Bricolage, vagabondage et apprentissage : Bricolage technique
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Bricolage, vagabondage et apprentissage : Bricolage technique
Bricolage, vagabondage et apprentissage : Bricolage technique, vagabondage intellectuel et apprentissage réciproque par Philippe Colomb, BIU Cujas Tout au long de la journée : les technologies sont « immatures » (Baron), elles évoluent très vite, et pas nécessairement de façon cohérente. Il y a beaucoup d'expérimentations, de nouvelles pistes, de nouveaux services. Les bibliothèques participent pleinement à ces recherches qui sont, nous l'avons vu à de nombreuses reprises aujourd'hui, assez tâtonnantes. Différentes outils se superposent, se complètent ou se doublonnent. Les professionnels de la documentation tentent de créer de la cohérence dans cette complexité en perpétuelle expansion : c'est l'un des objectifs de Domino ou du nouveau site de Cujas, par exemple. Ces imperfections et ces difficultés techniques obligent à une sorte de vagabondage, de passage d'un outil à l'autre, d'un support à l'autre. Les bibliothécaires le regretteront peut-être, mais beaucoup de chercheurs sauront en tirer profit. Comme l’a souligné Thomas Perroud, la recherche est faite de rigueur ET de hasard. Le vagabondage, plus ou moins volontaire, est un élément essentiel du travail intellectuel. Il faut donc que les bibliothèques respectent ses marges libertés, les accompagne et même, dans une certaine limite, les favorisent. Paul Ricœur disait souvent que pour écrire il devait « avoir tous les livres ouverts » devant lui. Les bibliothèques doivent offrir ce choix, cette possibilité de butiner parmi toutes les ressources, permettre ce papillonnage entre les sources et les documents. On a même envie de dire que les bibliothèques doivent être les complices de ce libertinage intellectuel, et offrir toujours plus de possibilité de rencontre : avoir accès à tous les documents, à tout moment, de partout. C'est bien le sens des services de personnalisation, de mise à disposition multiple et de coopération que les centres de documentation mettent en place. Évidemment, comme l'a noté dès l'introduction de cette journée M. Tosello-Bancal, les bibliothèques sont toujours en retard par rapport aux chercheurs, elles ne peuvent jamais totalement les satisfaire... Mais peut-on jamais satisfaire un authentique libertin ? En tout cas, elles font des efforts très importants en ce sens et on en a vu plusieurs exemples très intéressants aujourd'hui : mise en commun de périodiques, mise en place de système d'alerte, d'archives ouvertes. Jamais les chercheurs n'ont eu accès à autant de documentation, notamment sous forme électronique. Mais le vagabondage a ses limites et c'est même le thème de tous les romans « d'apprentissage ». La liberté s'apprend. En bibliothèque, cet apprentissage s'appelle la formation et permet de découvrir toutes les ressources documentaires disponibles et d'apprendre à utiliser les outils d'exploitation de la documentation. Nous avons vu son importance à Paris I et Paris II ce matin. Mais l'apprentissage est toujours réciproque, et je crois que cela a été l'un des thèmes les plus important de la journée : les remarques des utilisateurs, leur retour d'expérience, leur expertises sont de plus en plus indispensables aux professionnels de la documentation qui, eux aussi, sont parfois dépassés par le flux d'information et de nouveaux services proposés. En conclusion, on pourrait dire que depuis quelques années le bibliothécaire bricoleur et le chercheur vagabond semblent avoir appris à mieux se connaître l'un l'autre et ont compris qu'ils devaient absolument travailler ensemble. Les chercheurs doivent comprendre les contraintes, notamment financières, des bibliothèques, et les bibliothécaires les contraintes, notamment stratégiques, de la recherche. Ce couple peut être très fructueux et les projets d'archives ouvertes et de thèses en ligne sont d’excellents exemples de cette richesse. Mais surtout, ce qui me semble ressortir de façon saillante de cette journée, c'est le profond changement de contexte que les bibliothèques et les chercheurs ont connu ces dernières années et que, très rapidement, on appellera la « mondialisation ». Une compétition plus violente entre les chercheurs, des enjeux financiers plus importants, de nouveaux interlocuteurs et de nouvelles logiques : autant de choses qu'ils tentent d'apprivoiser ensemble. Dans ce qui est souvent présenté comme une guerre, certes économique et intellectuelle, mais tout de même une guerre, cette journée montre certainement que le bricolage et le vagabondage sont des armes de résistance, peut-être surprenantes mais assurément très efficaces. Philippe Colomb / BIU Cujas / Journée d’étude : 05/10/07 -1-