July_Sept 2008 contents colour version 7:Jan_March_2006

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July_Sept 2008 contents colour version 7:Jan_March_2006
ÉDITORIAL
de Paul Kroll
Des pécheurs dans les bras d’un Dieu bienveillant
Qu’est-ce que l’enfer ? Y a-t-il des gens qui s’y retrouveront ?
Et si oui, pourquoi ?
e monde sera probablement transformé en […] un
vaste océan de feu,
où les méchants
seront affligés […]
leur tête, leurs yeux, leur langue, leurs
mains, leurs pieds, leurs reins et leurs
organes vitaux seront pour toujours remplis d’un feu rougeoyant et fondant […]
ils seront éternellement […] tourmentés
[…] sans fin, et sans jamais, jamais en
«L
les mains d’un Dieu en colère »,
Edwards enseignait que celui qui était
impénitent et négligent spirituellement
finirait dans le feu d’un enfer qui brûle
toujours. On peut comprendre pourquoi
les gens qui écoutaient Edwards et
d’autres prédicateurs qui transmettaient
un message semblable pouvaient,
comme certains l’ont fait, gémir et hurler
d’horreur, se tordre dans une hystérie
épouvantable et même devenir fous.
être délivrés. »1
Ce genre de sermons sur le feu de
l’enfer a été une pression répandue et
de longue date, tissée dans l’étoffe de
l’Église au cours de la plupart de son
histoire jusqu’à tout récemment.
Cependant, vous n’entendrez probablement pas un sermon sur le feu et le
souffre de l’enfer dans l’Église aujourd’hui.
Cette description effrayante d’un enfer
qui brûle toujours a été écrite par
Jonathan Edwards (1703-1758), le théologien chrétien le plus influent de
l’Amérique coloniale et l’un de ses prédicateurs les plus puissants. Dans ses
sermons, comme « Des pécheurs dans
6
Doit-on prêcher ou ne pas prêcher
sur l’enfer ?
Un nombre croissant d’érudits évangéliques – y compris F. F. Bruce (19101990), Michael Green, John Stott, John
W. Wenham, pour n’en nommer que
quelques-uns – ont exprimé leur opposition à la vision traditionnelle de l’enfer.
Clark Pinnock, théologien et érudit
biblique canadien, n’a pas mâché ses
mots dans le livre Four Views on Hell
(Quatre visions sur l’enfer). Il écrit : « La
torture éternelle est intolérable d’un
point de vue moral parce qu’elle représente Dieu agissant comme un monstre
assoiffé de sang qui maintient un
Auschwitz éternel pour ses ennemis qu’il
ne laisse même pas mourir. »2
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ÉDITORIAL
Bien que Pinnock ait provoqué
la colère de certains de ses
collègues les plus conservateurs, son opinion sur les prédications d’un enfer de feu est
partagée
par
beaucoup
d’enseignants et d’érudits chrétiens, même s’ils n’exposent
pas leurs objections en des
termes aussi clairs. À l’instar de
Pinnock et d’un nombre croissant
de
personnes,
ils
« considèrent que le concept de
l’enfer défini comme un tourment sans fin du corps et de
l’esprit, est une doctrine outrageante et un crime théologique
et moral. »3 Un crime moral
peut être un terme faible quand
nous considérons le fait que
certains, qui enseignent un
enfer dont le feu brûle toujours,
enseignent également que
Dieu n’a choisi arbitrairement
qu’une toute petite minorité de
gens pour vivre au ciel et qu’il a
automatiquement, de toute
éternité, confié tous les autres à
une destinée effroyable en
enfer pour toujours.
Ce ne sont pas tous les enseignants et tous les théologiens
chrétiens qui sont d’accord
avec l’idée qu’enseigner sur un
enfer qui brûle toujours comme
une chambre de torture, soit
terrible. Certains insistent pour
dire que nous avons besoin de
plus de sermons sur l’enfer. Le
théologien Larry Dixon, qui a
écrit il y a quelques années
dans le magazine Moody,
décriait le manque de sermons
sur le feu de l’enfer. « À quand
remonte la dernière fois où
vous avez entendu un sermon
sur l’enfer ? a-t-il demandé.
Dans votre témoignage pour
Christ, avez-vous récemment
averti quelqu’un du jugement
éternel ? »4 Les théologiens
Christopher W. Morgan et
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Robert A. Peterson disent que nous
devons « proclamer tout le conseil de
Dieu – oui, y compris l’enfer – aux chrétiens autant qu’aux non-chrétiens ».5
Comme certains enseignants chrétiens
aujourd’hui et d’autres au cours de
l’histoire de l’Église, Dixon croit que les
gens ont besoin d’un coup de peur pour
s’engager envers Christ. Il insiste pour
dire que « les Nord-Américains autosuffisants n’écouteront jamais vraiment
l’Évangile à moins de les avertir à un
moment donné du jugement. » Son opinion est la suivante : « Si nous ne parlons que d’amour et d’affirmation, les
païens confortables nous écouteront
poliment pendant un certain temps,
diront qu’ils sont contents pour nous et
poursuivront leur chemin. » Il conclut en
disant : « À moins de craindre le jugement de Dieu, beaucoup ne rechercheront pas son amour. »6
Cette approche semble présumer que
les Américains ne croient pas au fond
d’eux qu’il existe un certain « enfer ». Il
semble que ce soit une supposition
erronée. Dans presque chaque sondage
mené au cours des dernières années,
une majorité d’Américains disent croire
en un véritable enfer. Selon un sondage
Gallup mené au milieu de l’an 2007, 69
pour cent des répondants ont affirmé
croire à l’enfer. Dans certains sondages,
le pourcentage de personnes disant
croire à l’enfer était même plus élevé.7
Toutefois, s’ils n’ont pas entendu parler
de l’enfer dans l’Église, d’où la croyance
d’une personne sur l’enfer vient-elle ?
En fin de compte, de la Bible, puisque la
Bible est la principale source
d’information sur l’enfer. Le problème,
c’est que beaucoup de mauvais renseignements
ont
été
mêlés
à
l’enseignement biblique sur l’enfer. Dieu
a été trop souvent représenté comme un
juge en colère, prêt à jeter des gens
dans les tourments de l’enfer à la
moindre provocation.
8
Mais c’est incontestablement un point
de vue non biblique, à la fois sur Dieu et
sur l’enfer. Le Nouveau Testament
témoigne que Dieu n’a aucune intention
de condamner immédiatement des gens
à l’ « enfer ». Son but est de nous libérer
de la condamnation que nous méritons à
cause de nos péchés et de nous guérir
de notre état de brisement spirituel.
Beaucoup de chrétiens ont une vision
légaliste de la relation entre Dieu et les
êtres humains. Ils perçoivent Dieu
comme un juge prêt à condamner, qui
est en colère contre le monde, qui jette
les « méchants » dans les flammes de
l’enfer pour l’éternité et qui n’emmènera
avec lui que les « bons » dans une félicité céleste et éternelle.
Développer une nouvelle perspective
sur l’enfer
Dieu est pour nous, et non contre
nous
En lisant le Nouveau Testament, vous
constatez que l’enfer est indubitablement une motivation mineure. On peut
littéralement compter sur les doigts de la
main les passages qui parlent directement de l’enfer. Cependant, il est vrai
que chaque auteur du Nouveau
Testament a quelque chose à dire indirectement sur l’enfer en parlant d’un
jugement futur sur toute personne qui
rejette volontairement la grâce bienveillante de Dieu et la bonne vie que
Dieu s’est proposé de toute éternité de
donner à ses enfants.
Le témoignage de l’Écriture nous donne
une image entièrement différente de
l’enfer. Elle dit que le Dieu trinitaire a
ouvert la porte de son amour pour tout le
monde. Dieu, qui est amour (1 Jn 4.8),
veut tellement sauver l’humanité de la
destruction du péché qu’il s’est luimême fait homme. Il est entré dans sa
création en tant qu’être humain dans la
personne de son Fils.
Voici un passage en Matthieu 25.41 – de
Jésus lui-même – qui parle de toute personne qui refuse de croire : « […]
Retirez-vous loin de moi, vous que Dieu
a maudits, et allez dans le feu éternel
préparé pour le diable et ses anges ».
En Marc 9.43, il parle de ceux qui peuvent « être jeté[s] en enfer dans le feu
qui ne s’éteint jamais ». L’épître aux
Hébreux parle de « l’attente terrifiante
du jugement et [du] feu ardent qui
consumera tous ceux qui se révolteront
contre Dieu » (10.27).
L’enfer est donc une question importante, et c’est pourquoi nous ne voulons
pas la négliger, parce que le témoignage
de l’Écriture ne le fait pas. Si nous
croyons le témoignage de la Bible, nous
devons penser sérieusement au fait
qu’un genre d’enfer existe, quelle que
soit sa nature. La question demeure :
Quel genre d’enfer la Bible enseigne-t-elle
vraiment et qui en réalité s’y retrouvera ?
Jésus, Dieu fait chair, a pris notre nature
humaine déchue et l’a transformée à
son image parfaite et juste, pardonnant
et détruisant ainsi le péché de
l’humanité. Paul a écrit qu’en Christ,
nous pouvons nous « revêtir de l’homme
nouveau, créé conformément à la
pensée de Dieu, pour mener la vie juste
et sainte que produit la vérité », ce qui
signifie que nous sommes son œuvre,
créée en Christ à son image (Ép 4.24).
Tout cela est le revêtement de Dieu pour
nous et en nous, à travers Christ et par
l’Esprit.
Robert Farrar Capon, prêtre retraité
d’une paroisse épiscopale et auteur de
plusieurs livres sur des thèmes chrétiens importants, a écrit : « Toutes les
idioties sur le ciel qui est réservé pour
les bons et sur l’enfer qui est réservé
pour les méchants sont totalement
fausses. Le ciel est entièrement peuplé
de pécheurs pardonnés […] et l’enfer est
entièrement peuplé de pécheurs pardonnés. La seule différence entre les
deux groupes est que ceux qui sont au
ciel acceptent le pardon de Dieu et ceux
qui sont en enfer le rejettent. »8
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ÉDITORIAL
Les paroles de Capon retentissent avec
celles de l’Écriture. En Christ, Dieu a
réconcilié le monde avec lui-même
même quand les gens étaient encore
ses ennemis et dans les ténèbres spirituelles. Paul l’exprime ainsi : « Alors que
nous étions encore des pécheurs, le
Christ est mort pour nous » (Ro 5.8).
Paul dit encore que même lorsque les
gens haïssaient Dieu dans leur cœur et
qu’ils étaient complètement ignorants de
sa promesse éternelle pour toute
l’humanité, ils ont été « réconciliés avec
lui par la mort de son Fils » (v. 10).
ressembler l’enfer, nous devons d’une
manière ou d’une autre dire que Jésus
accepte notre choix d’y aller sans nous y
forcer d’aucune manière déterministe. »9
Dieu veut que tout le monde soit sauvé
pour connaître à jamais la joie de communier avec lui. Mais l’amour n’est pas
l’amour s’il est forcé. À la fin, Dieu nous
laissera avoir ce que nous voulons réellement. Comme C. S. Lewis l’a écrit :
« Il y aura deux sortes de gens à la fin :
ceux qui diront à Dieu : “Ainsi soit-il” et
ceux à qui Dieu dira, à la fin : “Ainsi soitil”.»10
Ceux qui sont en enfer y sont parce qu’ils ne veulent aucune
communion avec le Dieu qui les a créés et qui les aime.
Paul insiste pour dire que ce don de la
grâce et de l’amour de Dieu est universel – c’est-à-dire destiné à tout le monde !
« En effet, Dieu était en Christ, réconciliant les hommes avec lui-même, sans
tenir compte de leurs fautes […] »
(2 Co 5.19). C’est ainsi que Paul exprime l’amour miséricordieux de Dieu pour
nous. Il dit en fait que tout dans le ciel et
sur la terre a été réconcilié avec Dieu en
Christ (Col 1.19,20).
Quand nous le comprenons de manière
théologique, l’enfer n’est pas une prison
ni un endroit où Dieu jette les gens qu’il
déteste. L’enfer, c’est nier qui est Dieu et
qui nous sommes censés devenir selon
son plan : réconciliés en Christ, dans
une relation éternelle avec lui pour partager sa vie. L’enfer, c’est refuser
d’accepter l’amour de Dieu, préférant
plutôt le monde égoïste que nous nous
sommes fabriqué.
Qu’est-ce que cela a à voir avec l’enfer ?
Si nous voulons parler de la raison pour
laquelle une personne pourrait se
retrouver en enfer, séparée de Dieu,
nous devons d’abord comprendre que
cela est totalement contraire à ce que
Dieu désire pour tout le monde. C’est
pourquoi il a déjà accompli une œuvre
pour sauver tous les hommes. Aucun
être humain n’a à aller en enfer, sauf s’il
le choisit à cause d’un esprit récalcitrant.
Ceux qui sont en enfer y sont parce
qu’ils ne veulent aucune communion
avec le Dieu qui les a créés et qui les
aime. Ceux qui sont au ciel y sont parce
qu’ils unissent leur destinée à celle de
Christ, l’acceptent comme Sauveur, le
suivent comme Seigneur et croient au
don de sa grâce bienveillante. Lewis a
écrit : « Aucune âme qui désire sérieusement et constamment la joie n’en sera
jamais privée. Ceux qui cherchent trouvent. À ceux qui frappent, la porte est
Qui se retrouvera en enfer et pourquoi
ouverte. »11
« Tout ce que nous disons sur l’enfer
doit être dit sous la rubrique d’une
réconciliation universelle et véritable de
toutes choses en Christ, dit Capon. Si
nous choisissons d’expliquer à quoi peut
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Les gens en enfer s’y retrouvent malgré
la volonté de Dieu pour eux, et non à
cause d’elle. Ils ont ce qu’ils désirent, et
non ce que Dieu désire pour eux.
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Dieu ne condamne personne à l’enfer
par un décret prédéterminé. Le témoignage de l’Écriture nous annonce la
Bonne Nouvelle glorieuse que Dieu
notre Sauveur « veut que tous les
hommes soient sauvés et parviennent à
la connaissance de la vérité »
(1 Timothée 2.4). Il ne « veut pas qu’un
seul périsse. Il voudrait, au contraire,
que tous parviennent à se convertir »
(2 Pierre 3.9).
L’enfer est un désastre funeste, tragique, lugubre et non nécessaire. Il est
en contradiction totale avec tout ce que
Dieu veut pour nous. Un pasteur chrétien a un jour résumé ce que cela signifie être avec Dieu, par opposition à choisir d’être sans lui en enfer. Il a simplement dit : « Le ciel, c’est trèèès bon.
L’enfer, c’est trèèès mauvais. » Il a tout
à fait raison !NL
Notes:
1. Jonathan Edwards, The Works of
President Edwards, vol. 7 (Worcester,
Mass.: Isaiah Thomas, 1809), p. 486 à
502.
2. William Crockett, éditeur, Four Views
on Hell (Zondervan, 1992), p. 149.
3. Christopher W. Morgan et Robert A
Peterson, Hell Under Fire (Zondervan,
2004), p. 34.
4. Larry Dixon, « Whatever Happened to
Hell? » édition juin 1993 du magazine
Moody, p. 26.
5. Morgan et Peterson, p. 240.
6. Ibid., extraits des pages 28 et 29.
7. Sondage Gallup mené du 10 au 13
mai 2007.
8. Robert Farrar Capon, The Mystery of
Christ… And Why We Don’t Get It
(Eerdmans, 1993) p. 10.
9. Robert Farrar Capon, Between Noon
and Three (Eerdmans, 1997), p. 269.
10. C.S. Lewis, The Great Divorce
(Simon et Schuster, édition 1996), p. 72.
11. Ibid.