ASTRID DALAIS FAIT LE PARI ÉCONOMIQUE DE L

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ASTRID DALAIS FAIT LE PARI ÉCONOMIQUE DE L
ASTRID DALAIS FAIT LE PARI ÉCONOMIQUE DE L’ART
Avec Move For Art, elle veut en faire un secteur à part entière en le mettant en scène lors
d’événements. Un moyen également de faire connaître le patrimoine de Maurice et de le
préserver.
Crédits photo : L’Eco austral
On croirait assister à la mise en place d’un puzzle en grandeur nature. Ou plutôt d’une mécanique
de précision où chaque élément doit trouver sa place. Question parfois de millimètres. À quelques
heures du début du spectacle, stress et angoisse nouent les estomacs d'Astrid Dalais, de Guillaume
Jauffret et de leur équipe de Move For Art. Ils apportent les ultimes touches à leur dernière
livraison : le spectacle son et lumière commémorant les 125 ans du conglomérat mauricien
Currimjee. Ce show aura nécessité huit mois de travail. Résultat ? La centaine d'« happy few »
invités dans l'immense centre Swami Vivekananda de Pailles ressortiront éblouis et feront un
triomphe à la prestation organisée et présentée par Move For Art.
UN COCKTAIL DE TALENTS
Fondée en 2008 avec seulement 2 000 roupies (50 euros) par Astrid Dalais et Guillaume Jauffret, «
Move For Art est l'unique agence de communication événementielle et culturelle de Maurice ».
Véritable couple fusionnel, chacun des deux partenaires y tient, comme dans une pièce de théâtre,
un rôle précis. À Guillaume l'artistique. Formé à l’Académie internationale de danse et à l’atelier
Rudra Béjart, école de la compagnie du célèbre chorégraphe français Maurice Béjart, ce danseur
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professionnel a participé à de nombreuses comédies musicales comme « Roméo et Juliette », « Les
Dix Commandements » et « Le Roi Soleil » (deux millions de spectateurs). « J'ai également dansé
pour la Star Academy », précise-t-il. Il est devenu par la suite directeur artistique, scénographe,
puis metteur en scène. À Astrid le concept stratégique et le montage financier. D'ailleurs, si la
jeune mère de famille de 37 ans indique dans son profil LinkedIn être « souffleuse d'idées » (c'est
aussi le nom de sa première entreprise), elle est la dirigeante de Move For Art. Fille du célèbre
cordon bleu mauricien Jacqueline Dalais (qui a été nominée elle aussi à l'élection de l'entrepreneur
de l'année), Astrid est diplômée de l’Institut universitaire technique de Montpellier et de l'École de
publicité, presse et relations publiques (EPPREP). Rentrée à Maurice, elle intègre le groupe hôtelier
Naïade Resorts comme Communication Manager. Elle y reste cinq ans avant de postuler, en 2005,
auprès du palace parisien Park Hyatt Paris-Vendôme. Elle y sera Marketing & Communication
Manager durant deux ans. L’occasion de tisser un solide réseau de contacts. Après son expérience
dans ce palace, elle rejoint le groupe hôtelier mauricien Sun Resorts comme Communication
Manager en Europe où elle demeure presque deux ans. En 2012, elle retourne chez Naïade Resorts
comme directrice de communication pendant un an et demi. Parallèlement à ses activités
professionnelles dans l'hôtellerie, Astrid effectue des prestations à Maurice et à l'étranger pour
Move For Art.
L’ÉVÉNEMENTIEL COMME VECTEUR DE COMMUNICATION
En 2008, l'entreprise effectue l'inauguration du complexe hôtelier Anahita, à Maurice. « Ce fut
notre première prestation. » En 2011, elle participe à l’inauguration du nouveau bâtiment
emblématique de la Mauritius Commercial Bank (en forme d’œuf) à Saint-Jean. Parallèlement,
Move For Art intervient également à l'étranger pour les groupes français Total et Vivendi ou encore
pour le groupe suisse Richemont. C'est en 2012, suite à la célébration des 40 ans du groupe IBL,
que le couple décide de rentrer définitivement à Maurice. « Nous avons réalisé qu'il manquait une
structure pour former et professionnaliser les artistes de l'île. » Le vrai challenge est de convaincre
les directeurs financiers de l'intérêt de l'art, non seulement pour communiquer à l'extérieur de
l’entreprise, mais aussi à l'intérieur. Pour les 50 ans de la bière Phoenix, en 2013, Astrid Dalais et
Guillaume Jauffret ont convaincu le management de l'entreprise d’inviter leurs clients et
partenaires en même temps que leurs employés. Move For Art les a « immergés » dans une
bouteille de 80 mètres de long avec un écran de 125 mètres et 11 projecteurs vidéos. Par-delà les
prestations scéniques, il s'agit surtout de faire passer des messages stratégiques. « Il est important
de comprendre les besoins, les valeurs et l'essence même de nos clients afin de les traduire
artistiquement. Cela nous demande une vision transversale de l'entreprise, ce qui signifie du temps
à y passer. »
L’ART, C’EST AUSSI DE L’ÉCONOMIE
Move For Art a été choisi par l'État mauricien pour assurer le spectacle des 45 ans de
l’indépendance du pays. Une plongée dans l'histoire de Maurice et dans son futur. « À la fin du
spectacle, nous avons utilisé des lasers en référence à la Cybercité. » La prestation a été
unanimement saluée. Mais le vrai challenge consiste à développer la culture, et l'art en particulier,
comme un secteur économique à part entière. Selon un rapport, publié en 2014, par les ministères
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français de la Culture et de l'Économie, l'impact de l'industrie culturelle atteint, dans l'Hexagone,
104 milliards d'euros, sept fois plus que l'industrie automobile ! « Les entreprises mauriciennes ont
compris, elles aussi, que l'art peut générer des emplois, une visibilité internationale et donc des
revenus. » C'est l'objectif du dernier projet de Move For Art : Porlwi by Light (Port-Louis par la
lumière). Cet événement, qui veut devenir annuel, propose aux Mauriciens de (re)découvrir
l’histoire de leur capitale. La cité, fondée vingt ans après l'arrivée de Français dans l'île (dont on
fête cette année le tricentenaire), possède des « joyaux injustement oubliés ». Il s'agira, du 4 au
6 décembre 2015, d’apporter un regard à la fois contemporain et authentique sur la capitale, tout
en permettant à un maximum d’artistes de s’exprimer par le biais de créations éphémères. « Porlwi
by light se déroulera sur 35 000 mètres carrés dans différents quartiers de la capitale. L'accent sera
mis sur la lumière et permettra à notre capitale d'avoir son propre festival culturel, économique et
touristique. » Et le projet séduit. « Évalué à 30 millions de roupies (750 000 euros), il est financé à
90% par le secteur privé », précise Astrid Dalais. « Mais surtout, on estime que l'événement
rapportera, sur le long terme, quatre fois plus que l'investissement initial. Car certains restaurants
et les commerces seront ouverts, des techniciens, comme le gagnant 2014 de la Fête des Lumières
de Lyon, viendront de l'étranger installer leurs équipements... Cela dynamisera le trafic, la
notoriété et finalement le chiffre d’affaires », ajoute Guillaume Jauffret.
- PROGRESSION
Fondée en 2008 par deux passionnés de danse, Astrid Dalais et Guillaume Jauffret, l'entreprise
Move For Art a pu réaliser des prestations de plus en plus impressionnantes, tant à Maurice qu'à
l'étranger. De quoi atteindre en 2014 un chiffre d’affaires significatif de 40 millions de roupies (1
million d'euros).
- INNOVATION
Unique agence de communication événementielle et culturelle de Maurice, Move For Art combine
à la fois la stratégie et l'artistique. Elle n'hésite pas à utiliser des moyens techniques poussés et
innovants pour réaliser une bouteille de 80 mètres de long pour les 50 ans de Phoenix avec un
écran de 125 mètres et 11 projecteurs vidéo, ou même de créer un décor en 3D avec un « video
mapping » pour les 60 ans d’UBP.
- DYNAMISME À L’EXTERIEUR
Si Move For Art est basée à Maurice, elle développe aussi son activité à l’extérieure de l’île. Elle a
ainsi travaillé pour la communication du groupe pétrolier français Total et du groupe Vivendi à
L'Olympia, à Paris, ou même à Genève pour le groupe Richemont, spécialisé dans l'industrie du
luxe.
- ENGAGEMENT CITOYEN
En plus de sa contribution obligatoire au CSR (Corporate Social Responsability), Move For Art
pratique le mécénat. Très impliquée dans le monde artistique, l’entreprise a soutenu le danseur
Emmanuel Chellen qui a reçu le premier prix national avec félicitations du jury au concours
national de la Confédération nationale de danse à Montpellier. L’entreprise a également soutenu le
groupe de musique « Esprit Ravanne ».
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GENEVIÈVE DARDANNE RÉUSSIT UNE PERCÉE SUR LE MARCHÉ DES RÉCEPTIFS
Avec Kreola, créé en 2011 dans une conjoncture difficile et alors que la concurrence était plus rude
que jamais, elle a su se différencier et affiche une impressionante progression en s’efforçant
d’innover.
Crédits photo : L’Eco austral
Il y a des rencontres qui façonnent une vie professionnelle. Geneviève Dardanne peut en
témoigner. Rien ne prédestinait cette cadette de huit enfants à une carrière dans le tourisme qui a
commencé dans les années 80. Mais le contact, au lycée, avec une professeur italo-mauricienne la
conduit à apprendre l’italien. Un bon moyen de se distinguer à une époque où l’hôtellerie
mauricienne commence à se structurer et se développe sur la plupart des marchés européens.
Ayant obtenu son HSC (Baccalauréat) mais disposant de peu de moyens financiers pour entamer
des études supérieures, la jeune femme se lance sur le marché du travail. Et sa maîtrise de l’italien,
rare à l'époque, lui permet d’intégrer le groupe réceptif Concorde comme guide touristique. Au
bout d'un an, Geneviève Dardanne rejoint Herbert Couacaud, le charismatique CEO du groupe
Beachcomber, premier groupe hôtelier mauricien, avec un poste de chargée de relation clientèle à
l'hôtel Méridien. « L’industrie touristique vivait alors ses vrais débuts. Le manque de structures
était compensé par notre passion. L'aéroport était ouvert 24 heures sur 24 et, pour être plus
opérationnels, nous résidions à l'hôtel pour accueillir les passagers qui arrivaient à toute heure. »
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PREMIÈRE MAURICIENNE DÉLÉGUÉE DE JETS TOURS ET MANAGER CHEZ HILTON
Deuxième virage important dans la carrière de Geneviève Dardanne : sa rencontre au Méridien
avec des représentants du célèbre voyagiste français Jet Tours. Ils lui proposent de devenir leur
déléguée résidente dans l'île. Elle sera la première Mauricienne à le devenir et le restera pendant
deux ans. Avant de poursuivre ce nouveau métier chez Beachcomber où elle finit responsable des
ventes. Elle intègre ensuite White Sand Tours où elle travaille pendant douze ans avec une autre
figure du tourisme local, Philippe Hitié. Entrée comme Marketing Manager, elle termine Manager.
Au moment de la scission de White Sand Tours et de la création de Summertimes par Philippe
Hitié, elle choisit « de ne pas choisir entre mes amis ». Elle retourne dans l'hôtellerie en devenant
responsable marketing et des ventes de l'hôtel Melville. Malheureusement, l'histoire tourne court
et finit par une procédure... Mais autre clin d'oeil du destin, au même moment, l'enseigne Hilton
s'installe à Maurice. Son directeur découvre dans la presse l'histoire de Geneviève et la contacte. «
Notre rendez-vous, qui a débuté à 10 heures, a fini à 16 heures ! », se souvient-elle. Séduit, il la
recrute. Elle restera dix ans au Hilton. « Le vrai challenge, en plus d'être situé dans le triangle d'or
hyper concurrentiel de Flic-en-Flac, a été de casser notre image d'hôtel Business. » Et cela a bien
fonctionné. « Le retour sur investissement de l'établissement a pris huit ans », explique-t-elle
fièrement. Disposant déjà d’une solide expérience de terrain, elle profite pleinement des
formations proposées par ce géant de l'hôtellerie. « La promotion à Hilton se fait non suite à une
évaluation terrain mais après une sévère sélection internationale. » Elle participe d’ailleurs à
l'ouverture des deux premiers Hilton aux Seychelles. Et après de nombreuses formations internes
et à l'étranger, elle est promue Business Development Manager. « Arrivée à un tel niveau de
responsabilités, la seule évolution qu'il me restait était de devenir directrice d'hôtel ou d’être
mutée à l'étranger. Mais j'ai choisi de privilégier ma vie familiale », affirme cette femme mariée et
mère de deux enfants. S'appuyant sur son expérience et sur son réseau, elle choisit alors de créer
sa propre entreprise. « J'ai débuté ma carrière dans le réceptif et sans doute que je la finirai dans
le réceptif », lance-t-elle avec le sourire.
KREOLA, UN RÉCEPTIF À TAILLE HUMAINE
Deux ex-collègues la suivent dans l’aventure qui commence par un investissement de 5 millions de
roupies (125 000 euros). Un minimum pour un réceptif qui a forcément besoin de véhicules.
« Kreola, c’est un nom facile à retenir et ça rappelle la créolité de Maurice. Quant au K, il fait
référence, de façon humoristique, à notre créativité. » Après un premier exercice comptable, en
2011, où l’activité a commencé seulement à émerger, l’année 2012 affiche un chiffre d’affaires de
44,3 millions de roupies (1,1 millions d’euros). En 2013, il fait plus que doubler en passant à 97,4
millions de roupies (2,4 millions d’euros) et atteint les 114,6 millions de roupies (2,9 millions
d’euros) en 2014. Une impressionnante progression alors que le tourisme a marqué le pas durant
cette période. Geneviève Dardanne a su donc conquérir des parts de marché et, pour sa flotte de
véhicules, s’appuie sur son partenaire ABC Motors. Le nombre de salariés, qui était de 15 à la
création de l’entreprise, est passé à 57 dont 14 qui travaillent au siège. En tant que réceptif, la
société conçoit des séjours et des visites de l'île. Elle se charge aussi de réaliser des programmes
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qu’elle a conçus. Et pour se démarquer de la forte concurrence, elle choisit de miser sur
l'originalité et la convivialité. Pour cela, Kreola s'appuie sur un partenariat exclusif noué avec
Exotismes, l'un des leaders européens du tourisme à destination des îles. « Nous proposons des
services et des packages originaux et surtout taillés sur mesure. Ces produits sont construits
autour de la relation et de l'interactivité avec les Mauriciens. Nos excursions, qui comprennent des
lieux classiques incontournables, ont toutes une signature Kreola. » Dans certains de ces packages,
les touristes peuvent ainsi découvrir la gastronomie mauricienne chez l'habitant... « Mon ambition
est de faire connaître à mes clients l'expérience de la destination Maurice… Nous voulons être un
réceptif à taille humaine. Cela passe par des liens privilégiés et nos chauffeurs-guides représentent
un élément stratégique pour ça. » Si Kreola se positionne encore sur les marchés traditionnels, sa
fondatrice et dirigeante a conscience qu'il faut se rapprocher des nouveaux pays émetteurs. Déjà,
l’une de ses employés parle le mandarin. « Mais cela demande une nouvelle organisation et une
approche marketing que nous envisageons dans le futur. » Geneviève Dardanne a conscience que
la richesse de Maurice, c'est avant tout les Mauriciens. Pour cela, Kreola soutient l'ONG « Les
enfants du soleil » qui scolarise des enfants en maternelle, organise des sessions d’éveil et propose
un cursus éducatif aux enfants et adolescents issus de familles défavorisées. « Car un entrepreneur
doit savoir aussi redonner. »
- PROGRESSION
Après un premier exercice comptable, en 2011, où l’activité a commencé seulement à émerger, l’année
2012 affiche un chiffre d’affaires de 44,3 millions de roupies (1,1 millions d’euros). En 2013, il fait plus que
doubler en passant à 97,4 millions de roupies (2,4 millions d’euros) et atteint les 114,6 millions de roupies
(2,9 millions d’euros) en 2014. Le nombre de salariés est passé de 15 à 57.
- INNOVATION
Kreola a choisi de se positionner sur le marché hyper-concurrentiel des réceptifs. Et pour se distinguer,
l’entreprise propose des packages novateurs, un mix entre les incontournables de la destination et des
endroits typiques parfois méconnus. Certains packages peuvent proposer la découverte de la gastronomie
mauricienne chez l’habitant. Geneviève Dardanne capitalise sur le facteur humain « car la vraie richesse de
Maurice, c'est les Mauriciens ».
- DYNAMISME À L’EXTÉRIEUR
L'essentiel de la clientèle de Kreola se trouve encore dans les marchés traditionnels comme celui de la
France ou de La Réunion. Le réceptif bénéficie pleinement de son partenariat exclusif noué avec Exotismes,
l'un des leaders européens du tourisme à destination des îles.
- ENGAGEMENT CITOYEN
Kreola soutient activement des malades. L’entreprise a aussi incité des tour-opérateurs français venus à
Maurice dans leur cadre de voyage d'études à participer à la crèche de Noël de Quatre-Bornes pour aider
des familles en difficulté. Elle soutient l'ONG « Les enfants du soleil » qui scolarise des enfants en
maternelle, organise des sessions d’éveil et propose un cursus éducatif aux enfants et adolescents issus de
familles défavorisées.
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KRISHNA MOOTIEN DÉVELOPPE UNE MARQUE EMBLÉMATIQUE
Suivre et anticiper l'évolution des comportements des consommateurs mauriciens en leur
facilitant la vie, c'est la réussite de Mayil, connue pour ses épices qui se sont imposées sur le
marché. Depuis quelques années, l’entreprise est passée à la vitesse supérieure.
Crédits photo : L’Eco austral
« Pulao », « halim », épices pour achards... et bien sûr « masala » (autre nom du curry).
Autant de produits emblématiques de la cuisine mauricienne. Et depuis presque trente ans,
un nom s'est fait une place particulière dans quasiment tous les foyers de l'île. Il s'agit de la
marque Mayil qui signifie paon en langue tamoule, un oiseau sacré symbolisant en Inde la
pureté et la beauté. Mayil propose des épices pré-conditionnées et pré-dosées en sachets et
en pots. Son histoire débute en 1987. « En fait, ma grand-mère maternelle, mon « amaye »,
préparait déjà du masala pour les gens de son quartier », se rappelle, des étoiles dans les
yeux, Krishna Mootien, qui a pris les rênes de l'entreprise. La demande était forte, d'autant
plus qu'à cette époque, les Mauriciens avaient l'habitude de préparer ou de faire préparer
leurs mélanges d'épices. Et très peu d'entreprises proposaient des conditionnements prêts à
l'emploi... Le père de Krishna, policier, a alors l'idée de commercialiser les produits préparés
par sa belle-mère en conditionnant la précieuse poudre jaune dans des sachets en plastique
plus faciles à transporter. Et déjà le succès est au rendez-vous. La famille Mootien transforme
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alors la maison familiale en un véritable petit atelier. Tous les membres de la famille mettent
la main à la pâte, dont le jeune Krishna qui passe ses vacances scolaires à les aider.
Rapidement, la décision est prise de créer l'entreprise en 1987. Dès le début, ce fut un pari
périlleux. « Nous arrivions sur un marché où le consommateur faisait très peu confiance au
masala et aux épices pré-conditionnés car ils souffraient d'une mauvaise réputation, explique
Krishna Mootien. Certains produits contenaient du riz, voire même de la sciure de bois.
Notre credo a été d'offrir des produits sains, illustrés par notre slogan « 100 % pur » qui
figure sur nos emballages. »
UNE PETITE ENTREPRISE FAMILIALE DEVIENT UN LEADER NATIONAL
Les produits de Mayil trouvent peu à peu leur place dans la plupart des boutiques de l'île, les
grandes surfaces étant encore rares à l'époque. Et avec l'augmentation de la demande et des
ventes, l'entreprise diversifie sa gamme : du masala, elle passe au safran, au cumin... Le
jeune Krishna décide, à la fin de ses études secondaires, de mettre le cap sur la Malaisie pour
y suivre des cours de gestion et de marketing. Il en profite pour y effectuer une étude du
marché des épices à Maurice. À la fin de son cursus universitaire, il retourne en 2003 dans
l'île. À 21 ans, il intègre l'entreprise familiale. Ses parents décident de passer
progressivement le témoin au jeune homme. Il revoit alors la structure de l'entreprise, en
investissant notamment dans des camionnettes de livraison et en développant son réseau de
distribution. Pour cela, il rencontre les boutiquiers, mais surtout les clients pour comprendre
leurs demandes afin de mieux y répondre. Il développe sa gamme de produits qui atteint
alors déjà 50 références. Sa volonté de structurer l'entreprise atteint un nouveau palier en
2007, avec la construction de sa deuxième unité de production à Dagotière. Elle comprend
des moulins dernier cri venus d'Allemagne et d'Inde. « Ils traitent des épices venues du
monde entier comme la cardamome du Guatemala, le poivre de la Malaisie ou les clous de
girofle de Madagascar... » Elles sont nettoyées et stérilisées. « Cela est indispensable car il
s'agit de produits alimentaires et j'ai une responsabilité envers mes clients ! » Enfin, elles
sont traitées, moulues et conditionnées selon les commandes. Exigeant le meilleur, le jeune
dirigeant de Mayil fait certifier son usine par le géant mondial SGS aux normes
internationales ISO 9001, ISO 22000 (norme relative à la sécurité des denrées alimentaires)
et HACCP (Hazard Analysis Critical Control Point), méthode de maîtrise de la sécurité
sanitaire de denrées alimentaires, actuellement en phase d'obtention. Krishna investit
également dans la logistique : la flotte de véhicules passe de 3 à 18. Si, pour assurer son
succès, le jeune patron estime « son investissement, depuis 2003, à 200 millions de roupies
(5 millions d'euros) », l'entreprise se développe sur ses fonds propres. « Aujourd'hui, je n'ai
pas d'emprunts ! » Outre le développement de l'entreprise, Jay Mootien, le père de Krishna
et actuel président de Mayil Spices Ltd a aussi lutté pour la libéralisation du marché du
curcuma, un des principaux ingrédients du curry. Cela a permis une baisse des prix. La
création de Mayil Spices Ltd en 2011 représente la dernière étape de la structuration des
activités.
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DÉVELOPPEMENT DE LA GAMME DE PRODUITS
Krishna Moutien a lancé, en 2013, la marque Dubon dont les ventes sont en hausse
constante, puis, en 2014, la marque Thaali avec un conditionnement unique en son genre.
Aujourd'hui, l'entreprise distribue 188 références de produits Mayil, 38 de produits Dubon et
38 de produits Thaali. « Pour assurer un produit typiquement mauricien, je m'appuie sur
l'association des chefs mauriciens qui élaborent les recettes d'épices. » Par ailleurs, la société
ne se contente pas de proposer des produits orientaux, mais commercialise également des
mélanges pour pizzas et pâtes. Mayil a su suivre et anticiper l'évolution des comportements
des consommateurs mauriciens en s'appuyant sur le boom des supermarchés. « Notre plus
grande fierté est d’avoir facilité la vie des Mauriciens ». Et les opérateurs de la grande
distribution suivent. À preuve, « nous travaillons avec toutes les enseignes qui respectent les
normes professionnelles et éthiques de référencement. D'ailleurs, et je le dis sans fausse
modestie, si les produits Mayil ne sont pas disponibles dans un point de vente, il faut
chercher le problème du côté du professionnalisme et du degré d'éthique dont fait preuve ce
commerçant ». Cette présence souligne le dynamisme de l'entreprise car les « magasins
n'ont ni de temps... ni surtout de place à perdre. Si vos produits ne conviennent pas à la
clientèle, ils sortent du référencement et disparaissent rapidement des rayons », souligne le
patron de Mayil.
La société est aujourd'hui leader de son secteur avec presque 80% du
marché et quelque 3 000 points de vente (qui vont des supermarchés aux petits boutiquiers).
De quoi engranger un chiffre d’affaires de 124 millions de roupies (3,1 millions d’euros) qui
devrait fortement progresser, à 200 millions de roupies (5 millions d’euros), en 2015.
- PROGRESSION
Fondée en 1987, Mayil a été créée avec de modestes investissements mais a pu s’imposer sur le
marché. Son chiffre d’affaires a atteint 124 millions de roupies (3,1 millions d'euros) en 2014 et
devrait atteindre les 200 millions de roupies (5 millions d'euros) en 2015. L’entreprise emploie une
centaine de Mauriciens.
- INNOVATION
Les produits Mayil sont importés du monde entier. Ils sont traités, moulus et conditionnés dans une
usine certifiée aux normes ISO 9001, ISO 22000 et HACCP (en cours d'obtention). Les épices y sont
nettoyées et stérilisées. Les produits Mayil sont pré-conditionnés et pré-dosés en sachets et en pots.
- DYNAMISME À L’EXTERIEUR
Après une tentative avortée d'implantation sur le marché européen en 2009, avec Mayil Europe, «
une ouverture prématurée », reconnaît Krishna Mootien, l'entreprise se donne aujourd'hui les
moyens de son ambition en investissant massivement dans les outils et les équipements. Mayil
compte pénétrer le marché régional dès l'année 2016.
- ENGAGEMENT CITOYEN
En plus de sa contribution obligatoire au CSR (Corporate Social Responsability) qui représente 2% de
ses bénéfices, Krishna Mootien soutient les enfants de sa centaine d'employés en finançant
intégralement leurs frais scolaires et universitaires. Car « l'éducation est la clé de la réussite ».
Nouvelle étape dans son engagement, il va créer en 2016 une fondation qui permettra de mieux
gérer et organiser les contributions de l'entreprise aux projets de société.
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VINCENT LAGARDE ENTREPRENEUR D’AVANT-GARDE
Son entreprise Natec Médical, qui conçoit, fabrique et commercialise des cathéters à
ballonnet stériles et non stériles, est un modèle du genre. Par sa politique sociale très
avancée et son intense activité de Recherche & Développement.
Crédits photo : L’Eco austral
Il est français et mauricien, Vincent Lagarde, mais très californien dans son style personnel et
dans sa conception de l’entreprise. Le genre de patron décontracté qu’on imagine croiser
dans la Silicon Valley. Et quand on découvre le « Maeva Centre Building » qui abrite Natec
Medical, au sein d’Ebene Business Park, cette impression se renforce. De l’espace, de la
végétation et de la lumière naturelle… L’architecture a été conçue pour en faire une
entreprise d’un nouveau type. Une entreprise où il fait bon travailler. « Ce qui m’intéresse,
c’est le bien-être de mes employés et c’est d’ailleurs mon intérêt car c’est comme ça qu’ils
donnent le meilleur d’eux-mêmes. » Au-delà du cadre de travail, c’est une véritable politique
sociale qui vise le bien-être physique et moral des salariés. Ces derniers bénéficient de la
prise en charge de 50% des frais de scolarité de leurs enfants de la Form 5 jusqu’au HSC
(équivalent du Bac). Sans oublier la prise en charge partielle ou totale, selon les cas, de leur
frais de garderie. Les salariés profitent aussi d’un programme de santé qui comprend des
tests sanguins, un bilan à l’hôpital Apollo, des consultations d’ophtalmologiste, une visite
chez une diététicienne et un accès à la thérapie du rire. Une fois par mois, on arrête tout,
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chez Natec Médical, pour se consacrer à des activités sportives et au yoga, au gymnase
d’Ebène qui est réservé pour ça. Pour le volley, c’est l’entraîneur national en personne qui
officie. Si l’on ajoute les cadeaux d’anniversaire, on voit que les employés de Natec Médical
sont particulièrement choyés et l’on comprend le faible taux de « turnover ». Côté salaire, la
politique se veut également motivante alors que sur 170 salariés - des femmes à 80% - on
compte 110 « petites mains » qui manipulent les cathéters. Ces « petites mains »
commencent à 6 200 roupies par mois (155 euros) et voient leur rémunération progresser et
atteindre, pour certaines, 16 000 roupies (400 euros). Sans prime de rentabilité qui
imposerait des cadences difficiles, mais plutôt des « primes de qualité ». Une politique
d’autant plus remarquable que les salaires représentent 50% des coûts de revient de Natec
Médical. Et cela n’empêche pas l’entreprise de réaliser 60% de son chiffre d’affaires sur le
marché indien. Dans ce pays d’1,3 milliard d’habitants, la production de cathéters est peu
développée, notamment parce qu’il n’est pas toujours bien vu que les femmes travaillent.
Mais les besoins se révèlent énormes avec le développement des maladies coronariennes.
INNOVER DANS LES SCIENCES DE LA VIE
Natec Médical travaille aussi sur les marchés des pays développés comme les Etats-Unis.
L’entreprise se positionne comme partenaire en outsourcing spécialisé dans la fabrication de
dispositifs interventionnels percutanés. Un partenaire qui conçoit et fabrique des dispositifs
de cathéters à ballonnet destinés à la cardiologie-radiologie interventionnelle, la gastroentérologie et l’urologie. Cette activité d’outsourcing ne l’empêche pas de développer ses
propres marques aux noms bien typiques comme Tamarin Blue, Filao et Ebony. Le secteur
dans lequel évolue Natec Médical est celui des dispositifs médicaux qui a le vent en poupe
sur le plan mondial avec le vieillissement des populations et le développement économique
qui entraîne son lot de nouvelles maladies. L’impressionnante croissance de l’entreprise de
Vincent Lagarde atteste de l’essor de ce secteur. Son chiffre d’affaires progresse en moyenne
de 20% chaque année depuis le début de son activité en octobre 2000.
En 2014, il a atteint 280 millions de roupies (7 millions d’euros), le résultat net s’affichant à
68 millions de roupies (1,7 million d’euros). L’entreprise a commencé avec 7 salariés et en
emploie aujourd’hui 170. C’est un véritable groupe qui émerge. Une première diversification
a vu le jour avec Envaste, entreprise spécialisée en gastrologie et urologie, créée en
partenariat avec un Français installé en Irlande. Le laboratoire Microlabs, pour sa part, sera
lancé d’ici la fin de l’année en microbiologie, notamment pour les tests de stérilité, et cela
évitera de faire appel à un laboratoire situé en France. Microlabs travaillera pour le groupe et
pour des clients externes. Une activité d’extrusion de tubes va être lancée également, ainsi
qu’une entreprise orientée vers la neurologie pour la production de cathéters spécifiques.
Natec Medical se positionne comme un acteur dans les sciences de la vie en conduisant une
politique de Recherche et Développement dans les composants médicaux, la fabrication et la
transformation de dispositifs médicaux, leur stérilisation et leur analyse micro-biologique.
Pas moins de 8% du chiffre d’affaires sont consacrés à la Recherche & Développement dont
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le département emploie 17 personnes, la moitié étant des ingénieurs mauriciens. Les
objectifs consistent à améliorer la performance des produits et à concevoir des machines
pour optimiser la production. Des machines qui devraient également être exportées.
L’activité est donc loin de se limiter aux « petites mains » et l’apport de nouvelles machines
devrait permettre d’augmenter sa valeur ajoutée. Une activité entièrement tournée vers
l’export avec 4% du chiffre d’affaires consacrés au marketing, investis principalement dans
des salaires et dans la participation à des congrès aux Etats-Unis, en Europe et en Asie.
UN NOUVEAU VISAGE MAURICE
L’aventure a commencé en 1998… Aux Etats-Unis. Avec déjà l’idée de s’installer à Maurice.
« Mais c’était trop tôt pour ce type d’activité », commente Vincent Lagarde. Cet ingénieur
diplômé de l’Institut national des sciences appliquées (INSA) de Strasbourg détient un master
en mécanique et un autre en polymères (nouveaux matériaux). Il a commencé par travailler
durant cinq ans dans un laboratoire norvégien, basé à Paris, qui travaillait justement dans les
ballons de dilatation. Vincent Lagarde y était chargé de la Recherche et Développement.
Profitant d’un plan social, il quitte l’entreprise avec quelques moyens et envisage de créer
son entreprise en France. « Je n’ai pas trouvé de soutien bancaire et je me suis tourné vers
les Etats-Unis où j’ai trouvé un associé. » L’aventure commence donc à Boston, mais dans la
situation de plein emploi de l’époque, la ressource humaine se révèle rare et les salaires
bondissent. Ayant passé ses vacances à Maurice en 1997, Vincent Lagarde avait pensé à ce
pays pour délocaliser une partie de l’activité. « Mais dans ce domaine médical, la destination
n’était pas encore assez crédible à l’époque. » Finalement, l’implantation se fera en 2000. Et
ce ne sera pas la délocalisation d’une partie des activités (à faible valeur ajoutée et exigeant
des « petites mains »), mais une relocalisation complète avec, dans la foulée, le rachat des
parts de son associé américain. Quinze plus tard, Vincent Lagarde a fait de Natec Médical une
entreprise modèle, très impliquée dans sa politique de responsabilité sociale qui va bien audelà des obligations légales.
Si Maurice impose en effet de consacrer 2% de son résultat net au CSR (Corporate Social
Responsability), Natec Médical fait nettement plus. L’entreprise avait d’ailleurs commencé à
soutenir l’association « SOS Femmes » il y a dix ans, bien avant que ne soit instauré le CSR.
Elle soutient plusieurs ONG agréées comme la MDA (Muscular Dystrophy Association) et
« SOS Enfants Villages Maurice », principale ONG dédiée aux enfants. Dans le domaine
culturel, et donc hors CSR, Natec Médical soutient « Ile Courts », le festival du court-métrage,
le festival de jazz Ernest Wiehe et l’Atelier Mozart qui initie les enfants défavorisés à la
musique. À titre personnel, Vincent Lagarde est l’un des fondateurs de l’école « Paul et
Virginie » en 2002, à Tamarin, sur la côte ouest. Une école maternelle et primaire qui est la
cinquième école française du pays, gérée par une société privée à but non lucratif. Le succès
est au rendez-vous puisque « Paul et Virginie » accueille aujourd’hui 380 élèves contre 35 à
son ouverture.
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- PROGRESSION : Le chiffre d’affaires progresse en moyenne de 20% chaque année depuis le
début de son activité en octobre 2000. En 2014, il a atteint 280 millions de roupies (7 millions
d’euros), le résultat net s’affichant à 68 millions de roupies (1,7 million d’euros). L’entreprise a
commencé avec 7 salariés et en emploie aujourd’hui 170.
- INNOVATION : 8% du chiffre d’affaires sont consacrés à la Recherche & Développement
dont le département emploie 17 personnes, la moitié étant des ingénieurs mauriciens. Les
objectifs consistent à améliorer la performance des produits et à concevoir des machines
pour optimiser la production. Des machines qui devraient également être exportées.
- DYNAMISME À L’EXTÉRIEUR : L’activité est entièrement tournée vers l’export avec 60% du
chiffre d’affaires réalisés en Inde. L’entreprise a des implantations en Inde, à Hong Kong et
aux Etats-Unis.
- ENGAGEMENT CITOYEN : Natec Médical fait beaucoup plus que consacrer 2% de son
résultat net dans la responsabilité sociale (soutien à des ONG agréées) comme le lui impose
l’obligation légale du CSR (Corporate Social Responsability). En interne, elle développe une
politique sociale très avancée.
Portrait suivant : Nirvan Veerasamy – Yu Lounge…
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NIRVAN VEERASAMY FAIT GRIMPER LE NIVEAU D’ACCUEIL DES TOURISTES
Son salon privé Yu Lounge accueille dans l’enceinte de l’aéroport la « jet set » aussi bien que
« monsieur tout le monde ». Un concept que ce passionné d’aéronautique, qui vend et loue
des avions, a exporté aux Antilles.
Crédits photo : L’Eco austral
« Ne pas savoir ce qu’on veut faire à 18 ans, c’est un atout. » C'est par ce mot d'esprit que le
créateur et directeur général de Yu Lounge, Nirvan Veerasamy, se remémore son parcours.
Second d'une fratrie de trois garçons, il est le fils de feu Me Sacheedanand Veerasamy, une
personnalité très connue du monde juridique. Titulaire d'un Bsc (licence) d'économie de
l'université de Birmingham City, le jeune homme découvre par hasard un catalogue
regroupant tous les masters britanniques, dont celui de l'université de Cranfield. Elle est
mondialement reconnue pour la qualité de son enseignement en aéronautique. « Ce fut une
claque pour moi. Immédiatement, j'ai envoyé une lettre de renonciation à l'université de
Stanford. » Accepté à Cranfield, le jeune Mauricien y obtient son Msc (master) en Air
Transport Management. À peine diplômé, il est recruté, en 1983, comme ingénieur des
ventes par Airbus. Il met alors le cap sur Toulouse, le siège de l'avionneur européen. Dès
1986, à 26 ans, il est nommé directeur des ventes du marché Asie du Sud-est. Le top de ses
ventes est atteint en 1989 avec Singapore Airlines. Nirvan va convaincre la compagnie
asiatique d'acheter 17 avions A340. Coût du contrat ? Cinq milliards de dollars. « L'unité de
base dans notre industrie est le milliard de dollars », rappelle-t-il. Ce succès scelle à la fois le
succès de Nirvan Veerasamy, mais aussi sa crainte « d'être enfermé à jamais dans le rôle du
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super vendeur ». À 32 ans, il demande un congé sabbatique d'un an. Il retourne à Maurice et
crée, en 1993, la compagnie Aero Services (Mauritius) Ltd. L'entreprise est spécialisée dans
l'immatriculation d'appareils à Maurice.
DU SUPER VENDEUR À L'ENTREPRENEUR
L'activité de l'aviation civile mauricienne ne suit pas et Aero Services ne peut décoller. Peu
après, Nirvan rencontre l'entrepreneur indien Uday Nayak. Cette rencontre est
fondamentale. « Un entrepreneur doit être capable de s'associer avec une personne qui a la
même vision pour aller conquérir ensemble d'autres marchés. Maurice est trop petit. »
Ensemble, ils fusionnent leurs entreprises pour créer en 2002, avec deux dollars, Veling Ltd.
« Je conserve toujours un billet d'un dollar sur mon bureau pour rappeler comment le succès
peut être éphémère. » Veling est spécialisée dans la vente, le leasing et la gestion d'avions de
ligne et de jets privés. L'entreprise mauricienne travaille avec les grandes compagnies
aériennes du monde. « La demande est forte puisque l'important n'est pas de posséder
l'appareil mais de l'opérer ». Veling Ltd est aujourd'hui classée dans le Top 40 mondial des
loueurs d'avions. Dès 2003, Nirvan et Uday réfléchissent à une offre en accord avec l'image
haut de gamme de Maurice. D'où l'idée de créer son propre terminal privé. C'est le Yu
Lounge (Yu pour You, vous en anglais, au sens où le client est au centre des préoccupations).
Mais entretemps, Nirvan Veerasamy est appelé à prendre les rênes d'Air Mauritius. Si
l'aventure tourne court au bout d'un an, il n'en garde pas de souvenirs amers. « Le secteur de
l'aéronautique est scindé en trois : le constructeur d'avions, le propriétaire d'appareil et
l'opérateur. J'ai eu la chance d'évoluer dans ces trois métiers. »
UN VÉRITABLE TERMINAL PRIVÉ, CARTE DE VISITE DE MAURICE
Le Yu Lounge débute ses opérations en 2008 avec un capital de 100 millions de roupies (2,5
millions d’euros). Il s’agit de proposer une offre exclusive pour les « riches et ultra riches qui
viennent en jet privé dans l'île », accessible également aux autres touristes. Il y a eu 225 jets
privés à atterrir en 2014 sur le tarmac mauricien. Le Yu Lounge est un véritable salon privé.
Excentré du terminal principal, il garantit la confidentialité des arrivées et surtout l’absence
de paparazzi pour la « jet set », les hommes d'affaires ou les personnalités politiques venus
incognito dans l'île. Ces passagers ont accès à un service traiteur gastronomique avec des
vins fins, un comptoir presse internationale, une télévision grand écran et bien sûr le Wifi. Ils
bénéficient également d'une boutique duty free exclusive. Bref, il s'agit de prestations dignes
d’un hôtel cinq étoiles. « Nous sommes bien en avance sur les autres aéroports de la région.
Nous sommes la carte de visite de Maurice. » Le Yu Lounge est également un véritable
terminal privé car il comprend des machines capables d’émettre les billets électroniques des
compagnies aériennes qui desservent Maurice. Le terminal séduit aussi les entreprises.
« Elles constituent 10% de notre chiffre d'affaires et nous visons les 15% à 20% à moyen
terme. » Pour cela, toute une gamme de services de secrétariat, allant de la télécopie à la
prise de notes, sont à la disposition des cadres en déplacement ou en transit à Maurice.
Dernière étape du développement du terminal, l'inauguration, en mai 2015, d'un hangar
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flambant neuf dont le coût s'élève à trois millions de dollars. Il peut accueillir quatre jets
privés en même temps. S'il s'agit d'une offre exclusive mais elle reste accessible. « À preuve,
notre clientèle est constituée pour moitié d’hommes d’affaires et de familles. Elle provient
d’Europe de l’Est comme la Russie (40%) ou de l’ex-Tchécoslovaquie, d’Afrique ou des pays du
Golfe. Si, aujourd'hui, le terminal ne constitue que 5% de l'activité de Veling Ltd contre 95%
pour le leasing, « cette activité ne peut que grandir ». YU Lounge a réalisé, en 2014, un
chiffre d'affaires de 2,35 millions d'euros.
UNE OFFRE QUI S'EXPORTE
L'objectif est de faire de Yu Lounge une marque internationale. Et après être devenu la
vitrine du luxe et du savoir-faire mauriciens, le concept s'exporte à Saint-Kitts-et-Nevis (SaintChristophe-et-Niévès) dans les Antilles. Le Lounge a été financé pour un montant de 8
millions de dollars. S'inspirant du modèle mauricien, les autorités de ce petit État fédéral
insulaire désirent attirer de riches investisseurs dans des projets immobiliers. Des
investisseurs qui peuvent acquérir, sous certaines conditions, la nationalité christophienne.
La vitrine Yu Lounge a impressionné le fondateur de la célèbre chaîne Four Seasons en visite
dans ce pays des Caraïbes. « Depuis, nous avons passé un accord avec eux. Dorénavant, les
touristes allant dans leur hôtel passeront par notre salon. Notre objectif est désormais
d’exporter le concept dans d’autres pays. D'ici à 2020, nous devrions en compter quatre ou
cinq, et pas nécessairement dans des destinations balnéaires. »
- PROGRESSION
Actionnaire à parité avec Uday Nayak dans l'entreprise, Nirvan Veerasamy est le directeur général de
Veling Ltd tandis que l'entrepreneur indien en est le président. Fondée en 2008 avec un capital de 2,5
millions d’euros (100 millions de roupies), Yu Lounge, filiale de Veling Ltd, a enregistré, en 2014, un
chiffre d'affaires de 2,35 millions d'euros.
- INNOVATION
Véritable terminal et salon aéroportuaire privés, Yu Lounge propose des prestations dignes d’un hôtel
cinq étoiles : service traiteur gastronomique, duty free exclusif, Wifi et même l'émission de billets
électroniques des compagnies aériennes desservant Maurice. Un ensemble de prestations qui se
veulent une carte de visite de Maurice.
- DYNAMISME À L’EXTERIEUR
Après être devenu la véritable vitrine du luxe et du savoir-faire mauricien, le salon Yu Lounge a été
exporté à Saint-Kitts-et-Nevis, dans les Antilles. L'objectif est d’en faire une marque internationale et
d’exploiter, d'ici 2020, quatre à cinq salons dans le monde, et pas nécessairement dans des
destinations balnéaires.
- ENGAGEMENT CITOYEN
« En plus de ses obligations légales dans le cadre du CSR (Corporate Social Responsability), Veling Ltd
a également des projets à Saint-Kitts-et-Nevis dans l'aide à l'enfance et à l'éducation.
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