I . Principes de digestion des ruminants

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I . Principes de digestion des ruminants
I . Principes de digestion des ruminants
Les principes essentiels de la digestion du ruminant peuvent être résumés ainsi :
• Toute production, lait ou viande repose sur un mécanisme de gestion d'énergie. Il faut de l'énergie pour faire du lait (exprimée classiquement par des UF ou
des calories ou des Nel) ou de la viande.
• Le ruminant ingère principalement de l'énergie fermentescible (critère Ef pour
les cœfficients OBSALIM) pour l'activité de son rumen et doit utiliser principalement le résultat énergétique de ces fermentations ruminales sous forme d'un bilan énergétique global (critère Eg pour OBSALIM) qui sera alors disponible pour
la production de lait, de viande ou ses propres besoins, croissance, reproduction,
déplacements…
• La compilation des symptômes alimentaires apparaissant sur le troupeau
peut indiquer la non réalisation du transfert en Eg et les excès ou les déficits
ingérés. Dans le diagnostic OBSALIM le niveau de la valeur Ef doit être très
proche de celui de Eg pour indiquer la bonne conversion des aliments en production et santé et non en symptômes ou pathologies. Si une valeur Ef élevée
est calculée dans la somme des cœfficients OBSALIM, en association avec une
faible valeur Eg alors le troupeau sera en sous-production et immanquablement présentera des symptômes alimentaires nombreux et intenses ou même
de la pathologie.
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• Pour que ce transfert énergie fermentescible Ef, énergie globale Eg se réalise,
la ration ne doit pas montrer de facteurs limitants, déficit azoté (critères
Af ou Ag négatifs), instabilité ruminale (critère Sr pour OBSALIM), insuffisance
de fibres de structure (Fs).
Le ruminant ingérant essentiellement des fibres, la digestion des fibres fines (critères Ff) contribue aussi à la production de l'énergie fermentescible (Ef) et globale (Eg)
en l'absence de facteurs limitants.
Nous pouvons ainsi expliquer le bilan nutritionnel OBSALIM dans les tableaux
de diagnostic de la fiche d'aide au diagnostic (voir p. ??) ou des outils logiciel ou jeu
de cartes.
Ex.1. Exemple de résultat performant : ligne de calcul de résultat du logiciel
Surveillance des facteurs limitants ou excédentaires
Surveillance des facteurs
limitants ou excédentaires
L'énergie fermentescible Ef montre une bonne transformation en énergie globale Eg 7.
Une production de 21 L de moyenne est obtenue avec 2,8 kg de concentré en plus
d'une ration foin et regain dans cet exemple avec peu de symptômes alimentaires.
7. Troupeau  montrant  les  symptômes :  rumination / sup.  à  60  coups.  Général / homogène  lourd / côtes  couvertes.  Lait / Tp 
élevé. Bouses / molles.
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Ex.2. Exemple de résultat non performant : ligne de calcul de résultat du logiciel
Facteur limitant
Facteurs limitants
L'énergie fermentescible Ef est peu transformée en énergie globale Eg.
Le facteur limitant est une insuffisance de stabilité ruminale (SR négatif) du à un
manque de fibres de structure – Fs négatif 8.
Une production de 17,5 L de moyenne est obtenue avec 6,2 kg de concentré en plus
d'une ration foin et regain dans la même région de production.
Avec le réglage alimentaire, la solution d'un problème alimentaire n'est plus le retour à une norme théorique mais le retour à la normale de signes physiques ou comportementaux (en dessous du seuil de sensibilité) d'un individu ou d'un lot. Ce retour
à la normale physiologique nécessite simplement des apports alimentaires entre deux
seuils, carence et excès, vis-à-vis desquels l'animal de production peut faire fonctionner
ses systèmes de régulation. La vache, la chèvre ou la brebis, animaux de production
feront le reste si l'ordre et les séquences de distribution respectent leur physiologie.
La pratique du réglage alimentaire privilégie la connaissance et le respect des
processus d'autorégulation plutôt que les calculs théoriques. Ici pas d'équation mais
simplement une lecture éclairée du discours alimentaire de l'animal.
8. Troupeau montrant les symptômes : rumination / inf. à 75% couchés. Général / cotes couvertes. Bouses / molles. Nez / rouge.
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II . Risques d'une ration
Dans les rations pour vaches laitières, la proportion 70% de fourrage et 30% de
concentrés peut être retenue comme base de travail pour la suite de notre exposé.
Toutefois, l'évolution des systèmes d'élevage dits modernes, des modes ou des conditionnements, condamne souvent des troupeaux à ingérer de plus en plus de concentrés
ou de fourrages mono-spécifiques à haute densité énergétique. Les dysfonctionnements
deviennent très visibles et s'expriment par de nouvelles pathologies : de reproduction,
de l'organe même de production (mamelle ou muscles), de déficit immunitaires ou de
dégénérescence. Les symptômes OBSALIM peuvent apparaître très nombreux.
Le risque principal de déséquilibre d'une ration devrait chez les ruminants être lié
aux fourrages. Les concentrés ne devraient jouer qu'un rôle annexe d'équilibre ou de
complément de production. Toutefois, ces derniers peuvent avoir une grande incidence
par suite de leur vitesse de fermentation élevée et de leur concentration en éléments
assimilables bien supérieure à celles des fourrages.
Nous allons présenter les 3 grands types de ration : pâture, fourrages secs et ration
intégrant des ensilages (type Ration Totale Mélangée). Ces 3 types constituent la base
de raisonnement des schémas d'application dans le « guide pratique » en fonction des
résultats du diagnostic par les cœfficients OBSALIM.
a) La pâture
La morphologie des vaches prouve une grande aptitude au pâturage. De l'équilibre
global du corps à la spécialisation de l'appareil masticateur, tout est orienté vers la
performance au pâturage. Par la nécessité du déplacement quasi continu, pour ingérer
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I . L'art d'observer
"Les choses changent quand tu les regardes parce que tu les regardes". Pensée reprise
de la physique quantique.
Osez appliquer, faire vôtre, le sens de cet aphorisme.
Chacun a entendu parler de l'expérience des particules de la physique quantique qui
dévient leurs trajectoires suite à l’effet de la présence de l'observateur. Cette référence
est intéressante pour nous, car ces physiciens quantiques forts de la puissance de leur
réflexion et de leur compréhension dans un univers mathématique et physique très sophistiqué, en arrivent à rencontrer des questions de fond. Cette question du rôle de l’observateur ou de la relation observateur – objet observé est aussi accessible à chacun de
nous. Elle nous fait réfléchir sur l'organisation de la matière et du vivant, sur les principes
qui régissent cette organisation dont l'homme fait partie intégrante et prend une part de
responsabilité de plus en plus grande à la mesure de ses découvertes techniques (bombe
atomique, ampleur des pollutions ou évolution des conditions de vie dans les grandes
métropoles au détriment de la vie rurale au contact direct des éléments naturels) et sur
la pensée ou le monde spirituel. Ces mêmes physiciens ou ces chercheurs ou praticiens,
essayent de saisir le monde sans s’impliquer ou sans l’intégrer en eux (ils choisissent de limiter l'effet de l'observateur sur les particules, sur les idées pour les philosophes ou éviter
les saisies dans la spiritualité orientale et son rapport au monde intérieur). Ils observent
donc dans un premier temps, prennent les informations par l'observation avant de les
placer dans le monde de la pensée, de leur pensée.
Observer est à la base de toute réflexion. Observer par soi-même directement,
est le seul endroit de départ pour la construction d'une pensée personnelle, adaptée à
nous-même et au moment de notre évolution, puis de notre expérience.
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Revenons à OBSALIM : le travail d'observation au sein d'une ferme constitue le socle
de travail de l'éleveur pour qu'il puisse piloter son troupeau au sein de la structure en
cohérence avec son projet personnel d'être, dans ce métier si prenant.
L'observation ou le travail par les sens est aujourd'hui ignoré, délaissé et une distance de plus en plus grande s'insinue entre l'observateur et l'objet. Des mesures, des
analyses nous reconstituent la réalité du troupeau par des concepts qui nous en éloignent. Une multitude de théories, de connaissances sur les besoins alimentaires de nos
frères animaux (approche biochimique du rumen par exemple, toujours complexifiée
avec ces recherches sur les oméga 3 et les vaches à haute production), des produits
indispensables (vaccins face à des maladies dont les causes multiples sont occultées,
vitamines…), des évolutions dites inéluctables (désertification rurale) largement entretenues par l'enseignement, les revues, les commerciaux circulant, prennent le pas sur
les savoir-faire.
Or chacun a la capacité de comprendre les besoins des animaux avec ses propres
outils. Rien ne remplace le vécu et nous ne pouvons déléguer l'expérience personnelle.
Si l'art de l'observation peut s'enseigner, le résultat de l'observation, cette expérience
personnelle qui est la première pierre du développement de votre savoir-faire, ne
peut être ni prévisible ni enseignée. Pour cette raison, OBSALIM ne restera qu’une
méthode d'observation et d'aide à la pratique (temps d'observation, de réflexion
puis de mise en pratique) et non un ensemble de recettes. N'en déplaise au désir de
simplification ou aux raccourcis pédagogiques. OBSALIM est un terrain d'expérience
personnelle au contact du troupeau par cette entrée alimentaire, comme l'homéo­
pathie l'est au contact de l'individu et de ses particularités dans l'expression de
sa maladie.
Dans l'enseignement et en élargissant l'idée à notre civilisation, l'expérience des
sens est de plus en plus délaissée. Car elle ne peut être mesurée ni modélisée du fait
de sa diversité et de sa subjectivité. Face au troupeau, avec le regard OBSALIM, cette
subjectivité et cette diversité apparaissent par la reconnaissance des symptômes alimentaires. À partir de ces symptômes subjectifs comme bouses molles, crottes non formées,
vous découvrirez des résultats fiables.
Certains trouvent la mise en œuvre de la méthode compliquée, difficile.
La méthode OBSALIM n'est pas compliquée en fait, mais s'adresse à l'ensemble
complexe et toujours variable des symptômes alimentaires et à celui tout aussi
complexe de la digestibilité des aliments fourragers. Soyez rassurés, l'outil des cœfficients est là pour vous révéler le lien entre les 2. Les sécurités par les 4 étapes de
la méthode et les principes d’association de symptômes, de triangulation ou de
regroupements par lots vous apporteront toute la sécurité nécessaire pour que vos
diagnostics et vos réglages soient fiables. L’apprentissage peut être déroutant pour
un adulte.
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I. Diagnostic OBSALIM
Première phase de la méthode OBSALIM : le diagnostic OBSALIM proprement
dit avec le relevé des symptômes et la hiérarchisation des dérèglements alimentaires.
Une fois le diagnostic OBSALIM réalisé, vient la deuxième phase : la synthèse, qui
prend en compte les aliments distribués par l'éleveur, phase d'explication des résultats
hiérarchisés avant les propositions du réglage alimentaire.
Pour guider l'apprentissage de l'observateur au cours de cet itinéraire diagnostic,
nous ne présentons que les observations alimentaires les plus faciles à observer ou les
plus fréquentes.
Le diagnostic OBSALIM se déroulera selon 4 étapes :
Troupeau de loin
1. Approche du troupeau 
existence d'un problème,
marge de progrès économique ou sanitaire
Homogénéité
tendance corporelle
vitalité
2. Orientation 
croix du grasset
(propreté - zone de souillure)
famille de risque,
alimentation - logement - pathologie interne
Troupeau de près
3. Stabilité ruminale 
4. Encadrement des apports
triangulation sur 3 sites minimum
120
zone pHG
bouses ou crottes variables
énergie
azote
fibres
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