Schéma régional de l`enseignement supérieur, de la recherche et

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Schéma régional de l`enseignement supérieur, de la recherche et
Schéma régional de l’enseignement supérieur,
de la recherche et de l’innovation
Contribution commune des Universités de Clermont-Auvergne, Grenoble et Lyon
sur l'accès des territoires aux ressources de l'Université
Contexte et enjeux
La grande région Auvergne-Rhône-Alpes se distingue par la coexistence, d'une part de métropoles de niveau
international notamment en matière de recherche, et d'autre part d'espaces à forte dynamique ou potentiel de
croissance industrielle, touristique ou agronomique, mais éloignés des pôles universitaires et ayant de ce fait
difficilement accès de la diversité disciplinaire et fonctionnelle des ressources de l'ESR.
Pour autant, le développement des connaissances et des capacités d'innovation constitue aujourd'hui pour ces
territoires de faible densité et ces villes intermédiaires une nécessité au moins aussi vitale que pour les
métropoles. Cet enjeu interpelle le monde académique au travers de ce que l'on peut qualifier de responsabilité
territoriale des universités, laquelle ne se confond pas avec la notion de responsabilité sociale.
En effet, avec l'appui des dispositifs ou d'initiatives nationaux, régionaux et locaux (bourses, aides à la mobilité,
logements étudiants…) mais aussi grâce à leurs pôles secondaires, les universités des métropoles régionales ont
permis à un nombre sans cesse croissant de jeunes issus des multiples territoires régionaux de suivre des études
supérieures (à titre d'illustration, près de 50% des étudiants inscrits à un niveau Bac+1 dans les établissements de
la COMUE Grenoble-Alpes sont originaires du territoire académique hors agglomération grenobloise).
A partir de l'estimation par âge des populations départementales fournie
par l'INSEE, ces courbes mettent en évidence :
- pour l'Ardèche et la Haute-Loire, le départ d'environ un 1/3 des jeunes
entre 16 et 18-19 ans, a priori pour suivre des études, et le faible "taux de
reconstitution" à la fin de la période d'études (23-25 ans)
- pour le Rhône, symétriquement, un accroissement très important des
classes d'âges 18-21 ans suivi d'une baisse progressive mais avec un solde
positif d'environ 4000 jeunes -a priori diplômés- supplémentaires restant
dans le département, et plus précisément dans l'agglomération lyonnaise
(les estimations par âge ne sont pas disponibles à l'échelle communale)
Cependant, si cette évolution contribue à la fois à la promotion sociale et au développement régional global, elle
pose problème pour les territoires "exportateurs de force vitale et de matière grise", dans la mesure où cette
polarisation géographique de l'offre de formation et de recherche s'observe également s'agissant des diverses
formes de collaboration de l'université avec les acteurs socio-économiques, culturels ou sanitaires. La répartition
géographique des stages professionnalisants en constitue une illustration voire un marqueur éloquent : sur près de
5 000 stages réalisés en 2013-14 dans le cadre de formations relevant de la COMUE Grenoble-Alpes, plus d'un tiers
est effectué dans des entreprises de l'aire urbaine grenobloise et seulement 2,4% en dehors des agglomérations
universitaires de l'académie (un seul stagiaire à Albertville ou à Privas).
Les différences géographiques dans la capacité d'accès aux diverses ressources de l'ESR traduisent ou induisent in
fine des disparités importantes au sein de l'espace régional. Celles-ci apparaissent nettement lorsqu'on réalise une
typologie sur la base des trois indices "niveau de revenu", "niveau de santé", "% de diplômés du supérieur", ou que
l'on les intègre sous forme d'un indicateur unique, adapté de l'Indicateur de Développement Humain (IDH) du
PNUD.
On peut constater que, s'agissant du lien à l'ESR, les facteurs de proximité ou d'accessibilité comptent au moins
autant que la distinction urbain/rural. De fait, nombre de petites villes comportent un faible taux d'actifs diplômés
du supérieur alors que les périphéries rurales ou les corridors entre métropoles peuvent se situer au même niveau
que les zones denses. En revanche, la relation (dans un sens ou dans l'autre) entre niveau de formation supérieure
et niveau de revenus s'observe systématiquement.
Pourtant, les évolutions récentes montrent que les espaces de faible densité offrent des perspectives de
développement autorisant des "retours sur investissement" des politiques publiques souvent supérieurs - en
relatif - à ceux des territoires métropolitains. Symétriquement, ces "nouveaux horizons" de l'écosystème régional
d'innovation constituent pour les établissements d'ESR des opportunités de développement et de diversification
de leurs activités de formation initiale (stages, ateliers, projets tutorés, promotion des formations…) et continue
(territorialisation de l'offre ou de la demande), mais également de recherche (identification de nouvelles
problématiques scientifiques, nouveaux modes ou terrains d'expérimentation et de transfert…) notamment en
termes d'interdisciplinarité et de partenariats.
Justification et finalités d'une interface Université-Territoires coordonnée à l'échelle régionale
Permettre aux territoires géographiquement -et souvent "culturellement"- éloignés de l'université de s'inscrire
dans la société de la connaissance ne peut plus se concevoir que marginalement sur le mode de la déconcentration
de formations ou de laboratoires de recherche : parce que les besoins des territoires sont pluriels et évolutifs tant
dans leur contenu que dans leurs modalités, parce que les deux dernières décennies ont montré les limites de ce
modèle, parce que les moyens des collectivités et des universités ne le permettent plus que très ponctuellement.
Il s'agit donc de concevoir, expérimenter et promouvoir des formes d'intervention et de sollicitation de l'Université
tirant parti à la fois de ses implantations physiques et de modalités ou de vecteurs plus "immatériels" tels que la
formation ou les conférences à distance, les stages étudiants, le lien à l'international, les partenariats de
recherche… et toute la combinatoire envisageable.
Pour ce faire, deux conditions doivent être réunies et articulées :

outiller les structures territoriales, socio-professionnelles, associatives… en charge du développement
économique, social, culturel ou sanitaire afin qu'elles soient au fait des diverses ressources offertes par
l'Université et de la manière d'y accéder et de les mettre en œuvre ;

faire en sorte que ces ressources soient visibles, lisibles et accessibles, mais également que les
établissements soient en mesure de traiter les demandes et de construire des réponses adaptées et à
bénéfices partagés.
Acquis à l'échelle régionale
Initier et développer d'une part, le "réflexe Université" de la part des acteurs socio-économiques extérieurs aux
écosystèmes métropolitains d'innovation, et d'autre part le "réflexe territorial" de la part d'acteurs académiques
jusqu'alors incités à concentrer l'offre et les ressources, ne peut ainsi s'envisager sans une implication forte des
structures territoriales ayant compétence en matière de développement socio-économique.
C'est ce constat qui a motivé et guidé côté Rhône-Alpes la création de l'inTERface Université-Territoires, d'abord au
sein de la COMUE de Grenoble puis en collaboration avec celle de Lyon (http://interface.univ-grenoble-alpes.fr/),
et côté auvergnat celle du Groupement d’Intérêt Public Institut d’Auvergne de Développement des Territoires
(http://www.iadt.fr/), avec le soutien des ex-Régions respectives. Dans un cas comme dans l'autre, il s'agissait de
disposer de ressources humaines et physiques (avec le bâtiment de l'IADT) clairement identifiables par les acteurs
territoriaux, socio-économiques et associatifs, et qui soient à même de mettre en œuvre ou d'expérimenter avec
elles des actions ou dispositifs mobilisant voire combinant des ressources universitaires (StaRTer ou Boutique des
Sciences autour des stages étudiant, conférences multi-sites, ateliers, thèses partenariales, expertises, projets de
recherche-action, formation d'élus …). Ces ressources sont interdisciplinaires et adossées à des formations
professionnelles attractives (de niveau licence ou master) ainsi qu’à des laboratoires de recherche reconnus, que
ce soit dans le champ des sciences du territoire ou dans tout autre domaine scientifique (par exemple santé,
numérique, énergie, sciences de l’ingénieur…) pour lesquels ces interfaces constituent des portes d’entrée, la
mobilisation des outils numériques permettant par ailleurs d’en accroître la diffusion.
Après 5 à 6 ans d'existence, le bilan de ces structures – souples et légères – apparaît très largement positif. La
permanence du dispositif StaRTer (les Stages comme Ressource pour le Territoire) sur certains territoires en
constitue un marqueur d'autant plus significatif que la collaboration ainsi initiée a pu favoriser l'émergence de
besoins et de réponses plus "élaborées" (formation tout au long de la vie, thèses CIFRE ou partenariales, ateliers et
futur « laboratoires vivants », entreprenariat étudiant…), illustrant ce faisant le potentiel de développement
existant en matière de (re)connaissance des ressources de l'Université par et pour tous les territoires.
Vers des objectifs et principes d'intervention partagés Région-Universités
L’existence de ces initiatives favorisant l'accès des territoires aux ressources de l'Université est une opportunité
que la Région doit s’attacher à préserver et à développer dans le cadre du futur SRESRI, mais aussi, dans la mesure
du possible, en articulation avec ses politiques de développement au sens large. Ces expériences innovantes
contribuent en effet à créer un maillage territorial ayant des effets bénéfiques en termes d’activité économique et
d’attractivité.
Par ailleurs, le fait de travailler sur des territoires de moindre ampleur ou complexité, en partenariat avec des
structures dynamiques (collectivités, consulaires, agences de développement...) ayant souvent une compétence
transversale en matière d'action économique, sociale, culturelle ou sanitaire, offre la possibilité d'expérimenter en
"modèle réduit" mais en conditions réelles des dispositifs opérationnels autour du transfert et de la production de
connaissances pour l'action. Ces territoires démonstrateurs sont essentiels pour mieux penser à la fois l'évolution
des politiques publiques et celle des missions et pratiques de l'ESR.
Cette ambition partagée invite à proposer différents principes d'intervention conjointe de la Région et des
Universités :
 Hors des périmètres géographiques et sectoriels des collaborations établies au sein des sites principaux et
secondaires, les acteurs socio-économiques des territoires constituent pour les établissements universitaires
une "nébuleuse" parfois difficile à appréhender et plus encore à approcher, la réciproque étant tout aussi vraie.
 Il est donc indispensable de créer des cadres spécifiques de coopération entre l'Université et, au sein des
territoires, des structures de développement au fait des enjeux, ressources et besoins de leur tissu socioéconomique et social.
 Pour ce faire, les deux "mondes" doivent pouvoir disposer de compétences et de ressources humaines en
capacité de mettre en œuvre, développer et faire "monter en gamme" les collaborations (du stage d'étudiant
au projet de recherche).
 Compte tenu de la diversité des configurations territoriales ainsi que de celle des domaines et modalités de
collaboration envisageables, il est essentiel d'autoriser voire de susciter des expérimentations favorisant une
acculturation graduelle aux diverses formes d'intervention de l'Université.
 Tant sur le versant "territoire" que sur le versant "académique", les résultats de ces actions doivent pouvoir
être connus et promus, y compris de manière ciblée en fonction des champs professionnels et disciplinaires.
 L'information voire la formation d'une part, des techniciens des structures de développement quant aux
ressources universitaires et au moyen de les mobiliser, et d'autre part des enseignants/chercheurs quant aux
opportunités offertes dans et par les territoires éloignés doit être développée de manière coordonnée.
 Pour permettre une équité d'accès des territoires aux ressources universitaires, les handicaps structurels,
notamment liés à l'accessibilité ou à l'attractivité, doivent être pris en considération par les différentes parties
prenantes (entreprise, territoire, Université, Région, Etat), notamment en valorisant les points d'appui que
constituent les antennes universitaires.
 Du fait des différences et des similitudes de configurations, les dispositifs doivent être dans le même temps
ciblés au plan territorial et pensés à l'échelle régionale; en articulation avec des logiques de site qui n'intègrent
pas forcément les problématiques des territoires extra-métropolitains.
Vers un développement coordonné à l'échelle régionale de l'interface Université-Territoires
Aller vers un cadre régional d’interface Université-Territoire opérationnel et évolutif suppose de conforter les
plateformes partenariales lisibles et visibles sur chacun des sites (avec les modalités d’intervention et les aires
géographiques d’influence qui leur sont propres), mais aussi de créer un cadre voire un outil communs permettant
de fédérer et promouvoir les ressources universitaires à l'échelle de la grande Région en vue de les mettre en
œuvre « au bon moment, au bon endroit, avec les bons acteurs et de la bonne manière ».
Symétriquement, et en pleine cohérence avec sa mission de développement économique et d'aménagement des
territoires, la Région peut inciter et aider les acteurs socio-économiques des territoires extra-métropolitains à
solliciter les ressources universitaires de différentes manières : en contribuant à financer les surcoûts liés aux
contraintes d'éloignement (déplacements, logement…), en favorisant la constitution d'une ingénierie de
mobilisation des ressources universitaires, en soutenant des actions partenariales et surtout leur montée en
gamme (notamment vers la recherche et l'innovation), en stimulant l'usage du numérique, en incitant à la
promotion et au déploiement des expériences concluantes… Le soutien à une palette voire à un continuum
d'actions dont il paraît difficile voire contreproductif de figer le périmètre et les modalités de mise en œuvre
pourrait par exemple prendre la forme d'un "chèque université" permettant à des structures de développement
ou à des acteurs socio-économiques de se doter de manière progressive d'une expertise sur les ressources
universitaires portant aussi bien sur la formation initiale (stages, projets tutorés…) ou la formation tout au long de
la vie que sur la recherche et le soutien à l'innovation (contrat de recherche, thèse partenariale…) ou l'apport de
connaissances spécifiques (conférences à distance, expertises…).
La coordination et la gouvernance de ces actions relevant d'acteurs et de modes d'intervention distincts autour
d'un objet (l'interface Université-Territoires) et d'un objectif communs (le développement des connaissances et de
l'innovation) pourrait trouver un point d'appui et un outil efficace dans l'existence d'une structure mixte
(Collectivités-Universités) sur le modèle du GIP IADT, autorisant de surcroît la mise à disposition de personnels des
membres fondateurs et l’association de chercheurs, d'agents de collectivités ou d'acteurs territoriaux.
Contacts
Université Clermont-Auvergne
COMUE Grenoble-Alpes
COMUE Lyon
Coordination
: Laurent RIEUTORT , [email protected]
: Pedro OLIVAS , [email protected]
: Florence BELAEN, [email protected]
: Grégoire FEYT , [email protected]