Identités alimentaires de la jeune diététicienne nutritionniste

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Identités alimentaires de la jeune diététicienne nutritionniste
UNIVERSITÉ TOULOUSE - JEAN JAURES
INSTITUT SUPÉRIEUR DU TOURISME, DE
L’HÔTELLERIE ET DE L’ALIMENTATION
MASTER ALIMENTATION
Parcours « Sciences Sociales Appliquées à l’Alimentation »
MÉMOIRE DE PREMIÈRE ANNÉE
Identités alimentaires de la jeune diététicienne
nutritionniste
Présenté par :
Aurélie Caumont
Année universitaire : 2015 - 2016
Sous la direction de : Anne DUPUY
UNIVERSITÉ TOULOUSE - JEAN JAURES
INSTITUT SUPÉRIEUR DU TOURISME, DE
L’HÔTELLERIE ET DE L’ALIMENTATION
MASTER ALIMENTATION
Parcours « Sciences Sociales Appliquées à l’Alimentation »
MÉMOIRE DE PREMIÈRE ANNÉE
Identités alimentaires de la jeune diététicienne
nutritionniste
Présenté par :
Aurélie Caumont
Année universitaire : 2015 - 2016
Sous la direction de : Anne DUPUY
L’ISTHIA de l’Université Toulouse Jean Jaurès n’entend donner aucune approbation, ni
improbation dans les projets tuteurés et mémoires de recherche. Les opinions qui y sont
développées doivent être considérées comme propres à leur auteur(e).
« La nourriture est beaucoup plus chargée en symboles qu’en glucides,
lipides et protides. On mange plus de symboles que de chimie »
Boris Cyrulnik (De la parole comme d'une molécule, 1991).
Remerciements
Je tiens tout d'abord à remercier mon maître de mémoire, Mme
Anne Dupuy pour son aide et ses conseils éclairés.
Je remercie également les autres professeurs qui ont pu me guider dans mes
recherches.
Je remercie également les personnes que j'ai pu interviewer, et qui m’ont
laissé un peu de leur temps.
Je remercie également mes proches pour leur soutien dans mes études et
projets.
Sommaire
REMERCIEMENTS ................................................................................................................... 8
SOMMAIRE ........................................................................................................................... 10
INTRODUCTION .................................................................................................................... 11
PARTIE 1 : CADRE THÉORIQUE .............................................................................................. 14
CHAPITRE 1 : POLITIQUE NUTRITIONNELLE EN FRANCE ..................................................................... 15
CHAPITRE 2 : LE METIER DE DIETETICIEN NUTRITIONNISTE................................................................. 22
CHAPITRE 3 : L’ALIMENTATION DU JEUNE ADULTE ........................................................................... 33
PARTIE 2 : HYPOTHÈSES ........................................................................................................ 43
CHAPITRE 1 : PROBLEMATIQUE ET CONSTRUCTION DES HYPOTHESES .................................................. 44
CHAPITRE 2 : HYPOTHESE 1 : LE COUPLAGE DES NORMES SOCIALES ET PROFESSIONNELLES TEND A UNE
RATIONALITE ALIMENTAIRE CHEZ LES JEUNES DIETETICIENNES NUTRITIONNISTES, DANS LE CONTEXTE DE LA
NUTRITIONNALISATION ................................................................................................................ 46
CHAPITRE 3 : HYPOTHESE 2 : DANS LE CONTEXTE DE MODERNITE ALIMENTAIRE ET D’UNE REDEFINITION DE
LA JEUNESSE, UN DECOUPLAGE ENTRE IDENTITE PROFESSIONNELLE ET PRATIQUES ALIMENTAIRES
QUOTIDIENNES APPARAIT ............................................................................................................ 55
PARTIE 3 : MÉTHODOLOGIE PROBATOIRE ............................................................................ 63
CHAPITRE 1 : METHODOLOGIE DE COLLECTE DE DONNEES ................................................................ 65
CHAPITRE 2 : PROTOCOLE DE RECHERCHE ...................................................................................... 71
CHAPITRE 3 : PROPOSITION D'OUTILS PROBATOIRES ........................................................................ 76
CONCLUSION ........................................................................................................................ 82
BIBLIOGRAPHIE ..................................................................................................................... 85
TABLES DES SIGNES ET ABREVIATIONS ................................................................................. 90
TABLE DES ANNEXES ............................................................................................................. 92
ANNEXE A : GUIDE D’ENTRETIEN EXPLORATOIRE N ° 1 ..................................................................... 93
ANNEXE B : GUIDE D’ENTRETIEN EXPLORATOIRE N ° 2 ..................................................................... 94
ANNEXE C : ENTRETIEN EXPLORATOIRE N ° 1 ................................................................................. 97
ANNEXE D : ENTRETIEN EXPLORATOIRE N ° 2 ............................................................................... 103
ANNEXE E : ENTRETIEN EXPLORATOIRE N ° 3................................................................................ 107
ANNEXE F : ENTRETIEN EXPLORATOIRE N ° 4 ................................................................................ 118
ANNEXE G : ENTRETIEN EXPLORATOIRE N ° 5 ............................................................................... 128
ANNEXE H : QUESTIONNAIRE QUANTITATIF « REPRESENTATION DES DIETETICIENNES »....................... 136
LISTES DES TABLEAUX ......................................................................................................... 144
TABLE DES MATIERES ......................................................................................................... 145
10
Introduction
11
L
a nutritionnalisation, caractéristique de la modernité alimentaire, est
présente quotidiennement dans la vie des Français, par les campagnes du
Plan National Nutrition Santé, ou dans les médias, par la diffusion de normes
nutritionnelles, avec en arrière-plan des préoccupations de santé publique dans une lutte
contre l’obésité et autres maladies métaboliques.
Aussi, les Français et les femmes, notamment, sont mis en présence de normes
esthétiques, et cela à travers toutes les époques, avec une évolution notable. Aujourd’hui,
les canons de beauté s’attachent à la minceur : « il nous faut être belles, bien nourries certes,
mais point trop » (Hubert, 2004). Ce « carcan » est d’autant plus pesant, car véhiculé par les
médias, où l’image de ces « belles » femmes est diffusée, et les femmes sont alors soumises
à des pressions sociale, culturelle, et morale (Hubert, 2004).
Ainsi, les diététiciennes seraient au cœur de ces préoccupations, à la fois
dispensaires de la « bonne parole nutritionnelle » mais également femmes dans une société
occidentale basée sur une image particulière de la « belle » femme.
J’ai choisi de m’attacher à ce sujet, de par ma propre expérience. Egalement
diététicienne nutritionniste, je trouvais intéressant d’étudier le rapport des étudiants à
l’alimentation, et en me focalisant davantage sur les jeunes diététiciennes nutritionnistes
récemment diplômées. J’ai privilégié les femmes plutôt que les hommes, notamment par les
motivations à exercer le métier qui diffèrent, d’ordre plus sportives pour les hommes, et
plus sociales pour les femmes. Aussi, le rapport à l’alimentation est différent entre hommes
et femmes, elles-mêmes plus perméables au discours nutritionnel.
Ma question de départ a été la suivante : la formation de diététique entraîne-t-elle
une modification des habitudes alimentaires chez ses étudiantes ? Au fil des recherches et
de mes questionnements, j’ai choisi de me resituer sur l’alimentation des diététiciennesnutritionnistes, afin d’obtenir une vision plus globale et de saisir toute la complexité du sujet,
notamment à travers la définition des politiques publiques de santé, l’identité
professionnelle, le contexte générationnel. Dès lors une problématique a pu être dégagée :
Quelles identités influencent les modèles, les représentations et les pratiques alimentaires
des jeunes diététiciennes nutritionnistes ?
12
Dans un temps, nous replacerons notre sujet par l’étude des différents concepts, au
moyen d’une revue littéraire, à savoir : les politiques nutritionnelles en France, par leur
définition et contextualisation ; le métier de diététicien nutritionniste avec les
caractéristiques des études et une sous-partie abordant les étudiantes ; et enfin
l’alimentation du jeune adulte, catégorie dans laquelle se situent les diététiciennes, avec
différents sous-thèmes : pratiques alimentaires, le « bien manger », l’identité alimentaire
des jeunes et les particularités féminines.
Dans une seconde partie, nous aborderons la construction de notre problématique,
ainsi que deux hypothèses qui peuvent en découler et leurs analyses au vu des entretiens
exploratoires effectués.
Enfin dans une dernière partie, nous proposerons une méthodologie probatoire,
après avoir défini les outils, afin de confirmer ou infirmer nos hypothèses.
13
PARTIE 1 : CADRE THÉORIQUE
14
Afin de contextualiser l’étude présente, un éclairage est nécessaire sur les thèmes
qui la composent, et cela dans le but d’aboutir à une problématique. En premier lieu, le
thème des politiques nutritionnelles en France sera développé, au travers de leur définition
et leur contextualisation dans la modernité alimentaire. Ensuite, sera fait un focus sur le
métier de diététicien-nutritionniste et les étudiants. Enfin nous verrons les éléments
caractérisant l’alimentation des jeunes, échantillon dans lequel se situent les sujets de notre
étude, et cela à travers l’alimentation, leurs pratiques alimentaires, leurs représentations et
un rapport plus spécifique des jeunes femmes à l’alimentation.
Chapitre 1 : Politique nutritionnelle en France
En France, la politique nutritionnelle s’articule autour de deux programmes, cela
depuis 2010, avec « un programme gouvernemental quinquennal relatif à la nutrition et à la
santé (Code de la santé publique article L. 3231-1) ainsi qu’un programme gouvernemental
pour l’alimentation (Code rural, article L. 230-1) »1. Ils sont définis par trois textes : le Plan
National Nutrition Santé (PNNS), le Plan Obésité (PO) et le Plan National pour l’Alimentation
(PNA).
Le premier texte est la base de cette politique, initié en 2001 et encore présent de
nos jours. Il fera l’objet d’une sous-partie afin de le développer. Le Plan Obésité s’attache à
la prévention et la prise en charge de l’obésité « afin d’enrayer la progression de la maladie
et de faire face à ses conséquences médicales et sociales »2. Ces deux textes s’unissent donc
autour de la nutrition et sont complémentaires.
Le Plan National pour l’Alimentation « vise à assurer à la population l'accès, dans des
conditions économiquement acceptables par tous, à une alimentation sûre, diversifiée, en
quantité suffisante, de bonne qualité gustative et nutritionnelle, produite dans des
conditions durables. Elle vise à offrir à chacun les conditions du choix de son alimentation
en fonction de ses souhaits, de ses contraintes et de ses besoins nutritionnels, pour son
1
Manger Bouger. Qu’est-ce que le PNNS ? [en ligne]. Disponible sur http://www.mangerbouger.fr/PNNS/Le-PNNS/Qu-estce-que-le-PNNS (consulté en novembre 2015).
2 Ministère des Affaires Sociales et de la Santé. Plan Obésité 2010 – 2013, 2011, p. 5 [en ligne]. Disponible sur http://socialsante.gouv.fr/IMG/pdf/Plan_Obesite_2010_2013.pdf (consulté en novembre 2015).
15
bien-être et sa santé »3. Dans cet exposé, nous nous intéresserons davantage au PNNS,
étant donnée sa primauté et son évolution à travers les années.
1. Un Programme National Nutrition Santé améliorant l’état de santé de la
population…
En 2001, l’Agence Nationale Française de Sécurité Sanitaire des Aliments (AFSSA),
devenue l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et
du travail (ANSES), lance le Programme National Nutrition Santé. Il a pour objectif
d’améliorer l’état de santé général de la population française, via la nutrition. Selon
l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), la santé relève d’un « état de complet de bienêtre physique, mental et social, et ne consiste pas seulement en une absence de maladie ou
d'infirmité », et cela depuis 19464. C’est dans ce cadre que la nutrition s’intègre dans le bienêtre, permettant ainsi de « sauvegarder un capital physiologique de bien-être, également
parce que la nutrition permet de contrôler son corps. Appartenant aux différents éléments
du bien-être qui désormais définissent la santé, la nutrition renvoie donc elle-aussi à la
santé. » (Romeyer, 2015, p 44). Aujourd’hui, la 3ème version du PNNS touche à sa fin, le
programme est reconduit jusqu’en 2020 avec le PNNS 4. Les objectifs du programme sont
définis par le Haut Conseil de la santé publique (HCSP), et s’articulent autour de quatre
thèmes :

« Réduire l’obésité et le surpoids dans la population ;

Augmenter l’activité physique et diminuer la sédentarité à tous les âges ;

Améliorer les pratiques alimentaires et les apports nutritionnels, notamment chez
les populations à risque ;

Réduire la prévalence des pathologies nutritionnelles. »5
3
Legifrance.gouv.com.
Code
rural
et
de
la
pêche
maritime,
[en
ligne].
Disponible
sur
https://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do?cidTexte=LEGITEXT000006071367&idArticle=LEGIARTI0000226573
88&dateTexte=&categorieLien=id (consulté en novembre 2015).
4 Préambule à la Constitution de l'Organisation mondiale de la Santé, tel qu'adopté par la Conférence internationale sur la
Santé, New York, 19-22 juin 1946; signé le 22 juillet 1946 par les représentants de 61 Etats. 1946; (Actes officiels de
l'Organisation mondiale de la Santé, n°. 2, p. 100) et entré en vigueur le 7 avril 1948.
5 Ministère des Affaires Sociales et de la santé. Manger Bouger. Le PNNS 2011 – 2015, [en ligne]. Disponible sur
http://www.mangerbouger.fr/PNNS/Le-PNNS/Le-PNNS-2011-2015 (consulté en novembre 2015).
16
Cependant, il est nécessaire d’étudier l’évolution des différents PNNS, afin de
comprendre comment a évolué en France la vision de la nutrition ainsi que l’ancrage des
PNNS au sein de la vie quotidienne des Français.
Le premier programme alarme sur la situation de l’état nutritionnel français et de
l’obésité. L’utilisation de termes forts « l’angoisse », « confusion », « gronde », « excès »,
« inquiétant » 6 , permettait d’expliquer la nécessité d’un tel programme nutritionnel en
France, de l’ancrer au sein des esprits et de « construire l’intérêt public de la question »
(Romeyer, 2015, p 48) tout en légitimant l’action publique.
Le second programme, lancé en 2006, argumente la nécessité du programme en
déterminant des moyens d’action : « enjeu majeur de santé publique », « véritable
politique », « un plan d’action », « un ciblage », « mobilisation de tous les acteurs », « faire
évoluer les comportements »7.
La rédaction du troisième programme, qui débute en 2011, a été confiée à une
agence de communication. En 2011, il n’y a plus de nécessité à persuader de l’urgence de la
situation, il constitue l’étape de professionnalisation dans une approche globale de la
nutrition.
Avec des caractéristiques linguistiques et des lignes éditoriales différentes, les trois
PNNS ont donc des visées diverses. Cependant, trois aspects ressortent chez chacun d’eux
(Romeyer, 2015, p 50 – 51) :

« Ils sont unanimes sur la nécessité de « mettre en place » […] Le PNNS 1 est « un
système de surveillance », « un réseau » ou encore « un comité », c’est-à-dire qu’il
faut se donner les moyens de mesurer précisément l’ampleur du problème. Pour le
PNNS 2, ce qui est important c’est la mise en œuvre de « formations », de
« repérage » et un « étiquetage » [afin de] repérer les critères de bonne nutrition
définis par les réglementations promues par ce texte et les labelliser comme les
« bons » repères. Le troisième PNNS entend, lui, mettre en place des « interventions
6
Ministère des Affaires Sociales et de la Santé. Manger Bouger. Le PNNS 2001-2005. Editorial de Bernard Kouchner, p. 2.
[en ligne] Disponible sur http://social-sante.gouv.fr/IMG/pdf/plan.pdf (consulté en novembre 2015).
7 Ministère des Affaires Sociales et de la Santé. Manger Bouger. Le PNNS 2006-20010. Editorial de Xavier Bertrand, p. 2. [en
ligne] Disponible sur http://social-sante.gouv.fr/IMG/pdf/PNNS_2011-2015.pdf, (consulté en novembre 2015).
17
spécifiques » pour certains publics, comme les femmes par exemple. Il met en place
une « stratégie de communication » et un « observatoire » ;

Deuxième élément transversal aux trois textes, la présence d’un risque qu’il s’agit de
réduire ;

La nécessité de « réduire » est omniprésente dans les trois programmes […] Ce qu’il
faut réduire, c’est le troisième élément transversal, le surpoids, l’obésité, l’exposition
aux risques ou la consommation de tel ou tel aliment. Et dans chaque programme,
le taux de réduction à atteindre est affiché. »
Ainsi ces textes promeuvent des comportements favorables en fonction des
différentes populations, en se précisant lors de chaque programme. On a alors une évolution
du discours et une précision dans l’action.
Cependant les PNNS ne s’attachent pas seulement à la dimension biologique pure de
la nutrition. En effet, elle prend en compte « la triple dimension biologique, symbolique et
sociale de l’acte alimentaire »8, et cela avec une approche positive, avec la promotion de
moyens d’action et non par l’interdiction, et avec un dynamisme orienté vers le plaisir, la
convivialité et la gastronomie.
Ainsi, c’est certainement dans ce dynamisme et dans cette logique de promotion
d’un mode de vie sain, en adéquation avec les valeurs que peuvent partager les Français,
que les programmes nationaux de nutrition ont pu porter leurs fruits. En effet, selon l’Etude
Nationale Nutrition Santé (ENNS) de 2006, les Français ont semble-t-il bien assimilé les
recommandations du PNNS, notamment par l’augmentation de la consommation de fruits
et légumes, la diminution de la consommation de sel, et l’augmentation de l’activité
physique. Cependant des disparités sont constatées selon les groupes de population, et c’est
dans ce cadre que le rapport du Pr Serge Hercberg de 2012 intervient en proposant des
mesures « pour réduire le caractère abrupt du gradient social de la santé, les actions doivent
être universelles, mais se caractériser par une échelle et une intensité proportionnelles au
désavantage social ».9
8
Ministère des Affaires Sociales et de la Santé. Manger Bouger. Le PNNS 2001-2005, p. 9. [en ligne] Disponible sur
http://social-sante.gouv.fr/IMG/pdf/1n1.pdf (consulté en novembre 2015).
9 Rapport – Propositions pour un nouvel élan de la politique nutritionnelle française de santé publique dans le cadre de la
Stratégie Nationale de Santé, Pr Serge Hercberg, p 128, 2013 [en ligne]. Disponible sur
http://www.ladocumentationfrancaise.fr/var/storage/rapports-publics/144000068.pdf (consulté en novembre 2015).
18
Actuellement, le PNNS est donc un « continuum de trois textes », selon Romeyer, qui
reflète avant tout leurs évolution et pérennisation, notamment dans leurs discours mais
aussi dans leurs similitudes. Pourtant, il est nécessaire de transposer les différents PNNS au
sein de la situation alimentaire actuelle dans les pays occidentaux, à savoir la modernité
alimentaire, sujet qui sera abordé dans la partie suivante.
2. … Et médicalisant la vie quotidienne ?
La modernité alimentaire se réfère à l’état actuel de l’alimentation. L’évolution des
pratiques et normes des individus a impacté notamment l’espace social alimentaire (Poulain,
1997), définit par six éléments :

Le mangeable, à savoir ce que les individus définissent comme aliments ;

Le système alimentaire, qui regroupe la production, transformation et distribution
de l’alimentation ;

Le culinaire, qui reprend les opérations techniques et symboliques contribuant à
l’appropriation d’un aliment ;

Les modèles de consommation, regroupant les manières de table, position et formes
des repas ;

La temporalité alimentaire, avec notamment les cycles de consommation ;

La différenciation sociale, dans laquelle l’alimentation marque les différences
sociales, ethnoculturelles, genrées.
La modernité alimentaire s’articule autour de divers thèmes, tendant à modifier les
liens sociaux (Poulain, 2013). On retrouve la patrimonialisation, la politisation, la
judiciarisation, le bien-être animal, l’environnementalisation et la médicalisation.
Dans notre contexte étudié, à savoir celui des politiques nutritionnelles françaises,
nous nous intéressons principalement à la médicalisation. Elle désigne « le processus par
lequel cet acte de la vie quotidienne – l’alimentation – est défini, décrit, et pensé en termes
médicaux » (Burnier, Dubois, 2012). Cette notion de médicalisation est employée dans
divers domaines de la vie quotidienne. La médicalisation de l’alimentation peut être
catégorisée en deux fonctions : la première faisant partie de la prise en charge du régime
alimentaire dans le cadre d’une pathologie et la seconde dans le cadre de la prévention,
19
correspondant à la « diffusion des connaissances nutritionnelles dans le corps social à
travers différents vecteurs » (Poulain, 2013).
Les différentes politiques nutritionnelles en France rentrent dans ce cadre-là, avec
une fonction que l’on pourrait qualifier de normalisatrice (Foucault, 1976, in Poulain 2012).
En effet, les PNNS imposent dans leurs différentes campagnes des normes de
consommation et de pratique à adopter : 5 fruits et légumes par jour, 30 minutes d’activité
physique par jour et cela à travers différents moyens : campagnes télévisées, publicités dans
des magazines, livrets d’éducation nutritionnelle adaptés à chaque population et besoin…
Ainsi la diffusion de ces normes, ces règles nutritionnelles, tend à évoquer un terme différent
de la médicalisation, celui de la nutritionnalisation (Poulain, 2013). La nutritionnalisation
serait d’autant plus facilitée par la pression d’un modèle esthétique mince (Poulain, 2013),
avec la préservation du corps dans le « désenchantement du monde » de Weber. La
médicalisation tend alors également à modifier les rationalités, où de nouvelles formes
s’imposent aux anciennes. La vulgarisation des informations ainsi apportées au profane,
permet une diffusion facilitée et massive, comme explicité dans la partie précédente.
Cette vulgarisation, peut aussi permettre de parler « démédicalisation », selon
Hélène Romeyer, étant donné les supports différents diffusés aux professionnels et ceux
destinés au grand public. En effet, pour ces derniers, le langage adopté est dénué de termes
médicaux, ou de référence à des pathologies, laissant transparaître un discours peu
anxiogène. A travers ces documents, une particularité française se laisse entrevoir, à savoir
le lien entre l’alimentation et le plaisir. Les politiques nutritionnelles mettent davantage en
avant le bien-être, avec la mise en avant des pratiques culinaires par la diffusion de recettes
ou encore l’outil « La Fabrique à menu »10, que la lutte contre les pathologies métaboliques.
Démédicaliser permet d’articuler les connaissances de la nutrition autour des dimensions
socioculturelles de l’alimentation (Basdevant, 2011).
Pour autant, il ne faut pas dénigrer l’aspect de politisation que les PNNS soustendent. En effet ces programmes sont rédigés par des « experts » de la nutrition dans le
cadre de problème de santé publique et des dernières crises sanitaires. La présence de l’Etat
10
Manger, Bouger. La Fabrique à menu. [en ligne]. Disponible sur http://www.mangerbouger.fr/Manger-Mieux/Vosoutils/Fabrique-a-menus (consulté en novembre 2015).
20
dans la nutrition permet donc de légitimer l’importance de ce domaine et aussi de se
protéger lors de véritable crise.
Les politiques nutritionnelles en France sont donc diffusées, principalement, au
grand public par des vecteurs médiatiques, et les véritables experts de la nutrition sont
rarement présents, alors que l’action publique en faveur de ce domaine tend à se séparer
du domaine de l’alimentation. Dès lors il est intéressant de se pencher sur les premiers
dispensaires du discours du PNNS, les diététiciens nutritionnistes. Quelle est leur véritable
place dans une société qui se nutritionnalise ? Suivent-ils les mêmes évolutions que leur
domaine de prédilection, sans cesse en mutation scientifique et sociale ? Ces questions
seront abordées dans la partie suivante de notre cadrage théorique.
21
Chapitre 2 : Le métier de diététicien nutritionniste
Au vue de l’omniprésence de la promotion d’une alimentation saine que ce soit à
travers des politiques de santé publique ou bien les autres médias, il serait judicieux de
penser que le métier de diététicien-nutritionniste est une profession reconnue et fortement
répandue. C’est dans ce cadre que nous allons nous intéresser à ce métier dans cette partie
afin de pouvoir faire un état des lieux de la profession et exposer les difficultés qu’il peut
rencontrer et également nous focaliser sur les étudiants de cette filière.
1. Le métier et les études…
Afin d’appréhender au mieux les aspects du métier, une approche basée sur le cadre
réglementaire du métier ainsi que sur son évolution sera nécessaire.
1.1.
Cadre réglementaire et champs d’action
La profession de diététicien est réglementée depuis 1952, et s’est développée
notamment grâce au Professeur Jean Trémolières, considéré comme l’un des pères de la
nutrition moderne en France. Le métier est reconnu comme une profession paramédicale
depuis l’arrêté ministériel du 25 septembre 1995 et a été redéfini récemment comme
« toute personne qui, habituellement, dispense des conseils nutritionnels et, sur
prescription médicale, participe à l'éducation et à la rééducation nutritionnelle des patients
atteints de troubles du métabolisme ou de l'alimentation, par l'établissement d'un bilan
diététique personnalisé et une éducation diététique adaptée. Les diététiciens contribuent à
la définition, à l'évaluation et au contrôle de la qualité de l'alimentation servie en collectivité,
ainsi qu'aux activités de prévention en santé publique relevant du champ de la nutrition. »11
Communément, on parle de diététicien, pour autant l’emploi d’un qualificatif est possible,
d’où l’emploi régulier dans cet exposé du terme « diététicien-nutritionniste ».
Le métier s’exerce dans divers champs d’activité. Le domaine principal d’action
regroupe les établissements de soin. En effet il regroupe environ 70 à 76 % des diététiciens
11
Legifrance.gouv.com. Loi relative à l'organisation de certaines professions de santé [en ligne]. Disponible sur
https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000000822417&categorieLien=id
(consulté
en
novembre 2015).
22
en activité12. Dans ce cas, les diététiciens sont le garant d’une alimentation équilibrée et en
adéquation avec les besoins des patients, car ils font le lien entre la restauration collective
et les services médicalisés. Ils participent également au diagnostic diététique, à un rôle
d’éducateurs dans la gestion de nouveaux régimes alimentaires adaptés aux pathologies des
patients et également de prévention. Pour autant, ce secteur peine à recruter davantage
étant donné les restrictions économiques qu’il connaît. De plus, il est confronté à des
difficultés de reconnaissance, notamment par l’absence de service de nutrition dans
certaines structures, par une assimilation du métier de diététicien à celui de cuisinier ou de
responsable de cuisine, omettant l’aspect des soins, ou encore par une scission des
responsabilités floue avec certains soignants13, qui pour certains prennent possession des
missions des diététiciens. Ainsi s’est ainsi créé un « « cercle vicieux » : ayant peu de
débouchés professionnels dans le système de soin, les diététiciens ont dû trouver d’autres
débouchés, l’existence de ces débouchés étant utilisée maintenant pour continuer à bloquer
leur meilleure insertion dans le système de soins »14.
Ensuite, les diététiciens peuvent exercer dans le secteur du libéral, avec 13 % de
diététiciens actifs. Ils reçoivent principalement des patients qui viennent spontanément ou
dans de rares cas sur prescription médicale. Ils peuvent s’occuper de rééquilibrer leurs
alimentations ou assurer des suivis diététiques personnalisés notamment face à des
pathologies particulières. Le diététicien peut également devenir formateur ou intervenant
dans des entreprises ou collectivités. Le secteur libéral connaît aussi des difficultés, certains
professionnels cumulent d’autres activités 15 , étant données les charges financières
importantes.
Le troisième secteur dans lequel le diététicien intervient est celui de la restauration
collective. Il veille au respect des recommandations nutritionnelles par la création de menus
équilibrés et adaptés aux besoins des convives et à la sécurité alimentaire.
12
Professeur Michel Krempf – AFDN. Rapport sur l’évolution du métier de diététicien [en ligne]. Disponible sur
www.afdn.org/fileadmin/pdf/rapport_krempf.pdf (consulté en décembre 2015).
13 Professeur Michel Krempf – AFDN. Rapport sur l’évolution du métier de diététicien [en ligne]. Disponible sur
www.afdn.org/fileadmin/pdf/rapport_krempf.pdf (consulté en décembre 2015).
14 Professeur Michel Krempf – AFDN. Rapport sur l’évolution du métier de diététicien [en ligne]. Disponible sur
www.afdn.org/fileadmin/pdf/rapport_krempf.pdf (consulté en décembre 2015).
15 Pôle Emploi. Fiche métier Diététicien(ne) [en ligne]. Disponible sur http://www.pole-emploi.fr/actualites/dieteticien-ne-@/article.jspz?id=61874 (consulté en janvier 2016).
23
Plus rare, il est possible de rencontrer des diététiciens dans des structures de santé
publique, où ils jouent un rôle de prévention en matière de nutrition et de promotion de la
santé. On retrouve les diététiciens dans d’autres domaines, de façon beaucoup plus
singulière, à savoir dans les industries alimentaires et pharmaco-diététiques dans
l’élaboration de produits ou des call centers, ou encore dans des structures de recherche.
Ainsi de nouveaux secteurs d’activité pour la profession se développent. En 2013, un
rapport sur les professions de santé de la Direction de la recherche, des études, de
l’évaluation et des statistiques (DREES), fait un état des lieux notamment des secteurs
d’activités des diététiciens-nutritionnistes. Pour un pourcentage, presque similaire, entre les
diététiciens de moins de 25 ans et ceux âgés entre 50 à 54 ans, les secteurs d’activité
diffèrent : le secteur sanitaire est largement plus représenté chez les plus jeunes, tout
comme le secteur de la communication, marketing et médias tandis que chez les diététiciens
plus âgés, les secteurs prépondérant sont l’enseignement, la recherche, l’administration, le
contrôle. Dans le domaine du soin, tout secteur confondu on note 10 % d’écart d’activités
au profit des plus âgés. La précarité de la situation des jeunes diététiciens est remarquable
par le fort taux d’embauche en intérim. Actuellement, le secteur qui se développe le plus en
France est celui des centres d’amaigrissements. Le leader en France, Natur House, a gagné
25 % en croissance lors de l’année de 2014 et comptabilise aujourd’hui 538 centres, 78 de
plus qu’en 2014 et est le premier employeur de diététicien16. Il est en concurrence directe
avec le secteur du libéral.
Après avoir exposé dans cette partie un contexte général sur le métier, il est
nécessaire d’aborder le(s) parcours à emprunter afin de mieux cerner les particularités de
ce métier.
1.2.
Les diplômes qualifiants
L’exercice de la profession est autorisé par l’obtention de deux diplômes : le Brevet
de Technicien Supérieur (BTS) Diététique créé en 1949 et Diplôme Universitaire de
Technologie (DUT) de Génie Biologique option Diététique plus récent.
16
Natur House [en ligne]. Disponible sur http://www.naturhouse.fr/ (consulté en février 2016).
24
Le BTS Diététique regroupe différentes disciplines : biochimie, physiologie, bases
physiopathologiques, nutrition, connaissance de l’aliment, régime, techniques culinaires,
gestion et droit. Cet examen est préparé dans des établissements publics, privés sous
contrat et privés. L’examen est national. En 2000, 2522 candidats se sont présentés et 953
ont été admis, soit 37,79 % de succès. C’est un des BTS avec le plus faible taux de réussite.
Pour le second examen, le DUT, la première année est commune aux autres DUT de
Génie Biologique. Les matières enseignées y sont très générales, on retrouve des
mathématiques, de la physique, de la chimie et de la physiologie notamment. C’est en
seconde année où les enseignements sont spécialisés suivant l’option : sciences de
l’alimentation, la physiopathologie, les régimes thérapeutiques et également la gestion
qualité et la communication. Les étudiants menant à terme leurs études obtiennent en
grande majorité le diplôme, avec 90 % de réussite.
Ces formations sont donc très denses sur deux ans, compte tenu des connaissances
à acquérir, disparates entre elles, et incomplètes, par l’absence d’enseignement véritable
de psychologie et sociologie, ou encore de pratique, sur les méthodes pour mener à bien
une consultation ou une intervention de type formation.
Les études de diététique ont une seconde singularité, à savoir la durée des études
qui est moindre que dans les autres pays européens, pour la même profession, comme le
résume l’AFDN :
Tableau 1 : Tableau comparatif des années d’étude du métier de diététicien, selon les pays européens
Pays
Irlande
Hollande
Autriche
Allemagne
Belgique
Danemark
Suède
Royaume-Uni
Grèce
Espagne
Italie
France
Nombre d’heures d’enseignements et de stage
7 200
6 720
6 600
5 244
5 148
4 958
4 800
4 350
3 840
3 600
3 567
2 400
Années
4,5
4
3
3
3
3
3
4
4
3
3
2
Source : AFDN
25
Les programmes sont différents dans chacun des pays. Cependant, la plupart des
pays fonctionne sur le même principe de bachelor, après trois ans d’études les élèves
obtiennent le Bachelor of Sciences (BcS), ce qui offre une reconnaissance des capacités, et
les études sont susceptibles d’être poursuivies jusqu’à un doctorat. Dans ce tableau, seuls
la France, le Danemark et l’Allemagne ne sont pas diplômants pour le BcS.
C’est pourquoi, depuis plusieurs années, en France, un projet d’une formation
universitaire unique est réfléchi, afin de créer un Diplôme d’état homogénéisant les
connaissances, équivalent au grade de la licence. Cette formation aura pour but
« d’harmoniser les cursus paramédicaux, les pratiques diététiques, d’aligner la formation au
niveau européen, […] d’améliorer la coopération interprofessionnelle et d’affirmer et
légitimer la place du diététicien dans la santé, l’alimentation et la nutrition. »17 Ce cursus en
bac + 3 aura la possibilité d’être prolongé à un niveau de master voire de doctorat. Pour
autant, la mise en place de ce nouveau cursus est compliquée par le changement de
qualification qui sera engendré. En effet, le passage à un niveau de licence crée à la fois un
diplôme semblable au statut de cadre et donc au-dessus du niveau exigé actuellement pour
le recrutement de diététiciens.
En attendant la modification de la formation, l’Association Française des Diététiciens
Nutritionnistes (ADFN) a pris les devants en rédigeant la charte du diététicien, établie sur
quatre points :

« Respect des principes d’objectivité, d’équité, d’intégrité et de transparence ;

Promotion de la santé et du bien-être des personnes par une alimentation adaptée,
en proposant à tous les individus les possibilités d’optimiser pleinement leur
« potentiel » santé ;

Promotion et développement professionnel ;

Reconnaissance des compétences des autres professions travaillant au bénéfice de
la santé des personnes et engagement à réaliser son exercice professionnel en
collaboration pluridisciplinaire. » 18
17
AFDN. Vivre et faire vivre la profession de Diététicien – Nutritionniste [en ligne]. Disponible sur
http://www.afdn.org/fileadmin/pdf/ppt-vivre-et-faire-vivre-la-profession.pdf (consulté en mars 2016).
18
AFDN. Charte de déontologie du diététicien – nutritionniste [en ligne]. Disponible sur
http://www.afdn.org/fileadmin/pdf/charte-deontologie.pdf (consulté en mars 2016).
26
Cette charte permet de montrer l’unité des diététiciens afin de pouvoir être reconnue et
faire avancer les pourparlers sur le remaniement de la formation.
Et c’est dans ce contexte, où le métier est en évolution dans ses secteurs d’activité
et où la formation est récente et en ballotage, que des jeunes se lancent dans les études de
diététicien. C’est ce qui nous amène à la partie suivante abordant les étudiants, leurs
motivations, et les aspects identitaires que la formation de diététicien pourrait faire évoluer
chez ses étudiants.
2. … et les étudiants
Les étudiants en formation pour devenir des diététiciens nutritionnistes sont en
majorité des femmes, représentant près de 95 % des 8 525 professionnels recensés en 2013,
comme indiqué dans le rapport de la DREES. Afin de pouvoir saisir les enjeux qui s’articulent
autour de ces études nous développerons les causes qui motivent le choix de cette
formation et le contexte identitaire qui en découle, en nous attardant principalement sur
les femmes.
2.1.
Motivations à exercer…
2.1.1. Contexte actuel de la modernité alimentaire
Le choix de la formation de diététicien, qui fait partie des professions paramédicales
et de rééducation, repose de manière prépondérante sur des motivations intrinsèques au
métier : conseiller les patients, travailler dans le domaine du soin, participer à la rééducation
alimentaire, travailler dans le domaine de l’alimentation avec l’alliance de la cuisine,…
Pour autant, la modernité alimentaire, et plus particulièrement, la médicalisation et
la nutritionnalisation de la société crée un véritable effet d’aubaine pour les étudiants. La
majorité des étudiants proviennent en effet de filière scientifique, avec des baccalauréats
Scientifique (S) ou Sciences et Technologies de la Santé et du Social (ST2S). On retrouve bon
nombre d’étudiants, 13 %19, pour qui la filière de la diététique est un second choix, après
une première année ou un premier cursus échoué ou déprécié, notamment après une
19
DigiSchoolOrientation.com. BTS Diététique [en ligne], Disponible sur http://www.orientation.com/diplomes/btsdietetique.html (consulté en mars 2016).
27
première année commune aux études de santé (PACES). Egalement, de nombreuses
reconversions sont recensées chez les étudiants de diététiques, 27 %, dont les critères de la
modernité alimentaire, participe aux motivations extrinsèques à choisir cette profession. Les
étudiants en diététique retiennent alors davantage la pensée d’Hippocrate, « que ton
alimentation soit ta première médecine », véhiculé à travers les politiques nutritionnelles ou
tous les médias disponibles : télévision, magazine de santé, réseaux sociaux et se dirigent
vers cette formation.
C’est ainsi que se crée un engouement pour le métier de diététicien, avec pourtant
une redéfinition des perspectives de carrières, comme nous allons le développer.
2.1.2. Légitimité
Le BTS Diététique, ainsi que le DUT Génie Biologique option Diététique, sont des
filières sélectives, avec, notamment, un taux de pression de 4 pour l’académie de Toulouse,
de 1,62 pour l’académie de Marseille, ou encore 3,5 pour l’académie de Clermont – Ferrand,
pour les BTS, faisant partie des taux de pression les plus élevés dans ces académies.
La profession, qui est saturée, comme vu précédemment, connaît pour autant une
augmentation du nombre de formations dispensées et la poursuite d'études est de plus en
plus souhaitée et souhaitable pour les étudiants afin d’obtenir plus de compétences et se
démarquer des autres diplômés. Ainsi la formation est en évolution à la fois dans les
techniques et des sciences, comme vu précédemment avec la resectoriarisation des activités
mais également par des conditions sociales et économiques, comme la précarité de la
profession ou la montée des politiques de santé publique (Gagnon, Guay, 1988). Les
formations envisagées sont de l’ordre de formations de courte durée de type licence
professionnelle, certificats, ou diplôme universitaire, à la filière universitaire (licence,
maîtrise,…) ou encore préparant à l'entrée dans des grandes écoles (écoles d'ingénieurs,…),
et sont spécialisées davantage en nutrition et diététique ou dans le domaine de
l'enseignement, de la qualité, de l’agro-alimentaire, de la restauration collective, des
pathologies ou populations particulières, ou encore en sciences sociales.
A travers la poursuite des études, les diplômés recherchent principalement plus de
légitimité, que l’on peut définir « comme un processus culturel par lequel une autorité ou
un pouvoir est reconnu et accepté par un groupe social déterminé » et cela dans « le milieu
28
de travail qui reconnaît l’autorité cognitive et le pouvoir professionnel et un milieu social
plus large » (Gagnon, Guay, 1988, op. cit.). Cette nécessité d’être plus qualifié montre les
faiblesses de la formation initiale.
Cette volonté de poursuite des études afin d’obtenir plus de légitimité et de
responsabilités participe à la construction d’une identité particulière des jeunes diplômés,
qui sera davantage développée dans la partie suivante.
2.2.
… Et identité professionnelle
La socialisation est un « processus par lesquels l’individu devient membre d’un
groupe social. Il intègre les valeurs, les normes et attitudes de ce groupe. Ces valeurs,
normes, ne sont pas statiques et participent à la construction des identités »20. On distingue
la socialisation primaire qui « correspond à la période de l’enfance. Ce processus s’effectue
d’abord dans la famille qui en constitue l’instance principale ; son action est essentielle pour
la structuration de l’identité sociale » (Castra, 2013) et la socialisation secondaire qui « se
fonde sur les acquis de la socialisation primaire, les prolonge et éventuellement les
transforme. Elle permet aux adultes de s’intégrer à des groupes spécifiques (travail,
association, parti politique…) » (Castra, 2013, op. cit.).
Dans le cadre de notre étude, nous allons principalement nous intéresser à la
socialisation secondaire, plus précisément la socialisation professionnelle et l’identité de
l’individu. L’identité est un « processus par lequel s’exprime ce que l’on « est ». Il s’agit d’un
construit social au moins autant qu’un déterminisme »21. La construction de l’identité prend
alors en compte trois concepts : l’un individuel, attrait à la personne, l’un social et l’autre
culturel attrait au collectif. L’identité professionnelle est permise, selon Carr-Saunders et
Wilson par, « la mise en place d’une formation spécifique fondée sur un « corps
systématique de théorie » » (Dubar, 2000, p 132). La socialisation secondaire est
« l’incorporation de savoirs spécialisés, que nous appellerons savoirs professionnels, qui
constituent des savoirs d’un genre nouveau. Ce sont des machineries conceptuelles
comprenant un vocabulaire, des recettes, un programme formalisé et un véritable « univers
20
Tibère Laurence. Socio – Anthropologie de l’Alimentation. M1 Sciences Sociales Appliquées à l’Alimentation, ISTHIA,
2015.
21 Tibère Laurence. Socio – Anthropologie de l’Alimentation. M1 Sciences Sociales Appliquées à l’Alimentation, ISTHIA,
2015.
29
symbolique » » (Dubar, 2000, p 99, op. cit.). Ainsi la place des études est prépondérante
dans l’évolution de l’identité professionnelle de l’individu, elle-même faisant partie d’une
dynamique de légitimation (Dubar, 2000, p 134, op. cit.).
La socialisation professionnelle est composée, selon Hughes dans un article sur la
« fabrication d’un médecin », par trois mécanismes que l’on peut transposer tout aussi bien
pour les diététiciennes-nutritionnistes (Dubar, 2000, p 139 – 142, op.cit.).
Le premier étant « l’immersion dans la culture professionnelle qui apparaît
brutalement comme l’ « « inverse » de la culture profane », qui est une étape qui peut se
dérouler notamment, lors du commencement des études, ou lorsque des règles diététiques
apprises se retrouvent en opposition avec des normes ou pratiques de l’individu. Pour
autant, cette ambiguïté entre « l’identification progressive et le rôle » peut se dissiper par
un « renoncement aux stéréotypes professionnels concernant la nature des tâches, la
conception du rôle, l’anticipation des carrières et l’image de soi » (Dubar, 2000, p 139, op.
cit.). Le second mécanisme implique « l’installation de la dualité entre le modèle idéal qui
caractérise la dignité de la profession et le modèle pratique qui concerne les tâches
quotidiennes et les durs travaux ». Ici, l’idéalisation du métier peut en être l’exemple. Le
dernier mécanisme caractérise la phase de « conversion ultime, par abandon et refoulement
des stéréotypes, et de dualité entre le « modèle idéal » et « normes pratiques ». Il concerne
l’ajustement de la conception de soi, c’est-à-dire de son identité en voie de constitution
impliquant « la prise de conscience de ses capacités physiques, mentales et personnelles,
de ses goûts et dégoûts » ». Ici, l’individu fait le lien entre son identité primaire et son
identité professionnelle, dite spécialisée.
Pour Goffman, l’une des clés de la conception de l’identité réside en la qualité d’une
personne en fonction de sa capacité à respecter les règles de l’interaction. Ces règles
d’interaction sont notamment retrouvées dans différents cadres, « partagés par toutes les
personnes en présence, orientant leurs perceptions de la situation ainsi que les
comportements qu'elles adoptent par rapport à elle » (Nizet, Rigaux, 2014). Goffman
distingue alors les cadres primaires, ne renvoyant à aucun autre, des cadres transformés
leurs ressemblant avec une signification différente. Les cadres primaires peuvent être
d’ordre naturel, résultant de l’action des forces, des lois de la nature ou d’ordre social
résultant d’intentions, des actions humaines. Les cadres transformés résultent de deux
30
processus différents : la modalisation où « les participants savent et reconnaissent qu’une
altération systématique a lieu » (Goffman, 1991, p 54) et la fabrication qui résultant « des
efforts délibérés, individuels ou collectifs, destinés à désorienter l'activité d'un individu ou
d'un ensemble d'individus et qui vont jusqu'à fausser leurs convictions sur le cours des
choses » (Goffman, 1991, p 93, op. cit.). Cependant, cette situation crée des dissonances,
entre les individus non au fait de la situation et ceux qui le sont. Pour autant il y a des
situations « bénignes » et d’autres « abusives ». Si l’on transpose la consultation diététique,
on se retrouve dans une situation bénigne où le patient n’a pas de préjudices mais dont le
cadre de l’interaction est le résultat un processus de fabrication. La consultation diététique
nécessite également le respect de règles, « acte formel et conventionnalisé par lequel un
individu manifeste son respect et sa considération envers un objet de valeur absolue, à cet
objet ou à son représentant » (Nizet, Rigaux, 2014, op. cit.). Le diététicien marque une forme
de respect envers son patient, notamment dans la critique de son alimentation, dans le but
de son bien-être mais également l’inverse où le patient s’attache à respecter le
professionnel en face de lui, ceci dans le but de « préserver sa face », « valeur sociale
positive qu’une personne revendique à travers la ligne d’action que les autres supposent
qu’elle a adoptée au cours d’un contact particulier » (Goffman in Nizet, Rigaux, 2014 op.
cit.), ici être diététicien.
Ainsi, ces concepts et mouvements étudiés, jouent sur l’identité de la diététicienne
nutritionniste dont sa représentation se construit en partie autour de son alimentation et
son modèle alimentaire. Celui-ci est un ensemble de connaissances issu et transmis par les
générations précédentes afin de sélectionner les ressources, les préparer, et les
consommer. C’est aussi un système symbolique qui reflète les valeurs des groupes sociaux
et qui contribue à la construction des identités. Le modèle alimentaire peut évoluer en
fonction de différentes causes : politiques, économiques, culturelles et symboliques,
environnementales, techniques et scientifiques et biologiques (Poulain). L’enjeu de notre
étude étant de cerner lesquels de ces facteurs peuvent rentrer en jeu.
31
Afin de pouvoir davantage contextualiser notre étude et répondre à la
problématique qui se pose dans notre contexte, développée ultérieurement, il est
nécessaire d’étudier l’alimentation des étudiants et jeunes adultes indépendants, groupe
dans lequel l’échantillon de notre étude se situe.
32
Chapitre 3 : L’alimentation du jeune adulte
La jeunesse est considérée comme le passage de l’adolescence à l’âge adulte. Pour
autant, il est difficile de normer cette période. Erik Erikson scinde la jeunesse sur deux
catégories dans sa théorie du développement psychosocial, sur les huit étapes qu’elle
comprend. La jeunesse « peut être définie sociologiquement comme la phase de
préparation à l'exercice de ces rôles adultes, ce que les sociologues appellent la
socialisation. » (Galland, 1991, p 129). Généralement, on considère la jeunesse comme
« l’entrée dans la vie adulte », caractérisé par trois étapes : le début de la vie professionnelle,
le départ de la famille d'origine, et être parent.
Pour autant, Olivier Galland conçoit que devenir adulte est aujourd’hui plus difficile
à définir qu’autrefois, dans un entretien d’Anne Rapin22:
« Quand devient-on vraiment adulte, aujourd’hui, dans la société française ? L’étape
majeure est devenue celle d’avoir un enfant. Les autres phases, qui marquaient
auparavant le passage à l’âge adulte, sont devenues plus floues et progressives, qu’il
s’agisse de l’accès au travail, […] ou du départ de chez ses parents. […] Tous ces seuils,
très nets autrefois […] sont aujourd’hui plus incertains. Tandis qu’avoir un enfant
reste un tournant décisif, puisque l’individu est alors confronté à des responsabilités
irréversibles qui changent profondément son statut. [...] Ainsi, entre la fin de
l’adolescence, la fin des études et le premier enfant, s’intercale une nouvelle période
de plusieurs années, variable selon les parcours évidemment. Auparavant, il y avait
une simultanéité de toutes les étapes introduisant le jeune au statut d’adulte, qui
rendait les frontières et les définitions des âges beaucoup plus claires »
En effet, un rapport de l’Institut national de prévention et d'éducation pour la santé
(INPES) définit comme période d’âge des 12 – 30 ans comme une période qui « constitue
une transition entre l’alimentation de l’enfance et celle des adultes », traduisant ainsi la
difficulté de la définition de la jeunesse.
22
Ministère des Affaires étrangères et du Développement international [en ligne] Disponible
http://www.diplomatie.gouv.fr/fr/france_829/label-france_5343/les-numeros-label-france_5570/lf51-lesjeunes_10104/france-nouvelle-generation_10107/devenir-adulte-est-plus-complique-pour-les-jeunes-aujourdhui_20116.html (consulté en mars 2016).
sur
33
Dans le domaine de l’alimentation, ces étapes du passage à la vie d’adulte sont
repérables (Garabuau-Moussaoui, 2002, p 32) :

« Le départ du foyer parental, moment d'inversion en termes d'alimentation ;

L'entrée dans la vie professionnelle, où le rapport à l'alimentation se « normalise » ;

La mise en couple, où la nourriture est un marqueur de la construction du couple ;

La naissance du premier enfant qui une fois en âge de participer aux repas des
parents, marque la naissance de la famille et du même coup, le passage de ses
parents à l'âge adulte. »
Dans notre cas, nous nous préoccuperons principalement des trois premières
étapes, étapes que vivent principalement l’échantillon de l’étude.
Dans cette partie, nous établirons une vue d’ensemble sur l’alimentation des jeunes,
ensuite nous aborderons, la représentation du « bien manger », puis les enjeux de
l’alimentation avec son aspect identitaire et social et enfin dans une dernière partie, les
particularités que l’on retrouve dans l’alimentation des jeunes femmes. Ces différents points
nous serons d’autant plus précieux, car ils seront repris dans notre enquête probatoire.
1. Les pratiques alimentaires
Dans cette partie nous aborderons les principales caractéristiques de l’alimentation
chez les jeunes, grâce au rapport de Laurence Tibère et Jean-Pierre Poulain sur
l’alimentation des étudiants, aux résultats de l'enquête CCAF du CREDOC 2007, publiés en
2012 dans l'ouvrage Comportements et consommations alimentaires en France de Pascale
Hébel.
Chez les jeunes, le nombre de repas est autour de 3 par jour, ceci entrant « dans la
norme valorisée par le PNNS de structuration des prises en 3 repas principaux, dont le petit
déjeuner, avec éventuellement un goûter » (Tibère, Poulain, 2010). Le repas qui a tendance
à ne pas être consommé chez les jeunes est le petit-déjeuner, notamment chez les 15 – 24
ans et cela par manque de temps notamment.
Les produits laitiers sont dans la grande majorité des cas évoqués lors de la définition
d’un repas et font ainsi parti de la norme d’un repas. Pour autant, selon le rapport de
Laurence Tibère et Jean-Pierre Poulain, 35 % des étudiants n’en consomment pas. 16 % des
34
étudiants sont en conformité avec le PNNS et consomment trois produits laitiers par jour, et
surtout les 22 – 26 ans. Néanmoins, les jeunes sont davantage en conformité avec la
catégorie des plus âgés, selon le rapport de l’INPES.
Les fruits et légumes font partie du « bien manger » selon les étudiants la plupart
s’accorde sur le fait « qu’il faudrait consommer davantage ». L’enquête de Laurence Tibère
et Jean-Pierre Poulain rapporte qu’environ « 58% des repas de la veille comprennent des
fruits et légumes ». La consommation de fruits et de légumes est valorisée mais pour autant,
cette catégorie alimentaire se heurte à des incompréhensions sur les recommandations du
PNNS, notamment avec le message « 5 fruits et légumes par jour », qui est imprécis selon
les étudiants. En effet, dans la génération des jeunes, selon l’INPES, seulement 6 % déclarent
ainsi en avoir mangé au moins cinq fois la veille.
Concernant la viande, les situations varient énormément : 43 % des étudiants n’en
consomment pas, 44% en mangent une seule fois par jour et 13% deux fois, selon le rapport
de Laurence Tibère et Jean-Pierre Poulain. Ces différences de consommation s’expliquent
dans un temps par des raisons budgétaires, mais sont également d’ordre culturel et éthique
avec l’aspect religieux ou dans le respect du bien-être animal. Le poisson est
majoritairement absent dans les repas des étudiants, cela s’expliquant par son coût, des
difficultés à le cuisiner, voire même à le choisir, selon les deux études.
Les étudiants, sont 53% à considérer qu’ils mangent trop souvent des féculents,
selon l’étude de Laurence Tibère et Jean-Pierre Poulain. Cependant, selon l’INPES, les jeunes
sont le groupe de population qui en consomme le moins, notamment les 19 – 30 ans, mais
en étant tout de même dans les recommandations du PNNS. Le pain, fait partie du modèle
alimentaire français et est consommé par une grande majorité des étudiants. Il est
« explicitement signalé par les enquêtés au moment du petit-déjeuner et au goûter ». Pour
autant, le pain est moins cité lors du déjeuner et dîner, considéré comme « allant de soi »,
alors qu’il fait partie du repas (Tibère, Poulain, 2010, op. cit.).
La consommation de boissons sucrées est plus fréquente chez les jeunes que chez
les adultes : 39 % des 12-30 ans en ont bu au moins une fois la veille, et en plus grande
quantité chez les 19 – 25 ans, selon l’INPES.
35
Le rapport de l’INPES relève que les lieux des repas sont différents chez les jeunes.
La prise du repas au domicile reste fréquente, mais « diminue légèrement au profit de repas
pris chez des amis, au restaurant ou au fast-food ». Les jeunes sont dans ce sens, les garants
du modèle français et ainsi rentre dans le cadre d’une sociabilité alimentaire avec la
commensalité.
Cependant, ces résultats sont à nuancer étant donné, l’intervalle des âges de l’étude
de l’INPES et également les contraintes auxquelles doivent faire face les jeunes : période
d’étude, dépendance financière, temps de préparation… Comme explicité, précédemment,
on retrouve des « jeunesses » et chacun renfermant sa définition de l’alimentation et ses
pratiques.
2. Le bien manger
A travers les deux études principales, la notion de bien manger a été analysée. Dans
les deux cas cette notion a deux aspects : l’un en lien avec la nutrition et le second axé sur
l’hédonisme, par des biais liés à la culture, la religion, le goût, l’origine du produit…
Dans l’ensemble « bien manger » revient à allier des quantités suffisantes et une
variété des produits. Le rapport de Laurence Tibère et de Jean-Pierre Poulain, relate que
« bien manger » est pour 61 % des étudiants « manger équilibré » (61%), avec une forte
surreprésentation des filles. Globalement, les messages du PNNS sont largement connus des
jeunes, bien que l’on retrouve une différence entre la norme nutritionnelle et la pratique.
En effet, pour certains ces normes sont considérées comme contraignantes ou trop strictes.
Ainsi certaines refusent de se plier à ses règles, se justifiant comme étant un changement
de style de vie qui ne sont pas près d’adopter. Chez certains jeunes, notamment les moins
diplômés, on retrouve des difficultés de compréhension (Garabuau – Mousaoui, 2001).
L'autre aspect du « bien manger », relatif au plaisir peut s’avérer en opposition avec
le premier. Pour certains « bien manger » est en opposition au « bon manger » nutritionnel,
lié à des plats servis en grande quantité, ou avec des produits plus riches en calories. Le
« bien manger » s’attache également pour certains, comme le révèle le rapport sur
l’alimentation des étudiants, à l’origine des produits, surtout s’ils sont de la région d’origine
de l’étudiant. On retrouve également dans le « bien manger » des questions plus en lien
36
avec l’éthique notamment axées sur le bien-être animal ou le mode de production des
produits (Tibère, Poulain, 2010 op. cit.).
Pour autant ces deux aspects ne sont pas en opposition totale, certains jeunes
tentent de lier la recherche de plaisir à travers le « bien manger » nutritionnel (Garabuau –
Mousaoui, 2001 op.cit.).
3. Identité et sociabilité alimentaire
Le départ du foyer parental, et l'entrée dans la vie professionnelle, sont deux étapes
de la vie d’un individu, sources d’évolution chez l’individu. Dans chacun des cas,
l’alimentation évolue en même temps que la condition de l’individu.
La période de vie étudiante est un véritable chamboulement pour les individus,
« dont l'enjeu est la transformation progressive du lycéen en étudiant (Dubet, 1994) »
(Boyer, Coridian, Erlich, 2001) et également la période de transition entre le contexte familial
et la vie d’adulte. Ainsi s’ensuit une modification des cadres, comme l’identifie Goffman, et
des modes de vie jouant sur l’identité de l’individu. En effet, devenir étudiant conduit à un
début de vie autonome, source d’angoisse ou d’euphorie.
« La perspective d’accéder à une plus grande autonomie, tant sur le plan matériel
que dans les modes de vie, est à la fois souhaitée et inquiétante. Cela implique une
série de prise de décisions et la construction de choix dans des domaines
habituellement « gérés » par les adultes. Cette situation est renforcée dans le cas
des étudiants dits « décohabitants » pour lesquels le nouveau statut d’étudiant
s’accompagne d’un éloignement par rapport aux parents, à la famille et au cadre de
vie habituel. Ces jeunes adultes en devenir doivent faire de nombreux
apprentissages : gestion individuelle des nouvelles formes de sociabilité mais aussi,
gestion des contraintes matérielles. Gestion du stress également, face aux
incertitudes et aux challenges liées à la formation et à l’avenir professionnel. Ce
stress se traduit principalement par des symptômes dépressifs, somatiques et des
troubles du comportement alimentaire. » (Tibère, Poulain, 2010, op. cit.)
Ainsi, la part de l’alimentation a une place prépondérante au sein de ces
changements. Elle est source de découvertes, d’apprentissages, en décalage ou en
37
continuité par rapport au modèle familial, grâce à la liberté alimentaire nouvellement
acquise. Les habitudes alimentaires interviennent dans la construction de l’identité de la
personne, en liant les héritages familiaux et culturels mais aussi l’individualisation des choix
identitaires. Le modèle alimentaire des étudiants, hérité des parents et inscrit dans « l’allant
de soi », est alors remis en cause « et la subjectivité intervient davantage, ramenant la
décision à l’individu dans une plus grande réflexivité » (Tibère, Poulain, 2010, op. cit). Ce qui
importe, c’est : « que manger, quand manger, comment manger ? » et aussi « comment
payer ? », notamment par la dépendance financière prépondérante pour les étudiants. Ces
questions remettent alors en question les modèles alimentaires antérieurs des étudiants et
de nouveaux apparaissent, permettant de concilier héritage et questionnements liés à la
nouvelle situation.
Pour autant, la jeunesse est caractérisée par d’autres étapes, comme vu
précédemment, et chacune va en modifiant l’aspect alimentaire. L’indépendance financière
apportée par l’entrée dans le monde du travail tend à modifier les comportements des
individus et cela vers un possible retour aux normes familiales, l’organisation de la vie
quotidienne s’y rapprochant de nouveau. Le pouvoir d’achat est lui aussi modifié : les jeunes
ne dépendent plus de leurs parents, et leurs ressources sont ainsi augmentées. Le choix des
produits s’en retrouve impacté et les pratiques culinaires également : les individus peuvent
alors investir dans des appareils qu’ils ne possédaient pas avant : four, robot,…
Comme vu précédemment, les frontières de la jeunesse et ses étapes clés sont
difficilement définissables. Ainsi, la mise en couple peut se dérouler lors du départ du
domicile familial ou de l’entrée dans la vie professionnelle, rendant plus complexe
l’adaptation des modèles alimentaires. En effet, deux modèles alimentaires se rencontrent
et peuvent être en opposition. Le couple doit alors faire preuve de concessions,
d’ajustements afin d’éviter des tensions. Ce passage à la vie à deux est un moment « de
découvertes de certains produits, plats ou manière de préparer et donc synonyme
d'enrichissement des pratiques culinaires. » (Moncé, 2015)
38
4. Particularités féminines
Dans cette partie, nous aborderons dans un premier temps les différences que l’on
retrouve chez les jeunes femmes dans leur alimentation, par rapport aux hommes et dans
une plus large partie, le rapport à l’alimentation, à l’alimentation équilibrée et au régime,
notamment grâce au rapport de Laurence Tibère et Jean-Pierre Poulain.
4.1.
Alimentation des jeunes femmes, les grandes lignes
Selon l’INPES, « la consommation alimentaire des jeunes femmes de 12 – 30 ans
apparaît ainsi plus favorable à la santé que celle des hommes du même âge. Les femmes ont
un « meilleur niveau de connaissances nutritionnelles que les hommes, étant davantage à
connaître les repères du PNNS ». D’ailleurs, à la question, « « que signifie pour vous « bien
manger » », la réponse la plus fréquente est « manger équilibré » (61%), avec une forte
surreprésentation des filles. »
Elles sont plus nombreuses à manger au moins cinq fois des fruits et légumes dans
une journée, et moins nombreuses à consommer des boissons sucrées », toujours selon
l’INPES. En effet, les jeunes femmes consomment davantage de fruits au petit-déjeuner et
les étudiants qui consomment des légumes le soir sont majoritairement des femmes, selon
la même étude de Laurence Tibère et Jean-Pierre Poulain. Selon l’enquête, les femmes sont
moins enclines à manger au fast-food que les hommes : « 20 % des femmes de 16-30 ans y
mangent au moins une fois par semaine contre 38 % des hommes ».
Sur les repas, les jeunes femmes ont le plus tendance à en sauter, notamment le
petit-déjeuner. Ces repas non consommés s’expliquent pour deux raisons : « pour
économiser », lorsque l’étudiant rencontre des difficultés financières ou dans une logique,
tout autre, pour assurer un contrôle de poids. Cependant, le repas du midi est davantage
sauté par les hommes, alors que les femmes préfèrent faire des « repas hyper simplifiés ou
organisés autour d’une salade », selon le rapport de Laurence Tibère et Jean-Pierre Poulain.
Concernant l’approvisionnement, les étudiantes ont plus tendance à aller sur les
marchés que les hommes.
39
4.2.
Le rapport alimentation et modèle corporel
4.2.1. Les modalités de contrôle alimentaire
Les entretiens réalisés dans l’étude de Laurence Tibère et Jean-Pierre Poulain
montrent qu’une majorité des jeunes filles ont un certain contrôle de leur alimentation.
Lorsqu’elles sont questionnées par rapport à la pratique de régime, la majorité répond, ne
pas en faire mais plutôt « faire attention », « d’équilibrer » ou « raisonner » leur façon de
s’alimenter, selon le rapport de Laurence Tibère et Jean-Pierre Poulain. Les stratégies
mobilisées pour « faire attention » ou pour équilibrer l’alimentation peuvent varier, mais
généralement, nous observons quelques éléments communs :

Le contrôle des quantités : et notamment sur les produits qui ne rentrent pas dans
la norme du « bien manger », à savoir les produits sucrés et gras ;

La sélection de certains aliments, notamment les aliments dits « sains » par les
jeunes femmes, c’est-à-dire les fruits et légumes, l’élimination d’autres considérés
comme moins « sains », cités précédemment, mais également la viande ;

Le contrôle du grignotage : considéré comme une « transgression des normes
sociales, diététiques, et esthétiques » ;

La modification des modes de cuisson afin de limiter la consommation de graisses ;

L’origine des produits, soit le respect de la saisonnalité, la proximité géographique,
le mode de production, notamment l’agriculture biologique ;

La pratique d’activité physique, permettant de « contrôler le corps et le poids », et
rentrant dans une logique de bien-être et santé.
Cette notion de « faire attention » est liée pour certaines jeunes femmes interrogées
dans l’enquête sur l’alimentation des étudiantes, à une volonté de perte de poids. D’autres
attachent le terme « faire attention » à des valeurs symboliques, telles que le bien-être
animal, l’agriculture biologique etc.
Pour autant, il semblerait que « faire attention » se rattacherait à faire un régime.
Dans « faire attention », les femmes font des changements dans leur alimentation
semblables aux changements alimentaires de celles qui font un régime (Labarre, 2004).
Néanmoins, le terme « régime » se rattache davantage à l’idée de privation et de
restrictions, selon les différents entretiens réalisés, dans le cadre de l’étude de
40
l’alimentation des étudiants. Cette norme du « faire attention » est permise par sa
légitimation, de diverses façons :

La « légitimation charismatique », véhiculée par les médias notamment et les
personnalités « modèles » ;

La « légitimation de type rationaliste », transmise par le discours nutritionnel diffusé
par les professionnels de la santé ;

La « légitimation de type légal bureautique » diffusée par les politiques de santé
publiques, les recommandations nutritionnelles ;

La « légitimation traditionnelle », à savoir, que « faire attention » est une norme,
présente dans l’ensemble de la société, transmise depuis des générations et
intensifiée récemment, par le développement des politiques nutritionnelles et la
légitimation charismatique.
Ainsi, après avoir repéré les différentes modalités qu’utilisent les jeunes femmes
pour la gestion de leur alimentation, Laurence Tibère et Jean-Pierre Poulain se sont attardés
à étudier les rapports au corps, développés dans la partie suivante et enrichis par diverses
lectures.
4.2.2. Les rapports au corps
Le rapport entre alimentation et corps est étroitement lié. De ce fait aborder la
question du corps et de l’image paraît nécessaire, notamment lors que « la « bonne forme
corporelle » donne à voir le niveau de réussite de la maîtrise de soi, de son existence »
(Apfeldorfer, 2008). Ainsi, certaines femmes interrogées ne sont pas satisfaites de leur
corps, « la pression sociale tend à uniformiser ce désir de minceur des femmes » (Corbeau,
2007), et sans pourtant prendre en compte le fait que le corps est déterminé, avant tout par
la génétique.
On remarque une dissonance chez les jeunes femmes entre l’idée qu’elles ont de
leurs corps et la réalité. Dans l’étude de Laurence Tibère et Jean-Pierre Poulain, les jeunes
femmes qui se considèrent comme « bien » ont un Indice de Masse Corporelle (IMC)
compris dans la fourchette basse de la normalité et même dans la maigreur (entre 17,8 et
41
20,7) 23 . Dans un article d’Annie Lacuisse-Chabot, de 2004, on remarque également une
incohérence entre représentation et réalité du corps : sur 142 jeunes étudiantes, seulement
25 % trouvent le bon IMC, en acceptant les faibles marges d’erreurs. Aussi, « en cas d’erreur
probante, il ne s’agit jamais d’une sous-estimation mais toujours d’une surestimation de son
IMC par rapport à la réalité. Ces jeunes filles rencontrent une véritable difficulté à évaluer
ce qu’est la normalité pondérale. » Ces différences dans les deux études d’ajustement entre
réalité et représentation se retrouvent également dans le domaine de la santé, car les
classes de l’IMC ont été modifiées : la catégorie d’un IMC « normal » est passé de 20 à 18,5
(Masson, 2004).
Ainsi, les femmes ont de meilleures connaissances que les hommes sur le « bien
manger » et ont un comportement plus en adéquation. Néanmoins, dans différentes
sources, il existe un rapport au corps particulier, dans lequel les jeunes femmes usent de
stratagèmes, pour « faire attention », influencées par diverses sources : externes,
construisant une norme du corps, la minceur, premier facteur de catégorisation, et par le
propre jugement de l’individu, qui peut être faussé.
Cette partie nous a permis d’aborder différents thèmes en lien avec notre sujet, des
politiques nutritionnelles, avec leurs caractéristiques dans la modernité alimentaire. Aussi,
avec l’étude du métier de diététicien, nous avons pu entrevoir les raisons qui poussent les
jeunes femmes à se lancer dans ces études, partagées entre médicalisation,
nutritionnalisation et nouvelles débouchées. Le tout créant une identité professionnelle
influant sur sa capacité d’interaction, et basée sur l’alimentation. Enfin nous avons cerné
l’alimentation des jeunes étudiants, où l’introduction de nouvelles représentations et
pratiques alimentaires se réalise, dans le cadre de nouvelles socialisations notamment. Pour
autant il est nécessaire de rappeler que ces évolutions diffèrent selon les individus, créant
des « jeunesses » avec des identités différentes et des représentations alimentaires,
définissant des mangeurs pluriels. L’alimentation liée à la santé, prend en compte la norme
de « minceur » qui fait rentrer les jeunes femmes, leur alimentation et leur rapport au corps
dans un jeu mettant en scène normes médicales et esthétiques.
23
IMC de moins de 16,5 : dénutrition ou famine ; 16,5 à 18,5 : maigreur ; 18,5 à 25 : corpulence normale ; 25 à 30 :
surpoids ; 30 à 35 : obésité modérée ; 35 à 40 : obésité sévère ; plus de 40 : obésité morbide ou massive
42
PARTIE 2 : HYPOTHÈSES
43
Chapitre 1 : Problématique et construction des hypothèses
Placée dans un contexte de médicalisation et nutritionnalisation par le PNNS, la
population se retrouve soumise à la diffusion de différentes préconisations, et cela ayant un
impact, dans le sens des politiques nutritionnelles, sur les comportements alimentaires.
La diététicienne nutritionniste, encore en études, se retrouve confrontée aux
changements inhérents à la vie étudiante mais également aux nouvelles normes étudiées
dans le cadre de la formation. Ainsi, elle se retrouve confrontée dans divers cadres,
impliquant son alimentation ou sa représentation.
Au fil des lectures, il est apparu que la jeune diététicienne est une mangeuse plurielle
et emplie de complexité. La jeune diététicienne, évoluant dans le contexte de la
nutritionnalisation et faisant partie d’une génération partagée entre normes médicales et
normes esthétiques, il est intéressant d’étudier son alimentation et de se demander :
Quelles identités influencent les modèles, les représentations et les pratiques alimentaires
des jeunes diététiciennes nutritionnistes ?
Afin de répondre à ma problématique, des entretiens exploratoires ont été réalisés.
Mes deux premiers enquêtés sont des individus qui n’ont pas de lien avec la diététique, ce
qui a pu me permettre de saisir leurs représentations vis-à-vis du métier de diététiciens.
Ensuite pour les entretiens exploratoires avec des diététiciennes nutritionnistes, j’ai choisi
des personnes avec des similitudes dans nos parcours, afin de créer un lien plus facilement
et comprendre certains de leurs propos plus aisément. De plus, ayant vécu les mêmes
épreuves que les diététiciennes interrogées, cela pourrait me permettre d’obtenir des
informations précises et sincères.
44
Tableau 2 : Présentation des profils interviewés en entretien exploratoire
Enquêté
Sexe
Âge
Situation professionnelle
O.G
Femme
21 ans
Etudiante
G.D
Homme 22 ans
M.M
Femme
22 ans
S.P
Femme
23 ans
A.D
Femme
22 ans
Etudiant
Diététicienne nutritionniste
depuis 2014
Employée dans un centre
d’amaigrissement
Diététicienne nutritionniste
depuis 2014
Etudiante
Diététicienne nutritionniste
depuis 2015
Etudiante
Situation
Vit en
couple
Vit seul
Entretien
exploratoire
Entretien n ° 1
Entretien n ° 2
Vit en
couple
Entretien n ° 3
Vit seule
Entretien n ° 4
Vit en
couple
Entretien n ° 5
Dans les deux premiers entretiens, j’ai rédigé un guide d’entretien rapide (cf. Annexe
A : Guide d’entretien n ° 1), en dirigeant mes questions sur leurs connaissances du métier
de diététicien nutritionniste, puis en me focalisant sur la diététicienne et les représentations
qu’ils peuvent avoir de ce métier. Dans les entretiens réalisées auprès des diététiciennes,
j'ai cherché à aborder des thèmes larges sur le sujet (cf. Annexe B : Guide d’entretien n ° 2)
tels que le parcours scolaire, la profession et ses représentations, la cuisine, les changements
alimentaires et le lien avec l’alimentation des personnes de leurs générations. Les
retranscriptions des entretiens sont retrouvables dans les annexes C, D, E, F et G.
Ainsi deux hypothèses se sont dégagées après l’étude de mon cadre théorique et
mes entretiens exploratoires :

Hypothèse 1 : Le couplage des normes sociales et professionnelles tend à une
rationalité alimentaire chez les jeunes diététiciennes-nutritionnistes, dans le
contexte de la nutritionnalisation ;

Hypothèse 2 : Dans le contexte de modernité alimentaire et d’une redéfinition de la
jeunesse, un découplage entre identité professionnelle et pratiques alimentaires
quotidiennes apparaît.
45
Chapitre 2 : Hypothèse 1 : Le couplage des normes sociales et professionnelles
tend à une rationalité alimentaire chez les jeunes diététiciennes
nutritionnistes, dans le contexte de la nutritionnalisation
A travers cette hypothèse, il s’agit de l’aspect professionnel qui sera développé, à
travers deux thèmes, abordés dans les entretiens exploratoires et également retrouvés dans
un article de Maria Clara de Moraes Prata Gaspar, Cultura y dietética: normas y
representaciones de una alimentación sana entre dietistas francesas y brasileñas, à la suite
du Congrès International, organisé par l’Observatoire de l’Alimentation et la Fondation
Alicia : « Otras maneras de comer: Elecciones, convicciones, restricciones »
Ces deux sous-hypothèses concernent, dans un premier temps, les représentations
de la diététicienne auprès des personnes qui sont extérieures au domaine, ainsi que des
diététiciennes elles-mêmes. Ensuite une seconde sous-hypothèse, sera développée sur la
rationalité entre les connaissances acquises et les pratiques ou représentations
alimentaires, avec leurs explicitations.
1. Les représentations de la diététicienne
Dans mes entretiens, l’image de la diététicienne a été abordée, et notamment celle
que se font les personnes qui ne sont pas en lien avec la profession. La notion de minceur
est revenue systématiquement, mais avec des représentations variée : « Plutôt grande et
très très fine. Mais vraiment maigre plus que mince. » (O.G, entretien n°1). L’interviewé n °
2 dit ne pas avoir d’apriori sur le physique de la diététicienne « c’est pas parce qu’elle va te
conseiller sur ton alimentation, que c’est quelqu’un qui doit être mince, ça peut-être une
personne basique, comme n’importe qui » (G.D, entretien n°2). Pour autant, il cite une
représentation des diététiciennes basées sur le physique, lorsqu’il lui ait demandé
d’expliciter : « Quelqu’un de svelte tu vois » (G.D, entretien n°2). Les diététiciennes partagent
également ces mêmes représentations, même avec tout de même plus de nuance :
« [Est-ce dans ton imaginaire, avant de commencer tes études, tu avais une idée de
la diététicienne ?] Non du tout. Boh qu’elle devait pas être obèse, mais sinon non. »
(M.M, entretien n°3)
46
« Je pense qu’elle doit avoir une certaine image à tenir. » (S.P, entretien n°4)
« Puis physiquement, une personne fine » (A.D, entretien n°5)
Lorsqu’il est question de l’image de la diététicienne, le critère de la corpulence, n’est
pas cité en premier. Les premières représentations étaient basées sur un aspect davantage
professionnel du métier, à savoir ses missions et sa place.
« Je pensais que c’était un peu comme le médecin de l’alimentation. Tu arrivais avec
ta blouse c’était vraiment une consultation médicale. » (S.P, entretien n°4)
« Déjà je pensais que tu étais super importante dans les structures, vraiment
indispensable, parce que bon l’alimentation c’est partout quoi et c’est indispensable,
t’avais ta blouse, tes dossiers et tout. » (A.D, entretien n°5)
Cependant, afin d’être légitime, le critère de l’apparence reste, chez nos interrogés
n ° 1 et n ° 2 et dans les commentaires les jeunes femmes un critère essentiel :
« [Et si tu consultes une diététicienne qui est ronde, c’est une gêne pour toi ? Est-ce
que tu aurais confiance en elle ?] Beh c’est comme si tu vas chez un cordonnier qui a
des chaussures trouées. [...] tu te dis « est-ce que je suis ses conseils ou pas ? » » (O.G,
entretien n°1)
« Après je me dirais « ouais elle est grosse, s’il faut c’est bidon ce qu’elle me dit. » »
(G.D, entretien n°2)
Cette légitimité s’instaure dans un contexte professionnel, permettant de
reconnaître, ou non, les capacités de la diététicienne. Ainsi, cette sorte de pression de la
personne susceptible d’être en attente de la diététicienne et de ses conseils, laisse
apparaître chez les jeunes diététiciennes, une prise de conscience :
« Justement tout le monde le dit… Après c’est vrai qu’en y passant si une diététicienne
n’est pas fine aux yeux des gens ce n’est pas crédible, elle donne des conseils sans les
appliquer. » (S.P, entretien n°4)
« Elle doit être à son poids de forme quoi. Elle doit pas être obèse. [Et maigre ?] Non.
Après parce que moi j’aime pas et puis après ça donne l’image de la diet qui vraiment
ne mange rien. Ça donne la mauvaise image de la diététicienne. » (A.D, entretien n°5)
47
Outre le fait d’être en surpoids, c’est aussi la maigreur, et des troubles alimentaires
qui peuvent être sous-tendus qui dérangent. La jeune diététicienne consciente de l’image à
donner afin d’être légitime, tente de se rapprocher de celle attendue par les profanes,
hypothétiques patients :
« Je pense que tu dois être un minimum bien, dans la normale niveau poids. C’est
aussi pour correspondre à ce que les gens veulent. Voir une diet obèse, ils vont pas
trop y croire. » (A.D, entretien n°5)
Cette image, attendue par les autres, se retrouve également dans le milieu
professionnel. Il apparaît qu’une diététicienne, si elle ne correspond pas à la représentation
commune « Moi je vois ma gérante, si la diététicienne est costaud, elle la prendra pas »
(M.M, entretien n°3), pourrait ne pas être embauchée. La minceur apparaît comme un atout
(Masson, 2012). Cette vision, se retrouve notamment dans le milieu du libéral, où les
consultations sont majoritairement dédiées à des pertes de poids : « en libéral, c’est ciblé
sur la perte de poids, je pense qu’il y a une mauvaise image » (M.M, entretien n°3) ; « Mais
comme tout le monde pense « amincissement », du coup oui c’est un peu basé sur le physique
à la base » (A.D, entretien n°5).
Ainsi, les diététiciennes se retrouvent, sous cette pression à surveiller leurs poids
pour être en adéquation avec l’image de la diététicienne :
« Beh le fait d’avoir pris du poids et d’être à un certains poids je me disais « mais les
gens, ils vont s’imaginer tout un tas de choses. » On représente le métier, donc c’est
vrai que j’étais pas bien. J’étais vraiment pas bien. » « Je maîtrise plus ce que je fais.
Pour éviter de prendre du poids tu vois. » (M.M, entretien n°3)
« Tu te dis « beh non ça aurait dû être l’inverse ». Mais ça me dérange pas plus que
ça. C’est surtout dans le concept quoi. C’est con, tu fais diet et tu grossis. » (S.P,
entretien n°4)
Une différence dans la considération du poids est reconnaissable. Chez l’interviewée
n ° 3 l’impact d’une prise de poids est vécu plus difficilement que chez l’interviewée n ° 4.
Ceci pourrait s’expliquer par le fait que la première diététicienne serait en exercice et
immergée quotidiennement dans l’exercice de la profession et les conseils de perte de
poids : « Après c’est peut-être parce qu’on est pas dans le métier. On travaille pas, donc c’est
48
plus pour moi que je le fais » (S.P, entretien n°4), lorsque l’on aborde le fait de manger
«équilibré ».
Pour autant, les interrogés semblent ne pas être réellement gênés si l’image, qu’ils
se font de la diététicienne, n’est pas avérée :
« Mais après voilà c’est pas parce que la personne est le contraire de ce qu’elle veut
me faire appliquer que ça va jouer. Elle est professionnelle, si elle y arrive dans son
métier c’est pas pour rien. Elle a fait des études, elle a les connaissances pour faire ce
qu’elle fait et voilà. Moi j’y connais rien, elle, elle a un avis professionnel et voilà. Elle
est censée savoir faire. Pour moi c’est pas un problème. » (G.D, entretien n°2)
« Et puis si les gens viennent voir une diet, c’est parce que t’es pro et tu sais mieux
que ce qui est bon ou pas. » (A.D, entretien n°5)
Ainsi, malgré une représentation sociale de la diététicienne, l’aspect professionnel
apparaît dans les entretiens, comme justifiant des possibles nuances entre l’image de la
diététicienne et la réalité.
2. Une rationalité en lien avec la pratique professionnelle
Sur l’alimentation en elle-même, les jeunes diététiciennes semblent adopter
certaines pratiques, afin d’être en cohérence entre leurs connaissances et pratiques :
« Beaucoup de femmes interrogées, dans leurs discours justifient leurs opinions, pratiques et
normes par le fait d’avoir étudié et de travailler dans le domaine de la nutrition. » (Gaspar,
2015).
Ainsi, une rationalité en finalité est retrouvée, régulant « la décision à partir des
conséquences de nos actes ». Il s’agit là de parler du raisonnable, du probable, du déterminé
(Poulain, 2004), de la rationalité scientifique qui « prend la place d’une série de raisons d’agir
fondées sur des valeurs, des traditions, voire des routines. Elle invite à revisiter ces
pratiques, ces usages parfois désignés comme erronés, à les abandonner et à refonder un
nouvel ordre alimentaire éclairé par la science. » (Fischer, 2013) Cette notion de rationalité
scientifique, est retrouvée chez les diététiciennes nutritionnistes interrogées dans leurs
discours et pratiques. En effet, lorsqu’il leur ait demandé d’évoquer leurs journées
alimentaires, des termes scientifiques, ou communs pour les diététiciens sont employés
49
pour la caractériser : « entremet », « crudités », « féculents », « composantes » (A.D,
entretien n°5) ; « D’habitude je prends une collation, une compote sans sucres ajoutés. […]
Et après le soir toujours protéines, pas de féculents, légumes plutôt, et produit laitier. Et en
boisson toujours de l’eau. » (M.M, entretien n°3). Ces propos sont également identifiables
chez Maria Gaspar : « Lors de la description d'une alimentation équilibrée, elles citent
plusieurs substances et composants nutritionnels, en particulier les protéines, les glucides,
les vitamines, les minéraux, les acides gras saturés / insaturés, fibres, etc. »
Ces termes, ou l’application de connaissances, sont observables, lors d’actes
quotidiens, comme faire ses courses « Par exemple, pour les compotes, je vais me diriger
vers les compotes sans sucres ajoutés, parce que je sais ce que ça veut dire. Je sais la
différence avec allégé ou les normales, donc je regarde pas la composition. » La composition
nutritionnelle des produits est rarement regardée par nos diététiciennes : « Je regarde pas
l’étiquetage ni rien. J’y passerai trop de temps » (M.M, entretien n°3) ; « Ça dépend, surtout
les nouveaux » (S.P, entretien n°4) ; « Je regarde jamais les étiquettes, toutes les
compositions jamais » (A.D, entretien n°5). Ce qui a tendance à plus intéresser nos
interrogées, c’est la composition des produits, avec la liste des ingrédients :
« A la limite la liste des ingrédients. Genre, je veux tester un nouveau gâteau. Si le
premier ingrédient dans la liste c’est beurre ou sucre je laisse tomber. Faut pas abuser non
plus. » (A.D, entretien n°5)
« Beh déjà, c’est pas forcément qu’ils soient plus gras, mais c’est vraiment les
ingrédients, comment ils sont composés. Genre les conservateurs… » (S.P, entretien n°4)
Les diététiciennes auraient propension à se diriger vers des produits plus naturels,
en adéquation avec une rationalité scientifique, aux valeurs transmises durant leurs
enseignements, notamment, et par le PNNS.
« Et des produits diététiques, t’en achètes ? Non pas du tout. […] Il faut se méfier.
[Les galettes de riz] c’est pas calorique mais ça a un index glycémique très élevé donc
c‘est pas top. C’est pas diététique et c’est au rayon diététique. » (M.M, entretien n°3)
« J’essaie de manger un peu naturel tu vois. Les trucs les moins modifiés possibles
quand je fais mes courses. » (A.D, entretien n°5)
50
« Selon les diététiciens, manger équilibré c’est une alimentation variée, où l’on peut
manger de tout, en quantités adéquates et raisonnables » (Gaspar, 2015), nos diététiciennes
interrogées vont également dans ce sens :
« C’est déjà les bases, avoir tous les produits de l’alimentation : produits laitiers,
protéines, féculents, légumes. C’est aussi avoir du sucre et des matières grasses. Pas
se priver. » (M.M, entretien n°3)
« Vraiment sur la variété. » (S.P, entretien n°4)
« Manger de tout. En quantité raisonnable je pense. […] T’as droit à tout, féculents,
matières grasses. Faut juste gérer. Et ça tout le monde ne le sait pas, comme les diet
peuvent le savoir. »
Ainsi, ces discours laissent à penser qu’il y aurait une valeur partagée par la
profession, un « bien manger » nutritionnel. Ces valeurs tendraient à effectuer chez nos
interrogées des changements alimentaires :
« [Tu as changé ton alimentation durant le BTS ?] Ouais. [Qu’est-ce que t’as
changé ?] Beh en fait je mangeais pas du tout comme ça. C’était pas du tout équilibré
en fait. Et du coup j’ai rééquilibré en faisant le BTS. » (M.M, entretien n°3)
« La première année non. La seconde année on va dire un peu. La troisième année oui
et maintenant oui. En BTS, je pense que c’est parce qu’on avait pas le temps. Ouais je
mange plus de légumes, je mange moins de féculents. Moins gras aussi. Et moins
sucré. Parce que tu vois ma mère elle cuisine beaucoup de trucs au caramel, et ça j’en
fais moins. » (S.P, entretien n°4)
« Alors la première année non. Le seul truc c’est le petit dej. Avant j’en prenais pas et
dès que j’ai commencé les cours j’ai senti qu’il me le fallait, sinon j’avais tout le temps
faim. Après j’ai commencé à tester plus de plus trucs, vraiment à plus cuisiner, à
varier. Et c’est vraiment cette année où j’ai commencé à mettre des légumes, acheter
des produits laitiers, des fruits… A structurer mieux. » (A.D, entretien n°5)
Et cela dans le but d’être plus rationnelles, à la fois en adéquation avec les
connaissances acquises, et pour leur bien-être personnel :
51
« Beh déjà de savoir ce que c’est une alimentation équilibrée, […] savoir ce que c’est
les protéines, les féculents, ce que ça apporte quoi. Les bases du PNNS quoi. […] Le
but c’était de rééquilibrer mon alimentation.» (M.M, entretien n°3)
« Autant appliquer ce que j’ai appris en cours. Ça peut avoir des impacts sur la
santé. » (S.P, entretien n°4)
« Je pense pour moi. Parce que manger des pâtes tout le temps c’est pas possible. Et
que je mangeais pas forcément bien, ça pouvait avoir des conséquences sur ma
santé. » (A.D, entretien n°5)
Mais également, en moindre mesure certes, par le fait d’être diététicienne, afin
notamment de ne pas « perdre la face » (Goffman, 1991), dans le cadre professionnel :
« Je pense que vu que c’est quelque chose que j’allais diffuser dans mon métier, déjà
c’était bien de le faire moi. » (M.M, entretien n°3)
« Je me suis dit « voilà t’as fini tes études, enfin t’as passé ton BTS, tu peux bien
manger maintenant ». » (S.P, entretien n°4)
Ces changements, initiés dans le sens du PNNS, et ce mode d’alimentation équilibrée
entraîne chez les diététiciennes certains mécanismes, ou réflexions sur leurs modes de
consommation passés.
« Même pour moi associer deux féculents ça me fait bizarre » (S.P, entretien n°4)
« C’est bête mais souvent j’ai le truc « teh t’as pris que deux produits laitiers
aujourd’hui ». Ou quand j’ai pris mes 3 fruits je suis contente. Ou genre manger des
fritures 2 fois, dans la semaine ça m’embête un peu. Je raisonne pas du tout en terme
de calories, tout ça, ça, ça m’intéresse pas mais je fais par rapport aux repères du
PNNS tu vois. Puis pareil avec les patients que je peux rencontrer, c’est plus simple. »
(A.D, entretien n°5)
Ces réflexes qu’ont les diététiciennes interrogées, s’éloignent tout de même de l’idée
préconçue « qu’une diététicienne ne mangeait rien, 3 graines et c’est fini », « à la limite, oui,
le côté maladif » (O.G, entretien n°1). Les écarts qui peuvent faire culpabiliser
diététiciennes, sont davantage liés à leur vision de l’alimentation équilibrée, lorsque cellesci s’en éloignent, comme manger en trop grande quantité :
52
« [Et tu as déjà eu un sentiment de culpabilité en mangeant quelque chose ?] Oui…
(rires) C’est plus en quantité, que sur le produit. » (M.M, entretien n°3)
« Mais quand je fais de gros gros écarts… Ouais peut-être… Enfin c’est pas vraiment
de la culpabilité. Des gros écarts d’affilés quoi. » (S.P, entretien n°4)
« Quand je mange un truc mais en trop grande quantité. Ou que je fais beaucoup
d’excès, parce que j’ai pas le choix, genre j’ai du travail, je suis stressée et tout. Là je
peux culpabiliser. » (A.D, entretien n°5)
Ces idées pouvant se lier à un rapport plus ou moins tendu à l’alimentation :
« Disons que c’est plus maîtrisé. Je maîtrise plus ce que je fais. Pour éviter de prendre
du poids tu vois. » (M.M, entretien n°3)
« Mais après tu vois c’est de deux façons. Comme tu sais ce que tu manges t’es plus
cool parce que tu te dis qu’en équilibrant après le reste ça va aller. Mais de l’autre tu
sais aussi ce qu’il y a dedans et tu te dis « ah ouais quand même c’est super gras.
Mais je réfléchis plus tu vois ! » (S.P, entretien n°4)
« Je pense que je connais les aliments et ce qu’ils apportent et que je sais quoi faire si
je mange pas des trucs supers, je sais m’adapter après tu vois, je suis plus. Mais d’un
autre côté, je calcule pas mal. Mais après je suis pas du tout dans la paranoïa ! Je sais
les repères, je les applique tant mieux, je les applique pas tant pis. » (A.D, entretien
n°5)
Les diététiciennes ont une double vision sur leur rapport à l’alimentation, d’un côté
la maîtrise de ce qu’elles mangent mais de l’autre, manger sans conformisme aux règles du
PNNS, ferait partie des qualités liées à la profession du diététicien. Il s’agit là d’un autre type
de rationalité, la rationalité en valeur, qui « consiste à disjoindre le comportement de ses
conséquences et à trouver la rationalité du comportement dans le respect d’un système de
valeurs » (Poulain, 2004), valeurs partagées entre les patients et les diététiciennes :
« Après quand on fait pas forcément ce qu’on dit, on comprend un peu mieux les gens
dans leur quotidien. Par exemple, tu grignotes et la personne en face son gros
problème c’est les grignotages, la diet elle va être plus apte à proposer des
solutions. » (M.M, entretien n°3)
53
« Après c’est que de la théorie ce qu’on apprend. Et puis si toi tu manges nickel, c’est
plus dur de comprendre le patient. Et si la diet mange mal, ça n’empêche pas qu’elle
puisse donner de bons conseils. C’est comme les tabacologues qui fument. » (S.P,
entretien n°4)
« Et aussi de toute façon quand t’as un patient qui te dit « j’adore le chocolat », tu
peux que rigoler, dire que toi aussi mais qu’il faut faire gaffe. Tu manges dans des
quantités raisonnables et voilà. On a tous nos travers et heureusement ! » (A.D,
entretien n°5)
Ici, se développe une coexistence entre le « modèle idéal » et le « modèle pratique »,
dans un cadre où la diététicienne et son patient, où elle adapte son comportement. Ainsi,
cette rationalité s’inscrit dans les demandes de patients potentiels :
« Ça peut-être rassurant, parce que tu te dis que la nana elle n’est pas forcément dans
l’extrême, tu peux aussi te dire qu’elle te comprend » (O.G, entretien n°1)
« Ouais pas comme un psy mais qui est là pour t’écouter et en fonction elle s’adapte
pour améliorer » (G.D, entretien n°2)
Il apparaît dans cette hypothèse que la nutritionnalisation et la socialisation
professionnelle impliqueraient des changements de rationalité chez nos jeunes
diététiciennes, traduits par des normes et attitudes différentes, après leurs études et des
expériences professionnelles. Au-delà de l’identité professionnelle et des rationalités dans
les comportements alimentaires qu’elle engendre, les diététiciennes de notre étude sont
également placées dans d’autres cadres, qui pourraient également influencer sur leurs
comportements. Ainsi se dessine notre seconde hypothèse, à savoir un découplage entre
identité professionnelle et pratiques alimentaires quotidiennes, dans le contexte de
modernité alimentaire et d’une redéfinition de la jeunesse.
54
Chapitre 3 : Hypothèse 2 : Dans le contexte de modernité alimentaire et d’une
redéfinition de la jeunesse, un découplage entre identité professionnelle et
pratiques alimentaires quotidiennes apparaît
« Les pratiques alimentaires sont des mises en scène des préoccupations, des
aspirations, des engagements, etc., d’une époque et d’une société données. » (Poulain,
2013). La jeune diététicienne nutritionniste mettrait ses pratiques alimentaires en
combinaison d’une part avec la représentation de sa profession, mais également dans le
cadre d’un double déterminisme : « un déterminisme culturel à travers les systèmes de
valeurs qui pilotent les pratiques, et un déterminisme matériel à travers les emplois du
temps, les contraintes budgétaires, les savoir-faire culinaires... » (Poulain, 2004),
déterminismes semblables à leur génération, et analysés ici à travers le modèle alimentaire
français et les contraintes générationnelles.
1. Le modèle alimentaire français
Afin de contextualiser ce point de l’hypothèse, la définition du modèle alimentaire
française proposée dans un Cahier de Recherches du CREDOC « Comparaison des modèles
alimentaires Français et Etats-Uniens » sera un appui.
Le modèle alimentaire français actuel repose trois caractéristiques pratiques de la
vie quotidienne, régularisant et ritualisant l’alimentation : « Trois repas principaux par jour,
un temps de préparation et une durée des repas relativement élevée, un repas structuré par
au moins 3 composantes prises dans l'ordre. »
S’ajoutent à cela, d’autres valeurs telles que la place de la diversité alimentaire, qui
est importante, le goût des aliments ainsi que la présence d’un savoir-faire.
Le « discours normatif » (Corbeau, 2007) valorisant les savoirs est présent dans la
représentation de l’alimentation des diététiciennes. En effet, le thème de la cuisine, dans les
entretiens, a été reçu avec dynamisme et apparaît comme l’un des sources de motivation
au choix des études de diététique : « On a tous dit la cuisine je crois ! » (M.M, entretien n°3) ;
« L’alimentation c’est un sujet qui m’intéresse et j’aime bien la cuisine, faire la cuisine, donc
55
je me suis orienté vers là. » (S.P, entretien n°4) ; « Et puis j’aimais bien cuisiner, la bouffe. »
(A.D, entretien n°5).
La définition du modèle alimentaire français est basée de manière prépondérante
sur ce savoir-faire, mais également sur la façon de présenter et consommer les aliments,
avec notamment la notion de convivialité. Ainsi, chacune des diététiciennes apprécie aller
au restaurant et notamment entre amis. On observe une déconnexion entre l’alimentation
festive et quotidienne (Corbeau, 2007) :
« D’habitude je prends une collation, une compote sans sucres ajoutés. Mais là
aujourd’hui ma copine elle est venue donc on a fait un goûter ! » (M.M, entretien n°3)
« Quand je mange chez moi je mange bien équilibré, il y a de tout et quand je mange
avec des amis, je mange très mal, quand on mange dehors. » (S.P, entretien n°4)
La convivialité définie sur la commensalité, est importante chez nos diététiciennes
interrogées, comme chez « plus de 50 % des français » (Gaspar, 2015) :
« Maintenant ça me fait plaisir de partager un repas avec eux. Parce qu’au final
l’alimentation nous réunit tous. On va échanger, parler de ci de ça… » (S.P, entretien
n°4)
« Quand on se voit déjà c’est autour de l’alimentation. Tapas, goûter, resto… Donc
déjà on se fait goûter les trucs, on change des restos et tout. C’est vraiment un
moment où on partage. C’est nécessaire. » (A.D, entretien n°5)
Plus qu’un partage de nourriture, c’est un partage d’expériences et anecdotes que
l’on retrouve, nécessaire à une sociabilité :
« Tu vois après je pense que manger avec les autres et comme les autres c’est garder
une vie sociale. J’ai des copains, ils mangent d’abord chez eux pour faire bien
attention et qui après nous rejoignent. Mais bon je trouve ça débile. […] Des amis qui
font du sport. Tu perds le côté social quoi. Mais mes amies diet elles sont toutes
comme moi. Ça nous fait plaisir de nous retrouver ensemble autour d’un repas. Plus
qu’avant, quand j’étais pas diet. Avec ça me fait plaisir, parce que je retrouvais mes
amis. Maintenant ça me fait plaisir de partager un repas » (S.P, entretien n°4).
56
Cette commensalité est source de plaisir chez nos différents interrogés, plaisir en
valeurs par la connexion avec l’alimentation24.
« Quand je vais au Mc Do avec des potes, c’est un plaisir d’y aller parce que je sais
que je me retrouve avec eux. » (G.D, entretien n°2)
« J’ai plus de plaisir, avec mes amis, d’avoir partagé un moment avec eux tu vois. »
(S.P, entretien n°4)
Cependant la notion de plaisir est ambivalente, dans ces citations elle « favorise une
régulation naturelle, appuyée sur le partage du repas » et « est reconnue par les
nutritionnistes comme une composante importante de l’équilibre alimentaire » : « Après de
ma formation, c’est surtout se faire plaisir en mangeant. Ça peut être n’importe quel aliment,
du moment où ça me fait plaisir de manger. » (M.M, entretien n°3). Toutefois, le plaisir
« [pour les clients] c’est ce qui va être dessert, sucreries, tout ce qui est sucré » (M.M,
entretien n°3) « c’est manger gras, sucré selon ses envies » (S.P, entretien n°4) et peut être
un facteur de surpoids, lorsqu’il est considéré « en décalage par rapport à la morale de la
sobriété, et de la minceur, en tant que normes légitimes. » En ce sens, on s’approche du
plaisir en finalité, étant donnée la prise en compte des conséquences25.
Dans ce contexte, se crée un effet d’aubaine pour les marques, qui joue sur la
nutritionnalisation :
« Il y a un gros marché qui s’est développé. Comme ce qu’il m’est arrivé l’autre jour
avec des gâteaux sésames, j’étais persuadée que c’était un truc pas calorique et j’ai
comparé et j’ai vu que c’était aussi calorique que mes Pépito » (O.G, entretien n°1)
Le modèle alimentaire français est également basé sur la diversité des produits
régions françaises et également sur l’appropriation de produits venus d’ailleurs.
« Moi plaisir, c’est le bon produit tu vois. C’est plus intéressant de manger tout seul
chez toi une salade avec des bons produits, diététiques, ou bio. » (G.D, entretien n°2)
24
Dupuy Anne. Socio – Anthropologie du plaisir alimentaire. M1 Sciences Sociales Appliquées à l’Alimentation, ISTHIA,
2016.
25 Dupuy Anne. Socio – Anthropologie du plaisir alimentaire. M1 Sciences Sociales Appliquées à l’Alimentation, ISTHIA,
2016.
57
« Et puis dans la classe y’avaient plusieurs origines, c’était sympa de découvrir
certains plats typiques. » (M.M, entretien n°3)
« Les fruits et les légumes, c’est plus le prix et la provenance. » (S.P, entretien n°4)
« Et après sinon je regarde beaucoup la provenance. J’essaie d’acheter au maximum
français, privilégier les produits locaux tu vois. » (A.D, entretien n°5)
A travers ces produits, et ces échanges, le patrimoine alimentaire est partagé par
tous, et les effets de patrimonialisation, environnementalisation permettent de resserrer les
liens sociaux. La définition du « bien manger » est alors retrouvée dans tous ces sens : « bien
manger » hédonique, par la convivialité ou des produits en accord avec les valeurs des
interrogés, au « bon manger » nutritionnel, et « bien manger » nutritionnel.
Cependant, il s’agit d’une définition du modèle alimentaire français, rarement
appliquée dans sa globalité, par tous les Français. Les diététiciennes se retrouvent dans cette
nuance, comme les autres jeunes de leur génération, en s’appuyant sur les caractères et les
tendances qui fondent essentiellement le modèle alimentaire français, et en acceptant
également d’autres contraintes.
2. Les mêmes conditions générationnelles
Comme développé précédemment, la jeunesse est difficilement définissable par ses
différentes étapes, sans véritables définitions d’âge et ainsi, on parlerait « des jeunesses ».
Cette étape, du passage à l’âge adulte, est source de changements chez l’individu. Chez nos
diététiciennes, les mêmes similitudes sur le plan alimentaire que chez les autres jeunes sont
observables.
Dans un premier temps, on retrouve le départ du domicile familial, notamment dans
les cadres des études dans le supérieur, avec l’adaptation à une nouvelle vie : « Fallait gérer
l’arrivée dans une grande ville, savoir où faire les courses, les cours et tout… C’était toujours
pareil. » (A.D, entretien n°5). Comme 51 % des étudiants interrogés dans l’étude de
Laurence Tibère et Jean-Pierre Poulain, notre diététicienne n’est pas satisfaite de l’offre
alimentaire proposée par le restaurant universitaire : « Déjà au RU, tu peux pas manger
super équilibré. Des fois c’est limite. » (A.D, entretien n°5). Aussi, nos diététiciennes se sont
retrouvées en difficultés, lors de l’apprentissage culinaire, comme bon nombre d’étudiants
58
(Tibère, Poulain, 2010). L’une d’elle, a apprécié les enseignements de techniques culinaires,
notamment pour l’initiation aux bases de la cuisine : « ça m’a bien aidée ! On a appris les
bases de la cuisine, donc maintenant je sais cuisiner. C’est vrai que ça c’était un plus. » (M.M,
entretien n°3)
Chez les jeunes, faire la cuisine implique également une organisation : « Je fais ma
liste avec mes menus et j’achète ce qu’il faut. Je suis organisée. » (A.D, entretien n°5).
Cependant, elle peut apparaître comme une contrainte (Tibère, Poulain, 2010), idée que
l’on retrouve également chez les diététiciennes interrogées :
« J’ai pas forcément le temps de faire tout nickel. » (A.D, entretien n°5).
« Je me dis que par facilité, je pourrais faire autre chose. Parce que c’est long à
préparer. Ça prend vraiment du temps. » (M.M, entretien n°3)
A l’instar de l’analyse effectuée dans la partie précédente, les diététiciennes
interrogées ont changé leurs alimentations, depuis le début de leurs études vers une
pratique plus équilibrée. Ce changement n’est pas uniquement cantonné à leur secteur car
13,5% des étudiants interrogés par Laurence Tibère et Jean-Pierre Poulain estiment manger
plus équilibré depuis qu’ils ont quitté le foyer familial.
Cette rupture entre les pratiques familiales et les nouvelles adoptées, est
caractéristique du passage à la vie étudiante. Ces changements sont associés comme dans
le rapport de Laurence Tibère et Jean-Pierre Poulain à une situation présentant plus de
liberté « tant au niveau des choix alimentaires » : « mais après par contre j’ai découvert la
charcuterie et le fromage » (S.P, entretien n°4) ; « que des possibilités d’invention et
d’appropriation culinaires » : « tu fais ta popote » (A.D, entretien n°5), « je teste au niveau
des pâtisseries. En remplaçant le sucre par du sirop de glucose » (M.M, entretien n°3)
Pour autant ces changements peuvent être sources d’incompréhensions au sein de
la famille :
« J’ai essayé de leur dire que moi j’avais changé mes habitudes alimentaires depuis 3
ans et que manger tout ça tous les jours, tout le temps ça ne plaisait plu, mais elles
n’avaient pas l’air convaincues. » (S.P, entretien n°4)
59
Ou même d’écœurements :
« Tu retrouves les saveurs, des plats de maman, tes habitudes d’avant. A la fin j’étais
écœurée. » (S.P, entretien n°4)
« Genre ma grand-mère cuisine assez gras. Et maintenant je suis habituée à pas trop
cuisiner gras. Et quand j’y vais, je le sens et des fois ça m’écœure. » (A.D, entretien
n°5)
Chez nos diététiciennes, le rapport à ces changements, voire jugements par rapport
à l’alimentation de la famille peut être mal interprété : « Vu que c’est la famille, je pense
qu’ils ont pas envie que je les considère comme des patients. » (M.M, entretien n°3)
Ces changements sont également sources de partage : « Maintenant c’est ma mère
qui fait des recettes que je lui apprends c’est marrant. » (A.D, entretien n°5)
L’étape de la mise en couple est également retrouvée dans le parcours des
diététiciennes, considérée comme un « rite de passage où s’opère une fixation des
habitudes alimentaires » (Corbeau, 2007), qui entraîne certaines difficultés :
« Et à l’appart, comme on aime pas les mêmes légumes, je fais pas comme je peux.
[…] C’est juste que c’est pas évident à deux. » (A.D, entretien n°5)
« Et puis j’étais avec K. et qu’il mangeait tout le temps gras. Genre on pouvait manger
3 fois des frites dans la semaine, ça lui faisait plaisir. Ça je lui avais dit [que je n’aimais
pas]. » (S.P, entretien n°4)
Au sein de notre échantillon de diététicienne, une seule était indépendante
financièrement (M.M, entretien n°3). Cette période est là aussi la redéfinition de certaines
pratiques alimentaires, comme vue dans notre cadre théorique, où l’alimentation aurait
tendance à se normaliser et s’approcher du modèle incorporé en socialisation primaire
(Moncé, 2015) :
« J’ai plus besoin maintenant de faire une collation, comme je finis tard le soir. »
« Plus de resto oui. Parce que j’ai avancé dans l’âge et je suis plus indépendante. »
« C’est vrai que je me dirige vers les conserves ou les surgelés non cuisinés comme j’ai
un frigo avec congélateur maintenant. »
60
Un dernier point, qui rapprocherait nos diététiciennes des autres jeunes femmes est
en lien avec certaines modalités de contrôle alimentaire. Ainsi, « faire attention » fait
également partie des pratiques des diététiciennes « D’habitude je fais plus attention, c’est
que cette semaine » ; « je fais attention aux matières grasses quand je cuisine » (S.P,
entretien n°4). Les modifications des pratiques alimentaires, « outils principaux du
management corporel » (Labarre, 2012), du « faire attention » paraissent semblables à
celles d’un régime (Labarre, 2004), sans pour autant que les jeunes femmes utilisent ce
terme, dans une tendance de légitimité traditionnelle. Il en est de même chez une de nos
diététiciennes : « Tu as déjà suivi un régime? Un vrai régime? Non. Un rééquilibrage
alimentaire ? Non. » (M.M, entretien n°3), où selon elle, lorsque la question est posée
explicitement, elle n’a pas suivi de rééquilibrage. Cette distanciation avec le terme
« régime » pourrait cependant s’expliquer par le fait, que pour une diététicienne, « régime »
soit relié aux termes « régime thérapeutique », alimentation spécifique dans le cadre des
soins, et cela par une rationalité scientifique.
3. Un désengagement dans les règles diététiques ?
Une différence entre les représentations de l’alimentation de nos diététiciennes, est
observable, comme sur la vision de l’équilibre alimentaire sur la durée :
« Déjà pour moi ça se fait sur une journée. » (M.M, entretien n°3)
« Manger équilibré, c’est sur toute la semaine. » (S.P, entretien n°4)
« Sur le long terme oui. Pour moi ça se construit une alimentation équilibrée sur de
longues périodes. » (A.D, entretien n°5)
Sur leurs pratiques alimentaires également, se définit des différences. La première
interrogée, décrit une alimentation totalement équilibrée au quotidien : « Franchement, on
mange équilibré » (M.M, entretien n°3), tandis que ses consœurs, ne jugent pas être en
adéquation avec les règles du PNNS, en la qualifiant, notamment, de « bancale » (S.P,
entretien n°4) :
« Elle est pas vraiment en harmonie avec ce qu’on apprend en cours, ou même le
PNNS. J’ai pas toutes les composantes, j’ai pas autant de légumes qu’il faudrait et
tout. […] Mais après je suis pas catastrophique loin de là. » (A.D, entretien n°5)
61
Au sein même de nos interrogées, les pratiques et représentations diffèrent. Toutes
regrettent d’avoir fait le choix de cette orientation, par le peu de débouchés qu’il existe :
« Au niveau des débouchés, oui » (M.M, entretien n°3),
« J’ai des regrets de pas pouvoir en faire ce que je veux plus tard » (S.P, entretien n°4)
« Quand je vois le peu de débouchés oui. Mais après non parce que j’ai appris des
trucs et maintenant je continue les études dans un truc qui me plaît tu vois. Donc
mitigée un peu. » (A.D, entretien n°5)
Ces difficultés rencontrées dans le métier et évoquées dans le contexte théorique,
sont souvent évoquées chez nos interrogées : « On parle plus du contexte professionnel que
de l’alimentation ! » (M.M, entretien n°3).
Les deux dernières diététiciennes, encore en études semblent donc avoir un rapport
à l’alimentation plus détendue que la première, en exercice dans un centre
d’amaigrissement. Ainsi, le contexte professionnel pourrait expliquer ce phénomène par
une différence d’engagement dans le métier.
Ainsi, les pratiques alimentaires des jeunes diététiciennes s’inscriraient également
dans un modèle alimentaire français et un contexte générationnel, similaires aux autres
jeunes, « on est comme tout le monde, on mange comme eux » (M.M, entretien n°3), sans
véritable jugement de leurs parts : « elle est humaine et elle fait ce qu’elle veut » (O.G,
entretien n°1).
Les hypothèses de recherche développées n’ont pu être qu’en partie vérifiées. De ce
fait, une partie développant une méthodologie probatoire est nécessaire, afin des réponses
plus ciblées à notre problématique.
62
PARTIE 3 : MÉTHODOLOGIE PROBATOIRE
63
La première partie de notre étude, présentant le cadre théorique avec des
références bibliographiques a permis de contextualiser notre travail, avec les concepts
essentiels : les politiques nutritionnelles française, leurs ressemblances, impacts sur la
population générale et son insertion dans la modernité alimentaire. Le métier de diététicien
a également été abordé, avec son cadre règlementaire, et l’aspect identitaire des
diététiciens. Enfin, a été réalisé un cadrage plus général sur l’alimentation des étudiants et
jeunes adultes, avec les spécificités féminines, afin d’être en adéquation avec l’échantillon
de la population étudiée.
Ces recherches sur les concepts clés, ont permis d’aboutir à la problématique suivante :
Quelles identités influencent les modèles, les représentations et les pratiques alimentaires
des jeunes diététiciennes-nutritionnistes ?
Ainsi deux hypothèses ont pu être formulées :

Hypothèse 1 : Le couplage des normes sociales et professionnelles tend à une
rationalité alimentaire chez les jeunes diététiciennes-nutritionnistes, dans le
contexte de la nutritionnalisation ;

Hypothèse 2 : Dans le contexte de modernité alimentaire et d’une redéfinition de la
jeunesse, un découplage entre identité professionnelle et pratiques alimentaires
quotidiennes apparaît.
Dans cette dernière partie, sera explicitée une méthodologie probatoire afin de
répondre aux hypothèses formulées précédemment, à savoir leurs validations ou leurs
infirmations. Dans un premier temps, nous présenterons les différentes méthodes de
collecte de données et plus particulièrement les méthodes qui seront privilégiées dans notre
recherche probatoire, puis nous reprendrons les hypothèses construites auparavant afin
d’expliciter les points à faire ressortir dans la construction de nos outils probatoires et enfin
dans une dernière partie nous présenterons ces outils.
64
Chapitre 1 : Méthodologie de collecte de données
Afin d’obtenir des réponses aux hypothèses formulées au sein de la partie
précédente, il est nécessaire d’effectuer de nouvelles recherches auprès de l’échantillon de
l’étude et cela au moyen de deux méthodes : qualitative ou quantitative. Ces méthodes ont
chacune leurs avantages et inconvénients et s’ajustent plus ou moins aux situations
étudiées. Ainsi, elles forment des outils complémentaires pour obtenir des résultats plus
larges dans le cadre d’une étude probatoire.
1. Méthode qualitative
Ce procédé s’applique à un faible nombre d’individus, afin de recueillir et analyser
des « données descriptives, telles que les paroles écrites ou dites et le comportement
observatoire des personnes » (Taylor et Bogdan, 1984).
Cette méthode ne permet pas une approche globale d’un phénomène étudié afin
d’en obtenir des généralités. Elle permet principalement d’offrir un aperçu des
représentations et perceptions des individus, de chercher à comprendre, décrire, évaluer,
afin d’en ressortir des idées et hypothèses (Kakai, 2008).
La méthode qualitative, ne peut être généralisée à l’ensemble de la population, étant
donné l’échantillon de recherche relativement faible. En effet, cette méthode ne permet pas
de faire résulter des données statistiques afin de généraliser les résultats de l’étude.
L’enquête qualitative permet de prendre en compte certaines subtilités des phénomènes
étudiés (Cardon, Desanti, 2007), notamment par l’utilisation de relances, de questions
supplémentaires permettent de saisir d’autres dimensions au sujet premier :

La reformulation-clarification : « Vous voulez dire que… » ;

L’interprétation : « Ce que vous dites ne s’explique-t-il pas par… » ;

Le recentrage : reprendre la question de départ ;

Les marques d’écoute : « Je vois… » ;

Les demandes d’éclaircissement : « Je ne comprends pas bien… » ;

Les silences significatifs.
65
La méthode qualitative est fondée sur différents procédés : directif, semi-directif,
non-directif et biographique, dans lequel l’interviewer prend plus ou moins de place afin de
diriger l’entretien dans un sens ou non.
Ici seront détaillées les méthodes employées dans le cadre de ma méthodologie
probatoire.
1.1.
L'entretien individuel semi-directif
L’entretien permet de rendre compte « des systèmes de représentations et des
pratiques sociales des individus », et cela par l’accès au point de vue des interrogées, leurs
vécu et expériences (Cardon, Desanti, 2007). Ce type d’entretien nécessite une attitude de
l’enquêteur « plus ou moins directive » (Cardon, Desanti, 2007, op. cit.), où il attend des
informations particulières, mais laisse une marge de liberté à l’échange, et cela dans un
climat serein. Il se base sur un guide d’entretien, élaboré en amont durant la phase
exploratoire. Il se compose de thème et sous-thèmes. Le guide d’entretien d’enquête est
plus précis et formalisé que le guide d’entretien exploratoire qui est moins formel.
Dans cette méthode, l’interviewer accompagne l’enquêté, en « faisant preuve
d’empathie, de relance et d’incitation » (Cardon, Desanti, 2007 op. cit.), pour avoir plus
approfondissements dans le discours, après avoir abordé des questions ouvertes. Ce
procédé permet à l’enquêté de construire plus facilement son propre discours.
Ce qui est intéressant dans cette méthode, comme avec le focus group, c’est le choix
de la population qui permet, dans une population précise du cadre de l’étude,
d’échantillonner afin d’obtenir aussi différents parcours, dans une approche plus globale.
Le lieu de la passation de l’entretien est également à prendre en compte, afin de
participer au climat serein et de confiance de l’entretien.
1.2.
Focus group
Le focus group est un entretien mais réalisé avec plusieurs personnes, de 6 à 12, dans
l’idéal. Cette technique repose sur la dynamique de groupe, permettant d’obtenir des
approfondissements dans les questions. Cette méthode permet de confronter les opinions,
66
avec leurs convergences et divergences et dans ce cas, d’obtenir davantage d’informations,
compte tenu de l’argumentation des interrogés nécessaire26.
L’échantillon est important, car c’est de lui que dépendra la bonne synergie. Par
exemple, que les individus de l’échantillon aient des distinctions entre eux pour assurer une
certaine complémentarité mais également qu’ils sont compatibles en évitant d’avoir un
leader ou des personnalités très opposées, ce pourrait entraver les échanges et la libre
expression.
Afin de réaliser un focus group, deux personnes, extérieures à l’échantillon sont
nécessaires :

Un animateur qui lance le débat, favorise les échanges, et doit être capable
également de gérer la dynamique, le temps et l’atteinte des objectifs ;

Un observateur qui se trouve, en périphérie du groupe et qui note et analyse
les comportements, réactions de chacun.
Pour mener à bien un focus group, un guide d’animation est nécessaire. Il permet de
structurer la séance et les thèmes à aborder.
Pour autant, mener un focus group demande beaucoup d’organisation. Il est
nécessaire de trouver un temps où chaque personne puisse se rendre disponible, s’assurer
de la venue de tous, d’avoir du matériel adapté et un lieu adapté.
Dans ces deux méthodes, la retranscription est nécessaire. Afin de faciliter le travail
de l’interviewer, il est intéressant de commenter les retranscriptions, permettant ainsi le
repérage des thèmes et sous-thèmes qui ressortent.
Concernant leur analyse, on retient principalement l’analyse thématique, où l’on fait
ressortir la structure, les processus et les thématiques significatifs de chacun, afin de
préparer une grille d’analyse thématique. Egalement, une analyse structurale, peut être
appliquée, permettant ainsi de « dégager les éléments de structure communs au discours
des interviewés ou, à l’inverse, les éléments de différenciation, afin de déterminer des
groupes distincts au sein de la population étudiée » (Couvreur, Lehuede, 2002). Ensuite on
26
CHU Nice, Docteur Pia. Recherche qualitative : La méthode des Focus Group. Guide méthodologique pour les thèses en
Médecine Générale [en ligne]. Disponible sur http://www.nice.cnge.fr/IMG/pdf/Focus_Groupes_methodologie_PTdef.pdf
(consulté en mars 2016).
67
retrouve l’analyse par entretien qui « repose sur l’hypothèse que chaque entretien est
porteur du processus psychologique ou sociologique que l’on veut analyser » (Couvreur,
Lehuede, 2002), par une étude longitudinale. L’analyse propositionnelle du discours vise à
reconstituer l’image que l’interviewé a des, relations entre différents objets, dans son
discours. Dernier type d’analyse, l’analyse des relations par opposition qui propose deux
postulats : « l’existence d’une correspondance entre les éléments d’un système pratique et
les éléments d’un système symbolique. Cependant, l’analyse des entretiens semi-directifs,
laisse place à l’interprétation du transcripteur.
La méthode qualitative suit ce déroulé :
Tableau 3 : Organisation d'une enquête qualitative
Étapes
Choix des thèmes à aborder dans le
questionnaire
Choix du/des profils de participants
Construction du guide d’entretien ou
d’animation
Test du guide
Recrutement du / des participants
Entretien
Analyse des données
Précisions
Définition des informations recherchées en
liant avec la problématique et les
hypothèses
Définir les critères de recrutement (ex : âge,
sexe, CSP, ...)
Traduction en question et relance
Ordonnancement des questions en «
entonnoir » (du plus large au plus précis,
voire au plus délicat)
Modifier, plusieurs fois si nécessaire, le
guide
Avec un questionnaire filtre pour respecter
les critères de recrutement définis
Introduction à l'entretien sans trop de
précision
Présentation du / des participants
Suivi des questions
Conclusion et remerciement
Tri et traitement des données
Analyse des contenus
Source : Thibaud Moncé, « L'alimentation des jeunes adultes »
68
2. Méthode quantitative
Cette méthode permet d’apporter de la statistique à l’étude d’un phénomène part
l’interrogation d’un grand nombre d’individus, apportant une représentativité. Elle permet
de dégager les déterminismes sociaux en montrant leurs influences27.
Le choix de l’échantillon est primordial afin de répondre de manière adéquate aux
hypothèses émises et d’avoir le plus de représentativité. Pour le déterminer, on utilise deux
méthodes d’échantillon : probabiliste ou non probabiliste. La première méthode « vise à une
sélection aléatoire dans la population-mère, où chaque individu doit avoir la même chance
que les autres de participer à l’enquête », tandis que la méthode non-probabiliste vise à
« identifier dans la population mère, quelques critères de répartition significatifs puis
d’essayer de respecter cette répartition dans l’échantillon d’individus interrogés »28.
Après avoir défini l’échantillon, il faut déterminer sa taille, en prenant en compte la
« taille de la population mère », afin d’avoir une représentation fiable, un « degré de
précision » et un « degré de confiance »29. Il est également nécessaire de prendre en compte
les contraintes liées à l’enquête : les moyens, le temps et l’homogénéité de la population.
La méthode quantitative peut être administré par l’enquêteur, en face ou par
téléphone, ou par l’interrogé lui-même, « auto-administré ». L’outil principal de la méthode
est le questionnaire, établi sur plusieurs types de questions :

Ouvertes, dans un but exploratoire par l’obtention de données qualitatives ;

Fermées mais qui nécessitent une bonne connaissance du terrain ;

Echelles d’évaluation de type Licker, ou Osgood.
Afin d’analyser les questionnaires, la saisie informatique est nécessaire, avec
notamment, un codage des « questions ouvertes. Des traitements statistiques sont alors
envisageables qu’il s’agisse de tris à plat, de tableaux croisés ou d’analyse des données. »
(Couvreur, Lehuede, 2002, op. cit.). L’analyse statistique comme avantage de se rendre
compte de l’importance du phénomène, de saisir ses mutations grâce à des données
27
Malacrida Alicia. L’enquête quantitative et la construction du questionnaire – Anthropologie de l’Alimentation. M1
Sciences Sociales Appliquées à l’Alimentation, ISTHIA, 2015.
28 Le Maux, Benoît. Statistiques, logiciels et enquête. Université de Rennes 1 - CREM CNRS, 2014.
29 Malacrida Alicia. L’enquête quantitative et la construction du questionnaire – Anthropologie de l’Alimentation. M1
Sciences Sociales Appliquées à l’Alimentation, ISTHIA, 2015.
69
établies dans le temps, de catégoriser les individus, suivant leurs comportements ou opinion
(Couvreur, Lehuede, 2002, op. cit.). Cette méthode permet également de croiser des
données, afin de se rendre compte de relations entre elles.
Ici, sont détaillées les différentes étapes de la méthode qualitative :
Tableau 4 : Organisation d'une enquête quantitative
Étapes
Choix des thèmes à aborder dans le
questionnaire
Échantillonnage
Construction du questionnaire
Test du questionnaire
Administration du questionnaire
Analyse des données
Précisions
Définition des informations recherchées en
liant avec la
problématique et les hypothèses
Définir les critères, la taille de l'échantillon
et le mode
d'échantillonnage (aléatoire, quotas)
Traduction des thèmes en question
Ordonnancement des questions en «
entonnoir »
(du plus large au plus précis, voire au plus
délicat)
Modifier, plusieurs fois si nécessaire, le
questionnaire
En face à face ou auto-administré
Tri et traitement des données
Analyse des contenus
Source : Thibaud Moncé, « L'alimentation des jeunes adultes »
Ainsi, après avoir défini les grands principes de la méthodologie de collecte, dans la
partie suivante seront détaillées les méthodologies utilisées pour la probation des
hypothèses.
70
Chapitre 2 : Protocole de recherche
Dans ce chapitre, les méthodologies susceptibles d’être en adéquation pour
répondre à nos hypothèses seront abordées.
1. Hypothèse 1 : Le couplage des normes sociales et professionnelles tend à une
rationalité alimentaire chez les jeunes diététiciennes nutritionnistes, dans le
contexte de la nutritionnalisation
Pour rappel, cette hypothèse part de deux postulats, l’un concernant la
représentation de la diététicienne et l’autre sur une rationalité existante entre les pratiques
alimentaires et les connaissances des diététiciennes.
Dans le premier cas, une corrélation a été faite entre ce que les personnes
extérieures au métier attendent d’une diététicienne, sur son esthétisme et ce que les
diététiciennes retiennent. Pour tous, la diététicienne doit être une femme mince, sans
soucis de poids, afin d’obtenir une légitimité dans l’exercice du métier envers ses patients
mais également des employeurs. Alors, la diététicienne mettrait en place un certain contrôle
du poids, afin d’être en adéquation avec l’image de la profession. Dans un second temps,
nous avons observé des changements au sein de l’alimentation des diététiciennes
nutritionnistes, durant leurs études et qui se poursuivent après l’obtention de leur diplôme.
Ces changements s’appliqueraient dans un temps dans une rationalité en finalité, étant
donné la prise en compte de l’aspect scientifique et de l’impact biologique de l’alimentation
sur le corps, et dans le sens de l’équilibre alimentaire. Cette rationalité se retrouve dans les
discours et actes quotidiens des diététiciennes interrogées. Egalement ces changements,
s’inscriraient dans une logique professionnelle où les diététiciennes adopteraient ces
comportements afin de préserver une légitimité envers les patients. Pour autant, les
diététiciennes adoptent une rationalité en valeurs, lorsque leur alimentation s’éloigne des
principes du PNNS et se rapprochent de ceux des patients, coexistence du « modèle idéal »
et du « modèle pratique ».
Ces différentes données ont pour objectif principal de mettre en évidence une
identité professionnelle des diététiciennes nutritionnistes justifiée par une pression sociale,
une rationalité scientifique et une rationalité en valeurs.
71
La méthodologie probatoire pourrait s’articuler au travers de deux méthodes : l’une
à destination du grand public et l’autre des diététiciennes nutritionnistes. La première
permettrait dans un temps de capter les connaissances et les représentations des individus
sur l’alimentation équilibrée. Ensuite, un état des lieux sur les connaissances de la profession
sera fait par des questionnements sur les études et les champs d’action de la profession.
Ensuite, sera abordée l’image qui caractérise les diététiciennes, selon les jeunes. La seconde
méthode se focaliserait essentiellement sur les diététiciennes nutritionnistes, avec l’impact
de l’image des autres sur leurs comportements et également leurs changements
alimentaires, avec des redéfinitions concernant leurs visions et le regard des autres sur leur
alimentation.
1.1.
Questionnaire « Représentation des diététiciennes »
Les thèmes abordés dans le questionnaire seront les suivants :

L’alimentation équilibrée

La diététique

Etudes et champs d’action de la profession

Représentation esthétique de la femme et de la diététicienne
Le questionnaire pourra être diffusé sur internet afin d’en faciliter l’analyse. Les
personnes visées par ce questionnaire sont des jeunes, étudiant, ou non, sans critères d’IMC,
n’ayant jamais eu de contact avec la diététique. Le recueil d’une centaine de questionnaires
exploitables sera nécessaire. La limite de l’utilisation de cette méthode pourrait être liée au
manque de connaissances des jeunes sur ce métier.
1.2.
Focus Group « Impacts de la représentation de la diététicienne et des études »
Ce focus group reprendra différents thèmes, en lien avec l’alimentation des
diététiciens et leurs ressentis :

La diététique

Le contexte professionnel

L’image attendue

La notion du plaisir
72

La culpabilité

Les changements alimentaires
Il sera idéalement composé de huit diététiciennes, et il pourra être réalisé plusieurs
fois, afin de multiplier les données et d’obtenir des propos plus détaillés et argumentés et
de confronter des expériences ou remarques similaires. Les diététiciennes ne seront pas
forcément en activité professionnelle. Au contraire, un échantillon composé de
professionnelles en activités, et de professionnelles en étude sera d’autant plus intéressant.
Il devra se réaliser dans un environnement adapté capable d’accueillir un tel groupe de
personnes et avec du matériel adéquat : caméra, micro, afin de faciliter la retranscription et
d’un rétroprojecteur pour diffuser certaines images en lien avec le focus group. L’entretien
comportera également une pause au milieu du focus. Elle sera organisée avec un goûter, où
différents aliments : du salé, du sucré, des fruits, des gâteaux, de l’eau, des sodas… Ainsi,
l’observateur pourra analyser les choix de diététiciennes, et un retour sur les observations
sera possible par l’animateur. Il durera entre 2 heures et 3 heures.
73
2. Hypothèse 2 : Dans le contexte de modernité alimentaire et d’une redéfinition
de la jeunesse, un découplage entre identité professionnelle et pratiques
alimentaires quotidiennes apparaît
Cette hypothèse s’appuie sur deux types de déterminisme, un qui serait lié à l’aspect
culturel, soit l’identité du mangeur français par le modèle alimentaire spécifique et un
déterminisme matériel qu’il est possible de lier au contexte générationnel des diététiciennes
de notre étude.
Le modèle alimentaire français a été abordé sur divers points le caractérisant : les
pratiques quotidiennes, la diversité des produits, le goût, le savoir-faire, la convivialité en
lien avec la commensalité, le plaisir. Les différentes étapes de la jeunesse ont également été
détaillées : départ du domicile familial, indépendance, mise en couple, avec une redéfinition
des pratiques alimentaires que cela peut supposer. Aussi, nous avons pu rapprocher
certaines pratiques de contrôle que mettent en place les diététiciennes et les étudiantes.
Il sera tenté de vérifier cette hypothèse au moyen d’entretiens individuels semidirectifs, afin de saisir les singularités des différents parcours de vie. L’entretien
abordera divers thèmes :

Les pratiques alimentaires

Le modèle alimentaire français

Rapport au corps
L’échantillon sera constitué de diététiciennes nutritionnistes âgées de moins de 25
ans. Il durera environ 1h30 et portera sur une dizaine de diététiciennes. Les entretiens
pourront être analysés de manière comparative au rapport de Laurence Tibère et JeanPierre Poulain.
74
Dans nos méthodes du focus groupe, et des entretiens semi-directifs, l’usage des
différents pronoms personnels « on », « nous » et « je » pourra être une méthode
intéressante, étant donné la réalisation des entretiens et focus par une diététicienne. En
effet, chaque pronom apporte un sens différent et permettrait de recueillir davantage
d’informations. Le « on » permet de projeter ses inquiétudes, afin de permettre notamment
aux interviewés le partage de leurs craintes. Le « nous » permet d’extérioriser des
affirmations identitaires. Enfin, l’utilisation du « je » permet d’impliquer le sujet, et de le
poser comme acteur. Il permet l’individualisation, et l’affirmation de différences (Corbeau,
2004). Egalement, l’interviewer pourra tutoyer les diététiciennes, avec leurs accords, afin
d’obtenir davantage de proximité et être plus à même, pour elles, de se confier.
75
Chapitre 3 : Proposition d'outils probatoires
Ce chapitre recensera les différents outils détaillés précédemment. Ces outils ne sont
pas présentés de manière définitive et seront susceptibles d’être modifiés.
1. Hypothèse 1 : Le couplage des normes sociales et professionnelles tend à une
rationalité alimentaire chez les jeunes diététiciennes nutritionnistes, dans le
contexte de la nutritionnalisation
1.1.
Questionnaire « Représentation des diététiciennes »
Durée estimée : 20 minutes
Le questionnaire se situe en annexe H.
1.2.
Focus Groupe « Impacts de la représentation de la diététicienne et des études »
Ici est recensé le guide d’animation pour la mise en place du focus group. Il est
présenté à l’état d’ébauche, car sa construction se basera sur les résultats de l’enquête
quantitative du questionnaire « Représentation des diététiciennes ».
Contexte : Salle équipée du DTICE de l'Université Toulouse Jean-Jaurès
Durée estimée : 2 heures
Tableau 5 : Guide d'animation du focus group
Thèmes abordés
Questions
Présentation des animatrices, du contexte de l’étude, de l’organisation du focus,
proposition du tutoiement
Tour de tables des participantes : prénom, âge, cadre de vie, activité professionnelle,
études,…
Les motivations à exercer le métier
La profession est-elle suffisamment représentée ?
Le contexte
Quelles sont les difficultés du métier, ses évolutions ?
professionnel
Quel regard portez-vous sur les études ? Réorientation et
poursuite des études
Qu’est-ce que la diététique ?
La diététique
Qu’est-ce que bien manger ? (bien manger, bon manger, beau
manger, manger nutritionnel…)
76
Qu’est-ce que l’équilibre alimentaire ? (variété des produits,
saison, composantes,…)
Pouvez-vous nous parler de la mise en application des
connaissances assimilées lors des études ? (impacts sur
l’alimentation, sur la santé, sur « le moral », sur la corpulence)
Que vous évoque cette assiette :
L’image attendue
Pensez-vous que la diététique a une mauvaise image auprès du
grand public ?
Quelles sont les idées reçues ?
Les retours que vous avez ?
Quelles sont les réactions des autres, de votre entourage, à la
vue de votre alimentation ?
Vos ressentis ? Déconcertée, surprise, déstabilisée, amusée,
agacée, stressée…
Cela vous impacte-t-il ?
Pensez-vous être légitimité s’il n’y a pas d’adéquation avec les
attentes des patients ?
Et vous quelle idée aviez-vous d’une diététicienne avant de faire
vos études ?
Est-ce différent aujourd’hui ?
Et si cette personne était diététicienne :
Qu’en pensez-vous ?
Dans le contexte professionnel, les patients font référence au
PNNS ? A la pression médiatique ?
Les rôles des médias et
Qu’en pensez-vous ?
PNNS dans les normes
Etes-vous influencées ?
esthétiques
Cela joue-t-il sur vos pratiques ?
Qu’évoque pour vous le terme de « normes » ?
77
N’est-ce pas perturbant pour le public d’entendre autant de
règles ?
Et vous ?
Pause goûter
Qu’est-ce qu’un plaisir ?
Définition dans le contexte professionnel, par rapport à celle de
la vie quotidienne
Plaisir alimentaire, qu’est-ce qui vous vient à l’esprit ?
Plaisir et diététique, est-ce conciliable ?
Si je vous montre cette image qu’en pensez-vous ?
La notion du plaisir
La culpabilité
Les changements
alimentaires
Conclusion
Qu’est-ce qu’un excès ? (quantité, fréquence, choix du
produits…)
Vous arrive-t-il de culpabiliser ?
Pourquoi ? Dans quel contexte ? Après avoir mangé quoi ?
L’organisation de l’alimentation au quotidien : courses,
équipements, faire la cuisine, choix des produits…
Avez-vous modifié vos habitudes alimentaires depuis le départ
du domicile familial ? (repas plus équilibré, suppression de
certains aliments, grignotages, augmentation de la
consommation de certains aliments…)
Les transformations dans les modèles alimentaires par rapport
au modèle parental
Les transformations dans des situations précises : sorties,
invitations chez d’autres personnes, quand on est hôte…
Les aspects positifs et négatifs de ces changements
Avez-vous quelque chose à ajouter ?
Qu'avez-vous pensé de cet échange ?
78
2. Hypothèse 2 : Dans le contexte de modernité alimentaire et d’une redéfinition
de la jeunesse, un découplage entre identité professionnelle et pratiques
alimentaires quotidiennes apparaît
Contexte : Domicile de l'interrogé
Durée estimée : 1 heure
Dans un premier temps je te remercie de m’accorder un peu de ton temps. J’ai voulu
t’interroger car dans le cadre de mon master, je dois réaliser un mémoire que j’ai choisi de
faire sur les diététiciennes et l’alimentation, et donc c'est pour cela que j’ai voulu
m’entretenir avec toi. Si ça ne te dérange pas, je vais enregistrer notre entretien pour que
je puisse l’analyser plus facilement. Tout ce que tu diras restera anonyme et confidentiel.
Tableau 6 : Guide d'entretien
Thèmes
Questions possibles
Dans un premier temps acceptezPrise de données vous le tutoiement ?
Je te propose de te présenter
Alimentation
 Journée alimentaire
Combien de repas prends-tu par
jour ?
Comment se composent-ils ?
Habituellement, où prends-tu tes
repas ?
Seule, ou accompagnée ?
Pourrais-tu me raconter ta
journée alimentaire d’hier ?
Ton alimentation a-t-elle changé
dans les dernières années ou
mois ?
Quels sont les changements ?
Pourquoi as-tu effectué ces
changements ?
Relances et notes
Nom, Prénom
Âge
Situation familiale
Situation professionnelle
Conformité au modèle alimentaire
français et aux normes
nutritionnelles
Contexte, influence des pairs,
plaisir d’être ensemble
Composantes, heures, structure,
environnement
Etudes, mise en couple,
déménagement, profession,
nouvelles connaissances, valeurs
Produits (produits sucrés, produits
frais), techniques, composants,
prise alimentaires, horaires…
Autonomie, contrainte
budgétaire, place de la
commensalité, manque de savoir-
79
faire culinaire, ou non, temps,
travail…
Modèle
alimentaire
français
Alimentation et
santé
Représentation
esthétique de la
femme et de la
diététicienne
 Organisation alimentaire
Fais-tu la cuisine ? Apprécies-tu la Contrainte, plaisir, héritage
faire ? D’où vient ta façon de
familial, curiosité culinaire,
cuisiner ?
expérimentation
Budget, organisation, courses à la
Où fais-tu tes courses ?
semaine, au jour le jour, liste…
Comment choisis-tu tes
Attrait pour la nouveauté, aspect
produits ?
nutritionnel, habitude, prix…
Structure de la journée, structure
Qu’est-ce qui caractérise
des repas, produits, savoir-faire,
l’alimentation des Français selon
cuisine, plaisir, convivialité,
toi ?
commensalité…
Quelles sont les différences avec Produits, pratiques, structure des
les autres pays ?
repas…
Que penses-tu de la gastronomie Savoir-faire français, produits
française ?
français, prestige
Trouves-tu légitime que le repas
gastronomique français ait été
reconnu comme patrimoine
immatériel de l'humanité par
l'UNESCO ?
Qu’est-ce que signifie le terme
Régime, thérapeutique, régime
régime ?
amincissant
As-tu déjà suivi un régime ?
Sans forcément consulter une
diététicienne
Un rééquilibrage alimentaire ?
Pour être en bonne santé qu’elle Facteur primordial, nécessaire,
est la place de l’alimentation ?
facteur parmi tant d’autres
Que penses-tu du phénomène de Réseaux sociaux, mise en avant
modèle « healthy » ?
d’un mode de vie sain, sport…
PNNS : 30 minutes d’activités
Pratiques-tu une activité
physique ?
physiques quotidiennement
As-tu l’habitude de te peser ?
Pourquoi ? Regard au niveau de
A-t-il évolué dernièrement ?
l’évolution du poids
Ton poids te convient-il ?
As-tu déjà été mal à l’aise vis-à-vis Pourquoi ? Quelles
de ton corps ?
circonstances ?
Bonne corpulence, trop mince,
Que penses-tu de l’image des
mannequins dans les magazines ? trop maigre, trop retouchée
Pour toi, qu’est-ce que grossir ?
80
Pour toi, qu’est-ce que maigrir ?
Désir de changement ? Par quels
Es-tu satisfaite de ton
apparence ?
moyens ?
D’après toi, sur cette photo où te situes-tu ? 30
L’Échelle de Stunkard et les valeurs d’IMC respectives.
Conclusion
Où aimerais-tu te situer ?
Aurais-tu d’autres remarques ?
Je te remercie pour le temps que tu m’as accordé.
30
1 : IMC à 18,3, corpulence maigre ; 2 : IMC à 19,3, corpulence normale ; 3 : IMC à 20,9, corpulence normale ; 4 : IMC à
23,1, corpulence normale ; 5 : IMC à 26,2, surpoids ; 6 : IMC à 29,9, surpoids ; 7 : IMC à 34,3, obèse ; 8 : IMC à 38,6, cbèse ;
9 : IMC à 45,4, obèse
81
Conclusion
82
A
travers ce mémoire, nous avons pu entrevoir les différents cadres
auxquels les diététiciennes sont attachées. Le PNNS d’abord, dans un
contexte
de
nutritionnalisation,
qui
pose
différentes
normes
nutritionnelles à l’ensemble de la population. Ensuite, dans le contexte
professionnel, où de nouvelles normes sont inculquées par les études et dispensées dans
leurs pratiques des techniciennes. Enfin, par un contexte de génération, partagées entre
études, indépendance, mise en couple, les diététiciennes seraient soumises à des
changements du modèle alimentaire.
La nutritionnalisation et la socialisation professionnelle impliqueraient des
changements de rationalité chez nos jeunes diététiciennes, traduits par des normes et
attitudes différentes, s’appliquant à leurs pratiques alimentaires. La pression sociale
entretenue par le besoin de légitimité les amènerait alors à adopter certains mécanismes
dans leurs alimentations.
Aussi, les pratiques alimentaires des jeunes diététiciennes s’inscriraient également
dans un modèle alimentaire français, par l’intériorisation de ses valeurs, et dans un contexte
générationnel, similaires aux autres jeunes, en vivant les mêmes étapes. Les jeunes
diététiciennes partageraient alors les mêmes « marqueurs d’identité » que leurs pairs.
Ainsi, dans une interaction entre ces cadres, ces identités, la jeune diététicienne
nutritionniste construirait sa propre identité de mangeur, entre équilibre alimentaire,
rationalité scientifique, quête de légitimité, modèle alimentaire français, et effet de
génération. Les diététiciennes apparaissent comme un exemple même de mangeur, dont
« l’alimentation, un acte social total, ne peut être réduite à sa dimension biologique » et
dont « les pratiques alimentaires [participent] à la construction des identités sociales »
(Poulain, in Gaspar, 2015).
Les diététiciennes avec leurs connaissances techniques seraient influencées par les
normes culturelles, ainsi la nutrition et la culture se mélangent. En effet, la médicalisation
de l’alimentation tendrait à homogénéiser les connaissances diététiques, car connues par
tous. Ainsi un « relativisme nutritionnel » (Fournier, 2014) apparaîtrait, où les règles
nutritionnelles seraient appliquées différemment selon les cadres dans lesquels les jeunes
diététiciennes nutritionnistes s’intègrent.
83
Le contexte de notre mémoire, initié durant une année universitaire de master 1, ne
permet pas une analyse et une recherche plus approfondie de l’objet de notre étude. C’est
pourquoi une méthodologie a été proposée, afin de poursuivre les recherches entreprises
sur les jeunes diététiciennes et l’alimentation.
Notre étude s’est attardée principalement sur un échantillon de jeunes femmes, sans
enfants. Pour autant, la nutritionnalisation, s’engageant dans tous les domaines de la vie, il
serait également intéressant d’élargir les recherches à d’autres classes d’âge ou sur d’autres
étapes de la vie. Notamment, la période de la première maternité, où nos diététiciennes
acquièrent toutes les connaissances scientifiques sur l’allaitement ou l’alimentation du tout
petit, durant leurs études, mais restent également des femmes, sans expérience face à une
première grossesse, comme tout à chacune.
84
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alimentaire, in POULAIN Jean-Pierre, Pratiques alimentaires et identités culturelles, les
études vietnamiennes, 1997, n°125 et 126, p. 31 – 126
POULAIN Jean-Pierre, Modèle alimentaire, in POULAIN Jean-Pierre, Dictionnaire des cultures
alimentaires, Paris : Presse Universitaire de France, 2012, p. 881 – 888
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alimentaires, in Fischler Claude, Les alimentations particulières. Mangerons-nous encore
ensemble demain ? Odile Jacob, 2013, p. 247 – 259
Région Midi Pyrénées. Programme de recherche SHS. Tibère Laurence, Poulain Jean-Pierre,
L’alimentation des étudiants : adaptation et réorganisation des modèles alimentaires, 2010,
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marseille.fr/spip/sites/www.cio-digne-manosque/spip/IMG/pdf/taux_de_pression_bts
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Académie Clermont Ferrand. Dossier de Presse InfoSup, 2013, 6 p [en ligne]. Disponible sur
https://www.ac-clermont.fr/fileadmin/user_upload/Orientation/ Banque__dossier_20132014/bts_03.pdf pdf (consulté en février 2016).
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ligne].
Disponible
sur
http://web.ac-toulouse.fr/automne_modules_files/
pDocs/public/r23453_61_apb3_-_taux_de_pression_-_juin2013.pdf. (consulté en février
2016).
89
Tables des signes et abréviations
AFDN : Association Française des Diététiciens Nutritionnistes
AFSSA : Agence Nationale Française de Sécurité Sanitaire des Aliments
ANSES : Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation
BcS : Bachelor of Sciences
BTS : Brevet de Technicien Supérieur
DREES : Direction de la Recherche, des Etudes, de l’Evaluation et des Statistiques
DUT : Diplôme Universitaire de Technologie
ENNS : Etude Nationale Nutrition Santé
IMC : Indice de Masse Corporelle
INPES : Institut national de prévention et d'éducation pour la santé
OMS : Organisation Mondiale de la Santé
PACES : Première année commune aux études de santé
PNA : Plan National pour l’Alimentation
PNNS : Plan National Nutrition Santé
PO : Plan Obésité
S : Bac Scientifique
ST2S : Bac Sciences et Technologies de la Santé et du Social
90
Annexes
91
Table des annexes
ANNEXE A : GUIDE D’ENTRETIEN EXPLORATOIRE N ° 1 ..................................................................... 93
ANNEXE B : GUIDE D’ENTRETIEN EXPLORATOIRE N ° 2 ..................................................................... 94
ANNEXE C : ENTRETIEN EXPLORATOIRE N ° 1 ................................................................................. 97
ANNEXE D : ENTRETIEN EXPLORATOIRE N ° 2 ............................................................................... 103
ANNEXE E : ENTRETIEN EXPLORATOIRE N ° 3................................................................................ 107
ANNEXE F : ENTRETIEN EXPLORATOIRE N ° 4 ................................................................................ 118
ANNEXE G : ENTRETIEN EXPLORATOIRE N ° 5 ............................................................................... 128
ANNEXE H : QUESTIONNAIRE QUANTITATIF « REPRESENTATION DES DIETETICIENNES »....................... 136
92
Annexe A : Guide d’entretien exploratoire n ° 1
Dans un premier temps je te remercie de m’accorder un peu de ton temps. J’ai voulu
t’interroger car dans le cadre de mon master, je dois réaliser un mémoire que j’ai choisi de
faire sur les diététiciennes et l’alimentation. C'est pour cela que j’ai voulu m’entretenir avec
toi, je te remercie de m'accorder un peu de ton temps. Si ça ne te dérange pas, je vais
enregistrer notre entretien pour que je puisse l’analyser plus facilement. Tout ce que tu diras
restera anonyme et confidentiel.
Généralités



Connais-tu cette profession ?
Ses missions ? Les études ?
Penses-tu que les diététiciennes ont une véritable légitimité dans l’éducation
alimentaire ? Les bons outils pour ?
Imaginaire de la diététicienne et pratiques professionnelles













Quel est le premier mot qui te vient à l’esprit quand si je te dis diététicienne ?
Pourquoi ?
As-tu déjà rencontré une diététicienne ? Pour quelles raisons ?
Stress, angoisse à son encontre ? Peur du jugement ?
Si tu devais en rencontrer une, aurais-tu appréhension ?
Qu’est-ce qui fait une bonne diététicienne selon toi ?
Dans ton imaginaire, comment vois-tu une diététicienne ?
Si tu en rencontres une différente de ton idée quelle serait ta réaction ?
La diététicienne type a-t-elle un physique précis dans ton imaginaire ?
Par exemple, consulter une diététicienne ronde serait une gêne pour toi ? Aurais-tu
confiance en elle ?
Dans ton esprit, comment vois-tu le mode de vie d’une diététicienne ?
Son alimentation ? Sport ?
Penses-tu que la diététicienne doit être irréprochable dans son mode de vie au vue
de ce qu’elle préconise ? Une certaine rationalité ?
Si je te dis plaisir et diététique ?
93
Annexe B : Guide d’entretien exploratoire n ° 2
Dans un premier temps je te remercie de m’accorder un peu de ton temps. J’ai voulu
t’interroger car dans le cadre de mon master, je dois réaliser un mémoire que j’ai choisi de
faire sur les diététiciennes et l’alimentation, et donc c'est pour cela que j’ai voulu
m’entretenir avec toi. Si ça ne te dérange pas, je vais enregistrer notre entretien pour que
je puisse l’analyser plus facilement. Tout ce que tu diras restera anonyme et confidentiel.
Données sociales




Nom, Prénom
Âge
Situation familiale
Vis-tu seule ? au domicile familial ? en couple ? en colocation ?
Parcours scolaire






Quel type de bac as-tu ?
La diététique a-t-elle été ta première orientation à la sortie du bac ?
Si oui,
o Pourquoi ?
o Attrait pour la diététique, aider les autres, la cuisine, expérience
personnelle dans la diététique
o Prise en compte des avis d’autrui ?
Si non,
o Quelle a été la première voie choisie ?
o Prise en compte des avis d’autrui ?
o Pourquoi le choix de la diététique ?
o Prise en compte des avis d’autrui ?
PNNS, magazine, influence dans le choix ?
Remarques des autres (famille, amis proches, inconnus) pour le choix de vos études
/ quand vous faisiez vos études / après
La profession





Que pensez-vous du métier de diététicien-nutritionniste ?
Mérite-t-il des améliorations ?
Penses-tu que le métier est en évolution ?
L’importance du métier ?
Regret d’avoir choisi cette voie ?
Image de la diététicienne






Dans ton imaginaire, as-tu une idée de la diététicienne avant de commencer les
études ?
As-tu déjà rencontré des personnes en ayant ? Quelles idées ?
Justement, penses-tu qu’être diététicienne est un métier basé sur l’apparence ?
Crois-tu que la diététicienne doit avoir un physique particulier au vu de son travail ?
Il y a une mauvaise image de la diététique ? Evolution par rapport toi ?
Hygiène de vie : tabac, alcool (aller plus loin que l’alimentation)
94
Cuisine










Qu’as-tu mangé aujourd’hui ? Hier ? -> journée type Comment se composent tes
repas ? (entrée, plat, dessert) Repas classique / sophistiqué
Comment juges-tu ton alimentation ?
Ça t’ennuie de manger équilibré des fois ?
Parles-tu d’alimentation avec tes amis ? Dans quels contextes ? Et avec votre
famille ?
Comment les autres jugent ton alimentation ? (remarques de la famille, amis,
camarades de classe, collègues)
Apprécies-tu cuisiner ? Temps de cuisine
Faisais-tu la cuisine avant d’entrer en BTS ?
Quels sont tes souvenirs des cours de cuisine dispensés durant la formation de BTS
Diététique ? (plaisir d’apprendre, de cuisiner, de tester, de découvrir de nouvelles
choses)
As-tu changé tes habitudes alimentaires pendant le BTS Diététique ? (repas plus
équilibré, suppression de certains aliments, grignotages, augmentation de la
consommation de certains aliments…)
Achats : où sont-ils effectués ? qu’est-ce que tu regardes quand tu fais tes courses,
quand tu choisis tes produits ? produits du rayon diététique ?
Changements alimentaires



Avez-vous changé certains de tes comportements suite au BTS Diététique ?
o Alimentation : choix des produits, des restaurants, des modes de cuissons
o Technique culinaire
o Relations aux autres
o Curiosité : découverte de nouveaux produits, nouvelles saveurs
o Statut dans la famille
o Quels changements ? Habitudes ? Nouveautés ? Jugements // aux
évolutions
Penses-tu être plus détendu par rapport à l’alimentation, à ton alimentation
qu’avant tes études ? Par rapport aux autres ?
Le fait que tu sois diététicienne, vois-tu une évolution du comportement des autres
pendant des repas ?
Alimentation comme les autres




Différence avec les autres de ton âge ?
C’est quoi l’alimentation de quelqu’un de notre âge ?
Ton alimentation s’en éloigne ?
Les gens ont les clés pour manger équilibré d’après toi ?
Diététique, plaisir et culpabilité




Qu’est-ce que « manger équilibré » ?
Pensez-vous manger équilibré ?
Qu’est-ce que manger ?
Qu’est-ce que la nutrition ?
95





Qu’est-ce que la diététique ?
Pensez-vous être légitime à donner des conseils alimentaires si votre alimentation
n’est pas équilibrée ?
Si je dis plaisir alimentaire, qu’est-ce qui te vient à l’esprit ?
Si je dis plaisir et diététique
Vous êtes-vous déjà senti coupable en mangeant qqc ?
Sport et poids





Pratiques-tu une activité physique ?
Tu pèses-tu ? A quelle fréquence ? Pourquoi ?
As-tu pris du poids ou perdu durant les études ? / depuis le départ du domicile
familial ?
As-tu déjà suivi un régime ? Quel type ? Quand ? Comment s’est passé cette
expérience ? Quelqu’un t’avait-t-il conseillé ?
As-tu déjà vécu une situation où tu t’es senti mal avec votre corps ou une partie de
votre corps ?
96
Annexe C : Entretien Exploratoire n ° 1
Date : Lundi 29 Février
Contexte : Domicile de l'interrogé
Durée : 20 minutes.
Enquêté : O.G, Femme 21 ans, étudiante
Intervieweur : I
I : Dans un premier temps je te remercie de m’accorder un peu de ton temps. J’ai voulu
t’interroger car dans le cadre de mon master, je dois réaliser un mémoire que j’ai choisi de
faire sur les diététiciennes et l’alimentation. C'est pour cela que j’ai voulu m’entretenir avec
toi, je te remercie de m'accorder un peu de ton temps. Si ça ne te dérange pas, je vais
enregistrer notre entretien pour que je puisse l’analyser plus facilement. Tout ce que tu diras
restera anonyme et confidentiel. Tout ce que tu diras restera anonyme et confidentiel.
Principalement, je vais m’intéresser à l’image des diététiciennes.
O.G : D’accord, ok.
I : Connais-tu la profession ?
O.G : Que veux-tu dire par connaitre ?
I : Est-ce que tu en as déjà entendu parler ?
O.G : Oui.
I : Est-ce que tu connais les missions qu’elles peuvent avoir ? Je te parle seulement des
diététiciennes femmes.
O.G : Pour moi une diet’ c’est quelqu’un qui te fait maigrir, clairement. Je pense aussi
qu’elles peuvent travailler en hôpitaux, mais pour moi ça s’arrête là.
I : L’amaigrissement donc, pas d’autres secteurs d’activités ?
O.G : Non.
I : Connais-tu les études pour devenir diététicienne ?
O.G : Je pense que ça doit être un BTS, mais sinon aucune idée.
I : Donc un bac + 2 ?
O.G : Oui.
I : Est-ce que tu penses que les diététiciennes ont une réelle légitimité dans l’éducation
alimentaire ? Est-ce qu’elles servent vraiment à quelque chose ? Est-ce qu’elles ont vraiment
les outils pour ?
O.G : Je pense qu’il faut diviser la question en deux, est-ce qu’elles ont vraiment les outils
pour ? Je ne sais pas. Est-ce qu’elles sont légitimes ? Oui, je pense que oui. Mais après la
nutrition c’est quand même une science qui est hyper remise en cause. Tous les 2 matins tu
as un nouveau régime. Donc oui je pense qu’il y a des choses qui sont sûres et que tu ne
peux pas revenir dessus, mais faut pas qu’elles s’emballent trop, elles ne vont pas nous
refaire le monde.
97
I : SI je te dis diététicienne, quel est le premier mot qui te viens à l’esprit ?
O.G : Tout ce qui est autour de la minceur, etc. Après c’est mon vécu aussi. Je pense que je
n’aurais pas du tout la même approche si je n’avais pas eu ce vécu par rapport à certaines
diététiciennes, j’aurais peut-être d’autres représentations, mais, moi, quand on me dit
diététicienne pour moi ce n’est pas une bonne représentation qui me vient à l’esprit.
I : C’est péjoratif ?
O.G : Plutôt oui.
I : Donc tu dis minceur par rapport à ton vécu ?
O.G : Oui.
I : Donc tu as déjà rencontré une diététicienne ?
O.G : Oui, plus d’une même. Quand j’étais petite, j’ai vu diverses diététiciennes, au début
c’était un peu comme un certain culte de la minceur, il fallait que les enfants et même tout
le monde soient nickel, minces et tout ça. Et on m’a fait faire énormément de régimes
différents, et pour un résultat bidon, en fait, avec tous des méthodes différentes. Certains
c’étaient des trucs très stricts, d’autres par médicaments et maintenant avec le recul je me
demande « mais comment on peut faire ça à un enfant ? », parce que déjà faire des régimes
aux enfants je trouve ça ridicule et c’est vrai que pour moi ça a jamais été des personnes
très tendres. J’en ai rencontré vraiment beaucoup, pourtant je n’étais pas non plus en
obésité extrême, ou je ne sais trop quoi. Pour moi c’est vraiment pas du tout une bonne
représentation.
I : Qui t’a orienté vers les diététiciens ? C’étaient les médecins ? Tes parents ?
O.G : C’était le médecin traitant, non mon père ne voulait pas. Après quand ma mère est
partie travailler, j’avais comme un sentiment d’abandon et j’ai eu une grosse prise de poids
et je pense que ça aurait été plus efficace de voir un psy plutôt qu’une diet. Le problème a
été pris à l’envers, je pense. Quand il y a un problème ailleurs et que tu essaies de résoudre
ce problème mais pas le bon au final ça sert à rien, ça fait une courbe de poids qui est comme
ça (montre une flèche qui augmente)… A 6 ans c’est pas tellement normal, tu vois.
I : Est-ce que tu rendais compte à ton âge que tu allais voir une diététicienne, ou tu réalisais
pas tellement…
O.G : SI tu réalises… Franchement, fallait voir ce qu’ils donnaient comme régime… Il y en
avait une, je finissais de manger et j’avais faim encore. C’était limite de l’acharnement, et
moi je l’ai très mal vécu et il y avait cette angoisse de se dire « putain quand je vais passer
sur la balance, est-ce que je vais avoir pris ou pas ? » c’était limite presque terrorisant d’y
aller.
I : Le stress, l’angoisse. Tu avais peur du jugement ?
O.G : Oui complètement, tu as tes parents qui te disent « putain je te paie la diététicienne
et tu manges n’importe quoi à côté », tu as la diététicienne qui te dit que ce n’est pas bien.
En plus de ça il se peut que tes copains à l’école ils le sachent, déjà qu’en plus il y a un regard
parce que tu ne fais pas le même poids que eux. C’est limite traumatisant, c’est vraiment
une mauvaise expérience.
I : Et si aujourd’hui te devais en rencontrer une ?
98
O.G : Non, maintenant j’assume totalement le fait d’avoir 10 kilos en plus.
I : Et si on sort du contexte de la minceur, tu as une maladie métabolique il te faut vraiment
un régime approprié, une maladie au rein par exemple et il te faut un régime spécial car
c’est la maladie qui veut ça et non dans un désir de minceur. Ça changerait ton
appréhension, ton angoisse ?
O.G : Déjà ça ne viendrait pas de moi, donc ça me ferait encore plus chier, mais je pense que
je me protégerais. Vu que c’est moi qui choisirai la personne ou quoi, je n’irai pas voir
n’importe qui, je pense que je prendrais des conseils extérieurs et ça ne se reproduirait pas
une deuxième fois.
I : Et une peur du jugement toujours, étant donné que c’est dans le cadre d’une maladie et
non pas un désir de minceur ?
O.G : En fait maintenant le jugement je m’en fous, puisque quand tu as toujours été comme
ça au final tu t’en fous. Tu dis, je ferais jamais un 36 et tu vies comme ça. Je suis comme ça
et pas autrement, je vais bien, je fais du sport. On le sait que tout le monde ne peut pas faire
un 38 on n’est pas toutes pareilles loin de là et donc au bout d’un moment tu t’en fous
clairement.
I : Qu’est ce qui fait une bonne diététicienne selon toi ?
O.G : Euh, je ne sais pas. Je pense qu’il y a le fait qu’elles essaient de comprendre la personne
et ce qu’elles voient en face d’elle.
I : Un individu pas un poids ?
O.G : Oui plus qu’un poids mais un individu, une histoire.
I : Un aspect psychologique ?
O.G : Oui voilà, qu’elles te sortent pas un papier en te disant qu’il faut manger 100 g
d’haricots verts, 200 g de machins tous les jours. Dans ton assiette c’est féculent, c’est bon
quoi à un moment. J’ai ce souvenir-là, qu’elles nous prennent un peu pour des cons, fin c’est
tellement individuel l’alimentation, je veux dire je le vis comme ça, d’ailleurs parler de ce
que je mange je n’aime pas, je n’aime pas qu’on regarde ce que je mange j’ai horreur de ça,
limite maintenant ça me gêne. Parce qu’on est tellement venu mettre le nez dans mon
assiette et se mêler de ce que je mangeais. Enfin je veux dire je me souviens des repas de
quand j’étais petite il y avait la balance sur la table, il fallait tout peser. Maintenant, c’est
plus jamais.
I : Est-ce que tu penses que si tu avais cette expérience mais que ça serait venu de toi, ça
serait différent ? Parce que là tu étais contrainte finalement.
O.G : Je ne sais pas, j’étais petite, il faudrait mettre ça dans un contexte où j’étais plus
grande. Oui peut-être que je l’aurais vécu différemment, je ne sais pas.
I : Dans ton imaginaire, comment tu vois une diététicienne ?
O.G : (rires) Plutôt grande et très très très fine. C’est bête mais cheveux courts, je sais pas
pourquoi ! Quelqu’un de très sec.
I : Masculin au final ?
O.G : Oui presque, mais vraiment maigre plus que mince.
99
I : Donc un physique précis, et des qualités personnelles, en terme de personnalité ?
O.G : Pour la personnalité quelqu’un qui est à la limite du rustre, qui n’est pas du tout
attentionné, un peu dur. Toujours au vécu que j’ai eu, ce n’était pas vraiment des gens qui
… fin avec moi ça a été dur.
I : Et si tu en rencontres une avec un physique, une image différente que celle que tu as,
comment tu réagirais ?
O.G : Je me dirais que tout est possible, non après oui ce n’est pas parce que tu es
diététicienne que tu fais forcément un 38 et que tu es une « connasse ». Je suis sûre qu’il y
a des diététiciennes qui sont très bien. Tu ne peux pas toujours tout cataloguer. Après ça ne
choquerait pas.
I : Et si tu consultes une diététicienne qui est ronde, c’est une gêne pour toi ? Est-ce que tu
aurais confiance en elle ?
O.G : Beh c’est comme si tu vas chez un cordonnier qui a des chaussures trouées. C’est bête
mais ça dépend, qu’est-ce que tu appelles ronde ? C’est sûr que si elle fait 150 kilos, tu vas
lui dire, qu’est-ce que tu vas me donner des conseils alors que tu aurais besoin d’y aller.
I : Pas ronde, mais avec un physique qui est différent de la maigreur que tu me parlais tout
à l’heure, avec un physique un peu plus enveloppé. Plus mince que toi mais pas non plus
sèche.
O.G : Ca peut-être rassurant, parce que tu te dis que la nana elle n’est pas forcément dans
l’extrême, tu peux aussi te dire qu’elle te comprend. Et en même temps tu te dis « est-ce
que je suis ses conseils ou pas ? ». T’as deux extrêmes.
I : Comment tu vois le mode de vie d’une diététicienne ?
O.G : Je ne sais pas. J’étais persuadée qu’une diététicienne ne mangeait rien, 3 graines et
c’est fini. Et maintenant quand je te vois manger à toi, au secours quoi. Mais pour moi avant
les diététiciennes ne mangeaient pas grand-chose.
I : Presque des troubles du comportement alimentaire, ou qui mangeaient équilibré et sain ?
Plus le côté maladif ?
O.G : A la limite oui le côté maladif, c’est con la mauvaise image que j’ai. J’ai tellement eu…
I : Même pas une alimentation équilibrée, restrictive plutôt ?
O.G : Si équilibré quand même, mais plus proche de la restriction. Je ne dis pas que les
diététiciennes sont anorexiques, loin de là, mais très gros contrôle.
I : Pas d’écarts autorisés, par exemple…
O.G : Si après elles sont humaines donc je pense que si des écarts, mais elles devaient tout
le temps contrôler. Et encore le fait qu’elles se contrôlent à elles ce n’est pas un problème
mais je me dis qu’est-ce que ça pourrait être de vivre avec une diététicienne, ça je ne
pourrais pas. Vivre avec quelqu’un qui est diététicienne je me sentirais fliquée en
permanence. Alors qu’au contraire pas du tout, je sais pas.
I : Et le sport ?
O.G : Alors pour moi je n’associe pas du tout diététicienne et sport.
100
I : Que l’alimentation, pas l’hygiène de vie en général?
O.G : Dans ma tête elles sont très maigres mais pas musclées. Je l’associe pas au sport. Plutôt
au « bien manger ».
I : Est-ce que tu penses qu’une diététicienne doit être irréprochable dans son mode de vie,
vu ce qu’elle préconise ?
O.G : Non je ne pense pas. Enfin, c’est sûr tu arrives chez une diététicienne elle boit un coca
c’est moyen mais devant ses patients elle doit être irréprochable, ne pas manger un
sandwich, mais en dehors elle est humaine et elle fait ce qu’elle veut. Mais à ce compte-là
elle sait qu’elle aussi elle est comme tout le monde qu’elle n’aille pas te dire « il ne faut
surtout pas manger ça ». Moi c’est ça qui me dérange, c’est qu’elles aient l’impression, de
ce que j’ai le souvenir, et quand t’as une diet qui te dit « jamais un goûter, non tu es fou à la
limite une demi pomme pas plus », mais tu te dis « est-ce qu’elles se rendent compte qui
vont à l’école, qu’ils voient les autres enfants manger d’autres trucs », enfin qu’elles aient
un peu plus les pieds sur terre et qu’elles se rendent compte du monde qui entoure.
I : Et si tu consultes une diététicienne, tu sors tu vas dans un restaurant, elle aussi et elle se
prend un hamburger, juste avant elle t’a donné un régime avec tant de grammes de trucs ?
O.G : C’est contradictoire, la femme elle est mince, quelle chanceuse, quelle « connasse »,
vivement que je sois comme ça. Mais en même temps tu te dis « super elle te dit de manger
ça et au final c’est tu fais ce que je dis, mais pas ce que je fais ». Donc c’est à double
tranchant.
I : Dernière question, si je te dis plaisir et diététique. Est-ce que c’est lié ?
O.G : Pour moi ce n’est pas contradictoire. Ça peut-être lié, pour moi dans mes études on
nous a appris en restauration, que le plaisir c’est ok mais il faut quand même ne peut pas
mettre une bouteille d’huile et respecter ce que tu mets dans l’assiette.
I : Est-ce que tu penses que les diététiciennes savent allier les deux côtes ?
O.G : Je ne sais pas.
I : Dans leur vie personnelle et professionnelle ?
O.G : Dans leur vie personnelle, j’espère pour elle. Je pense, elles sont humaines. Dans leur
vie professionnelle, c’est-à-dire dans ce qu’elles recommandent ?
I : Oui, sont-elles capables de donner des conseils allant dans ce sens, alliant plaisir et
diététique ? Manger en termes de saveur, de plaisir et nutrition équilibrée.
O.G : Je pense qu’aujourd’hui oui par rapport à l’époque, il y a 18 ans quand j’ai commencé
très très tôt. Aujourd’hui on a quand même avancé pour pouvoir allier plaisir et minceur,
après il y a un gros marché qui s’est développé. Faut faire gaffe au marketing aussi. Comme
ce qu’il m’est arrivé l’autre jour avec des gâteaux sésames, j’étais persuadée que c’était un
truc pas calorique et j’ai comparé et j’ai vu que c’était aussi calorique que mes pepitos, donc
du coup j’ai bouffé mes gâteaux au chocolat, tu vois. Si c’est pour 3 calories en moins, qu’estce que c’est, c’est rien.
I : C’est pour le plaisir où la bonne conscience que tu avais acheté ces gâteaux ?
O.G : En fait c’était parce que j’avais goûté et bien aimé.
101
I : Et derrière tu t’étais dit une idée diététique mais sans plus ?
O.G : Si c’est bon et que ça fait du bien je m’étais dit « vas-y, prend-les », et en plus ce n’était
pas très cher. Mais après j’étais hyper déçue.
I : Et tu en rachèteras ?
O.G : Oui j’ai bien aimé, parce que c’était bon. Après si je voudrais un truc pas calorique il ne
faudrait pas que j’aille pas vers ça. En vrai je me surveille tout le temps dans mon assiette,
mais pas en quantité enfin si j’ai ma petite voix dans ma tête qui dit « tu ne te serviras qu’une
fois » mais c’est tout le temps je me dis qu’il faut que j’ai des légumes et des féculents et
tout ça.
I : Tu regardes ton assiette, en termes de qualité du choix des produits ?
O.G : Oui, mais maintenant je le fais inconsciemment, j’ai appris étant donné que je cuisine
moi-même. Mais par exemple je m’étais de l’huile d’olive pour me donner bonne
conscience. Par exemple si je fais une quiche la plus part du temps, je vais faire des
végétariennes, mettre beaucoup de légumes limite, pour me donner bonne conscience,
j’essaie de faire bon mais au maximum sain.
I : D’accord. Eh bien j’en ai fini avec mes questions. Merci beaucoup de ta participation et
de ton intérêt pour mon étude.
102
Annexe D : Entretien Exploratoire n ° 2
Date : Mardi 1 mars
Contexte : Domicile de l'interrogé
Durée : 20 minutes.
Enquêté : G.D, Homme, 22 ans, étudiant
Intervieweur : I
I : Dans un premier temps je te remercie de m’accorder un peu de ton temps. J’ai voulu
t’interroger car dans le cadre de mon master, je dois réaliser un mémoire que j’ai choisi de
faire sur les diététiciennes et l’alimentation. C'est pour cela que j’ai voulu m’entretenir avec
toi, je te remercie de m'accorder un peu de ton temps. Si ça ne te dérange pas, je vais
enregistrer notre entretien pour que je puisse l’analyser plus facilement. Tout ce que tu diras
restera anonyme et confidentiel. Tout ce que tu diras restera anonyme et confidentiel.
Principalement, je vais m’intéresser à l’image des diététiciennes.
G.D : D’accord.
I : Est-ce que tu connais cette profession ?
G.D : Oui. Je connais un peu. Qu’est-ce que tu veux que je te dise ?
I : Les missions…
G.D : Je sais qu’elles ont pour mission de conseiller les gens sur leurs régimes alimentaires
qu’ils peuvent avoir, par exemple au niveau des sportifs, le régime qu’ils ont besoin pour
être performant, genre les protéines, les glucides… Ensuite, je sais que la plupart travaille
dans des hôpitaux donc elles conseillent les patients pour leurs régimes alimentaires. Je sais
que c’est un métier qui se fait en BTS, en 2 ans. Je pense pas que ça soit la seule mission que
de conseiller… Ah si elles confectionnent les menus pour les individus, que ce soit des menus
équilibrés.
I : Tu penses que les diététiciennes elles ont une véritable légitimité dans l’éducation
alimentaire ? Est-ce qu’elles ont les bons outils ?
G.D : Je pense pas. Je pense qu’elles ont pas assez le pouvoir de changer les choses. Elles ont
pas assez de pouvoir d’action. Par exemple, juste pour une année en plus en qualité, une
licence pro, tu peux devenir responsable qualité et il a plus de missions. Après que
diététicienne, même avec un bac + 3, t’as moins d’impact.
I : Si je te dis diététicien, quel est le premier mot qui te vient à l’esprit ?
G.D : Femme ! J’ai le cliché, pour moi c’est des femmes. C’est rare que j’entende parler
d’hommes.
I : T’as déjà rencontré une diététicienne ?
G.D : Non jamais.
I : Si tu devais en rencontré une dans le cadre médical, tu aurais une appréhension ?
G.D : Pas du tout, non.
I : Une peur du jugement, une angoisse sur le jugement de ton alimentation ?
103
G.D : Non pas du tout. Je pense… C’est pas une angoisse, mais comme j’aime bien manger
et que je me prive de rien, c’est une alimentation riche en calories, pas saine, je pense qu’elle
me ferait la réflexion que c’est pas équilibré, et qu’elle me conseillerait de privilégier tel
produit plutôt qu’un autre, par exemple. Mais c’est pas quelque chose que j’appréhenderai.
C’est pas quelque chose qui me stresserait.
I : D’accord. Et qu’est-ce qui fait une bonne diététicienne selon toi ?
G.D : C’est quelqu’un à l’écoute de ce qu’on lui dit. Genre, t’es en surpoids, elle va pas te
donner un truc super restrictif. C’est quelqu’un qui va être à ton écoute, qui va planifier des
choses dans le temps et qui va te faire changer ton alimentation progressivement.
I : Comment tu imagines une diététicienne ?
G.D : Physiquement ?
I : Tout, les qualités qu’elle peut avoir, le physique.
G.D : Honnêtement, c’est quelqu’un de doux, de pas méchant. Ouais pas comme un psy mais
qui est là pour t’écouter et en fonction elle s’adapte pour améliorer. Niveau physique, c’est
pas parce qu’elle va conseiller sur ton alimentation, que c’est quelqu’un qui doit être mince.
Ça peut-être une personne basique, comme n’importe qui.
I : T’as pas de représentation physique donc.
G.D : Non j’ai pas le cliché de la personne super mince, qui passe sa journée à dire « faut que
je mange ça », « faut que je fasse attention à ça ». C’est pas quelqu’un qui va se contrôler.
J’ai pas d’apriori.
I : Si tu dois consulter une diététicienne, tu veux maigrir et en face de toi la diététicienne est
ronde. Tu réagirais comment ? T’aurais confiance ?
G.D : Ouais honnêtement ouais. Après je me dirais « ouais elle est grosse, s’il faut c’est bidon
ce qu’elle me dit ». Mais après voilà c’est pas parce que la personne est le contraire de ce
qu’elle veut me faire appliquer que ça va jouer. Elle est professionnelle, si elle y arrive dans
son métier c’est pas pour rien. Elle a fait des études, elle a les connaissances pour faire ce
qu’elle fait et voilà. Moi j’y connais rien, elle elle a un avis professionnel et voilà. Elle est
censée savoir faire. Pour moi c’est pas un problème.
I : Et dans ton esprit, la diététicienne, elle a un mode de vie particulier ? Comment elle peut
gérer son alimentation ?
G.D : Je pense pas que ça soit quelque chose qui prenne part dans son quotidien. Elle va pas
s’imposer quelque chose de strict. Genre « je suis diététicienne, donc va falloir que
j’applique exactement ce qu’il faut appliquer : tant de glucides, tant de lipides, tant de
protéines, éviter les sucreries etc ». Je pense pas que c’est quelqu’un qui contrôle sa vie, par
rapport à son métier. Au contraire, je pense qu’un minimum elles connaissent les produits
qu’il faut pas consommer mais ça leur arrive d’en consommer. C’est pas quelque chose qui
va rentrer dans leur quotidien. Elles ont une vie à côté et elles sont pas obligées d’appliquer
les préconisations.
I : Donc d’après toi, elles ont pas un mode de vie plus sain, que les autres personnes ?
G.D : Forcément, elles ont les connaissances donc elles savent mieux ce qu’il faut pour avoir
une alimentation saine et une hygiène de vie correcte.
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I : Donc pas forcément de différences selon toi.
G.D : Je pense que ça dépend surtout de la personne, de la psychologie de la diététicienne.
Peut-être que t’en as qui sont carrés qui appliquent leurs conseils « je suis diététicien, je fais
tous les trucs, plus que la normale ». Mais je suis sûre t’en as des normales, qui changent
pas forcément leurs modes de vie.
I : Tu crois justement que la diététicienne devrait être irréprochable dans son mode de vie ?
G.D : Non justement, par ce que si elle a le sentiment de devoir être irréprochable, que c’est
une obligatoire, beh elle changerait dans son métier. Au moindre client qu’elle verra ça sera
« beh regardez-moi je fais ça, je suis comme ça, vous avez qu’à faire pareil ». Je pense qu’il
faut pas se forcer à se donner une image de diététicien. Ça pourrait changer son jugement
et sa capacité à conseiller le patient.
I : Et c’est quoi du coup cette image ?
G.D : Beh quelqu’un de svelte tu vois. Mais j’ai pas d’image. Même je connais personne qui
va voir des diététiciens. Même à la pub, quand on te montre en général, c’est une personne
normale, ils te montrent jamais de personne forte.
I : Et d’après toi, tu crois qu’il doit y avoir une certaine rationalité entre ce qu’elles disent et
ce qu’elles devraient faire ? Par exemple elle te conseille de manger équilibrée mais elle fait
absolument pas ça.
G.D : C’est pas quelque chose qui me choquerait. Comme je disais tout à l’heure, elles sont
pas obligées d’avoir le physique ou la mentalité de faire les choses que leurs patients doivent
appliquer. C’est pas une obligation. Et puis même, au contraire, faut pas qu’elle se dise « je
suis grosse donc je suis pas en capacité. Je suis comme je suis, je suis professionnelle et je
sais ce qui est bon pour eux, même si mon physique…». Voilà quoi.
I : Et si je te dis plaisir et diététique, tu penses que c’est conciliable ?
G.D : Oui. Oui je pense que c’est possible de manger sainement en se faisant plaisir. Tant
qu’on respecte les quantités et qu’on est pas irraisonnable je pense que c’est tout à fait
faisable. Puis même si on veut plus manger en quantité pour se faire plaisir, beh après c’est
à la personne de se bouger après, faire plus d’activités. Tu peux manger sainement en se
faisant plaisir. Tu concilies les conseils que tu donnes dans ta vie professionnelle dans la vie
personnelle. Si tu sais te détacher du métier quoi. Faut pas rester cantonner à l’image du
métier, montrer l’image d’une diet bien svelte à son patient, donc chez moi j’impose les
mêmes règles. Et puis il faut qu’elle ait la même alimentation que les autres. T’es en décalage
sinon.
I : Et le plaisir et la diététique c’est compatible, selon toi ?
G.D : Ouais. Je pense que oui. Quand je vais au Mc Do avec des potes, c’est un plaisir d’y
aller parce que je sais que je me retrouve avec eux. C’est de la mal bouffe ou aller au resto,
mais c’est un plaisir.
I : Mais qu’est-ce que tu entends par plaisir toi ?
G.D : Moi plaisir, c’est le bon produit tu vois. La convivialité. Pas forcément des trucs lourds.
C’est avec qui tu manges. Aller au fast food c’est pas un plaisir. Ça dépend avec qui t’es. C’est
sur t’y vas tout seul t’as aucun plaisir. C’est plus intéressant de manger tout seul chez toi
une salade avec des bons produits, diététiques, ou bio.
105
I : D’accord, je vois. Je n’ai plus de questions. Je te remercie pour ta participation.
G.D : Avec plaisir.
106
Annexe E : Entretien Exploratoire n ° 3
Date : Lundi 29 Février
Contexte : Domicile de l'interrogé
Durée : 47 minutes.
Enquêté : M.M, Femme 22 ans, diététicienne-nutritionniste diplômée en 2014, employée
dans un centre d’amaigrissement
Intervieweur : I
I : Dans un premier temps je te remercie de m’accorder un peu de ton temps. J’ai voulu
t’interroger car dans le cadre de mon master, je dois réaliser un mémoire que j’ai choisi de
faire sur les diététiciennes et l’alimentation, et donc c'est pour cela que j’ai voulu
m’entretenir avec toi. Si ça ne te dérange pas, je vais enregistrer notre entretien pour que
je puisse l’analyser plus facilement. Tout ce que tu diras restera anonyme et confidentiel.
On va aborder plusieurs thèmes, parcours, scolaire, la profession, l’image de la diététicienne,
les changements alimentaires, la cuisine etc. Dans un premier temps, je vais te laisser te
présenter, ton prénom, ton âge, ta situation familiale, si tu vis seule, si tu travailles etc.
M.M : Très bien. Donc je m’appelle M.M. j’ai 22 ans, je suis diététicienne depuis 2 ans. J’ai
fait une licence l’année dernière et depuis je travaille chez N. en CDD, bientôt en CDI, voilà.
Je vis accompagnée depuis… presque 4 ans.
I : D’accord, très bien. Quel type de bas tu as ?
M.M : Un bac ST2S, Sanitaire et Social.
I : La diététique a-t-elle été ta première orientation à la sortie du bac ?
M.M : Oui.
I : Pourquoi t’as fait ce choix ?
M.M : C’est quelque chose qui me plaisait et du coup j’ai fait ce bac pour m’orienter vers ce
BTS.
I : D’accord. Et quand est-ce que t’as eu l’idée de faire diététicienne ?
M.M : Quand ma mère est allée voir une diet.
I : Et qu’est-ce qui t’a plu ?
M.M : Je sais pas ! (rires) C’était le libéral, le cabinet et ça m’a plu. Je me suis dit « teh c’est
chouette c’est ça que je veux faire »
I : D’accord. Donc t’étais jeune ?
M.M : Ouais j’étais plus jeune. Beh j’étais même pas au lycée je crois.
I : Du coup tu as pris en compte les avis des autres personnes pour cette formation ? Tes
parents, tes amis…
M.M : Mes parents. Mais après… C’est tout
107
I : D’accord. Donc tu dis que c’est le fait d’aller en cabinet libéral qui t’a donné envie de faire
ce métier. Et est-ce que tu crois que les magazines, les projets de minceur, le PNNS, les
publicités qu’on peut voir à la télé, est-ce que ça a créé un attrait pour toi vers ce métier ?
M.M : Non. Non. Parce que c’est vrai que j’avais pas fait le rapprochement. Les magazines
pas du tout. Et le PNNS c’est vrai qu’à l’époque c’était pas aussi représenté que maintenant.
I : D’accord. Donc tu n’as pas eu de remarques concernant le choix de tes études, mais une
fois que tu y étais ? Pourquoi ce choix ?
M.M : Euh oui. On nous a demandé pourquoi on voulait s’orienter vers la diet, ce qui nous
plaisait. On a tous dit la cuisine je crois ! Mais après c’est vrai que le PNNS on l’a beaucoup
vu en cours, mais avant…
I : Tu me parles de l’aspect culinaire mais est-ce que d’autres aspects du métier t’ont
attirée ?
M.M : Le rapport avec le patient… L’aide en fait. L’aide médicale.
I : D’accord. Et sur la profession en elle-même qu’est-ce que tu en penses ?
M.M : Je trouve que c’est un beau métier. Parce que du coup, on est au service des
personnes, on est vraiment là pour un confort au niveau de la santé mais on est pas du tout
représenté. C’est surtout ça qui est dommage.
I : Tu penses que ça mérite des améliorations ?
M.M : Oui. Je pense qu’au niveau des structures on devrait être beaucoup plus représenté.
Ça devraient pas être des mi-temps, mais des temps pleins, il devrait pas y en avoir qu’une…
Voilà, ils devraient, mettre plus en avant cet aspect-là.
I : Et tu crois que le métier est en évolution ?
M.M : Pas du tout ! (rires) Non je pense que ça évolue pas du tout. Du moment où il n’y a
pas de financement, y’aura pas de postes de créés.
I : Et tu crois pas justement qu’il y ait des centres d’amaigrissement, ou les call center, des
choses comme ça, qui se développent, c’est une évolution dans le métier ? Ou à domicile
par exemple.
M.M : C’est une évolution. Mais pour moi c’est une évolution qui n’a pas forcément besoin
de diététicien en fait. C’est plus une évolution « médiatique » je dirais, plutôt que vraiment
avec un diététicien, un professionnel.
I : C’est-à-dire ?
M.M : Comme dire… Si tu veux là, le call center, pour moi-même si c’est pas un diététicien
qui le fait, ça se verra pas. On verra pas la différence. Il suffit de former une personne sur le
diabète et à répondre aux questions types et voilà c’est tout. Y’a pas de réelles utilités.
I : C’est plus pour jouer l’aspect marketing quoi.
M.M : Voilà c’est ça.
I : Et tu penses que le métier a une place d’avenir ?
M.M : Pour moi il devrait. Mais pour l’instant il a pas de place.
I : Tu as des regrets d’avoir choisi cette voie ?
108
M.M : Euh. Au niveau des débouchés oui, du coup. Près c’est vrai que c’est un métier qui me
plaît mais le fait qu’il n’y ait vraiment pas de débouchés, je me dis que j’aurai du faire autre
chose.
I : T’aurais choisi quoi ? Dans le paramédical ?
M.M : Ça je sais pas du tout. Franchement, je sais pas.
I : D’accord. Donc maintenant on va passer à l’image de la diététicienne. Est-ce dans ton
imaginaire, avant de commencer tes études, tu avais une idée de la diététicienne ? Qu’estce que c’est une diététicienne, comment elle doit être, qu’est-ce qu’elle doit faire…
M.M : Non du tout. Boh qu’elle devait pas être obèse, mais sinon non.
I : Est-ce que t’as rencontré des gens qui avaient des idées préconçues sur les
diététiciennes ?
M.M : Avant de faire mes études ?
I : Oui.
M.M : Non.
I : Et après ?
M.M : Pendant et après oui. Comme quoi, pour être diététicienne, il fallait être fine, il faut
manger comme on leur dit à eux… Voilà c’est vraiment… Ouais voilà ils ont une image.
I : C’est qui qui peut dire des choses comme ça ? C’est ton entourage ? Ou dans le cadre
professionnel ?
M.M : Ça peut être l’entourage aussi. Le fait de se dire « ah elle est diététicienne… ». Ou
quand on est invité chez des gens et quand ils savent qu’on est diététicienne, il réfléchisse
direct au menu, en se disant « mince j’aurai peut-être pas dû faire ça ». Voilà ça va être des
choses comme ça. Après, moi dans mon boulot, c’est les gens qui me disent « mais vous
mangez comme moi ? »…
I : Et qu’est-ce que tu réponds ?
M.M : Je leur dis que non pas forcément. Parce que eux, ils sont en perte de poids et j’ai pas
forcément besoin de manger comme eux.
I : Et ils font quelle tête ?
M.M : Beh non ils comprennent. Ils réalisent et se disent « beh oui c’est pas parce qu’on est
diet qu’on doit manger comme eux, en perte de poids. »
I : Et manger équilibré ? il vaut mieux dire ça ?
M.M : Oui oui ! Je vais pas leur dire « je mange n’importe comment ! » Non non après pour
eux c’est sûr, une diet elle mange équilibrée.
I : Tu manges équilibré ?
M.M : Oui. Oui. Franchement on mange équilibré. Sauf des fois où on se fait des plaisirs mais
on mange équilibré.
109
I : Et justement, tu crois que le métier de diététicienne, c’est un métier basé sur
l’apparence ? Est-ce que tu crois que c’est un critère qui rentre en jeu quand on dit
diététicienne ?
M.M : Ouais je pense. Franchement je pense. Moi je vois ma gérante, si la diététicienne est
costaud, elle la prendra pas.
I : Ah oui ?
M.M : Oui. Parce qu’elle reflète l’image de la structure, donc du coup il faut pas qu’elle soit
costaud.
I : Même si c’est une super diet ?
M.M : Ouais. C’est sur elle la prendra pas. Puis même les gens, ils viennent te voir pour
perdre du poids et si toi t’es costaud, ils vont se dire « bon ça marche pas du tout ce qu’elle
va me dire, elle, elle est pas fine, ce qu’elle va me dire ça va pas marcher »
I : Et tu crois, que la diet doit avoir un physique particulier pour son travail ?
M.M : Elle doit être à son poids de forme quoi. Elle doit pas être obèse.
I : Et maigre ?
M.M : Non. Après parce que moi j’aime pas et puis après ça donne l’image de la diet qui
vraiment ne mange rien. Ça donne la mauvaise image de la diététicienne. Celle qui prive,
celle qui représente vraiment la privation.
I : Y’a une mauvaise image de la diet tu crois ?
M.M : Oui je pense. Des diététiciennes en libérale oui. Pas en structure. Mais en libéral, qui
sont ciblées sur la perte de poids, je pense qu’il y a une mauvaise image. Pour la diététique
équivaut à privation. Mais nutritionniste de suite ça passe mieux.
I : Donc d’après toi, les gens ont une mauvaise image de la diététique ?
M.M : Ouais. C’est de suite la privation en fait.
I : Et quand ils te voient ? ou les conseils que tu peux donner ?
M.M : La première chose c’est « mais je vais pouvoir manger tout ça ? ». Et là du coup oui,
là ils sont contents et ils finalement ils se disent « je suis pas privé, j’ai droit à pleins de
choses »
I : Au final quand les gens connaissent le métier…
M.M : Ça passe beaucoup mieux.
I : Oui. Et donc ça c’est plutôt ton activité professionnelle, et de ton côté personnel, ton
entourage, ils ont une mauvaise image de la diététique ?
M.M : Ils ont une image comme quoi la diététicienne, elle va jamais au Mc Do, elle mange
pas de pizza, tous ces aliments plus gras. Après ils se rendent vite compte qu’on est comme
tout le monde, on mange comme eux.
I : Justement, on va parler de ta journée alimentaire. Qu’est-ce que tu as mangé
aujourd’hui ? Une journée type.
110
M.M : Aujourd’hui j’ai mangé, toujours basique, du pain, du pain aux céréales, à la farine
mélangée, avec du beurre dessus pour la matière grasse, un bol de thé, et un actimel 0 %
pour le produit laitier. (rires) Le petit dej idéal ! Et un verre de jus de fruits. Tous les matins !
I : Et à midi ?
M.M : J’ai mangé, alors, j’ai pas pris d’entrée. J’ai mangé du jambon d’York, deux tranches,
avec de la purée de pomme de terre et de la salade. Et un yaourt. Et voilà. Après bon…
D’habitude je prends une collation, une compote sans sucres ajoutés. J’en prends une le
matin à 10 h normalement. Mais là aujourd’hui ma copine elle est venue donc on a fait un
goûter ! (rires) Et après le soir toujours protéines, pas de féculents, légumes plutôt, et
produit laitier. Et en boisson toujours de l’eau.
I : Donc c’est ce que tu manges quotidiennement. Comment tu juges ton alimentation ?
M.M : Oh elle est bien. Elle est bien. Elle est équilibrée.
I : Tu parles d’alimentation avec tes amis ou ton entourage…
M.M : Non pas du tout.
I : Dans les repas ou quoi, y’a jamais le thème qui revient ?
M.M : Beh non, le fait que je sois diet, on en parle pas.
I : Ah oui ? Ça peut créer des conflits ?
M.M : Non mais… Je sais pas… Vu que c’est la famille, je pense qu’ils ont pas envie que je les
considère comme des patients.
I : Et tes amis ?
M.M : Beh s’ils sont pas dans le milieu de la diététique on en parle pas.
I : Et avec tes amis de diététique ?
M.M : On parle pas forcément d’alimentation… On parle plus du contexte professionnel que
d’alimentation !
I : Les autres, ils jugent ton alimentation du coup ? Des petites remarques…
M.M : Oui j’en ai un ouais. Du style « ah mais tu manges ça ? », beh oui, je mange comme
toi, je vais au Mc Do … Ouais c’est vrai, ils sont étonnés de me voir aller au Mc Do. Parce que
je suis diet je devrais pas aller au Mc Do, parce que c’est pas équilibré. Si on prend pas le
contexte professionnel là oui c’est bon.
I : D’accord. Maintenant parlons cuisine. Tu aimes bien cuisiner?
M.M : J’aime bien oui ! Mais je n’ai pas du tout le temps. Et même quand j’ai le temps j’ai
pas forcément l’envie. Je vais pas forcément cuisiner. Des fois ça m’arrive, mais je vais
surtout cuisiner des pâtisseries, plutôt que des plats. Mais en général c’est pas moi qui
cuisine.
I : D’accord. Et donc en BTS, on a des cours de cuisine, tu cuisinais avant ?
M.M : Pas du tout !
I : Donc ça a été un peu la découverte?
111
M.M : Ouais et ça m’a bien aidée ! On a appris les bases de la cuisine, donc maintenant je
sais cuisiner. Puis ce qu’on faisait c’était bon, on a les recettes, on peut les refaire. C’est vrai
que ça c’était un plus.
I : T’as des souvenirs des cours de cuisine?
M.M : Oui. Des bons souvenirs. C’était bon enfant, c’était pas strict, c’était relax. Mais non
très bons souvenirs.
I : Bonne ambiance du fait qu’il y ait des camarades ?
M.M : Oui. Et puis aussi tester, goûter les préparations des autres… C’était convivial!
I : Tes camarades t’ont fait découvrir des choses?
M.M : En cours non, car on avait des recettes définies, mais en dehors oui. Et puis ça dépend.
Ça dépend du lieu où l’on va. Et puis dans la classe y’avaient plusieurs origines du coup c’était
sympa de découvrir certains plats typiques.
I : Tu as changé ton alimentation durant le BTS ?
M.M : Ouais.
I : Qu’est-ce que t’as changé ?
M.M : Beh en fait je mangeais pas du tout comme ça. C’était pas du tout équilibré en fait. Et
du coup j’ai rééquilibré en faisant le BTS.
I : Comment tu peux expliquer ces changements ?
M.M : Beh déjà de savoir ce que c’est une alimentation équilibrée. Et puis après oui les
aliments qui sont à privilégier par rapport à d’autres, ce genre de choses. Et puis savoir ce
que c’est les protéines, les féculents, ce que ça apporte quoi. Les bases du PNNS quoi.
I : Ces changements c’étaient pour toi, ou tu penses que derrière, il y avait autre chose ?
M.M : Non, je pense que vu que c’est quelque chose que j’allais diffuser dans mon métier,
déjà c’était bien de le faire moi. Et puis après, même, le but c’était de rééquilibrer mon
alimentation.
I : Donc à la fois, pour toi mais aussi l’aspect professionnel derrière.
M.M : Oui.
I : Et pour tes courses, tu les effectues où ?
M.M : En grande surface.
I : Et comment tu choisis tes produits? Tu compares, tu lis les étiquettes ?...
M.M : Pas du tout! Absolument pas ! Après c’est parce que je sais vers comme me diriger.
Par exemple, pour les compotes, je vais me diriger vers les compotes sans sucres ajoutés,
parce que je sais ce que ça veut dire. Je sais la différence avec allégé ou les normales, donc
je regarde pas la composition.
I : Donc au final, les connaissances que t’as, tu les appliques dans ta vie quotidienne.
M.M : Oui. Mais après je regarde pas l’étiquetage ni rien. J’y passerai trop de temps. Puis je
prends souvent les mêmes produits, c’est une routine. Après quand je veux prendre un
112
produit que je connais pas, là je vais regarder, un petit peu. Genre les yaourts, je vais
regarder, les matières grasses, le sucre, pour savoir où on en est.
I : Pourquoi ?
M.M : Parce que c’est vrai que j’ai pas envie d’avoir des yaourts super sucrés. Et puis par
curiosité. Et voir si la marque est vraiment comment elle le prétend.
I : Et des produits diététiques, t’en achètes ? Les produits du rayon diététique plutôt.
M.M : Non pas du tout. Parce que voilà quoi, c’est les produits du rayon diététique. Puis c’est
souvent des plats tout prêts aussi. Et puis c’est mélangé avec le bio. C’est pas un rayon défini
en fait. Par exemple le konjac on le retrouve dans ce rayon, parce que c’est une algue et que
ça n’apporte rien. Mais après y’a pas une gamme de produits énormes donc c’est là.
I : Et tout ce qui est galettes de riz…
M.M : Il faut se méfier. C’est pas calorique mais ça a un index glycémique très élevé donc
c‘est pas top. C’est pas diététique et c’est au rayon diététique.
I : Donc maintenant on va passer plus aux changements dans ton alimentation. Donc tu m’as
dit que pendant le BTS tu avais changé ton alimentation. Et depuis que tu travailles ?
M.M : Travailler chez N. où tu donnes des plans à des gens en phase de perte de poids, ça
m’a fait changer mes habitudes. Genre on peut décaler le fruit du repas et le mettre en
collation. Beh ça je le fais tu vois. J’ai plus besoin maintenant de faire une collation, comme
je finis tard le soir.
I : D’accord. Et qu’est-ce qui a changé après ? Pa exemple, les choix des produits, le nombre
de restaurant, le mode de cuisson…
M.M : Le choix des produits… Ça a plus changé maintenant. Avant pendant le BTS, c’étaient
plus des produits frais et maintenant c’est vrai que je me dirige vers les conserves ou les
surgelés non cuisinés comme j’ai un frigo avec congélateur maintenant. Après au niveau du
BTS, c’est que avant, j’avais dans mon assiette toujours une protéine et soit un féculent, soit
un légume. Et j’avais pas le féculent et le légume. Donc ça je l’ai modifié.
I : Quand est-ce que tu as fait ce changement ?
M.M : Pendant le BTS. Et les entrées j’en a jamais trop fait… Je cuisine avec plus d’épices,
j’utilise moins de sel. Et matières grasses ça a pas changé, je cuisinais pas gras.
I : Et tu as plus de nouveautés dans ton alimentation ? Tu testes plus de choses ?
M.M : Je teste au niveau des pâtisseries. (rires) En remplaçant le sucre par du sirop de
glucose pour diminuer la teneur en glucides du produit et les calories. Et après… J’ai pas trop
le temps de tester d’autres trucs.
I : Pourquoi tu remplaces le sucre par du sirop ?
M.M : Beh d’abord je veux voir si y’a une différence au niveau du goût. Et si je vois qu’il n’y
en a pas et que ça diminue la teneur en sucre, je me dis que dans tous les cas c’est bénéfique.
I : Niveau nutrition c’est bénéfique. Et niveau plaisir ?
113
M.M : C’est pareil, c’est équivalent. Vraiment ça n’a aucune incidence. Je teste pas sur tout.
J’ai fait des cookies, je m’attendais à ce que ça change, ça a pas changé la texture. J’utilise
les produits dont la diététique promeut un peu.
I : Et dans ton alimentation, tu as changé pour être plus en règle en avec l’équilibre
alimentaire ?
M.M : Oui. Pour moi. Parce que je l’avais.
I : Depuis que tu as fait tes études, tu fais plus de resto, plus de plaisir ?…
M.M : Plus de resto oui. Parce que j’ai avancé dans l’âge et je suis devenue indépendante.
I : Est-ce que tu vois une évolution dans le comportement des autres pendant un repas, du
fait que tu sois diététicienne ?
M.M : C’est plutôt des gens que je connais pas, ou que je vois pour la première fois. Et de
suite c’est « ah bon… ». Ils réfléchissent un peu, je pense qu’ils se remettent en question. Ils
doivent se poser des questions « qu’est-ce qu’elle pense de moi ? est-ce que ce que j’ai fait
à manger c’est bien ? »… Mais après les gens que je connais, non. Ils le savent.
I : Et tu penses que tu as un rapport plus détendu sur l’alimentation. C’est-à-dire d’avoir les
connaissances, tu es plus détendue, tu dramatises mois de faire un écart, un plaisir… Ou au
contraire ça te fait plus peur ?...
M.M : Je dirais que c’est le contraire. Avant je connaissais pas ce qu’était un plaisir tu vois,
donc je connaissais pas l’impact qu’ils avaient. Tandis que là je connais. C’est à moi après à
rééquilibrer par derrière pour compenser l’écart.
I : Tu penses que tu as un rapport plus tendu maintenant…
M.M : Disons que c’est plus maîtrisé. Je maîtrise plus ce que je fais. Pour éviter de prendre
du poids tu vois.
I : Et par rapport aux autres de ton âge, tu vois une différence dans ce rapport à
l’alimentation ?
M.M : Non. Après c’est sur si je mange sur plusieurs repas avec d’autres, et que je les vois se
resservir plusieurs fois, dans ma tête je vais me dire « ouh la la ». Mais ça m’impacte pas vu
que c’est pas moi.
I : D’accord. Maintenant on va parler un peu plus sport et poids. Tu fais du sport ?
M.M : Non pas actuellement.
I : D’accord. Tu te pèses régulièrement ?
M.M : Je dirais une fois par semaine. Pour maintenir mon poids.
I : Tu as déjà suivi un régime?
M.M : Un vrai régime? Non.
I : Un rééquilibrage alimentaire ?
M.M : Non.
I : T’as déjà senti une situation où tu n’étais pas à l’aise à ton corps ?
M.M : Oui, ça oui. Puis en plus en étant diet, c’était pire ?
114
I : Ah oui?
M.M : Oui. Beh le fait d’avoir pris du poids et d’être à un certains poids je me disais « mais
les gens, ils vont s’imaginer tout un tas de choses. » On représente le métier, donc c’est vrai
que j’étais pas bien. J’étais vraiment pas bien.
I : D’accord. Toi tu te sentais pas bien, mais également le regard des autres ?
M.M : Oui.
I : Parce que t’avais pris du poids ou parce que tu avais pris du poids et tu es diététicienne ?
M.M : Les 2. Après c’était moi qui m’imaginait ça. Ce qu’eux pensaient. J’ai pas eu de
remarques ou quoi.
I : D’accord. Maintenant on va passer à une partie plus « bilan ».
M.M : D’accord.
I : Qu’est-ce que manger équilibré pour toi ?
M.M : Déjà pour moi ça se fait sur une journée. Voire même sur la semaine. Ça se fait pas
sur un repas. C’est déjà les bases, avoir tous les produits de l’alimentation : produits laitiers,
protéines, féculents, légumes. C’est aussi avoir du sucre et des matières grasses. Pas se
priver.
I : Tu m’as dit tout à l’heure que nutritionniste, ça passait mieux que diététicienne… C’est
quoi la nutrition d’après toi.
M.M : Beh pour nutritionniste c’est un médecin. Et diététicienne c’est issu du BTS.
I : Et entre le terme nutrition et diététique, tu vois une différence ?
M.M : Pour moi y’en a pas. Diététique c’est diet. Donc c’est la privation.
I : Alors que nutrition…
M.M : Nutrition c’est l’alimentation en général. C’est nourrir. C’est beaucoup moins négatif.
I : Tu crois être légitime à donner des conseils à des personnes, si ton alimentation est pas
équilibrée…
M.M : Oui parce qu’au final c’est mon métier. Et puis les gens ils connaissent pas mon
alimentation. Ça ne regarde que moi. Après moi c’est pour eux que je vais le faire. Mais après
c’est sûr, c’est un peu mieux si on fait ce qu’on dit aussi.
I : Du coup t’es diététicienne, donc bon tu vas pas manger n’importe quoi non plus.
M.M : Voilà c’est ça.
I : Pour toi ? Pour l’image que tu donnes aux autres ?
M.M : Oui. Beh c’est sûr que oui. Vu que je suis diet, je dois bien manger aussi, mais ils sont
pas au courant de ce que je mange.
I : Et si tu avais une alimentation moins équilibrée, sans forcément le légume à chaque repas,
le produit laitier, en sautant le petit-déjeuner par exemple, en grignotant… Est-ce que tu te
sentirais mal de donner des conseils d’équilibre alimentaire à côté ?
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M.M : Un petit peu je pense. Après quand on fait pas forcément ce qu’on dit, on comprend
un peu mieux les gens dans leur quotidien. Par exemple, tu grignotes et la personne en face
son gros problème c’est les grignotages, la diet elle va être plus apte à proposer des
solutions.
I : D’accord. Et si je te dis plaisir alimentaire, qu’est-ce qui te vient à l’esprit ?
M.M : Disons que de part, mon travail actuellement, tout ce qui va être plaisir, c’est ce qui
va être dessert, sucreries, tout ce qui est sucré. Après de ma formation, c’est surtout se faire
plaisir en mangeant. Ça peut être n’importe quel aliment, du moment où ça me fait plaisir
de manger.
I : Que ce soit quelque chose de sucré, de salé…
M.M : Oui. Ça peut être un plat, une pomme… Du moment où t’as envie de le manger et que
ça te fait plaisir, voilà.
I : Dans l’esprit des gens, y’a souvent une séparation…
M.M : Ouais. Beh eux ça va être plus ce qui va être interdit en fait.
I : Et si je te dis plaisir et diététique, c’est conciliable ?
M.M : Oui.
I : Peu importe le plaisir ? Une sucrerie…
M.M : Oui.
I : Et tu as déjà eu un sentiment de culpabilité en mangeant quelque chose ?
M.M : Oui… (rires) C’est plus en quantité, que sur le produit. Au lieu de manger un gâteau,
je vais manger la moitié du paquet. Je vais me dire « t’abuses ». Si je l’ai mangé c’est que
j’en avais envie, ça me fait plaisir. Mais c’est la quantité, c’est ne pas savoir s’arrêter qui fait
culpabiliser.
I : Pourquoi tu penses avoir abuser ?
M.M : Parce que c’était pas de la faim, et puis c’est pas un aliment que tu dois manger tous
les jours non plus. Et puis trop en manger c’est même plus un plaisir à la fin.
I : Tu t’autorises des plaisirs ?
M.M : Oui, mais c’est rare. Les pâtisseries j’en fais pas tout le temps. Après on fait plus de
plaisir salé que sucré, genre Mc Do, pizza…
I : Quel discours tu as devant un client te dit « ah je vais au Mc Do, des fois… » ?
M.M : Beh s’il est dans une logique de perte de poids, je vais lui faire comprendre que c’est
pas forcément dans son objectif. Après je dédramatise la chose. Je vais pas lui interdire. C’est
juste que pour lui comprenne. Lui expliquer pourquoi, c’est pas top. Et puis je vais demander
le contexte. Si c’est quelque chose qui lui faisait envie, je préfère qu’il se fasse plaisir, plutôt
que d’être frustré, et de se lâcher sur autre chose. Je dédramatise mais en lui disant que
c’est quelque chose qui doit rester exceptionnel.
I : Du coup t’allies un minimum plaisir et diététique.
M.M : Ouais. Pour moi il ne faut pas que les gens soient frustrés. Donc des fois faut se faire
plaisir.
116
I : Tout comme toi ?
M.M : Oui voilà c’est ça.
I : Et tu penses que ton alimentation est éloignée d’une personne lambda, qui a le même
âge que toi, qui est en couple, qui travaille… ?
M.M : Je pense qu’il y a une petite différence parce qu’ils font moins attention, à ce qu’il y a
dans l’assiette. Par exemple, féculents midi et soir, pas souvent des légumes ou autre, donc
ils vont pas forcément faire attention. Je pense que ça se joue surtout pour les jeunes de
mon âge, au niveau de l’alcool. Après au niveau des plaisirs, je pense qu’il y en a plus dans
leurs alimentations, mais sinon je pense pas qu’il y ait de différences énormes. Avec tout ce
qu’on entend, et tout ce qui passe à la télé, les gens ils sont un minimum éduqués sur
l’alimentation.
I : Tu la vois comment l’alimentation de quelqu’un de ton âge ?
M.M : Je dirais que c’est du pas cher, plus de conserves que de produits frais, plus de
féculents que de légumes. Peut-être plus de pizza, Mc Do…
I : Tu penses que ton alimentation s’en éloigne beaucoup ?
M.M : Non je ne pense pas. C’est pas vraiment éloigné. Mais y’a quand même une petite
différence.
I : Elle s’en approche par quoi ?
M.M : Le fait de se faire des restos, aller boire un verre, manger un pizza… De sortir de la
routine quoi.
I : Ça t’ennuie de manger équilibré des fois ?
M.M : Ouais des fois ouais ! Je me dis que par facilité je pourrais faire autre chose. Parce que
c’est long à préparer. Ça prend vraiment du temps.
I : C’est pour ça que tu crois que certaines personnes ne mangent pas équilibré ?
M.M : Ouais. Parce qu’ils ont pas forcément le temps pour tout préparer.
I : Et tu crois qu’ils ont les connaissances pour manger équilibré ?
M.M : Oui je pense. Je pense qu’ils ont toutes les clés pour et que seuls ils y arrivent pas. Je
vois les clients qu’on a, ils essaient avant de venir de rééquilibrer l’alimentation. Mais tout
seul, ils y arrivent pas. Ils ont besoin d’être aidés, aiguillés…
I : Ils ont les connaissances comment ?
M.M : Par le PNNS, Manger Bouger, tout ce qu’on entend. Ce qu’on voit dans les magazines
aussi. Les gens savent très bien qu’il faut boire de l’eau, limiter les sucres et le gras. On
l’entend tellement qu’ils le savent.
I : J’ai terminé avec mes questions. Tu as des remarques peut-être ?
M.M : Je crois qu’on a fait le tour là ! Franchement j’ai pas vraiment de remarques. C’est
complet (rires). Après peut-être le tabac et l’alcool… Parce que t’as beaucoup de diet qui
sont fumeuses. Parce que c’est une hygiène de vie quand même, la diététique.
I : D’accord, je vois. Je te remercie pour ta participation.
M.M : Avec plaisir.
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Annexe F : Entretien Exploratoire n ° 4
Date : Mardi 1 mars
Contexte : Domicile de l'interrogé
Durée : 48 minutes.
Enquêté : S.P, Femme, 23 ans, diététicienne-nutritionniste diplômée en 2014, étudiante
Intervieweur : I
I : Dans un premier temps je te remercie de m’accorder un peu de ton temps. J’ai voulu
t’interroger car dans le cadre de mon master, je dois réaliser un mémoire que j’ai choisi de
faire sur les diététiciennes et l’alimentation, et donc c'est pour cela que j’ai voulu
m’entretenir avec toi. Si ça ne te dérange pas, je vais enregistrer notre entretien pour que
je puisse l’analyser plus facilement. Tout ce que tu diras restera anonyme et confidentiel. Je
vais te poser des questions sur toi, ton âge, ta situation familiale… puis ton parcours scolaire.
On va ensuite parler du métier de diététicienne, ensuite de l’image de la diététicienne, de la
cuisine, des changements alimentaires, du sport et de l’alimentation des autres. Pour
commencer, ton prénom, ton âge ?
S.P : D’accord. Alors S., j’ai 23 ans. J’habite seule en appartement sur Toulouse. J’ai fait des
études en diététique et maintenant je suis en master.
I : Quel bac tu as ?
S.P : J’ai fait un bac S.
I : Ça a été ta première orientation après le bac ?
S.P : Diététique ?
I : Oui.
S.P : Oui. J’ai eu une année ou je ne savais pas quoi faire, où j’ai travaillé en assistante de
laboratoire et après je me suis dirigée vers la diététique.
I : Pourquoi ?
S.P : Parce qu’après le bac, j’ai eu un trou d’un an où je ne savais pas trop quoi faire, je voulais
m’orienter vers le médical ou paramédical, mais je me sentais pas de faire médecine. J’ai
regardé un peu les métiers dans ce domaine-là et j’ai trouvé diététique.
I : Un truc en particulier, tu voulais te diriger dans le paramédical, mais tu avais un attrait
pour la diététique, ou pour aider les autres, pour la cuisine ?
S.P : L’alimentation c’est un sujet qui m’intéresse et j’aime bien la cuisine, faire la cuisine,
donc je me suis orienté vers là.
I : Tu as eu une expérience personnelle avec la diététique ?
S.P : Pas du tout.
I : Tu as pris en compte les avis d’autrui par rapport à cette orientation ? Est-ce que tu as eu
des avis ?
S.P : Non, mais après dans mon entourage ce n’est pas un métier très connu, on en parle
pas trop.
118
I : Est-ce que tu penses que le PNNS, les magazines etc… ont pu influencer ton choix ? De
voir des publicités en lien ?
S.P : Avant de faire diététique je ne connaissais pas du tout le PNNS, après les publicités c’est
vrai qu’on en voit beaucoup, les campagnes et tout. Mais pas plus que ça, avant de faire
diététique. Après maintenant oui, j’y suis plus sensible.
I : Tu avais fait le lien entre la diététique, le PNNS, les campagnes comme manger,
bouger avant de faire le BTS?
S.P : Non, avant je connaissais pas le PNNS, et les campagnes je ne faisais pas trop attention
j’ai pas trop de souvenirs, je n’ai pas l’impression que ça m’ait marqué avant de faire
diététique, maintenant beaucoup plus.
I : Tu as des remarques des autres par rapport aux choix de tes études, tes amis qui t’ont fait
des remarques sur la diététique, pourquoi la diététique ?
S.P : Avant non, après oui on est catégorisé comme celle qui mange des légumes, qui mange
plus de gâteaux et qui ne va plus au mac do et on se prend toujours des remarques quand
on fait des écarts, mais sinon pas spécialement. Après maintenant, j’ai plus un cercle d’amis
qui sont presque tous dans l’alimentation donc ils ne disent plus grand chose.
I : On va maintenant parler de la profession en elle-même, qu’est-ce que tu en penses de la
profession ?
S.P : (rires) Ce sont des études qui m’ont vachement plu, vachement intéressée. Même la
profession en elle-même est très intéressante et qu’il y a beaucoup de choses à faire pour
aider les gens parce qu’il y a quand même une grosse demande. Mais malheureusement ce
n’est pas un métier qui est très reconnu et qu’au final ce n’est pas un métier que j’ai pu
vraiment découvrir au travers de mes stages, que ce soit en hôpitaux ou dans d’autres
structures, la diététicienne n’a pas vraiment d’importance. Mais le libéral m’aurait bien plu
par contre, tu vois tes patients, tu leurs fais vraiment une prise en charge.
I : Est-ce que tu penses que ce métier mérite des améliorations ?
S.P : Oui ! (rires) Déjà il mérite d’être plus reconnu, et puis donner plus de tâches et de
responsabilités aux diététiciennes dans les structures. Pour les études que l’on fait on est
capable de faire plus de choses.
I : Tu penses que ce métier est en évolution ?
S.P : Il pourrait mais ça fait longtemps qu’on dit qu’il devrait évoluer et changer et que rien
ne se passe, j’ai perdu un peu espoir là-dessus.
I : Tu ne crois pas que vu qu’il y a le développement de centres d’amaigrissement ou des call
centers, c’est un façon de se développer, autres que les hôpitaux ?
S.P : Si c’est vrai, je n’y avais pas pensé.
I : Est-ce que tu as des regrets d’voir choisi cette voie ?
S.P : Non, car c’est des études qui m’ont beaucoup passionnée, où j’ai appris pleins de
choses. Après j’ai des regrets de ne pas pourvoir en faire ce que je veux plus tard. Après non
j’ai pas du tout de regrets d’avoir choisi cette voie.
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I : On va parler de la diététicienne en elle-même. Est-ce que avant de commencer tes études
tu avais une idée de la diététicienne dans ton imaginaire, une idée préconçue ? Est-ce que
tu t’imaginais quelque chose, sur elle, sur le métier ?
S.P : Je pensais que c’était un peu comme le médecin de l’alimentation. Tu arrivais avec ta
blouse c’était vraiment une consultation médicale. Mais après je ne savais pas vraiment
comment ça se passait car j’étais jamais allée voir une diététicienne, j’ai voulu le faire avant
de prendre les études puis au final je n’ai pas eu le temps, mais j’avais pas d’idée très précise.
Mais je pense que comme les idées reçues de tout le monde, je pensais qu’être diététicienne
c’était vraiment être clean dans ton alimentation, manger que des légumes, pas faire
d’écarts, pas manger de pâtisseries, de fast food.
I : Tu as déjà rencontré des gens qui avaient des idées sur la diététicienne ?
S.P : Oui quasiment tout le monde.
I : Quelles idées ?
S.P : Sur le fait qu’une diététicienne ça doit forcément bien manger et donner l’exemple.
Pour eux, ils n’associent pas que l’équilibre alimentaire c’est un tout. Pour eux, tout le temps
ça doit être très carré et stricte l’alimentation. Après sur d’autres points non, vu que c’est
un métier qui n’est pas très connu, c’est la seule image qui en ressort.
I : Est-ce que tu penses que ce métier est basé sur l’apparence ?
S.P : Euh, l’apparence pour qui, pour la diététicienne en elle-même ?
I : Oui.
S.P : Euh quand même oui, parce que la plus part des consultations c’est pour perdre du
poids et améliorer son image corporelle et donc forcément c’est basé sur l’apparence
physique.
I : Et donc tu penses que la diététicienne doit avoir un physique particulier ?
S.P : Justement tout le monde le dit… Après c’est vrai qu’en y passant si une diététicienne
n’est pas fine aux yeux des gens ce n’est pas crédible, elle donne des conseils sans les
appliquer. Je pense qu’elle doit avoir une certaine image à tenir.
I : Est-ce qu’il y a une mauvaise image de la diététique ?
S.P : Euh, c’est dur à dire vu qu’on y est dedans. Je pense que pour les gens la diététique
c’est chiant, c’est strict, c’est faire attention à tout, tout peser et tout calculer.
I : C’est une hygiène de vie ?
S.P : C’est une hygiène de vie qui faut tenir tous les jours et à long terme.
I : Sur l’alimentation ou sur d’autres points ?
S.P : Sur l’alimentation.
I : Et le sport, le tabac, l’alcool ?
S.P : Je ne sais pas ! (rires) Après oui c’est comme quelqu’un qui fait du sport ça n’empêche
pas qu’il fume à côté, quelqu’un qui mange bien ça n’empêche pas qu’il fume aussi. Après
c’est un tout qu’il faudrait mais je ne pense pas que dans la tête des gens c’est associé, je
pense que c’est différencié.
120
I : Pour toi la diététique c’est plus l’alimentation.
S.P : L’alimentation et le sport je suis d’accord que le sport rentre en jeu, après tous les
autres alcool, tabac et tout pas forcément, tu fais pas le rapprochement.
I : On va parler de la cuisine…
S.P : Ouiiiiii !
I : Parle-moi de tes repas classiques, ils se composent comment ?
S.P : (rires) Aujourd’hui j’ai mangé des œufs durs, une pizza trois fromages, de la compote
et du fromage blanc. Au goûter j’ai mangé des fondants au chocolat (rires) et ce soir je
mangerais une salade (rires) et ce matin j’ai mangé un bol de céréales et une clémentine.
I : Hier ou demain ?
S.P : Avant-hier j’ai mangé un ragout de bœuf fait moi-même avec du riz et hier un américain,
mais ça faut pas le dire (rires). D’habitude je fais plus attention, c’est que cette semaine.
I : Comment tu fais d’habitude ?
S.P : Quand je mange chez moi je mange bien équilibré, il y a de tout et quand je mange avec
des amis, je mange très mal quand on mange dehors, on se fait plaisir.
I : C’est quoi un plaisir pour toi ?
S.P : C’est manger gras, sucré selon ses envies.
I : Et les envies c’est forcément gars et sucré ?
S.P : Après je pense quand on se restreint, quand tu te dis qu’il faut manger équilibré, te
mettre certaines conditions te faire plaisir c’est ne plus avoir ces conditions et contraintes.
I : Et tu te restreins ?
S.P : Pas sur la quantité, mais je fais plus attention à la qualité, les choix des produits et varier
l’alimentation. Avant je ne mangeais quasiment pas de légumes, je mange beaucoup de
fruits maintenant et je fais attention aux matières grasses quand je cuisine.
I : Par rapport à avant le BTS ?
S.P : Oui.
I : Comment tu juges ton alimentation ?
S.P : Bancale ! (rires) Ca dépend des semaines, des jours, ça dépend mais après le BTS m’a
aidé à mieux manger. C’est aussi lié à la culture en Nouvelle-Calédonie personne ne mange
des légumes à tous repas, ici c’est ancré dans les modes alimentaires. Là-bas c’est beaucoup
des féculents, voire deux féculents, riz ou pain, frite et pain, pomme de terre et riz, ça
maintenant je peux plus, ça me fait bizarre. Quand je suis seule bien et pas seule pas bien.
I : Manger équilibré ça t’ennuie ?
S.P : Non pas du tout, j’aime ça. Je ne sais pas si ça me rassure dans ma tête mais je me dis
par rapport à tout ce que j’ai appris c’est bien pour ma santé et tout. Quand je cuisine chez
moi et que je mange seule, ça me fait plaisir de faire des plats équilibrés.
I : Tu parles d’alimentation avec tes amis ? Ils sont tous dans la même branche, le même
secteur ?
121
S.P : J’en parle beaucoup, ils sont quasiment tous dans ce secteur ou beaucoup font du sport.
Mais après c’est un sujet qui revient souvent, c’est peut-être parce que je suis diététicienne
et que quand on va manger dehors, c’est un sujet qui va revenir et lancer la discussion. Ça
revient souvent.
I : C’est souvent dans les sorties que vous en parlez ?
S.P : Oui, même sans sortir.
I : L’alimentation en général, l’aspect nutrition, cuisine ?
S.P : De tout, l’aspect cuisine aussi. J’ai un copain qui me demande comment cuisiner des
légumes, des trucs comme ça.
I : Et avec ta famille tu en parles de l’alimentation ?
S.P : Beaucoup moins, je ne sais pas si c’est le fait que je ne les vois pas. Ou même quand il
y avait ma mère et ma sœur, vu que chez moi on ne fait pas attention à ça et que pour elles
se faire plaisir c’est manger de tout et ce n’est pas que dans leurs têtes « manger gras et se
faire plaisir », c’est qu’on a tellement eu l’habitude de manger comme ça que de ne pas
manger comme ça, ça ferait bizarre. Quand elles sont venues en vacances pour elles il fallait
se faire plaisir comme ça et ne pas se contrôler.
I : Vous n’avez pas parlé d’alimentation ?
S.P : J’ai essayé de leur dire que moi j’avais changé mes habitudes alimentaires depuis 3 ans
et que manger tout ça tous les jours, tout le temps ça ne plaisait plu, mais elles n’avaient
pas l’air convaincues. Donc j’ai abandonné et je m’y suis pliée ! (rires)
I : Ça ne t’a pas fait bizarre de remanger « normal » et équilibré après leur départ ?
S.P : Non ça m’a trop fait plaisir. Je pense que c’est l’habitude, avant je le faisais pas mais
quand elles sont reparties j’ai remarqué que ça m’a fait plaisir de pourvoir remanger comme
je le voulais.
I : Et au début ça t’a pas fait plaisir de manger comme elles ?
S.P : Au début oui, parce que tu retrouves les saveurs, des plats de maman, tes habitudes
d’avant. A la fin j’étais écœurée.
I : Comment les autres jugent ton alimentation, ta famille, tes camarades de classes ou tes
collègues en stage ?
S.P : Tout aussi bancale ! (rires) C’est souvent la remarque qu’on prend, tu es diététicienne
mais tu ne fais pas si attention. Ce n’est pas mauvais quand ils le disent, c’est plutôt cool, au
final quand tu es diététicienne tu te fais aussi plaisir, tu ne manges pas que des légumes, ce
n’est pas stricte.
I : La cuisine en elle-même, est-ce que tu aimes cuisiner ? Est-ce que tu cuisines beaucoup ?
S.P : J’adore cuisiner ! Je cuisine beaucoup, autant que je peux.
I : Et avant de faire le BTS tu cuisinais ?
S.P : Je commençais oui, mais chez ma mère c’était quand même elle qui cuisinait le plus
mais c’est avec elle que j’ai appris.
122
I : En BTS on a des cours de techniques culinaires, tu les as appréciés ? Tu gardes quoi comme
souvenirs ?
S.P : Oui, franchement je les ai bien appréciés. Après pour moi ce n’était pas de la cuisine où
tu te faisais plaisir, c’était avec de la contrainte. Des fois j’ai beaucoup aimé et des fois ça
m’a contrariée.
I : Quoi comme contraintes ?
S.P : Les contraintes d’hygiène surtout, après faire des plats équilibrés c’est normal et tant
mieux j’ai appris des choses, mais l’hygiène c’était chiant.
I : Grâce à ces cours, tu as appris des nouvelles choses les recettes etc. mais est-ce que tu as
testé des autres choses avec les autres ou seulement le prof t’a apporté ?
S.P : C’était un peu de tout, car on a tous des manières différentes de faire des choses, genre
faire cuire du riz. On a tous appris des choses dans l’ensemble. Mais après en BTS on suivait
des recettes sur un programme, mais en troisième année on était plus libre de choisir nos
recettes par rapport à une pathologie ou une maladie imposée et là j’ai appris des recettes
des autres, des techniques…
I : D’accord. Tes courses où les fais-tu ?
S.P : Dans un supermarché et maintenant ça fait pas longtemps depuis 2 mois je vais au
marché. Pas toutes les semaines mais quand j’arrive à me lever, pour acheter des fruits et
des légumes, c’est soit le même prix soit moins cher.
I : Quand tu fais tes courses, qu’est-ce que tu regardes, comment tu choisis tes produits ?
Tu regardes les étiquettes ?
S.P : Oui mais ça dépend des produits, surtout les produits que je ne connais pas, quand je
vais manger quelque chose de nouveau, je regarde. Les fruits et les légumes c’est plus le prix
et la provenance. Et la viande non pas spécialement, c’est plus les produits industriels.
I : Pourquoi ?
S.P : Pour voir ce qu’il y a dedans, les ingrédients et après la valeur nutritionnelle.
I : Ça t’apporte quoi de regarder ?
S.P : Je me rends compte que ça peut être vachement gras.
I : Et du coup ça te fait poser des produits ?
S.P : Ça dépend des produits, quand je trouve que c’est vraiment excessif oui. Mais après je
regarde beaucoup pour comparer deux marques car je sais qu’au final je prendrais un de
ces produits. Je compare les marques.
I : Pour prendre le moins gras ?
S.P : Pour prendre celui qui est le mieux composé, mais sur les ingrédients, surtout.
I : D’accord. Donc là on va passer aux changements que tu as eu dans ton alimentation,
pendant le BTS, une fois diplômée… Tu as changé quelque chose ?
S.P : La première année non. La seconde année on va dire un peu. La troisième année oui et
maintenant oui. En BTS, je pense que c’est parce qu’on avait pas le temps. Et puis j’étais avec
K. et qu’il mangeait tout le temps gras. Genre on pouvait manger 3 fois des frites dans la
123
semaine, ça lui faisait plaisir. Ça je lui avais dit. C’était compliqué d’ailleurs, je lui avais dit
que je faisais quand même des études en diététique et lui il s’en foutait quoi. Bref. Et
depuis… Ouais je mange plus de légumes je mange moins de féculents. Moins gras aussi. Et
moins sucré. Parce que tu vois ma mère elle cuisine beaucoup de trucs au caramel, et ça j’en
fais moins. Mais après par contre j’ai découvert la charcuterie et le fromage…
I : Ça s’est fait progressivement les changements ?
S.P : Non d’un coup plutôt. Je me suis dit « voilà t’as fini tes études, enfin t’as passé ton BTS,
tu peux bien manger maintenant ».
I : Parce que tu es diet?
S.P : Non pas parce que je suis diet, mais autant appliquer ce que j’ai appris en cours. Ça
peut avoir des impacts sur la santé.
I : Ça te permet de justifier ton côté diet ou c’est vraiment pour toi ?
S.P : Non c’est vraiment pour moi. Après c’est peut-être parce qu’on est pas dans le métier.
On travaille pas, donc c’est plus pour moi que je le fais.
I : Tu as changé des aliments et ta façon de cuisine aussi ?
S.P : Oui je mets moins d’huile.
I : Et tu as changé aussi par rapport aux nouvelles personnes que tu as rencontrées, ce
qu’elles faisaient à manger, les produits qu’elles utilisaient…
S.P : Oui. D’autres produits genre charcuterie, fromage et tout. Et si oui. Sur les techniques
de cuisine aussi. La Réunion aussi vu qui y’avait une Réunionnaise.
I : Ca a changé ton statut dans la famille ?
S.P : Oui. Mais comme je suis éloignée je sais pas. Quand elles sont venues, j’ai voulu faire à
manger, j’ai bataillé. Mais ça lui faisait trop plaisir de me faire à manger.
I : Ça t’a manqué ?
S.P : Oui. Et c’est pour ça que ça m’a fait plaisir de recuisiner quand elles sont parties et du
coup, j’ai retrouvé ma cuisine ça m’a fait plaisir.
I : Y’a des produits que tu as abandonnés dans tes changements ?
S.P : C’est tout ce qui chips et tout ça.
I : D’accord. Tu penses être plus détendue concernant l’alimentation depuis que t’as fait le
BTS ?
S.P : C’est-à-dire ?
I : Par exemple, comme tu as plus de connaissances maintenant, ça change ton rapport à
l’alimentation ?
S.P : Oui je pense. Mais après tu vois c’est de deux façons. Comme tu sais ce que tu manges
t’es plus cool parce que tu te dis qu’en équilibrant après le reste de ça va aller. Mais de
l’autre tu sais aussi ce qu’il y a dedans et tu te dis « ah ouais quand même c’est super gras ».
On est peut-être plus impliquée. Parce que je connais l’alimentation.
I : Donc pas forcément plus tendue.
124
S.P : Non. Mais je réfléchis plus tu vois ! Sur l’équilibre et tout…
I : D’accord je vois. Et tu sens une évolution des comportements des autres sur toi depuis
que t’es diet ?
S.P : Pas forcément, comme on est tous dans l’alimentation. Mais après t’as des petites
remarques des gens extérieurs quoi : « t’es diet, tu manges au Mc Do, oh la la ». Mais je sais
que c’est pour rire. Ça m’atteint pas du tout.
I : D’accord. Maintenant on va parler de l’alimentation des autres personnes de ton âge. Tu
crois qu’il y a des différences entre ton alimentation et celles des autres jeunes ?
S.P : Euh. Oui je pense. Ils doivent moins calculer les fréquences et tout. Moins manger
équilibré. Mais après pas tant que ça. Je vais au Mc Do, je sors, et tout tu vois. Donc je peux
pas dire que ça soit vraiment en opposition. Tu vois après je pense que manger avec les
autres et comme les autres c’est garder une vie sociale. J’ai des copains, tu vois, ils font ça.
Ils mangent d’abord chez eux pour faire bien attention et qui après nous rejoignent. Mais
bon je trouve ça débile.
I : Des diet ?
S.P : Non des amis qui font du sport. Tu perds le côté social quoi. Mais mes amies diet elles
sont toutes comme moi. Ça nous fait plaisir de nous retrouver ensemble autour d’un repas.
Plus qu’avant, quand j’étais pas diet. Avant ça me fait plaisir, parce que je retrouvais mes
amis. Maintenant ça me fait plaisir de partager un repas avec eux. C’est ce côté-là qui est
présent. Parce qu’au final l’alimentation nous réunit tous. On va échanger, parler de ci de
ça…
I : C’est quoi pour toi l’alimentation de quelqu’un de ton âge ?
S.P : Je pense que c’est pas beaucoup de légumes. Pas mal de féculents. Et des produits
industriels quand même, des trucs tout prêts.
I : Et tu crois que les jeunes ont les clés pour manger équilibré ?
S.P : Oui. Avec tout ce que tu as maintenant à la télé, t’as largement la possibilité de savoir
les trucs de l’équilibre alimentaire.
I : Donc qu’est-ce que c’est manger équilibré pour toi ?
S.P : Vraiment sur la variété. Et sur la qualité des produits. Genre pas des produits industriels,
pas des plats préparés…
I : C’est quoi la qualité des produits industriels pour toi ?
S.P : Beh déjà, c’est pas forcément qu’ils soient plus gras, mais c’est vraiment les ingrédients,
comment ils sont composés. Genre les conservateurs…
I : Donc manger équilibré c’est les bons produits en terme d’apports nutritionnels mais aussi
les ingrédients ?
S.P : Ouais. Et la variété. Tout mélangé ensemble. C’est allié nutrition, et qualité du produit.
I : Tu penses manger équilibré toi?
S.P : Ça dépend des jours! C’est bancale. Je peux pas dire que je mange équilibré. Manger
équilibré c’est sur toute la semaine. Genre une fois un américain par semaine, ou une fois
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une pizza c’est pas grave. Mais si je mange ça 3 jours par semaine là pour moi c’est
déséquilibré. Je le fais pas sur la journée, mais sur la semaine.
I : Donc t’as des semaines équilibrées ?
S.P : Ouais quand même. Je mange souvent avec des amis, mais comme c’est moi qui cuisine
c’est équilibré. Oui j’ai des semaines équilibrées.
I : Donc au final ton alimentation est pas si bancale que ça.
S.P : Ouais finalement ça va, ça colle à ce que j’ai dit, les bons produits et tout. Mais après
des fois je culpabilise. Genre l’américain d’hier je culpabilisais ça m’a dégoutée. Si c’est pour
manger bien d’un côté et manger ça après c’est nul.
I : Tu culpabilises souvent ?
S.P : Non. Mais quand je fais de gros gros écarts… Ouais peut-être… Enfin c’est pas vraiment
de la culpabilité. Des gros écarts d’affilés quoi. Manger super gras. Même pour moi associer
deux féculents ça me fait bizarre.
I : Ça veut dire quoi manger pour toi?
S.P : C’est se faire plaisir. C’est même plus que subvenir à ses besoins. C’est vachement
rythmé quand même, chez moi. Ça rythme ma journée de manger.
I : Et tu me dis manger c’est se faire plaisir. Tu te fais des plaisirs ?
S.P : Ah ouais. Mais moi franchement quand je me fais mes plats, ça me fait plaisir.
I : Se faire plaisir, c’est pas vraiment gras ou sucré…
S.P : Ouais. Genre faire à manger c’est un plaisir, manger une pâtisserie c’est un plaisir. Ça
dépend du moment, du produit. Mais après manger un produit gras seule et manger un truc
gras avec mes amis c’est pas pareil. J’ai plus de plaisir, avec mes amis, d’avoir partagé un
moment avec eux tu vois.
I : D’accord je vois. C’est quoi la nutrition pour toi?
S.P : La nutrition ça serait pas comme la diététique, mais ça serait les sciences de
l’alimentation.
I : Et la diététique?
S.P : C’est l’étude saine de l’alimentation. C’est surtout sain. Genre quand on parle de mal
bouffe c’est plutôt la nutrition. C’est tout ce qui englobe l’alimentation et la diététique c’est
l’alimentation saine.
I : Ok. Et tu penses être légitime à donner des conseils sur l’alimentation, si toi tu manges
pas équilibré ?
S.P : Oui. Après c’est que de la théorie ce qu’on apprend. Et puis si toi tu manges nickel, c’est
plus dur de comprendre le patient. Et si la diet mange mal, ça n’empêche pas qu’elle puisse
donner de bons conseils. C’est comme les tabacologues qui fument.
I : Donc on a parlé du plaisir et si je te dis plaisir et diététique ?
S.P : Pour moi ça va totalement ensemble. Parce que dans la tête des gens diététique c’est
pas se faire plaisir, alors que pour moi c’est totalement associé. Moi j’ai fait des études de
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diététique, et je mange bien, et c’est pas pour autant que je me fais pas plaisir. Ça doit aller
ensemble.
I : Tu t’es déjà senti coupable de manger quelque chose ?
S.P : Ouais. Genre hier. Mais c’est vraiment dans la quantité quoi. Quand tu manges au-delà
de ce que tu peux, je pense.
I : D’accord. Et en lien avec tu te pèses régulièrement ?
S.P : Rarement. Une fois par mois. Et encore. Je vais me peser… Genre quand y’avait ma
mère et ma sœur, je me suis pesée, parce qu’on a fait pas mal de resto, j’ai mangé plus que
d’habitude, je vais me peser mais pour pouvoir me situer un peu. Sinon non je me fis plus à
ce que je vois.
I : Tu connais ton IMC ?
S.P : Oui, quand comme on le calculait en cours, oui je le connais.
I : T’as pris du poids durant tes études ?
S.P : Je crois que j’ai dû prendre 2 kilos. Mais pourquoi je sais pas !
I : Tu l’as mal vécu?
S.P : Ouais, surtout quand tu fais diet. Tu te dis « beh non ça aurait dû être l’inverse ». Mais
ça me dérange pas plus que ça. C’est surtout dans le concept quoi. C’est con, tu fais diet et
tu grossis. Après quand je rentrais chez moi, je prenais 5 kilos à chaque fois… Donc je sais
pas si c’est ça. Mais après avec la diététique t’inclus plus de composantes. Donc est-ce que
c’est pas ça qui m’a fait prendre du poids aussi, je sais pas ! Avant j’avais que le plat. Là j’ai
le plat, le dessert, l’entrée…
I : Et ton plat est pas moins conséquent ?
S.P : Beh justement c’est là où j’ai du mal à me réguler. Je mange mon plat jusqu’à aller à la
satiété. Et après j’ai plus de place pour le dessert mais je le mange quand même.
I : T’as déjà suivi un régime ? Un équilibrage alimentaire ?
S.P : Un régime non. Un rééquilibrage alimentaire, beh je pense que je me le suis fait du
coup, toute seule.
I : Tu t’es déjà senti mal à l’aise avec ton corps ?
S.P : Quand j’ai pris du poids ouais. Avant j’étais super fine alors deux kilos, ça s’est vu direct
tu vois. Mais ça me fait encore bizarre tu vois. C’est que j’ai pris du gras quoi. Je fais plutôt à
mon corps que le chiffre sur la balance.
I : J’ai terminé avec mes questions. Tu as des remarques peut-être ?
S.P : Non, non. Mais c’est très bien comme truc ça fait réfléchir.
I : Oui un peu ! Je te remercie pour ta participation en tout cas.
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Annexe G : Entretien Exploratoire n ° 5
Date : Mercredi 2 mars
Contexte : Domicile de l'interrogé
Durée : 35 minutes.
Enquêté : A.D, Femme, 22 ans, diététicienne-nutritionniste diplômée en 2015, étudiante
Intervieweur : I
I : Dans un premier temps je te remercie de m’accorder un peu de ton temps. J’ai voulu
t’interroger car dans le cadre de mon master, je dois réaliser un mémoire que j’ai choisi de
faire sur les diététiciennes et l’alimentation, et donc c'est pour cela que j’ai voulu
m’entretenir avec toi. Si ça ne te dérange pas, je vais enregistrer notre entretien pour que
je puisse l’analyser plus facilement. Tout ce que tu diras restera anonyme et confidentiel. Je
vais te poser des questions sur toi, ton âge, ta situation familiale… puis ton parcours scolaire.
On va ensuite parler du métier de diététicienne, ensuite de l’image de la diététicienne, de la
cuisine, des changements alimentaires, du sport et de l’alimentation des autres. Pour
commencer, ton prénom, ton âge ?
A.D : Ça marche ! Donc je m’appelle A. j’ai 22 ans. Alors S., j’ai 23 ans. J’habite en couple sur
Toulouse. J’ai fait des études en diététique et maintenant je suis en licence là.
I : Quel bac tu as ?
A.D : J’ai fait un bac S.
I : Le BTS Diététique a été ta première orientation après le bac ?
A.D : Oui. Je savais pas quoi faire. J’ai hésité entre ça et orthophoniste. Comme j’ai fait un
bac S je voulais partir vers du paramédical parce que médecine je pense que j’y serais pas
arrivée. Du coup j’ai pris diet.
I : Pourquoi ?
A.D : J’ai pris diététique parce que je pensais qu’orthophoniste c’était un peu plan plan. Et
comme on parle toujours d’obésité et tout ça beh, je me suis dit qu’il devait y avoir de
l’avenir.
I : C’est quoi qui t’attrayait principalement dans le métier ? L’aide aux autres, la cuisine ?...
A.D : Déjà parce que c’était logique avec mon bac d’aller dans ce secteur. Et puis j’aimais
bien cuisiner, la bouffe. Et aider les gens ça m’intéressait aussi quand même.
I : Tu as eu une expérience personnelle avec la diététique ?
A.D : Moi non. Mais ma mère en a consulté une quand j’étais au lycée. Elle lui avait donnée
un livret, des documents avec des chouettes graphiques et tout. Ça aussi ça m’a motivé à
choisir cette voie. J’avais trouvé ça intéressant.
I : Tu as pris en compte les avis d’autrui par rapport à cette orientation ? Est-ce que tu as eu
des avis ?
A.D : Oui. Mes parents déjà. Savoir si c’était vraiment pour moi ou pas.
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I : Est-ce que tu penses que les campagnes du PNNS ou ce qu’on voit dans les magazines ça
a pu influencer ton choix.
A.D : Euh je sais pas. Je trouvais toutes ces pubs super bien faites. Mais après je crois pas
que ça ait influencer. Je suis pas sûre d’avoir fait le lien avec le BTS. Mais après c’est ça aussi
qui te dit que y’a des problèmes d’obésité, donc il faut y remédier, donc diet ça peut avoir
des débouchés. Mais de façon vraiment claire et précise c’est pas ça non.
I : Tu as des remarques des autres par rapport aux choix de tes études, tes amis qui t’ont fait
des remarques sur la diététique, pourquoi la diététique ?
A.D : Non du tout. Enfin si. J’adore le chocolat depuis que je suis gamine, c’est mon goûter.
Alors on me charriait en disant, que je devais arrêter comme je faisais ça mais sinon non.
I : On va maintenant parler de la profession en elle-même, qu’est-ce que tu en penses de la
profession ?
A.D : Je pense qu’elle est absolument pas valorisée. A part faire maigrir, les gens savent pas
à quoi tu sers. (rires) Et puis même dans les études sont pas vraiment en adéquation avec le
métier. Elles sont trop courtes pour tout ce qu’on doit apprendre. Et puis avec les stages que
j’ai pu faire, tu vois pas trop l’importance de la diet. Concrètement t’as pas des missions
folles, enfin moi ça m’a pas trop plu. Après j’ai fait un stage en libéral, et là ça m’a plu parce
que là t’as un suivi avec le patient, tu as vraiment un retour sur ton travail, et là c’est
intéressant.
I : Est-ce que tu penses que ce métier mérite des améliorations ?
A.D : Oui ! (rires) Déjà changer les études, comme ça y’aura plus de légitimité. Et puis
vraiment engager des diet dans les structures où y’en a pas. Et dans les structures de santé
publique, pour des missions d’équilibre alimentaire, d’éducation un peu.
I : Tu penses que ce métier est en évolution ?
A.D : Je sais pas. En évolution mais dans le mauvais sens peut-être. Mes copines diet qui
cherchent du travail, en trouvent pas. Y’a pas de places dans les hôpitaux… Mais après
maintenant y’a beaucoup de prestataires à domicile, alors qu’avant t’en entendais pas
parler.
I : Est-ce que tu as des regrets d’avoir choisi cette voie ?
A.D : Quand je vois le peu de débouchés oui. Mais après non parce que j’ai appris des trucs
et maintenant je continue les études dans un truc qui me plaît tu vois. Donc mitigée un peu.
I : Maintenant, on va aborder la diététicienne en elle-même. Avant de commencer tes
études tu avais une idée de la diététicienne ? Les missions, les qualités à avoir, l’allure…
A.D : Déjà je pensais que tu étais super importante dans les structures, vraiment
indispensable, parce que bon l’alimentation c’est partout quoi et c’est indispensable, t’avais
ta blouse, tes dossiers et tout. Après je pensais que c’étaient que des nanas et au final c’est
vrai. Et puis physiquement, une personne fine, qui adore cuisiner, qui mange pleins de
légumes, pleins de couleurs dans son assiette.
I : Tu as déjà rencontré des gens qui avaient des idées sur la diététicienne ?
A.D : Oh oui !
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I : Quelles idées ?
A.D : Que tu manges que des légumes, que tu sais pas t’amuser, que t’es hyper carrée, que
tu analyses la bouffe de tout le monde. Que tu dois être bien fine aussi. Mais bon après tu
restes professionnelle quoi et s’arrêter à ça c’est idiot. Pas de Mc Do, pas de coca, pas de
sucreries… Des choses dans le genre.
I : Et tu penses que ce métier est basé sur l’apparence ?
A.D : Beh avant de faire le BTS je t’aurais dit oui. Maintenant un peu moins. Parce que certes
t’as le côté de la nana qui fait maigrir les gens mais de l’autre t’as tout l’aspect
thérapeutique. Où les personnes ont besoin de toi, mais parce que c’est vraiment
indispensable. Genre maladies rénales, ou dénutrition. Ou obésité. Pas 5 kilos à perdre avant
l’été. Mais comme tout le monde pense « amincissement », du coup oui c’est un peu basé
sur le physique à la base.
I : Et tu penses que la diététicienne doit avoir un physique particulier ?
A.D : Beh honnêtement je crois que oui. Je pense que tu dois être un minimum bien, dans la
normale niveau poids. Et c’est bête mais bien habillée aussi tu vois. C’est aussi pour
correspondre à ce que les gens veulent. Voir une diet obèse, ils vont pas trop y croire.
I : Est-ce qu’il y a une mauvaise image de la diététique ?
A.D : Je pense oui. Pour les gens qui vraiment n’y connaissent rien, et que ça les intéresse
pas forcément, je pense qu’ils doivent se dire que c’est vraiment prise de tête.
I : C’est une hygiène de vie pour toi la diététique?
A.D : Euh. Oui. Je pense. Ça concerne ton alimentation du quotidien.
I : Et le sport, le tabac, l’alcool, ça rentre en compte?
A.D : Je pense que c’est différent ça encore. T’as ton hygiène de vie qui prend en compte ta
façon de manger, d’acheter, de consommer certains trucs, de faire du sport, mais voilà. Et
la diététique pour moi c’est que l’alimentation. C’est un des facteurs qui fait que t’es en
bonne santé.
I : D’accord. Maintenant, on va aborder le thème de tes journées types et la cuisine.
A.D : Cooool
I : Tes repas ils se composent comment ? Comment as-tu mangé aujourd’hui par exemple.
A.D : Alors tous les matins je prends un petit dej. Tartines de pain, avec du beurre, du miel,
un café et un jus de fruits. Tous les jours ça. A midi au RU, j’ai pris du chou rouge en entrée,
le plat c’était du riz, avec du poisson en sauce ça allait. Et en dessert un entremet qui avait
au citron là. Je prends souvent des crudités, elles sont bonnes je trouve. En plat c’est souvent
féculents, comme ça je prends pas de risques (rires). Et en dessert ça dépend. Fromage
quand j’aime bien. Oui fruits. Ou la pâtisserie, des fois elles sont bonnes alors je la prends.
Et le soir c’est souvent salade avec un petit truc, genre bruschetta, tarte, ou une salade
composée. Ou sinon des féculents mélangés avec un peu de viande ou un peu de poisson.
Et en dessert soit fruits, soit yaourt. Après dans la journée je prends des trucs aux pauses
entre les cours. Des barres céréales ou des Kinder.
I : Comment tu juges ton alimentation ?
130
A.D : Elle est pas vraiment en harmonie avec ce qu’on apprend en cours, ou même le PNNS.
J’ai pas toutes les composantes, j’ai pas autant de légumes qu’il faudrait et tout. Mais après
franchement ça va. Déjà au RU tu peux pas manger super équilibré. Des fois c’est limite. Et
à l’appart, comme on aime pas les mêmes légumes, je fais pas comme je peux. Mais je
mange mieux qu’à une époque c’est clair.
I : Manger équilibré ça t’ennuie ?
A.D : Non. C’est juste que c’est pas évident à deux. Et que j’ai pas forcément le temps de
faire tout nickel. Mais après je suis pas catastrophique loin de là. J’ai des réflexes que certains
n’ont pas qui font que je mange quand même pas trop mal. Après j’aime bien quoi. Tu fais
ta popote, tu finis sur un truc qui fait du bien à la fin de ton repas, léger, frais c’est cool. Tu
te sens pas lourd quoi.
I : Manger équilibré, c’est quelque chose de léger pour toi ?
A.D : Non. En fait ce que je veux dire c’est que je trouve agréable de finir sur un truc frais,
genre un fruit, un yaourt. C’est léger ça passe bien avec un plat tu vois, qui peut être un peu
plus copieux, si t’as des féculents tu vois. Après moi j’ai un appétit de moineau. Je mange
pas mal sur toute la journée mais sur un repas c’est pas énorme les quantités que je prends.
I : D’accord, je vois… Tu parles d’alimentation avec tes amis ?
A.D : Oui pas mal. Déjà ceux de la fac et du BTS ouais. Quand on se voit déjà c’est autour de
l’alimentation. Tapas, goûter, resto… Donc déjà on se fait goûter les trucs, on change des
restos et tout. C’est vraiment un moment où on partage. C’est nécessaire. On teste et donc
forcément on en parle. Ou on se dit « regarde la recette que j’ai vu » ou « j’ai testé un truc
trop bon ». On parle que de ça, c’est marrant. On est tous gourmands je crois. Et après avec
mes amis qui sont pas dans ça oui. Enfin, c’est surtout elles qui m’en parlent, si tel produit
est bien, comment je cuisine, si je mange équilibré ! (rires) Ou ma mère m’en parle, si c’est
bien ce qu’elle mange, ce qu’elle devrait changer et tout. C’est marrant.
I : Tu parles plus de nutrition ou de cuisine ?
A.D : Avec mes copines qui sont dans la diet, on parle vraiment bouffe. Et les autres c’est
plus le côté nutrition, diététique, équilibre tu vois. Ils demandent des conseils au final.
I : Comment les autres jugent ton alimentation, ta famille, tes camarades de classes ou tes
collègues en stage ?
A.D : Ma famille eux ils voient bien mon évolution. Ils trouvent que c’est plus équilibré. Après
les gens qui me connaissent moins ou en dehors des copines de diet, là ils chambrent un
peu. Que je mange que du chocolat, parce que j’adore, que c’est abusé et tout, que je vais
tout le temps au resto… Mais après c’est pas méchant du tout. Ils sont plus étonnés qu’autre
chose je pense.
I : D’accord. Et sinon, la cuisine en elle-même tu aimes bien ? Est-ce que tu cuisines
beaucoup ?
A.D : Oui franchement j’aime bien. Je fais mes petites expériences c’est cool. Tu fais à
manger et après t’as le plaisir de le manger. Et quand c’est bon je suis trop fière. (rires)
I : Et avant de faire le BTS tu cuisinais ?
131
A.D : Oui un peu. Comme ma mère bossait des fois le week-end je faisais à manger pour mon
père et ma sœur. Mais des trucs bateaux. Mais je savais me débrouiller en arrivant à
Toulouse quoi. Maintenant c’est ma mère qui fait des recettes que je lui apprends c’est
marrant.
I : En BTS on a des cours de techniques culinaires, tu les as appréciés ?
A.D : Oui, c’était bien. On était entre copines c’était cool.
I : Tu gardes quoi comme souvenirs ?
A.D : Déjà on rigolait bien. Puis après j’ai après vraiment les bases quand même. Faire les
différentes pâtes, faire des coulis, des crèmes. Des trucs que j’aurais jamais fait toute seule.
Et puis les copines aussi elle te filait des astuces. Chacun faisait son truc et tu goûtais les
trucs des autres. Tu voyais comment ils avaient fait, ce qu’ils avait mis dedans c’était bien.
I : D’accord. Et pour faire tes courses, tu t’organises comment ?
A.D : Je l’ai fait dans un supermarché. Je fais ma liste avec mes menus et j’achète ce qu’il
faut. Je suis organisée.
I : Tu suis ta liste scrupuleusement ?
A.D : Oui. Après j’achète des trucs en plus des fois. Mais bon je m’enflamme pas trop j’ai un
budget à respecter.
I : Quand tu fais tes courses, qu’est-ce que tu regardes, comment tu choisis tes produits ?
Tu regardes les étiquettes ?
A.D : Je regarde jamais les étiquettes, mais vraiment. Toutes les compositions jamais. A la
limite la liste des ingrédients. Genre, je veux tester un nouveau gâteau. Si le premier
ingrédient dans la liste c’est beurre ou sucre je laisse tomber. Faut pas abuser non plus. Et
après sinon je regarde beaucoup la provenance. J’essaie d’acheter au maximum français,
privilégier les produits locaux tu vois.
I : Pourquoi ?
A.D : Beh pour un même produit, je trouve ça plus sympa de faire profiter des agriculteurs
français. Ça me donne bonne conscience ! (rires) Ah des fois si je regarde les acides gras
saturés.
I : Ça t’apporte quoi de regarder ?
A.D : Beh ça me permet de voir si ce produit c’est un peu « de la merde » ou pas quoi.
I : Et ça te fait poser des produits ?
A.D : Oui, franchement oui. Quand je trouve les valeurs ou les ingrédients un peu excessifs,
avec 1000 additifs, ça m’intéresse pas non plus. J’essaie de manger un peu naturel tu vois.
Les trucs les moins modifiés possibles quand je fais mes courses.
I : Pourquoi ?
A.D : Beh, c’est bête parce que c’est étudié pour, mais je me dis qu’un jour ça aurait des
conséquences sur la santé.
I : D’accord. Donc là on va passer aux changements que tu as eu dans ton alimentation,
pendant le BTS, une fois diplômée… Tu as changé quelque chose ?
132
A.D : Alors la première année non. Fallait gérer l’arrivée dans une grande ville, savoir où faire
les courses, les cours et tout… C’était toujours pareil. Des pâtes ! Le seul truc c’est le petit
dej. Avant j’en prenais pas et dès que j’ai commencé les cours j’ai senti qu’il me le fallait,
sinon j’avais tout le temps faim. Après j’ai commencé à tester plus de plus trucs, vraiment à
plus cuisiner, à varier. Et c’est vraiment cette année où j’ai commencé à mettre des légumes,
acheter des produits laitiers, des fruits… A structurer mieux.
I : Pourquoi tu as fait tous ses changements d’après toi ?
A.D : Je pense pour moi. Parce que manger des pâtes tout le temps c’est pas possible. Et que
je mangeais pas forcément bien, ça pouvait avoir des conséquences sur ma santé.
I : Tu as change des aliments et ta façon de cuisine aussi ?
A.D : Oui. Et puis même maintenant je sens quand c’est gras. Genre ma grand-mère cuisine
assez gras. Et maintenant je suis habituée à pas trop cuisiner gras. Et quand j’y vais, je le sens
et des fois ça m’écœure.
I : Et tu as changé ton alimentation aussi par rapport aux nouvelles personnes que tu as
rencontrées…
A.D : Pas vraiment. Peut-être je teste des recettes des uns des autres mais après y’a pas eu
tant de changements que ça.
I : D’accord. Tu penses être plus détendue vis-à-vis de l’alimentation de puis que t’as fait le
BTS ?
A.D : Bonne question ! (rires) Je pense que je connais les aliments et ce qu’ils apportent et
que je sais quoi faire si je mange pas des trucs supers, je sais m’adapter après tu vois, je suis
plus. Mais d’un autre côté, je calcule pas mal. C’est bête mais souvent j’ai le truc « teh t’as
pris que deux produits laitiers aujourd’hui ». Ou quand j’ai pris mes 3 fruits je suis contente.
Ou genre manger des fritures 2 fois, dans la semaine ça m’embête un peu. Je raisonne pas
du tout en terme de calories, tout ça, ça, ça m’intéresse pas mais je fais par rapport aux
repères du PNNS tu vois. Puis pareil avec les patients que je peux rencontrer, c’est plus
simple.
I : Donc tout de même tu raisonnes un peu sur ce que tu manges…
A.D : Beh quand on te rabâche pendant 2 ans qu’il faut tant de ça, de ça et de ça et que toi
tu le dis à tes patients, ça finit par rentrer dans ta tête quoi. Mais après je suis pas du tout
dans la paranoïa ! Je sais les repères, je les applique tant mieux, je les applique pas tant pis.
Même si au fond, ça doit m’embêter un peu.
I : D’accord je vois. Et tu vois une évolution des comportements des autres sur toi depuis
que t’es diet ?
A.D : Comme je disais tout à l’heure t’as quelques taquineries mais ça va. Après les gens sont
plutôt agréablement surpris tu vois que je mange pas forcément équilibrée et nickel.
I : D’accord. Maintenant on va aborder le thème de l’alimentation des autres personnes de
ton âge. Tu crois qu’il y a des différences entre ton alimentation et celles des autres jeunes ?
A.D : Oui.
I : Tu penses qu’il y a des différences entre ton alimentation et celles des autres jeunes ?
133
A.D : Un peu ouais. Genre ils connaissent le PNNS eux aussi, comme tu le vois tout le temps
à la télé, mais après ils doivent pas calculer autant. Genre 3 fois des pâtes dans la semaine
ça doit pas en embêter beaucoup. Mais surtout pour les gens qui savent pas trop cuisiner.
Ceux qui aiment ils doivent bien manger de tout, je pense. Je pense que la différence c’est
surtout que les jeunes doivent manger plus de trucs industriels. Et encore… Les étudiants
plus. Mais après manger comme je mange c’est donné à tout le monde. Le RU c’est le même
menu quoi. Après je suis pas un être complètement différent parce que j’ai fait diet. Je vais
au resto, je vais au mc do, je mange des nems, je me fais livrer des sushis, normal quoi. Pas
obligée de manger toujours nickel parce que je suis diet. Je pense qu’il y a pas mal de
similitudes dans les alimentations. Juste que peut-être que les diet calculent plus.
I : C’est quoi pour toi l’alimentation de quelqu’un de ton âge ?
A.D : Comme je disais, des féculents. De la viande. Pas trop de poisson et de légumes. Des
gâteaux aussi.
I : Et du coup ton alimentation s’en éloigne ?
A.D : Un peu oui. Parce que je pense plus varier. Et mis à part à la fac, j’ai pas de gâteaux
chez moi.
I : Tu crois que les jeunes ont les clés pour manger équilibré ?
A.D : Oui ! Le PNNS est super clair quand même. A part pour les légumes et fruits avec les 5
portions, mais ça c’est tout le monde qui comprend pas, ils sont pas clairs sur ça, les gens
comprennent pas.
I : Et qu’est-ce que manger équilibré pour toi ?
A.D : Manger de tout. En quantité raisonnable je pense. Et éviter les produits indus. C’est
pas une alimentation stricte, manger équilibré. Au contraire, t’as droit à tout, féculents,
matières grasses. Faut juste gérer. Et ça tout le monde ne le sait pas, comme les diet peuvent
le savoir.
I : Tu penses manger équilibré toi?
A.D : Sur le long terme oui. Pour moi ça se construit une alimentation équilibrée sur de
longues périodes. Sur la ligne des repas des petits « écarts » ça signifie rien. Mon poids est
stable, j’ai pas de problème de santé, c’est quelque part je mange bien. Après si tu regardes
des semaines, des fois c’est cata. Parce que j’ai eu tels trucs, tels trucs qui font que j’ai mangé
différemment des autres jours, mais c’est rare. Et le reste de mon quotidien n’en est pas
impacté pour autant.
I : Ça veut dire quoi manger pour toi?
A.D : C’est se nourrir mais avec d’autres trucs : être en famille, se faire plaisir… Manger c’est
plus large comme terme je trouve.
I : D’accord. C’est quoi la nutrition pour toi?
A.D : La nutrition c’est plus l’aspect pathologique ou qui touche à des populations précises
un peu.
I : Et la diététique?
134
A.D : La diététique c’est plus, un truc quotidien, sain. Que tout le monde peut appréhender
un peu.
I : Ok. Et tu penses être légitime à donner des conseils sur l’alimentation, si toi tu manges
pas équilibré ?
A.D : Oui. Parce que premièrement, j’ai pas une alimentation chaotique, j’ai pas de
problèmes de santé. Et puis si les gens viennent voir une diet, c’est parce que t’es pro et tu
sais mieux que ce qui est bon ou pas. Et aussi de toute façon quand t’as un patient qui te dit
« j’adore le chocolat », tu peux que rigoler, dire que toi aussi mais qu’il faut faire gaffe. Tu
manges dans des quantités raisonnables et voilà. On a tous nos travers et heureusement !
I : Et d’après toi, plaisir et diététique c’est conciliable ?
A.D : Oui. Comme je disais manger équilibré c’est sur du long terme, tu peux te faire plaisir
quoi. Après plaisir c’est variable selon les gens. Des fois manger une bonne salade composée
avec des bons produits c’est un plaisir. Tout comme un muffin peut me faire plaisir ou
manger des chips. Ça dépend du contexte. Et des gens aussi tu vois. Mais c’est conciliable
ouais. Sinon les sucreries et tout ça n’existeraient pas ! (rires)
I : Tu t’es déjà senti coupable de manger quelque chose ?
A.D : Oui. Quand je mange un truc mais en trop grande quantité. Ou que je fais beaucoup
d’excès, parce que j’ai pas le choix, genre j’ai du travail, je suis stressée et tout. Là je peux
culpabiliser. Je culpabilise quand de base ça va pas ! Sinon je m’en veux pas d’avoir mangé
du chocolat au goûter tu vois.
I : D’accord. Et en lien avec tu te pèses régulièrement ?
A.D : Une fois par semaine à peu près. Enfin quand je rentre chez mes parents. Parce qu’à
Toulouse j’ai pas de balance. Pour vérifier comme ça, voir la stabilité. Après je suis pas une
accro. Si j’ai pris 500 g je m’inquiète pas. Si la semaine d’après j’ai repris là je vais me dire
« bon qu’est-ce que t’as fichu ? » mais voilà c’est tout.
I : T’as pris du poids durant tes études ?
A.D : Non j’ai même perdu. Comme je me dépensais plus qu’au lycée et j’ai perdu, alors que
la première année tu vois je mangeais vraiment pas top et j’ai pas pris. Comme je faisais
beaucoup de déplacements à pied je compensais.
I : T’as déjà suivi un régime ? Un équilibrage alimentaire ?
A.D : Pas de régime. Mais j’ai rééquilibré mon alimentation quoi.
I : Tu t’es déjà senti mal à l’aise avec ton corps ?
A.D : Oui ! Au lycée quand j’avais grossi. Ou même quand je fais les magasins, j’essaie des
trucs, beh ça me va pas parce que je suis trop mince aussi, que j’ai pas ce qu’il faut ! (rires)
Mais c’est rare. C’est quand j’ai fait des excès sans plaisir où je me sens pas bien.
I : D’accord. J’ai terminé avec mes questions, je te remercie. Tu as des remarques peut-être ?
A.D : Non, non. C’était très bien. Merci à toi !
135
Annexe H : Questionnaire quantitatif « Représentation des diététiciennes »
136
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142
143
Listes des tableaux
TABLEAU 1 : TABLEAU COMPARATIF DES ANNEES D’ETUDE DU METIER DE DIETETICIEN, SELON LES PAYS
EUROPEENS........................................................................................................................... 25
TABLEAU 2 : PRESENTATION DES PROFILS INTERVIEWES EN ENTRETIEN EXPLORATOIRE ............................... 45
TABLEAU 3 : ORGANISATION D'UNE ENQUETE QUALITATIVE .................................................................. 68
TABLEAU 4 : ORGANISATION D'UNE ENQUETE QUANTITATIVE ................................................................ 70
TABLEAU 5 : GUIDE D'ANIMATION DU FOCUS GROUP ........................................................................... 76
TABLEAU 6 : GUIDE D'ENTRETIEN ..................................................................................................... 79
144
Table des matières
REMERCIEMENTS ................................................................................................................... 8
SOMMAIRE ........................................................................................................................... 10
INTRODUCTION .................................................................................................................... 11
PARTIE 1 : CADRE THÉORIQUE .............................................................................................. 14
CHAPITRE 1 : POLITIQUE NUTRITIONNELLE EN FRANCE ..................................................................... 15
1. Un Programme National Nutrition Santé améliorant l’état de santé de la
population… ...................................................................................................................... 16
2. … Et médicalisant la vie quotidienne ? .................................................................... 19
CHAPITRE 2 : LE METIER DE DIETETICIEN NUTRITIONNISTE................................................................. 22
1. Le métier et les études… .......................................................................................... 22
1.1. Cadre réglementaire et champs d’action ....................................................... 22
1.2. Les diplômes qualifiants .................................................................................. 24
2. … et les étudiants ..................................................................................................... 27
2.1. Motivations à exercer… ................................................................................... 27
2.1.1. Contexte actuel de la modernité alimentaire ............................................ 27
2.1.2. Légitimité ..................................................................................................... 28
2.2. … Et identité professionnelle .......................................................................... 29
CHAPITRE 3 : L’ALIMENTATION DU JEUNE ADULTE ........................................................................... 33
1. Les pratiques alimentaires ....................................................................................... 34
2. Le bien manger......................................................................................................... 36
3. Identité et sociabilité alimentaire............................................................................ 37
4. Particularités féminines ........................................................................................... 39
4.1. Alimentation des jeunes femmes, les grandes lignes .................................... 39
4.2. Le rapport alimentation et modèle corporel ................................................. 40
4.2.1. Les modalités de contrôle alimentaire ....................................................... 40
4.2.2. Les rapports au corps .................................................................................. 41
PARTIE 2 : HYPOTHÈSES ........................................................................................................ 43
CHAPITRE 1 : PROBLEMATIQUE ET CONSTRUCTION DES HYPOTHESES .................................................. 44
CHAPITRE 2 : HYPOTHESE 1 : LE COUPLAGE DES NORMES SOCIALES ET PROFESSIONNELLES TEND A UNE
RATIONALITE ALIMENTAIRE CHEZ LES JEUNES DIETETICIENNES NUTRITIONNISTES, DANS LE CONTEXTE DE LA
NUTRITIONNALISATION ................................................................................................................ 46
1. Les représentations de la diététicienne................................................................... 46
2. Une rationalité en lien avec la pratique professionnelle ........................................ 49
CHAPITRE 3 : HYPOTHESE 2 : DANS LE CONTEXTE DE MODERNITE ALIMENTAIRE ET D’UNE REDEFINITION DE
LA JEUNESSE, UN DECOUPLAGE ENTRE IDENTITE PROFESSIONNELLE ET PRATIQUES ALIMENTAIRES
QUOTIDIENNES APPARAIT ............................................................................................................ 55
145
1.
2.
3.
Le modèle alimentaire français ............................................................................... 55
Les mêmes conditions générationnelles ................................................................. 58
Un désengagement dans les règles diététiques ? .................................................. 61
PARTIE 3 : MÉTHODOLOGIE PROBATOIRE ............................................................................ 63
CHAPITRE 1 : METHODOLOGIE DE COLLECTE DE DONNEES ................................................................ 65
1. Méthode qualitative................................................................................................. 65
1.1. L'entretien individuel semi-directif................................................................. 66
1.2. Focus group...................................................................................................... 66
2. Méthode quantitative .............................................................................................. 69
CHAPITRE 2 : PROTOCOLE DE RECHERCHE ...................................................................................... 71
1. Hypothèse 1 : Le couplage des normes sociales et professionnelles tend à une
rationalité alimentaire chez les jeunes diététiciennes nutritionnistes, dans le contexte
de la nutritionnalisation ................................................................................................... 71
1.1. Questionnaire « Représentation des diététiciennes » .................................. 72
1.2. Focus Group « Impacts de la représentation de la diététicienne et des
études » ........................................................................................................................ 72
2. Hypothèse 2 : Dans le contexte de modernité alimentaire et d’une redéfinition de
la jeunesse, un découplage entre identité professionnelle et pratiques alimentaires
quotidiennes apparaît ...................................................................................................... 74
CHAPITRE 3 : PROPOSITION D'OUTILS PROBATOIRES ........................................................................ 76
1. Hypothèse 1 : Le couplage des normes sociales et professionnelles tend à une
rationalité alimentaire chez les jeunes diététiciennes nutritionnistes, dans le contexte
de la nutritionnalisation ................................................................................................... 76
1.1. Questionnaire « Représentation des diététiciennes » .................................. 76
1.2. Focus Groupe « Impacts de la représentation de la diététicienne et des
études » ........................................................................................................................ 76
2. Hypothèse 2 : Dans le contexte de modernité alimentaire et d’une redéfinition de
la jeunesse, un découplage entre identité professionnelle et pratiques alimentaires
quotidiennes apparaît ...................................................................................................... 79
CONCLUSION ........................................................................................................................ 82
BIBLIOGRAPHIE ..................................................................................................................... 85
TABLES DES SIGNES ET ABREVIATIONS ................................................................................. 90
TABLE DES ANNEXES ............................................................................................................. 92
ANNEXE A : GUIDE D’ENTRETIEN EXPLORATOIRE N ° 1 ..................................................................... 93
ANNEXE B : GUIDE D’ENTRETIEN EXPLORATOIRE N ° 2 ..................................................................... 94
ANNEXE C : ENTRETIEN EXPLORATOIRE N ° 1 ................................................................................. 97
ANNEXE D : ENTRETIEN EXPLORATOIRE N ° 2 ............................................................................... 103
ANNEXE E : ENTRETIEN EXPLORATOIRE N ° 3................................................................................ 107
146
ANNEXE F : ENTRETIEN EXPLORATOIRE N ° 4 ................................................................................ 118
ANNEXE G : ENTRETIEN EXPLORATOIRE N ° 5 ............................................................................... 128
ANNEXE H : QUESTIONNAIRE QUANTITATIF « REPRESENTATION DES DIETETICIENNES »....................... 136
LISTES DES TABLEAUX ......................................................................................................... 144
TABLE DES MATIERES ......................................................................................................... 145
147
Résumé
Dans un contexte de modernité alimentaire, avec la diffusion quotidienne de
messages nutritionnelles et de normes esthétiques, véhiculés par les médias, la femme se
retrouve sous le coup de différentes pressions. Les jeunes diététiciennes nutritionnistes sont
au cœur de ses préoccupations, à la fois en tant que dispensatrices de la « bonne parole
nutritionnelle » mais également femmes dans une société occidentale basée sur une image
particulière de la « belle » femme. Nous contextualiserons notre étude, par l’approche des
politiques nutritionnelles françaises, la profession de diététicien, et les jeunes adultes et
leurs rapports à l’alimentation, pour aboutir à une problématique concernant l’influence des
identités sur les représentations alimentaires des jeunes diététiciennes. Notre travail sera
appuyé par des entretiens exploratoires réalisés auprès de jeunes diététiciennes de 22 à 23
ans, récemment diplômées, mais également sur des entretiens de jeunes sans lien avec ce
milieu, afin de dégager deux hypothèses. Enfin, nous proposerons une méthodologie
probatoire, après avoir défini les outils, afin de confirmer ou infirmer nos hypothèses.
Mots clés : diététique – nutritionnalisation – identité – représentation – modèle alimentaire
– jeunesse
Abstract
In a context of food modernity, with daily diffusion in the media of nutritional
messages and aesthetic standards, women are constantly pressured. Young nutritionists are
at the core of these concerns, both as holders of the « good nutritional speech » and as
women in a Western society based on a particular image of the « beautiful » woman. We
will contextualize our study by analyzing French nutritional policy, the profession of
dietician, and the relation of young adults to food, to highlight the issue of the influence of
young dieticians’ identities on their dietary perceptions. Our research will be supported by
exploratory interviews with 22 to 23 years old dieticians who recently graduated, and
conversations with young persons unrelated to this field from which two assumptions will
be drawn. Finally, after defining our tools, we will use a probationary methodology to prove
or disprove our assumptions.
Keywords: dietary - nutritionnalisation - identity - representation - food model - yout

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