Interview version femina
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Interview : Patricia Kaas fait son Kabaret Article du 15/12/2008 A l’occasion de la sortie digitale de son nouvel album le 15 décembre , Patricia Kaas nous invite dans son Kabaret contemporain. Douze nouvelles chansons et un spectacle complet en hommage aux années trente. Rencontre. Propos recueillis par Aurélia Scheyé La naissance de Kabaret « Kabaret » est un album, mais c'est aussi un spectacle. Dans quel ordre le projet est-il né ? Patricia Kaas : C’était d’abord une chanson. Après pas mal d’écoute de différentes musiques sur Internet via MySpace et iTunes, je me suis arrêtée sur une chanson allemande de Hildegard Knef, Das Glück Kennt Nur Minuten (adaptée en français « La chance jamais ne dure »), qui est devenue le premier morceau suivi de Faites entrer les clowns, ce qui était assez « cabaret Berlin ». Ensuite, on a commencé à discuter de l’album avec l’équipe. Pour autant, je n’imaginais pas tellement un album dédié à cet unique thème. Ce qui vous a donné envie d’élargir l’horizon musical de l’album ? Patricia Kaas : Oui. Je me suis rendue compte que dans les années trente, il y avait effectivement le cabaret à Berlin mais aussi le jazz à Saint Germain et le tango à Buenos Aires. L’idée est donc venue de survoler le tout dans les ambiances de l’album. On s’est ensuite entourés de professionnels en fonction de ces styles : Laurent Brifo qui a travaillé avec les Gotan Project pour ce qui est du tango, les Caravan Palace, un jeune groupe découvert sur MySpace pour le côté jazz manouche et Frédéric Helbert pour les arrangements. C’est comme ça qu’a grandi le projet Kabaret. On découvre un album à la fois simple et élégant. Comment marie-t-on les deux en musique ? Patricia Kaas : Je suis ravie que l’on puisse ressentir les deux. La simplicité se ressent peut-être dans le son et vient de la façon dont a été fait cet album. On ne s’est pas posé mille questions. On a par exemple enregistré les voix dans un musée à Avignon. On a pris notre temps en laissant les choses venir petit à petit, tout s’est fait très naturellement sans prise de tête, sans penser au grand studio, aux grands moyens. Ce que je retiens en écoutant mon album, ce qui est très rare puisque je dois presque le réapprendre avant une tournée, c’est que je ne sens pas de représentation ou de prestation et j’y tiens. Pour ce qui est de l’élégance, je pense qu’elle revient grandement aux choix des arrangements. L’album Kabaret La référence aux années trente, c’est un hommage à la beauté, à l’élégance et à la féminité de l’époque finalement ? Patricia Kaas : Oui, aux femmes de cette époque. Après des recherches sur les années trente, on s’est rendu compte qu’il y avait toutes ces femmes fatales et androgynes, très féminines dans leur façon de penser mais aussi très masculines par leur indépendance, des femmes qui me fascinent. Ca faisait déjà un peu partie de moi. J’aimais bien le personnage de Marlène Dietrich dont ma mère m’a beaucoup parlé, Lili Marlen est d’ailleurs l’une des premières chansons que j’ai chantées. Il y avait aussi Anaïs Nin qui, étonnement à l’époque, écrivait sur l’érotisme sans aucune gêne. Ces femmes font partie de celles qui m’ont marquée et que j’admire. Et relativement aux années trente, on s’est aussi rendu compte que si la décoration de mon appartement est moderne, elle était aussi à l’image de cette époque. L’idée était donc d’amener cette époque, sa musique et les idées qui l’entourent avec des professionnels et un son d’aujourd’hui. L’album mêle des airs de jazz, de blues et de tango. C’est pour vous la combinaison d’influences musicales idéale ? Patricia Kaas : Idéale, je ne sais pas. En tout cas, il est certain que ces airs fonctionnent bien ensemble. Comme j’avais des arrangeurs différents et des chansons aux airs différents, c’est vrai qu’il a fallu gérer le mélange des styles. Ce qu’on a réussi à faire sur l’album je crois. J’ai toujours aimé mélanger différents genres en fonction de mes envies du moment et selon les gens avec qui j’avais envie de travailler. Mon répertoire contient de la variété française, un peu de pop, des sons plus électriques, du cabaret, du blues… Ce nouveau mélange des genres était en fait idéal par rapport ce que j’avais envie de dire dans cet album et surtout de ce que je voulais faire dans le spectacle, le cabaret prenant surtout sa dimension sur scène. Revenir à l’ambiance cabaret après des albums plutôt orientés pop et variété française, est-ce finalement un retour à vos premières amours ? Patricia Kaas : C’est ce qui semble ressortir de Kabaret. Selon les gens qui m’entourent et d’après la réaction du public, cet atmosphère jazz et cabaret me correspond plus et fait penser à mes débuts. Ce qui m’a d’abord paru étrange comme observation. Mais en réadaptant les anciennes chansons pour le spectacle, on s’est rendu compte qu’elles avaient déjà cette base cabaret jazz. Bien sûr, à vingt ans je chantais des textes d’adolescent. On ne chante pas l’amour à 20 ans comme à 40 ans donc il n’y avait pas dans mes premiers albums l’élégance des arrangements de Kabaret, mais la base était là, c’est vrai. Le spectacle Kabaret Pourquoi avoir présenté votre album sur scène et donc avant sa sortie digitale du 15 décembre ? Patricia Kaas : J’ai enregistré cet album en me disant j’ai 40 ans, 20 ans de carrière, je vais le faire pour moi sans me demander ce qu’on attend de moi ni ce qui passe aujourd’hui à la radio. C’est vrai qu’il était difficile face à la motivation que j’avais pour l’album de voir que les maisons de disques étaient en restructuration et que rien n’était vraiment stable autour. Je n’étais pas là depuis deux trois ans, donc c’était peut-être un risque mais on a de fait décidé de présenter les nouvelles chansons sur scène, comme je l’avais d’ailleurs déjà fait pour mon deuxième album et comme le faisaient aussi des chanteuses comme Edith Piaf et Marlène Dietrich à l’époque avec des enregistrements live de leurs albums. En plus, ça correspondait plus à l’idée de Kabaret. Je pense qu’aujourd’hui, on ne présente plus un album de la même façon. J’ai l’impression que la musique est un milieu très fermé en France, et c’est la première fois qu’on a fait appel à gens différents. Comme Christophe Martin pour le théâtre, Régis Aubadia pour la dans contemporaine. J’ai été surprise et j’ai trouvé génial qu’ils veuillent bien faire partie du spectacle après vingt de carrière. Ca m’a donné beaucoup de motivation et de confiance, ça m’a amenée vers de novelles choses. C’est sûr que la musique est aujourd’hui difficile, on s’y est donc adapté, tout en s’adaptant à notre projet Kabaret. Vous semblez vous révéler pleinement à votre public dans ce nouveau spectacle, comme une première fois. Après 20 ans de carrière, vous attendiez le bon moment ? Patricia Kaas : C’est effectivement un album plus personnel dans lequel je me suis beaucoup impliquée, même si je l’ai toujours fait. Mais dans Kabaret j’ai dirigé les voix, les arrangeurs, j’ai co-signé une chanson. Et le côté naturel de l’enregistrement rend peut-être cet album plus proche de moi et plus humain. J’ai enregistré à côté de chez moi, les projections de remake de films que l’on donne sur scène ont été filmées dans mon appartement avec des amis. C’est beaucoup plus intime. Comment décrivez-vous la mise en scène de Kabaret ? Patricia Kaas : C’est un vrai spectacle. Avec justement ces projections en noir et blanc, de la danse contemporaine, les nouvelles chansons mais aussi 50% d’anciennes chansons réarrangées. Le spectacle est un ensemble d’éléments qui m’ont touchée, qui font partie de ma vie et que j’aime, des images que j’ai aimées dans un film, ou une ligne d’un livre que j’ai aimée et qui ont un lien avec mon répertoire. C’est la première fois qu’on a fait appel à gens différents qui ne font pas partie du milieu fermé de la musique. Comme Christophe Martin pour le théâtre, Régis Obadia pour la danse contemporaine. J’ai été surprise et j’ai trouvé génial qu’ils veuillent bien faire partie du spectacle après vingt de carrière. Ca m’a donné beaucoup de motivation et de confiance. VERSION FEMINA (décembre 2008)