Limites et complexité du partenariat Soignants / Familles
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Limites et complexité du partenariat Soignants / Familles
Limites et complexité du partenariat Soignants / Familles Docteur Emmanuel Chevrillon Médecin de Médecine Physique et Réadaptation Médecin Chef de la Clinique du BOURGET Centre de référence Ile de France pour la prise en charge des patients cérébrolésés avec troubles cognitifs sévères Quelques réflexions préalables Cet exposé est centré sur la prise en charge et l’accompagnement de patients cérébro lésés graves et s’appuie sur une expérience de 30 ans de soins, à la phase aigue, en post réanimation, lors de la période de rééducation et du suivi (HDJ, CS, SRAME). • 20/11/2014 2 Quelques réflexions préalables Il est aussi tiré du partenariat, depuis presqu’aussi longtemps, avec les associations de professionnels (France Traumatisme Crânien, Rhône Alpes Coma, ARFTC) et de familles (UNAFTC, AFTC Lyon, AFTC IDF) • 20/11/2014 3 Quelques réflexions préalables Il y a 3 entités partenaires en jeu qui n’ont pas le même rôle, qui ne vivent pas dans le même contexte, qui n’ont pas la même histoire et qui n’ont pas forcément la même représentation • 20/11/2014 4 Quelques réflexions préalables Il s’agit d’une relation qui s’établit dans un contexte très lourd, difficile, où le patient, la famille et les soignants ne sont pas au même niveau. • Il s’agit d’une relation qui s’inscrit dans la durée, où notre rôle de prise en charge et d’accompagnement va évoluer. • 20/11/2014 5 Quelques réflexions préalables Il s’agit d’une relation qui se place dans un contexte légal complexe et souvent contradictoire qui place le patient et sa famille comme « acteurs de soins », mais qui est beaucoup plus restrictif que ce que l’on croit et que l’on fait! • 20/11/2014 6 Quelques réflexions préalables La clé du partenariat: c’est la capacité d’établir un lien durable de confiance, de gérer les aléas, les périodes de conflits, les AR de la vie en se posant toujours les questions: • 1.Quel est notre rôle et notre place? 2.Qu’est ce que l’on accompagne ? 3.Comment on accompagne, même si on est pas d’accord? 20/11/2014 7 Quelques réflexions préalables Les limites du partenariat • –Situations conflictuelles qui exacerbent les comportements de défense (deus agressivité …) ex machina, substitut du patient, –Choix thérapeutique, décision de soins, choix du projet de vie, passage d’étape,… –Ne pas oublier le patient, qui doit toujours être au centre, même si ces capacités cognitives et relationnelles sont réduites 20/11/2014 8 Quelques réflexions préalables Poser les limites et les devoirs de chacune des parties est un exercice difficile où il ne faut pas avoir de jugement de fond sur le comportement des familles vis-à-vis des soignants, mais établir un minimum de règles pour que la relation puisse continuer. • 20/11/2014 9 Si on définit le comportement, …. comme la manifestation observable d’une relation, ou d’une inter-action sujet / environnement, … On admet : 1. qu’il n’y a pas de standard de comportement, de comportement normal ou anormal, On admet : 2. qu’il n’y a que des comportements prévus, attendus par l’entourage, dans une situation donnée, On admet : 3. qu’il n’existe donc pas de trouble, mais des modifications du comportement dans certaines situations. Contexte légal La loi du 4 mars 2002 établit les droits du patient –accès au système de soins, –Information du patient, –règles de confidentialité et secret médical, –droits au soins,…) 20/11/2014 12 Contexte légal La loi Léonetti du 22 avril 2005 établit les droits du patient en fin de vie maintien de l’interdit fondamental de donner délibérément la mort à autrui, interdiction d’obstination déraisonnable, respect de la dignité et soins palliatifs, respect de la volonté du patient, directives anticipées et personne de confiance, collégialité des décisions, protection des acteurs, consultation des familles Contexte légal La loi Léonetti du 22 avril 2005 régulièrement en question 2010Révision de la loi . 2012 Promesse de campagne du Président HOLLANDE 2012/2013 Rapport SICARD et avis du Comité National d'Ethique => en faveur du maintien de la loi Léonetti. 2013 Renouvellement du comité National d'Ethique et nouvel avis demandé 2014 affaire V. LAMBERT et avis du Conseil d’ETAT, Contexte légal ● La loi « Hôpital, Patients, Santé et Territoires » du 21 juillet 2009 poursuit les ambitions de la loi de mars 2002 en matière de qualité, de sécurité des soins et de relations avec les usager Contexte légal •Interviennent aussi, notamment pour le droit à l’information (patient, famille,…) 1.Le code de déontologie 2.Le code pénal 3.Le code de santé publique 20/11/2014 16 Directives anticipées Dans le cas où en fin de vie, le patient n’est pas capable d’exprimer sa volonté, elles permettront au médecin de connaître ses souhaits concernant la possibilité de limiter ou arrêter les traitements en cours. Faites librement par personne majeure • Renouvelées tous les ans • Le médecin n’est pas tenu de s’y conformer si d’autres éléments venaient modifier son appréciation • ….., Adoptées par très peu de personnes en France, …. 20/11/2014 17 La personne de confiance 10 ans après son institution la personne de confiance reste trop souvent confondue avec la personne à prévenir –Le patient doit être informé de cette possibilité –La désignation ou le refus de la personne de confiance doit être faite, librement par mandat écrit. La durée est précisée. –La PC peut être un parent, un proche ou le médecin traitant. Elle doit accepter ce rôle. 20/11/2014 18 La personne de confiance Attention: lorsque le patient est inconscient ou incapable de s’exprimer, l’interlocuteur privilégié est la personne de confiance, dont l’avis prévaut sur tout autre avis non médical. • En clair, si la PC, n’est pas un parent, proche ou un membre de la famille, (ex amant, amante), l’équipe ne doit consulter que celle-ci et la famille est légalement exclue ! • 20/11/2014 19 La personne de confiance Un patient sous tutelle ne dispose pas de ce droit. (Si désignation avant, seul le juge de tutelle est compétent pour valider ou non) • Un patient présentant des troubles cognitifs ne peut désigner une personne de confiance . (justifier) • « la plupart des patients cérébrolésés graves ne peuvent désigner une personne de confiance » 20/11/2014 20 Secret professionnel / La loi La loi du 4 mars 2002 présente le secret comme un droit du patient au respect de son intimité et du secret des informations le concernant • Le code de déontologie (Art. 4) définit le secret médical qui « couvre tout ce qui est venu ce qui est venu à la connaissance du médecin, dans l’exercice de sa profession, ce qui lui a été confié, mais aussi ce qu’il a vu, entendu et compris » • Le code pénal dans son article 226-13 évoque le secret professionnel comme une obligation d’ordre public qui, garantie de liberté pour le patient. Son manquement est passible d’un an d’emprisonnement. • Le code de santé publique (Art. L.1111-2 définit le droit du patient à être informé • 20/11/2014 21 Secret professionnel / La loi « cette obligation de secret affirme que seul le patient décide de ce qu’il laisse savoir ou non de son état de santé et à qui » « ce principe peut mettre en opposition deux obligations contradictoires que sont le secret médical du à toute personne et les obligations de santé publique pour éviter un risque pour les autres (épidémies, violence, ???) 20/11/2014 22 Secret professionnel / La pratique quelle information? A qui? Le Patient Il n’y a pas de secret par rapport au patient Le code de déontologie (art. 35) prévoit la possibilité de démarches de réserve (information du patient d’un pronostic défavorable, …, ) • Cas du patient mineur: Il n’y a pas de secret en principe par rapport au patient mineur •La loi prévoit que le secret ne s’oppose pas au titulaire de l’autorité parentale, mais,… •la loi de 2002, sur les droits des patients prévoit des aménagements pour les adolescents qui peuvent demander à ce que leur parents ne soient pas informés. • 20/11/2014 23 Secret professionnel / La pratique Le majeur protégé: Information adaptée à ses capacités de compréhension •Le tuteur ou curateur reçoit mission de gérer les biens du patient qui garde libre disposition de sa personne •Le secret professionnel peut donc être opposé au tuteur. •Dans la pratique ceci sera adapté en fonction du lien qui unit le majeur protégé et le tuteur - le code de déontologie et la loi de 2002 prévoient l’information de la famille qui pourra recevoir des informations dans ce cadre - le secret reste opposable lorsque la tutelle est assurée par un organisme ou un tuteur indépendant • 20/11/2014 24 Secret professionnel / La pratique La famille et les proches le code de déontologie et la loi de 2002 prévoient, sauf avis contraire du patient, la possibilité de donner une information à caractère médical de façon à mieux pouvoir soutenir et accompagner le patient. •le code de déontologie, autorise que le diagnostic soit caché au patient et révélé aux proches dans le cas de maladie grave, sauf avis formel contraire du patient • 20/11/2014 25 Secret professionnel / La pratique Le secret partagé entre médecin n’est théoriquement possible qu’entre médecins traitant le patient et sur la pathologie commune •Dans un ES : partage des informations au sein de l’équipe soignante (QUI?, variable selon les textes, ex A. Soc.) •Médecins SS IGAS HAS => Oui Tous les autres , Famille / Tuteur / experts! => Non dossier et les info médicales remis par le patient Quid, si le patient en est incapable? 20/11/2014 26 Secret professionnel / La pratique Quelques situations particulières: Réquisition •Expertise judiciaire •Témoignage en justice • 20/11/2014 27 Partenariat avec la famille Chacune des parties, soignant/ famille/ patient a ses certitudes et voit et vit différemment la même situation • 20/11/2014 28 Partenariat avec la famille Chacune des parties, soignant/ famille/ patient a ses certitudes et voit et vit différemment la même situation • 20/11/2014 29 Partenariat avec la famille La famille ne peut être assimilée au soignant Elle a un lien particulier avec le patient •Elle est prise dans une situation difficile dont elle ne contrôle pas les paramètres, ce qui déclenche souvent une sensation de culpabilité •Elle se retrouve confrontée à un proche qui est aussi devenu un « autre » •Elle est confronté brutalement aux notions de mort, de handicap, de dépendance et il n’est pas sur qu’elle partage la même représentation que les professionnels • 20/11/2014 30 Partenariat avec la famille Le changement de rôle est facteur de dégradation des relations et de conflit •Au sein de la relation affective Famille / Patient où il introduit une relation de dépendance •Au sein de la relation Famille / soignant où il introduit des sentiments de frustrations, de défiance et de conflits. 20/11/2014 31 Partenariat avec la famille Mais la famille est un acteur fondamental de la prise en charge du patient, au premier plan des facteurs de pronostic fonctionnel. • (facteurs pronostics après TC graves, E. Chevrillon, SOFMER 1998) La Famille va souvent évoluer entre la famille qui attend tout et la famille totalement soignante •Dans la plupart des cas, c’est la famille qui assurera à terme, une grande partie de l’accompagnement du patient et elle aura obligatoirement à assumer de temps en temps, un rôle de soignant • 20/11/2014 32 Partenariat avec la famille La violence de la situation peut déstabiliser les familles comme les soignants • 20/11/2014 33 Partenariat avec la famille L’équipe professionnelle qui prend en charge ces patients cérébro lésés graves a, outre sa mission de soins et d’accompagnement du patient, un rôle important de protection de la famille, afin que ne se détruise pas tout le tissus affectif autour du patient. • 20/11/2014 34 Partenariat avec la famille L’équipe professionnelle doit être capable de comprendre et de s’adapter aux comportements paradoxaux des familles (ambivalence, dénégation,…), aux manifestations d’agressivité et de violence. • => Même si c'est souvent difficile ! 20/11/2014 35 A la phase aigue A la phase aigue, la famille est extrêmement vulnérable, elle est centrée sur le risque vital, elle « n’entendra » pas le risque de séquelles, sauf si se pose le problème d’un choix thérapeutique grave ou de l’arrêt de soins. •C’est un situation potentielle de conflit et le professionnel a l’obligation de protéger la famille / sentiment de culpabilité • 20/11/2014 36 A la phase aigue La loi est claire, sauf DA, la famille /PC est consultée, mais c’est au médecin que revient la décision. (protection des acteurs par une décision collégiale) •De plus en plus de décision d'arrêt de soins ? • Cette situation peut se poser plus tard, SRPR, MPR, EVC, MAS/FAM à l’occasion de complications aigues où le pronostic vital est engagé. • 20/11/2014 37 Phase de récupération et de rééducation A cette phase, la famille reste extrêmement vulnérable, elle est centrée sur le risque de séquelles, de handicap et de dépendance, dont elle va progressivement avoir conscience. •Elle aborde cette période en ayant laissé beaucoup d’énergie et va chercher des réponses qui correspondent à ce qu’elle espère auprès des différents acteurs de l’équipe de soins. • 20/11/2014 38 Phase de récupération et de rééducation Beaucoup de questions se posent sur le pronostic l’évolution et les séquelles, outre le problème des limites de l’élargissement du secret médical, beaucoup plus restrictives que ce que l’on fait •Quelle information peut/doit être donnée? Par qui? •Complète ou non? Progressive? •Qui doit-on informer? •protection / association? •Famille acteur /outil de réinsertion • 20/11/2014 39 Phase de récupération et de rééducation Attention à la clarté des informations et à l’homogénéité des informations données à la famille •Attention à ne pas multiplier les interlocuteurs • = Source de perte de confiance de la famille/ équipe et source de conflits 20/11/2014 40 Partenariat avec la famille les limites Quelle information peut/doit être donnée? -Très souvent il n’y a pas de « référent légal » - Comment apprécier la proximité Famille/patient, proche/patient et choisir les interlocuteurs quand on ne sait pas? - Qu’est-ce qui relève de l’intimité du patient et qui doit être protégé ? Sexualité, affectivité, comportement? - ? Si conflit Patient / Famille La dépendance ne lève pas la notion du secret • 20/11/2014 41 Partenariat avec la famille les limites Pb de la sexualité Quelles informations en cas de comportement hypoactif, hyperactif ou intrusif •Comment protéger le couple, la famille •Explications pour pouvoir accepter et comprendre? • 20/11/2014 42 Partenariat avec la famille les limites Il faut fixer des limites, mais : Qu-est ce qu’on accepte des professionnels? •Qu-est ce qu’on accepte des familles? •Qu-est ce qu’on accepte du tuteur ? • Acteurs essentiels du projet de vie 20/11/2014 43 Les situations génératrices de conflit Dépendance, négation par la famille => source de conflit avec l’équipe de soins Inégalité au sein des soignants (Kiné >>AS) •Nécessité d’entretiens réguliers, de RMD avec la famille •Accompagnement et tolérance! • 20/11/2014 44 Les situations génératrices de conflit Point important qui fait partie de la complexité et des limites •Vécu des professionnels par rapport à souffrance / mort /handicap. •Représentation et histoire personnelle Source de comportement Rigidité / Tolérence Identification au Patient Parent Frère / sœur 20/11/2014 45 Partenariat avec la famille Les situations génératrices de conflit L’accès au patient Droit de visite? •Famille éclatée / conflit au sein des proches, amant, •Régression affective de la famille • Légalement ni la famille, ni le tuteur, ni l’établissement n’a le droit d’interdire les visites seul le patient a le droit 20/11/2014 46 Les situations génératrices de conflit L’accès au patient •Droit de visite? •Famille éclatée / conflit au sein des proches, amant, •Régression affective de la famille Légalement ni la famille, ni le tuteur, ni l’établissement n’a le droit d’interdire les visites seul, le patient en a le droit. 20/11/2014 47 Les situations génératrices de conflit Décision de soins / choix thérapeutiques •Comment faire si la famille s’y oppose (gastrostomie, hospitalisation, psychothérapie,…) •Comment gagner l’assentiment des familles? •Qui doit prendre la décision ? Le médecin. 20/11/2014 48 Les situations génératrices de conflit Problème de la sortie d’hospitalisation /choix du projet de vie •Quand la famille rompt les liens? •Quels moyens juridiques d’obligation familiale •Comment conserver le lien pour mettre en place le projet de vie du patient • 20/11/2014 49 Partenariat tout au long de la filière de soins et de suivi Savoir s’adapter •Éviter un comportement rigide • 20/11/2014 50 Partenariat tout au long de la filière de soins et de suivi Coordination / Accompagnement dans la durée • Lien de confiance • Capacité de répondre et de gérer les aléas, les retours • Capacité de proposer des solutions alternatives, évolutives, de répit •Respect du rôle de chaque partie • 20/11/2014 51