Architecture des villes d`eaux. Stations thermales et stations

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Architecture des villes d`eaux. Stations thermales et stations
Architecture des villes d'eaux.
Stations thermales et stations balnéaires.
En 1984, dans un ouvrage sur les villes d’eaux, deux historiens de l’art, Lise Grenier et
Dominique Jarassé définissaient les limites de leur étude sur les villes d'eaux aux « stations
possédant un établissement thermal, à l'exclusion des stations balnéaires et climatiques et des
stations hydrothérapiques ou thalassothérapiques »1 (fig. 1).
Existe-t-il une architecture thermale spécifique ? Les lieux où l'on prend les bains n'ont-ils
pas tous un même air de famille ? La classification médicale et juridique des villes où se
développent des traitements thérapeutiques à base de soins hydrominéraux reconnus par la loi
recouvre-t-elle une réalité architecturale et urbanistique particulière ? Faut-il distinguer les types
de villes selon les types de bains ?
Jusqu'au début du XXe siècle, la station d'hydrothérapie du bord de mer est une variante de
la ville thermale. Les guides touristiques du XIXe siècle présentent ensemble les « bains de mer et
les villes d'eaux ». Les monographies urbaines des guides Hachette, par exemple regroupent dans
une collection unique stations thermales ou balnéaires et régions touristiques. Le Bottin-Mondain
de 1908 reprend la même formule pour présenter sous une seule carte les stations thermales,
balnéaires et pittoresques de la France (fig.2).
Les guides médicaux des premières décennies du XXe siècle auxquels font référence Lise
Grenier et Dominique Jarassé distinguent trois types de stations2. Les stations hydrominérales,
appelées encore aujourd’hui stations thermales ou « villes d’eaux » sont à l’époque au nombre de
170 à 220 environ. Les plages marines, d'un nombre légèrement supérieur, sont appelées plus
communément « stations balnéaires ». Enfin, les stations climatiques regroupent plus de 1200
unités. Quelques villes appartiennent aux deux premières catégories comme stations thermales et
balnéaires : Le Croisic, Pornic, Les Sables d'Olonne, Royan, Soulac, Arcachon, Biarritz, Hyères,
Cannes, Beaulieu-sur-Mer, Monaco, Menton.
Le traitement thérapeutique et ses vertus varient en fonction du milieu et du type d'action
des soins. La thérapie s’effectue dans un milieu liquide (eau de mer ou minérale), solide ou demisolide (sable, boue, tourbe), ou gazeux (air chaud, gaz de toutes natures). Les actions spécifiques
de la balnéothérapie sont liées à la température, à la durée, à l'action physique (les fameux
« bains de lame » marin), à l’action chimique et à la forme du bain (demi-bain, bain de sièges, de
pieds).
1
. Les villes d’eaux en France, Paris : Institut Français d’Architecture, 1984, p.274.
. Porcheron (Dr. L.), Guide pratique aux villes d’eaux, stations climatiques, plages marines françaises.
Marseille : Quo Vadis, 7e édit., s.d. . Voir aussi par exemple :
- G. Bardet (G.) et J.-L. Macquarie (J.-L.), Plages et stations thermales de la France. Paris, 1885.
- [Syndicat général des médecins des stations balnéaires et sanitaires de France], Index médical des principales
stations thermales et climatiques de France. Paris, 1903.
- Annuaire médical des stations hydrominérales, climatiques et balnéaires de France. Paris, 1927-1949.
2
Mais au-delà de l'action de l'eau minérale employée sous forme de bain, d'inhalation ou de
boisson3, c'est aussi l'influence moins évidente mais aujourd'hui grandissante des facteurs
hygiéniques (désignés sous la dénomination récente de « remise en forme ») dont les plus actifs
sont le repos du corps et de l'esprit, le régime, l'exercice, le dépaysement, .... toutes actions que
l'on retrouve dans les diverses types de stations, jusqu’aux stations « climatiques » de montagne,
de création plus récente.
La fonction curative du bord de mer s'amoindrit à partir de la fin du XIXe siècle au profit de
la fonction préventive associée de plus en plus à une pratique mondaine et à des activités
ludiques. Malgré des signes de reprises ces dernières années, le thermalisme marin est encore
une activité marginale, laissant la place à une clientèle plus populaire, sportive et « touristique ».
Villes balnéaires et thermales ne tirent pas leur différence de leur nature thérapeutique,
mais plus fondamentalement de leur différence de situation géographique. La ville balnéaire se
développe au bord de l'eau, sur un front de mer pris sur l'espace de la plage, des dunes et des
falaises. La ville « thermale », comme le décrit Marcel Monmarché en 1902 pour Salies-de-Béarn,
s'agglutine autour de la source et des griffons, du bassin et des fontaines.
« Salies, dans un étroit vallon très vert, enchâssé entre deux collines, offre un curieux
contraste. De la gare on arrive de suite au « jardin public ». C’est la ville thermale, toute neuve,
d’une somptueuse banalité : un square rectangulaire entouré de grands hôtels, d’un casino
pseudo-arabe et d’un long établissement rayé de blanc et de rouge pseudo-oriental. Un peu audessus sur le côteau, un hôtel s’est installé au milieu d’un parc dans l’ancien château de Salies,
fief des Talleyrand-Périgord ... De la ville thermale on passe sans transition dans le vieux Salies
aussi tassée, vieillotte, délabrée, enchevêtrée, que l’autre est large, géométrique et neuve... 4 »,
La ville thermale s'adapte à une topographie paysagère tournée essentiellement vers les
massifs montagneux des Alpes, du Massif-Central, des Pyrénées et des Vosges.
L'eau génère-t-elle des espaces particuliers et des organisations originales ? Les
équipements de ces villes d’eau sont-ils tous spécifiques ?
.
Urbanisme et appropriation de l'espace.
N'y-a-t-il pas une seule architecture de villégiature : point de rencontre entre deux cultures,
celle de la clientèle exogène, touristique et celle d'une culture indigène, régionale et longtemps
rurale. Le point commun entre ces différents types de stations est l'occupation d'espaces vierges
pour des activités originales à l'opposé de la ville industrielle, lieux d'un autre mode de vie, hors
des contraintes de la ville conventionnelle et traditionnelle.
3
. De La Harpe (Dr.), Formulaire des eaux minérales, de la balnéothérapie et de l’hydrothérapie. Paris, 1894.
. Description de Salies-de-Béarn par Marcel Monmarché (1872-1945) (auteur des Guides Hachette). Extrait de
ses carnets de voyage. B.Municipale Vendôme, samedi 27 septembre 1902.
4
2
La conquête des espaces vierges : la ruée vers l’eau.
Le passage d’un lieu inconstructible et insalubre à un lieu au goût du jour entraîne des
enjeux spéculatifs exceptionnels, une ruée vers l'eau, que l'Etat essaie de maîtriser par la mise en
place de règlements d'urbanisme.
Le domaine maritime public est géré par l'Etat. A partir de 18255, les préfets concèdent une
partie du rivage après une enquête commodo et incommodo. Mais une partie de ce domaine
maritime relève du domaine militaire, avec contraintes et interdiction de construire. Le balnéaire
devra parfois se développer hors les murs, dans des bâtiments éphémères construits en bois.
L’Etat exerce également ses prérogatives dans les stations thermales pour désigner le
périmètre de protection autour de sources par enquête d’utilité publique. En 1898, 1300 sources
sont reconnues par l'Etat.
La loi Cornudet (14 mars 1919, modifiée et complétée 19 juillet 1924) joue un rôle décisif
pour les plans d'extension et d'aménagement des villes d’eaux. Dans les stations balnéaires,
thermales et touristiques, la loi prévoit l'obtention d'un label : l'érection de communes en stations
de climat, de bains, de promenade avec une « chambre thermale» désignée par l'administration,
qui « seconde » la municipalité.
Le passage du domaine public au domaine privé et le processus d'urbanisation présentent
un schéma commun aux villes thermales et balnéaires et de nombreuses similitudes avec des
villes nouvelles de l'intérieur comme la villégiature du Vésinet. Les plans de lotissement paysager,
accompagnés d'un cahier des charges spécifiques pour l'aménagement de l'espace et l'édification
des constructions exercent leurs influences sur le style mais surtout veillent au respect du site par
la conception des voies et des jardins publics, la place des espaces privés, ...
Une déambulation mondaine dans une nature théatralisée.
A la fin du XVIIIe siècle et au début du XIXe siècle, le renouveau du thermalisme témoigne
d'un changement d'attitude par rapport à la nature, jugée étrangère et sauvage. La montagne,
dominatrice et écrasante, devient le lieu du sublime. La mer, élément incontrôlable, déchaîné, et
tumultueuse devient un lieu de délectation6. L’eau thermale, l’Océan, les Alpes, la douceur
hivernale du Midi méditerrannéen, jusque là méconnus ou inconnus, sont prétextes à des plaisirs
mondains.
Ce changement s’opère par un « retournement », l’invention de nouvelles pratiques, de la
mode des lieux de villégiature conçus pour le touriste. Au lieu de se détourner de cette nature
hostile, l'homme romantique recherche un « point de vue » dominant vers le sauvage d’une nature
théâtralisée. Ces nouvelles villes romantiques créent des espaces fonctionnels et hiérarchisés
pour apprivoiser et recomposer la nature. Les digues (= « seuils de garantie », terrasses, remblais)
sont édifiées pour contenir l'amplitude de la marée, résister aux grandes tempêtes qui érodent la
falaise et préserver les constructions des assauts des vagues. On construit aussi des estacades
5
6
. Ordonnance royale du 23 septembre 1825.
. A. Corbin, Le territoire du vide. L’Occident et le désir du rivage, 1750-1840. Paris : Le Seuil, 19..
3
perpendiculaires à cet axe principal, comme à Nice, quais en avancées sur la mer à l'imitation des
piers anglais et de la célèbre jetée-promenade de Brighton. Digues, estacades, falaises et dunes
stabilisées composent le nouveau paysage marin domestiqué.
Des forêts de pins (La Baule7), des plantations d’oyats (stations de la Côte d’Opale) sont
chargées de fixer les dunes en bord de mer et des parcs paysagers sont composés au milieu des
villes thermales (Vichy). Ils cherchent à associer l'aptitude climatique et hygiénique du site par des
promenades aménagées, véritables pastiches recomposés et miniaturisés.
Le rôle protecteur des digues (eau), et de la forêt (vent) se double des valeurs
thérapeutiques liées à l'air marin, aux effluves balsamiques. La déambulation hygiénique sur ces
digues ou dans ces parcs devient indissociable de la déambulation mondaine. Ces boulevards
aménagés à travers les parcs ou sur les digues sont les premiers espaces de représentation de la
station.
Les villes thermales et balnéaires de la fin du XIXe siècle s’inspirent des promenades de la
ville hausmanienne, en reconstituant dans la villégiature des morceaux de la « vraie » ville aux
axes bien marqués avec ses boulevards et ses avenues, ses bois et ses allées cavalières (stations
normandes, Vittel, Vichy). On note aussi l’influence du modèle anglais du Crescent (Deauville,
Paris-Plage) et l’imitation d'autres villes thermales célèbres comme Spa, Brighton, Marienbad.
A partir du début du XXe siècle, l’urbanisme se démarque de cette conception traditionnelle
pour évoluer davantage vers la cité-jardin, lancée par les utopistes socialisants et largement
développée entre les Deux-Guerres (Hossegor8).
De la ville idéale à la ville-jardin pittoresque.
La station type rejoint les schémas de la ville idéale, superposée à la ville antérieure, ou
créée ex-nihilo, à l'écart, comme la station de Vernet-les-Bains.
« Une société financière est passée par là et, procédant à coups de millions, elle a formé le
projet de créer là une ville d'eaux modèle, à la fois station d'été et station d'hiver. Le projet est
actuellement à peu près réalisé. La ville thermale forme un domaine entièrement clos qui va se
perdre jusque dans les montagnes qui ferment la vallée. Elle se compose d'un parc avec sa pièce
d'eau et sa cascade, le tout gracieusement dessiné, d'un casino, d'un établissement thermal, d'une
quinzaine de villas destinées à être louées en entier ou par parties aux baigneurs qui viennent
s'installer avec leur famille, de cinq ou six grands hôtels, d'un jardin merveilleux, d'une vacherie
9
pour la cure du petit lait, d'un gymnase pour les enfants ».
Thermal et balnéaire répondent à des schémas identiques d'aménagement. On peut
esquisser une topologie des coeurs de stations par l'étude comparée des implantations et des
circulations depuis la gare et les accès routiers, l’architecture des équipements thérapeutiques et
7
. Charles A., Dans le doux dédale des dunes. dans 303, n°40, 1994, p.30 et ss.
. Exemple d’Hossegor. Laroche (Cl.)., Hossegor. La station des sports élégants. Paris : I.F.A./Norma, 1991.
9
. Extrait de La Gazette des Eaux, 15 septembre 1881.
8
4
ludiques, le dessin du parc et du rôle de l’eau, la situation et l’importance de la ville ancienne, ...
(Contrexéville, Hendaye).
Les villes répondent aux mêmes principes d'urbanisation. Elles emploient la trame
orthogonale, utilisée à partir des axes structurants (front de mer, boulevard qui relie
l'établissement thermal à la gare), le plan radio-concentrique comme à Cabourg, Stella-Plage ou
Barbotan-les-Thermes (projet), ou le plan en étoile à Hendaye, La Baule ou Sable-d'Or-les-Pins.
Les parcs pittoresques commencés dès le Second Empire connaissent un regain d'engouement
durant l’Entre-deux-guerres.
Ces nouveaux espaces urbanisés viennent se greffer sur un port (Les Sables d'Olonne) ou
un village (Néris-les-Bains, Salies-de-Béarn). Mais cette cohabitation ne va pas sans risque de
rivalités. L'activité ludique peut phagocyter l'activité traditionnelle, la récupérer, l'absorber ou la
détruire. L'activité de villégiature, trop proche de grosses agglomérations comme Marseille, Le
Havre, Toulon, Saint-Malo peut aussi être envahie par les vagues d'extension urbaines et devenir
un satellite d'une grande agglomération.
La naissance et la croissance des stations thermales et balnéaires offrent de nombreux
points d’analogies même si les topographies sont différentes, les règles d’urbanisme plus diffuses
et les créations de villes ex-nihilo moins nombreuses dans les stations thermales. On retrouve
dans les stations thermales les différentes phases d’occupation du site balnéaire décrites par
Dominique Rouillard10 depuis le temps des découvreurs et la mise en place de la propagande
jusqu’à la venue du fondateur-promoteur (exemple d’Emile Péreire à Vichy en 1853, de François
Bouloumié à Vittel en 1854). Artistes et écrivains, journalistes et médecins jouent partout un rôle
essentiel dans l'histoire légendaire, voire mythique et dans l'indispensable publicité qui
accompagne l'essor de la station.
Les schémas de mise en place du processus économique d'investissement et de gestion
avec les banquiers, les représentants des compagnies de chemins de fer, les propriétaires locaux
et les intervenants publics appellent également à la multiplication des études comparatives
d'histoire économique.
Les équipements de la ville-médicale à la ville-ludique.
L'espace urbain est structuré par les équipements publics : établissements de bains et de
santé, équipements de sports et de loisirs, hôtels et autres établissements d'accueil. A l'origine, les
équipements sont polyfonctionnels puis, à partir du Second Empire, on note une tendance à une
spécialisation et à une séparation des fonctions par bâtiments différenciés selon les programmes
et les besoins.
L'ensemble assure le prestige de la station et doit frapper les esprits par son originalité. Ces
monuments-phares des principaux équipements - souvent aux mains des édiles communaux assurent presque à eux seuls la promotion de la station, indépendamment de la réputation de ses
vertus thérapeutiques. Pour rester à la mode, ces établissements, et particulièrement le casino,
sont obligés de faire peau neuve à chaque saison et d’évoluer au rythme des besoins. Ils survivent
10
. Rouillard (D.), Le site balnéaire. Bruxelles/Liège : Mardaga, 1984
5
en s'adaptant aux nécessités impératives du confort et du progrès technique. L'implantation de ces
équipements répond à une stratégie de construction du paysage balnéaire.
Un des traits caractéristiques de ces équipements liés à des espaces consacrés à la
déambulation médicale et mondaine est la galerie-portique qui prolonge la promenade des
espaces publics aménagés. Elle assure une circulation extérieure entre les parcs, avenues et
allées et les bâtiments, les relient avec des galeries marchandes qui se prolongent par des
pergolas, des colonnades et des terrasses couvertes. A Vichy, les charpentes métalliques et les
marquises des galeries proviennent de celles de l'Exposition universelle de 1889. Comme les
serres et les jardins d’hiver, ces galeries sont particulièrement dans le goût du jour à la Belle
Epoque. La galerie-portique prend la forme de loggia intégrée ou accolée aux édifices, à l’entrée
de l’établissement de bains ou du casino et joue la transparence entre l’espace intérieur et
l’extérieur. A l’intérieur des édifices, ces galeries se transforment en coursives et facilitent la
circulation, particulièrement pour distribuer les cabines d’un établissement de bains ou les
chambres d’un hôtel (hôtel du Parc à Salies-de-Béarn, construit en 1890).
La forme de l’établissement de bains a beaucoup évolué selon la mode et le type de soins
poursuivi11 (fig. 3 et 4). Dans les villes balnéaires, les bains froids et spécialisés sont devenus des
piscines communes intégrées ou de simples vestiaires. On assiste à leur disparition ou à leur
transformation (fig. 5 et 6) au profit du casino (Biarritz) ou de l’établissement sportif en bord de
mer (Hendaye), ou à leur intégration comme partie constituante de l’hôtel thermal (Dax) .
L’établissement de bains se confond parfois avec le casino. Depuis 1907, l'ouverture des
salles de jeux est uniquement réservé aux stations thermales et balnéaires. Le casino, poumon
économique indispensable au développement de toute station, est l’édifice de représentation par
excellence. Le parti à trois pavillons reliés par une galerie connaît une grande fortune jusquà la
Première guerre. La tour, le minaret ou le campanile donnent un caractère monumental et
exotique à l’édifice. Le motif de la rotonde, du bow-window est souvent utilisé sur les avants-corps,
multipliant les perspectives sur le paysage (fig. 7 et 8). Le casino est directement influencé par les
modes et les techniques véhiculées par les Expositions universelles.
Les architectes s’inspirent de l’architecture du Grand Siècle, en se référant au modèle du
Palais de Versailles, pour construire les grands hôtels de la Belle Epoque, espaces aristocratiques
placés à côté du casino. Les autres hôtels font plus appel au modèle régionaliste. L’hôtel
s’organise selon deux modes : hôtel à atrium central sous verrière avec distribution unilatérale des
chambres sur les quatre façades, fermé sur lui-même ou hôtel-bloc avec un massif central et deux
ailes, desservi par un corridor intérieur, ouvert sur l‘extérieur.
De nombreux équipements sportifs sont également en relation avec la déambulation ou liés
le plus souvent aux sports individuels. Golfs, hippodromes, courts de tennis avec siège des
associations, tribunes et bâtiments annexes occupent une large place dans l’espace paysager de
chaque station.
11
. Chabiland (N.), Les établissements de bains de mer. D.E.A. Histoire de l’art, Paris IV, 1993.
6
Sous réserves d’études comparatives plus poussées, il semble que la station balnéaire
favorise davantage la dissémination des équipements publics et leurs spécialisation et que la
station thermale les rassemblerait sous un espace plus restreint.
Les nouvelles valeurs patrimoniales des villes d’eaux12.
Ces lieux de villégiature sont aujourd’hui des villes à forte identité patrimoniale. Elles sont
conçues comme des cités idéales pour réparer les méfaits de la ville industrielle, guérir le corps
malade et lui donner les bienfaits du confort et du bien-être. Chaque station cultive ses
particularismes et ses originalités. Tous les objets du passé légitiment les anciennes stations à
construire leur réputation à venir sur la qualité de leur propre patrimoine. Cet héritage est un gage
de leur modernité et sa transmission leur seule chance de survie.
Ces lieux exceptionnels sont aujourd’hui phagocytés par l’urbanisation et menacés
d’asphyxie par les lois du marché économique. La civilisation des loisirs banalise ces lieux de
séjours temporaires privilégiés en centres de loisirs péri-urbains permanents, uniformisés
aseptisés et réglementés, effaçant les particularismes initiaux de la villégiature éclectique.
L’environnement paysagé est peu entretenu ou renouvellé, mité par la construction anarchique et
la spéculation immobilière.
Les premières protections de l’Etat au titre de la loi sur les Monuments Historiques
apparaisssent timidement dans les annnées 1960 pour s’accélérer à partir de la fin des années
1980 et commencer des campagnes de protection plus systématiques. De nouvelles dispositions
juridiques sont apparues pour gérer les franges côtières par le Conservatoire du littoral. De
nombreuses stations thermales et balnéaires se sont également dotées de Zones de Protection du
Patrimoine Urbain et Paysager. Ce Patrimoine souvent marginalisé et peu connu de la population,
d’un intérêt historique, ethnologique et architectural évident, reste encore à étudier.
Bernard TOULIER
Conservateur en chef du Patrimoine.
Conférence prononcée au colloque sur les Villes d’eaux en 1994 à Salies-de-Béarn.
12
. Toulier (B.), L’architecture des bains de mer : un patrimoine marginalisé, dans Revue de l’Art, n°101,
1993, p.29-40.
7
Illustrations
Fig. 1. Carte des villes d’eaux ( = stations hydrominérales). Extrait de l’ouvrage sur Les
villes d’eaux en France. Paris, I.F.A., 1984, p.274.
Fig. 2. Carte de la France thermale, balnéaire et pittoresque ( = villes d’eaux, bains de mer,
stations hivernales, centres d’excursions, sites pittoresques, monuments historiques). Bottinmondain. Paris : Didot-Bottin, 1908, p. 50.
Fig. 3. Biarritz, établissement de bains (à gauche) et hôtel-casino Bellevue (au fond) par
Alphonse Bertrand architecte, en 1858. Carte postale, coll. B. Toulier.
Fig. 4. Hendaye-Plage, établissement de bains-casino par Alphonse Bertrand architecte,
vers 1885. Carte postale, coll. B. Toulier.
Fig. 5. Biarritz, établissement de bains : Les Thermes Salins par Adrien Lagarde architecte,
en 1893. Carte postale, coll. B. Toulier.
Fig. 6. Salies-de Béarn, établissement de bains reconstruit par Adrien Lagarde architecte,
en 1888. Carte postale, coll. B. Toulier.
Fig. 7. Bidart, La Roseraie, casino par J. Hiriart, G. Tribout et G.-H.-J. Beau architectes, en
1928. Intérieur de la salle de jeux avec les vitraux de J.Gruber. Photographie de 1928, coll.
Archives d’architecture de la Côte basque.
Fig. 8. Salies-de-Béarn, casino par J. Hiriart, G. Tribout et G.-H.-J. Beau architectes, en
1930. Carte postale, coll. B. Toulier.
8

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