1516_FLACSO_rapport1
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LIENHARD Judith BUENOS AIRES, JUILLET 2015-JUIN 2016 Palermo Soho, Buenos Aires, Juillet 2016 1 Introduction I. LA FLACSO, UNE FAC’ PAS COMME LES AUTRES A. FLACSO : une faculté à taille humaine B. FLACSO : une faculté de posgrado C. FLACSO : une vie à côté de la fac II. BUENOS AIRES, UN SEMBLANT DE VILLE EUROPÉENNE A. Flâner dans Buenos Aires : chercher Paris B. Vivre à Buenos Aires : s’adapter face à l’instabilité C. Etudier à Buenos Aires : concilier vie et étude III. LA 3A, beaucoup de « hauts »… et quelques « bas » ! A. Partir pour se dépayser B. Partir pour se retrouver C. Partir et revenir Conclusion 2 Introduction : L’Amérique du Sud, c’était certain ! Je voulais rompre un temps avec la culture occidentale, et le sous-continent m’apparaissait chaleureux, avec son lot d’imperfections, développement précipité oblige, et ses démocraties toujours plus fragilisées, mais aux peuples en marche, faisant preuve de la même passion pour les révoltes politiques que pour les danses endiablées de rues. Bon, certes, il y allait là beaucoup de fantasmes, j’en avais conscience. Et certains ne tomberont qu’à mon arrivée - non, il n’y a pas la mer à Buenos Aires ; oui, il pleut beaucoup ! -. Mon niveau d’espagnol, médiocre et stagnant depuis la 4ème, fut probablement le seul élément tout à fait rationnel dans ce choix… que je ne regrette pas ! Parisienne, nées de parents alsacien et allemand, pur produit de la construction européenne, je cherchais un dépaysement en demi-teinte : partir à l’autre bout du monde, certes, mais non sans quelques repères familiers. Vous connaissez le refrain : « Buenos Aires, Paris de l’Amérique latine ». J’ai fait confiance à ces sirènes, choisissant cinq universités dans cette ville, et une à Santiago de Chile, qui me semblait correspondre plus ou moins au même critères. La FLACSO était mon deuxième choix, mais, comme je l’avais écrit mot pour mot dans ma lettre de motivation, elle était « aussi un premier choix ». Séduite par la faible charge horaire hebdomadaire, et son programme de master, j’y voyais l’opportunité de m’investir pleinement dans une ou deux activités extra-scolaires, de prendre le temps que je n’ai pas forcément à Paris pour écrire ou enfin apprendre à utiliser cet argentique qui trainait dans mon placard, tout en bénéficiant de cours de qualité avec des étudiants plus expérimentés, et majoritairement latino-américains. I. LA FLACSO, UNE FAC’ PAS COMME LES AUTRES Vous le réaliserez bien vite en comparant avec vos autres amis en échange, la FLACSO est unique en son genre dans de florilège d’universités proposées à Buenos Aires. Peu habituée à recevoir des jeunes de niveau licence, aucun accueil spécifique n’y attend les rares « intercambios ». Les étudiants que vous y rencontrerez sont déjà tous titulaires d’une licenciatura, diplôme qui, à la différence de la France, peut s’étendre de cinq à sept ans. Cela fait de vous le benjamin de l’établissement. La plus part des élèves ont plus de vingt-cinq ans, parfois bien plus. Il n’y a donc pas de vie étudiante à proprement parler, car la plus part des élèves sont déjà salariés en parallèle de leurs études, peuvent avoir une famille, voir des enfants. C’est une immersion frontale dans le monde académique argentin, mais qui se passe sans encombre pour les « sciencepistes » débrouillards que vous êtes. C’est surtout une opportunité idéale, par la faible charge horaire, pour l’étudiant voulant conjuguer son expérience universitaire avec un stage, une association ou un club de sport. Enfin c’est l’une des rares facs ouvertes qui permettent de rencontrer des Argentins issus de milieux divers, et non pas uniquement des enfants de très hauts cadres vivant dans les tours dorées du barrio norte de la ville. 3 A. FLACSO : une faculté à taille humaine La Facultad Latinoamericana de Ciencias Sociales (FLACSO) Argentina nait en 1974, à l’initiative de l’UNESCO, selon un projet bien défini : former, dans tout un éventail de disciplines des sciences sociales, des experts qui se destinent à travailler pour l’administration publique, et à œuvrer pour la démocratie en Argentine. Aujourd’hui, la FLACSO jouit d’une excellente réputation, en Argentine comme dans les pays voisins, pour sa formation de deuxième cycle et doctorale. Située au centre de la ville, entre Balvanero et Recoleta, Ayacucho 555 très exactement, la FLACSO est discrète. Vous croirez peut-être vous aussi perdre la tête, passant plusieurs fois devant, les premiers jours, sans même la remarquer. Car malgré ce prestige régional, et à l’inverse de l’UCA à Puerto Madero ou de la Torcuato di Tella à Belgrano, aux campus tapent à l’oeil, vous n’y trouverez qu’un modeste édifice, labyrinthique et de petite taille, qui fait l’effet d’un cocon. Cette mini fourmilière - il faut le voir pour comprendre la formule – a cela d’agréable que vous en connaitrez vite la plus part des membres: l’adorable gérant de la cafétéria, à laquelle vous viendrez boire au comptoir un expresso en y plongeant quelques medialunas, mais surtout Muriel, votre responsable d’échange. Dans l’administration chaotique des services argentins, elle vous guidera patiemment dans vos démarches et notamment dans le choix de vos cours, tout en vous conseillant quelques bons bouquins et film argentins pour parfaire votre immersion culturelle. Si vous vous sentez un peu perdu les premières semaines, n’hésitez pas un seul instant à toquer au primer piso, au secretaria académica, elle vous répondra avec plaisir sur tout et n’importe quoi. Gardez toutefois à l’esprit que l’administration argentine, en général, est une vieille machine un peu rouée. Ainsi, arrivée à Buenos Aires fin août après un mois de voyage, je n’ai pu commencer les cours que début octobre, car les classes du programme d’échange avaient déjà commencé depuis un mois, et celles des masters n’étaient pas encore fixées. De même, au second semestre, je n’ai appris la date de ma rentrée, début mars, qu’une petite semaine avant le début des cours. Bien sur vous pousserez quelques soupirs résignés face à cette désorganisation, mais vous réaliserez que ce semi-chao permet également une souplesse qui joue parfois en votre faveur, notamment pour vos voyages qui grappillent parfois sur des heures de cours imprévues. B. FLACSO : une faculté de posgrado La FLACSO est une faculté de posgrado, c’est à dire qu’elle ne dispense que des formations de master. Il n’est donc pas toujours facile de suivre car de nombreuses références théoriques, conceptuelles, ou même historiques échappent au jeune étudiant européen qui finit tout juste son Bachelor… Mais rien d’insurmontable ! Le grand avantage c’est qu’il n’y a pas d’examen écrit mais uniquement des mémoires à réaliser chez soi et à envoyer par mail. Cela permet d’allonger les vacances et de partir en voyage dès la fin de la session, puisqu’aucune semaine d’examen n’est balisée. Par ailleurs, petits chanceux, la FLACSO vient d’ouvrir un programme destiné à des étudiants en échange (CIEE), à 99% américains (nous n’étions que deux françaises ce second 4 semestre, toutes deux de Sciences Po Paris), qui dispensent des cours plus introductifs et accessibles. Pour obtenir le nombre requis de crédits, il vous faudra choisir trois cours de chacun trois heures, soit une charge horaire de 9 heures par semaine. L’autre grand intérêt de ce programme est qu’il permet de rencontrer des étudiants de son âge. Je vous conseille vivement de suivre deux cours du programme d’étudiants en échange et un d’un programme de master par semestre. Cela me semble être la balance idéale entre cours d’introduction, de très bonne qualité et qui vous permettront d’avoirs quelques repères clefs sur la société argentine, et cours de master, plus approfondi, qui sont l’occasion de se frotter aux concepts d’auteurs sud-américains, et de travailler avec des étudiants et doctorants locaux sur des problématiques régionales. Premier semestre (octobre 2015 – décembre 2015) Ciudadanía, sistema político y organizaciones de la sociedad civil, professeur Sergio de Piero, 10 séances : Si vous épluchez d’autres rapports de séjour, vous remarquerez que ce cours est une constante chez les sciencespistes en échange. Et je le recommande à mon tour ! Ce fut mon cours préféré de ce premier semestre. Le professeur est à la fois pédagogue et blagueur, rendant l’ambiance de classe agréable et invitant à l’échange. Le cours se présente comme une étude des nouveaux mouvements sociaux en Amérique Latine, de leurs rapports aux institutions, et de la redéfinition du concept de citoyenneté qu’ils impliquent. S’appuyant sur des textes théoriques, le professeur développe des cas historiques, tirés de différents pays du sous-continent. C’est tout l’intérêt du cours que de repasser sur des évènements auxquels nous n’avions porté qu’un intérêt distrait dans nos médias Européens, et d’en proposer une analyse politico-sociale plus fine. Les textes à lire d’une semaine sur l’autre, conséquents, sont absolument nécessaires à la bonne compréhension du cours, car le professeur se contente de repasser sur les points les plus saillants, sans réexpliquer tous les concepts développés. La validation passe habituellement par un mémoire sur une étude de cas, mais le professeur a préféré pour moi, seule étudiante étrangère de la classe, adapter le mode d’évaluation. J’ai du répondre, à la maison, à trois questions sur un corpus de textes, en rédigeant des paragraphes argumentés, le tout sur une dizaine de pages. Integración Regional, professeurs Alejandra Racovschik et Leticia Gonzalez, 10 séances : Le cours propose une analyse comparée des différentes formes d’intégration régionale sur le continent Américain, en détaillant les différents degrés d’intégration et le fonctionnement des institutions. Il détaille aussi les politiques menées à l’échelle régionale en terme de santé, d’éducation, de politiques sociales et économiques. C’est un cours qui allie technique (études d’arrêts, de communiqués) et théorie (textes académiques), de façon parfois un peu aride pour l’ignare européen, qui ne connaît guère plus que le fonctionnement (et encore) de l’Union Européenne. La bibliographie est gargantuesque, et les professeurs ne s’attendent pas à ce que vous la parcouriez intégralement. A vous de faire le tri selon les sujets qui vous intéressent. 5 La validation passe par la rédaction d’un mémoire d’une quinzaine de page sur l’étude d’une problématique rencontrée par l’une des intégrations régionales étudiées. Teoría Política II, professeur Andres Rosler, 10 séances : Il s’agit du deuxième module, sur trois, du cours de théorie politique. C’est de loin le cours le plus difficile qu’il m’ait été donné de suivre à la FLACSO. Le professeur développe la théorie de grands penseurs, comme Aristote ou Hobbes, qu’il demande aux étudiants de lire préalablement chez eux. C’est un homme brillant, mais qui manque, je crois, de pédagogie. Sa pensée s’éparpille dans tous les sens, et il est difficile d’en tirer un court organisé et rigoureux, deux qualités pourtant essentielles dans cette discipline. La prise de note en est quasi impossible. Toutefois, les Argentins, qui prennent la parole beaucoup plus volontiers que les élèves français, font un effort de réappropriation des éléments conceptuels vus en cours, en l’adaptant à des situations historiques ou contemporaines, ce qui donne lieu à des discussions intéressantes. Le professeur est par ailleurs très sympathique. Son cours ayant lieu tard le jeudi soir, la dernière heure est souvent occupée par le visionnage de vidéos, notamment des Monty Python dont il raffole. La validation passe par la rédaction d’un mémoire d’une quinzaine de pages sur le concept d’un auteur. Deuxième trimestre (mars-juin 2016) Cuestiones culturales de Argentina, professeur Francisco Corigliano, 12 séances : Le cours fait parti de la maquette proposée aux étudiants du programme d’échange. Le professeur, un érudit, docteur en histoire, qui vous transmettra sans mal sa passion, est adorable. Chacun de ses cours traite d’une « question culturelle » liée à l’histoire de l’Argentine : la colonisation ; l’immigration ; la guerre des Malouines ; la dictature militaire, etc. Des textes sont à lire d’une semaine sur l’autre, et un questionnaire à choix multiples est à remplir. Le professeur revient en cours uniquement sur les points traités dans le QCM, souvent très concis. Cette méthodologie permet de retenir rapidement les points centraux de son cours, qu’il agrémente toujours d’anecdotes illustratives pertinentes. C’est probablement le cours grâce auquel j’ai le plus appris sur l’histoire du pays et l’identité argentine. Les ressources pédagogiques qu’ils utilisent sont variées : textes, cartes, photos, musique, films. Vous ne vous ennuierez pas, prenez ce cours sans faute ! La validation passe par deux évaluations : des questions de synthèses transversales à rédiger chez soi. El Nuevo Cine Argentino, professeur XXX, 12 séances : Ce cours fait lui aussi parti du programme d’échange. Le professeur développe le mouvement du nouveau cinéma argentin, datant du début des années 2000. Un film est à voir pour chaque cours, auquel s’ajoutent des textes à lire. La filmographie ne se limite pas aux frontières de l’Argentine, vous aurez aussi bien l’occasion d’analyser Citizen Kane (Orson 6 Welles) que Shoah (Claude Lanzmann). Chaque séance développe un concept cinématographique. Le professeur distribue à chaque début de cours un résumé de ce qu’il traitera ensuite, ce qui permet de suivre facilement le déroulé de la classe. Les points traités sont pertinents, et les élèves sont invités à prendre la parole très librement. Seul bémol, les films ne peuvent être visionnés qu’à partir de l’intranet de la faculté, accessible depuis la bibliothèque, ce qui demande de venir jusqu’à la faculté en dehors des heures de cours. Par ailleurs, la charge de travail est plus importante qu’elle n’en a l’air ! Les étudiants participent à l’activité d’un blog sur le cinéma auxquels ils contribuent par des brefs articles sur les films vus, mais aussi des analyses plus poussées problématisées. La validation passe par l’écriture de quatre post pour le blog ; une analyse thématique et problématisée sur un film (par exemple, le concept de genre dans tel film) ; et un essai final. La participation orale au cours est elle aussi notée. C. FLACSO : une vie à côté de la fac Je ré-insiste ici une dernière fois sur la « vie étudiante », afin de rassurer le futur 3A inquiet de choisir la FLACSO, un « ovni » en comparaison des autres facultés proposées. Les étudiants ont échange, hors programme CIEE, sont très peu nombreux. Au premier semestre, nous n’étions que deux, toutes deux de Sciences Po Paris. Le profil des étudiants (plus âgés et travaillant à mi-temps) ainsi que l’organisation des cours (regroupé le matin ou le soir) présentent certes quelques inconvénients mais aussi des avantages. A la pause café, vous aurez l’occasion de rencontrer vos collègues. Ces discussions, bien que furtives et disparates, sont intéressantes car elles sont l’une des rares méditions avec la réalité Argentine, dont on peut vite passer à côté, compte-tenu de l’importance de la communauté d’ « expat’ » à Buenos Aires. Ce fut pour moi l’occasion d’entendre ce que des porteños, pour la plus part issu de la classe moyenne, pensait des élections présidentielles qui tenaient lieu, et du moment historique qu’ils vécurent lors de l’annonce de la victoire de Macri. S’il s’agit d’échanges intellectuels plus que d’amitiés fusionnelles, nulle inquiétude ! La FLACSO vous laisse un temps libre considérable, qui est aussi fait pour s’épanouir dans une vie sociale en dehors de la faculté. Pour rencontrer des personnes avec qui parcourir la ville, voyager, et sortir, vous n’aurez aucun mal tant la vie étudiante est bien organisée, notamment par deux associations incontournables : BAIS et Argentina For All, dont les évènements s’adressent à tous les étudiants en échange à Buenos Aires, indépendamment de leurs universités. Par ailleurs, la ville regorge d’immenses maisons où vivent joyeusement parfois jusqu’à vingt étudiants. Consciente que je ne rencontrerai pas grande monde à la fac, j’ai emménagé dans une de ses grandes « colocs » où j’ai rencontré de fidèles compagnons de voyage, des acolytes de soirées, et de précieux amis. La très faible charge d’horaire de la FLACSO (9 heures par semaine), un peu déroutante les premières semaines, demande de la discipline. Car après les cours, reste à lire consciencieusement les cinquante pages hebdomadaires par matière et se mettre raisonnablement en amont à la rédaction des mémoires demandés en fin de semestre. 7 En contrepartie, cela vous permet de profiter de votre temps libre, une denrée rare, dont vous manquerez probablement les prochaines années. Pour cela, Buenos Aires regorge d’activités culturelles, sportives ou associatives, dont beaucoup sont gratuites. Vous ne vous ennuierez jamais. Le plus difficile reste de savoir dans quoi s’investir ! Pour ma part, j’ai pris beaucoup de plaisir à découvrir le tango, m’inscrire dans une salle de sport – véritable enquête de terrain ethnographique tant le corps est un culte ici -, courir les centres culturels où se donnent les spectacles les plus farfelus. J’ai également été bénévole dans l’association Zéro Fronteras qui organise quotidiennement du soutien scolaire ou des ateliers d’arts plastiques dans la Villa 31, la favéla tentaculaire au cœur de la ville. Au second semestre, n’ayant à valider que deux cours à la FLACSO, j’ai effectué un stage de deux mois dans l’organisation RACI, organisme venant à l’aide d’ONG en Argentine, à raison de douze heures par semaine. II. BUENOS AIRES, UN SEMBLANT DE VILLE EUROPÉENNE A. Flâner dans Buenos Aires : chercher Paris L’on dit souvent que Buenos Aires est le « Paris de l’Amérique latine », tant certains immeubles du Micro Centro, ou le majestueux Teatro Colon, ont des airs d’édifices parisiens. La comparaison s’arrête là en ce qui concerne la capitale française, mais Buenos Aires a bien l’allure d’une ville européenne. Quelque chose nous y est familier, de son organisation générale jusqu’au carreau madrilène de ses trottoirs. Mais l’expérience au quotidien de la capitale argentine, parfois éprouvante, montre bien qu’un faussé la sépare encore des grandes capitales européennes. Buenos Aires, c’est deux fois Paris. Et c’est une différence de taille compte tenu de la qualité du service de transport argentin qui vous fera porter un regard bien plus indulgent sur la RATP, avec l’avantage majeur, cependant, d’être très économique (6 pesos le trajet, soit moins de 50 centimes d’euros). Les bus, plus de 500, circulent dans toute la ville 24h/24, de façon toutefois très variable selon les lignes. Le métro, moyen de transport le plus rapide, connaît des heures de pointe lors desquelles il est impraticable. La gestion des eaux est inexistante bien que Buenos Aires soit une ville où il pleuve beaucoup. La vie s’arrête lorsque les trombes d’eau s’abattent : plus de bus, plus de cours, et les portenos restent chez eux. Vous aurez probablement à sauter par-dessus un mètre cinquante de caniveaux boueux ou, résigné, à patauger en plein dedans. Buenos Aires demeure, et c’est bien sa magie, une ville géniale à visiter. Chaque quartier révèle un aspect différent de la capitale, très hétérogène dans son ensemble. Aux côtés des derniers artisans, épiciers et marchands à leur compte, tenant des petits « bouiboui » aux ustensiles improbables, s’installent des restaurants branchés, et magasins de luxe. C’est tout un jeu pour les yeux que de détailler la vie frénétique qui se déroule sur l’interminable Avenida de Julio, la plus large au monde (une véritable autoroute dans la ville). Précision nécessaire pour les étudiantes : vos oreilles siffleront des « piropos », ces délicats compliments lancés le sourire jusqu’aux oreilles par des porteños de tout âge et classe sociale. Pour l’Argentin, il s’agit de remarques flatteuses et vous constaterez avec étonnement qu’elles sont le plus souvent perçues comme telles par les Argentines. 8 B. Vivre à Buenos Aires : s’adapter face à l’instabilité Vivre à la porteña, c’est vivre intensément. La plus part des Argentins jonglent entre plusieurs travails, et trouvent quand même le temps de faire un asado (le barbecue local) le soir et de danser le tango la nuit. Le marasme économique qui frappe en plein fouet le pays se vie quotidiennement : dans l’augmentation des prix insensés (le prix de votre yaourt préféré peut doubler d’une semaine à l’autre) ; les enfants venant faire la manche inlassablement à chaque station de métro ; ou encore les professeurs d’université devant cumuler les emplois pour joindre les deux bouts. A cela s’ajoute une tension politique, arrivée à son comble lors de l’élection de Macri en novembre dernier, aujourd’hui impliqué dans l’affaire des « Panama papers ». L’Argentine est une société dont la sphère politique a totalement imbibée la sphère sociale, notamment chez les étudiants, et les rebondissements sont nombreux. L ‘Argentine a connu douze ans de « kirchnérisme », ce gouvernement populiste chargé de redresser l’économie d’un pays en faillite après la crise de 2001, souvent taxé de populisme pour sa logique interventionniste dans l’économie, accusé par le FMI de manipuler les chiffres de son inflation (10% officiellement, jusqu’à 25% semblerait-il). La côte de popularité de Cristina Kirchner s’est effondrée tout au long de son second mandat (20112015) au sein des classes moyenne et élevée, qui se sont mobilisées contre une réforme de la Constitution pour permettre sa réélection. En votant Macri, le maire de Buenos Aires, et son slogan « Cambiemos », l’Argentine élit un premier gouverner de droite, en rupture avec la politique économique socialiste et protectionniste de son prédécesseur. C’est une révolution pour le pays car beaucoup des étudiants de notre âge n’avait connu qu’une seule famille politique. Les mesures lancées par le nouveau président ont déjà des applications concrètes (accord avec les « fonds vautours » ; réduction du personnel de la fonction publique et des subventions d’état), qui touche jusqu’à la communauté d’expatriés occidentaux – nous - avec la disparition du « taux blue » (taux de change officieux de l’euro et du dollar) qui permettait de changer ses sous à un taux plus avantageux que celui officiel qui niait l’inflation en affirmation qu’1 euros revenait à 10 pesos (contre 1 euros à 16 pesos environ au taux officieux). A cette instabilité politique et économique s’ajoute une détresse sociale palpable jusqu’au cœur de la ville. Dix minutes suffisent pour passer des majestueuses ambassades de type haussmannien du quartier de La Recoletta à la Villa Miséria, bidonville tentaculaire, du quartier de Retiro. C. Etudier à Buenos Aires : gagner en autonomie La comparaison entre les systèmes universitaires argentin et français est délicate, concernant la FLACSO, car cette faculté a elle-même un statut à part parmi les universités argentines. Trois grandes différences majeures avec l’enseignement de Sciences Po m’ont marquées : la souplesse de l’organisation des cours ; le peu d’encadrement des étudiants et l’absence de vie étudiante. 9 Les cours de la FLACSO sont souvent plus un débat ouvert sur les textes lus préalablement qu’un cours magistral. Les étudiants, plus âgés, jouissent d’une expérience professionnelle et académique, très diverse selon les uns et les autres, qui permettent d’enrichir le débat. On se sent un peu à l’écart des ces discussions, pas vraiment à même d’y prendre part. A la FLACSO, les étudiants et les professeurs sont au même niveau, on ne retrouve pas vraiment la relation verticale « maître-élève » à laquelle nous sommes habitués dans les écoles françaises. La discipline est toute relative : chacun arrive à l’heure qu’il peut et rend son travail dans la mesure du possible, car les professeurs ont conscience que leurs étudiants ont pour la plus part un travail qui accapare la majorité de leur temps. Les professeurs n’organisent pas de suivi du travail de recherche de leurs élèves, et ne sont pas vraiment disponibles pour en discuter (difficile à joindre, pressés après les cours, absents lors de l’intercours). J’y ai vu une claire différence avec l’encadrement du programme d’étudiants américains en échange. Dans ce dernier, des travaux réguliers sont demandés, avec des corrections approfondies, et la possibilité d’échanger avec le professeur en cas de doute sur le sujet de mémoire choisi. Une salle de travail avec des ordinateurs est mise à dispositions. Les référents auxquels s’adresser en cas de problèmes sont clairement identifiés. La vie étudiante est inexistante à la FLACSO. C’est probablement la rupture la plus frappante compte-tenu de la vitalité des associations étudiantes de Sciences Po. L’explication est pragmatique : les élèves n’ont pas le temps. Cela est différent dans les autres universités, souvent privées, de la ville qui organisent via l’équivalent de notre Bureau des Elèves des asados, cours de Tango, ou autre évènements qui permettent aux étudiants de se rencontrer. Je crois que la réelle différence entre la FLACSO et Sciences Po est celle que l’on retrouve, à un moindre degré en France, entre universités publiques et écoles privées. L’on se sent un peu perdu dans ces premières, immenses institutions qui manquent de fonds pour offrir tous les services aux étudiants que les secondes peuvent se permettre. Les étudiants en échange à la UBA, faculté publique, la plus prestigieuse en Argentine et à l’étranger, un peu « la Sorbonne » locale, partage le même ressenti. III. LA 3A, beaucoup de « hauts »… et quelques « bas » ! A la différence de la grande majorité des étudiants en échange, les « sciencepistes » ont le privilège de rester un an dans leur pays d’accueil. Cet étalement dans la durée, son rythme particulier concernant l’Argentine car l’année est coupée par trois mois et demi de grandes vacances d’été en son milieu (saisons inversées), a joué un rôle important dans mon cheminement. Le premier semestre était celui de l’euphorie de la découverte du nouveau, de l’ « Autre », sans réelle réflexion sur ce que je vivais en aval ; le second semestre est bien celui de l’introspection : la digestion des six premiers mois ; l’interrogation sur les cinq à venir ; et le casse-tête de l’après. Le second semestre s’est avéré beaucoup plus éprouvant moralement et intellectuellement. Mais à quelques mois du grand départ, je suis ravie d’avoir pu vivre, en une année, deux expériences très différentes, tant dans le mode de vie que dans l’état d’esprit qui l’accompagnait. A. Partir pour se dépayser 10 Bien sur, le grand acquis de cette année, c’est l’espagnol ! Sans prétendre être bilingue, je peux désormais m’exprimer dans à peu près n’importe quelle situation : au milieu d’une dizaine d’Argentins lors d’une « previa » (apéro) tout comme à un entretien d’embauche. L’espagnol, ce n’est pas tout… Le véritable cap c’est de parler « porteño », ou les « ll » deviennent des « ch » ; les fins de phrases prennent des intonations italiennes; et toute élocution s’agrémente d’un « che cabron/pive/boludo ». La langue acquise, reste l’état d’esprit : la « buena onda » porteña. Si l’on utilise l’expression à toutes les sauces, l’on y retrouve toujours cette légèreté parfois déroutante; cet épicurisme qui donne tant de saveur à chaque moment ; cette envie de vivre intensément ; et cette culture de l’accueil. Bon, il est fort possible que l’amour que portent les Argentins aux Français explique leur comportement, mais il n’est pas rare d’être invité par une famille rencontrée dans un marché à partager un asado ; ou le maté avec un groupe d’étudiants posés sur une pelouse. Cela se fait naturellement. Et ça vous gagne ! Rentrée en France quelques semaines au mois de Janvier m’a fait réaliser non seulement combien les Argentins étaient différents dans leur fonctionnement des Français, mais aussi combien je m’était imbibée de leur comportement. Il y’a quelque chose de fascinant à ce que les habitants d’une ville de deux fois la taille de Paris soient toujours aussi chaleureux. Enfin, les longues vacances d’été que vos copains de l’hémisphère Nord vous envieront sont l’occasion de voyager. Brésil, Chili, Bolivie, Uruguay, mais aussi toute l’Argentine en dehors de Buenos Aires : le dépaysement est garanti ! L’on apprend beaucoup en voyageant en backpackers : la rencontre de voyageurs du monde entier ; les différances culturelles régionales que six mois d’immersion préalable vous permettront de remarquer ; la souplesse nécessaire dans l’organisation d’un si long voyage ; et parfois aussi, la non-organisation totale. B. Partir pour se retrouver Les Français, et ils sont nombreux à Buenos Aires, ont souvent mauvaise réputation : ils sont snobs, ne parlent qu’entre eux et dans leur langue. L’on en revient avec la volonté de changer ce préjugé, d’aller vers les autres plus spontanément, et de prendre le temps de les comprendre. Je me souviens d’un débat passionné avec une Argentine, assez « arty », fêtarde, aux idées globalement progressistes, mais absolument opposée à l’avortement. Je crois que je reviens de cette année plus tolérante, avec une plus grande ouverture intellectuelle dans mes débats. Paradoxalement, cela permet aussi de porter un nouveau regard sur l’actualité francofrançaise, qui nous paraît pourtant si loin d’ici. Après trois mois et demi de vadrouille, le retour à un quotidien, même à l’autre bout du monde, est un peu dur. Le second semestre reprend, et il faut tout recommencer ! L’un et l’autre sont deux expériences distinctes mais complémentaires. Ce premier semestre avait été celui d’une vie à 100 à l’heure, si intense et unique, que je voyais mal comment le reproduire. Le second a été plus calme, une routine s’était installée. J’y ai pris le temps de réfléchir à ce que je voulais pour l’avenir, ce qui me motivait vraiment. J’ai commencé, avec toute la dose d’angoisse que cela implique, à réfléchir à « l’après ». 11 C. Partir et revenir A l’arrivée, les acquis sont, je crois, nombreux : une capacité à se laisser porter, à accueillir avec enthousiasme tout ce que l’on me propose, à revaloriser ce que je vis là, tout de suite ; mais aussi une faculté à accepter les temps-morts, voire l’ennui parfois, et l’inconnu de ce qui nous attend au retour. Malgré tous ces changements, le choix de master a été un véritable « casse-tête ». Intéressée par les politiques urbaines, et ses différents métiers sur lesquels je m’étais renseignée tout au long de ma deuxième année, j’ai postulé au double diplôme en « Urban Policy » avec la London School of Economics, dont j’attends encore le résultat. Vivre à Buenos Aires un an aura confirmé cet intérêt. La ville de Buenos Aires développe des projets formidables, et fait notamment preuve d’une époustouflante vitalité culturelle ! Par ailleurs, mon long périple en Amérique Latine m’a permis de réaliser que l’innovation se cache parfois là où on l’attend le moins : par exemple dans ce télésiège flambant-neuf qui permet d’aller d’un bout à l’autre de la, par ailleurs, chaotique La Paz en un rien de temps. Conclusion C’est sereinement, mais le cœur serré, que je reviens sur ces onze mois passés à Buenos Aires. Paradoxalement, si le déroulement de ma 3A n’a pas suivi à la lettre le scénario que je lui avais préparé, les objectifs que je m’étais fixés ont eux été remplis. J’ai su partir à l’autre bout du monde, m’y installer, m’imprégner d’une culture, apprendre une langue, jusqu’à me sentir chez moi. J’ai appris à vivre avec une dizaine de personnes, souriant à la énième panne d’électricité, ou la montagne de vaisselles salles dans l’évier. J’ai appris à rester seule, aussi, à conquérir la ville sans personne. J’ai voyagé sans toujours savoir où j’allais, réceptive à toutes les rencontres, toutes les propositions. Et je commence à mieux me connaître, identifier mes priorités, et la place de chaque chose : l’investissement que je suis prête à donner pour mes études, l’envie de repartir à l’étranger, les secteurs dans lesquels je pourrais m’épanouir professionnellement. C’est un consensus que je rejoins : la 3A est l’une des années, voir l’année, la plus intense de ma vie. Car elle est une rupture radicale. Toutefois j’aimerais mettre en garde contre cette surenchère, à laquelle on est vite tenté de succomber, de celui qui passe la meilleure année, la plus folle, la plus excitante, bref « la plus plus ». Elle ne se passera pas comme vous l’imaginez, parce que vous l’aurez trop rêver, et que bien heureusement, vous changerez, et vos envies avec. Cette année, j’ai découvert un nouveau rapport au temps, un nouveau rythme qui rompt avec la routine des études supérieures parisiennes : parfois tout s’accélère, le temps semble comme compressé, et l’on a le vertige en pensant au peu de mois qu’il nous reste et tout ce que l’on veut encore faire et voir ; d’autres fois les jours s’égrainent lentement, l’on se sent un peu seul, et la maison nous manque. Bien sur, il s’agit là d’une expérience personnelle, mais s’il y’a bien un constat que l’on peut généraliser, c’est que cette année vaut la peine d’être vécue ! 12 Annexe : Visas : Le visa touristique argentin n’est valable que trois mois. Au-delà, il vous faudra payer une amende à la sortie. Deux choix s’offrent donc à vous : ou bien sortir tous les trois mois du territoire, ou bien affronter les services d’immigration argentin (pas une mince affaire). Cela dépend de votre université : certaines exigent l’obtention d’un visa étudiant pour valider les examens, d’autres non. Pour ma part, restant un an, il me semblait plus intéressant de faire la démarche pour obtenir un visa étudiant, qui permet par ailleurs un certain nombre de réductions (musées, cinémas, billets de bus, etc.). Les pièces nécessaires pour obtenir un visa étudiant (valable 6 mois ou 1 an) sont : - un passeport en cours de validité + une photocopie de CHAQUE page de celui-ci - un certificat d’antécédents pénaux argentins, payant, pour lequel il faut demander un rendez-vous sur ce site : http://www.dnrec.jus.gov.ar/AtPartic_Personalmente.aspx - un extrait de casier judiciaire français, dont la demande, gratuite, peut se faire sur ce site : https://www.cjn.justice.gouv.fr/cjn/b3/eje20 - une traduction, payante, de vos papiers français par un traducteur public argentin répertorié - un certificat de domicile délivré par le commissariat le plus proche de chez vous. Cela s’avère assez contraignant car la police peut passer n’importe quand dans les 24h suivant votre demande pour vérifier que vous résidez bien à l’adresse indiquée. Je n’ai pas fais la demande, n’en ai pas eu besoin, et ne connais personne qui ait eu de problèmes sans ce certificat… - Deux photos d’identité à faire chez un photographe habilité (n’importe quel magasin Kodak par exemple) ou en Argentine en précisant que c’est pour un DNI. - Certificat d’inscription électronique à la faculté ou « constancia de inscripción » à demander au secrétariat académique de votre fac - Taxe migratoire à payer le jour-même aux migrations. Coût : AR$600 en espèces. Arrivée à Buenos Aires : Logement : Il existe deux principaux sites sur lesquels trouver des appartements et des colocations à Buenos Aires : http://buenosaires.craigslist.org (vivienda > alquiler de piso o piso compartido) et http://www.compartodepto.com. Le premier propose des loyers globalement plus chers que le second car il est très prisé des étudiants en échange européens et nordaméricains, tandis que le second est plus « latino ». Le temps de trouver, je vous conseille de louer un Airbnb si vous arrivez avec un ou des amis ; ou une chambre dans une auberge sympa et étudiante, au centre de la ville pour rencontrer du monde et éviter de faire 10 000 aller-retour dans des coins opposés. Les loyers sont plus chers qu’on ne l’imagine, et ne cesse d’augmenter avec l’inflation. Toutefois, cela varie énormément d’un quartier à l’autre : Palermo et San Telmo, très réputés chez les jeunes, sont hors-de-prix, il suffit de s’éloigner de quelques rues pour voir les prix 13 baisser de 100 à 200 euros. Par ailleurs, il revient plus cher de vivre dans l’une de ses grandes colocations, très sympa – j’en ai fait deux fois l’expérience - tenues par des « dueños » souvent plus fous et escrocs les uns que les autres, que de louer son propre appartement pour deux ou trois personnes. Comptez : - entre 400/450 et 500/550 euros pour une chambre à Palermo dans une grande colocation - entre 350/400 et 450/500 pour une chambre à San Telmo dans une grande colocation - entre 250 et 350/400 pour n’importe quel autre quartier pour une chambre dans une grande colocation Il s’agit là de prix indicatifs, susceptibles de varier avec l’inflation. Et l’on peut toujours tomber sur une perle rare ! Gare aux propriétaires qui la plus part de temps ne délivre aucun reçu, et ne font signer aucun contrat tout en demandant un « deposoto », souvent l’équivalent d’un mois de loyer, qu’il ne rende pas forcément à la fin de votre séjour, pour des raisons assez obscures. Renseignez-vous si vous le pouvez auprès des colocataires qui y résident déjà. Au premier semestre je vivais à Palermo, à 2min de la Plaza Armenia, pour 450 euros par mois, puis 300 dans une chambre partagée avec salle de bain privée. Au second semestre, j’ai déménagé à Recoleta, à la frontière de Palermo, métro Aguero (linea D), pour 375 euros. Je vous recommande fortement les quartiers de Recoleta, Almagro, centrales et économiques en comparaison à Palermo, excentré au Nord, ou San Telmo, excentré au Sud. Vous réaliserez bien vite que deux camps s’opposent : les « pro » Palermo, quartier branché, à mi-chemin entre le Marais et le 10ème, où sont tous les bars, les boîtes de nuit et les restaurants tendances ; et les « pro » San Telmo, quartier historiquement plus populaire, aux petits bars et restaurants plus authentiques. Argent : Tout mon premier semestre, j’ai laissé de côté ma carte de crédit car les Européens ou Nord-américains sont tous au « taux blue ». Il s’agit d’un taux de change officieux, bien plus intéressant que le taux officiel, que l’on obtient dans des « casas de cambio » souvent déguisés en bijouterie. Il s’agit là d’une pratique totalement banalisée, et tolérée des forces de polices. - Taux officiel : 1 euros = 10 pesos - Taux officieux : 1 euros = 16 pesos, jusqu’à parfois 18 pesos Le « taux blue » a disparu avec l’arrivée au pouvoir de Macri. Désormais, il est possible de changer dans des bureaux officiels à un taux équivalent au taux blue, et de tirer au distributeur. Il est toutefois impossible de retirer plus de 2000 pesos (environ 125 euros) par jour, et de nombreuses banques prélèvent des commissions. Le budget mensuel nécessaire pour vivre correctement varie énormément en fonction de l’inflation et du quartier dans lequel vous résidez. Mes dépenses s’élèvent à environ 800 euros par moi, loyer compris. Je vis très bien, m’autorisant régulièrement des restaurants, spectacles ou concerts. Toutefois ce budget ne compte pas mes voyages, hormis quelques longs weekends passés non loin de Buenos Aires. Soins médicaux : 14 Le site de l’ambassade de France en Argentine publie une liste des médecins francophones recommandés à Buenos Aires. Carlos Schwartz, dans le quartier de Belgrano, et Nicolas Garrigue, à Recoleta, sont des incontournables. Les deux sont très gentils, parlent parfaitement français, et sont habitués aux diverses assurances internationales et formulaires à remplir pour faire valoir le remboursement. De nombreuses Farmacity sont ouvertes 24h/24, vous y trouverez tout ce dont vous avez besoin. Quant aux hôpitaux, je vous conseille fortement d’opter pour des cliniques privées (en consultant préalablement votre assurance car elles appliquent des prix exorbitants) plutôt que les hôpitaux publiques qui manquent cruellement de moyens et dont les conditions d’hygiène sont douteuses. Voyages : Voyager en Amérique du Sud, et en Argentine, s’avère beaucoup plus onéreux qu’on ne le croit. Un conseil : travaillez en France pour mettre un peu d’argent de côté avant de partir, il y’a mille et une chose à faire. Je ne détaille que synthétiquement mes différents voyages mais me ferais un plaisir de répondre à vos questions ou de vous donner quelques conseils si vous le souhaitez. En Argentine, les destinations les plus prisées sont : Salta, au Nord (comptez une semaine) ; Iguaçu à la frontière avec le Brésil (comptez un long week-end) ; Mendoza et la région des vins (comptez une petite semaine) ; Cordoba et Rosario (comptez un long weekend) ; la Patagonie (comptez une semaine à dix jours selon votre parcours et surtout votre budget) ; Ushuaia où vous irez probablement dans la foulée avec la Patagonie. Les zones touristiques telles que la Patagonie ou la Terre de feu sont hors-de-prix. La plus part des étudiants en échange réservent ces régions pour leurs familles si ils ont la chance de recevoir de la visite, ou se décide à faire du camping durant la saison estivale. Si vous ne pouvez pas vous éparpiller : je vous conseille en priorité Salta et la Patagonie. Vous réaliserez que Buenos Aires ne partage pas grand chose avec le reste de ces terres. Plus l’on va au nord, plus l’on prend conscience des racines indiennes, et de la proximité avec la Bolivie et le Pérou. L’Europe paraît bien loin ! D’un point de vue pratique, il revient souvent plus économique de voyager en bus, certaines compagnies appliquant des tarifs étudiants, qu’en avion car les taxes aéroportuaires sont élevées, et un prix plus élevé est réservé aux touristes. Prenez votre mal en patience pour les 24h qui vous attendent avant de rejoindre Salta ou Iguaçu, les bus sont bien équipés, les sièges se penchent à quasi 180 degrés… Et puis, ca vaut le coup ! Le Brésil fut le grand coup de cœur. J’ai eu la chance de me rendre deux fois à Rio où une amie de Sciences Po résidait. Le dépaysement tropical est total, bien plus qu’à Buenos Aires. J’ai toutefois détesté l’ambiance du Carnaval de Rio de Janeiro. Je vous conseille fortement de vous rendre à Ilha Grande, Paraty, Sao Polo, et Florianopolis. Je n’ai malheureusement pas eu le temps de faire la côte Nord. Là encore, le bus est souvent le moyen de transport le plus intéressant. Les prix sont plutôt moins élevés qu’en Argentine. 15 Au Chili, je recommande San Pedro de Atacama, le point de départ de nombreuses excursions dans la nature, à très haute altitude, dans des paysages stupéfiants, mais qui ont un coût élevé. Je n’ai malheureusement pas pu me rendre à Valparaiso, dont on m’a vanté mille fois les mérites. Le voyage le plus aventurier et dépaysant fut la Bolivie, où j’ai joué trois semaines la « backpackeuse » en faisant la classique boucle : Salar d’Uyuni (au départ de Tupiza, car moins bondé) – Isla del Sol – Copacabana – La Paz – Sucre. Vous pourriez également rajouter Potosi pour y visiter les mines, si vous n’êtes pas claustrophobe et n’êtes pas mal à l’aise à l’idée d’observer les mineurs travailler. 16