Communiqué Presse

Transcription

Communiqué Presse
 COMMUNIQUÉ DE PRESSE
Bijoux des Toits du Monde. De la Chine au Caucase.
Collection Ghysels
28 septembre 2012 - 3 mars 2013
Cette exposition raconte les espaces immenses de la Chine au Caucase. Près de deux cents bijoux de la célèbre
collection Ghysels conduisent les visiteurs sur les sentiers de la route de la Soie, en passant par la Mongolie, le
Tibet, le Bhoutan, le Népal, l’Inde du Nord, l’Afghanistan, le Pakistan et l’Asie centrale. Qu’ils soient en ambre, en
turquoise, en corail, en or ou en argent, incrustés de pierreries ou enrichis de plumes, ces joyaux de qualité
exceptionnelle révèlent des peuples, des civilisations et des cultures dont la mémoire disparaît. Ils nous parlent
aussi de la passion, de la persévérance qui ont conduit Colette et Jean-Pierre Ghysels sur tous les continents à
la recherche d’ornements dont les critères premiers étaient la beauté et la qualité. Séduits par la richesse de
l’imaginaire et des traditions ancestrales de ces populations, ils n’ont eu de cesse de rassembler des parurestémoins de mondes en perdition.
Ces bijoux tirent leur singulière beauté de l’éclat de leur palette et de la préciosité de leurs matériaux. Si l’or
recueille les faveurs de l’élite, l’argent, la turquoise, le corail et la cornaline règnent sur la majorité des ornements.
Qu’ils soient nomades ou sédentaires, les « peuples des toits du monde » rivalisent d’imagination pour exhiber le
prestige de la tribu ou du clan. Loin d’être des colifichets futiles, ces coiffes, ces colliers, ces pendants d’oreilles,
ces bracelets, ces lourdes ceintures orfévrés scandent les grandes étapes de la vie et bien souvent bijou et
talisman aux vertus protectrices ou curatives ne font qu’un. Mais comme chez bien des peuples, la parure
constitue également une réserve monétaire pour affronter les caprices du destin. C’est aussi la dot qui protège la
femme de son fragile statut.
Les Parures de Chine – bracelets, colliers, boucles d’oreille, épingles - présentées en introduction invitent à
pénétrer dans l’univers raffiné de la société chinoise. Quelques pièces exceptionnelles démontrent que l’art du
bijou en jade s’est développé dès le néolithique (vers 6500-1500 av. notre ère), tandis que l’or apparaît sous la
dynastie Shang (env. 1500-1050 av. notre ère). Ces deux matériaux précieux seront particulièrement appréciés
jusqu’à la dynastie Qing (1644-1911), parfois enrichis de pierres ou de plumes de martin-pêcheur.
Dès la deuxième salle, le visiteur entre dans le monde chamarré des peuples nomades en passant De la
Mongolie au Népal où l’or, l’argent, la turquoise, le corail et l’ambre sont les matières de prédilection. Les
ornements – imposantes parures de tête, colliers-pectoraux, bracelets, bagues, ceinture - souvent d’une beauté
sauvage et rude, étaient conçus pour s’accumuler sur le corps.
Le voyage se poursuit avec Les parures de l’Inde du nord, du Pakistan et de l’Afghanistan exposées dans la
troisième salle. Les femmes de ces pays manifestaient un goût marqué pour les bijoux en argent, parfois émaillés
: coiffes, ornements frontaux et temporaux, colliers à rangs multiples, bracelets, bagues, ceintures. Souvent
composés de chaînettes et de pampilles, ils tintaient au gré des mouvements.
À la fin du circuit la splendeur des parures de métal se dévoile Au fil des peuples et des tribus d’Asie centrale.
Chez les Turkmènes, la profusion et l’opulence des ornements d’argent, bordés de filigrane et agrémentés de
cornaline, permettaient d’éloigner les mauvais esprits. Les bijoux en argent niellé du Caucase, méconnus du
grand public, sont représentés par quelques colliers, bracelets et boucles d’oreilles mais surtout par un ensemble
rare de ceintures féminines et masculines aux styles variés.
A cette présentation s’associe un ensemble de photographies anciennes issues des Archives photographiques
du Musée Guimet - musée national des Arts asiatiques à Paris.
Commissaire de l’exposition : Monique Crick
Scénographie : Nicole Gérard
Catalogue : Bérénice Geoffroy-Schneiter
1 Parures de Chine
Les parures sont attestées en Chine dès la période néolithique (vers 6500-1500 av. J.-C.). Les plus précieuses,
exécutées en jade, témoignent de l’importance attribuée à cette pierre. Les bijoux épousent des formes d’une
sobriété parfaite avant de s’enrichir, au fil des siècles, de motifs décoratifs. Prisé pour sa dureté, sa sonorité, la
qualité de son poli ainsi que ses vertus spirituelles et morales, le jade semble avoir été utilisé sans interruption
pendant près de sept millénaires pour la fabrication de bracelets, perles, bagues, boucles de ceinture, colliers et
ornements de coiffure… À la discrétion de cette belle pierre s’oppose l’exubérance de l’or, employé dès la
dynastie Shang (env. 1500-1050 av. notre ère), des gemmes colorées et du bleu étincelant des plumes de
martin-pêcheur, très prisés à partir de la dynastie Ming (1368-1644).
Les ornements de coiffure sont parmi les plus anciennes parures connues en Chine et leur popularité ne se
démentira plus, jusque sous la dynastie Qing (1644-1911). Les épingles à cheveux, notamment, étaient déclinées
en différentes matières et les femmes mariées en ornaient leur chignon, complété d’un diadème, de peignes ou
d’autres ornements. Les boucles d’oreilles, portées à l’origine par les hommes comme les femmes, deviennent
par la suite un attribut exclusivement féminin. Longtemps perçu comme allogène ou utilisé par les femmes du
peuple, cet accessoire se répand néanmoins dans l’aristocratie sous les Ming. Celles en forme de calebasse
(emblème de longévité) sont particulièrement appréciées.
De la Mongolie au Népal : turquoise, corail et ambre en majesté
Témoins de longues traditions, les parures en Asie sont l’expression, peut-être la plus visible, de la richesse et de
la complexité des différentes ethnies. Dans ces horizons infinis des routes de la Soie, elles évoquent
matériellement le passage des marchands chargés du corail rouge de la Méditerranée, de l’ambre de la Baltique
ou de la turquoise de Perse. Qu’ils soient hommes ou femmes, sédentaires ou nomades, les habitants de ces
contrées prêtent à leurs bijoux une valeur talismanique, aussi le choix des matériaux n’est-il guère fortuit. Chez la
femme, les ornements signalent le rang et la fortune de son époux. Les parures données en dot à la jeune
mariée pouvaient s’enrichir au cours des années, si la situation économique de la famille le permettait. Elles
restaient néanmoins la propriété de la femme et assuraient sa sécurité en constituant une garantie financière.
Les métaux précieux et les pierres représentaient à tout moment une valeur sûre et aisément négociable.
Si l’or recueillait les faveurs de l’élite, l’argent, la turquoise et le corail régnaient sur la majorité des bijoux. Par sa
couleur bleue, symbole de l’eau, du ciel et de l’air, la turquoise est investie de vertus curatives et prophylactiques.
Ecartant les influences démoniaques, elle rend courageux et invulnérable. Tout aussi prisé, le corail apporte force
et bonheur aux femmes. Le rouge étant lumière, les parures qui mêlent le bleu du ciel au rouge ardent du feu
accomplissent la fusion des énergies naturelles. Symbole de la terre, l’ambre fascine par sa couleur dorée mais
surtout réchauffe, protège et guérit. La légende veut que les perles d’agates gzi [brillance, splendeur] soient
d’origine surnaturelle. Rubanées ou à motifs d’ « yeux » (mig), elles sont considérées comme des amulettes
protectrices, celles à neuf « yeux » étant les plus recherchées. Broyées en poudre, elles peuvent être utilisées
dans la médicine traditionnelle tibétaine. Savamment codifié, le port de certains bijoux relève, quant à lui, de la
sphère du religieux, tels les reliquaires mongols ou tibétains ou le collier tayo porté chez les Newar du Népal par
la Kumari – jeune fille considérée comme une déesse vivante.
Les parures de l’Inde du nord, de l’Afghanistan et du Pakistan
En Inde, l’importance des bijoux prend racine dans la littérature sacrée et peu de pays n’ont su, comme celui-ci,
préserver les coutumes millénaires. Les ornements se portaient traditionnellement sur presque toutes les parties
du corps, notamment au niveau des articulations et des points de pression. On pensait, en effet, que le contact
entre les points de pulsation et les bijoux - pénétrés de significations symbolique et spirituelle - améliorait le
passage du flux énergétique et maintenait ainsi le corps et l’esprit dans un état d’équilibre et d’harmonie parfaits.
Il était donc impératif d’arborer des décorations, aussi modestes étaient-elles, et celles des chevilles et des pieds
n’étaient pas moins importantes que celles des autres parties du corps. L’Inde a déployé, du nord au sud, un
éventail extraordinaire de parures, objets de séduction qui s’adressaient autant aux personnes qui les portaient
2 qu’à celles qui les contemplaient. Les bijoux transformaient la femme en déesse, rehaussaient la grâce de ses
formes et de ses gestes et soulignaient, par une multitude de connotations religieuses et mythologiques, ses
rapports avec la nature. Ces ornements, investis d’un pouvoir bénéfique et protecteur, lui offraient aussi respect
et statut social.
Dans le domaine de la bijouterie, le mouvement migratoire incessant des populations au cours des siècles s’est
traduit par l’émergence d’innombrables influences et les échanges de motifs et de techniques. Les régions et les
communautés peuvent néanmoins se distinguer grâce aux lignes et aux dessins caractéristiques de leurs bijoux.
Si toutes les populations du continent indien portaient des « torques » - ces colliers qui remontent à la préhistoire
- l’on devine sur ceux de la vallée de Swat des influences grecques dues au passage des armées d’Alexandre le
Grand (356 – 323 av. notre ère). Les émaux, spécialité du Punjab sous les empereurs Moghols (1526 - 1858),
continuent à consteller de couleurs vives les parures de l’Himachal Pradesh (Terre des montagnes enneigées) et
de l’Afghanistan tandis que les verroteries remplacent les gemmes sur celles des tribus Pashtoun.
Séductions nomades : au fil des peuples et des tribus d’Asie centrale
La parure en Asie centrale est un art majeur qui raconte l’appartenance tribale et les âges de la vie. Les bijoux
traditionnels y sont de qualité exceptionnelle grâce à la préciosité des matériaux, la maîtrise des techniques et
des décorations. La magnificence de leur présence révèle aussi bien les compétences des orfèvres que leur
sensibilité artistique. On y décèle le langage des steppes, les influences orientales, l’esthétique rude des peuples
nomades et la sophistication des citadins. Tous les éléments - métal, dessin, décor, pierres - s’unissent pour
inventer un langage symbolique dont les origines remontent à d’anciennes croyances dont la mémoire s’est
souvent estompée. Épargnés par les guerres et les révolutions, ces bijoux aux formes étranges et belles
témoignent du faste et de la richesse d'une Asie centrale mythique.
Les Turkmènes, répartis de nos jours en trois groupes principaux, Tekke, Ersari et Yomud ont fait de la parure
une « cuirasse » ostentatoire et protectrice, dont la gamme et la technique des ornements variaient d’un groupe à
l’autre. Rayonnante de métal et de pierres le jour de ses noces, la femme turkmène croulait sous le poids de sa
coiffe, de ses pendentifs et bracelets en argent massif rehaussés de dorures et de cornalines - une pierre
précieuse qui passait pour protéger des saignements. Pendant un an, elle restait richement parée et arborait son
imposant diadème jusqu’à la naissance de son premier enfant. Peu à peu, elle allégeait ses ornements pour ne
les exhiber que les jours de fête, puis renonçait à toute décoration d’argent quant elle n’était plus en âge
d’enfanter. Tout comme les Turkmènes et les Kazakhs, les peuples du Caucase portaient de lourdes parures en
argent dont le travail caractéristique se reconnait à la finesse de ses motifs curvilignes et à la perfection de
l’incrustation du nielle (substance noire constituée de sulfure d'argent mêlé à du borax qui sert de liant, auxquels
on ajoute parfois du plomb et du cuivre).
FONDATION BAUR, Musée des Arts d’Extrême Orient, 8, Munier-Romilly, CH-1206 Genève – www.fondationbaur.ch
3