins et l’impact de sa brûlure au quotidien.
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II. Méthode
a) Bilan initial
1. Présentation de la patiente
Mme L., âgée de 59 ans, est transférée du Gabon au centre de Brûlés à l’hôpital
d’instruction des armées Percy, le 28 novembre 2009, à la suite d’un feu de domicile survenu
le 26 novembre 2009. Elle est entrée au centre de rééducation du Grand Feu à Niort le 25
mars 2010.
Elle était secrétaire à l’ambassade de France, à Libreville, capitale du Gabon.
Elle est divorcée et vivait seule à Libreville. Son ex-mari vit à Libreville mais son fils
âgé de 24 ans est retourné vivre en France. Sa maison était de plain-pied et située en centre
ville. Depuis son rapatriement en France, elle n’est pas retournée au Gabon, et passe ses
week-ends de sortie chez son frère, qui vit à la Roche-sur-Yon. Ses parents résident dans le
sud de la France.
2. Histoire De La Maladie
Cet accident est survenu à son domicile par la mise en feu de bouteilles de gaz qui
présentaient des fuites, dans la cuisine.
Elle souhaitait réinstaller des petites bouteilles de gaz pour sa gazinière. Mme L.
n’ayant pas réussi à installer la première, elle a mis en service une seconde bouteille de gaz.
Lorsqu’elle a voulu allumer sa gazinière avec une allumette, le gaz de la première bouteille
qui s’échappait a pris feu.
Elle est sortie une première fois de la maison sans embuche, mais Mme L. est repartie
chercher son chien, resté à l’intérieur de la maison. Elle s’est alors retrouvée encerclée par les
flammes dans sa chambre. Il lui était impossible de sortir par la fenêtre du fait de la présence
de barreaux aux fenêtres.
Des adolescents l’ont vu, encerclée par les flammes, et ont réussi à l’extirper de la maison en
passant par le conduit de la climatisation.
Mme L. a été hospitalisée durant quatre mois, à Percy, où elle a subi dix interventions,
a été trachéotomisée pendant trois mois, alitée durant deux mois. Les pansements étaient faits
tous les jours puis tous les trois jours sous anesthésie générale.
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Durant ces interventions, elle a également été, de multiples fois, greffée et la dernière
greffe date du 24 février 2010, par un patch dans le bas du dos.
3. Déficiences de structure
La cicatrisation de la brûlure entraine une modification de la structure de la peau.
4. Déficiences de fonction
 Fonction douloureuse
Mme L. ne ressent pas de douleurs spontanées.
Elle présente des douleurs, face antérieure des moignons des épaules lors des massages
cicatriciels de cette zone.
Elle ressent également des douleurs dans les genoux lors de la montée et la descente
des escaliers.
 Fonction cutané, trophique, vasculaire
Mme L. porte un haut et un pantalon compressif le jour et y ajoute des gants
compressifs la nuit.
Les brûlures s’étendent sur 60% de la surface corporelle et la plupart sont du 3 ème
degré.
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Figure 3 : Cartographie des brûlures de face
Figure 4 : Cartographie
des brûlures de dos
Brûlure au troisième degré
Brûlure au deuxième degré intermédiaire
Figure 5 : Greffes et prises de greffe de face
Figure 6 : Greffes et prises de
greffe de dos
Greffe
Prise de greffe
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L’évaluation des cicatrices a été réalisée selon l’échelle d’évaluation C.D.M.T. [6]
Couleur
La couleur de la peau est rose au centre du dos, ce qui correspond à une cotation de
2/5. Au niveau bords latéraux du dos, la peau est de couleur violine, donc cotés à 4/5. Cette
zone correspond à la jonction des greffes.
Les membres supérieurs et inférieurs sont de couleur nacrée, donc une cotation de 0/5.
Densité
Elle se teste avec un pli de peau.
Dans le dos, le pli de peau est souple, se laissant déprimer, mince et haut, cotation de
1/5.
Au niveau des mains, le pli de peau est comparable à la peau saine, elle est donc cotée
à 0/5.
Au niveau axillaire droit et gauche, le pli de peau est impossible, la cotation est de 5/5.
Au niveau du pied gauche, le pli de peau est dur, très épais et peu élevé, il est coté à
4/5.
Mobilité
Sur la face dorsale du pied droit, la cotation est de 2/5 et pour le pied gauche, la
cotation est de 3/5.
Au niveau des mains, la mobilité est normale, donc cotée à 5/5 sauf au niveau de la
face dorsale de la main droite, où il existe une adhérence avec le tendon de l’extenseur des
doigts. Au niveau de la main gauche, il existe une adhérence avec la tête du deuxième
métacarpien, en face dorsale. La cotation est de 0/5.
Au niveau de la face antérieure des moignons des épaules, la mobilité est réduite sur
deux axes, on cote alors à 2/5.
Sur la partie postéro-latérale supérieure du dos, la mobilité est réduite sur trois axes, la
cotation est de 3/5. Pour le reste du dos, la mobilité est normale, la cotation est donc de 0/5.
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Le coude droit présente une adhérence en regard de l’olécrâne, la mobilisation est
impossible, la cotation est de 0/5.
Tension
Au niveau des mains, pieds et du dos, on note une absence de tension. La cotation est
de 0/5.
La tension est de 2/5 à la face postéro-latérale droite et gauche du cou.
Au niveau du creux axillaire droit, il existe trois brides rétractiles, en partie antérieure,
postérieure et au milieu du creux. Dans le cas de la bride située au milieu du creux axillaire,
on note un phénomène d’échappement qui n’est pas visible au repos, c’est pourquoi la tension
est cotée à 4/5. Pour les deux autres brides axillaires droites et les brides axillaires antérieures
et postérieures du creux axillaire gauche, la cotation est de 5/5.
Les deux coudes présentent des brides rétractiles. Le P.M.T (point maximal de
tension) est localisé à une plage réduite, la cotation est de 3/5.
Test du prurit
Mme L. présente un prurit localisé au dos.
Elle présente deux plaies en cours de cicatrisation dans le dos.
Il existe un œdème localisé aux mains et aux pieds. La périmétrie est réalisée par un 8
qui passe par la tête des métacarpiens, la styloïde radiale et la tête ulnaire pour les mains, et
un 8 passant par la tête des métatarsiens et les malléoles pour le pied.
Œdème
Droite
Gauche
Pied
64 cm
62 cm
Main
44 cm
44 cm
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 Fonction articulaire
Cou
Flexion
Distance menton-manubrium
0 cm
Extension
sternal
17 cm
Rotation droite
Distance menton-acromion
11,5 cm
Rotation gauche
Inclinaison droite
Distance tragus de l’orielle-
12 cm
Inclinaison gauche
acromion
12 cm
Membre supérieur
Epaule
Coude
Hanche
Membre inférieur
11,5cm
Genou
Cheville
Droite
Gauche
Abduction
80
90
Flexion
80
90
Extension
10
10
Rotation latérale
Main-occiput
Main-nuque
Rotation médiale
Main-L5
Main-L1
Flexion
130
130
Extension
- 15
- 20
Flexion
85
85
Extension
0
0
Flexion
80
80
Extension
0
0
Flexion
0
- 5
Extension
15
15
 Fonction sensitive
La patiente présente une anesthésie totale à la face médiale du pied, ainsi que de
l’hallux gauche. La sensibilité profonde et la sensibilité superficielle sont atteintes.
Il existe une hypersensibilité algique sur la face antérieure des moignons de l’épaule
droite et de l’épaule gauche, ainsi qu’en regard des pectoraux.
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 Fonction motrice
Le LEH et LEO droits sont côtés à 1/5 sur le testing de Daniels et Worthington.
Les autres muscles sont côtés à 3/5. On observe une amyotrophie globale.
 Fonction psychologique
Mme L. n’a pas eu suivi psychologique, même lors de son hospitalisation à Percy.
Lors de son arrivée au centre du grand Feu, un suivi lui a été proposé mais elle a refusé.
5. Limitation d’activité
Mme L. a un périmètre de marche de 1 km. Elle se déplace sans aide technique.
Elle s’habille seule, réussit à boutonner ses vêtements. Elle ne met pas ses chaussures
toute seule, et ne fait pas ses lacets.
Elle est autonome dans ses transferts. La montée et descente des escaliers restent
difficiles. La montée des escaliers se fait marche par marche, Mme L. a tendance à se mettre
en biais pour faciliter le passage des membres inférieurs. La descente se fait également
marche par marche avec une chute du pied et elle ne contrôle pas les derniers centimètres de
la descente.
Elle travaille sa minutie et sa dextérité en ergothérapie en réalisant des collages de
serviettes papiers et des tableaux en coquillages.
6. Restriction de participation
Mme L. est en hospitalisation complète depuis son accident domestique. Elle part en
week-end chez son frère, qui habite à côté de la Roche-sur-Yon.
Il lui est impossible de conduire mais elle marche sans aide technique.
7. Objectif de Mme L.
Elle souhaite se coiffer seule et réussir à être moins fatiguée lors de ses sorties le
week-end.
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b) Diagnostic kinésithérapique
La déficience de structure cutanée, avec une peau cicatricielle rétractile, entraine des
limitations de la fonction douloureuse, avec une hyperalgie en regard des moignons des
épaules. La fonction cutanée est atteinte avec la présence de brides rétractiles au niveau
axillaire, des coudes et du cou, responsables d’une importante limitation d’amplitude
articulaire dans ces différentes zones. On note une amyotrophie généralisée responsable d’un
déconditionnement à l’effort. De plus l’atteinte des releveurs du pied entraine une altération
de la marche, une diminution du périmètre de marche et une fatigabilité qui se fait ressentir
rapidement.
c) Rééducation
1. Principes
La prise en charge d’un grand brulé est une thérapie douce, à long terme, où le suivi et
la surveillance sont primordiaux.
Le respect de la douleur d’un grand brûlé ainsi que de son vécu douloureux sont très
importants.
Il ne faut pas mettre en tension une peau fraichement cicatrisée, sinon, il peut se
former de nouvelles lésions. L’étirement de la bride rétractile se fait jusqu’au blanchiment de
la peau, au risque de provoquer une réaction inflammatoire de défense, si l’étirement est trop
intense.
Le travail cutané se fait sans glissement des doigts du masseur kinésithérapeute sur la
peau du brûlé, au risque d’aggraver l’inflammation ou de provoquer des frictions et donc créer
de nouvelles lésions cutanées d’un tissu cicatriciel fragile.
2. Objectifs de rééducation
Il faut éviter la déformation ostéo-articulaire due aux différents phénomènes
cicatriciels qui tendent à diminuer le crédit de longueur cutané.
Le gain d’amplitude dans les trois plans de l’espace des épaules est le premier objectif
fonctionnel pour l’autonomie de Mme L., pour cela il faut réussir à assouplir les brides
rétractiles et réussir à lever les adhérences. On tente d’assouplir la peau cicatricielle rétractile,
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de lever les adhérences entre la peau et le tissu sous-jacent. Il faut lutter d’hypertrophie
cicatricielle.
En parallèle, il est important de lui augmenter son périmètre de marche avec une
réadaptation à l’effort adaptée.
Mme L. doit gagner en endurance lors de ses efforts.
3. Prise en charge
Mme L. est vue deux fois une heure par jour. Le matin est donc consacré au travail des
cicatrices, adhérences et tissu cutané, l’après-midi, au reconditionnement à l’effort.
Le lundi, mercredi et vendredi, la séance du matin est exécutée en chambre. Il est
réalisé un bain hydratant avec massage des cicatrices.
 Travail du tissu cicatriciel
Lutte contre l’hypertrophie
La cicatrice de brûlure évolue sur vingt-quatre mois, avec la présence d’un pic
d’inflammation au sixième mois. De ce fait, la cicatrice évolue très rapidement durant cette
période, d’où l’importance au port des vêtements compressifs.
La patiente porte jour et nuit un vêtement compressif. Mme L. présente également des
œdèmes aux mains, mais elle ne supporte pas le port des gants compressifs, c’est pourquoi
elle ne les porte que la nuit. Le week-end, elle porte une compression en Tubigrip® qui lui
permet d’être plus à son aise, mais qui permet malgré tout une compression.
Massage assouplissant de la peau
Ce massage est réalisé en chambre, le lundi, mercredi et vendredi, au niveau du dos,
épaules, coudes et face dorsale des pieds. Lorsque le massage est terminé, on réalise un bain
hydratant avec du Lipikar® sur la totalité du dos, membres supérieurs et inférieurs.
C’est un massage de type dermo-épidermique. On réalise la technique du pincer rouler
d’un pli de peau. Le pli de peau se fait entre l’index et le pouce de chaque main, puis il est
étiré et mobilisé en S.
On réalise également la manœuvre d’étirement orthodermiques de Morice en étoile
pour assouplir le tissu cicatriciel.
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On utilise une technique instrumentale basée sur le LPG® qui est un appareil de
vacuothérapie et engendre une dépressurisation de la zone à traiter. Pour assouplir la peau, il
faut utiliser un embout présentant deux roulettes, qui permettent le déplacement sur la peau
sans créer de conflit, ni de frictions. Suivant la zone à traiter et l’épaisseur de la peau, la
dépression exercée est différente. Pour les pieds, où la peau est épaisse et ne relève que d’une
prise de greffe, la dépression est élevée (7/7). Au contraire, au niveau des avants bras et du
dos, où la peau est mince, fragile, la dépression est très faible (1/7)
Figure 6 : Différents embouts de vacuothérapie
Lutte contre les adhérences
Les adhérences au niveau de la face dorsale des mains et des pieds sont travaillées
manuellement lors des bains hydratants. Lors des séances sur le plateau technique, elles sont
travaillées d’abord manuellement puis instrumentalement, avec le LPG®. Pour les zones
d’adhérences, l’embout utilisé lors de la vacuothérapie est circulaire et n’est pas déplacé lors
de la dépression. Il permet une action ciblée sur les points d’ancrage.
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Le travail manuel est différent des mains aux pieds. Sur les mains, l’action est
superficielle et plus ciblée. On utilise la manœuvre de Jacquet Leroy. Le pli de peau est
réalisé entre le pouce et l’index de la main, puis on réalise une torsion de ce pli de peau.
Au niveau des pieds, la mobilisation est plus profonde. On veut atteindre le tissu sous
dermique et dermique profond. On réalise alors une forte pression sur la zone, puis on exécute
des micros mouvements circulaires, transversaux et longitudinaux pour lever les adhérences.
Les adhérences sont quasiment impossibles à travailler manuellement. J’ai alors
préféré travailler avec la vacuothérapie. D’abord on crée une dépression sur la zone
d’adhérence puis on réalise une torsion de cette zone. Il est possible de travailler la zone
d’adhérence en torsion ou alors en mouvement longitudinal et transversal.
Les adhérences créant un point d’ancrage aux brides, sont travaillées manuellement,
aussi bien pour les brides axillaires, des coudes et du cou, du fait de la fragilité de la peau et
du ressenti douloureux de la patiente.
Lutte contre les rétractions
On tente d’augmenter le crédit de longueur de la peau du brûlé. La mise en tension de
la bride est longue, lente et progressive. Lorsque la bride devient blanche, on faut arrêter
l’étirement et réaliser un temps de posture. Le blanchiment de la bride traduit l’hypoxie
cutanée et donc limite la prolifération des fibres de collagène ; qui ont une répartition
anarchique. Chez Mme L. cette technique est utilisée pour les brides axillaires et celles de
coudes.
Pour les brides axillaires, il est réalisé différentes postures. La patiente est installée en
décubitus, on réalise alors une abduction d’épaule jusqu’au blanchiment des brides, puis la
posture était maintenue entre cinq et dix minutes. L’épaule est ensuite placée en rotation
latérale. On place l’épaule en capacité cutanée maximale.
De plus, il faut exercer un troisième point d’appui au niveau de la bride. Les zones axillaires
et du coude sont des zones concaves et la bride prend la tangente lors du placement en
position cutanée maximale et donc l’étirement devient inefficace. Ce troisième point d’appui
permet d’étirer la bride au maximum et de récupérer des amplitudes fonctionnelles.
Les brides des coudes sont étirées en plaçant le coude en extension et supination. Pour
augmenter l’effet rotatoire de la posture, on y ajoute une rotation latérale d’épaule.
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 Reconditionnement à l’effort
La patiente réalise des exercices sur vélo, en décharge, pour limiter les douleurs de
genoux. Mme L. est rapidement fatigable donc les exercices de vélo dure cinq minutes au
début puis quinze minutes à la fin du stage.
Les exercices sur vélo sont réalisés en pyramide, avec une puissance de départ de cinq
watts. Il y a quatre paliers, durant cinquante secondes chacun au début de la prise en charge.
Toutes les cinquante secondes, la puissance requise augmente de cinq watts. La puissance
maximale demandée est de vingt watts. Selon son ressenti, la patiente a la possibilité de
réduire la puissance à fournir. A la fin de la prise en charge de Mme L., la puissance de départ
était toujours de cinq watts, mais elle n’avait plus besoin de réduire la puissance lors de
l’effort maximal. La durée de l’exercice était passée de cinq à quinze minutes. De ce fait, la
durée des paliers était passée de cinquante secondes à une minute trente secondes.
Pour éviter le risque de chute, Mme L. réalise des exercices en extérieur sur différents
plans et textures. On travaille la phase propulsive de la marche et le renforcement des triceps
suraux avec une marche dans le sable.
La marche sur galets permet de travailler la proprioception des chevilles et les
réactions posturales qui s’en suivent.
L’enjambement d’obstacles permet de travailler la hauteur du pas et donc la
proprioception du genou, le placement du pied dans l’espace.
La marche sur plan incliné en montée et descente permet de travailler les releveurs du
pied.
Pour compléter le travail sur vélo d’endurance, on y associe des montées et descente
d’escaliers.
d) Bilan final
1. Déficiences de fonction
 Fonction douloureuse
Les douleurs sont identiques. Elle présente par contre une douleur au niveau du genou droit en
position genou fléchi prolongée, cotée à 1/10 à l’EVA et une douleur au niveau du coude droit
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cotée à 2/10. Ces douleurs sont en rapport avec la chute de son fauteuil, survenue une semaine
auparavant.
 Fonction cutanée, trophique, vasculaire
Le port des vêtements compressifs est systématique.
L’évaluation des cicatrices a été réalisée selon l’échelle d’évaluation C.D.M.T. [6]
Couleur
La couleur de la peau du dos s’unifie et devient rose, cotation de 2/5
Densité
Il n’y a pas eu de progression de la densité du pli de peau au niveau des creux
axillaires droit et gauche, la cotation reste de 5/5.
La peau du pied gauche s’est assouplie, la cotation est de 3/5.
Mobilité
Les adhérences persistent au niveau du pied gauche (3/5), au niveau de la tête du
deuxième métacarpien et du tendon de l’extenseur des doigts (0/5). La face antérieure des
moignons est difficilement mobilisable du fait de la douleur ressentie par la patiente, il n’y a
pas eu d’évolution sur cette zone.
Par contre, on note une amélioration de la mobilité de peau du pied droit, la cotation
est de 1/5.
Tension
La tension de la peau est toujours de 2/5, malgré tout, on peut noter une diminution de
cette tension.
Il n’ ya pas eu de progression au niveau des brides des creux axillaires.
Test du prurit
Le prurit du dos est moins intense.
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Les deux plaies présentent dans le dos ont fini de cicatriser mais suite à sa chute Mme
L. présente deux nouvelles plaies : en face antérieure de la jambe gauche et une autre au
niveau du coude droit.
L’œdème au niveau des pieds et des mains persiste.
Droite
Gauche
Pied
63 cm
62 cm
Main
43 cm
44 cm
 Fonction articulaire
Cou
Flexion
Distance menton-manubrium
0 cm
Extension
sternal
19 cm
Rotation droite
Distance menton-acromion
10 cm
Rotation gauche
9 cm
Inclinaison droite
Distance tragus de l’orielle-
10 cm
Inclinaison gauche
acromion
9 cm
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Membre supérieur
Epaule
Coude
Membre inférieur
Hanche
Genou
Cheville
Droite
Gauche
Abduction
90
100
Flexion
90
90
Extension
10
10
Rotation latérale
Main-nuque
Main-nuque
Rotation médiale
Main-L1
Main-T10
Flexion
135
140
Extension
- 15
- 15
Flexion
85
85
Extension
0
0
Flexion
90
90
Extension
0
0
Flexion
5
5
Extension
30
30
 Bilan sensitif
On ne note aucun changement au niveau sensitif.
 Fonction motrice
Le LEH et LEO droits sont côtés à 1/5 sur le testing de Daniels et Worthington.
Les autres muscles sont côtés à 4/5. On observe une amyotrophie globale.
2. Limitations d’activité
Il a été réalisé un test de 6 minutes. La distance parcourue est de 400 mètres.
La montée des escaliers se fait en enfilade mais la descente reste marche par marche.
Page | 19
III.
Discussion
1. Analyse des résultats de la prise en charge
On note que la prise en charge de Mme L. a permis une amélioration cutanée sur le
plan de la souplesse, de l’élasticité et de son épaisseur.
L’allongement des brides rétractiles a été possible grâce au positionnement en capacité
cutanée maximale. Ce qui a permis un gain d’amplitude articulaire, étant donné que la
limitation d’amplitude n’est due qu’aux rétractions consécutives aux phénomènes cicatriciels.
Ici ce n’est pas le cas, mais il est possible d’associer à des orthèses de postures qui complètent
les postures d’augmentation du crédit de longueur.
La souplesse ainsi que l’épaisseur de la peau au niveau des pieds est en cours
d’amélioration, principalement grâce à l’utilisation de la vacuothérapie.
L’utilisation de crème hydratante permet de lutter contre le desséchement de la peau et donc
de lutter contre le prurit qui est une gêne très importante. De plus lorsque la peau se dessèche,
il se forme des plaies comme des gerçures qui altèrent le phénomène de cicatrisation, d’où
l’importance d’une hydratation régulière.
L’utilisation de vêtements compressifs permet de lutter contre l’évolution de
l’hypertrophie. On note qu’à certaines zones, l’hypertrophie se développe malgré l’utilisation
des vêtements, comme au niveau des poignets et au niveau des brides axillaires. Ceci est la
conséquence d’une force de compression moins importante au niveau de ces zones.
2. Analyse de la prise en charge
La prise en charge de la brûlure est une nouvelle approche du métier de masseur
kinésithérapeute. En effet, lors de mon stage, j’ai pris pour la première fois une patiente
brûlée en soin. Je ne connaissais ni la physiopathologie ni les différentes techniques possibles
à mettre en place. Il m’est donc paru important de connaître les différents effets des soins déjà
reçus par Mme L.
 La compression
Une étude menée par Li-Tsang CW [8], au département de réhabilitation de Shanghai
prouve les bénéfices de la pressothérapie sur les cicatrices hypertrophiques.
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« Pressure therapy of hypertrophic scar after burns and related research »
On recrute quarante cinq patients présentant des brûlures aux extrémités des membres.
Ils sont divisés en deux groupes : un groupe témoin de neuf individus et un groupe qui suit le
traitement par vêtement compressif, de trente six individus.
Le vêtement compressif est porté vingt-trois heures sur vingt-quatre. On évalue la
cicatrice grâce à l’échelle de Vancouver, la spectrocolorimétrie et un système d’ultra-sons.
On réalise des évaluations à deux mois.
Il existe une différence significative entre les deux groupes. La peau des patients
portant des vêtements compressifs étant moins enflammée, moins épaisse, moins dense.
La
pression
continue
d’une
cicatrice
hypertrophique
post
brûlure
limite
significativement l’évolution néfaste de cette cicatrice.
Les vêtements compressifs empêchent la néo vascularisation des brides rétractiles et
donc permettent le réalignement des fibres de collagène. [7]
Le port de Tubigrip pendant le week-end présente principalement un objectif
fonctionnel. En effet son pouvoir de compression est moindre par rapport au vêtement
compressif, mais la patiente est plus à l’aise lors de ses week-ends.
Les vêtements compressifs nécessitent l’aide d’une seconde personne pour les mettre.
La patiente n’est pas autonome au niveau de l’habillage, ce qui pose problème.
 L’allongement cicatriciel
Une étude menée à l’hôpital de la croix rouge à Beverwijk aux Pays-Bas, prouve
l’intérêt des étirements de la peau brûlée après excision chirurgicale de cicatrices de brûlures
du bras. [9]
« Efficacy of skin stretching for burn scar excision : a multicenter randomized controlled
trail » [9]
L’étude regroupe trente patients, séparés en deux groupes de quinze.
Le premier groupe associe l’intervention chirurgicale à des techniques d’étirement de
la peau. Le second groupe ne reçoit que la technique chirurgicale.
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Il est important de noter que dans le premier groupe, il y a eu dix excisions totales de
la cicatrice, alors qu’il n’y en a eu que trois dans le second groupe.
On relève la taille de la cicatrice de brûlure ainsi que les complications secondaires à
la chirurgie.
Il y a une réduction important de la taille de la cicatrice dans les deux cas, mais la
réduction est plus importante pour le groupe qui avait un étirement de la peau, sans
augmentation des complications.
L’étude a permis de prouver que l’étirement cutané est un outil thérapeutique pour le
traitement des cicatrices de brûlures. De plus, l’étirement peut être la première étape du
traitement avant la chirurgie.
 Le massage
L’étude menée par Diane Kelly Garrison nous montre l’intérêt du massage cicatriciel
dans l’assouplissement de la peau du brûlé, même après deux ans d’évolution.
L’étude « Therapeutic Massage for Pediatric burn Survivors : Camp amigo Pilot
Project 2006 » [10]
L’étude compare un tissu cicatriciel de référence non traité et un tissu traité par
massage sur un même individu. L’étude regroupe huit enfants, chacun reçoit quinze minutes
de massage par jour durant cinq jours.
Le sexe féminin est plus largement représenté que le sexe masculin, six filles pour
deux garçons. La moyenne d’âge des enfants est de treize ans et demi. Ils présentent tous des
brûlures thermiques, datant de deux ans.
Cette étude évalue l’amplitude articulaire de la zone lésée et la taille du tissu
cicatriciel, ces deux dernières sont évaluées au début et à la fin de chaque séance de massage.
Les massages n’ont pas un effet immédiat sur la cicatrice de brûlure. En effet, la
mesure goniométrique de l’amplitude articulaire et la mesure centimétrique de l’étendue de la
cicatrice avant et après la séance n’ont pas de différences significatives.
Par contre, on compare les mesures à J1 et à J5. On note alors une augmentation de
l’amplitude articulaire ainsi que de la surface du tissu cicatriciel.
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Cette étude montre donc, que le massage, même réalisé sur cinq jours, a un effet
bénéfique sur l’allongement de la cicatrice et sur la mobilité de ce tissu cicatriciel.
Durant mon stage, il m’a été possible de voir l’évolution cutanée de la patiente durant
ma prise en charge. Lors du bilan final, j’ai pu remarquer qu’il se pose une limite sur
l’évaluation des cicatrices de brûlures et de prise de greffes. J’ai constaté un décalage entre
mon ressenti à la palpation tout au long du traitement durant ces deux mois et l’évaluation sur
l’échelle C.D.M.T. Même si au travers de cette échelle certaines zones ne montraient pas
d’évolution, j’ai noté une évolution lors de la palpation régulière du tissu cutané. J’ai
remarqué une peau plus souple et moins épaisse, alors que vis-à-vis de l’échelle utilisée, il n’y
avait pas d’évolution.
Ce qui pose donc un problème au niveau de l’évaluation intra et inter opérateur. Cette échelle
C.D.M.T reste subjective et dépend du degré d’expérience de l’opérateur, du suivi au long
cours du patient par le même opérateur. L’évaluation d’une cicatrice de brûlure est opérateurdépendant.
Malgré une progression observable, j’ai été confrontée à plusieurs difficultés qui me
permettent aujourd’hui de remettre en question la prise en charge que j’ai effectuée avec ses
aspects positifs et négatifs.
Le fait d’avoir une patiente très active et coopérante m’a permis de mettre en place et
de découvrir différentes techniques spécifiques à la brûlure. De plus, le fait qu’elle ne vive pas
sa brûlure comme un échec et que ses brûlures soient dues à un accident domestique et non à
une tentative de suicide facilitent nettement la prise en charge. Par contre, la difficulté
rencontrée est de canaliser la patiente. A trop vouloir progresser rapidement, elle se place des
objectifs trop hauts et se fatigue rapidement. Il est donc important de rappeler les différentes
étapes et l’évolution de sa prise en charge.
Durant ma prise en charge je ne me suis pas occupée des placards cicatriciels de la
patiente au niveau des moignons des épaules du fait de l’hyperalgie tactile de cette zone.
Ainsi, il s’est créé un point d’ancrage pour les brides rétractiles d’épaules. Il aurait été
intéressant de mettre en place une prémédication afin d’allonger ces placards cicatriciels et
d’éviter leur ancrage.
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L’évolution des cicatrices de prises de greffe au niveau des pieds m’a permis de
comparer l’utilisation de la vacuothérapie et le travail manuel. En effet, au niveau des pieds,
la peau était beaucoup plus épaisse et moins élastique. J’ai commencé par réaliser un travail
manuel puis j’ai utilisé le LPG qui m’a permis de travailler plus en profondeur. En effet, le
travail manuel se focalise surtout sur un travail superficiel, au niveau de la couche dermoépidermique. La vacuothérapie, en créant des zones de dépressurisation permet d’aller plus
profond au niveau cutané, elle atteint le derme profond et la couche sous dermique.
Ayant eu des nouvelles de la patiente après le stage, le travail au centre de rééducation
a été complété par une cure thermale. A la suite de cette cure, les brides rétractiles axillaires
ont peu évoluées et le seul recours possible pour que Mme L. retrouve des amplitudes
fonctionnelles au niveau des épaules est la chirurgie de reconstruction, avec l’utilisation de la
méthode d’excision des brides axillaires.
e) Conseils de règles de vie hygiéno-diététiques chez le brûlé : Vivre avec
sa brûlure au quotidien
1. Le prurit
Il est important d’informer sur ces démangeaisons à recrudescence nocturne [11]. Il ne
faut pas se gratter au risque de créer de nouvelles lésions qui ralentissent alors le phénomène
de cicatrisation et augmentent le risque d’infection. Si les démangeaisons deviennent trop
intenses, il est possible de les réduire en exerçant une forte pression sur la zone.
2. Le soleil
Il est important de protéger une cicatrice de brûlure, du fait de cette nouvelle
épidémisation mais aussi en raison de la fragilité de la peau en reconstruction du brûlé.
Il ne faut pas s’exposer longtemps au soleil, la protection par un écran total, un teeshirt, une casquette en indispensable.
En effet, le tissu cicatriciel est beaucoup plus vulnérable aux agressions des ultra-violets. La
notion de capital solaire est la base. Chez le brûlé, ce capital est entièrement épuisé. Si le sujet
présente un coup de soleil sur une cicatrice, la recoloration de la peau ne s’opérera pas. On
observe alors une dépigmentation permanente de cette zone [11].
Même après une cicatrisation complète, la peau reste fragile et vulnérable. Le risque
de cancer de la peau est majoré. Il faut donc modifier certaines habitudes. Les séances de
Page | 24
bronzage sont fortement déconseillées. Il en est de même pour la protection solaire, il faut
utiliser une protection à indice élevé même à distance.
3. Soins quotidiens
Une fois le patient de retour chez lui, l’un des points les plus essentiels est
l’hydratation de la cicatrice, pour entretenir la souplesse cutanée, le confort et l’allongement
des cicatrices. Cette hydratation cutanée permet d’entretenir le travail exécuté kinésithérapie
ou lors des cures thermales, mais aussi de créer un contact avec cette nouvelle peau et se
nouveau corps. Elle permet d’entretenir ce nouveau corps.
De plus, l’hydratation de la peau cicatrisée permet d’éviter le dessèchement de la peau,
qui accentue le prurit.
Lors de l’hydratation, on peut associer le massage mais la notion de massage plaisir
est très importante : le touché, le massé, le caressé. Le massage peut être réalisé par le patient
lui-même mais aussi par son entourage [11].
Lors des soins quotidiens, il faut apprendre au patient à surveiller ses cicatrices ainsi
que son œdème. La surveillance de la cicatrice passe par la couleur de la peau, son aspect, le
test de vitropression qui traduit l’inflammation. La surveillance de l’œdème est primordiale.
En effet, l’apparition d’œdèmes est anormale ainsi l’évolution vers une couleur violacée de la
peau cicatricielle. Dans ce cas, il faut reprendre contact soit avec le médecin soit avec le
centre de rééducation.
4. Cure thermale
La cure thermale apporte un réel bénéfice pour les cicatrices de brûlures. A la
différence des centres de rééducation, la cure permet de s’axer uniquement sur les différentes
séquelles et améliorent nettement la qualité du nouveau tissu cutané [12].
La cure thermale à différents objectifs suivant le stade de cicatrisation :
-
Accélération du processus cicatriciel
-
Amélioration de l’aspect de la cicatrice
-
Assouplissement du tissu cutané
-
Libération des brides rétractiles
-
Apaisement du prurit
-
Récupération fonctionnelle
Page | 25
IV.
Conclusion
La prise en charge cutanée de cicatrices de brûlures est un travail à long terme, en
particulier en phase de remodelage.
La cicatrisation obéit à des règles qui conditionnent la prise en charge : le concept
d’H.A.R.A. Les adhérences créant des points d’ancrage aux rétractions. Ces rétractions
touchant le tissu cicatriciel atteignent le tissu sain et forment des attractions. L’hypertrophie
accentue ces phénomènes.
Grâce ce concept, le travail cutané est orienté suivant les différentes déficiences et permet
d’orienter le remodelage. De plus, la situation dans le temps de la cicatrice hypertrophique
permet d’ajuster les thérapeutiques mises en place.
L’utilisation de techniques cutanées telles que le massage spécifique et localisé, la
vacuothérapie, les postures en position cutanée maximale permettent d’orienter le remodelage
cutané et alors d’éviter les attitudes vicieuses et les limitations d’amplitudes articulaires qui
réduisent les capacités fonctionnelles de l’individu.
Durant cette phase, il est important de prévenir toutes les attitudes en enroulement qui
peuvent se former. D’où l’importance de l’information du patient aussi bien sur les techniques
réalisées, que sur l’importance du port des vêtements compressifs.
Aux vues du retentissement fonctionnel de l’apparition des brides rétractiles aux
niveaux des creux axillaires, on peut se poser la question de l’impact fonctionnel des brûlures
de main. En effet, lorsque les brides rétractiles atteignent les commissures et particulièrement
la première ; le principal outil fonctionnel qui est la main s’en retrouve modifié.
Page | 26
V. Bibliographie
[1] TORTORA Gérard, REYNOLDS GRABOWSKI Sandra. Principes d’anatomie et de
physiologie. 3ème édition. De Boeck, 2001, p. 148 à 153
[2] MOUTET François, Brûlures étendues récentes : diagnostic et traitement initial [en ligne].
Mars 2005. Disponible sur Internet < http://www-sante.ujfgrenoble.fr/sante/corpus/disciplines/chirmain/chirmain_et_brules/201a/lecon201a.html >
(consulté le 15 novembre 2010)
[3] WASSERMANN Daniel. Les brûlures : généralités, principes du traitement. Soins. Aoûtseptembre 1993
[4] UNITE DE KINESITHERAPIE DES BRÛLES, centre de grands brûlés, Lyon Saint-Luc.
L’évaluation des différentes strates fonctionnelles d’une cicatrice : Echelle d’évaluation
C.D.M.T.
[5] JAUDOUIN Denis. La kinésithérapie de la cicatrice après une brûlure grave : traiter et
guider le remaniement du derme [I]. la cicatrice de la grande brûlure. 2007
[6] UNITE DE KINESITHERAPIE DES BRÛLES, centre de grands brûlés, Lyon Saint-Luc.
Fiche de bilan cicatriciel – corps entier
[7] SAINTON Charles Prise en charge d’une bride axillaire rétractile suite à une brûlure
profonde. Kinésithérapie la revue, 2006, n° 53, p. 24 à 28
[8] LI-TSANG CW, FENG BB, LI KC et al. Pressure therapy of hypertrophic scar after
burns and related research. Zhonghua shao Shang Za Zhi. Décembre 2010, n° 26, p. 411 à 415
[9] VERHAEGEN PD, VAN TRIER AJ, JONGEN SJ et al. Efficacy of skin stretching for
burn scar excision : a multicenter randomized controlled trail. Plastic Reconstruction Surgery,
Janvier 2011.
[10] GARRISON Kelly, MORIEN Annie, KEENEY SMITH Nancy et al. Therapeutic
Massage for Pediatric burn Survivors : Camp amigo Pilot Project, Diane 2006
[11] KINBRUL. Conseils pratiques pour les cicatrices [en ligne].23 mai 2010. Disponible sur
Internet < http://www.kinebrul-pro.com/pub/readap/0-read2.html > (consulté le 18 décembre
2010)
[12] BOUDIER Frédéric, Centre de cure thermale de la Roche Posay [en ligne]. Disponible
sur Internet < www.thermes-larocheposay.fr > (consulté le 21 avril 2011)