Les IDE franco-polonais en 2014
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Les IDE franco-polonais en 2014
Les IDE franco-polonais en 2014 Résumé Les récentes publications des chiffres bilatéraux de la Banque de France et de la Banque centrale polonaise ont toutes deux mis en lumière un net rebond des flux d’investissement français vers la Pologne dans un contexte de forte progression générale des flux d’IDE sortants français. En harmonie avec la bonne orientation de l’investissement direct étranger en Pologne, que semblent confirmer les données préliminaires de balance des paiements 2015, ce redémarrage a permis à la France de consolider sa place parmi les principaux investisseurs directs étrangers dans ce pays : le stock d’IDE français en Pologne (19,94 Mds € selon la Banque centrale polonaise, 13,69 Mds € selon la Banque de France) situait l’an dernier la France en deuxième position derrière l’Allemagne pour cet indicateur une fois décomptés les stocks néerlandais et luxembourgeois, dont une part significative est vraisemblablement réalisée pour le compte de pays tiers. Sixième destinataire derrière le RoyaumeUni et devant le Canada des flux d’IDE français dans le monde l’année dernière (4,38% des flux nets totaux, contre 3,14% en 2013), la Pologne n’apparaissait, en revanche, que comme leur seizième pays d’accueil en termes de stocks, son poids dans ces derniers demeurant inchangé à 1,30% du total à l’aune des revalorisations opérées par la Banque de France. I. La reprise des flux d’IDE français en Pologne répond à l’orientation favorable de la conjoncture en Europe centrale depuis la fin 2013 Après s’être, selon les chiffres de la Banque de France comme de la Banque centrale polonaise (NBP), sensiblement infléchis au cours de la période 2011-2013, les flux d’IDE français en Pologne ont selon la Banque de France atteint l’an dernier un pic de 1,41 Md € (dont 969 M€ pour les opérations en capital social, en hausse de 822 M€ par rapport à 2013) inégalé depuis la période 2000-2004, durant laquelle les perspectives d’entrée de la Pologne dans l’Union Européenne avaient joué un rôle de catalyseur sur l’investissement direct étranger. Ils ont progressé, selon les chiffres révisés de l’Institut d’émission polonais, de 2,20 Mds PLN (524,4 M€) en 2013 à 4,94 Mds PLN (1,18 Md €) l’année dernière, dont 5,0 Mds PLN sous forme de capitaux propres, 2,5 Md PLN sous forme de bénéfices réinvestis et -1,04 Md PLN au titre des autres opérations. La France est, dès lors, apparue comme le troisième investisseur en flux en Pologne en 2014 derrière le Luxembourg (16,0 Mds PLN) et les PaysBas (14,9 Mds PLN) mais devant la Belgique (4,8 Mds PLN), Chypre (3,1 Mds PLN) et l’Allemagne (2,6 Mds PLN avec des rapatriements de capitaux propres de 3,5 Mds PLN, soit 833,7 M€), les chiffres de la Banque centrale devant être lus à la lumière des flux indirects transitant à travers Chypre, le Luxembourg ou encore les Pays-Bas depuis des pays-tiers ; la France a, dès lors, probablement été en réalité le premier investisseur étranger en Pologne l’année dernière. Demeurée, durant la période de reflux de l’investissement direct étranger (2012-2013), un des principaux investisseurs étrangers en Pologne, la France a donc pleinement tiré parti du rebond des flux d’IDE vers ce pays l’année dernière : les flux entrants d’IDE en Pologne se sont en effet, selon les chiffres donnés par la Banque centrale (NBP) sur la base du principe directionnel étendu, établis l’an dernier à 37,64 Mds PLN (8,99 Mds € à taux de change actualisé), contre seulement 8,64 Mds PLN (2,06 Mds €) en 2013, les stocks progressant quant à eux de 32,9 Mds PLN à 731,73 Mds PLN (+ 3,2 Mds € à 171,7 Mds € malgré la dépréciation induite par la fixation du taux de change de référence à la date du 31 décembre d’environ 4,26 EUR/PLN, contre une moyenne légèrement inférieure à 4,19 EUR/PLN sur l’ensemble de l’année 2014). Cette orientation favorable apparaît confirmée, pour l’exercice actuel, par les chiffres préliminaires de balance des paiements du premier semestre, qui font état d’une hausse de 10,12 Mds PLN (3,06 Mds €) du passif polonais au titre des IDE au cours du premier semestre 2015. Si elle coïncide, de manière générale, avec une forte progression de l’investissement des entreprises françaises à l’étranger en 2014 (+ 71,6% à 32,3 Mds € au total), l’évolution des flux d’IDE français en Pologne s’en distingue cependant, en nette rupture avec les années antérieures, par la part prépondérante des transactions en capital social, qui ont représenté l’an dernier 68,5% des flux d’IDE français en Pologne (soit 969 M€, contre respectivement 344 et 101 M€ soit 24,3 et 7,1% du total - pour les bénéfices réinvestis et les autres opérations) alors qu’ils ne représentaient que 16,0% des flux d’IDE français dans le monde (contre respectivement 28,2 et 55,7% pour les bénéfices réinvestis et les autres opérations). Cette orientation pourrait indiquer la relâche d’un processus de désendettement en partie imputable à la situation des maisons-mères qui avait conduit, au cours des années précédentes, nombre de ces dernières à rapatrier, sous forme de prêts intra-groupes, une partie des liquidités dont disposaient leurs filiales en Europe centrale. Illustrée l’an dernier, outre le rachat – suivi de la fusion en début d’année 2015 pour former une entité regroupant 4% des actifs du secteur bancaire – de 90% du capital de la banque BGŻ par le groupe BNP en septembre, par les acquisitions par les groupes Axa et Auchan des branches polonaises de BRE Assurance (filiale de l’allemand mBank) et de Real, la première portant initialement sur un montant de 570 M PLN (136 M€) tandis que la seconde, annoncée dès 2012, s’inscrivait dans le cadre du rachat, pour 1,1 Md €, de 91 hypermarchés en Pologne, Russie, Roumanie et Ukraine, la progression des investissements français en Pologne doit être interprétée à l’aune de la résilience puis du redémarrage de l’économie polonaise, qui a renoué l’an dernier avec une croissance de 3,4% après une période de décélération au début de la décennie. Elle reflète, de manière plus générale, le positionnement stratégique du marché polonais au sein de la chaîne de production centre-européenne, la compétitivité-coût du marché polonais par rapport à ses partenaires européens, la stabilité de l’environnement institutionnel et réglementaire1, jusqu’à présent favorable à l’investissement étranger en dépit de restrictions ponctuelles dans certains secteurs d’activité (médias, transports aériens, secteur primaire) mais aussi, de manière croissante, le potentiel du marché intérieur, fort d’une population de 38 millions d’habitants sur laquelle a reposé l’essentiel du dynamisme de l’économie polonaise au cours des derniers trimestres, ce paramètre jouant vraisemblablement un rôle décisif dans l’investissement dans le secteur tertiaire. On notera, enfin, la relative stabilité du taux de change l’année dernière en dépit d’une dépréciation ponctuelle au cours des deux derniers mois (voir supra). II. La structure des IDE français se caractérise par une part importante de prêts intra-groupes Revus légèrement à la baisse à l’occasion du passage au principe directionnel étendu, les stocks d’IDE de première contrepartie française étaient en 2013 – dernière année disponible – estimés à 19,12 Mds € (soit 11,9% du total) par la Banque centrale polonaise, contre 21,39 Mds € (12,3% du total) en 2012. Ils auraient, selon les derniers chiffres de la Banque de France, progressé de 6,9% à 13,69 Mds € par rapport aux 12,81 Mds € estimés pour 2013, où l’on notera un fort écart avec les chiffres de son homologue polonaise ; cet investissement consiste, pour l’essentiel, en des prises de participation sous forme de capitaux propres, dont la part dans le stock total a selon la Banque de France progressé l’an dernier de 70,6 à 72,0% (soit 9,86 Mds €, contre 3,84 M€ au titre des autres opérations). Si la Pologne n’apparaissait l’an dernier, en stocks qu’en seizième place (sous réserve de publication de données encore confidentielles) du classement des pays destinataires des IDE sortants français, la France conserve en revanche, selon les chiffres polonais, une position prépondérante au sein des principaux investisseurs étrangers en Pologne. Désormais légèrement dépassée par le Luxembourg, dont le stock est passé l’an dernier de 17,66 à 20,37 Mds €, la France apparaissait ainsi, avec un stock de 85,00 Mds PLN (19,42 Mds €) au quatrième rang des principaux investisseurs directs étrangers derrière les Pays-Bas (126,17 Mds PLN, 29,60 Mds €), passés à la première place et l'Allemagne (119,26 Mds PLN, 27,98 Mds €), On notera cependant l’adoption récente, le 24 juillet, d’une loi sur le contrôle des investissements stratégiques octroyant à l’Etat le droit de bloquer l’acquisition de 20% des actions de sociétés opérant dans des secteurs d’activité jugés stratégiques (énergie, défense, télécommunications pour l’essentiel). 1 deuxième, mais nettement devant l’Espagne (46,14 Mds PLN, 10,82 Mds €) et l’Italie (39,49 Mds PLN, 9,26 Mds €). S’il convient de pondérer le classement des investisseurs étrangers par les réserves susmentionnées quant aux rôles joués par les Pays-Bas, le Luxembourg et Chypre, on notera cependant que la France se singularise par une proportion « d’autres opérations » (essentiellement des prêts intra-groupes) particulièrement importante dans ses stocks, 44,9% des IDE français répondant de cette catégorie contre une moyenne de 22,6% pour l’IDE dans son ensemble et seulement 15,2% pour l’investissement allemand ; cette situation, exceptionnelle parmi les premiers investisseurs mais qui ne remet pas en cause l’importance de l’investissement français en capitaux propres, également quatrième en valeur au 31 décembre 2014 selon la NBP, pourrait éventuellement traduire la forte concentration de l’IDE français dans le secteur des services. Cette situation pourrait permettre d’éclairer la situation particulière de la France, dont le stock en euros figure, en dépit de flux entrants conséquents, parmi les rares à être réévalués à la baisse (- 385,4 M€, contre une hausse de 697,1 M PLN du stock en zlotys) dans les pays ayant l’euro pour devise, la variation des stocks ayant, en termes agrégés, été positive pour les pays de la zone euro à composition constante (+ 42,12 Mds PLN et + 6,20 Mds €) et négative pour les autres pays (- 9,22 Mds PLN, - 3,03 Mds €) du fait, notamment, des variations du taux de change, qui se sont traduites par l’appréciation des instruments libellés en euros et la dépréciation de ceux libellés en zlotys : alors que le stock des IDE français investis dans le cadre d’opérations en capitaux propres (incluant les bénéfices réinvestis) a progressé, du fait des nouvelles transactions, de 892,7 M€ à 11,00 Mds € (+ 4,97 Mds PLN à 46,87 Mds PLN), celui des IDE comptabilisés au titre des « autres opérations » a en revanche été déprécié de 1,28 Md € à 8,95 Mds € (- 4,27 Mds PLN à 38,13 Mds PLN) en raison, notamment, de la dépréciation du passif polonais vis-à-vis de la France (de 1,20 Md € à 10,94 Md €, l’actif progressant de 77,9 M€ à 1,96 Md €), ce qui pourrait en partie résulter des variations du taux de change. La dépréciation du stock d’IDE français, si elle doit être pondérée par la progression du stock d’autres opérations d’une majorité des pays de la zone euro, apparaît donc concentrée sur les instruments de prêts intra-groupes. La position des entreprises françaises leur a néanmoins permis de percevoir au titre de leur activité en Pologne des bénéfices de 6,66 Mds PLN (soit 1,59 Md €, dont 452,6 M€ réinvestis sur place) en 2014 selon la NBP (soit un taux de rentabilité apparent de 7,9% par rapport au stock en début d’année), la Banque de France estimant quant à elle les revenus totaux de l’investissement français à respectivement 990 et 910 M€ en 2013 et 2014, dont 144 et 158 M€ sous forme d’intérêts sur les prêts intragroupes, 540 et 408 M€ sous forme de dividendes et 306 et 344 M€ sous forme de bénéfices réinvestis pour des taux de rentabilité apparents de respectivement 7,7 et 6,6% par rapport au stock en début d’année (soit des rentabilités apparentes respectives de 3,8 et 4,1% pour les titres de dette et de 9,4 et 7,6% pour les titres de participation, en incluant les bénéfices réinvestis) ; on notera que ce taux apparaît légèrement en-deçà de celui de la plupart des autres investisseurs en raison de la part importante des autres opérations dans l’investissement français (voir Annexe), en particulier dans un contexte d’assouplissement général des conditions de financement. L’activité des filiales françaises demeure un facteur de dynamisme important pour l’économie polonaise. Alors qu’on dénombrait en 2012, selon l’enquête Foreign Affiliates Trade Statistics, 527 filiales françaises employant en Pologne, hors-secteur financier, 159 859 personnes pour un chiffre d’affaires et un résultat opérationnel de respectivement 28,8 et 4,5 Mds €, de récentes estimations du Bureau des statistiques faisaient des filiales françaises le deuxième acteur étranger en Pologne en 2013 derrière les Pays-Bas (7,7 Mds €) mais devant l’Allemagne (7,4 Mds €) avec des actifs estimés à 7,5 Mds € ; elles concentraient l’essentiel de leurs actifs, selon cette source, dans le secteur des télécommunications, qui représentait, grâce, vraisemblablement, au poids d’Orange Polska, près de 48% des actifs des filiales françaises ; si elle se distingue également par sa présence dans le secteur de la distribution, qui représentait en 2013 14,9% des actifs de ses filiales, la France se caractérisait en revanche, malgré d’importants investissements dans ce secteur (16,0% du total), par un investissement manufacturier sensiblement plus circonscrit que l’Allemagne et les Pays-Bas, dont près d’un tiers des actifs étaient représentés par des entreprises de ce secteur. Il convient, par ailleurs, de rappeler qu’audelà des simples flux d’IDE, la France est également présente en Pologne par le truchement de son secteur bancaire, dont la position vis-à-vis des contreparties résidentes était au deuxième trimestre estimée à 46,46 Mds USD (deuxième après l’Allemagne) selon les chiffres de la Banque des règlements internationaux (voir Annexes). III. L’investissement polonais en France demeure encore marginal Encore marginaux et principalement concentrés dans le secteur des services, les stocks d’investissement direct polonais en France apparaissaient, selon la Banque de France, toujours négatifs en termes nets (- 1,29 Md € en 2014, - 1,34 Md € en 2013) ; cette situation s’explique par le solde négatif du stock des « autres opérations » (- 1,52 Md €, - 1,58 Md € en 2013), vraisemblablement imputable au rapatriement sous forme de prêts intra-groupes d’une partie importante des revenus de l’activité en France, en particulier dans le secteur des services où les stocks atteignaient, selon les derniers chiffres disponibles par secteur – et non-comparables aux chiffres susmentionnés –, - 2,20 Mds €, dont -2,27 Mds € sous forme « d’autres opérations » en 2013. Les capitaux propres des filiales françaises d’entreprises polonaises s’établissaient l’an dernier à 233 M€ et demeurent pratiquement inchangés par rapport à 2013 (235 M€), le rachat, en début d’année 2015, de 65,3% des parts du groupe Fruehauf par le producteur de remorques et semi-remorques Wielton pour un montant de 9,5 M€ (avec une option à 6,6 M€ pour le rachat du reliquat en 2017), ayant toutefois illustré la hausse de l’intérêt des entreprises polonaises pour la France. Les chiffres de la NBP, négatifs depuis l’introduction du principe directionnel étendu, tendent à confirmer la faiblesse de l’engagement des entreprises polonaises en France ; l’Institut d’émission polonais estimait ainsi en 2014 le stock d’IDE polonais en France, pratiquement inchangé par rapport à 2013, à – 1 019,3 M PLN (- 239,1 M€), le poste « autres opérations » expliquant cette position négative avec un stock négatif de 1 169,3 M€ alors que les capitaux propres étaient estimés à 150,0 M€ ; les flux d’IDE polonais en France semblent, cependant, avoir fortement progressé l’an dernier selon la Banque centrale, dont les chiffres font de la France le premier bénéficiaire d’IDE sortants polonais en 2014 après Chypre avec un flux net de 1 911,8 M PLN (456,8 M€) nettement supérieur à celui des flux adressés à l’Allemagne (230,1 M PLN, soit 55,0 M€) ; cette conclusion doit toutefois être nuancée par un rappel de la structure de ces flux, qui ressortent en territoire négatif pour les opérations en fonds propres (- 137,9 M€ en incluant les bénéfices réinvestis) et ont dès lors exclusivement reposé sur les « autres opérations » (+ 594,3 M€ en termes nets). On dénombrait pour rappel, selon l’enquête FATS, 13 filiales polonaises (hors-secteur financier) en France en 2012 (14 en 2011) hors-secteur financier ; générant un chiffre d’affaires de 202,0 M€, elles employaient au total 421 personnes, dernière année disponible selon l’enquête d’Eurostat. Copyright Tous droits de reproduction réservés, sauf autorisation expresse du Service Économique Régional de Varsovie (adresser les demandes à [email protected]). Clause de non-responsabilité Le Service Économique Régional s’efforce de diffuser des informations exactes et à jour, et corrigera, dans la mesure du possible, les erreurs qui lui seront signalées. Toutefois, il ne peut en aucun cas être tenu responsable de l’utilisation et de l’interprétation de l’information contenue dans cette publication. Note rédigée par Louis Nouaille Degorce Note revue par David Karmouni Service Économique Régional de Varsovie 1, rue Piekna, 00-477 Varsovie Version du 20 novembre 2015 Annexes Variation des stocks d'IDE, par devise du pays d'origine En zlotys En euros 2013 Zone euro 565038,7 136245,8 2014 Hors-zone euro 133788,7 32260 Zone euro 607156,8 142448,2 Variation Hors-zone euro 124570,4 29226,1 Zone euro 42118,1 6202,4 Hors-zone euro -9218,3 -3033,9 Source : NBP