AFD : « Par exemple, si un entrepreneur veut un crédit pour

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AFD : « Par exemple, si un entrepreneur veut un crédit pour
POLITIQUES PUBLIQUES
AFD : « Par exemple, si un
entrepreneur veut un crédit
pour changer sa chaudière,
la banque peut lui proposer
les crédits Sunref »
Entretien avec Catherine Bonnaud, la directrice de
l’Agence française de développement au Bénin.
n Energies Africaines : Expliqueznous brièvement ce que c’est que le
Sunref, ce programme dont la mise en
œuvre vient de débuter au Bénin ?
Catherine Bonnaud : Le Sustainable
Use of Natural Resources and Energy
Financing (Sunref ) est un instrument
essentiellement consacré au secteur
privé. A travers ce programme, nous
permettrons aux banques d’accompagner sur les plans techniques et financiers les entreprises qui ont besoin de
financement et d’accompagnement
technique, et qui intègrent l’efficacité
énergétique et les énergies renouvelables dans leurs projets.
Par exemple, si un entrepreneur
veut un crédit Orabank pour changer sa chaudière, la banque peut lui
proposer les crédits Sunref. Mais cela,
après qu’elle ait contacté un expert qui
propose une solution verte à l’entrepreneur. Ce dernier bénéficie du crédit à la seule condition qu’il accepte
cette solution. Mais il faut savoir que
le client ne rencontre jamais d’expert,
ni d’agent de Sunref. Tout se passe
entre le client et la banque d’une part,
et Sunref et la banque d’autre part. Le
client de l’AFD, c’est la banque, pas
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les pays, ni les PME. En l’occurrence,
c’est Orabank pour le Benin.
n EA : Pourquoi ne pas vous adresser directement aux entreprises ?
CB : A partir du moment où nous
cherchons à cibler les entreprises,
nous ne pouvons pas, nous, en direct,
travailler avec les entreprises. L’AFD
a une filiale, la Proparco, qui travaille
spécifiquement avec les entreprises,
mais des entreprises de grande taille
qui nécessitent un financement déjà
important. Lorsque nous voulons aider les entreprises de tailles moyennes
ou grandes, mais pas suffisamment
pour mobiliser notre filiale secteur
privé, nous avons besoin d’un intermédiaire qui, dans le cas du Sunref,
est la banque. Par conséquent, nous
n’existons pas au niveau des petites entreprises qui ont besoin de
financement.
n EA : Agissez-vous en quelque
sorte comme un fonds de garantie ?
CB : Non, ce n’est pas un fonds de
garantie. Le programme accompagne
les banques dans la prise de risque,
dans les prêts qu’ils font au privé,
mais sans apporter de garanties. Nous
apportons principalement un appui
technique. Quand une entreprise au
Bénin veut faire un prêt, la banque,
n’ayant pas d’expertise dans le secteur
de l’énergie renouvelable, doit se faire
aider. Mais c’est compliqué de dépêcher un expert sur fonds propres.
C’est là que nous intervenons pour
l’accompagner au niveau technique.
n EA : Vous êtes également l’un
des principaux partenaires du secteur
énergétique public. Comment jouezvous ce rôle ?
CB : Au Bénin, nous appuyons la
SBEE, l’entreprise publique de fourniture électrique, à travers un appui
institutionnel, des prêts et des subventions octroyés à l’Etat béninois et
rétrocédés à cette société. Ce projet
cofinancé avec la Banque européenne
d’investissement et l’Union européenne, dans un mixage prêt/don, va
permettre d’améliorer la distribution
de l’énergie électrique dans le département de l’Atlantique, en installant
des transformateurs, en faisant des
lignes, en aidant à l’accès au compteur. Cette extension du réseau impli-
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quera non seulement la mise en place
de nouvelles lignes, mais également
la réhabilitation des lignes déjà existantes qui causent beaucoup de pertes
en raison de leur état. Elle permettra
d’avoir un réseau plus propre et de limiter les pertes, tant techniques que
commerciales, de la SBEE. A terme,
le nombre de consommateurs ayant
accès à l’électricité augmentera et la
SBEE réduira ses pertes commerciales
et techniques.
Quand les gens auront accès à
l’énergie et que la société sera mieux
gérée on diminuera, de facto, l’utilisation de toute source d’énergie plus
polluante, que ce soit le charbon ou
le bois de chauffe, ce qui est une autre
façon d’agir sur le climat.
n EA : Menez-vous également des
actions dans le secteur des énergies renouvelables ? Et si oui, comment gérez-vous le manque de cadre
réglementaire ?
CB : Depuis de nombreuses années,
l’agence a mis en place une stratégie
climat. Dans cet engagement, l’AFD
cible l’ensemble des partenaires et
a des partenariats différenciés en
fonction des pays dans lesquels elle
intervient, mais également des partenariats avec l’ensemble du public.
Nous avons plusieurs schémas et il
revient au gouvernement de prendre
des options.
Pour le hors-réseau, il faut choisir
un modèle parce qu’il s’agit d’une
entité autonome. Le producteur indépendant d’énergie (IPP) qui intervient a son propre modèle économique. Nous pouvons l’aider via les
financements du secteur privé. Nous
pouvons même éventuellement faire
un mixage Proparco-Afd, Proparco
étant la filiale du secteur privé de
l’agence, parce qu’il y a un volet social
non négligeable. Nous apportons de
l’électricité à de petites localités éloignées du réseau.
Mais il y a également une condition à cette option. En effet, s’il y a le
réseau qui passe au-dessus du village,
nous n’aiderons pas parce que cette
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« Nous permettrons aux banques d’accompagner sur les plans techniques et financiers les
entreprises qui ont besoin de financement et d’accompagnement technique et qui intègrent
l’efficacité énergétique et les énergies renouvelables dans leurs projets. »
localité pourrait être desservie par le
réseau électrique national. Or, aujourd’hui, nous n’avons pas une claire
vision des endroits où vont être installées les minicentrales hors-réseau.
Certaines sont en dessous des lignes,
ou pas loin, ou pas suffisamment loin.
Nous pouvons accompagner les IPP
dont les projets respectent nos standards techniques parce que nous savons que cette énergie au coût de sortie est beaucoup plus chère qui celle
qui est produite par le réseau national.
Si ces centrales sont destinées à être
raccordées au réseau et qu’il se pose
le problème du rachat de l’électricité
par la SBEE, il y a plusieurs façons
d’appuyer le projet. L’Etat peut emprunter pour construire et signer un
contrat avec un opérateur. Il s’agit là
d’un prêt à l’Etat du Bénin. La seconde solution est d’accompagner le
privé. Dans ce cas, nous sommes très
pointilleux sur le contrat en ce qui
concerne le mode de financement et
d’opération de l’IPP. Il ne s’agit pas,
en effet, de financer des panneaux et
de s’en aller. Il faut exploiter la centrale, la maintenir, et revendre son
électricité à la SBEE. A ce niveau, il y
a un problème relatif au prix de rachat
de l’énergie produite par à la SBEE.
Aujourd’hui, il y a un prix arbitraire
de 73 FCFA qui a été proposé mais il
n’est pas encore accepté de tous. D’où
l’importance de la mise en place du
cadre réglementaire.
Nous avons financé, en 2011, la
mise en place de la réglementation,
mais il y a un problème de volonté
politique de mettre en place les cadres
qui conviennent. L’Autorité de régulation de l’électricité (ARE) a été
créée en 2011, mais elle n’a pas encore
de financement pour fonctionner. y
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