Adieu Zarafa le livre?

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Adieu Zarafa le livre?
30
du 20/05/10 au 17/06/10 | un gratuit qui se lit
Adieu Zarafa
Le foot contre
le livre?
Politique culturelle
Théâtre et histoire
La culture en danger
4, 5
7
Festivals
Marseille, Châteauvallon
Gageron
L’Alhambra, AFLAM, Flâneries d’art
Festival du livre de la Canebière
Musiques, arts de la rue
Musique
BJCEM, Minoterie, Bernardines
GMEM
8
9
10
11
12, 13
14
16
18
Théâtre
Les Bernardines, La Criée
LAM, Festival de théâtre amateur, Bancs publics
Daki Ling, Vitez, ATP Aix
Avignon
Arles, Cavaillon, Port-de-Bouc
Port-Saint-Louis, Vitez, Sirènes et midi net
Au programme
20
21
22
23
24
25
26, 27
Danse
BNM
MOD, Ballet d’Europe
Le Merlan, Château-Arnoux,
Pavillon Noir, Canebière
28
29
30
31
Musique
Symphonique, Sacrée
Musique de chambre
Spectacles
Musique du monde
Chanson, métal
Jazz
Au programme
32, 33
34, 35
36, 37
38
40
41
42 à 45
Jeunesse
Martigues, Draguignan
Aubagne, Vitrolles
46
47
Éducation
Télémaque en collège, compagnie Skappa
Le printemps des lycées, la Criée
48
9
Spectacles
Théâtre de Nîmes, GTP, théâtre de Grasse, PôleJeunePublic
50
La Friche, la Colonne, Forum de Berre, Théâtre Durance, Vélo Théâtre
51
Toursky, Gymnase, Salins, PôleJeunePublic, Massalia
52
Théâtre de Fos, la Criée, Simiane
53
Au programme
54, 55
Livres
56 à 58
Livres
Arts, littérature
Rencontres littéraires
60, 61, 62
63, 64, 65
Philosophie
Réalisme politique, livre
66
Sciences et techniques
Livre, Au programme
67
Patrimoine
Pont du Gard, Quinson, les Baux, les Saintes
68, 69
Cinéma
Les rendez-vous d’Annie, Cannes Panafricain
Portrait d’Alain Cornu, Festival Reflets
Les Variétés, l’Alhambra, Pascal Kané
70
71
72
Arts visuels
Fondation Van Gogh, CAC Istres
Printemps de l’art contemporain, Musée Cantini
Musée d’art de Toulon, les arts éphémères
Au programme
Rencontres /Adhérents
73
74
75
76, 77
78, 79
Cocktail ou apéro ?
Voilà que ces derniers jours la télé tout entière semble descendue
ici pour adouber les héros de deux épopées majeures : le Festival
de Cannes, et l’Olympique. Stars et tapis rouge d’un côté, bleu
azur et liesse populaire de l’autre. Le mistral dans les cheveux ne
se ressemblait pas, ébouriffant pour les uns, déplaisant pour les
autres. Il faut dire que les caméras ne traquaient pas les mêmes,
braquées sur les foules au Vieux-Port, tournées vers les acteurs
sur les marches. Deux «people» d’étoffe diverse, avers et face
d’une même médaille, rassemblés aux pieds des miroirs aux
alouettes qui seuls aujourd’hui font scintiller la gloire et l’argent
dans les yeux des petites gens.
C’est que tous les médias convient au rêve commun : qui oserait
dire qu’il faudrait ne pas inciter à ces rassemblements ? Régulièrement ils mettent à sac le bien public, les commerces, et nécessitent
de grandes manœuvres onéreuses des forces de l’ordre (Cannes
aussi d’ailleurs, et des subventions). La destruction de la girafe
de livres fleure l’autodafé : elle symbolisait la reconquête du
centre-ville par la culture populaire. Les supporters de foot
veulent-ils la mort de la lecture ?
Rien n’est moins sûr, l’acte est marginal. Et puis ailleurs d’autres
foules se pressent, invitées sur Facebook à un gigantesque apéro
chips and bière. Mobilisées pour rien ? Il faut voir. Dans les salles
de spectacles, de concerts, durant la nuit des musées, la fête
des voisins, lors des salons du livre, de la BD, aux spectacles de
rue, la foule aussi est là, débordante, inattendue, même lorsqu’il
vente et que le printemps tardif semble jouer contre le plaisir du
plein air. Seules les urnes et les mobilisations sociales ne rassemblent plus, surtout pas les classes populaires, surtout pas les
jeunes, dominés par le sentiment d’avoir été grugés, d’être au
dehors.
Car ces rassemblements sont violents et sentent la révolte. S’en
prennent aux forces de l’ordre, manient le fumigène, hurlent contre
le pouvoir central -Paris, on t’encule- même quand l’OM gagne
contre Bordeaux. Cela tient de la revanche, conséquence d’une
oppression ancienne, et de l’affirmation des valeurs multiculturelles et populaires d’une ville. Valeurs qui séduisent d’ailleurs
bien au-delà de la cité, et ont concouru au succès de la candidature à la Capitale Culturelle Européenne.
Le foot contre la culture ? Non, mais clairement contre le pouvoir. Il faut simplement, aujourd’hui, que les artistes ne soient pas
perçus comme une classe caviar-cocktail enrubannée de laque
pour se dérober aux effets du vent qui se lève.
AGNÈS FRESCHEL
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04
POLITIQUE CULTURELLE
THÉÂTRE ET POLITIQUE
Pour un nouveau
Le théâtre de la Minoterie organisait,
en collaboration avec l’association
Approches, Cultures & territoires (A.C.T.),
une après-midi théâtre et politique.
Au centre, l’historien Gérard Noiriel,
venu dans le cadre de son spectacle,
Chocolat, participer à une rencontre-débat
Avant d’entamer l’échange, l’auteur se présenta et expliqua sa démarche et son
projet. Il affirma s’inscrire dans une démarche ancienne : celle d’un enseignant,
investi depuis toujours dans l’expression théâtrale. Désireux de sortir de la
tour d’ivoire où se tiennent, pour cause d’objectivité, les chercheurs en sciences sociales, il lui paraissait indispensable de se coltiner au vivant !
Entraîné par l’historienne Madeleine Rebérioux dans le champ culturel, son
expérience débute lors des mouvements de grèves qui agitent la Lorraine des
années 80. Intervenant sur les ondes d’une radio locale, il en déduit la
nécessité de concevoir la pratique de l’historien au contact de la société
environnante. D’ailleurs, constate-t-il, il n’est pas d’objet historique majeur
qui ne soit issu des tressaillements du social : ce sont les mouvements associatifs qui ont fait surgir les nouvelles interrogations des sciences sociales (les
femmes, les immigrés..). Pour lui, le laboratoire de l’historien c’est la rue!
Fondateur
À partir de ce préambule s’esquisse pour l’auteur sa relation au théâtre, comme
la trajectoire de ses recherches d’universitaire. Pour avancer sur son chemin,
Gérard Noiriel participe à la fondation de la Cité nationale de l’Histoire de
l’Immigration. Il s’agit de créer là un lieu de mémoire et de débat, un lieu de
rencontre qui confronte les expériences des historiens, des militants associatifs
et des artistes. Mais cette expérience ne peut se prolonger. La mise en place
du ministère de l’Immigration et de l’Identité nationale le conduit à démis-
Théâtre esthétique, théâtre militant
Ayant clos son exposé introductif,
Noiriel se mit à l’écoute de la salle. Les
questions furent nombreuses. Elles
permirent de préciser ou d’éclairer les
opinions de l’auteur. Florilège !
Brecht ? Il apparaît évidemment comme un précurseur : c’est lui qui a ouvert la voie d’un théâtre
militant, opposé à un simple esthétisme. En fait, ce
qui est déterminant aujourd’hui, c’est le rapport du
théâtre à la recherche scientifique. Il doit échapper
au cadre universitaire car le théâtre n’est pas seulement une technique ou une esthétique : il est aussi
civique. Au lieu de fournir un spectacle clos sur luimême, une sorte de boite noire, le théâtre décide
d’éclairer les éléments du récit par une intervention
critique sur la production même de l’histoire racontée, comme le faisait d’une autre manière le théâtre
brechtien. Et, par renversement, l’événement ou la
destinée historiques sont complétés (on remplit les
vides de l’histoire) par une fiction réaliste au vu
des connaissances sur le sujet. Cette élaboration
plausible permet, par le truchement du récit inventé, la réflexion du spectateur.
Elle permet aussi l’appropriation par le public de
l’histoire, de son histoire ! Déplorant la vision ministérielle de l’efficacité de la recherche, limitée à la
seule fourniture d’une expertise auprès des entreprises, Gérard Noiriel défend cette activité créatrice
comme parfaitement compatible avec les obligations et les préoccupations d’un chercheur. Si le
théâtre doit raconter des histoires, il permet, comme dans un ouvrage scientifique, de présenter des
hypothèses. La frontière entre l’art et la science
s’efface. La dimension sociale du chercheur réapparait car le théâtre est un lieu irremplaçable pour
créer du lien social, pour réhabiliter et développer
la culture populaire.
Le financement et l’évolution
de l’institution
II existe dans le milieu théâtral, comme dans le
champ historique, des représentants dominants,
liés nommés ou approuvés par les institutions.
Ceux-ci mettent, au travers de leur identité créatrice, une distance de plus en plus grande avec le
politique et le social alors que les dominés (les
«bricoleurs d’avenir») s’aventurent encore, eux,
dans ces domaines. Ce jeu est encore compliqué
par une constante : si les artistes sont à même de
définir l’artistique, la tendance fait que ces professionnels s’adressent avant tout aux professionnels
-c’est vrai aussi des universitaires. Cette tendance
ne peut qu’entrer en contradiction avec le principe
de démocratisation.
En France, la tension se fait jour avec le financement
par l’État du théâtre public, après 1945. S’avance
alors le problème de la légitimité et de la destination des subventions. Le principe de la transparence
est incontournable ! Il faudrait aussi établir des critères, mais sur quelles bases ? Comme le bailleur a
le dernier mot, il faut revenir sur la notion de culture.
Ce que n’est pas la culture
Avant tout, il faut affirmer qu’elle ne peut être définie comme une expression de soi. Elle doit être au
service des citoyens, et non conçue comme une
entité abstraite. Quant à la démocratisation, le
théâtre ne concerne que 6% d’ouvriers : les politiques volontaristes ne peuvent effacer le résultat
d’une domination sociale et culturelle.
Que faire ?
Eviter de penser à une démocratisation verticale
(c’est le cas aujourd’hui avec une diffusion, comme
une dilution, des sphères éthérées vers le populaire). Il faut recourir à une diffusion horizontale,
en élargissant les publics du côté des milieux
artistiques, de l’enseignement et de l’action culturelle. Résoudre cette équation n’est pas simple car
le contexte actuel, fait d’insécurité financière, ne
pousse évidemment pas à l’innovation. Faut-il dès
lors, en se gardant de donner prise au credo libéral
de la réduction des dépenses, remettre en cause le
ministère de la Culture ? L’institution ne pèse-telle pas dans le sens de l’immobilisme?
L’avenir ?
Il semble passer par la diffusion au travers de réseaux, par la mise en place d’une sorte de monde
collaboratif. Il faut inventer de nouvelles relations
avec les gens, créer des espaces de visibilité pour
les expériences innovantes. Plus on renforcera les
liaisons entre ceux qui tirent dans le même sens et
plus la résistance face aux contingences et aux
pesanteurs se développera.
Gérard Noiriel conclut et témoigne ; son projet ne
consiste pas à vouloir éliminer les autres modes du
théâtre mais à y trouver une petite place. Si cela
débouche sur un nouveau genre, tant mieux ! Pour
celui qui ne peut s’empêcher d’être un universitaire
citoyen, l’essentiel comme le disait Brecht, c’est la
place de la connaissance.
R.D.
© François Fogel
POLITIQUE CULTURELLE
théâtre
sionner et à interrompre ses expériences culturelles : la promotion d’une identité nationale à fonction d’exclusion ne pouvait être compatible avec sa démarche
scientifique et civique. Dès lors l’expérience de Gérard Noiriel s’inscrivit dans
l’association DAJA (http://daja94.free.fr), réunion d’auteurs et artistes, mais
aussi de chercheurs en sciences sociales, d’enseignants et de travailleurs
sociaux. L’idée du spectacle Chocolat allait en naître.
Une nouvelle voix ?
Ce spectacle, conçu comme une conférence-théâtre, a pour sujet l’histoire du
premier clown noir, longtemps oublié, en France. Dans ce cadre, le rôle que se
fixe l’historien est de donner des éléments informatifs et contextuels. Il élabore
ainsi une critique de la société, en référence à Brecht. Il donne une dimension
civique à son intervention car il défend et diffuse la science, tout en se démarquant du rôle d’expert dans lequel le confinent les média, le transformant en
suppôt des élites. Il veut participer à la diffusion de la connaissance dans un
large public, en faire un élément de formation citoyenne.
Le système est fondé sur l’association et la mise en commun des expériences
05
et des opinions du savant, du comédien et du dramaturge. L’élaboration dialectique permet alors de progresser, non vers un consensus, mais vers une meilleure
expressivité. Gérard Noiriel déplore la perte de cet idéal de la discussion depuis
la déliquescence du marxisme et l’appesantissement d’un pouvoir libéral dans
un cadre social de plus en plus individualiste.
Cette expérience théâtrale est aussi un engagement social. L’effort pour
promouvoir la science dans un public large, celui de transformer la perception
des gens au travers d’une histoire romancée mais réaliste, est conçu comme
une œuvre éducative. Mais c’est aussi une trajectoire à double sens, car l’auteur
veut établir une relation dialectique avec son public : il débat. Il charge aussi
une sociologue d’analyser la réception du spectacle. Cette situation lui parait
identique à celle rencontrée dans l’université, où la question de quelle
formation pour quel public est tout aussi essentielle.
RENÉ DIAZ
À lire : Théâtre, histoire et politique
ed Agone (voir Zib’22)
Chocolat, un théâtre coloré
dans sa propre catégorie. Aux témoignages de reconnaissance du clown envers ces êtres, le conférencier
rajoute ses commentaires sur la société du temps.
Il découvre un monde qui se cache derrière les
rideaux de la scène. Rafael, Chocolat, est le sujet
d’une peinture de cirque. Le tableau, projeté sur le
châssis, nous le montre surmontant un cheval mais
sa face est celle d’un singe. Lautrec n’a pu, ou n’a
© François Fogel
Des caisses, grosses et petites, alignées en demicercle. À gauche, debout, l’acteur conférencier, à
droite, encerclé comme dans un bastion, le musicien.
Au milieu, de petites lumières insérées dans le sol
délimitent un cercle, la piste. Au fond, clôturant
l’espace, se dresse un châssis autour d’un drap blanc,
l’écran, au travers duquel filtre la réalité dissimulée
de Chocolat, l’auguste.
Le conférencier entame son propos. Jeux de lumières et voilà Chocolat en scène. Saynète courte, une
histoire de passager et de train. Qui prendra place,
et quel sera son sort. C’est Footit qui distribue les
sièges et les claques. C’est Chocolat qu’on moque et
qu’on bat ! Musique et images complètent le propos.
Tandis que Chocolat regagne l’envers du décor,
l’historien explicite. Qui est donc ce «nègre» qu’on
exhibe pour rire, ce clown ridiculisé et battu ? Rafael
de Leios revient témoigner : dans les plantations
de Cuba, il apprend la souffrance, le désespoir. Il
apprend l’esclavage et l’état de chose. Amour, haine,
destinée qui échappe! Mais notre homme n’abdique
pas, il prend la fuite. Il abandonne ce monde d’hommes qu’on mutile, qu’on dégrade, il fuit vers l’Europe
et la terre de la Révolution.
Et c’est justement en 1889, lors des festivités du
centenaire de la Révolution, qu’il rencontre son
futur acolyte : Footit. Le conférencier s’est immiscé
dans le récit. Il raconte la France de l’Affaire Dreyfus, la France coloniale du Noir et du Blanc. Le
musicien se laisse aller, lui, à une marseillaise déglinguée, mais saisissante. Images projetées sur le
drap blanc, intervention de Chocolat, musique, commentaire, tout s’enchaîne pour poursuivre le récit.
Notre clown noir fréquente Montmartre, il se lie
avec Marie, sa femme, une blanche, dont l’humanité
et l’amour contrastent avec ceux des «opportunistes» récemment installés dans leur République.
Chocolat fait aussi la rencontre de Toulouse-Lautrec,
peintre génial mais homme infirme, curiosité aussi
pas voulu, échapper au préjugé. Et voilà notre ancien fugitif ravalé au rang de bête !
Dans cette France bousculée par l’affaire Dreyfus
(1894-1906), le duo avait encore sa place. Mais les
valeurs évoluent. Les injustes accusations contre
le capitaine ont provoqué un changement de
mentalité : plus question de rire du préjugé racial.
Alors l’équipage artistique tangue et s’échoue, il ne
fait plus recette. Footit se retire nanti, mais Rafael
n’a plus rien. Il reparaît devant nous, épuisé, navré,
désobligé. Il a tenté une carrière de comédien mais
on ne le lui a pas vraiment permis. Il lui reste la
solitude -Marie est morte- et la misère, retour narquois à la case départ. Il meurt quasi-seul, à Bordeaux,
en 1917.
Le rideau qui tombe clôture le spectacle mais pas
l’intervention : elle se poursuit par un échange entre
les acteurs et le public, qui demande des précisions,
interroge sur les situations, sur les objectifs poursuivis. On change de posture et c’est là une volonté
consubstantielle à cette expérience théâtrale. Le
public s’approprie le spectacle. Il voudrait plus de
gravité ou plus de rire, il voudrait plus d’explication... Et l’auteur, lui, écoute, enregistre, note pour
pouvoir tenir compte de l’échange.
Le mélange des genres est surprenant, il désoriente.
On ne sait plus qui de Marcel Mankita l’acteur ou
de Gérard Noiriel le conférencier tient le premier
rôle. On se laisse bercer ou surprendre par l’intervention musicale, instrument sensible de la scène
qui se déroule. On apprécie les images qui défilent.
Spectacle complet, spectacle engagé mais surtout
spectacle émouvant, original, qui témoigne et qui
instruit, qui révolte et qui apaise. Une voie pour le
théâtre ?
R.D.
Chocolat s’est joué
à la Minoterie le 24 avril
LA DÉFENSE DE LA CULTURE
POLITIQUE CULTURELLE
07
Rester debout
Défendre l’Art et la culture.
C’est le mot d’ordre
d’une profession rassemblée
le 6 mai, salariés
et employeurs ensemble…
Chacun a pris la mesure, au cours des dernières
années, des difficultés croissantes : la réforme du
régime des intermittents a paupérisé artistes et
techniciens, et la baisse des subventions, en
particulier de l’État, a d’ores et déjà ralenti l’activité
de la plupart des lieux de spectacles, et fait
disparaître les compagnies les plus fragiles -qui ne
sont pas forcément les moins
intéressantes, mais les plus jeunes,
les plus pointues, les moins dociles,
ou les moins repérables dans un
monde culturel replié de désarroi.
Mais aujourd’hui la menace va plus
loin, et prend des allures de mise à
sac : la deuxième révision générale
des politiques publiques (RGPP2) et
la réforme des collectivités territoriales font craindre, une à une et dans
leur combinaison, un coup d’arrêt
définitif de la création. «Pour ne pas
ajouter le chaos à la crise», l’ensemble des syndicats* se mobilise et
demande au gouvernement des
réponses et des garanties.
les directions régionales du ministère, de geler,
voire de diminuer de 5% les subventions des théâtres et scènes nationales, de déconventionner un
certain nombre d’établissements et de festivals, de
«rationaliser» le réseau des établissements d’enseignement artistique, et de geler tout label ou
conventionnement nouveau…
Ce retrait de l’État aboutit d’ores et déjà à un appauvrissement évident des formes proposées aux
publics, qui souvent éclatent de misère. Mais il a
aussi des conséquences indirectes très graves,
puisqu’il donne presque tout pouvoir aux réels
subventionneurs : les collectivités locales.
Celles-ci, qui sont plus directement sujettes aux
pressions de proximité, mettent aujourd’hui franchement le nez dans les programmations des lieux
Drôles de Révisions !
La RGGP1 est en route depuis 2006
dans tous les domaines qui relèvent
de la dépense publique d’État
(éducation, santé et administration
publiques, police et défense…). Si les
coupes sombres ont généralement des effets désastreux, elles restent sans commune mesure avec
celles à l’œuvre au Ministère de la Culture (et de la
Communication, mais il y a un certain danger à
associer ces deux termes) : la Région PACA rappelle
par exemple que la dépense de l’État envers les
compagnies conventionnées est passée en 4 ans
de 2.5 millions à 1.6 million d’euros, soit une diminution de 36%. Aucun autre secteur n’est attaqué
ainsi.
D’autant que la destruction n’en est qu’à sa première étape: François Fillon a clairement demandé
au Ministère de la Culture (et de la Communication)
de poursuivre et amplifier la réduction des dépenses pour répondre à la RGPP2, notamment par
«la reconfiguration du secteur muséal» et «la
réforme des modalités d’intervention de l’État dans
le secteur du spectacle vivant». Il est ainsi question de supprimer des orchestres, de recentraliser
culturels. Imposant dans «leur» salle et «leurs»
musées des manifestations de leur choix, et/ou
obligeant les artistes à légitimer leur travail en
l’accompagnant d’actions sociales (ce qui peut être
très bien, mais n’est pas a priori leur boulot).
Nombre de directeurs de lieux déplorent les pressions qu’ils subissent de la part des Élus, sensibles
au moindre mécontentement de spectateurs/consommateurs qui n’ont pas forcément raison de
récriminer (la création ne saurait obéir à la garantie
commerciale du «satisfait ou remboursé»…).
La situation est donc extrêmement préoccupante.
Mais le pire semble à venir.
Domaine réservé
La réforme des collectivités territoriales, Départements et Régions, leur retire la compétence
générale et les recentre sur leurs missions
particulières. La culture n’en fait pas partie. Les
collectivités, maintenant qu’elles ne perçoivent
plus la taxe professionnelle, vont dépendre presque
exclusivement de versements compensatoires de
l’État : les régions et les départements, s’ils
demeurent, se verront retirer toute autonomie, et
seront contraints de restreindre leurs interventions
à leurs missions obligatoires (les établissements
scolaires, les routes, le RMA, l’Allocation aux Personnes Agées…). Ce qui leur interdit de fait de mener
une politique, culturelle ou non d’ailleurs.
Le 6 mai, à l’occasion de la conférence de presse du
Festival de Marseille, l’intersyndicale du spectacle
a demandé des éclaircissements, rappelant que
Nicolas Sarkozy a promis de conserver la compétence culturelle aux collectivités territoriales, alors
que le texte voté au parlement ne garantit en rien
ce maintien. Patrick Mennucci
précisa clairement le danger : «Sur
400 millions alloués dans la région
PACA à la Culture, 250 millions
sont dépensés par les collectivités
territoriales. Retirer aux Départements et aux Régions la possibilité
d’intervenir dans ce domaine
aboutirait à la mort du secteur.»
Renaud Muselier réagit lui aussi
clairement, donnant rendez-vous
à l’intersyndicale : «Il faut
vraiment apaiser les inquiétudes
inutiles, et je m’engage à relayer
votre parole auprès du Parlement
pour que soient levés les malentendus, et les rumeurs qui circulent
au sujet de cette réforme, que j’ai
votée.»
Une passe d’armes rassurante ?
Tant que la Culture demeurera un
enjeu politique (et non de simple
Communication), les professionnels pourront faire entendre leur
voix sans trop la dévoyer !
AGNÈS FRESCHEL
* CGT spectacle, CGT Culture, CGC,
FO de l’audiovisuel, Syndeac, Synavi,
Fedurok Syndicats de l’édition, du cinéma,
des scènes publiques, du théâtre itinérant,
des professionnels de l’Art contemporain,
des Arts de la rue, des musiciens d’orchestre,
des musiques actuelles…
08
FESTIVALS
MARSEILLE | CHÂTEAUVALLON
15 ans de créations
Le Festival de Marseille s’annonce,
ce qui est toujours un événement
Depuis 15 ans la manifestation débute aux prémisses
d’un été de Festivals, avant les géants que sont
Avignon et Aix, dans une Région qui consacre
beaucoup (trop ?) de ses subsides culturels aux
manifestations estivales. Avec ses 13 000 places
mises à la vente et ses 1 680 000 euros de budget
(dont 67% de subventions de la Ville de Marseille,
12% de la Région, 3% de l’État et rien du département), le Festival pourrait passer pour une
manifestation municipale, et élitiste. Il n’en est rien,
et depuis 15 ans Apolline Quintrand veille à concocter
une programmation d’une grande exigence qui ouvre
Marseille à des esthétiques contemporaines du
spectacle, interroge le public, fasse débat, et permette
à la création d’éclore, puisque la majorité des
spectacles programmés sont co-produits (fait
rarissime dans les festivals!). Tout ceci en privilégiant
la danse mais en restant pluridisciplinaire, et en
gardant une place pour la création régionale tout en
accueillant de grands artistes internationaux.
Un équilibre qui cette année encore semble atteint,
même si, sur le papier -mais on ne peut juger que sur
pièces-, le programme semble un brin décevant: pas
de théâtre, peu de musique, des formes en cours…
Quelques points forts cependant: la présence, grâce à
la Japan foundation, de nombreux artistes Japonais,
depuis un duo de Teshigawara qui l’an dernier avait
fasciné le public, jusqu’au travail sur Barthes de Shiro
Onde de choc, Ginette Laurin © Ginette Laurin
rendu à Merce Cunningham par Foofwa d’Imobilité,
Jérôme Bel et Jonah Bokaer.
Rendez-vous donc à la Salle Vallier qui redevient un
lieu de spectacles, grâce au Festival et au BNM (voir
p. 28).
Takatani, jeune directeur de Dumb Type ; la dernière
création de Joseph Nadj, inspirée d’une fable de sa
ville natale ; deux pièces de Ginette Laurin,
magnifique chorégraphe québécoise qui ouvrira le
festival en musique, avec Steve Reich interprété par
l’OJM (direction Georges van Gucht), puis le terminera
avec sa dernière création sur une musique de Michael
Nyman ; deux cartes blanches, à Marseille Objectif
Danse et au GRIM, qui promettent de belles soirées
expérimentales et ouvertes ; Christophe Haleb pour
une création et une reprise; et un hommage qui sera
AGNÈS FRESCHEL
Festival de Marseille
Du 17 juin au 6 juillet
04 91 99 02 50
www.festivaldemarseille.com
Pour tous les sens et les goûts
Dédié aux écritures contemporaines et aux formes innovantes, le CNCDC Châteauvallon renoue avec la tradition estivale
et lance son Nouveau Festival 2010. Entre découvertes, retrouvailles et stars
XXe : Ravel et Albeniz (17 juillet).
De la musique, encore, imbibée d’une bonne dose de
théâtre comme Omar Porras et William Ospina en
ont le secret (18 et 19 juin) avec leur poème épicomusical Simon Bolivar… Si le théâtre n’est pas
dominant au Nouveau Festival 2010, Châteauvallon
Alonzo King © Marty Sohl
Le Nouveau Festival 2010 (3 juin-31 juillet) est un
concentré de théâtre, de danse et de musiques avec,
été oblige, plus de têtes d’affiche qu’à l’accoutumée.
Et toujours cette ouverture au monde qui permet de
véritables découvertes venues d’Iran, d’Afrique du
Sud, de Colombie, d’Inde, des États-Unis, d’Espagne.
La musique y tient une place prépondérante -comme
un fil naturel et historique- avec les chants a capela
de Mahotella Queens suivis d’un concert du
trompettiste Hugh Masekela et d’une jam session (4
juin). Rencontre entre l’Inde du Nord et la GrandeBretagne à l’occasion de la création du collectif Sizero
Tabla Experience aux sonorités singulières (19 juin).
Les inconditionnels du jazz et plus particulièrement de
Ron Carter, présent l’été dernier pour un hommage à
Miles Davis, le retrouveront en trio avec Russel Malone
et Mulgrew Miller (9 juillet). Jazz toujours, mâtiné de
musique traditionnelle iranienne, à l’issue d’une
résidence de l’Ensemble Shanbehzadeh et du trio
Matthieu Donarier : un dialogue musical inédit qui
aboutira à la création de Zâr (23 juillet). Comme
Châteauvallon aime à traverser les continents, il ne
craint pas non plus de quitter les rivages des musiques
du monde pour ceux de la musique classique ; sans
aller jusqu’à la contemporaine, mais en invitant Katia
et Marielle Labèque autour d’un programme début
frappe fort avec la mise en scène de Jean-Baptiste
Sastre présentée en avant-première du Festival
d’Avignon, La tragédie du roi Richard II de
Shakespeare (16 juillet). Tandis que L’Incroyable
compagnie ouvre le bal avec son opéra clownesque Ô
Carmen (3, 4 et 5 juin).
Question danse Châteauvallon n’hésite pas à faire le
grand écart entre les Ballets de Monte-Carlo (25 et
26 juin), les étoiles et solistes de l’Opéra de Paris
(23 et 24 juillet), les chorégraphies d’Alonzo King
(20 juillet), Hervé Robbe (25 et 26 juin) et les formes
courtes de Julie Dossavi et Kubilai Khan
Investigations (20 juillet). Jusqu’au bouquet final
des Nuits flamencas de Juan Carmona (30 et 31
juillet).
Une programmation éclectique, donc, à la fois pointue
et populaire, qui devrait piquer la curiosité des plus
classiques et satisfaire les plus iconoclastes.
M.G.-G.
Nouveau Festival 2010
du 3 juin au 31 juillet
CNCDC Châteauvallon, Ollioules
04 94 22 02 02
www.chateauvallon.com
GAGERON
Artistes en liberté
Au cœur de la vaste commune
d’Arles, au Mas du Grand Arbaud, à
Gageron, est organisée pour la 5e
année consécutive par l’association
Cultures Nomades une exposition
d’art contemporain axée sur la
création in situ. L’art au cœur du
paysage pour être exact, dans le
cadre particulier de la Camargue que
les artistes sélectionnés sur dossier
en février, et qui viennent de tous les
horizons, ont pu appréhender lors
d’une résidence de création d’une
dizaine de jours. Les œuvres exposées
du 15 mai au 15 juillet sont donc
toutes créées pour l’occasion, le
thème de la lumière étant cette
année au centre de toutes les
réflexions : lumière du jour, de la
nuit, artificielle ou naturelle, avec en
prime une dualité possible jour-nuit,
les œuvres étant visibles durant deux
nuits. Seront donc visibles les travaux
d’Elodie Tanguy (NaCl), Pascale
Planche (Le retour des lucioles),
Flavie Cournil (Alouettes-alouettes),
Philippe Domergue (L’Île solaire),
Guillaume Corentin (Interaction),
Hugo Verlinde (Univers îles), Pierre
Laurent (NaCl), Thierry Godet
(Sunrise) et Made (Fils de vie), des
œuvres à n’en pas douter réalisées
«en interaction avec le lieu et
paysage». À noter qu’un Prix sera
attribué à la meilleure réalisation, sur
décision de l’association assistée par
un jury de professionnels, le 27 mai à
19h.
In Situ 0.5
Exposition du 15 mai au 15 juillet
Mas du Grand Arbaud, Gageron
04 90 49 89 10
http://culturesnomades.org
Colonnes de sel d'Isabelle Barruol,
oeuvre exposée lors de In Situ 04
© X-D.R
FESTIVALS
09
10
FESTIVALS
L’ALHAMBRA | AFLAM | FLÂNERIES D’ART
Cannes à Marseille
Art bucolique
La Quinzaine des Réalisateurs est une manifestation
née à la suite des évènements de Mai 68 au Festival
de Cannes, pour protester contre l’éviction d’Henri
Langlois de la direction de la Cinémathèque Française.
«Les films naissent libres et égaux entre eux : il faut les
aider à le rester» déclara Pierre Kast, cinéaste et
fondateur de la Quinzaine.
L’Alhambra Ciné Marseille accueille douze longs
métrages issus de cette sélection, permettant au
public de découvrir ces œuvres présentées lors du
Festival de Cannes, mais pas toujours reprises, comme
celles de la sélection officielle, dans les salles.
Au programme donc quatre films français dont le
premier long de Katel Quillévéré, Un poison violent ;
Pieds nus sur les limaces de Fabienne Berthaud, en
ouverture, avec Ludivine Sagnier et Diane Kruger ;
un documentaire de Florent de la Tullaye et Renaud
Barret, Benda Bilili, (Au delà des apparences). Il y aura
aussi Evelyne qui aime Albert, qui aime Arthur, qui
aime la fille qui fait l’actrice, qui aime… dans Le Petit
tailleur de Louis Garrel ; des arrestations de
clandestins dans Illegal du Belge Olivier MassetDepasse ; un vieux berger des montagnes de Calabre
dans Les Quattro volte de Michelangelo Frammartino.
Cleveland vs Wall Street du Suisse Jean-Stéphane
Bron raconte l’histoire d’un procès qui aurait dû avoir
lieu… et dans All good friends de l’Irlandaise Alicia
Duffy, Dara tombe amoureux de Bella. Deux films
d’Amérique latine, La Mirada invisible de l’Argentin,
Diego Lerman et Somo los que hay du Mexicain Jorge
Michel Grau.
ZedCrew de Noah Pink dresse le portrait de trois
jeunes hommes qui espèrent réussir comme rappeurs
en Zambie, et The light thief d’Aktan Arym Kubat
nous emmène avec un électricien au Kirghiztan.
Quatre ans après le lancement des Flâneries d’art dans
les jardins aixois par la comédienne Andréa Ferréol, il
semble que peu de jardins résistent encore à la
tentation de marier art et nature. Le temps d’un weekend, les espaces privés et publics, les musées et même
les traverses transforment leurs «allées» en galerie à
ciel ouvert et en lieux de rencontres inédites. Sur le
parcours, accompagné par des musiciens classiques et
des chanteurs, on découvrira une batterie d’œuvres et
l’on croisera également leurs auteurs : c’est là toute
l’originalité de l’opération que de permettre au public
cette proximité avec les artistes…
Deux stars comme Hervé di Rosa (Pavillon de
Vendôme) et le sculpteur Jean-Michel Othoniel (à
l’Atelier Cézanne pour une œuvre créée en l’honneur
du peintre) entraîneront dans leur sillage pas moins de
22 artistes. Toutes disciplines confondues : de la
peinture à la fresque, de la sculpture à la création de
bijoux et même l’art culinaire, en fonction des coups
de cœur d’Andréa Ferréol qui a poussé la porte de
leurs ateliers avant de les inviter. Ce qui a pour effet
de composer une programmation éclectique, ouverte
à tous les courants et totalement subjective. Au
détour d’un bosquet donc, ou à l’ombre d’un mur
végétal, les amateurs éclairés et les simples curieux
(21000 visiteurs en 3 ans) pourront converser, s’initier
aux techniques (comme la sculpture sur fer auprès de
Myriam Paoli) ou découvrir une palette de matières
(taffetas et bois chantourné chez Charlotte Gaveau)…
Bref, saisir l’univers de chacun.
Pieds nus sur les limaces © Christophe Henry-Le Bureau
Un vrai tour du monde en cinéma, sans les ors, les
clichés et les bousculades de la Croisette.
ANNIE GAVA
Alhambra Cinémarseille
Du 25 au 30 mai
04 91 03 84 66
www.alhambracine.com
Et juste après…
Le 4 juin, à partir de 18h 30, l’Alhambra souffle ses
vingt bougies et vous invite à un bal sur la scène
devant l’écran, sur la musique de Roberto Tricarri et de
son orchestre de huit musiciens juste avant la
projection de Playtime de Jacques Tati. Et le
lendemain, on continue la fête avec Monsieur Tati en
suivant la tournée «à l’américaine» du facteur pour
un vrai Jour de fête.
Des réjouissances en perspective… Il est conseillé de
prendre ses places à l’avance !
S’embarquer pour un voyage au Maroc, c’est ce que
nous propose AFLAM en partenariat avec la
Cinémathèque de Tanger. Deux tables rondes, l’une à
l’Alcazar autour de «Tanger et les artistes» le 27 mai
à 18h, après la projection du film d’Yves de Peretti,
Une fenêtre à Tanger, réalisé pour l’exposition Le Maroc
de Matisse ; l’autre aux ABD, le 2 juin sur «Tanger et
le cinéma» après Paris sur mer de Munir Abbar.
Et, bien sûr, des projections : au cinéma Variétés, plus
d’une quinzaine de films, courts et longs métrages,
Fissures de Hicham Ayouch
réalisés entre 1938 et 2009.
En ouverture, le 28 mai à 20h30, Fissures, qui raconte
la rencontre de trois marginaux en quête d’amour et
de délivrance, sera projeté en présence de son
réalisateur, Hicham Ayouch. Sera présent aussi, le 3
juin, Jilali Ferhati pour son film Tresses qui évoque
un drame dans une famille modeste d’un quartier
populaire de la ville. Le 30 mai, à 20h30, Emmanuel
Ponsart du Centre International de Poésie de Marseille
présentera Le festin nu de David Cronenberg, inspiré
du roman écrit par William Burroughs, entre 1954 et
1957 alors qu’il résidait à Tanger. Dans l’après-midi, ne
ratez pas le beau court métrage de Michael Dreher,
Fair Trade, qui fait réfléchir sur l’adoption. Et ceux qui
voudraient revoir Pierre Brasseur sur grand écran le
pourront le 29 à 20h30 dans l’Homme de la Jamaïque
de Maurice de Canonge.
La programmation présentée à Marseille se poursuivra
à la Cinémathèque de Tanger en 2011.
Alors, entre rêve et réalité, cinémas marocains et
français, bon voyage à Tanger !
A.G.
Tanger Rêvée
Du 27 mai au 4 juin
04 91 47 73 94
www.aflam.fr
Flâneries d’art dans les jardins
Les 12 et 13 juin, Aix-en-Provence
Exposition Hervé di Rosa au Pavillon de Vendôme
jusqu’au 20 juin et Jean-Michel Othoniel
à l’atelier Cézanne jusqu’au 14 juin
www.aix-en-œuvres.com
Détail Monaco, Jean-Michel Othoniel © Luc Castel
Passer le détroit
M.G.-G.
FESTIVAL DU LIVRE DE LA CANEBIÈRE
FESTIVALS
11
Avé les accents de la mer
Après le festival CoLibriS fin avril, les
tentes et les stands vont à nouveau
investir le cœur de Marseille pour 3
jours d’un Festival du Livre de La
Canebière éclectique et convivial
La 1re édition s’intitulait Les Bouquinades. Ce terme,
amusant, rappelait les sardinades et autres tapenades
régionales, et avait finalement assez peu de rapport
avec une fête de la lecture et de l’écriture, quoiqu’on
puisse aussi engloutir des bouquins ! La manifestation,
qui se rôdait, naviguait entre têtes d’affiche à gros
tirages et animations plus intimistes, et louvoyait entre
le commercial et l’associatif. L’équipe organisatrice,
coordonnée par Cécile Silvestri de l’association
Couleurs Cactus, a choisi pour cette 2e édition de
recentrer son propos et de privilégier ce qui lui tient le
plus à cœur : «accompagner TOUS les publics à la lecture,
la littérature et l’écriture pour une meilleure connaissance
de l’autre et un mieux-vivre ensemble.» Une entrée
populaire donc, et non populiste, dans la culture, avec
un ancrage fort sur le solide réseau des associations du
quartier et de la ville. Et des propositions variées, pour
permettre à tous, petits et grands, d’être acteurs et pas
seulement spectateurs, ou consommateurs de livres et
de propos : cette fête du livre se veut surtout une
célébration du plaisir d’écrire, et d’échanger.
La manifestation sera inaugurée vendredi 11 juin en fin
de matinée en présence de sa marraine Edmonde
Charles-Roux, figure emblématique de la ville, et de
Patrick Mennucci, maire du 1er secteur. Et puis ce
seront 3 jours d’un festival littéraire, visuel et musical
aux accents de la mer et sous la protection
bienveillante de Zarafa la girafe de livres, qui fait
désormais partie intégrante des allées de Meilhan et
tente de rendre à la Canebière sa dimension culturelle.
Le vendredi après-midi sera destiné aux scolaires mais,
dès le début de soirée et jusqu’au dimanche après-midi,
tous les publics seront invités à voir des films ou des
expositions, à écouter des contes et des concerts, à
échanger des livres, à participer à des rencontres avec
des auteurs, éditeurs et libraires de la région
essentiellement, à des ateliers d’écriture ou
d’illustration, bref à s’emparer des mots, des images et
des sons. Et pour que tous les sens soient à la fête,
goûters en chansons, ateliers culinaires, apéros
littéraires ou musicaux et pique-nique dominical géant
ponctueront de leurs saveurs méridionales et métissées
ces jolis jours de juin.
Zibeline partenaire
On imagine aisément pourquoi notre journal est
heureux de s’associer à ce festival. À Zibeline aussi nous
défendons l’idée d’une culture pour tous, échangée dans
un esprit d’émulation festive. C’est pourquoi nous
participerons activement aux nouveaux concours
proposés cette année. À celui de La Bonne Nouvelle de
La Canebière, qui récompensera la meilleure nouvelle
écrite sur le thème des Accents de la mer. Au concours
© X-D.R
d’illustration de La vague et le rocher d’Hélé Beji, en
partenariat avec Libraires à Marseille. Vous pourrez
également vous initier à l’écriture journalistique
(chroniques de livres, reportage) sur notre stand. La
nouvelle et l’illustration lauréates, ainsi que les
meilleurs reportages et chroniques seront publiés dans
notre numéro du 16 juin… À vos stylos !
FRED ROBERT
Le 2e Festival du Livre de la Canebière
se déroulera du 11 au 13 juin.
Le concours de La Bonne Nouvelle de la Canebière
est ouvert à tous jusqu’au 22 mai.
Sur le thème Les Accents de la mer, il s’agit d’écrire
une nouvelle courte (12000 caractères maximum)
à envoyer à la mairie du premier secteur.
Voir modalités sur notre site www.journalzibeline.fr
ou au 06 98 72 29 07
12
MUSIQUES | ARTS DE LA RUE
FESTIVALS
Fort de Bouc !
sher (5/6), le tout rythmé par des
joutes provençales (5/6 à midi). Pour
un festival qui, en plus de ses qualités musicales, se révèle toujours très
convivial : ouverture à 19h30, 10
euros pour la soirée, et gratuit aux
moins de 12 ans accompagnés !
Les 4 et 5 juin il va falloir longer la
côte bleue et stopper à Port-de-Bouc
pour un Festival des Agglos plein de
vitalité et de fraîcheur en ce printemps qui se fait un peu attendre. 9e
édition et une programmation qui
fait déjà saliver, avec entres autres le
rock surréaliste de Raoul Petite (4/6)
et la fanfare ska rock jazz de Ceux
qui marchent debout (5/6) pour
faire vibrer le site magique de l’Anse
Aubran. Deux jours à sentir la mer au
son assourdissant des Dissonant
Nation et de l’hybride punk rock
disco de Skip The Use (4/6), avant le
pape du funk français Juan Rozoff,
l’expérimental reggae d’Izmo Dub
Box et les funky Selecter The Puni-
FREDERIC ISOLETTA
Les Agglos
Les 4 et 5 juin
Port-de-Bouc
www.festivaldesagglos.com
Raoul Petite
© Juliette Gueiko
Mondialiser
La Ville de Gardanne transforme son centre-ville
aux rythmes et couleurs des cinq continents : deux
jours durant, Arts et Festins du monde met à
l’honneur l’artisanat et la restauration de tous les
pays, avec, cette année, un éclairage spécial sur
les États-Unis. Au menu, parcours découverte des
Histoires d’Amériques, animations Far West, expos
sur des motos et voitures américaines, concerts
rock et country avec Home Cooking, New Orleans
avec la fanfare Gugus Band, gospel avec le Joyfully
Gospel et, last but not least, le Rock and Blues
American Show ! Sans oublier la fête-kermesse de
Le grand Sault
Qu’on se le dise, qui dit rural ne désigne pas
forcément un désert culturel. La preuve par trois
avec le 3e festival Sons dessus de Sault qui se
tiendra dans le Vaucluse les 29 et 30 mai. Avec des
valeurs comme le partage, l’écoute, la découverte,
la proximité et l’action pédagogique, c’est un
rendez-vous artistique protéiforme à ne pas manquer. Les traditionnelles et attendues petites formes
permettent aux musiciens de groupes programmés
de se rencontrer et d’entamer de véritables
échanges musicaux. Le 29 les détonants Quelques
Bratsch © X-D.R.
Peuples en parade qui défilera en préambule, le 19
mai, les repas et le marché artisanal en plein air…
Arts et Festins du monde
Les 21 et 22 mai
Centre-ville de Gardanne
04 42 51 79 00
Découverte
fiers Mongols revisitent Led Zeppelin façon fanfare
(11h30, gratuit). Viennent ensuite les Dithyrambe,
improbable duo où l’aphorisme Baroque is not dead
rappelle étrangement le punk! (14h, gratuit). Puis
la déambulation Dans les rues de 14h à 19h avec
l’atelier l’Artisan des Vents, la libraire éphémère
Sans Paradis Fixe, le Philharmonique d’occasion
et ses sérénades à louer et les surprises décalées !
De quoi s’occuper pour aussi découvrir les petites
formes pour deux rencontres étonnantes (16h et
18h30) avant d’écouter The Great Melting Poets
(place de l’église 4/6 euros). De quoi être paré pour
les concerts du soir : les festifs Bratsch, Mazalda
& Dunumba, Le Grand Bal-Bœuf avec scène et
piste de danse ouverte, rien que ça… (Salle polyvalente, 21h. 10/12 euros).
Et dimanche ? Le Lit (10h 4/6 euros) pour un
univers excentrique, La Grande Déjambulation
(11h gratuit) pour un immense cortège, encore et
toujours Les petites formes (14h et 16h gratuit)
rythmées par Dans les Rues (14h à 18h gratuit,
mêmes artistes que la veille), Chin Na Na Poun
sous la houlette de Manu Théron (17h30 4/6
euros), avant Le Grand Apéro Final avec La Farfan
de Gohu et un immense bœuf collectif pour Le
grand Déchiffrage (18h30 gratuit). Pas de quoi
s’ennuyer !
Sons du Lub’
Le 23 mai
06 14 75 45 59
http://arcensola.free.fr
X
iboa ©
-D.R
Son dessus de Sault
Les 29 et 30 mai
Sault (84)
06 29 05 41 99
www.pharealucioles.org
F.I.
ior L
Melch
FRÉDÉRIC ISOLETTA
Situé entre Pertuis et Manosque, Beaumont de
Pertuis est un village du Vaucluse. Le festival Son
du Lub est à découvrir avec notamment les
Drunksoul, Melchior Liboa et Madjahpol, mais
aussi Leda Atomica et Poum Tchack : de quoi faire
un petit tour musical dans le Luberon. Mais ce qui
compte avant tout c’est la très importante 6e
édition de la Bourse aux instruments qui rythmera
les trois scènes et les 19 concerts. Initiative à
découvrir pour les collectionneurs et les passionnés
de musique, le tout gratuitement grâce à la volonté
de l’association Arc en Sol soucieuse de développer
des activités culturelles en milieu
rural. Un moment d’échanges et
de rencontres à ne pas rater.
FESTIVALS
13
Olé !
Transhumance Métal Gagnant
commune
A.F.
La Folle Histoire des arts de la rue
du 20 au 24 mai
Saint Rémy
04 96 15 76 30
www.cg13.fr
http://follehistoire2010.karwan.info/
Nous sommes en 2010 après J-C, toute la Gaule est
occupée par le rap. Toute ? Non, un petit local d’irréductibles gaulois résiste encore et toujours à l’envahisseur ! Avec
une accroche pareille de la part des résistants métalleux les
choses sont claires non ? Alors, et ceci pour 5 euros,
rendez-vous les 4 (dès 17h) et 5 juin (dès 18h) au Local de
la Penne-sur-Huveaune pour la Local Fest IV afin
d’organiser l’encerclement du Rn’B et consorts dans un
F.I.
Festival Flamenco
du 18 au 22 mai
Théâtre Toursky, Marseille
0820 300 033
www.toursky.org
déchainement de bons groupes de métal qui enchantera
les adeptes et fera vibrer l’étonnement des néophytes.
F.I.
Local Fest IV
Les 4 et 5 juin
Local, Penne-sur-Huveaune
www.myspace.com/lelocalmetal
Les joutes de Pentecôte
Le festival de Correns, les Joutes
Musicales du Printemps, organise sa
13e édition du 21 au 23 mai. Une
trentaine de concerts organisés par
Le Chantier, centre de création des
nouvelles musiques traditionnelles et
musiques du monde. L’oxymore entre
nouvelles et traditionnelles semble
fécond, puisqu’il rassemble entre
autres A Filetta, la Cie Montanaro,
François Rossé, Annie Ebrel, JeanMarc Montera, The Samurai et le
trio Chemirani. Le paradoxe d’un
éclectisme de choix est au rendezvous dans le Var, et ce depuis 1997 !
Chant Corse, d’Irlande, de Sicile, percussions persanes, musique occitane
inclassable, sons de Bulgarie, d’Iran,
sans parler de l’incroyable rencontre
entre un piano et une cornemuse,
Correns parie sur une composition et
une transmission orales de la musique. Pour le week-end de Pentecôte,
il n’y a pas à hésiter si vous voulez
allier découverte et verdure sur un
site incroyablement beau, pour des
moments uniques festifs ou intimistes (théâtre de verdure, fort Gibron,
salle la Fraternelle, église, place du
village).
F.I.
Les joutes musicales de Correns
du 21 au 23 mai
04 94 59 56 49
www.le-chantier.com
Miqueu Montanaro © Y. Page
La Folle histoire des arts de la rue
finit sa folle tournée en un feu d’artifice… et de moutons ! Après avoir
mis en mouvement Saint-Cannat,
Mallemort, Velaux et les Pennes-Mirabeau, les cinq compagnies vont marier
leurs arts, leurs danses, leurs musiques et leur théâtre dans les rues de
Saint-Rémy, pour des petites formes
qui vont se succéder à un rythme de
plus en plus rapide, et culminer à la
Pentecôte… lorsque traditionnellement les moutons traversent la ville
provençale pour gagner les pâturages
d’été. Escarlata circus, Les Grooms
en fanfare, les saynètes de Kumulus,
la danse de rue de la cie Pernette et
de Retouramont résisteront-elles aux
moutons ? Trois jours de fête à ne pas
manquer : profitez-en, c’est férié !
cle Leyenda personal (21 et 22 mai à
21h). Devenu incontournable, ce
festival attaché à un lieu cher aux
marseillais est toujours un grand
moment de danse.
Joaquin Grilo, Leyenda © flaco
Le théâtre Toursky accueille du 18
au 22 mai le VIe Festival Flamenco sous
couvert du XXe Festival Mai-Diterranée.
La Compania Mara Martinez pour Hijas
de Eva entre sensualité, émotion et
virtuosité par la jeune prodige du flamenco (18 et 19 mai à 21h et 19h),
une soirée cinéma avec Farruquito y
Famillia, meilleur film flamenco en
2008 (20 mai à 21h) et la Compania
Joaquin Grilo (un des grands nom du
flamenco) pour son nouveau specta-
14
FESTIVALS
MUSIQUE
Têtes
d’affiche
Le magnifique village médiéval de
Piano jubilé
C’est au pied de l’illustre montagne Sainte-Victoire, peinte par Cézanne, au cœur Biot, perché au-dessus de la Riviera
du village du Tholonet qu’a lieu la 4e édition du festival Autour des Claviers
près de Sophia Antipolis, a une vie
cette année le bicentenaire de sa naissance?). Leur culturelle riche d’événements…
Sarah Lavaud © Yannick Coupernec
Vie de Chopin nous plonge de sa Pologne natale à
Paris, dans sa liaison avec George Sand à Nohant,
aux Baléares (et Marseille !), au cœur du romantisme (le 30 mai à 18h30 à l’église).
Les Britanniques Thomas Gould (violon) et Alasdair
Beatson (piano) interprètent la fameuse Sonate «à
Kreutzer» de Beethoven, tout en reliant le chefd’œuvre à la nouvelle éponyme et postérieure de
Tolstoï. Le duo joue aussi la virtuose et ardente
Sonate en fa mineur de Prokofiev (Soirée russe le 6
juin à 18h30 à l’église).
La jeune et talentueuse pianiste Sarah Lavaud
choisit des Nocturnes et Mazurkas de Chopin et livre
également les huit pièces passionnées des Kreisleriana op.16 de Schumann (on se souvient qu’il est
né aussi en 1810 !). Une Promenade de Chopin à
Schumann (le 13 juin à 18h30 à la nouvelle salle
de Palette). À entrée libre !
Le moins que l’on puisse dire, c’est que son Festival
des Heures Musicales affiche des solistes de premier plan. Pour la 27e édition, Liliane Valsecchi
annonce, sur la côte d’Azur, deux Russes parmi les
plus grands pianistes actuels : Nikolaï Lugansky
(en clôture du festival le 24 juin) et Boris Berezovsky
(à deux pianos avec Alexeï Petrov le 9 juin).
Chopin est à l’honneur avec deux grandes Dames du
piano français : Brigitte Engerer (et le récitant JeanYves Clément le 23 mai) et Anne Queffélec (le 15 juin)
pénètrent l’âme et la vie du poète romantique du clavier.
Les frères Capuçon, à leur tour, présentent des récitals
avec piano : si Gautier ouvre les festivités au violoncelle en compagnie de Gabriela Montero (le 18 mai),
Renaud et son violon chantent Brahms ou Bartok
avec Khatia Buniatishvili (le 4 juin). On n’oublie
pas également la soirée Gospel donnée par Marcel
Boungou And the Gospel Move Singers (le 28 mai).
JACQUES FRESCHEL
J.F.
4e festival Autour des claviers
du 30 mai au 13 juin
Le Tholonet
04 42 96 96 96
www.autourdesclaviers.com
Le parrain de la manifestation provençale, FrançoisRené Duchâble, retrouve son compère le comédien
Alain Carré pour un voyage mêlant littérature,
correspondance, biographie et musique en hommage
à Frédéric Chopin (faut-il rappeler que l’on célèbre
27e Festival des Heures Musicales de Biot
du 18 mai au 24 juin
Concerts à 21h
Église de Biot (06)
04 93 65 78 00
www.biot.fr
Khatia Buniatishvili © Julia Wesely
Soave sia il vento…
juin). Le Chœur Régional Provence Alpes Côte
d’Azur (direction Michel Piquemal) chante, au son
du cor, des pièces de Michael Haydn, Brahms, Schumann, Schubert, Mendelssohn (le 13 juin).
Avec Gershwin, le clarinettiste Frédéric Cellier
donne sa Soirée Jazz (le 19 juin), quand la manifestation s’achève avec l’Orchestre d’Harmonie de la
Musique de l’Air de Paris dirigée par le LieutenantColonel Claude Kesmaecker pour des musiques de
film, et le Concerto pour 4 cors de Robert Schumann
(le 20 juin).
J.F.
© X-D.R
À quelques lieues d’Avignon, dans la cité de Morières,
le Festival des Vents met à l’honneur, comme son
nom l’indique, les cuivres et les bois, flûte à biseau,
trompe à embouchure ou autre doudouk à anche…
ainsi que toute machine musicale aimant à prendre
l’air ! L’idée originelle est issue d’une tradition de
fabrique, dans la commune vauclusienne, d’anches
doubles (pour hautbois, cor anglais basson…) à partir
de roseaux. Et le but avoué par l’Amicale créatrice
du festival, est de donner l’idée, le goût, au plus grand
nombre d’amateurs de pratiquer ces instruments.
Eric Sombret, cor solo à l’Orchestre Lyrique de Région
Avignon Provence et professeur au Conservatoire de
musique d’Avignon programme cette saison quatre
événements.
En ouverture, le trompettiste virtuose Bernard Soustrot joue Vivaldi accompagné par l’Orchestre des
Solistes Français dirigé par Paul Rougé (le 12
Festival des vents
Du 12 au 20 juin à 21h15
Centre culturel Folard, Morières-les-Avignon
06 22 28 48 88
www.festivaldesvents.com
Été espéré !
Le Festival estival qui anime la région Toulonnaise
depuis 60 ans débute dès le 12 juin à la Tour Royale
(sauf repli nécessaire à l’Opéra ou à l’église St-Jean
Bosco en cas d’intempéries) avec le pianiste Cédric
Thiberghien et l’Orchestre de l’Opéra de Toulon (dir.
Wolfgang Doerner) dans un programme Chopin,
Mozart et Beethoven. (à 21h30, 04 94 92 70 78).
Ce sont ensuite des Sonates romantiques de Weber,
Schumann et Beethoven qui résonnent sous les doigts
de la violoniste Isabelle Faust et du pianiste
Andreas Staier (le 14 juin à 21h30).
J.F.
Festival de Musique de Toulon et sa Région
jusqu’au 29 juillet
Tour Royale, Toulon
04 94 18 53 07
http://musiquetoulon.pagespro-orange.fr
16
FESTIVALS
BJCEM | MINOTERIE | BERNARDINES
Jeunes et précieux
De retour de Skopje les jeunes créateurs ont présenté
des spectacles divers
Notre Dallas que la Cie L’Individu
peaufine et améliore (à voir bientôt
le Diable en bouche, voir p. 24) clôturait une série de représentations
théâtrales, musicale et dansées aux
réussites diverses.
Jouer contre soi
La Cie la Parenthèse est vraiment
agaçante. On l’a vue bourrée de
talent inventer un Boléro époustouflant de brisures et d’ironie, puis
s’égarer dans une théâtralité datée
dans d’autres pièces, et revenir de ses
erreurs en replongeant dans la danse
avec bonheur. Sélectionnée pour
partir à Skopje avec L’heure du bain,
pièce courte, intime, centrée sur les
gestes, voilà qu’elle présente à Marseille, sur le plateau du Gymnase, une
création bâclée, formée de 5 solos
successifs entrecoupés de saynètes
identiques, et accompagnés par un
guitariste insupportable qui ne
connaît que 5 accords et est capable
de les répéter en boucles pendant
d’interminables minutes. Les inter-
prètes cherchent l’intime mais ne le
trouvent pas, dansent mal pour la
plupart, présentent un objet non fini.
Il faut être sacrément vaniteux pour
vouloir créer en quelques jours et
avec peu de moyens un spectacle
chorégraphique de deux heures ! Mais
la vanité n’a jamais tué le talent,
pourvu qu’on en revienne.
Sous la peau
Le nom de sa compagnie créée en
2004 est déjà tout un programme :
Post Partum, après la naissance…
C’est de l’évolution du corps, de son
épanouissement au monde, de son
confort que Jean-Baptiste Bonillo
veut nous parler. Il le fait de façon
surprenante. D’abord il écrit sur un
tableau des phrases qui évoquent les
entraves du corps, puis il remplit les
blancs laissés entre les lignes. Une
bande son lancinante accompagne le
noir qui envahit la scène. Le danseur
revient caché par le tableau sur
roulettes et traverse la scène, on ne
voit que ses jambes nues, puis une 3e
Parenthèses © Agnès Mellon
et une 4e jambes, des mains surgissent sur les côtés effaçant le texte.
Les 4 jambes avancent sur un rythme
très lent en parfaite symbiose comme
un même corps, même taille, mêmes
fesses, on devine pourtant que le
second corps qui disparaît ensuite est
féminin. Le danseur se retrouve seul,
une voix lénifiante donne des
conseils pour reprendre possession de
son corps, le ressentir de l’intérieur.
Très beau moment ensuite : le corps
de Jean-Baptiste Bonillo est comme
occupé par une petite image qui naît
au niveau de son diaphragme et va
grandir jusqu’à envahir tout son
espace ; le corps d’une femme se
calque sur le sien, l’un est le Palimpseste de l’autre... et inversement.
CHRIS BOURGUE ET AGNÈS FRESCHEL
Géométrie variable : 1res figures
Arrêt[er] le gaspillage ne suffit plus à donner un
sens aux ardeurs civilisatrices du théâtre des
Bernardines ; voici venu le temps de déjouer les
habitudes, libérer les horaires, multiplier les rendezvous hors piste : programme ambitieux et louable
qui, en association avec La Minoterie, prend la
forme d’une carte blanche donnée au metteur en
scène Xavier Marchand et à ses invités.
Le premier volet a vu se succéder dans une impeccable maîtrise des lieux et des moments sept ou
huit pièces courtes, des brunchs, un auteur mort
de longue date (Beckett et son Premier Amour),
un autre depuis peu (Raymond Federman et le Crépuscule des Clochards),
deux bien vivants (Pascal Omhovère
et Noël Casale) aussi acteurs de leur
propre fiction... un homme à l’harmonica que l’on retrouve çà et là...
On y rencontre donc des personnages
plutôt humbles ou carrément en
marge, comme les clochards de
Federman qui dialoguent vivement
en parcourant le monde autour de
leur pupitre ; l’amitié, le temps qui
file, les chaussettes à partager,
toutes conversations célestes dont la
drôlerie et la mélancolie reposent sur
les ressources expressives des deux
comédiens en manque de rythme à la
première.
et le social, le singulier et le collectif avec une grande justesse ; on rit beaucoup et ce n’est pas tout !
Il est plus difficile en revanche de tenir tous les
fils de Reprise d’un triomphe qui mêle plusieurs
niveaux de fiction, personnages à double ou triple
fond (Hubertus Biermann, par lui-même déjà si
présent -alias Gunther- alias Dean Martin...), récits
enchâssés et formes diverses d’un aimable désenchantement intemporel (Bastia, l’été prochain) qui
ralentissent et anesthésient un peu la réception,
jusqu’à ce que l’irruption tonitruante de l’idiot du
village-capitaine d’industrie Ulysse/Pascal Omhovère,
de retour dans sa patrie vienne
Le crépuscule des clochards © Fabrice Duhamel
réveiller tout le monde !
Les quatre saisons -en trois comédies et un drameet les mille et une voix de Noël Casale sont aussi
bien réjouissantes : dans une unité absolue de lieu
(Bastia et nulle part ailleurs) se reconstruisent des
pans de vie réelle ou rêvée dans des pensions de
famille ou des meublés ; la langue corse, jaillissant
naturellement à tous les moments de particulière
intensité, constitue littéralement une part de dramaturgie ; l’auteur/acteur/metteur en scène, tout
à la fois Jean-Jojo, Annonciade, Tino Rossi (oui
oui), son fils et tant d’autres dans Forza Bastia
produit une énergie virevoltante qui brasse l’intime
MARIE-JO DHO
À venir
Le Hors Piste des Bernardines
et de la Minoterie se poursuit
avec une programmation et des horaires
complexes du 18 au 22 mai.
Avec à nouveau Pascal Omhovère
et Noël Casal, mais aussi Suzanne
Joubert, Haïm Menahem et Alain
Fourneau. Et Xavier Marchand !
18
FESTIVALS
GMEM
Moments rares
Depuis quelques années
le festival du GMEM parvient
à rassembler 7 à 8000
spectateurs pour venir écouter
de la musique contemporaine.
La recette ? Des formes croisées
et un prix attractif
Une journée de festival
Le 23 avril. Rendez-vous à midi trente au musée
Cantini pour un solo époustouflant de clarinette.
Horaire peu commun très agréable qui meuble la
pause repas du centre ville et prestation décapante
d’Alain Billard, soliste de l’Ensemble Intercontemporain. Avec comme œuvre la plus ancienne le
Dialogue de l’ombre double de Boulez composé en
1985, le ton contemporain est donné. La pièce,
dont le titre est emprunté au vocable du Soulier de
satin de Claudel met en scène l’instrumentiste et
son double préalablement enregistré et diffusé par
un dispositif électroacoustique. Singulière, cette
correspondance intérieure se diffuse dans l’espace
sans affrontement et se tuile dans une fluidité intimiste. L’étonnante virtuosité du soliste trouvera
un autre terrain de jeu avec Windex d’Ivan Fedele,
explorant les limites timbriques de l’instrument à
l’image des multiples aspects du vent. Spectaculaire
seront les deux dernières pièces du concert avec
tout d’abord Trace V de Martin Matalon, pour clarinette et dispositif électronique en temps réel, ce
qui rend la performance spatialisée et réactive.
L’important travail effectué sur bande et la complémentarité avec l’instrumentiste laissait présager
une fin explosive avec Art of metal II de Yann Robin
pour clarinette contrebasse et toujours live électronique. Avec un instrument entièrement en métal
(même le bec construit pour l’occasion) et des sonorités travaillées inouïes crachées des baffles, le
résultat fut dantesque. Ajoutons à cela la maîtrise
d’Alain Billard, soufflant, parlant, hurlant dans son
bec et offrant des sons paroxystiques, quasiment
indéfinissables.
Mythes et sacrifice
En soirée au Ballet National de Marseille, l’ensemble Musicatreize, le Chœur Contemporain et
l’Orchestre des Jeunes de la Méditerranée PACA
dirigés par Roland Hayrabedian. En ouverture, la
création d’Alexandros Markeas Dionysos, le vin, le
sang pour douze voix et dispositif électro-acoustique. La disposition scénique des 12 solistes attablés
évoquant la Cène face au chef, assis également,
contribua à l’évocation du vin dans tous ses excès,
d’Anacréon à Molière (du rire aux larmes en passant
par la colère). Markeas, à la recherche d’une vocalité
nouvelle inspirée du chant traditionnel méditerranéen, s’inscrit certainement dans une filiation
subtile avec Maurice Ohana. Son Llanto por Ignacio
Sanchez Mejias sur des textes de F. Garcia Lorca à
la mémoire du célèbre matador, est une des pièces
Thierry Thieu Niang © Agnès Mellon
que les ensembles de Roland Hayrabedian ont
enregistrée avec bonheur il y a 7 ans. Bien défendue par les jeunes musiciens même si on n’y
retrouvait pas le souffle du disque, cette cantate
associant un chœur féminin, un récitant (Olivier
Boudrand), un baryton (Job Tomé) et un clavecin
(Jean-Marc Aymes) se rapproche de la déploration
et des sonorités ibériques, l’étonnante utilisation
du clavecin, martelé, évoquant les guitares. Les mots
se fondent habilement dans le tissu orchestral,
Ohana jouant davantage sur l’aspect phonétique
que sémantique, cherchant lui aussi des voies nouvelles au cœur du siècle dernier. Une journée comme
on en redemande!
il donnera simplement non une lecture de ces
œuvres, mais comme une illustration, discrète, en
coin de page, de quelques éléments perçus ça et là
dans les partitions. Avec Stéphanie Auberville il
suit parfois le rythme, plus souvent les lignes, plus
souvent encore les émotions et étonnements que
ces pièces suscitent en chacun d’eux. Très simplement, tandis que la violoniste virtuosissime Saori
Furukawa enchaîne les difficultés de For Aaron
Copland (Feldman), Anthème (Boulez), la Sequenza
(Berio) pour finir sur les 10 minutes d’harmoniques
de Waka Pleats (Tomoyuki Hisatome). Au Zenith,
son exploit. Autour, des satellites modestes.
Danser la musique
En conclusion du festival, le 1er mai, le concert du
Trio Paj (Michel Portal à la clarinette et au bandonéon, Roland Auzet aux percussions et Pierre
Jodlowski aux «machines») a rempli sans peine les
objectifs pourtant ambitieux fixés par ses musiciens. Des sonorités familières issues du jazz, mais
également du tango (choix de tempi et de semblants de métriques plus langoureux) et d’autres
recoins de notre imaginaire musical (plus populaire ?) furent savamment entremêlées, appuyées
par des ostinatos électroniques et un recours fréquent aux questions-réponses, les petites poussées
de la clarinette se mélangeant souvent à leurs
propres échos et à leur anticipation. Le tout fut
porté par un sens de la tension/détente visiblement rodé, et captivant. Reste la promesse de cette
«nouvelle sorte de langage» chère à Michel Portal,
entre improvisation et musique savante, qui interrogerait notre rapport ambigu à la modernité.
Peut-on parler de renouveau stylistique simplement
en rassemblant, même fort brillamment, les apports
et trouvailles des XXe et XXIe siècles ?
Il est rare que les chorégraphes contemporains osent
danser sur la musique des compositeurs «savants»
de leur temps. La Compagnie Mossoux-Bonté a pris
un parti minimal en accompagnant les musiques
planantes de Scelsi et Giya Kancheli d’une danse
voltige faite des mêmes cercles lancinants, des mêmes
répétitions, variations, duplications et changements
de direction : trois corps féminins suspendus, identiques, tournent, posant parfois le pied au sol comme
les sons profonds de Scelsi lancent discrètement
leurs attaques pour laisser planer, longtemps, leurs
résonnances… Dans Khoom cependant la musique
varie ses timbres, passant du petit ensemble (Musique Nouvelles, dirigé par Jean-Paul Dessy) au solo,
et variant ses effets sinon ses dynamiques. La danse des trois femmes reste quant à elle sur se belle
idée de départ, hypnotique et fascinante, puis soulevant un peu le cœur comme dans un manège dans
lequel on resterait trop longtemps. Alors on ferme
les yeux et on écoute la profondeur des sons…
Plus radical le pari de Thierry Thieû Niang : les
œuvres qu’il choisit de danser sont des monuments…
Il le sait, et ne relève pas le défi de les circonscrire :
En toute liberté
SUSAN BEL, FRÉDÉRIC ISOLETTA ET AGNÈS FRESCHEL
20
THÉÂTRE
LES BERNARDINES | LA CRIÉE | LE GYMNASE
Petits arrangements avec le désir
Tout est question de désir. Mais est-ce
chez l’homme ou la femme qu’il s’émousse en premier lieu ? C’est à cette question
que se proposait en son temps de
répondre Marivaux dans La Dispute.
Un couple de nobles cruels, curieux de
connaître la nature de l’homme, a enfermé dès leur naissance et séparément
des enfants des deux sexes ; les jeunes
gens sont «libérés» à l’adolescence et
mis en présence. Les dés sont jetés !
Nadia Vonderheyden a monté cette
pièce avec les élèves-comédiens de
l’ensemble 18 de l’ERAC, l’école d’acteurs de Cannes. Elle y a associé La
contention, écrit par Didier-Georges
Gabily pour en être une suite, mais
qu’elle a choisi d’éclater à différents
latoires du spectacle, avec ravissements,
petits cris, halètements, dans lesquels
excellent ces jeunes comédiens. Jalousies et tromperies s’enchaînent à
l’épreuve d’une séparation forcée : le
bon sauvage n’est pas meilleur que le
civilisé, le cœur humain n’est pas fidèle.
Gabily rappelle que la férocité de nos
contemporains n’a rien à envier à nos
ancêtres cannibales. Fin d’une grande
noirceur pour un spectacle qui fait
basculer Marivaux vers Sade.
© Didier Grappe
moments de la pièce de Marivaux. Le
début plonge le spectateur dans un
univers glauque où évoluent des nobles désoeuvrés et masqués en quête
de séductions. Mais le Maître tue sa
est discrète, et repose sur un décor naturaliste, mais
écrasant, et des comédiens qui naviguent habilement
dans les sub-tilités d’un texte juxtaposant dialogues
réalistes et soliloques fantasmés. Glaçant, juste ce
qu’il faut pour vous donner envie de fuir à jamais la
compétitivité économique…
A.F.
Push up a été joué
à La Criée du 27 au 30 avril
© Inès Dufay
Sales caractères
Goldoni sait peindre à merveille les caractères déviants,
qui se plongent sans l’aide de personne dans des
situations impossibles. Les Amoureux mettent en scène
deux jeunes gens qui s’aiment mais ne savent que se
faire du mal, lui étant aussi hystérique qu’elle… L’oncle
aussi est un barbon de comédie, puissamment versatile, obséquieux et avare, comme il se doit. Seul le
hasard et tout l’effort d’auxiliaires raisonnables pour© Pidz
Crimes de l’amour a été joué
aux Bernardines du 20 au 24 avril
Scapin en farce
Misère affective
C’est le lot dissimulé des cadres supérieurs à La
Défense, cœur économique et financier d’un système
capitaliste en déroute… Push up de Roland Schimmelpfennig est une pièce cruelle, désespérante parce
qu’elle brise les rêves d’ascension sociale, et réjouissante parce qu’elle met définitivement à bas l’idéal
sale du gagnant. Dans les sphères supérieures, làhaut, au dernier étage, on ne baise plus, on crève de
jalousie, de solitude, et on compense son renoncement à la vie sociale en regardant du porno, en jouissant
de ses promotions, en s’enfonçant dans ses obsessions, en regardant avec soulagement les autres
tomber, vieillir, grossir. Les femmes s’habillent comme
on passe une armure, ces hommes ne savent pas
aimer, partager, converser même, et tous vivent dans
la peur constante de stagner, d’être lourdés, dépassés. L’entreprise n’est qu’un immeuble où le ridicule
tue, où l’on vit en apnée, sans autre idéal que de
grimper les étages. Un monde sans désir, sans valeur
et sans vie qui n’est que le reflet perverti d’un idéal
délétère. La mise en scène du jeune Gabriel Dufay
CHRIS BOURGUE
maîtresse Hermiane et déclenche une
dernière dispute avec son cadavre. Le
plateau s’éclaircit ensuite pour les scènes
des découvertes des jeunes gens qui
sont parmi les moments les plus jubi-
Omar Porras connaît à merveille les jeux de masque.
Il travaille depuis des années, avec sa troupe de comédiens surdoués, à fabriquer une théâtralité qui s’assume,
joue de ses ficelles et de ses plaisirs, maquille, exagère,
chante, fait le clown, l’acrobate, surprend, émerveille,
dévoile… Coloré et saturé de fantaisie, son Scapin révèle une fidélité au texte qu’on n’attendait pas chez
un metteur en scène qui a trahi avec bonheur aussi
bien Brecht que Lorca, Cervantes ou Molière. C’est
qu’il a trouvé dans Les Fourberies de Scapin une farce
parfaite : la mécanique comique de Molière n’en finira
jamais de susciter le rire, pourvu qu’elle soit jouée à
la bonne vitesse. Mais le metteur en scène retrouve
aussi en Scapin la quintessence de sa figure favorite
: celle du valet qui domine ses maîtres et tire les
ficelles. La compagnie d’Omar Porras, qui s’appelle le
Teatro Malandro, pratique un art populaire et subversif dans ses finalités, mais aussi dans son inspiration…
Un regret, infime ? que la subtilité sentimentale des
longues tirades sur les rencontres amoureuses l’ait
ennuyé : il les parasite et les ridiculise (avec succès)
alors que leur fraîcheur élégiaque n’est pas ridicule,
et peut sonner vrai…
AGNÈS FRESCHEL
ront les mener au mariage, même si on doute de leur
possibilité de bonheur ! La pièce est savoureuse et
drôle, légère, enlevée, et Gloria Paris en propose une
lecture tapageuse, déconnectée de la Venise du XVIIIe
siècle et plongée dans notre réel : Fulgenzio et Eugenia
ressemblent à des petits bourgeois adolescents, longue mèche sur l’œil et dégoût affecté, qui se trémoussent
sur du rock. La transposition fonctionne, même si on
y perd un peu en rythme, et en subtilité : si Gloria
Paris a, dans sa traduction, réactualisé la langue, les
rapports entre les personnages restent dominés par
les conventions du XVIIIe siècle, et ne cadrent pas
avec la mentalité de notre époque. Les comédiens, formidables d’énergie physique, ne parviennent pas
toujours à faire coller les deux lignes divergentes, ce
qui occasionne quelques temps morts. Oubliés dès
que ça redémarre ! A.F.
Les Amoureux ont été joués au Gymnase
du 4 au 8 mai
Les Fourberies de Scapin ont été jouées
au Gymnase du 20 au 24 avril
© Marc Vanappelghem
LAM | FESTIVAL DU THÉÂTRE AMATEUR | BANCS PUBLICS
THÉÂTRE
21
Cabaret militant
Léda Atomica Musique, depuis plus
de 10 ans, relie théâtre populaire,
musique, cabaret et toutes les formes
généreuses de l‘art. Ils ont concocté
un spectacle iconoclaste pour un
public qu’on sentait très complice ;
pour entrer dans l’ambiance, une volée
d’encensoir, suivie d’une note tenue à
l’orgue : la cérémonie peut commencer ! Bref rappel de la création du
monde -parodie de la Bible- avec,
parmi l’énumération des êtres vivants,
l’insertion du Yorkshire et des fraises
Tagada. «Dieu trouve ça beau!», et dans
un dernier effort il crée... l’argent. Car
c’est du capitalisme, des banques, des
plus-values, de la bourse, et de la crise
dont il est question dans le texte de
Phil G., qui fait le lien entre les chansons réalistes ou humoristiques, clin
d’oeil aux années 30 avec 2 chansons
de Jules et Julien, 50 avec Vian et Piaf,
60 avec la vache à 1000 francs de Jean
Poiret… toutes très bien interprétées, et
intelligemment relookées. Jubilatoire !
Les arrangements de Phil Spectrum
et Jean Sallier Dolette sont pleins
d’inventivité, et les deux comédienneschanteuses usent avec malices du
décalage : ah ! la choucroute magnifique
de Marie Démon et les chaussures
kitsch de Danielle Stéfan ! Une leçon
d’économie décapante !
CHRIS BOURGUE
Crashcashocac, mes Patrick Rabier,
s’est joué au Marie-Jeanne
du 23 au 25 avril.
À noter : le spectacle sera repris
le 3 juillet à Marseille au festival
des Arts de Passage à Emmaüs,
et au Centrte culturel Louis
Aragon de Septèmes-les-Vallons
le 21 mai (04 91 96 31 00).
© LAM
Fête à la Grimace !
© X-D.R.
Les comédiens amateurs du Théâtre de la Grimace
d’Aix-en-Provence sont ambitieux et courageux : ils
n’ont pas eu peur de monter un spectacle terrible qui
parle d’un crime, l’inceste, qui vient d’ailleurs enfin
d’être reconnu comme tel par nos autorités
judiciaires. Cette troupe a choisi de monter Festen
d’après le film danois de Thomas Vinterberg qui
fait date en la matière. La scénographie est
intelligente, isolant certaines scènes par des
lumières, les acteurs sont tous très engagés dans des
rôles pas faciles et une langue crue. Le sombre
règlement de comptes a lieu dans une famille
honorable, à l’occasion de l’anniversaire du père, et
l’addition est salée ! La mise en scène est de Claire
Prati, seule professionnelle de l’équipe, elle avait
commencé une pratique bénévole avec la troupe puis
finalement elle est engagée pour faire les mises en
scène. Bravo à cette équipe d’amateurs qui n’a pas
choisi la facilité !
CHRIS BOURGUE
Festen s’est joué au Parvis des Arts
le 30 avril dans le cadre du Festival
de Théâtre Amateur
À noter : Après la pluie de Sergi Belbel
par une troupe amateur de Paris
au collège Izzo le 21 mai.
04 91 61 15 37
Inquiétante étrangeté
© Didier Nadeau
La création de Terra Cognita est
l’aboutissement d’un projet de longue
date, qui repose sur un rapport réel qui
s’est construit dans le temps. Julie
Kretzschmar et Guillaume Quiquerez ont rencontré Alger par hasard, en
allant d’abord là-bas pour un spectacle
sur l’Algérie. Mais Terra Cognita les a
ramenés à Marseille avec un autre
désir : il s’agissait pour eux d’essayer
d’adopter le regard de l’autre, de voir
ce que signifie vivre à Marseille pour
chacun. Pas uniquement ce qu’être un
immigré à Marseille veut dire. Avec
Samir El Hakim, Eric Houzelot et
Sharmila Naudou, ils ont fabriqué un
objet violent dans ce qu’il met en jeu :
Alger et Marseille apparaissent comme
des villes qui se ressemblent, se frottent,
et rejettent, excluent, définitivement,
l’une comme l’autre. Parmi ceux qui
quittent Alger aucun ne parvient ici à
trouver une place. Terra Cognita
aborde les choses très simplement, en
racontant des histoires vraisemblables,
sans jouer au documentaire, mais en
inventant des paroles directes qui
s’énoncent comme des témoignages
successifs. Et racontent la difficulté
d’obtenir un visa, la violence des
regards, la position de clandestin, les
mots qui rabaissent. Situations qui
gagneraient à plonger dans une
théâtralisation plus radicale.
A.F.
Terra Cognita a été créé
aux Bancs Publics
du 20 au 24 avril
22
THÉÂTRE
DAKI LING | ATP (AIX) | VITEZ
Proserpine fait son show
interpellations les plus trash, à danser avec elle. Elle,
elle était sur scène, loin, dans son truc. Le son
exécrable du premier soir n’a pas arrangé les choses.
On avait beau tendre des oreilles meurtries, rien à
faire, on perdait les des paroles. Bref, la déception.
D’autant plus forte qu’on avait tant aimé les premiers
spectacles de cette clowne extraordinaire, à
l’agressivité cathartique et aux sketches désopilants.
S’il te plaît, Proserpine, redeviens celle que nous
aimons. Et tes couplets sur la décrépitude du couple,
sur la mort, sur le temps qui détruit tout, viens donc
plutôt nous les cracher de près.
FRED ROBERT
Prozband, le spectacle a été présenté sous chapiteau
les 7 et 8 mai, dans le cadre du Festival Tendance
Clown (5e édition) qui se poursuit jusqu’au 23 mai.
04 91 33 45 14
www.dakiling.com
Prozband © X-D.R
Après une performance réjouissante et déjantée sur
le parvis de l’Opéra (voir p.25), rendez-vous avec
l’Apprentie Compagnie sous le chapiteau Gardens
pour Prozband, le spectacle. La scène ressemble à
celle d’un concert de rock. Un groupe de quatre
musiciens, Les Pistoleros, accompagne Proserpine
herself, qui joue de la voix et accessoirement du
concertina. Pendant une heure, titres et parodies
musicales s’enchaînent, ponctués de quelques brefs
échanges avec le public. La diva, tenue skaï et
léopard, moumoute noire sous les aisselles et
soutien-gorge doré, «s’éclate» : elle ne cesse de le
crier. Dommage que ce soit toute seule ou presque !
Qu’elle ait envie de «faire un truc olé olé avant de
mourir» comme elle l’a déclaré, on peut le
comprendre. Après tout, la musique entre dans la
tradition du clown. Mais qu’elle oublie son public en
route, on n’en est toujours pas revenu ! Ils étaient
pourtant là, ses fans, prêts à l’acclamer, à subir ses
Fantaisie en émois mineurs
«Un orage serait bien beau, ici...»
Un titre au conditionnel fatigué, expression d’un désir discret et néanmoins
intense, tiré sans emphase de La Promenade de Robert Walser, écrivain
suisse de langue allemande mort dans
la neige, la nuit de Noël 1956 après 23
ans d’internement...
Une officine à deux bureaux, quintessence de toutes les administrations
désuètes et éternelles où œuvrent
modestement les poètes de Kafka à
Pessoa lorsqu’ils sont de retour de
leurs merveilleux vagabondages...
Trois employés à pas grand chose :
ranger, classer, bailler, rêver peut-être
dans leur chemise à carreaux, et une
accompagnatrice en coin si effacée
devant son petit clavier... Un art de
jouer à rebours de la représentation
dans l’intelligence sidérante d’un texte
marqué par une ingénuité dérangeante
et un minimalisme actif... Marie José
Malis met finement en scène l’inquiétante étrangeté des joies simples du
marcheur, narrées tour à tour par chacun des acteurs sous le regard dévorant
des autres : elle sait dire la puissance
d’émerveillement devant le monde
seule capable peut-être de le transformer, ce monde, l’air de rien ! Affronter
et habiter vraiment le décalé entre les
paroles ailées et la lumière crue de
l’administration, lui donner ses lettres
de noblesse sans ironie, faire chanter à
gorge déployée des lieder de Schubert
accompagnés d’un doigt au synthétiseur, sortir la bannière de la CGT 66 du
placard et l’y remettre, manger un
sandwich ou remonter un pantalon qui
tient mal à la taille participent du même
art poétique qui mêle le travail et la
rêverie, la mélancolie et l’exaltation.
Tout cela émeut profondément, inquiète un peu «...il est déjà tard et tout
est sombre...» et rappelle discrètement
que l’homme est bien un roi sans
majesté...
MARIE JO DHO
Un orage serait bien beau ici
a été présenté au Théâtre Vitez, Aix,
les 27 et 28 avril
Sade par Mishima : double peine
© Anne Gayant
D’abord un mot sur la mise en scène proposée par
les ATP d’Aix au Pavillon Noir : Jacques Vincey
réussit une forme tout à fait surprenante, six femmes
jouant sur un vaste échiquier symbolique une partie
dont elles sont les pions magnifiques, caparaçonnées
dans des robes sur roulettes et dominées par
d’immenses perruques rigides, toupies d’un destin
qui les dépasse et dont le manipulateur est absent.
Madame de Sade, sa mère, sa sœur, les acolytes
prude ou perverse sont sublimes dans leur irréaliste
jeu de marionnettes féroces. Mais pourquoi faire ?
Le texte de Mishima sur le «Marquis de Sade vu par
les femmes» est traversé de magnifiques fulgurances
d’écriture, mais trimballe un discours très limite…
Il n’est pas question de faire ici le procès d’un auteur
hyper nationaliste qui écrivit des romans sublimes de
culpabilité et de désir d’illumination, mais se suicida
après avoir fomenté un coup d’État visant à rétablir
l’autorité de l’Empereur. Cependant que nous raconte
son histoire ? Si Sade représente la liberté absolue,
on est en droit de se demander pour qui. Ses écrits,
franchement ennuyeux la plupart du temps,
contiennent effectivement quelques diatribes bien
pensées (et sacrément bien écrites) sur la société
d’Ancien Régime. Mais enfin ce n’est pas ce qu’il a
fait de pire, ce régime en fin de course, que
d’emprisonner un homme qui, sans doute, a fouetté
à mort plusieurs prostituées, et violé nombre de
femmes. Ou au moins fait l’apologie du viol, puisqu’on
n’a pas de preuve formelle qu’il l’ait pratiqué.
Comprendre la littérature de Sade, cette plongée
sans retenue, fantasmée, vers le fond noir des désirs,
vers ce Don Juanisme de la douleur où Valmont ferait
figure de niais, est une chose. Mais l’homme ? Et puis
imaginer cinq femmes qui se pâment en évoquant la
sodomie ou le plaisir de dégoutter le sang est un brin
ridicule : lorsqu’on se targue d’adopter un point de
vue féminin, peut-on vraiment imaginer ainsi leur
plaisir ? D’ailleurs comment Mishima le pourrait-il ?
C’est à lui, qui se fit photographier en Saint Sébastien
à la chair transpercée, que cette Madame de Sade
ressemble. Les femmes ne sont pas des
homosexuels masochistes.
AGNÈS FRESCHEL
Madame de Sade a été jouée le 10 mai au Pavillon Noir
dans le cadre de la programmation des ATP d’Aix
AVIGNON
THÉÂTRE
23
Gueule de bois
Voilà une troublante excursion dans le
chaos de fin de siècle que nous propose le metteur en scène/scénographe
Alain Timar dans Simples Mortels, sa
création 2010. Adapté du roman de
Philippe de la Genardière (Actes Sud),
ce «voyage» raconte la dislocation d’une
famille dans la débâcle de l’humanisme
occidental. Timar s’est focalisé précisément sur le récit, accablant, des
années 90 en conservant «la sombre
litanie des désastres accumulés» que
vont nous distiller quelques survivants.
C’est un gros Blues, voire gueule de
bois, des années 90 qui nous est offert
! Une crise de croissance interprétée à
l’imparfait, et en didascalies, par Paul
Camus, Yaël Elhadad, Nicolas Geny,
Roland Pichaud et Claire Ruppli (un
peu désorientés dans l’imposant décor
apocalyptique qui leur ravit la vedette).
Ils nous tendent un miroir amèrement
dépressif de notre société postmoderne.
aussi la lumière, qui s’élève au rythme
de leur progression dans l’espace, et
parviennent miraculeusement, malgré
quelques longueurs et errements insolites, à composer dans ce marasme
une partition surprenante. Leurs voix
se font écho, leurs corps se croisent,
se frôlent et s’interrogent au ralenti, les
vieux réflexes se réveillent et comme
lorsqu’on regarde une image tridimensionnelle, nous apparaît un ballet
virtuel diablement composé. Une
mécanique des corps dans la mécanique du monde qui nous fait espérer, un
peu, des lendemains qui chantent.
DELPHINE MICHELANGELI
© Valerie Suau
De la chute du mur à l’effondrement
des tours jumelles, des guerres ethniques ou religieuses au capitalisme
triomphant (et le taux de suicide, la
mutation des femmes, le clonage, la
sacro-sainte information…), ils racontent le déclin de notre humanité,
cherchant visiblement les traces d’une
vie passée. Sous fond de symphonie
Brucknérienne, les acteurs cherchent
Simples Mortels s’est joué au Théâtre
des Halles (Avignon) du 27 au 30 avril
et sera repris lors du Off
Prescriptions mondaines
peu timide lors des premières représentations, a l’œil
qui frise délicieusement et compose un personnage
amusant/amusé qui rend savoureuses ces règles de
bienséance. Elle a trouvé une mécanique de diction
et un phrasé rapide qui ajoutent à la beauté de
l’écriture. Ce «savoir-vivre» d’un «autre temps», qui
pourrait parfaitement être dicté par Nadine de Rothschild, peut-il faire de quiconque un «être respectable» ?
En y regardant de plus près, ces mondanités ridicules
ne sont pas loin des prescriptions de notre époque
d’apparence, et de formules toutes faites. Ça ferait
presque froid dans le dos.
DE.M.
Les Règles du savoir-vivre dans la société moderne
a été joué le 30 avril et 1er mai
au Théâtre du Balcon
© X-D.R
La cie On est pas là pour se faire engueuler,
menée par Laetitia Mazzoleni et Noam Cadestin
metteurs en scène et acteurs en alternance, fonctionne de la ville à la scène sous le mode de la fusion.
Ce drôle de nom de scène emprunté à la poésie de
Vian et au culot de Coluche leur porte chance. Après
avoir reçu l’aide du fonds de diffusion du Off en 2009
avec La Vieille dame qui fabrique 37 cocktails molotov
par jour de Visniec, ils offrent un nouveau spectacle
réussi. Laetitia Mazzoleni interprète très justement
Les règles du savoir-vivre dans la société moderne de
Jean-Luc Lagarce, une des rares pièces drôle, caustique, d’un auteur à l’écriture généralement pathétique.
Ici, «il s’agit de connaître et d’apprendre, dès l’instant
déjà si mondain de sa naissance, à tenir son rang et
respecter les codes qui régissent l’existence.» Convenances, manières et protocole, aussi détaillés que
définitivement obtus, sont ainsi énumérés de la naissance au deuil. La comédienne, bien qu’encore un
Un égoïste raffiné
égoïste par sa famille et ses amis, nous entraîne dans
l’écriture de sa prochaine pièce et nous fait le coup
du Malade Imaginaire. Enfants, ex-femme, maîtresse,
© Christophe Olinger
Poursuivant une collaboration artistique entre le
théâtre luxembourgeois et avignonnais, les 11 acteurs
du Théâtre des Capucins ont investi le Chêne Noir
pour jouer la dernière comédie de Jean Anouilh, créée
en 1981 avec Bernard Blier. Le Nombril nous parle du
statut d’auteur de théâtre, et Jean Anouilh s’y dissimule à peine derrière les traits du personnage principal
Léon, incarné par Marc Olinger au sommet de sa
forme. Cette pièce grinçante redonne à Anouilh sa
place d’auteur important du répertoire français qui,
même s’il est admis dans le prestigieux cercle des
édités de la Pléiade et reconnu pour son incontournable Antigone, n’en demeure pas moins exclu des
cercles universitaires. Ce Léon, goutte au pied et
cigarette au bec, profondément reconnu comme
ami d’enfance, médecin, tout son petit monde gravite
autour de sa plume et de son chéquier, qui lui permet
d’acheter son calme et une relative tranquillité. «Je suis
un égoïste raffiné, je passe ma vie à m’occuper des
autres.» Une vraie mère nourricière! La mise en scène
très traditionnelle de Claudine Pelletier et le décor
boulevardier respectent scrupuleusement cette comédie délurée et drôle, dans laquelle, à travers un canevas
quasi pirandellien, Anouilh règle une part de ses
comptes avec «l’intelligentsia».
DE.M.
Le Nombril s’est joué
au théâtre du Chêne Noir
du 22 au 25 avril
24
THÉÂTRE
ARLES | CAVAILLON | PORT-DE-BOUC
L’humour
a bon dos
Saga familiale
© Jean-Louis Fernandez
rencontre amoureuse. Un «Tournez manège» imposé,
drôle certes, à prendre au second degré, mais quelque peu pathétique. À l’image de cette habitante, très
gênée de se voir imposer la lecture d’un texte cru
(«baise-moi encore, oui baise-moi…»), de cette autre
obligée de choisir «l’homme qui lui tape le plus à l’œil»,
ou encore de cet homme qui doit faire la parade du
poulpe (il avouera s’être senti surtout «plouc»). Pas
de problème pour ceux qui aiment faire du «testing»
façon cirque, moins supportable pour les autres.
Yannick Jaulin s’est lancé dans l’écriture de La bête
à deux dos après avoir lu La stratégie du caméléon de
Jean-François Bouvet, où «toutes les stratégies du
vivant pour séduire, se cacher et tout ce qui fait
l’adaptation à la vie» sont évoqués. Programmée aux
Nomade(s) de la Scène Nationale, l’énergique
Angélique Clairand a donc mené dans les villages
du Vaucluse une séance de coaching amoureux
devant des petites jauges de spectateurs qu’elle
utilise pour en faire les «otages» de sa démonstration.
Si la complicité créée par la comédienne est effective, le texte drôle et documenté, son talent pour
l’improvisation évident, le spectacle dérape rapidement vers le style «camping des Flots Bleus». Tout le
monde joue le jeu bien sûr et s’amuse, bien obligé,
mais certaines situations tiennent plus de l’art d’animer un groupe de vacances que du théâtre. «Comédienne
en phase de reconversion professionnelle», devenue
cochère de l’amour et le public son groupe de travail,
elle crée donc une vraie/fausse séance collective de
DE.M.
La Bête à deux dos ou le coaching amoureux
s’est joué aux Nomade(s) de la Scène
Nationale
du 27 au 30 avril
À noter : La bête à deux dos est programmé
à Gap, au Parc de la Pépinière, dans le cadre
du Festival Cité Cirque ( voir p 54).
Complément d’objet
«Que venez-vous chercher ici ?», «Pourquoi êtes-vous
venu à La Mourre ?» Ils s’invectivent les uns les autres,
se scrutent et se jaugent, ne savent pas forcément
pourquoi ils participent à ce jeu très spécial de La
Mourre au cours duquel les étiquettes feront le
moine, à moins que ce ne soit l’habit… Bref, avoir
quelques minutes l’illusion que l’on peut s’affranchir
La mourre © Milan Szypura
des étiquettes que l’on nous colle sur le dos ou au
contraire conforter l’opinion des autres en adhérant
complètement à l’image… Et comme un négatif qui
viendrait se greffer sur le jeu, comme s’il existait un
double pour chacun dans un monde parallèle, un
deuxième spectacle vient s’intercaler, physique,
visuel, où chacun effectue, sous le regard des autres,
des figures avec différents agrès, répétitives et
hypnotiques, saisissants tableaux qui éloignent un
temps les participants du jeu et de leurs étiquettes.
Une fois encore la liberté est au cœur du travail de la
compagnie la Scabreuse, éternelle quête qui
interroge le libre arbitre et l’assignation sociale, avec
humour et finesse, et dont La Mourre nourrit les
questions en laissant le public face à ses réponses…
DOMINIQUE MARÇON
La Mourre a été jouée le 29 avril au Théâtre d’Arles
Des portes s’ouvrent -3, alignées en fond de scène-,
claquent, ils rentrent, sortent, sautent, gestes bizarres
et répétés jusqu’à prendre sens, tandis qu’un
guitariste rock solitaire va nous conter l’histoire d’une
famille un peu barrée, par bribes parlées et musicales.
Tous les personnages sont là, simplement visibles
dans une encoignure ou traversant le plateau
jusqu’au mat sur lequel les figures ne vont pas tarder
à s’enchaîner, lumineux moments hors du temps où
se fabrique cette histoire familiale. Tout le travail de la
cie Hors Pistes se base sur le cirque, un travail du
corps et de l’espace qui prend ici une dimension plus
importante puisque mélangée à de la danse, à de la
musique, impulsant au spectacle un rythme particulier qui permet d’alterner les souvenirs, les flashs,
et d’aborder des thèmes chers aux artistes tels la
mémoire, le rapport de l’homme au travail (en l’occurrence une chaîne automatisée qui pourrait bien
rendre fou), la solitude, le pouvoir… Les saynètes s’enchaînent avec une énergie folle, les portes donnent le
ton, laissant à chacun le soin d’interpréter les portés,
les sauts, les performances à la barre, et l’histoire se
déroule, des années 60 à nos jours, curieusement
familière et pourtant bien particulière !
DO.M.
Coma Idyllique a été joué le 7 mai
au théâtre du Sémaphore,
à Port-de-Bouc dans le cadre
des Nuits Circulaires
© Lucie Dufranc
PORT-ST-LOUIS | VITEZ | SIRÈNES ET MIDI NET
THÉÂTRE
25
Tribu Levinienne poético-rock
Voilà une pièce jubilatoire, d’une énergie fulgurante,
entre performance ultra distinguée et métaphysique
palpable, hautement recommandée par les temps
qui courent. Habilement monté par la comédienne
metteur en scène Agnès Régolo, qui signe la
première pièce de sa nouvelle Cie Du Jour au
Lendemain, Que d’Espoir de Hanokh Levin risque
bien de devenir le petit bijou à ne pas rater. Agnès
Régolo a réussi à rassembler musique et théâtre en
une tribu hétérogène et non dissociée de talents
confirmés, complices et inclassables, autour de la
langue «coup de poing» de l’auteur israélien. Les
musiciens du Collectif Inouï (Nicolas Chatenoud,
Guigou Chenevier, Frédéric Giuliani, Guillaume
Saurel) plongent sans peur ni reproche au cœur du
théâtre, s’immergeant avec délectation dans les
mots et les notes de ce cabaret expressionniste, tiré
des textes courts et chansons de Levin. Les
comédiens (Catherine Monin, Nicolas Geny,
Kristof Lorion) se fondent et se démultiplient de
tout leur corps dans la musique live, en partie issue
du Bal Inouï qui revisite des morceaux des Résidents
à Robert Wyatt (grandiose). Le résultat est rock,
généreux, drôle, cynique, burlesque, hargneux mais
toujours tendre, et la dépense qui s’en dégage
combinée à la prose Levinienne ressemble à l’effet
que procure cette dernière : elle électrise. On plonge
avec ces «créatures de scène» dans l’absurdité du
© Delphine Michelangeli
monde au cœur de la domination politique et sociale.
Et au cœur de l’humanité. Un coup de fouet et
surtout du très bon théâtre qui donne les contours
d’un paysage vraiment singulier, magnifiquement
éclairé par Erick Priano.
DE.M.
Que d’Espoir s’est joué au Théâtre des Halles,
Avignon, du 13 au 16 mai et au théâtre de la Colonne,
Miramas, le 18 mai
À noter
Que d’espoir sera joué le 20 mai
au Théâtre Vitez, Aix
04 42 59 94 37
http://theatre-vitez.com
Création en cours
«Bienvenue dans l’espace mental de Daniel Meynard!»
L’invitation est lancée dès l’entrée du Citron Jaune
par les membres de la compagnie 3 points de suspension qui présentent-là une étape de leur travail
Nié qui tamola, L’œil voyageur. Nous sommes en
Afrique, une Afrique singulière que dévoile un dispositif original et foisonnant : un itinéraire d’œuvres
diversement exposées invite le public à «se documenter» ; accrochées aux murs ou posées sur le sol,
elles forment un puzzle intelligent, du simulateur de
marchandage au grand jeu des origines (remarque
percutante selon la réponse que vous apportez à la
question «je suis africain parce que…») en passant
par une fenêtre qui pleure ou un cabinet de curiosité
sénégalais des plus curieux, dont le sens n’apparaîtra
pleinement que plus tard… une fois digéré le spectacle hilarant et très documenté qui narre les péripéties
politiques de la «Françafrique». De de Gaulle à
Sarkozy, petits et grands personnages de l’histoire
coloniale et postcoloniale défilent, au cours du
spectacle durant lequel on assiste à une dénonciation sans concession des politiques menées depuis
une cinquantaine d’années. Une «sortie de chantier»
plus que prometteuse dont on attend avec impatience la prochaine apparition…
DO.M.
Nié qui tamola a été visible le 27 avril
au Citron Jaune à Port-Saint-Louis-du-Rhône
Au feu et tous aux abris !
C’est rouge, pétaradant, enflammé…
Le numéro proposé par l’Apprentie
Compagnie à midi net est un hommage
aux clowns anciens, perruques orange
et maquillage blanc, qui grimpaient à
la grande échelle avec d’immenses
chaussures et des tuyaux d’incendie
capricieux. Aux fenêtres les cris lyriques des victimes potentielles, des
fumigènes, des explosions de bombes
aux confettis… sur le parvis un défilé
de camions rouges à bretelles, du saut
à bascule, des acrobaties claudiquantes, et des tartes à la crème, de
la mousse de neige sur les maigrichons
palmiers qui survivent là… C’est tapageur, et joyeux, et simple, drôle comme
les bonnes surprises sans prétention,
mais réglé au millimètre pour qu’aucun
passant de s’éclabousse, et que tous
s’éclatent !
On ne s’improvise pas pompier
a eu lieu le 5 mai à midi net
sur le parvis de l’Opéra de Marseille
A.F.
© Daniel Simon
À venir
Soto ni Deru, la dernière sirène
avant l’été, sera proposée par
Kubilaï Khan Investigation.
Une création sur le flux urbain,
et comment le corps y inscrit
son intimité. Cinq danseurs,
perturbés par trois musiciens,
entre deux sirènes.
Le 2 juin à midi
Parvis de l’Opéra, Marseille
04 91 00 81 28
www.lieuxpublics.com
26
THÉÂTRE
AU PROGRAMME
Vian’s
Show !
Entraînés
Jérôme Savary retrouve l’esprit revue pour rendre
Alpes
diverses
Angela Konrad met en scène les étudiants des
hommage à Boris Vian, écrivain touche-à-tout de
génie, symbole de l’esprit jazz qui régna sur SaintGermain-des-Prés. Avec juste ce qu’il faut de nostalgie
et toute la folie retrouvée de l’époque, Savary a plongé dans les chansons et les petits textes poétiques,
mais aussi dans les romans, pour y trouver un écho
à son propre univers. Une revue pas comme les
autres, avec cinq comédiens-chanteurs, et six musiciens.
cursus Théâtre et Musique de l’Université de Provence pour un spectacle sur les Alpes bavaroises, inspiré
de l’esprit de l’opérette L’Auberge du Cheval Blanc, et
des affres précipiteux d’Elfriede Jelinek… Deux visions
pour le moins contrastées des sommets enneigés !
Beau babil nouveau
© X-D.R.
Une Trompinette au Paradis
Du 25 au 29 mai
Le Gymnase, Marseille
0820 000 422
www.lestheatres.net
Au Joyeux Tyrol
Du 8 au 13 juin
Les Bernardines, Marseille
04 91 24 30 40
www.theatre-bernardines.org
Comme toutes les années, le théâtre des Ateliers
conclut sa saison par des présentations publiques de
sa compagnie d’entrainement. L’occasion bien sûr
de prendre la mesure d’un travail pédagogique de
grande qualité, et de découvrir de jeunes comédiens.
L’occasion aussi de plonger dans l’univers d’un
auteur : les Ateliers ne conçoivent pas leur formation
sans l’établissement d’une relation profonde entre
auteur et comédiens. Cette année, ce fut Joël
Jouanneau qui leur donna la main. Alain Simon les
dirige pour interpréter Les dingues de Knoxville.
Les dingues de Knoxville
La cie d’entrainement
Du 3 au 16 juin à 21h
Les Ateliers, Aix
04 42 38 10 45
www.theatre-des-ateliers-aix.com
© Brigitte Enguerand
Les Nouvelles brèves de comptoir sont arrivées ! JeanMarie Gourio et Jean-Michel Ribes livrent leur
nouvelle fournée de saynètes autour d’un blanc, ou
d’un p’tit noir. De l’aphorisme qui frappe l’imaginaire
à la formule cassante qui cloue le bec, en passant
par de plus longues circonvolutions, et des échanges
étonnés, émus ou vifs, les répliques de ces piliers de
comptoir fusent et désopilent, parlant simplement de
l’époque, avec juste ce qu’il faut de caricature et de
couleur. Pour finir la saison en légèreté, et parler de
la crise autrement !
Leçon
d’amour
Les Fausses Confidences sont sans doute le chef- Irréel
Avec les musiciens de la fanfare le S.N.O.B. (Service de
d’œuvre de Marivaux. Celui où l’on voit la naissance du
sentiment amoureux, le renversement des stratégies
de domination, le basculement de la noblesse vers des
intérêts d’argent. Les personnages et les dialogues y
sont ciselés avec le plus fin des couteaux, et offrent
aux comédiens des rôles de rêve. Didier Bezace,
qui sait rendre dans l’espace les relations de pouvoir
et de prédation, y dirige Pierre Arditi et Anouk
Grinberg… Aux Salins, qui accueillent la programmation exilée de la Criée en leurs murs… Une navette
est prévue, gratuite sur réservation, dans la limite des
places disponibles.
Les Fausses Confidences
Du 2 au 5 juin
Les Salins, Martigues
04 91 54 70 54
www.theatre-lacriee.com
nettoyage des oreilles bouchées), Ulik parcourt les rues
pour offrir un défi de taille : leur Glisssssssssendo surprend les yeux et les oreilles ! Avec un répertoire éloigné
des brass-bands traditionnels, basé plutôt sur des compositeurs contemporains, les musiciens jouent sur des
instruments de musique extravagants aux formes inédites
tout en glissant, comme par magie, parmi les spectateurs,
vêtus de costumes noirs dignes de derviches tourneurs.
Leurs silhouettes apparaissent et disparaissent avec
grâce et magie tandis que dure leur Fugue musicale.
Glisssssssssendo
Le 21 juin à 11h et 22h
Théâtre de Cavaillon
04 90 78 64 64
www.theatredecavaillon.com
Sombre
Librement adapté de l’œuvre de David Peace par la com-
Dévorant
La jeune et talentueuse cie L’individu poursuit sa
pagnie Fraction, Swan est tiré de la tétralogie Red Riding
Quartet qui a pour cadre la ville de Leeds et la région
du West Yorkshire, et se déroule de 1974 à 1983. La mise
en scène de Jean-François Matignon s’attache au
personnage de Clare, jeune fille de 13 ans retrouvée
morte en 1983, sorte de petit chaperon rouge qui aurait
rencontré l’Enfer en allant voir sa grand-mère, ou serait
simplement tombé au cœur d’un vaste réseau de
corruption qui mêle policiers, politiciens, industriels,
journalistes et voyous.
route, forte du succès de Notre Dallas, et reprend Le
di@ble en bouche, une histoire de relation anthropophage consentie... L’écriture de Charles-Eric Petit,
parfois trop labile, ne manque ni de souffle, ni de personnalité, ni d’énergie, et touche juste là où les trentenaires
ont mal de notre siècle. Thomas Cérisolaet Guillaume
Clausse ne manquent pas non plus de ces talents
multiples qui font les très bons comédiens…
© Brigitte Enguerand
Le di@ble en bouche
Du 3 au 5 juin
Bancs Publics, Marseille
04 91 64 6000
http://bancspublics.free.fr
Explorant les rapports entre fictions et mensonges,
récits fondateurs et arts en création, le 3bisf propose
une longue soirée festive autour des mythes et de la
création contemporaine. Avec un solo d’Anne-Marie
Chovelon, le Lit de mars, une conférence de Jean-Pierre
Raffaelli, une performance théâtrale chantée par
Miriam Palma sur un texte de Lina Prosa, une vidéo…
Comme toujours au 3bisf l’événement sera précédé
d’ateliers (les 8 et 9 juin) et on pourra se restaurer sur place.
Mito !
Le 11 juin
3bisF, Aix
04 42 16 17 75
www.3bisf.org
>
Les Nouvelles brèves de comptoir
Du 1er au 12 juin
Le Gymnase, Marseille
0820 000 422
www.lestheatres.net
Créer, mentir
Swan
Du 3 au 5 juin
Théâtre des Halles, Avignon
04 90 85 52 57
www.theatredeshalles.com
27
Jubilatoire
© J. L. Fernandez
Dans une volonté de «mise en condition réelle», le Théâtre de l’Unité adapte Oncle
Vania de Tchekhov et le joue à la campagne. C’est donc en plein air, à Lavalduc,
non loin de Fos, que se déploiera la pièce, un espace ouvert qui est l’«un des parti
pris le plus innovant de la mise en scène» comme le disent Jacques Livchine et
Hervé de Lafond. Le texte du dramaturge russe s’inscrit dans un contexte dont les
deux metteurs en scène démontent les mécanismes, des personnages
secondaires ou fantômes jusqu’aux traditions russes qui émaillent le spectacle,
samovar et bortch compris…
Oncle Vania à la campagne
Les 11 et 12 juin à 20h
Lavalduc
Théâtre de Fos
04 42 11 01 99
www.scenesetcines.fr
du 24 au 26 mai Plateau de Roquevignon
Théâtre de Grasse
04 93 40 53 00
www.theatredegrasse.com
Dépaysant
Au Macumba, improbable Salle des fêtes où règne Madame Gravotta, se croise
tout un monde de chanteurs, danseurs, musiciens pressés d’en découdre avec la
scène. Macha Makeïeff et Jérôme Deschamps retrouvent-là l’univers qui colle si
bien à leur peau, parodique et émouvant, au cœur d’un microcosme où chacun
est toujours un peu à côté de sa vie mais heureux. Que les fidèles de la compagnie
se rassurent, la pièce s’inscrit parfaitement dans le répertoire connu et habituel
qui est leur marque de fabrique. En plus musical !
Salle des fêtes
Les 27 et 28 mai
Théâtre de l’Olivier, Istres
04 42 56 48 48
www.scenesetcines.fr
© Marc Enguerand CDDS
28
DANSE
BNM
Le Ballet
National
n’en finit pas
de danser…
Après son programme
à l’Opéra de Marseille,
un autre à Danse en avril
(Aubagne), Métamorphoses
aux Salins, une tournée
en Italie, la carte blanche de
ses danseurs, un [Mac] envahi
lors de la nuit des musées…
le BNM va danser la dernière
création de Frédéric Flamand
dans une Salle Vallier rééquipée… À ne pas manquer !
À l’Opéra on a pris plaisir à revoir la pièce de Lucinda
Childs, à l’écriture précieuse et au rythme précis,
épatant surtout dans le mouvement rapide… Les deux
créations étaient moins intéressantes pour des raisons
différentes : Eric Oberdorff, qu’on a vu plus inspiré,
semblait avoir conduit ses danseurs hommes vers un
univers assez convenu ; quant à la pièce d’Olivia
Grandville, elle débutait avec génie -ah ces filles en
survêt traversant sur pointes la scène- puis se perdait
un peu en longueurs, et en références drôles, mais
pas exemptes, bizarrement, de clichés féminins (importance du déguisement, de l’habillage/déshabillage,
de l’échevelé…). Mais il était évident ce soir-là que le
Ballet de Marseille avait subi une transformation, amorcée depuis un an : finis les manques d’impulsion, de
dynamique, et les décalages fréquents d’une troupe
qui ne parvenait plus tout à fait à danser ensemble.
Les nouveaux danseurs ont visiblement impulsé une
énergie nouvelle, reprise avec bonheur par les plus
anciens qui les canalisent…
À chat perché
La dernière pièce de Frédéric Flamand en témoigne également. La vérité 25 fois par seconde a montré
au Théâtre de Chaillot un Ballet en plein essor. La
chorégraphie est en effet fondée sur les qualités
individuelles des interprètes, qui offrent de très beaux
duos ou moments solitaires qui témoignent de leurs
personnalités. Ils font également preuve d’une grande
cohésion qui permet des ensembles parfaitement
réglés, et d’une généreuse ampleur. Mais l’intérêt de
cette création réside dans son propos. Accompagnée
par une musique omniprésente, la pièce repose sur
une scénographie sans effets tapageurs, toute en
finesse : comme dans le Baron Perché dont il
La vérité 25x par seconde © Pino Pipitone
tin dans un monde fou d’Angelo Vergari, originalité
pleine d’humour de Malgorzata Czajowska, duo
sensible de Marcos Marco, interrogations douloureuses de Gabor Halász. Mais aussi un travail sur la
couleur et les différences avec Noir et blanc du bielorusse
Anton Zvir et celui de Nahimana Vandenbussche,
danseur d’origine burundaise dont la peau noire joue
avec la farine dont il s’enduit le corps. Enfin la chorégraphie déjantée de Martin Harriague joue sur le
dépaysement japonais en envahissant la scène de
25 poupées en plastique à l’image de la fameuse
Kitty, héroïne «mignonne» et mièvre qui fait fureur
chez les ados. Comme quoi une Ouverture peut
mener loin !
Masculin
BNM à l'Opéra © Agnès Mellon
s’inspire, Flamand conçoit un monde terre à terre
répétitif et factice, où l’illusion règne, projetée sur des
écrans qui mentent en désaxant l’image, en emmêlant
captations immédiates et enregistrées. Un Œil énorme surveille le tout, et les buissons d’échelle conçus
par Wei Wei séparent le bas du haut, qui semble un
ciel inatteignable vers lequel personne n’osera s’échapper, ou dont les jeunes barons ne pourront plus
descendre. Une pièce où la rotation domine pour mieux
brouiller les repères et dont on sort presque étourdi.
C’est à un jeu très viril, intitulé Super Man Project,
que Yasuyuki Endo invitait au [Mac] lors de la nuit
des musées. Si l’interprète du Ballet demeure toujours aussi fascinant lorsqu’il danse, majestueux et
ouvert comme un sphinx épanoui, sa proposition
contenait beaucoup de maladresses, quelques très
belles idées, et des moments éblouis. Les maladresses ?
Des bananes qui sortent des slips, d’interminables
vidéos dont une course travestie dans les couloirs du
BNM, une juxtaposition de saynètes n’ayant rien à
faire ensemble, et par-dessus tout un spectacle
frontal mal pensé dans l’espace, offert à un public
nettement trop nombreux dans cette configuration.
Les trouvailles pourtant -la danse scotchée au sol, les
corps à corps athlétiques, les costumes souples et
colorés, la belle masculinité de cinq interprètes
visiblement très bien guidés- laissent le spectateur
en attente d’une proposition plus resserrée ou plus
accomplie, sans vidéo maladroite, et dans une salle
de spectacle…
CHRIS BOURGUE ET AGNÈS FRESCHEL
Ouverture à 360°
Lors de la Carte Blanche aux danseurs au Grand
Studio, leurs 9 pièces courtes ont fait preuve de liberté, et d’un plaisir à chorégraphier les uns pour les
autres, à mêler leurs esthétiques et leurs cultures. Le
résultat est décapant ! Énergie et maîtrise les animent
tous, avec des atmosphères très différentes. Travail
plastique et réflexions sur le couple de Marion Zurbach
et Martin Harriague, images désarticulées du pan-
À venir
La Vérité 25 fois par seconde
Salle Vallier, Marseille
Du 8 au 12 juin
04 91 32 72 72
www.ballet-de-marseille.com
MOD | BALLET D’EUROPE
DANSE 29
Remue méninges
En ces temps de disette des concepts, la programmation de MOD fait du bien par où elle passe, posant
de fondamentales questions même si on n’aime pas
toujours les réponses ! Avec Appaix d’abord, à la
Minoterie et aux ABD, puis avec Yvonne Rainer. En
attendant Meredith Monk, pas moins !
Diptyque et variations
Paul Verlaine aimait les vers qui boitent sans peser ni
poser... ne pas compter douze mais onze et respirer
la joie du suspens... Les jeunes interprètes du groupe
Coline, issu des classes de formation professionnelle
de La Maison de la Danse d’Istres, interprétaient
donc en impair et sans le moindre faux pas la pièce
pour eux chorégraphiée par Georges Appaix, Dodeca
ou presque... Le titre à l’oreille sautille et affiche une
liberté assumée ; nulle désinvolture pourtant dans
cette prestation serrée, impeccable et d’une lisibilité
revigorante : les danseurs livrent le temps d’un parcours sur plateau des fragments d’autobiographies
imaginaires parlées (on y est souvent Suisse, tendance
Chameau; on pense à Godard-le-Fou), scandées par
le geste, emportées par la course, scindées et traversées par l’irruption de l’autre, toujours interrompues
donc et toujours à remettre en mouvement ; les Inventions de Bach dans leur précision didactique, légèrement
déréglées par le souffle de Glenn Gould et le doigté
d’Olivier Renouf semblent jaillir de l’énergie de chacun.
Avec émotion on y reconnaît les matériaux qui ont
construit l’histoire de La Liseuse : générosité de la
transmission et intelligence de l’assimilation. L’exercice est parfaitement réussi !
Georges Appaix aime-t-il Paul Verlaine ? Quand notre
danseur, en aparté troubadour, chante sur sa guitarejouet, défiant Fauré et Debussy, nul ne doute plus de
sa malignité. À ce moment délicat, la salle de lecture
de la BDP se remet à peine des perturbations savamment orchestrées par le sextet (voir plus haut): le
spectateur a d’abord foulé aux pieds un seuil de livres
couchés, mosaïque ironique, avertissement sans frais ;
assis à la table de travail, il a vu s’agiter de sombres
employés en quête de sens (où ? à quel endroit ? du
pied de la lettre à l’échelle des mots ?), passer à vive
allure un hippocampe vibrant du feuilleté de toutes
ses pages ; un peu perdu dans ce wonderland rempli
de bruissements (la langue de Flaubert croise celle
de Ghérasim Luca / les livres finement animés par
Jean Pierre Larroche se rebellent / les danseurs ont
les mots aux fesses et se glissent partout dans les
oreilles), il a goûté à la délicieuse frustration qui fait
tendre le cou dans toutes les directions : autant en
emporte la vue et tant pis pour l’ouïe (ou l’inverse) !
En perspective
Croiser Yvonne Rainer a de quoi déboulonner quelques attentes du spectateur de danse. Parce que son
style affirmé, dansé, refuse la torture du corps, le trop
tendu trop placé trop sec trop vite que l’on voit chez
le danseur contemporain comme chez le classique.
Mais elle ne sombre pas non plus dans le rien, le
minimal, l’esquisse (qui n’est autre que l’envers du
trop-tendu-trop…). Ses quatre danseurs tranquillement laissent leurs corps divers dire toute la gamme
des joies d’être, dans un relâché qui n’est pas avachi
ou morbide mais expressif, suggestif, humain, simple
comme des gestes quotidiens que vous ne feriez pas,
pourtant. Dans Spiraling down elle parle de cela, du
corps, qu’on endurcit ou pas, qu’on aime ou pas, qui
a un vécu, une forme. Ros indexical questionne de
surcroît la place du public. En s’attaquant au Sacre et
en rappelant combien, il y a près d’un siècle, il avait
fait scandale ; en imposant un univers où les danseurs répondent, quand ils le veulent, aux élans de la
musique et non à l’argument; en introduisant des
perturbations lumineuses, puis en théâtralisant une
intervention de spectateurs préparés. À l’heure où le
public se comporte souvent en consommateur insatisfait, et trouve parfois des échos auprès des pouvoirs
publics, il est bon de rappeler que les grandes œuvres du passé ont souvent été accueillies par des
Europe poursuit sa route
Comme chaque été le Ballet de Jean-Charles Gil
multiplie les événements et les créations en Provence
et en Europe. Avec une première étape le 10 juin, à
La Friche : l’occasion pour le chorégraphe de
présenter son projet sur l’eau, qui le conduira
jusqu’en 2013 au terme d’une recherche, déjà bien
Comme un souffle de femme © J.-C. Verchère
entamée, sur la fluidité et la sensualité. Témoin ce
Comme un souffle de femme, ballet en deux trio
mixtes qui, sur des musiques de Theodorakis, laisse
voir comment des corps différents s’emparent de la
même partition chorégraphique pour donner jour à
des interprétations très dissemblables. La soirée
verra aussi la création de Extra-vaganza, sur la
musique de Vivaldi, référence des danseurs
classiques. Un duo d’une belle étrangeté avait été
créé en 2008, intégré à Folavi. Jean-Charles Gil
prolonge, et monte tous les mouvements de la
Stravaganza, concerto mythique, avec six de ses
excellents interprètes.
Comme un souffle de femme. Extra-vaganza
Ballet d’Europe
Le 10 juin
La Friche, Marseille
04 96 13 01 12
www.balletdeurope.org
Yvonne Rainer, Spiraling down © Paula Court - Courtesy of Performa
scandales peu pertinents… Ouvrir son esprit à des
formes inhabituelles, revendicatrices dans leur propos ou dans leur radicalité, redevient urgent.
MARIE-JO DHO ET AGNÈS FRESCHEL
À noter
Marseille Objectif Danse poursuit
sa programmation avec Meredith Monk
du 4 au 6 juin à La Friche
04 95 04 96 42
www.marseille-objectif-danse.org
30
DANSE
MERLAN | CHÂTEAU-ARNOUX | PAVILLON NOIR
Pour qui sont tous ces cerfs ?
Le Belge Jan Lauwers et sa Needcompany ont présenté au Théâtre
du Merlan le dernier volet de la trilogie Sad Face Happy Face consacrée
aux tragédies contemporaines. Une
maison des cerfs dans la lignée des
créations de cette troupe éclectique et
polyglotte, qui associe théâtre, musique
et danse dans des décors ahurissants
et avec une belle énergie. De fait, hormis quelques-uns qui ont quitté la salle,
le public a été conquis et a réservé aux
artistes un accueil des plus enthousiastes. Cela peut se comprendre. Ce
spectacle en trois temps, né d’un
drame personnel, la mort en Yougoslavie du frère d’une des danseuses,
repose sur de réelles performances
d’acteurs sinon de danseurs et offre,
outre sa singularité même, des moments de magie. Durant l’acte central,
sorte de mise en abyme, La maison
des cerfs, havre inquiétant au milieu
des bois, apparaît comme le lieu de
mémoire de toutes les catastrophes
humaines et de toutes les grandes
œuvres dramatiques. L’intrigue rappelle
les tragiques grecs, les comédiens et
danseurs, affublés d’oreilles postiches
et de costumes mi-tulle mi-fourrure,
évoquent des elfes shakespeariens. Et
lorsqu’enfin, dans un décor d’hécatombe, les cerfs sont débités en
morceaux et servis à table, que morts
et vivants se retrouvent autour du
repas de Noël puis qu’ils entonnent le
choral final, un brin consensuel, on
s’aperçoit qu’on a été pris.
Il n’y a pas à dire, Jan Lauwers sait y
faire pour entraîner le spectateur.
Reste à savoir vers quoi. Le propos,
que le premier acte, situé dans les vestiaires de la compagnie, est censé
exposer, part tous azimuts. On ne sait
© Agnès Mellon
plus où regarder, qu’entendre. Est-ce
pour pallier cela qu’un livret de 10 pages,
pas moins, est distribué aux spectateurs ?
La maison des cerfs a été présentée
au Merlan du 22 au 24 avril.
FRED ROBERT
La planète s’affole
Ça démarre dans un lavomatic et ça finit derrière des
paravents en bois dentelé. Entre les deux ? Un
spectacle sans queue ni tête, à croire que sentir le
propre rend fou ! Des étendages désarticulés
bougent seuls, des corbeilles en plastique attaquent
© Agnès Mellon
entre la ronde des faunes et la cour des miracles :
gnomes tordus, ils éructent, crient, rient jusqu’à s’en
faire péter les cordes vocales. De cette folie qui n’a
rien de Surréaliste (pauvre Breton !) ni d’absurde
(Ionesco en resterait muet), on en sort naufragé,
vaincu par tant de vacuité. Et si ce n’était la
Needcompany, dont on avait plébiscité La chambre
d’Isabella, on s’interrogerait sur les intentions réelles
de This Door is too small (for a Bear) : que cache
donc cet «ours» débridé et voyeur derrière son
costume de clown ?
les acteurs-danseurs-chanteurs et des planches se
déhanchent ; les objets parlent avec des hommes à
tête d’ours. Et après ? Deux danseuses en poupées
glacées enrobées d’une mini robe en lamé
transforment la laverie en champ de bataille : chacun
vaque à ses occupations (euh, lesquelles ?) dans un
désordre indescriptible. Ils avaient annoncé «un
spectacle surréaliste imprégné d’humour absurde»
imaginé par la chorégraphe Grace Ellen Barkey, on
a droit à une représentation tape-à-l’œil, racoleuse
et terriblement ennuyeuse. Et quand les corps
dansent, leur maladresse feinte exaspère et leur
gestuelle outrancière frise le ridicule : la pauvreté du
langage chorégraphique laisse pantois. Ensuite ? Une
fois le plateau débarrassé de ses scories (la laverie
n’est plus la métaphore d’un paradis blanc ou d’un
bordel…), les corps dessinent une partition qui oscille
MARIE GODFRIN-GUIDICELLI
This Door is too small (for a Bear)
a été joué les 28 et 29 avril au Merlan
Dancité
© Jean-Jacques Mahé
Le 30 avril, le Théâtre Durance présentait ses
urbanités chorégraphiques à son public enthousiaste.
Anthony Egéa, talentueux chorégraphe de la
Compagnie Rêvolution basée à Bordeaux, présentait son Urban Ballet, poésie chorégraphique en
quatre strophes créée en 2008. Une écriture subtile,
précise et sensuelle qui semble s’affiner avec le
temps. Le débat avec la troupe, à la suite du spectacle, permet au public de vérifier les causes de ses
impressions premières : la volonté d’une architecture
du geste aussi solide que rigoureusement bâtie sur
des fondations musicales puissantes et amples
(Stabat mater de Vivaldi, Boléro de Ravel, composition
de Xenakis puis de Franck II Louise) ; une harmonie
nerveuse et vive entre les corps et l’âme du groupe,
hydre à dix têtes ondulante et foisonnante ; une
émouvante osmose entre ceux qui créent et ce qui
croît en l’œuvre collective ; le geste chorégraphique
ample et aérien de la danse de rue allié à la précision
horlogère d’une danse contemporaine aux accents
très classiques. L’émotion seule est portée par les
performances physiques époustouflantes. «…Quand
on reste sur la scène durant plus d’une heure, à un
moment c’est l’esprit qui prend le pas sur la fatigue du
corps…» Une abnégation qui permet à un public
subjugué de savourer un vrai moment esthétique…
pour un rêve d’évolution qui emporte vers des
sommets d’émotion.
YVES BERCHADSKY
Urban Ballet a été dansé au Théâtre Durance
de Château-Arnoux (04)
Woza, Welcome,
Bienvenue
Musique et diaporama en guise de
mise en bouche, Via Katlehong
Dance plonge derechef le spectateur
en Afrique du Sud. Il ne quittera plus
le township de Katlehong, dont le
groupe est originaire, jusqu’aux
dernières mesures de Woza, épuisé
par le rythme d’enfer mais totalement
réjoui. Woza, par son énergie de tous
les mouvements, son sourire un peu
figé et sa générosité, atteint en une
fraction de seconde les cœurs
sensibles au chaos festif, aux rituels et
à la danse parfois incantatoire.
Costume traditionnel pour l’un, jean et
basket pour l’autre, complet-veston
digne d’un Sapeur (mouvement ancré
à Brazzaville, Kinshasa et Paris…) pour
le troisième… Salutations tonitruantes,
palabres éternelles, rumeurs et chants
mêlés : on se croirait au marché un
jour de grande affluence ou lors des
préparatifs d’une cérémonie… Par
tableaux successifs -qui font de Woza
une revue plutôt qu’un spectacle- la
troupe alterne scènes de groupe,
parade, musique afro-jazz et standards
© John Hogg
américains. Parfois elle s’offre une
petite pause avec un solo nostalgico-langoureux et un duo amoureux à l’humour
poussif. Bref, Woza est un mixte entre Johannesburg et Broadway ! Qu’importe…
cet «exotisme» séduit d’autant plus que Via Katlehong Dance modernise la
pantsula (style de vie de la jeunesse rebelle des townships dans les années 60
incluant mode, musique et danse), lui apporte sa touche personnelle en l’associant
aux gumboots, aux claquettes et à la musique traditionnelle. Une musique de
bottes en caoutchouc symbole de fête et de protestation.
MARIE GODFRIN-GUIDICELLI
Woza a été interprété du 27 au 30 avril au Pavillon noir, Aix
Comme à
Amsterdam
mais…
L’art discret de Christine Fricker
interroge le quotidien. En mettant ses
danseurs en vitrine, sur la Canebière
de surcroît, elle interroge sans tapage,
simplement en faisant surgir l’incongru,
notre regard dans la ville. Que ses
interprètes soient une très belle jeune
femme, un homme plus ténébreux ou
une dame moins jeune, tous sont
captivants parce qu’ils se livrent sans
démonstration. Regardent ou non les
passants, miment ou non des gestes
réels, répètent ou non des boucles.
Comme toujours l’incongruité arrête
les passants, suscite des questions On
peut regarder ? Ils vendent un truc ? C’est
un spectacle ? et des remarques épatées Ben dis donc la vieille elle est plus
en forme que moi, des rapprochements
amusés On se croirait à Amsterdam,
mais en plus habillé ! Jusqu’au bourru
qui passe en pestant. Lui aussi, finalement, ça l’a ému.
A.F.
Inventaire des corps mouvementés
a été créé dans les vitrines
de l’Espace Culture,
3 fois par jour, du 7 au 11 mai
32
MUSIQUE
SYMPHONIQUE
L’Empereur s’habille en tailleur
Obérons rapidement la sempiternelle 5e symphonie
de Beethoven et les insipides Quatre psaumes de
Schütz de Betsy Jolas pour nous focaliser sur l’axe
principal du concert proposé à Salon dans le char-
Brigitte Engerer © Anton Solomoukha
mant théâtre à l’italienne Armand : à savoir, le concerto L’Empereur par Brigitte Engerer. Seule face à son
Steinway, à la sonorité métallique et agressive, et à
l’orchestre de Cannes, au pupitre des vents particulièrement désertique, la concertiste de renom
s’attaqua au monument de Beethoven. Bien soutenue
par l’ensemble dirigé par Philippe Bender, la
pianiste nous fit oublier la piètre qualité de l’instrument alternant passages robustes et dynamiques
avec des arabesques perlées d’une rare beauté. Le
second mouvement, longue dentelle mélodique en
opposition au rondo final destructeur nous permit
d’admirer toute l’étendue de la palette de jeu d’Engerer : trilles cristallines, virtuosité sans faille, emprise
totale sur l’orchestre… du grand art ! un face à face
monumental entre l’œuvre et l’interprète: impérial !
Succès
symphonique
CHRISTOPHE FLOQUET
Ce concert a eu lieu à Salon le 28 avril
et aux Pennes-Mirabeau le 27 avril
Cordes d’exception !
Les grandes scènes nationales n’ont qu’à bien se tenir ! c’est en Avignon que se
sont produits trois immenses artistes : Frank Braley, Gautier Capuçon et Laurent
Korcia
rêver en interprétant avec fougue le Concerto op.26
de Max Bruch, pages virtuoses dont tous les jeunes
violonistes connaissent le lyrisme. L’orchestre, placé
sous la baguette de Jérôme Pillement, a dignement
soutenu le soliste qui s’est vu bissé plusieurs fois par
le public. Le concert s’est achevé par la Symphonie
«l’Horloge» de Haydn, chaudement applaudie.
Le prochain concert symphonique (11 juin) sera
encore placé sous le signe des cordes puisque c’est
l’immense virtuose russe Vadim Repin qui viendra
interpréter un Concerto de Prokofiev.
Le 4 mai, Frank Braley et Gautier Capuçon ont
joué pour un concert organisé par le Rotary Club : la
soirée s’est ouverte sur les Variations H378 de
Martinu -à la place de l’Arpeggione de Schubert
programmée- et, outre une Sonate de Schumann et
des Variations de Beethoven, c’est dans l’opus 119 de
Serge Prokofiev que l’intensité émotionnelle a été la
plus forte. Créée en 1949 par le Grand Rostropovitch,
l’œuvre envoûte immédiatement : au piano, Frank
Braley a su dévoiler sa virtuosité tout en laissant
Gautier Capuçon (et son superbe violoncelle, un
«Goffriler» de 1701) séduire une salle déjà sous le
charme de l’artiste qui avait interprété avec talent le
Concerto opus 104 de Dvorak en février 2009. Le
public, électrisé par tant de passion, a longuement
rappelé les artistes qui ont rejoué avec générosité.
Le 6 mai, ce fut au tour de Laurent Korcia -qui joue
le «Zahn», un «Stradivarius» de 1719- de nous faire
CHRISTINE REY
Mikhaïl Rudy © X-D.R
Laurent Korcia © Andres Reynaga
Frank Braley © King Records
Gautier Capuçon © M. Tammaro
Le dernier concert de la saison de l’Orchestre de
l’Opéra de Toulon, en collaboration avec le Festival
de Musique de Toulon et sa Région, a attiré du
monde au Palais Neptune le 22 avril dernier. C’est
qu’au pied du Faron on avait envie d’entendre le
pianiste Mikhaïl Rudy dans Rachmaninov et son 2e
concerto. Le Russe, fort à l’aise dans l’expression
sombre de l’âme slave, rompu aux traits virtuoses
travaillés depuis le Conservatoire Tchaïkovski, a fait
preuve de cœur et de puissance dans ce morceau
de bravoure. L’ensemble n’a pas manqué de
générosité, malgré une acoustique déséquilibrée,
quelques accrocs et flottements dynamiques entre
le piano et l’orchestre.
Au programme, on a également apprécié une belle
interprétation de la trop rare Symphonie de Bizet. Ce
chef-d’œuvre de la littérature symphonique française,
écrit par un tout jeune homme, fut servi par une
direction vibrante (Giuliano Carella) et un solo de
hautbois à élever l’âme, livré avec finesse et goût par
la dernière recrue de la phalange varoise : Guillaume
Deshayes.
JACQUES FRESCHEL
MUSIQUE 33
Le quinzième festival de musique sacrée
poursuit sa route jusqu’au 28 mai…
Souffle romantique
Jean-Philippe Lafont © X-D.R.
Elias est une fresque lyrique magistrale. Mendelssohn
l’a composée (il n’y manque que peu d’atouts
scéniques pour en faire un opéra) en se souvenant
de Bach et des oratorios de Haendel. C’est du Livre
des Rois qu’est tiré le livret d’Elias. Durant deux
heures et demie les voix sont très sollicitées. Dans
l’acoustique délicate de l’église St Michel, où les
pupitres choraux ont tendance à se dissoudre dans la
réverbération, le Chœur de l’Opéra de Marseille a
montré sa brillante maîtrise technique. Sans économie, déployant un chant puissant, il a, d’une seule
voix, articulé le texte à souhait dans les grands
chorals, les contre-points variés, tout en préservant le
souffle inhérent aux phrasés romantiques. On souligne le travail rigoureux effectué en coulisse par la
phalange phocéenne et son chef Pierre Iodice. Pour
les quatre principaux solistes, Maurice Xiberras avait
fait appel à des talents de dimension internationale :
Jean-Philippe Lafont et sa déclamation puissante,
le charme vocal de Kimy Mc Laren, le timbre sombre de Qiu Lin Zhang et le ténor lumineux de Gilles
Ragon, soutenus par la direction experte de Friedrich
Pleyer à la tête de l’Orchestre Philharmonique de
Marseille, ont donné toute sa dimension à cet opus
qui manquait depuis quinze ans à l’affiche du festival.
JACQUES FRESCHEL
Hasmik Papian © Zaven Khachikyan
Vibrations polyphoniques
L’église Saint-Michel accueillait le 11 mai l’orchestre
lyrique de Région Avignon Provence et le Chœur
Régional PACA dirigés par Michel Piquemal, dans
deux œuvres majeures: Pauken Messe (Messe dite
des timbales) de Haydn et Lauda Sion op.73 de
Mendelssohn. Le chœur, intense dans l’immense
crescendo du Kyrie soutenu par les timbales, et recueilli dans un Benedictus planant, suit un chef précis,
libérant un lyrisme communicatif : vigoureuse fugue
du Credo et Agnus Dei impressionnants, croches
régulières des cordes sur des roulements de timbales
et les accents jubilatoires des cuivres. Dans le quatuor
soliste, on retiendra l’engagement lumineux de
Sandrine Eyglier, soprano expressive au timbre
ample. Le ténor Vincent De Rooster et le baryton
Ulrich Studer assurent correctement des parties
moins exposées. Jacqueline Mayeur, mezzo-soprano,
colore son timbre chaud, proche du contralto.
L’OLRAP est homogène, cordes veloutées et interventions solides des vents. Le Lauda Sion, salvatorem
(Sion, acclame ton sauveur), traduction musicale de
la transsubstantiation du pain et du vin en corps et en
sang, de Mendelssohn, prouve la science du compositeur dans le domaine de la musique religieuse.
Dessinée en traits larges fortement orchestrés, elle
dégage un romantisme alternant rythmes vifs -châtiment du jugement dernier (sumit unus)-, motifs
apaisés (Bone pastor) ou le magnifique choral
chœur/soprano (sit laus, plena, sit sonora).
YVES BERGÉ
Orchestre de l'OLRAP © Stephan Caso
La classe !
Le Festival de Musique Sacrée c’est aussi des
concerts gratuits organisés dans des églises de
divers quartiers de la ville par les élèves avancés des
classes du Conservatoire. Le 9 mai à St-Julien, on a
pu ainsi apprécier de beaux airs et ensembles vocaux
interprétés avec talent et goût par de jeunes chanteurs de la classe d’Isabelle Vernet. La professeure,
nouvellement arrivée dans la cité phocéenne pour
Sacrément
théâtral
prendre la succession de Claude Méloni a assuré
une forte présence pour soutenir ses élèves. Elle a
dirigé et présenté ses «protégés» avec un enthousiasme communicatif. Des chanteurs pleins d’avenir qui
furent accompagnés rituellement (et au cordeau !)
par la pianiste Marie-France Arakélian !
J.F.
Le Requiem de Verdi est une immense fresque en
sept parties qui commémore l’anniversaire de la
disparition du poète Manzoni et fait preuve d’une
maîtrise parfaite du sens liturgique, d’une écriture
magistrale, entre drame et aspiration sacrée. L’opéra
de Toulon avait invité le chef Bruno Aprea, survolté,
imprimant toute la palette de nuances exigée par la
partition. Le quatuor soliste était de haute tenue : la
soprano Hasmik Papian, domptait à merveille une
redoutable tessiture, avec un Liberame me superbe ;
la mezzo-soprano Elisabetta Fiorillo, aux graves
imposants, donnait au Lacrimosa de belles couleurs
plaintives ; le ténor Antonio Gandia, à la ligne de
chant superbe, fut lumineux dans l’Ingemisco, la
basse Marco Vinco noble et imposant dans le
confutatis maledictis. Les chœurs de l’opéra, placés
sur quatre rangées en haut de scène, étaient très
convaincants dans les passages pianissimi planants,
salva me, ou reprenant l’Agnus Dei des solistes,
paliers a cappella, sur un fil, avec contrechants des
bois, comme dans l’étonnant Dies Irae aux attaques
décidées, leitmotiv puissant. Leur disposition, très en
hauteur derrière les trois rangées de vents et les
timbales, ne servait cependant pas la projection.
L’orchestre de l’opéra donnait toute son énergie
dans un Dies Irae tonique et on appréciait les
nombreuses interventions des vents ; quelques
décalages dans le début du Sanctus n’empêchèrent
pas la fugue de s’imposer de façon rayonnante. Verdi
au sommet de son art, entre Aïda et Otello, laisse une
œuvre d’une immense poésie, pleine de force et
d’espérance : liberame, Domine ! On pouvait aller en
paix après cette interprétation généreuse et intègre.
YVES BERGÉ
Le Requiem de Verdi a été chanté les 14 et 16 mai
à l’Opéra de Toulon
34
MUSIQUE
MUSIQUE DE CHAMBRE
Du lyrisme à la joie
L’ensemble vocal Musicatreize poursuit son cycle de concerts dans l’auditorium de la bibliothèque départementale
Temps et espace habitent ce programme : temps de
la mort en valeurs longues, temps de la fête en rythmes incisifs. Un voyage acoustique aux dispositions
pertinentes : Trois Etudes hongroises de Ligeti, Quatre
chants populaires hongrois de Bartok, Madrigalkomödien de Peter Eötvös et les Eight sacred and
profane lyrics songs de Britten.
Le lyrisme de Britten impose de grands intervalles,
des entrées par paliers en appels douloureux, en
crescendos saisissants. Les fins de phrases pianissimi de la Prière à la Vierge sont magiques, et dans Si
je connais l’amour le solo de Kaoli Isshiki au chromatisme chaloupé plane sur les nappes du chœur
aux attaques parfaites. La direction de Roland Hayrabedian, expressive, entraîne ici un bel engagement.
Les Études de Ligeti sont plus agressives dans leurs
polyrythmies, et les chants populaires de Bartok se
révèlent d’une grande difficulté : ambitus large,
métrique des Balkans, textes sombres sur le
prisonnier, la fuite, dissonances acerbes. Plus ludiques, les Comédies madrigalesques d’Eötvös :
Insetti Galanti (Insectes galants), que Gesualdo utilisa
dans ses Madrigaux, évoque des ébats de moustiques, regorge de jeux vocaux, fait un clin d’œil à
l’opéra, et donne lieu à une merveilleuse alchimie des
timbres : le chef devient cocasse et l’ensemble vocal
semble enfin relâché ! Le Madrigal du mariage, d’une
folle théâtralité, évoque la joie de vivre au moment
des photos, occasion d’ironiques arrêts sur images.
© Guy Vivien
Chaque voix s’amuse, se répond, dans une allégresse
vocale tourbillonnante. Un moment très jubilatoire !
YVES BERGÉ
Ce concert a eu lieu le 7 mai à la Bibliothèque
départementale Gaston Defferre
Zin’q à six
Une musique sculptée
MARYVONNE COLOMBANI
Dana Ciocarlie © X-D.R.
La belle salle de l’Oustau Calendal de Cassis, située
idéalement sur la jetée qui sépare le port de la mer,
accueillait ce soir-là, le 27 avril, pour la fin de la
saison, un concert tout d’harmonie et de passion.
Dana Ciocarlie au piano et Sébastien Van Kuijk
au violoncelle (un superbe instrument de François
Fendt, fin XVIIIe) ont offert à un public averti une
exécution virtuose et inspirée d’œuvres de
Mendelssohn et de Schumann, dont l’anniversaire
est occulté par celui de Chopin cette année… Une
complicité de huit années était rendue sensible par le
jeu des deux artistes. Si les variations concertantes
de Mendelssohn mettaient en valeur la virtuosité des
deux instrumentistes, et Romance sans paroles la
fluidité du clavier, la 2e sonate en ré majeur (op 58)
soulignait l’ampleur du jeu arpégé du piano, la
souplesse et le lyrisme jusque dans les pizzicati du
violoncelle. Les passages de Schumann,
Märchenbilder, Quatre Phantasiestücke (op. 12 et op.
78), sont à la fois brillants et sensibles dans une
esthétique de la surprise sans cesse renouvelée. Le
sublime ici devient évidence tangible. Le public
demande rappels sur rappels et les artistes accordent
le bonheur de la Romance sans Paroles et la pièce
inachevée Albumblat de Mendelssohn. On sort de là
réconciliés avec le monde, une mer tendre offre un
miroir uni au beau lever de lune sur les falaises…
Exceptionnel.
L’arrivée en trombe sur la scène du foyer des six
musiciens (Laurent Cabaret et Julien Lucchi aux
trombones, Thomas Leleu au tuba, Eric Laparra
de Salgues au cornet, Denis Cartier Million à la
trompette et Bernard Pereira aux percussions) et
l’entonnement hâtif naturel du célèbre gospel Just a
closer walk, suivi de la Danse du sabre d’Aram
Khachaturian, a su donner à un public complice le ton
de ce dernier concert de musique de chambre de la
saison. Programme éclectique donc, quoique
cantonné à des pièces tonales, interprété avec
théâtralité et humour (le Duo des chats de Rossini
s’avéra tout simplement délicieux, et la Danse des
heures de Ponchielli vivifiante), et une musicalité
indéniable. Plus à l’aise dans le folklore (espagnol ou
balkanique) que dans un répertoire plus «sérieux»
(l’adaptation de la Nuit sur le Mont Chauve tombait
un peu à plat), la bande des Zin’q n’a cependant pas
hésité à resituer les compositeurs, à remercier l’opéra
de l’importance qu’il aura accordée aux cuivres cette
année (en rappelant la prestation acclamée du tubiste
Thomas Leleu au dernier concert symphonique) et à
présenter tour à tour les membres du quintette (+1)
dans la bonne humeur. Le résultat a très vite conquis
le public, qui a exigé deux bis ; amusés, les musiciens
ont à plusieurs reprises rejoué à la cadence finale, en
la réduisant peu à peu, jusqu’à ne tonner que le
dernier accord. Un joli teint cuivré pour préparer l’été !
SUSAN BEL
Ce concert a eu lieu le 15 mai au Foyer de l’Opéra de
Marseille
MUSIQUE 35
Caprices de Diva
grognements de chien (Fido Fido) ou des
mâchonnements évocateurs (Le vieux chameau du
zoo)… On en oublierait presque les splendeurs de son
soprano aérien, les virtuosités déployées, si l’on
n’entendait, comme en clôture du spectacle, un
irrésistible pastiche technico-délirant d’air d’opéra
signé Isabelle Aboulker (Je t’aime). On vire du rire aux
larmes avec Reynaldo Hahn ou Canteloube, on
reconsidère le cante jondo de Falla et Turina et l’on
fredonne à l’unisson les «standards» de Poulenc (Les
Chemins de l’amour) ou Satie (Je te veux).
Un concert où s’harmonisent, grâce à une gestuelle
plastique au millimètre, le burlesque, l’émotion et le
respect des œuvres.
La soprano a le don de revisiter le format classique du
récital. Une habile mise en espace, un Steinway
bordé de plantes vertes, l’appui d’accessoires et de
percussions mobiles servent un talent scénique horsnorme. Son personnage de poupée rouquine
tragico-loufoque, pince sans rire, déclenche l’hilarité
comme à d’autres instants, habitée par une émotion
vraie, tire les larmes…
En prime, les musiciennes font découvrir un
répertoire peu connu du XXe siècle, enchaînement
de mélodies françaises, ibériques ou américaines
inouïes. Il faut les voir, parées d’un déguisement de
cow-boy et de plumes sioux, interpréter de Vieilles
chansons américaines de Copland, jouer de bruitages
et d’appeaux, lunettes «tournesol» au pif, déclamer
quelque Satie version Dada ! Chez Rosenthal, la
chanteuse introduit, avec un naturel confondant, des
JACQUES FRESCHEL
Des ors dans Beethoven
Christian Ferras.
En trio classique avec piano, l’équilibre cordes/clavier
est souvent aléatoire, et l’équation parfois impossible
à résoudre selon l’acoustique du lieu. Si la balance a
penché du côté du piano au début du Trio op.70 n°2
de Beethoven, on a ensuite, grâce à l’écoute et la
cohésion des artistes, saisi le rigoureux travail de
chambriste réalisé en amont, apprécié le lyrisme
chaleureux du violoncelliste Xavier Chatillon, les
couleurs diaphanes et subtiles du violon comme les
majestés d’un clavier symphonique.
La villa Magalone constitue un bel écrin pour
apprécier la musique de chambre. Au pied du double
escalier encadrant son vaste hall, surplombé de staff
et de dorures, le public a formé un ample arc de
cercle autour du piano. Un instrument certes assez
médiocre, mais dont Marie-France Arakélian a su
tirer profit en réalisant des prouesses. Son jeu
toujours clair, égal et précis a fait écho au style fin et
chatoyant du violoniste Yann Le Roux-Sédes. Dans
la célèbre Sonate «A Kreutzer» de Beethoven, la
disciple de Barbizet a dû se souvenir avec émotion
du duo que formait autrefois son maître avec
JACQUES FRESCHEL
Aimez-vous Brahms ?
Fidèle à leur tradition de qualité, les Moments
Musicaux proposaient le 20 avril au public habitué
des mardis de Carry un plaisant et judicieux parcours
au cœur de la musique romantique allemande. Au trio
en si bémol majeur, œuvre de jeunesse de Beethoven,
succédaient deux pièces de Schumann, dont les 3
Fantasie stücke, une œuvre de maturité du maître,
avant l’un des chefs-d’œuvre de Brahms, le trio en la
mineur opus 14 écrit au sommet de sa carrière
musicale.
Diana Ligeti © Claire Mouginot
Dès les premières mesures du Beethoven, le trio
composé de Diana Ligeti au violoncelle, Véronique
Pelissero au piano ainsi que du très jeune Jérôme
Christophe au saxophone laissait percevoir sa
qualité, faisant alterner avec fougue l’exaltation
romantique avec le recueillement et la pudeur
intérieure des thèmes joyeux ou nostalgiques aux
réminiscences bucoliques. L’instrument à vent
semblant se jouer de la délectation morose et des
accents languissants de l’adagio. Après l’éblouissant
duo piano clarinette du premier morceau de
Schumann, les Fantasie stücke, mêlant le fougue et
l’ardeur du piano à la retenue, à la générosité ample
du violoncelle : les artistes ont littéralement mis le
feu par la grâce de leur maestria et de leur complicité
totale. Mais c’est avec le trio de Brahms que le
concert allait atteindre l’apothéose, la rondeur et la
chaleur du saxophone lui conférant une modernité
rare, alliée à la clarté d’un jeu intelligent, tout en
nuances, d’une extrême finesse de l’ensemble des
musiciens. Une piquante Romance sans paroles de
Mendelssohn venait remercier le public de la longue
ovation amplement méritée.
JEAN-MATHIEU COLOMBANI
Patricia Petibon © Stephanne Charpentier
Quelle fantaisie déployée par Patricia Petibon et sa pianiste-complice Susan Manoff
le 5 mai au théâtre du Jeu de Paume !
36
MUSIQUE
SPECTACLES
À la sauce italienne
CHRISTOPHE FLOQUET
Don Pasquale s’est donné à l’Opéra de Toulon
du 20 au 25 avril
© Opéra de Nice
Au faîte de son art lorsqu’il composa Don Pasquale en
1842, Donizetti, grand compositeur italien à la mode,
était un homme brisé, affecté par la perte de sa fille
et de sa femme quelques années auparavant. Le personnage central de la pièce, Don Pasquale, homme
d’un certain âge, va se retrouver au cœur d’un
complot ourdi par son «ami» le docteur Malatesta…
Derrière une rhétorique parfaitement huilée, Donizetti
dépassa le monde trivial de la farce et dépeignit avec
justesse des portraits d’une grande humanité historiés d’une légère mélancolie ; tous les sentiments
humains furent explorés avec grande justesse dans
une partition marquée d’une profonde maturité. Le
rôle, superbement soutenu par la voix chaude et
ronde de la basse, Carlo Lepore, vint ici s’opposer à
la légèreté et la frivolité de la soprano, la jeune
italienne Daniela Bruera. Le personnage d’Ernesto,
bien évidemment ténor, composé pour l’occasion par
Francesco Marsiglia, compléta ce triangle adultère.
Le public ne s’y est pas trompé, marquant son enthousiasme sous une salve drue d’applaudissements.
En cette journée quasi estivale, Toulon fleurait bon
les parfums d’Italie !
No trouble in thy breast
Didon et Enée est un bijou baroque, miracle de concision, devant lequel on
s’incline. Le public ne s’y est pas trompé, remplissant les travées de l’église SaintLaurent, le 15 mai, soir de mistral, nuit des musées et de hourras footballistiques.
Quelle bonne idée a eu Rémy Littolff de monter le chef-d’œuvre de Purcell ! Sa
direction, taillée au millimètre, a poli son diamant, dosé les contrastes et les
respirations, fait briller ses facettes : de l’hystérie des sorcières à la chute
mortuaire, des ballets festifs aux chaconnes douloureuses, de la «chasse» obstinée
à la froide annonce du messager…
Soutenu par un ensemble instrumental de haut-vol (Quatuor Opus 16 et Julien
Ferrando au clavecin), le Chœur Phocéen s’est montré particulièrement
impliqué, en place et précis pour des interventions finement mesurées. Karine
Magnetto a campé une Didon noble et émouvante avec, pour sommet, le fameux
air When I am laid et ses déchirants Remember me ! à tirer des larmes. Le plateau
de solistes, judicieusement distribué, a contribué à rendre à l’œuvre sa sobriété
tragique : Jean-Christophe Born (Enée) ténor tout en majesté, Laury Littolff
(Belinda) aérienne et claire à souhait, Ambre Monray, sombre et inquiétante
magicienne… Une version de concert chaleureusement applaudie.
JACQUES FRESCHEL
Une Égypte vivante
Cette production de l’opéra de Nice
est une réussite. Verdi y est servi par
un orchestre et un plateau homogènes,
des lumières magnifiques et mise en
scène subtile. Indra Thomas, soprano américaine, campe une Aïda très
engagée, voix égale dans tous les
registres, pianissimi d’esclave torturée
Numi Pièta succédant aux imprécations
fortissimo d’amoureuse passionnée
Ritorna vincitor. Radamès est le coréen
Jeong-Won Lee, voix solide de lirico
spinto, parfois éclatante; cependant,
l’attitude est figée et l’absence de
nuances entraîne des duretés dans les
passages diminuendo. La mezzo russe
Elena Manistina est une Amnéris
étonnante: voix chaude, présence grandiose. Amonastro, Carlos Almaguer,
roi déchu, magnifique baryton au timbre d’airain. Jean Teitgen, roi puissant
et sobre, Nicolas Courjal, valeureux
© X-D.R.
Ramfis. Décors, costumes et lumières
étonnantes nous dévoilent des scènes
où le blanc domine ; contrastes saisissants sur les appuis de bleus et doré :
une esthétique remarquable. Le ballet
est expressif et chatoyant, les chœurs
de l’opéra de Nice se joignant à ceux
d’Avignon et des pays du Vaucluse
pour un beau travail, dans les passages
triomphaux comme dans les invocations aux dieux, plus subtiles. La
direction du jeune chef Rani Calderon
est précise, enthousiaste, dégageant
un lyrisme sensible sans emphase :
l’orchestre dévoile de belles couleurs.
Une intelligente mise en scène de
Paul-Emile Fourny où l’on voit bouger
la société égyptienne, les artisans
façonnant des colonnes, peintres, teinturiers, musiciens, avec bien sûr, le Nil,
les pharaons, les dieux, mais le drame
s’y déroule dans une Egypte vivante.
Sans anachronisme inopérant...
YVES BERGÉ
Aïda de Verdi s’est joué
à l’Opéra Théâtre d’Avignon
les 25 et 27 avril
MUSIQUE
37
Mixer sans folie
La meilleure surprise : les Indes Galantes de Rameau devient un super tube
pop-rock, une danse des sauvages
endiablée avec Paul et Louise. La 7e
symphonie de Beethoven garde une
couleur trop classique. Dans la sublime
mélodie de Fauré Après un rêve,
Rosemary, très sensuelle, dialogue
avec claviers, cordes frottées et chœurs
en nappes.
Ce projet ambitieux permettait d’espérer un feu d’artifice. La richesse
mélodique et harmonique des musiques au programme sont un trésor
pour des remix pop, rock, électro, qui
peuvent puiser dans le beat essentiel
du baroque et jouer sur les boucles
caractéristiques des musiques électroniques aux possibilités inouïes. Mais le
résultat manquait d’audace et de folie,
de sons qui décoiffent, de mix plus
appuyés, plus osés. Un mariage somme toute conventionnel !
L’idée ? Laurence Equilbey se transforme en Iko, s’adjoint les chœurs et
l’orchestre Private Domain accompagnés d’artistes «électro» et chanteurs
«pop». Ensemble ils revisitent, arrangent
et transforment des opus classiques
de Bach, Mozart, Schubert, Beethoven,
Rameau ou Monteverdi, avec l’aide de
Para One, figure de l’électro française,
Murcoff, électro expérimental, Marc
Collin, musicien Nouvelle Vague, Paul
et Louise, couleur pop et Rosemary
Standley, de Moriarty, craquante dans
ses interventions vocales, et de trois
ordinateurs pour les sons échantillonnés. When I was laid (Didon et Enée) de
Purcell devient, avec la basse obstinée à la guitare électrique, une chanson
d’un bel effet. Death and maiden
d’après Schubert, reste original :
thème du Lied chanté par un chœur
trop figé, l’ensemble instrumental jouant
les variations du quatuor à cordes sur
sons échantillonnés. Le lamento della
ninfa (Monteverdi) reste émouvant,
Rosemary répondant au chœur (Miserella) sur pulsations rock aux guitares.
YVES BERGÉ
© X-D.R
Le Grand mix s’est joué
le 23 avril au GTP
Question d’espace
Le Flâneur de Jean-Louis Clot, opéra créé il y a
quatre ans lors du festival du GMEM, a été repris au
Gyptis dans une version qui lui va bien : un concert,
simplement mis en espace, qui laissait toute sa place
à l’écoute, et à l’imaginaire. Il y est question d’un
promeneur qui passe de pays en allégories, de
rencontres en retrouvailles, de quêtes aventureuses
en rendez-vous tacitement convenus. L’espace
dramaturgique y est ductile, à la fois référencé et
rêvé, affectif, littéraire. La mise en scène et en voix du
foules, l’intimité… Là-dessus les lignes vocales des
solistes viennent, presque étrangères, imprimer leur
lyrisme qui semble une parole intérieure. Avec
modestie, et une grande musicalité. Une très belle
reprise !
quatuor d’interprètes -un banc, un pupitre, presque
rien- laisse justement place à tous les espaces
imaginables, présents, comme il se doit, dans la
musique… Car aucun instrument n’accompagne cet
opéra : simplement une bande, faite de conversations
inidentifiables, de chœurs, de sons concrets et de
synthèse qui, diffusés et spatialisés, lui donnent non
seulement son épaisseur sonore, mais aussi une
grande richesse évocatrice, comme documentaire,
qui fait vivre les halls de gare, le bord de mer, les
AGNÈS FRESCHEL
Le Flâneur a été recréé par Alain Aubin, Marie Prost,
Felicitas Bergman et Laurent Grauer le 5 mai au Gyptis,
dans le cadre de la programmation du GMEM
C’est un opéra miniature qui était repris au Théâtre
d’Arles le 20 avril sous la baguette de Roland
Hayrabedian dirigeant Musicatreize en formation
resserrée accompagné d’un ensemble instrumental:
clarinette, guitare, percussions, trio à cordes avec
contrebasse et piano. Sur scène, trois sopranos
commentaient l’action comme un chœur grec
antique, à l’exemple du Requiem aeternam introductif,
chanté recto-tono après le quatuor en sol mineur avec
piano de Mozart jouant le rôle d’ouverture. Un
glissement subtil opéré par le compositeur Bruno
Mantovani nous amenait donc dans la musique du
XXIe siècle afin de décrire le coup de cœur d’un
passant devant une gravure de L’enterrement de
Mozart exposé par un vieillard antiquaire et donnant
son nom à cet opéra. Inscrit dans le cycle des Sept
contes de Musicatreize, le livret de cette
commande lyrique a été écrit par Hubert Nyssen à
partir d’une nouvelle qualifiée de «conte baroque».
Souvent cocasse, cette pochade donne à l’éditeur
arlésien l’occasion de dériver sur les évocations
loufoques de notre boutiquier, mélangeant le souvenir
d’un chien philosophe au travers de quiproquos
basés sur les assonances et les jeux de mots faisant
parfois référence à l’univers Lacanien dans un monde
qui oscille entre Kant et Kafka. Dans un décor fait de
volumes sobres et mobiles, et mis en scène par
Jeanne Roth, la musique illustre ce beau babil en
créant des effets d’atmosphères musicales basés sur
des modes de jeu contemporains, du trémolo aux
longues trames de sons tenus en passant par les
envolées d’une clarinette volubile. Sans fulgurance
notoire, cette création de 2008 a néanmoins le
mérite de la concision (1h avec le prologue) et de
l’équilibre dans un discours musical varié et novateur.
P.A HOYET
© Yves Petit
Nyssen ni fulgurance
38
MUSIQUE
MUSIQUE DU MONDE
À l’heure où les émissions de cuisine fleurissent sur les petits
écrans, Peter Hens nous donne un cours de gastronomie
musicale, à consommer sans modération aucune, à l’image
de ce spectacle sans temps mort, rapide, enlevé, dans
lequel l’artiste s’amuse visiblement, jongle avec les mots,
pratique l’esprit d’escalier, concaténation, échos farfelus et
autres mignardises… Les passages musicaux s’enchaînent
avec la même verve, jonglant entre les styles et les époques,
effectuant des rapprochements saugrenus : Michael
Jackson, Schubert, Verdi, The Queen…. Chorégraphies
hilarantes, acrobaties vocales (la voix change de registre
avec une aisance déconcertante), tout est réuni pour faire
rire, mais avec un souci permanent de qualité. Le piano,
mené avec humour par Yves Gourmeur, complice, permet de
nombreuses fantaisies… les deux musiciens se relaient sur
un même morceau en tournant sur le tabouret du piano, le
tempo ne varie pas ! Mimiques, appels, mésententes feintes
lorsque violoncelle et clavier doivent duettiser… Le public
aussi participe. Peter Hens réussit même à faire chanter Le
temps des cerises… et ça finit dans une débauche de
lumières, feux d’artifices, parodie des scènes à grand
spectacle, Aïda en chœur… C’est bon comme un gâteau à
la crème chant-chantilly !
MARYVONNE COLOMBANI
La Framboise Frivole s’est jouée au Toursky les 29 et 30 avril
© Johan Jacobs
Une recette fruitée
Îles
quotidienne, processions, mariages, travaux des
femmes. Sur scène, quatre chanteuses aux voix
superbes, accordées entre elles par une joyeuse
complicité. Berceuses, chansons d’amour, de travail,
Teatro Actores Alidos © X-D.R.
Dans le cadre de Mai-Diterranée, un double concert
était donné le 11 mai au Toursky. Sardaigne et Corse
étaient à l’honneur, avec des voix de femmes : les
chants donnés en concerts le sont traditionnellement
par les hommes, et la polyphonie est une chasse
gardée masculine… On retrouvait avec plaisir la voix
de Jacky Micaelli, nuancée et vibrante, qui se
dévoilait avec grâce lorsqu’un simple bourdon
l’accompagnait. Dommage que l’équilibre des voix
n’ait pas été assuré dans les passages polyphoniques
où certaines voix oubliaient toutes les nuances et
même la justesse, et où la terza recouvrait parfois
tout le reste.
Scénographie, enjouement, vivacité, caractérisaient
en revanche le groupe des femmes sardes, Laras de
Coraddu, Lèvres de Corail… Projetés en fond de
scène, des images en noir et blanc de la vie
de deuil, comptines réarrangées, et c’est toute le
Sardaigne qui s’offre à nous, jusque dans les objets
qui se transforment en instruments de musique… Les
tambours, frottés ou frappés, donnent une tonalité
particulière. Un homme les accompagne, Orlando
Mascia, il ne chante pas, mais joue avec un bel
entrain de l’orgue diatonique, de la guimbarde, mais
surtout d’une étrange flûte, une clarinette
polyphonique en roseau composée de trois tuyaux
d’inégales longueurs, la launeddas, au son proche de
celui de la cornemuse… On a même droit à une
démonstration de danse au rythme endiablé. Quelle
légèreté !
MARYVONNE COLOMBANI
L’esprit de Cordoue
Dans un monde où l’intolérance religieuse refait
surface, il est bon se replonger dans la richesse de
cette époque… l’Espagne médiévale métissée est
apparue comme un modèle de convivencia, quand
Musulmans, Chrétiens et Juifs échangeaient leurs
arts et respectaient leurs pratiques. Françoise
Atlan, imprégnée de ses racines judéo-berbères,
nous a plongés dans la beauté et les contours de ses
Françoise Atlan © X-D.R.
mélodies aux riches couleurs d’Al Andalus :
merveilleux voyage, conte des mille et une odeurs,
mélismes, ornementations dans les modes les plus
complexes et les plus raffinés. Programme articulé
autour de chansons séfarades, arabo-andalouses.
Une berceuse en mode persan hijaz, une de
Salonique en hommage à l’errance des juifs, bijoux
finement ornés ; Cette terre qui est la mienne est aussi
la vôtre, chant de Grenade, où Françoise Atlan
improvise; un chant mystique en arabe dans la
tradition de Fès (Allahou ya Alamou) ; une romance
judéo-espagnole qui relate l’histoire de Moïse
recevant la mission de délivrer les juifs du joug du
Pharaon, un chant arabo-andalou El Boulboul : la
chanteuse passe d’un registre à l’autre sans à coups,
fins de phrases en écho, sans laisser retomber le
souffle, en faisant vibrer simplement les cordes pour
une ligne de chant parfaite. Un art vocal unique et
rare aux odeurs de citronniers, d’orangers, des
rangées d’oliviers, jardins fleuris de roses, de jasmins.
Splendeurs de l’Alhambra !
YVES BERGÉ
Ce concert a eu lieu le 16 avril
au temple d’Aix-en-Provence
40
MUSIQUE
CHANSON | MÉTAL
Jeu de Massacre
Le 21 avril, The Brian Jonestown
Massacre investissait le Cabaret
Aléatoire, entraînant les amateurs
de rock teinté de références ironicodécalées au cœur de l’univers
directif du groupe californien
Quand Anton Newcombe monte sur scène et
entame une tournée, il joue pour ses fans et
uniquement pour eux. Il n’est pas question de séduire
les curieux, venus nombreux au Cabaret Aléatoire
constater que le nouvel album n’est même pas en
promotion. Les Brian Jonestown Massacre
investissent donc la scène de la Friche et ne font pas
The Brian Jonestown Massacre © X-D.R.
Renan et Benoît
dans la demi-mesure : pas moins de 8 musiciens,
organisés autour de la mascotte au tambourin Joel
Gion dont l’endurance de l’avant bras est à reconnaître et saluer. S’ensuivent deux heures d’un concert
rigoureux où les morceaux s’enchainent -dans un
relatif brouhaha acoustique parfois, à distance d’un
public partagé entre la ferveur des fans et le retrait
mesuré des simples amateurs. Le jeu de scène,
réduit à sa plus simple expression, rappelle que les
musiciens du BJM ne sont là que pour jouer. Qu’on se
le dise ! Anton Newcombe, excentré et de profil, n’a
de regards que pour son groupe qui, lui, concède un
frontal stoïque à la fosse scandant compulsivement
le nom adulé du leader intouchable. À défaut d’un
«merci», il répond par le choix de ses morceaux,
anciens, populaires et attendus pour la plupart. Il n’en
reste pas moins que le concert alterne ambiances
planantes d’un rock psychédélique travaillé et élans
pop californiens sentant plus clairement le Frisco
originel. Le groupe terminera son concert comme un
devoir bien fait, sans un merci pour l’auditoire, lequel
aura su se contenter du cadeau de ces deux heures
rares. Demandait-on autre chose ?
PASCALE FRANCHI
La Fare en Feu !
En ce 29 avril au Dock des Sud, Renan Luce et Benoît Dans ce petit village provençal a eu lieu le 30 avril un concert
métal éclectique
Dorémus ont fait chanter Marseille
Ne lui dites plus que son style musical rappelle étrangement celui de Renaud,
Benoît Dorémus l’a trop entendu. À l’occasion de la sortie de son second album
en mai 2010 : 2020 (Capitol /EMI), le chanteur débarque fraîchement pour, en une
trentaine de concerts, assurer la première partie de Renan Luce. Autre jeune et
remarqué artiste français actuel, ses chansons sont néanmoins plus légères que
son compagnon de soirée. Au Dock ses textes s’enchaînent sur une musicalité
tantôt pop, tantôt plus douce, devant un parterre de fans avertis de tous âges, et
notamment de très jeunes auditeurs venus en nombre pour le très médiatisé
Renan Luce, mais tout heureux de découvrir cette très bonne première partie.
Benoît Dorémus enchante : Bilan carbone, T’as la loose ou encore Deux pieds
dedans racontent un peu l’histoire de chacun d’entre nous. Une guitare, une voix,
des questions plus ou moins graves sur fond de refrain joyeux : telle est la signature
du nouveau venu. Un album qui se laisse écouter, en attendant sa tournée (à lui tout
seul) qui débutera à l’automne 2010.
Pour la suite, je vous
laisse deviner l’aura que
dégage désormais l’artiste
phare de cette soirée et
la ferveur qui accompagne chacun des titres
du nouveau chanteur à la
mode, applaudi comme il
se doit par une foule
dense et bon enfant.
SONIA ISOLETTA
Renan Luce
© Jean-Baptiste Mondino
Avec une moyenne d’âge avoisinant les
quinze ans et les tee-shirts Spliknot ou
Linkin Park, la relève est là, nombreuse,
devant la Maison des Jeunes de La
Fare les Oliviers. Cloneshop et Jackface, qui avaient pour tâche de chauffer
la salle, ont rempli leur rôle, certes sans
réinventer le métal, mais correctement.
Le temps d’évacuer tout le monde,
d’aérer, et l’Esprit du Clan s’installe
pour une ambiance hard-core/metal,
avec un groupe réputé pour ses shows
très «in-your-face» et sa proximité avec
le public. Il manque un des chanteurs
ce soir, mais celui restant ne va pas
faire pâle figure, mêlant jeu de scène
hxc, discours très «unity-bon esprit» et
voix bien «tough». Côté musique ça
envoie, mélangeant le métal, le hxc et
quelques rythmiques hip-hop.
C’est enfin aux Black Bomb A de
lancer les hostilités et c’est pour eux
que la foule se masse et que les mains
se lèvent... et c’est parti pour une
heure de folie pure! Comme à leur
habitude, les BBA desservent un show
à l’énergie communicative qui sent la
sueur, le rock’n’roll, la bonne humeur
et le chaos. Le groupe alterne les tubes
du nouvel album et certains titres datant
de la première heure, sans oublier le
très apprécié Oh Marry que le public
entonne en chœur ! Même les meta-
Black Bomb A © Toon
leux old-school se laissent prendre par
la rafale BBA, se demandant encore
comment les chanteurs tiennent avec
une telle décharge d’énergie sans jamais faiblir vocalement ! C’est pro et
péchu, le duo de choc établit le contact
entre scène et fosse avec une facilité
déconcertante. Les musiciens ne sont
pas en retrait pour autant, alternant
avec autant de hargne que d’aisance
riffs bien lourds et moments plus
punk’n’roll et sautillants. Le set se
termine avec l’excellent Tales from the
Oldschool, et la fosse déchaînée
achève en ovations ce qui lui restait de
vertèbres et de voix.
HUDGARD
JAZZ
MUSIQUE
41
Be and Hard
Fabien Mary est un trompettiste
normand qui vient de fêter ses 32 ans.
Il est récompensé par un Django d’Or
Jeune Talent en 2003 et devient
Révélation instrumentale lors du
Festival de jazz à Juan-les-Pins en
2004. Depuis il vit et travaille à New
York… La formation pour ce concert
est le 4tet composé de Mourad
Benhammou à la batterie, Samuel
Hubert à la contrebasse et Hugo
Lippi à la guitare. Le rythme est
enlevé, à la façon des premiers
bopeurs, Charlie Parker ou Dizzy
Gillespie. Les longues phrases rapides
à la trompette sont ponctuées de
pauses attendues, pour laisser respirer
la musique, le souffleur, mais aussi le
public, sollicité à une écoute attentive.
La guitare inventive fait défiler de
puissance et finesse, encourageant
chaque musicien de petits cris,
imprimant une cohésion brillante et
une écoute manifeste. Kenny Dorham,
Benny Golson, Cole Porter, Thad Jones,
Oscar Pettiford sont magnifiés,
entièrement revisités mais avec une
adulation extrême. Alors be-bop, hardbop qu’importe ! C’est l’histoire du jazz
qui s’enrichit!
DAN WARZY
Fabien Mary © Armel Bour
constants changements harmoniques,
plaquant des accords à la clausule des
grilles. La contrebasse est précise,
véloce, explorant la totalité de sa
tessiture, tout en bas et tout en haut
du manche. La batterie est là, en
CD en 2003 Twilight / en 2005
Chess / Four and Four en 2008 Label Elabeth
www.elabeth.com
www.fabienmary.com
Ce concert a eu lieu au Cri du Port le
29 avril 2010
Entre deux mondes
Marjolaine Reymond est une chanteuse au
parcours musical complexe, passée par Berio, Kagel,
Stockhausen, Messiaen ou Cage. Sa musique est le
fruit de ce rapport entre le répertoire contemporain
et l’improvisation que permet le jazz. Des textes, en
anglais, sont dits ou chantés, poèmes d’Alfred Lord
Tennyson, Thomas Lodge ou Emily Dickinson. Deux
micros nourrissent le son, et elle s’est entourée pour
ce concert d’une section rythmique batterieMarjolaine Reymond © Gérard Tissier
contrebasse (Yann Joussein et Xuan
Lindenmeyer). Tous deux, très à l’écoute, savent
rester discrets au besoin lors de séquences vocales
improvisées allant de la transe hypnotique vers
d’autres climats très changeants, entre paroxysme
et apaisement. L’apport du vibraphone, ici instrument
central, joué par David Patrois, contribue à la
création d’atmosphères oniriques. Les titres des
pièces sont évocateurs : Les Cupidons Glacés, Vénus
Transfert, Carnaval des Elfes. Une soirée singulière
donc pour le public du Moulin à Jazz qui a fait
preuve, comme à son habitude, d’une grande qualité
d’écoute.
DAN WARZY
Circonvolutions de l’Ecuyère a eu lieu le 8 mai à
Vitrolles
CD’s : Chronos in USA Kapitaine Phoenix Collectif,
2008
Eternal Sequence, Kapitaine Phoenix Collectif, 2005
www.marjolainereymond.com
Ballade d’un exilé
Le Cri du Port donne décidément à entendre des
musiciens français qui sont partis à la Mecque du
jazz. Le quartet de Jérôme Sabbagh (saxophones
soprano et ténor) est assurément New-Yorkais et
composé de musiciens au beau pedigree. On
retrouve Joe Martin à la contrebasse, le même qui a
participé au dernier CD de Raphael Imbert NY
Project, Jochen Rueckert à la batterie et un
guitariste très recherché, Ben Monder. La musique
de Jerôme Sabbagh est originale, d’une profusion de
sources telles que la pop music, la musique araboandalouse, et aussi le jazz sous toutes ses formes.
Electric Song est une ballade à la couleur très rock,
guitare et saxophone saturés. L’univers improbable
et féerique de Contine donne l’impression de voir un
ogre géant qui se ballade dans une forêt sombre et
profonde (son de cathédrale du saxo, batterie frappée
avec de grosses boules et accords de guitare à
l’envers). Les lignes mélodiques sont simples et
riches à la fois. La liberté d’improvisation est
accordée à chacun des musiciens. Un bon concert
qui gagne en complicité. Les décalages horaires de
voyages transatlantiques doivent y être pour quelque
chose !
D.W.
Cds One Two-Three Bee Jazz 2008 /
Pogo-Bee Jazz-Sunnyside 2003 / North Fresh Sound
New Talent 2004.
Ce concert a eu lieu le 6 mai 2010
au Cri du Port à Marseille
Les elfes
aux bois
L’église de Simiane Collongue se bat pour
rassembler les fonds nécessaires à la réfection des
ses orgues. Le concert du 25 avril était donné dans
ce cadre généreux. Un ensemble remarquable par sa
composition proposait un florilège de suites
irlandaises, de tangos et de morceaux plus classiques
(Fauré, Bach, Satie). L’originalité de l’orchestre :
trente clarinettes… oui, trente ! Toutes les tailles de
cet instrument sont représentées. Le nom de cette
formation atypique, L’arbre D’ébène, reprend une
symbolique expliquée par la responsable du groupe,
les basses, comme les racines, l’harmonie pour le
tronc, les branches, en contre-chant, le feuillage, la
mélodie… Étrangement, le son perçu varie selon les
univers abordés, cornemuse, accordéon… Le
passage des tangos est particulièrement réussi,
saveur d’un bal populaire sous les voûtes sonores de
l’église qui a connu le rythme entraînant des suites
irlandaises. Le chef d’orchestre, Christian Richard,
dirige avec passion, rattrape les parties… On a le
plaisir de la découverte de ses propres compositions,
qui ont le charme de l’atmosphère de Michel
Legrand… Le Trio Zelf lui prête alors ses voix. Ce
groupe dynamique, composé de trois jeunes femmes,
interprète avec humour une série de chants, qui vont
du Poinçonneur des Lilas au Poulailler song, mettant
en valeur un joli tempo jazzy dans lequel les trois
complices excellent. Elles arrivent avec une
inébranlable bonne humeur à surmonter les
problèmes liés aux câbles et à l’espace qui brouille
les harmoniques. Une après-midi musicale bien
agréable, dont on retiendra l’enthousiasme et la
fraîcheur.
MARYVONNE COLOMBANI
42
MUSIQUE
AU PROGRAMME
AIX
Salle du Bois de l’Aune : Raoul Petite, Under Kontrol,
Subliminal Sanctuary, Stentor, Mushroom (22/5)
04 42 59 30 13
Pasino : Opérette Trabucco Il était une fois les comédies
musicales (30/5), Air (12/6)
04 42 59 69 00
www.casinoaix.com/fr
Théâtre et Chansons : Jean Vasca (29/5), Hombeline
(12 et 13/6)
04 42 27 37 39
www.theatre-et-chansons.com
ARLES
Cargo de Nuit : Poum Tchack (22/5), Féloche (28/5),
Hindi Zahra (5/6)
04 90 49 55 99
www.cargodenuit.com
AUBAGNE
L’Escale : Kabba Massa Gana (29/5)
04 42 18 17 17
www.mjcaubagne.fr
AVIGNON
CDC Les Hivernales : l’atelier des Hivernales chante
Nino Ferrer (25 au 29/5)
04 90 82 33 12
www.hivernales-avignon.com
Les Passagers du Zinc : Carte blanche à Dj Zebra
(21/5), Max Romero & The Charmax, Conquering Sound
(27/5), Soirée de soutien au label T-Rec avec Tue-Loup et
Redeye (28/5), Apéro concert Dub Welders (3/6), Behind
the illusions, Khat, Spëculons, Papaya Cake (4/6)
04 90 89 45 49
www.passagersduzinc.com
BERRE L’ÉTANG
Forum des jeunes et de la culture : Concert de
Batucada et de musiques brésiliennes, projet réalisé avec
les écoles de Berre l’Etang dans le cadre des itinéraires
musicaux (28/5 à la Salle polyvalente)
04 42 10 23 60
www.forumdeberre.com
HYÈRES
Théâtre Denis : Original Folks, Starboard Silent Side
(22/5), Antoine Hervé (12/6)
04 94 35 38 64
Mad Map
Le Nomad’Café propose des rendez-vous de qualité
dans son accueillante salle du boulevard de Briançon.
La chanteuse Madjo, dans un style folk chanson
française et a cappella est programmée le 21 mai à
20h30. Un véritable univers intimiste à découvrir et qui
sera précédé en première partie de Plume. Le 27 mai,
c’est Z.E.P, comprenez Zone d’Expression Populaire,
qui se fera entendre au Nomad dans le cadre du
Festival Artéfada, petite bombe artisanale prête à
exploser dans ce temps d’échange, de découverte et
d’expérimentation. La soirée se déroulera en deux
temps : 20h30 pour le micro ouvert «Viens Tchatcher»
animé par le Collectif des Pavillons Noirs et
l’1consolable pour se laisser ensuite entraîner à 22h
par Z.E.P, nouveau projet du M.A.P, Ministère des
Affaires Populaires ! F.I.
Nomad’Café
0491624977
www.lenomad.com
ISTRES
L’Usine : Finale Tremplin découverte 2010 (28/5)
04 42 56 02 21
www.scenesetcines.fr
MARSEILLE
Cabaret Aléatoire : Get the blessing, Minimal orchestra
(20/5), Breakbot, Boombass, Jackson (21/5), Red Bull
Manny Mania, Poni Hoax (22/5), Cocorosie (27/5), En
attendant les plages ( 28/5), Festival Geek & Music
(29/5), soirée now future (5/6), Raul Midon (7/6), Gizelle
Smith (10/6), Camo & Krooked, Disaszt, Body & Soul,
Gunston feat. Pulla, C.Kel & John E. Boy (11/6)
04 95 04 95 09
www.cabaret-aleatoire.com
Centre Edmond Fleg : Soirée de clôture de l’Espagne
des trois cultures avec un spectacle de contes judéoespagnol avec Djoha, voix parlée, voix chantée de Angèle
Perla Saül et Sylvie Cohen (27/5)
04 91 08 53 78
www.horizontesdelsur.fr
Cité de la musique : Pour un printemps avec N. Bauffe
et J. Raynaut (26/5 à l’auditorium), Quartier Sud (27/5 à
l’auditorium), Ensemble Dulcisona (28/5 à La Magalone)
04 91 39 28 28
pages.citemusique-marseille.com
El Ache de Cuba : Sandra Goboy (21/5), Va Fanculo
Night and day (22/5), Sylvie Paz et El Tchoune (28/5),
Kazou (29/5)
04 91 42 99 79
www.elachedecuba.com
Embobineuse : Melted Men, Baseck, Nomex, Dj Tronc
(21/5), Marvin, Slutspurt (25/5), Secret Chiefs 3, Fat 32,
Congo for Brums (28/5)
04 91 50 66 09
www.lembobineuse.biz
Espace Julien : Micky Green (20/5), Milow (21/5), La
finale Emerganza (22/5), Noa et Mira Awad (23/5),
Pierpoljak (26/5), Terez Montcalm (27/5), Emmanuelle
Seigner (4/6), Yvi Slan (4/6), Beenie Man & the Caution
band (15/6), Duval MC (16/6), Ed Mudshi (18/6)
04 91 24 34 10
www.espace-julien.com
L’Intermédiaire: Lady Palavas (20/5), Dj Kafra et guest
(21/5), Dj Phonic et guest (22/5), Synopsis (26/5), Drum
to Tek (28/5), Organik (29/5)
04 91 47 01 25
www.myspace.com/intermediaire
L’Affranchi : Casey (22/5), Les Solos de la Scred, Mysa,
Kalash (28/5), Ysaé (29/5), Soprano, la Swija, Carpe
Diem, Mino, Révolution Urbaine (4/6), Big Twins of
Infamous Mobb, Mr Bars, Sabotage 16’s, Just Music
(12/6)
www.l-affranchi.com
La Machine à Coudre : No-Guts-No-Glory, Lazy Bones,
Menpenti (21/5), Antonio Negro et ses invités (27/5),
Diego Pallavas, Koit Electric Nymphonic, ETC (28/5), Ich
bin dead, Keith Richards Overdose (29/5), Zodiac Killers
et guests (31/5), Bombardiers, Out of the order (5/6),
Jack Dope’n’noise, Gilbert et ses problèmes (12/6)
04 91 55 62 65
www.lamachineacoudre.com
La Mesón : Akosh S. & Gildas Etevenard (21 et 22/5),
Ahamada Smis (3/6), Tablao Flamenco Ana Vidal et Laura
Dubroca (5/6), Harragas (6/6), Terca-Feira Trio (12/6)
04 91 50 11 61
www.lameson.com
Leda Atomica Musique : Ciné Concert Nosferatu, eine
Symphonie des Graens (4/6 au Musée du Terroir
marseillais, à Château Gombert))
Réservations au musée provençal
au 04 91 68 14 38
www.musee-provencal.fr
Le Paradox : Fat Freddo & Teddy Flint (21/5), La Cumbia
(22/5), Dj Djel aka Diamond Cutter (23/5), The Glasses
(25/5), Beatbox free session 4 (26/5), Jigsaw tribute to
Marillion (27/5), Katalaï (28/5), Djezziré (1er/6),
Marabout Fonk System (5/6)
04 91 63 14 65
www.leparadox.fr
SALON-DE-PROVENCE
Portail Coucou : The Host, Rescue Rangers (21/5)
04 90 56 27 99
www.portail-coucou.com
AGENDJAZZ
ARLES
Chapelle du Méjan
18 au 22/5 15e Edition de Jazz in Arles
04 90 49 56 78 - www.lemejan.com
HYÈRES
Jazz à Porquerolles, Théâtre Denis
12/6 Antoine Hervé, Leçon de Jazz n°4 (Keith
Jarrett)
06 31 79 81 90 - www.jazzaporquerolles.org
MARSEILLE
Cri du Port
20/5 Christian Brazier 4tet
04 91 50 51 41 - www.criduport.fr
Cité de la Musique, L’Auditorium
27/5 Quartier Sud
7/6 Samenakoa fanfare
14/6 Jazz made’n Cité (concert des profs)
Cité de la Musique, La Cave
31/5 Jazz en Scène (Jam Session)
7/6 Pierre Fenichel 4tet
04 91 39 28 28 http://pages.citemusique-marseille.com
La Mesòn 52, rue Consolat 13001
21 et 22/5 Akosh S et Gildas Etevenard (Ethno-jazz)
3/6 Ahamada Smis Trio à20h
5/6 Tablao Flamenco Ana Vidal & Laura Dubroca
12/6 Terca Feira Trio (Choro-Jazz Brésil)
19/6 La Mal Coiffée & Hos Ayas (OccitanieMongolie)
04 91 50 11 61 - www.lameson.com
Théâtre Toursky
29/5 Patshiv (Fanfare Vagabontu & Taraf Traio
Romano) Bal Tzigane
0820 300 033 - www.toursky.org
Jazz Club Music’Cale, l’Inga de Riaux
21/5 Camion-Pizza 4tet
27/5 Serge Dupire trio
28/5 Jean Charles Parisi trio
4/6 Thierry Maucci
11/6 Alert’O’Jazz
18/6 Faroa
06 07 57 55 58 - www.inga-des-riaux.fr
VITROLLES
Moulin à Jazz
23/5 Christophe Marguet 4tet
21/6 Fête de la Musique dès 20h Les durs à cuivre
& Docteur Lester Brass Band
04 42 79 63 60 - www.charliefree.com
SALON
IMFP 95
18/5 Mario Canonge et Michel Zenino
20/5 Douce France invite Olivier Ker Ourio
25/5 Didier Del Aguilla Alain Richou Quartessence
feat Domingo Patricio
1/6 Pierre Camas 4tet
15/6 L’IMFP fête son quartier - Entrée gratuite
04 90 53 12 52 - www.imfp.fr
MUSIQUE
43
C.N.I.P.A.L.
Le plus bôô…
Diva
Derniers récitals du Centre National d’Insertion
Professionnelle d’Artistes Lyriques. De jeunes
voix de demain à suivre !
Immuable Vincent Scotto pour une opérette locale
chérie sous nos tropiques (parfois tristes…) ! Un de la
Canebière est mis en scène par Jacques Duparc
avec une distribution foisonnante dirigée par Didier
Benetti.
La formidable mezzo soprano Béatrice Uria-Monzon est accompagnée au piano par Jean-Marc
Bouget dans un programme alliant Bellini, Pergolèse,
Falla…
MARSEILLE. Les 20 et 21 mai à 17h15
04 91 18 53 18
TOULON. Le 27 mai à 19h - 04 94 92 70 78
AVIGNON. Le 29 mai à 20h30 - 04 90 82 81 40
En bateau
Croisière musicale en Méditerranée initiée par le
violoncelliste Dominique de Williencourt avec
Roger Muraro, Caroline Sageman, Emmanuel
Rossfelder, l’Orchestre Santa Cecilia dirigé par
Georges Prêtre… Eve Ruggieri et Olivier
Bellamy… Du beau monde !
BARCELONE, MALTE, TUNIS, ROME…
du 24 au 31 mai
01 44 50 58 58 www.europe-art.com
AVIGNON. Le 29 mai à 20h30
et le 30 mai à 14h30
Opéra Théâtre 04 90 82 81 40 - www.avignon.fr
Baroque
L’ensemble vocal Opus 13 et l’Orchestre de
Chambre de Toulon et du Var annoncent un
concert de musique baroque, la Missa Votiva de
Zelenka et l’Ode pour l’anniversaire de la Reine
Anne de Haendel.
AIX. Le 30 mai à 18h Chapelle du Sacré-Cœur
le 5 juin à 21h à l’Eglise du Saint-Esprit
04 42 28 62 95
Installation
Rossini et tournedos
Dans le cadre de l’Odyssée de Martigues, Champ
harmonique est installé sur le littoral (site des Laurons)
sur 1000 m2. Une symphonie de Pierre Sauvageot
pour auditeurs-marcheurs et 500 instruments
étonnants : tambours vibreurs, moulins-glockenspiels,
sifflets-bambous, hélices-sirènes, boîtes à musique
giratoires, épouvantails balinais, tepees chromatiques, graals pentatoniques, arcs sonores, arbres à
flûtes, zoophones, cannes à pêche à la crotale…
Lucile Pessey (soprano) et Amandine Habib (piano)
concoctent un menu «Pour oreilles et papilles» autour
d’opus de Rossini, musicien et éminent gastronome,
«célébrant les petits pois, les noisettes, les hachis ou
les hors- d’œuvre»…
MARTIGUES. Du 26 mai au 6 juin
04 42 44 32 26 www.odyssee-martigues.org
Restauration
Daniel Roth organiste à Saint-Sulpice joue sur l’instrument de 1847 nouvellement restauré de l’église
Notre-Dame du Mont.
MARSEILLE. Le 27 mai à 18h30
Dernière
Le spectacle burlesque à la gloire des musiques du
monde de l’ensemble de percussions Symblêma
(dir.Frédéric Daumas) achève, pour cette saison,
son voyage régional...
CABRIÈS. Le 28 mai à 20h30 Salle la Bergerie
de Trébillane.
Tout public - Entrée libre : réservation conseillée
au 06 09 89 50 36
04 86 31 62 73 - www.symblema.com
Nouvel orgue
Christophe Guida (titulaire à la tribune du Sacré
Cœur à Marseille) donne un récital dans le cadre de
l’inauguration du nouvel orgue de l’église Saint-Antoine
de Padoue.
CUGES-LES-PINS. Le 29 mai (inauguration
à 18h et récital à 20h)
Trompette et orgue
Le trompettiste Gérard Occello est accompagné
par Chantal de Zeeuw dans Bach, Vierne…
MARSEILLE. Le 29 mai à 20h30
Eglise Notre-Dame du Mont
Espace Culture 04 96 11 04 61 (Marseille Concerts)
MARSEILLE. Le 5 juin à 19h Station Alexandre
04 91 00 90 00 - www.station-alexandre.org
Piano et chant
Le pianiste François-Frédéric Guy et la mezzosoprano Sophie Koch interprètent des airs de Thomas,
Donizetti, Berlioz (Nuits d’été, Damnation, Les Troyens)
Massenet (Werther)…
AVIGNON. Le 8 juin à 20h30
Opéra Théâtre 04 90 82 81 40 – www.avignon.fr
Intégrale Beethoven
David Galoustov (violon) et Caroline Sageman
(piano) achèvent leur cycle d’enregistrements en public
(pour le label Lyrinx) de l’intégrale des Sonates pour violon et piano (n° 7 8 & 10) de Beethoven sur le Vieux-Port.
MARSEILLE. Le 8 juin à 19h. Théâtre de la Criée
04 91 54 70 54 - www.theatre-lacriee.com
Cours d’Espagne
Luis Fernando Perez et Jean-François Heisser
(pianos) en compagnie du Quatuor Arriaga interprètent de la musique espagnole de Granados, De
Falla, Albéniz Turina et Mompou. Concerts à 19h aux
Jardins de l’Hôtel Imperator et à 21h dans le Cour de
l’Hôtel Boudon
NÎMES. 4e édition de Musique sur cour
les 8 et 9 juin à 19h et 21h et le 10 juin à 21h
04 66 36 65 10 - www.theatredenimes.com
Violon tsar
Le grand violoniste russe Vadim Repin interprète le
2e concerto de Prokofiev en compagnie de l’Orchestre Lyrique de Région Avignon Provence qui joue
également la 1ère symphonie de Nielsen et un Adagio
pour cordes de Tanguy.
AVIGNON. Le 11 juin à 20h30
Opéra Théâtre 04 90 82 81 40 - www.avignon.fr
MARSEILLE. Le 16 juin à 20h30
au Théâtre du Gymnase
0 820 000 422 (Marseille Concerts)
Électro-comique
Lucie Prod’homme est ses Acousmonautes
présentent un concert commenté de musique de
chambre électronique. L’humour du son : une
pléiade d’opus désopilants !
MARSEILLE. Le 18 juin à 18h30 – Urban Gallery
04 91 37 52 93
Choristes
Les Petits Chanteurs de la Major accueillent leurs
homologues de Saint Marc qui, il y a quelques
années, ont gravé la B.O. du film Les Choristes (dir.
Nicolas Porte et Rémy Littolff).
MARSEILLE. Le 20 juin à 16h30
Eglise Saint-Laurent
Entrée libre 06 27 03 78 34 www.pch-major.fr
Cocktail lyrique
Après Bizet était une femme, Jonathan Soucasse
(piano) et Cathy Heiting (diva) livrent leur deuxième
opus «lyrico-déjanté» mis en scène par André Lévèque. Opéra Molotov mêle Puccini aux ballades de
jazz ou à la variété décalée. Explosif !
PERTUIS. Le 21 mai à 20h30
04 90 79 56 37 www.theatre-pertuis.com
J’ay pris amour
Voyage dans l’Europe baroque avec l’Ensemble Dulcinosa : Anne Périssé (soprano) et Jean-Paul
Juchem (baryton) et au continuo Anne Garance et
Isabelle Chevalier.
MARSEILLE. Le 28 mai à 20h30 Villa Magalone
04 91 39 28 28
http://pages.citemusique-marseille.com
LES PENNES-MIRABEAU. Le 12 juin à 20h30
Eglise St Blaise
04 42 02 51 51
Blanc Cassis
Festival Le verre musical au Clos d’Albizzi : l’ensemble Mescolanza joue des musiques médiévales
(le 23 mai à 18h30) et Jaroslaw Adamus (violon
baroque) et Jean Paul Serra (claviers) nous font
remonter Aux origines du violon (le 29 mai à 18h30).
CASSIS. Clos d’Albizzi - Ferme Saint-Vincent
06 60 56 44 21 www.organo-forte.fr
Orgue et Orchestre
Vivaldi, Bach, Paganini avec le quatuor Opus 16,
Georges Minassian (flûte), Alex Boghossian
(guitare) et Thomas Girard aux tuyaux.
MARSEILLE. Le 13 juin à 17h
Eglise de Montolivet (Entrée libre)
04 91 87 09 65 http://orguemontolivet.free.fr
44
MUSIQUE
AU PROGRAMME
Miroirs du temps présent
Raoul Lay et l’Ensemble Télémaque
mettent en regard deux œuvres. L’une
est magistrale : un monument de la musique de chambre du XXe siècle ! Le
Quatuor pour la fin du temps de Messiaen
fut écrit pour clarinette (Linda Amrani), piano (Hubert Reynouard), violon
(Yann Le Roux-Sèdes) et violoncelle
(Guillaume Rabier) alors que le musicien était prisonnier au Stalag VIII-A de
Görlitz en 1941 (voir p.48). Son langage
regorge d’expression lyrique, de puissance mystique, puise son inspiration
dans l’Apocalypse de Saint Jean : c’est une
sorte d’allégorie sonore du combat de
l’Esprit contre la matérialité du Présent.
L’autre opus, Preludium, Postludium and
Psalm (2007) de la compositrice hollandaise Hanna Kulenty est quasiment
inconnu sous nos latitudes. L’accordéoniste Jean-Marc Fabiano et le
violoncelliste Guillaume Rabier en
assurent sa «Première française». Une
œuvre qui questionne, comme chez
Messiaen, les notions de couleur et de
fusion des timbres instrumentaux.
MARSEILLE. Le 29 mai à 19h30
au Théâtre des Bernardines
04 91 24 30 40 - www.theatrebernardines.org
En fin de Contes Mai baroque
MARSEILLE. Antti Puuhaara
le 11 juin à 19h
aux ABD Gaston Deferre
04 91 00 91 31 - ww.musicatreize.org
Orphée
en juin
Le Chœur de Dames chante Charpentier & Port Royal (le 26 mai à 20h30
à Marseille – Eglise St-Laurent). Le Chœur
mixte trace un tableau de L’esprit français, du Moyen-âge à nos jours (le 28
mai à 20h30 à Aix – Église du St Esprit
et le 1er juin à 20h30 à Marseille – Eglise
St-Laurent). L’ensemble instrumental
Le contre-ténor Alain Aubin est accompagné par Jean-Paul Serra au pianoforte
dans des Lieder de Mozart et des Romances inédites d’un compositeur métis,
contemporain de «Wolfi», maniant aussi bien le violon que l’épée : le Chevalier de
Saint-Georges est le fils d’une esclave et d’un noble, qui l’a élevé dans l’esprit
des Lumières. Un concert-lecture intitulé Amadeus & le Don Juan noir à
découvrir, d’autant que la plupart des partitions sont inédites !
J.F.
MARSEILLE. Le 4 juin à 20h30 à la Villa Magalone
ARLES. Le 5 juin à 20h30 au Temple Réformé
09 51 16 69 59 - www.baroquesgraffiti.com
JACQUES FRESCHEL
Ensemble Télémaque © Agnes Mellon
Le dernier Conte du cycle initié par
Roland Hayrabedian (voir p.37) pourra être entendu en juin dans sa version
musicale. «Antti Puuhaara est un mélange de cycle choral et de mélodrame
inspiré d’une légende finlandaise» écrit
le compositeur finnois Tapio Tuomela,
qui cosigne aussi le livret avec Erik
Söderblom. Un «univers magique où
se mêlent géants, devins, fille-oiseau et
sorcière» sur un mythe héroïque et une
musique interprétée par l’ensemble
Musicatreize, à découvrir avant la
création scénique qui sera imaginée
par Aurélie Hubeau et Damien Caille
Perret en novembre 2010 au Théâtre
du Gymnase… J.F.
Fleurons et fleuret
Dernier volet du Mai en musique à
Lenche avec l’ensemble BaroquesGraffiti (dir. Jean-Paul Serra) : après
des transcriptions autour de thèmes
communs à Zoroastre de Rameau et La
Flûte Enchantée de Mozart (le 21 mai à
20h30), des opus pour viole de gambe
de Marin Marais (le 22 mai à minuit)…
On assiste à des représentations «miniatures» de la tragédie-lyrique Zoroastre
mise en scène par Renaud Marie Leblanc avec fresque et projections (les
26 et 27 mai à 19h et le 28 mai à 20h30).
Un mois baroque qui s’achève par un
récital de flûte à bec par Marine Sablonnière dans C.P.E. Bach (le 29 mai à
minuit : c’est pas du pipeau !) .J.F.
MARSEILLE. Mai en Musique
au Théâtre de Lenche jusqu’au 29 mai
04 91 91 52 22 www.theatredelenche.info
joue un florilège de la Provence baroque (le 3 juin à 20h30 – Chapelle de La
Baume-les-Aix) et l’ensemble vocal Lucien
Bass met en regard Josquin des Prez &
le XXe siècle (le 17 juin à 20h30 à Aix –
Oblats).J.F.
Les Festes d’Orphée
04 42 99 37 11 - www.orphee.org
La Ciofi dans Ophélie
On sait combien Shakespeare a constitué un modèle pour les romantiques.
Ambroise Thomas (1811-1896) est un
musicien français qui a marqué la production lyrique au XIXe siècle. Il est hélas
aujourd’hui un peu délaissé, même en
ses propres terres… comme tant d’autres
des ses pairs : Adam, Auber... Ce compositeur a trouvé dans Hamlet une source
d’inspiration qui a définitivement scellé
sa notoriété internationale (après Mignon,
son second chef-d’œuvre).
L’Opéra de Marseille a la bonne idée
de produire ce bijou lyrique en faisant
appel à l’équipe qui fut saluée dans
Maria Golovine en 2006. C’est Vincent
Boussard qui met en scène le drame
nordique «pris dans les canons du siècle
romantique» ; les décors sont signés
par Vincent Lemaire, les costumes
de la main de Katia Dufflot, le tout
éclairé par Guido Levi.
Tête d’affiche internationale, se produisant sur les plateaux les plus prestigieux,
c’est la soprano Patrizia Ciofi qui
interprète, pour la première fois de sa
carrière, le rôle aérien d’Ophélie. Elle
est entourée d’une distribution royale
emmenée par la mezzo Marie-Ange
Todorovitch (Gertrude) ou le baryton
Franco Pomponi invité pour le rôletitre. L’Orchestre et les Chœurs de
l’Opérasont dirigés par Nader Abbassi.
J.F.
MARSEILLE. Hamlet
du 26 mai au 6 juin
à l’Opéra
04 91 55 11 10 http://opera.marseille.fr
Passions sacrées
Le Festival de Musique Sacrée se
poursuit à St-Michel avec les Corses
d’A Filetta. L’éminent groupe polyphonique emmené par Jean-Claude
Acquaviva imagine un programme
construit autour de la Passion du Christ
et plus généralement de l’idée de la
mort. Des chants sacrés issus de la
tradition orale ou des créations originales
fondent une sorte de liturgie originale
(Passione le 21 mai à 20h30).
La manifestation s’achève avec le Nisi
Dominus, le Laudate pueri de Vivaldi et
le douloureux Stabat mater de Pergolèse, expression baroque de la douleur
de la Mère au pied de la Croix chantée
par les voix entremêlées de Pascale
Beaudin (soprano) et Marie-Ange
Todorovitch (mezzo). L’Orchestre
Régional de Cannes PACA est placé
sous la direction de Philippe Bender
(le 28 mai à 20h30).
Sans oublier Les plus beaux Airs
Sacrés à l’église des Olives le 21 mai
à 16h et à la Basilique du Sacré-Cœur
le 26 mai à 20h30 par les élèves du
Conservatoire Pierre Barbizet.
J.F.
MARSEILLE. 15e Festival de Musique
Sacrée jusqu’au 28 mai
04 91 55 11 10 - www.marseille.fr
A Filetta © Boccalini
Chapelle du Méjan invite un pianiste
puissant et virtuose. Zhong Xu joue
des extraits des Années de pèlerinage
(Italie : Sonetti del Petrarca etSuisse:Vallée
d’Obermann) de Liszt, la Sonate n°3
op.58 en si mineur de Chopin et la
Sonate n°28 op.101 de Beethoven (le
4 juin à 20h30). Deux jours après, en
matinée, on entend Stéphanie-Marie
Degand (violon), Miguel Da Silva
(alto) et Henri Demarquette (violoncelle) dans le Divertimento en mi bémol
majeur K.563, avant que le pianiste
chinois les rejoigne pour le Quatuor en
mi bémol majeur op.47 de Schumann.
(le 6 juin à 11h).
J.F
ARLES. Chapelle du Méjan
04 90 49 56 78 - www.lemejan.com
H. Demarquette © Eric Larrayadieu
Mandarin
merveilleux
Pour ses deux derniers rendez-vous, la
An
die Musik
Klaus Weise est un grand chef, spécialiste en particulier de la musique allemande. Gageons qu’il insufflera à l’Orchestre Philharmonique de Marseille,
une flamme passionnée vitale dans les fameux Prélude et Mort d’Isolde (Tristan und
Isolde), l’Ouverture et Bacchanale (Tannhäuser) de Richard Wagner et la Symphonie
alpestre, op.64 de Richard Strauss.
J.F.
MARSEILLE. Le 12 juin à 20h à l’Opéra
04 91 55 11 10 - www.marseille.fr
Père
& fille
Si Bernard Foccroulle dirige depuis 2006 le festival d’Art Lyrique d’Aix-enProvence, on n’oublie pas qu’il est (avant tout ?) un éminent organiste ayant
enregistré, entre autres, l’intégrale de l’œuvre pour orgue (chez Ricercar) de JeanSébastien Bach sur des
B. Foccroulle © Johan Jacobs
instruments historiques.
Visiblement, le musicien a
eu quelques tuyaux au
pays de Cézanne, puisque
c’est à la tribune de SaintJean de Malte qu’il mêle
les jeux du buffet de l’orgue
au coffre de sa soprano
de fille Alice qui émerveille dans Schütz, Buxtehude,
Purcell… et Bach (le 26 mai
à 20h30).
Le dernier récital de la saison des Concerts d’Aix
réunit deux jeunes pianistes : l’aixoise Célimène
Daudet et Emmanuel
Despax autour d’un programme Chopin (le 6 juin
à 20h30 dans la Cour de
l’Hôtel de Ville).
J.F.
AIX. Concerts d’Aix
04 42 63 11 78 www.concertsdaix.com
CAHIER JEUNESSE MARTIGUES | DRAGUIGNAN
Martigues sur tous les fronts
biodiversité en Méditerranée, programme donc une conférence (Tortues,
requins et cétacés… pouvons-nous les
protéger ?), une table ronde sur Les
espèces migratoires face aux embûches
qui jalonnent leur voyage et une expo
du CESTmed d’une dizaine de panneaux traitant des tortues marines,
ainsi que deux spectacles événements.
Champ Harmonique et L’Odyssée de
Bigsi, spectacle déambulatoire du plasticien scénariste Thierry Pierras sur la
tortue Caouanne, espèce migratoire
protégée en Méditerranée, créé à la
demande de l’association pour l’Animation des maisons de quartiers de
Martigues. Bigsi, immense automate de
10 mètres de long devrait faire sensation lors du défilé avenue Louis Samut
phié… À voir et à réentendre, quand
le jour se lève, en plein soleil, quand la
nuit apaise les derniers souffles de la
mer : au festival d’Oerol plus de 10000
visiteurs n’en sont pas revenus. Ou
plutôt : y sont revenus souvent !
DO.M. ET A.F.
L’Odyssée de Martigues
Champ Harmonique
du 26 mai au 6 juin
04 42 44 32 26
www.odyssee-martigues.org
Faire chanter le vent
Durant toute la durée de l’Odyssée
Pierre Sauvageot, compositeur lunaire
et néanmoins directeur inspiré de
Lieux Publics, installe 500 éoliennes
sonores sur la longue bande de terre
de la Pointe de Bonnieu - après le
pont, tout juste entre l’Étang, le ciel et
la mer. Un endroit où les vents
s’emmêlent souvent les pinceaux.
L’idée : faire entendre les sons produits
par ces souffles dans des instruments
construits tout exprès, depuis le
moulin à deux, trois ou cinq tons, jusqu’aux épouvantails balinais, en passant
par des hélices, des sirènes, des gongs,
des arbres à flûtes… Tout y est prévu,
composé aléatoirement mais pas par
hasard : selon la force et la direction
des vents les percussions, accordées
ou non, déclinent leurs modalités. Les
éoliennes sont aussi sublimes, belles de
leur ferraille et de leur artisanat, et le
parcours est soigneusement chorégra-
Chant harmonique «work in progress» Perschelling’s Oerol Festival (NL) juin 2009 © F. Broyelle
Bigsi © X-D.R
Exit l’Odyssée des lecteurs, biennale
consacrée aux livres et aux auteurs !
Mais bienvenue à une plus vaste
Odyssée : la manifestation martégale
s’ouvre plus largement sur le métissage
culturel, la biodiversité et l’environnement et dure plus longtemps, tout
en investissant pleinement la ville et ses
alentours. L’Odyssée, dont le concept
originel est de «construire avec et pour
le plus grand nombre des parcours, des
espaces culturels et artistiques pluridisciplinaires» prend place dans le cadre
de Marseille capitale européenne de la
culture 2013 autour de deux axes
forts : «Martigues, la Méditerranée, le
monde» et «Babel Martigues, ailleurs
comme ici». La manifestation, engagée
entre autres dans la sauvegarde de la
le 29 mai à 21h. En clôture, le 5 juin à 21h
à la Halle, le spectacle Punjabcaravan :
c’est le fruit d’un travail qui mêle
musique et danse, mené conjointement par Eric Fernandez, Souad Massi,
Dj Ravin et les musiciens et danseurs
du conservatoire, les associations
culturelles de danse et de musique de
la MJC. Ce n’est pas tout puisque la
quinzaine sera émaillée, dans divers
lieux de la ville, de récits de voyages, de
projections, de débats, d’un parcours
urbain sur l’immigration et le refuge, de
contes…
ça bourdonne !
Un p’tit porté, Cie Prise de pied © X-D.R
Théâtres en Dracénie essaime ses Petites formes de
cirque depuis Draguignan jusqu’au Muy, Ampus et
Trans-en-Provence (10, 11, 12 juin). Pas un espace
public n’échappera à la déferlante ! Places et parkings,
jardins et boulodromes sont «réquisitionnés» pour
accueillir Prise de Pied, Dare d’Art, L’Aimant et Begat
Theater, quatre compagnies et autant de visages de
la création circassienne actuelle. Il faudra bien trois
jours pour découvrir les acrobaties de la Cie Prise de
Pied qui, dans Un p’tit porté, explore les émotions de
jeunes parents, de la naissance de leur enfant jusqu’à
ses premiers pas. Poétiques en diable, Saïlen Rose et
Benoît Heliot ont l’art de danser avec un parapluie et
un accordéon, et même un landau… Le duo
d’acrobates Gréta et Gudulf qui marie l’humour et
la voltige aérienne avec un sacré sens du rythme, de
la répartie et de l’apesanteur ! Il faut avoir le cœur
bien accroché… Antoine Le Menestrel (Cie Lézards
bleus) qui n’a rien trouvé de mieux que la danse
escalade pour conquérir le cœur de sa belle : alors
quand Folambule-Roméo cherche sa Juliette aux
balcons des façades, sachons garder les pieds sur
terre. Quant au Begat Theater, le spectateur devra
pénétrer, seul, dans sa boîte à histoires où l’attendent
Les Demeurées : la Varienne, l’idiote du village, celle
qui perçoit la vie autrement, sa fille Luce et
l’institutrice, Mlle Solange… Ah, la, la, quelle
expérience : intime, déroutante, sonore et imagée !
Attention, décollage imminent…
M.G.-G.
Petites formes de cirque
du 10 au 12 juin
Théâtres en Dracénie, Draguignan
04 94 50 59 50
www.theatresendracenie.com
AUBAGNE | VITROLLES ÉVÉNEMENTS
47
Quand la rue s’enflamme
Cie Carabosse Chez Cocotte © Sylvie Monnier
Le rendez-vous traditionnel des arts
de la rue aubagnais Chaud Dehors
s’annonce aérien, clownesque, enflammé… et transformera, durant deux jours,
le centre-ville d’Aubagne. Ouverture
des festivités le 4 juin avec le Filoscope
des frèresThonessen de la cie Carabosse
(visi-ble le lendemain également),un «manège» aérien sur lequel les 3 zigotos
accrochent de fabuleux tableaux
animés, véritables pépites poétiques qui
forment un journal intime pour le moins
original… Une autre de leurs fantaisies,
un peu plus tard dans la soirée, devrait
réjouir petits et grands : Chez Cocotte
est une machine, un théâtre à vapeur
et soupapes sorti tout droit de l’imagination de Cocotte, vrai-faux cheminot
retraité… Et pour clore cette première salve, les clowns de La Industrial
Teatrera sèmeront leur optimisme, le
nez Rouge de l’amour remplaçant progressivement le nez bleu du désastre
dans un spectacle inspiré d’un poème
de Palau I Fabre. Le lendemain dès 18h
sur le cours Foch, entraîné par Roger
le Montreur, le public s’initiera à la
danse avant de participer au Ballet du
Montreur, poétique et festif. Plus intimiste, mais tout aussi poétique, We
meet in Paradise de la cie Théâtre
Fragile, fable humaniste et touchante
sur l’asile, le déracinement, l’accueil…
En fin de soirée la cie Entre Terre et Ciel
proposera un voyage envoûtant au
pays du feu et de la danse avec Neige
de feu, spectacle étonnant créé et joué
par Lara Castiglioni.
Rendez-vous Chaud Dehors
les 4 et 5 juin
Centre-Ville
Théâtre le Comœdia, Aubagne
04 42 18 19 88
www.aubagne.com
La fête des
pitchouns
Dans le parc du domaine de Fontblanche à Vitrolles, Festi’Pitchou propose
aux enfants et aux familles des moments
conviviaux (goûter collectif), ludiques
(manèges à pédales) et artistiques
(fanfare Samodiva et théâtre de marionnettes).Au programme : Latypique
compagnie et sa célèbre Mémère !
dans sa caravane pliante, Kartoffeln
avec Mon ange gardien, le Théâtre
Chignolo qui perpétue la tradition du
Guignol lyonnais dans Le déménagement fantastique et Fluide corporation
qui offre aux tout-petits dès 18 mois
un Blou Baladou tout doux…
Festi’Pitchou
mercredi 9 juin à partir de 14h
Domaine de Fontblanche, Vitrolles
04 42 02 46 50
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ÉDUCATION TÉLÉMAQUE EN COLLÈGE | COMPAGNIE SKAPPA
Zone sensible : la qualité comme exigence
Telemaque © Yves Berge
Dans le cadre des actions initiées par le Conseil
général envers les collégiens, l’Ensemble Télémaque
a proposé une lecture du Quatuor pour la fin du
temps d’Olivier Messiaen à des élèves de 3e du
collège Vieux Port. Comment des élèves en Zone
d’Éducation Prioritaire allaient-ils entrer dans cette
œuvre difficile ? Le professeur d’éducation musicale,
Anne Ligonnière, avait remarquablement préparé ses
classes pour une écoute et une participation parfaites.
1941 : quatre musiciens, prisonniers dans un stalag,
créent avec des instruments médiocres et la
complaisance d’officiers mélomanes, ce quatuor..
C’est tout l’art de Raoul Lay, chef de Télémaque, de
captiver l’auditoire, entre récit, interprétation et
analyse. Il énonce les quatre facettes du style
Messiaen : doctrine catholique, rythme, son-couleur,
chant des oiseaux. Les musiciens sont de merveilleux
complices de ce jeu permanent entre l’art et la
pédagogie souriante. Hubert Reynouard, piano, nous
envoûte par sa générosité, dans les passages lyriques
fortissimo et une sensibilité à fleur de peau dans des
pianissimi suspendus (Vocalise pour l’ange qui annonce
la fin du temps). Le violoncelliste Guillaume Rabier
explique les sons harmoniques, effleure les cordes,
les fond en de grands glissandi (Fouillis d’arc-en ciel,
pour l’Ange qui annonce la fin du temps). Épreuve du
souffle, temps suspendu : Abîme des oiseaux à la
clarinette solo de Linda Amrani, très expressive,
Nature vivante
Nouvelle action éducative du Conseil
général 13, à destination des plus
jeunes des collégiens, et d’un grand
raffinement : la compagnie Skappa a
présenté une installation IN 1 et un
spectacle sur le thème de la nature
autonome, résistante au béton,
créatrice de poésie et de voyages.
L’installation visible ce jour-là au collège
Longchamp par une classe de 6e est
celle des bottes. Le dispositif en est
simple : deux bottes de jardin sont
posées au sommet de trois petites
marches de bois et une dizaine de
évoque la terre (longues tenues) et les oiseaux (traits
virtuoses). Louange à l’éternité de Jésus est un voyage
du pianissimo au fortissimo, et le violoncelle signe un
legato pour la fin des temps ! L’énorme unisson
Danse de la fureur, pour les sept trompettes, est
saisissant. Le chef demande aux élèves de reproduire
un rythme : très concentrés, ils comprennent mieux
à la deuxième écoute. Puis le débat s’installe : pourquoi
le choix de cette œuvre ? Combien d’heures de travail
sont nécessaires pour monter ce quatuor ? La Louange
à l’immortalité de Jésus pour violon et piano est un
lent abandon, extatique, magnifié par les deux artistes,
accords au piano accompagnant l’élévation finale du
violon de Yann Le Roux-Sèdes, élégiaque et
mélancolique.
Quatre musiciens exceptionnels, un chef conteur et
musicien, ont conquis des adolescents attentifs et
admiratifs. Élever l’écoute en défendant des choix
difficiles est tout à l’honneur de l’Ensemble
Télémaque qui poursuit son travail de recherche et
de création, sans le distinguer de la diffusion et de la
démocratisation. Puisse cette séance annoncer
d’autres vibrations pour ces collégiens !
YVES BERGÉ
Cette séance pédagogique a eu lieu au collège du
Vieux Port (Marseille), de Saint-Chamas et de Berre
L’étang du 27 au 30 avril
À noter : Le Quatuor pour la fin des temps sera joué
aux Bernardines le 29 mai (voir p 44)
www.ensemble-telemaque.com
au technicien et l’on rentre dans le
spectacle sans s’en apercevoir. Elle lui
demande de régler la lumière, puis elle
dessine une fenêtre sur le mur tendu
de papier. L’image d’un arbre qui agite
ses feuilles est alors projetée. Le doigt
de la comédienne se déplace sur le
mur et un rayon de lumière le suit
créant l’illusion que la lumière vient de
son doigt. C’est une leçon de
«rajdinage» qui commence, terre et
boutures sur fond de musique jazzy. Le
personnage dessine de plus en plus
fébrilement, les lignes se croisent, les
spectateurs s’assoient en demi-cercle
en face. Une bande-son s’élève tandis
que la lumière baisse, les yeux
s’habituent à la pénombre et - l’on
croit rêver - quelque chose se met à
sortir très doucement des bottes, des
ombres se projettent sur le mur. Peu à
peu on voit que ce sont des fleurs qui
grandissent et s’épanouissent, puis
regagnent l’intérieur des bottes. Fin de
cet instant magique. Certains enfants
ont senti le parfum des fleurs !
IN 2 a lieu dans la salle d’arts plastiques.
Au début Isabelle Hervouët s’adresse
taches de couleur s’étalent, les papiers
se déchirent ou se superposent. Un
jardinier, maître du monde végétal,
occupe tout le mur. Le dessin se
mélange aux graphismes projetés.
Chants d’oiseaux, bruits légers de l’eau
qui goutte, histoire du temps qui passe
et du temps que l‘on compte.
CHRIS BOURGUE
IN 1 et IN 2 sont joués jusqu’au 21 mai
dans les collèges Longchamp, Pont de
Vivaux et Romain Rolland (Marseille)
In 2 , Skappa ! © Christophe Loiseau
PRINTEMPS DES LYCÉENS| LA CRIÉE ÉDUCATION
49
Printemps effervescent
Alors que les intempéries avaient
empêché son bon déroulement l’an
dernier, le Printemps des Lycéens
et des Apprentis de la Région PACA
a réussi sa 18e édition
forts de ce Printemps ; pour la radio 10 minutes
d’antenne. En tout 33 lycées ont été primés.
Dans une ambiance excellente, un concert avec DJ
et VJ, video-jockey, a animé la soirée tandis que dans
la journée un orchestre, l’Impérial Kikiristan, faisait
résonner ses cuivres. Le tout sous le soleil et le long
du canal avec vue sur la vieille ville de Martigues…
Cette manifestation existe depuis 1992 et en 2000,
sous l’impusion de Michel Vauzelle, les pays du
pourtour méditerranéen y ont été invités pour
favoriser les rapprochements de leurs adolescents,
mettre en valeur leurs forces créatrices et œuvrer
pour la Paix. En 2006, la manifestation s’est ouverte
aux autres Régions de France. Ainsi le cercle s’est
agrandi : 3000 jeunes, 450 enseignants, 146
établissements publics et privés, 15 centres
d’apprentissage, 7 régions françaises, 16 pays comme
le Liban, Israël, l’Égypte, l’Albanie... dont les délégations
viennent d’établissements sélectionnés généralement
dans les lycées des capitales.
CHRIS BOURGUE
Le Printemps des Lycéens et des Apprentis a eu lieu
les 6 et 7 mai
Int grer
Citoyen... et festif !
Les groupes sont totalement pris en charge par la
Région (transport, hébergement, restauration) et du
matériel professionnel est mis à leur disposition.
Chaque établissement peut proposer plusieurs
projets pour des groupes de 6 à 10 élèves, chacun
sous la responsabilité d’un enseignant. Après
l’ouverture par le grand défilé des étendards, les
épreuves se sont déroulées durant 2 jours. Au
programme théâtre, arts de la rue, danse, musique,
mode, vidéo, et des défis Sports de printemps. Mais
aussi performances en direct en arts plastiques avec
matériel fourni, identique pour tous, et présentation
Printemps des lyceens et des apprentis © Valerie Tersen
de projets citoyens à but humanitaire, civique ou
environnemental. Radios et journaux ont aussi leur
place : les lycéens exposent la maquette de leur
projet et réalisent les reportages du Printemps avec
interwievs, photos, restituant la mémoire des instants
Valérie Tersen, professeure d’une classe du CAP
Nouvelles chances au lycée Ferdinand Revoul à
Valréas, accompagnait ses élèves avec un projet
citoyen : «Les élèves de cette classe sont sortis de 3e
sans orientation et avec un niveau faible. On leur
propose une remise à niveau encadrée par un projet
pédagogique fort qui les remotive. Il s’agit d’une action
de solidarité intitulée Ne laissons personne sur le
bord du chemin. Nos élèves correspondent avec des
mineurs en centre de détention, font des animations
pour des malvoyants, des enfants malades... La
Région aide ce type de projet dans le cadre d’une
Convention Vie Lycéenne et Apprentie (CVLA)».
Leur sélection pour participer à ce Printemps leur
aura peut-être donné le coup de pouce dont ils
ont besoin, pour s’intégrer en intégrant l’autre.
C.B.
Vive la politique !
La Grenouille et l’architecte est un travail réjouissant
qui rend hommage aux élus locaux de tous les bords,
à partir des actes de divers conseils municipaux,
introduits par quelques extraits de la République de
Platon : les élus défendent-ils leur conception du bien
général, ou leurs intérêts propres ? La réponse de
Thierry Roisin est généreuse, appuyée sur les
comptes-rendus de débats, et quelques confidences
– une fois par an, entre des centaines d’invectives et de
réclamations, on reçoit une ou deux lettres de
félicitations... La comédie, alerte, se
détache du ton documentaire pour
jouer une polyphonie… à laquelle
tous les élèves de troisième du
collège Gaston Defferre ont assisté.
Préparés par leurs professeurs et le
metteur en scène, leur écoute fut
particulièrement attentive, et ils nous
ont livré leurs impressions :
Plusieurs thèmes importants de la vie
des citoyens sont abordés avec une
grande justesse, sans porter de
jugements : diverses opinions sont
données, le côté positif et le côté négatif
de la démocratie, de la politique actuelle,
laissant ainsi le spectateur libre de
J’ai trouvé cette pièce très active même si le début
ressemble à une leçon de philosophie ; la suite est
marrante. ANTOINE
Cette pièce est drôle alors que le sujet n’est pas censé
être drôle. Ils nous font découvrir un conseil municipal
d’une autre manière. CORALIE Le rapport public-acteurs est une dynamique importante
dans cette création. Les gradins en fond de scène me
donnaient l’impression d’être dans une assemblée. Je me
suis alors sentie plus impliquée et j’avais envie de
participer au débat et de donner mon
La grenouille et l’architecte © Éric Legrand
avis. RAPHAËLLA
Le plateau à roulettes avec le sable et
les projections enrichissent la pièce.
MARC
C’était la première fois que j’allais au
théâtre avec de véritables spectateurs.
MATHIAS
J’ai vraiment apprécié d’aller réellement
au théâtre, même si je pensais être dans
une plus grande salle. Sans le collège je
n’y serais sans doute jamais allée. LÉA
réfléchir à ces notions fondamentales.
MATHILDE ET MARINE
J’ai été surprise que les acteurs puissent jouer plusieurs
rôles. J’étais perdue dans les personnages. Je ne
comprends pas qu’une femme puisse jouer le rôle d’un
homme. MYRIAM
Que les acteurs jouent plusieurs rôles apporte de
l’originalité à l’œuvre. MATHILDE ET MARINE
Pour moi, ce n’est pas du théâtre, les acteurs étaient
comme des musiciens. ANNA La grenouille et l’Architecte a été joué
du 21 au 24 avril à La Criée
50
SPECTACLES NÎMES | GTP | GRASSE | LE REVEST
Envoûtant
Le rêve parfois sur scène se matérialise. C’est ce qui
se passe lors de Flowers in the mirror par la troupe de
l’Opéra du Sichuan de la ville de Chengdu, dans la
superbe mise scène de Charles et Vincent Tordjman.
Le court livret précise l’importance de l’œuvre,
inspirée d’un roman qui fait partie des grands
classiques de la littérature chinoise de la dynastie Qing
(1644-1911), mais c’est à la magie extraordinaire du
spectacle que l’on est le plus sensible. Le décor jongle
avec les reflets, la mise en scène travaille les espaces,
joue sur les profondeurs, l’artifice théâtral se transforme en objet même de théâtre… Les modulations
des voix, les intonations, les phrasés nous emportent
dans un autre monde, tout de subtilité, de décalages
infimes… Les costumes participent de la fête, dans
leur chatoiement, leur variété, leur infinie complexité. Le conte de la déesse des
fleurs bannie puis réconciliée avec le monde des immortels est charmant, et garde
cependant au-delà du merveilleux une vision critique du monde des mortels,
prenant les allures du conte philosophique… Quant aux saluts, c’est un autre
spectacle offert au public que ces virevoltes, ces acrobaties gymniques
époustouflantes, ces cracheurs de feu (on comprenait alors le vide des premiers
Histoires de chant
Repetition Fleurs dans le miroir © X-D.R
rangs!), et cet art des masques, qui se transforment le temps d’un battement de
cils… On côtoie le merveilleux !
M.C.
Flowers in the Mirror a été joué le 4 mai
au Théâtre de Nîmes et les 7 et 8 mai au GTP
François Kerdoncuff, la cantatrice entre en scène,
précédée de son chant. Clair obscur, robe longue
rouge, impressionnante… mais une connivence quasi
immédiate s’instaure avec le public. La diva se raconte,
ses routes, ses tours de chant, elle prend une pause,
grâce à nous. La robe laisse la place à un costume
plus commode, dans lequel on peut bouger, jouer…
rappeler des souvenirs d’enfance, depuis la
savoureuse chanson du bébé de Rossini où les «pipi
caca» s’en donnent à cœur joie, jusqu’à La Fontaine
revisité par Offenbach (impossible d’oublier la cigale
et la fourmi après cela !), ou Prévert qui nous entraîne
autour du monde «en sortant de l’école»… Une
interprétation enjouée, juste, sans faux effets, une voix
qui ne bouge pas malgré les difficultés, et une
magnifique articulation qui rend compréhensibles les
passages vocaux même les plus délicats ! Le voyage
Chante moi une histoire 2 © X-D.R.
Le 9 mai dernier, un public jeune, très jeune, était
assemblé au GTP pour assister à Chante-moi une
histoire. Accompagnée avec finesse au piano par
musical s’appuie avec intelligence sur de petits objets,
livres cartonnés qui s’ouvrent sur de merveilleuses
architectures de papier : les animaux naissent ainsi sur
le piano, une valise s’ouvre sur un voyage qui
s’anime… Une veste et un chouchou dans les
cheveux, l’aventure est à nos portes ! La cantatrice
reprend sa robe de travail, remercie le public du
bonheur de cette récréation… Agnès Mellon reçoit
un succès mérité : elle a captivé pendant une heure
le plus terrible et le plus exigeant des publics : les
enfants !
MARYVONNE COLOMBANI
Le récital d’Agnès Mellon s’est déroulé le 9 mai
au Grand Théâtre de Provence
«Calme, calme… Patience, patience» répète
inlassablement la voix off aux quatre compères en
camisoles enfermés entre 5 blocs de bois, grands et
encombrants, et 12 boîtes. C’est que ces hommes
au crâne rasé, quasi interchangeables, pourraient
devenir fous s’ils n’y prenaient pas garde !
Heureusement, ils rivalisent d’inventivité - question
de survie - et s’ingénient à déborder du cadre pour
être heureux. Comme dans un jeu de quilles, tout ici
est question d’équilibre, d’abord entre leurs
tempéraments bien trempés (le facétieux, l’angoissé,
l’incrédule, le naïf) ensuite dans leurs corps qui
grimpent aux arbres, échafaudent des installations
périlleuses, jouent au chat et à la souris, jonglent avec
des boules en bois. Le ballet des Argonautes est si
minutieusement orchestré et sa partition exécutée
avec la précision d’un métronome que rien ne peut
enrayer la machine : pas un mouvement du corps,
pas un déplacement d’objet, pas même une fausse
Pas perdus © A.Chaudron
Fantaisie hypnotique
note de violon (les jongleurs acrobates sont aussi
musiciens !). Alors d’où vient cette folie absurde qui
déclenche l’hilarité ? De l’interprétation muette et
joyeuse, de la fantaisie de l’histoire, du comique des
quatre bâtisseurs, de la réjouissance de leurs
performances. Chacun teste les limites de l’autre,
adopte une allure désinvolte ou fait mine d’être en
colère quand le bon ordonnancement des choses
est en péril. Gare à celui qui pousse un peu trop la
farce ! Mais tout est bien qui finit bien et le quatuor
parvient à s’accorder : ce n’est pas la composition
pour 1 violon à 4 mains qui dira le contraire…
M.G.-G.
Pas perdus a été donné les 21 et
22 avril au Théâtre de Grasse
et les 26 et 27 avril
au PôleJeunePublic au Revest
LA FRICHE | MIRAMAS | BERRE | DURANCE | APT SPECTACLES 51
Naissance des émotions
CHRIS BOURGUE
la 1ère fois en contact avec «la toujours
seule» et toute bleue, Ilka. Et c’est un
grand trouble qui les saisit : Léon se
sent tout léger et tout à l’envers, et il
s’envole comme un ballon! Puis vient la
petite fille modèle, Ma, tout en rose et
diadème, sollicitée pour compter
jusqu’à 100 et qui pique une colère
Au fin fond de l’univers
Accueillis par de drôles de spationautes silencieux, sous un dôme éclairé
muni de grandes fenêtres, les petits
spectateurs étaient prêts à décoller, à
aller voir de plus près ce qui se passe
dans les étoiles, dans cette soucoupe
étrange, quand la lumière du jour
s’éteint… Sur les murs et par les hublots, des jeux d’ombres, magnifiques
apparitions colorées, qui laissent présager
d’un voyage lointain. À des annéeslumières de la terre, une petite planète
se laisse approcher : là, hors du temps,
vit un drôle de petit bonhomme, Ploum,
marionnette manipulée dans le noir
qui se déplace sur son parapluie et
dont on savoure les sauts en apesanteur pour attraper les étoiles, jouer
au ballon ou échapper au monstre
glouton dévoreur de planète… Et
terrible. Pour finir le petit Louis a peur
du noir et ne veut pas dormir...
Spectacle qui apprend à nommer les
émotions sur fond de musique électroacoustique et de voix d’enfants
enregistrées. Chaque histoire est
soulignée de comptines et certains
enfants des trois classes maternelles
présentes le 30 avril chantonnent en
repartant… Création sensible pour
enfants sages... ou pas !
Leon, Li, Louis © Veronique Lesperat-Hequet
Éric Goulouzelle construit ses figurines
dans l’atelier du Tas de sable à Amiens,
lieu de création, de formation autour
de la marionnette, créé par Sylvie
Baillon, metteure en scène, également
formatrice à l’ENSAM de CharlevilleMézières. Pour Léon, Li, Louis une
commande a été passée à Valérie
Deronzier sur le thème des peurs et
des émotions enfantines. Résultat : trois
histoires de 15 minutes qui s’enchaînent, chacune dans une tonalité
différente. Les marionnettes sont
manipulées à vue par leur créateur et
Élisa Voisin devant un décor très
sobre : des arbres blancs découpés
derrière lesquels se cache le jeune
Léon avant de partir à l’école où il
retrouve ses copains, figurines colorées
en ribambelles. Ce jour-là il rentre pour
Léon, Li, Louis, par la Cie Ches Panses
Vertes, s’est joué du 24 avril au 4 mai
au Petit Théâtre de la Friche Belle
de mai
Une histoire criminelle…
rencontrer celle qui, comme lui, habite
un bout d’univers, celle avec qui il
pourra flotter encore longtemps au
milieu des étoiles. Revenus sur terre, les
enfants, presque déçus de reconnaître
un environnement familier, purent
apprécier un nouveau lever de soleil
(malgré la pluie !). Formidable ouverture sur l’imaginaire concoctée par la
compagnie Le Clan des songes, qui,
par des silences et des images, permet
un véritable voyage bien loin de la
terre…
DO.M.
La Nuit s’en va le jour a été joué
au théâtre de la Colonne
le 28 avril et au Forum de
Berre le 5 mai
La nuit sen va © JL Sagot
Dans son grand livre
illustré, le Vélo-Théâtre a
ouvert la page à la lettre
L comme loup et M
comme maison. Et sur la
couverture, il a écrit en
grosses lettres noires,
bien épaisses, «Et il me
mangea». On pense immédiatement au Petit
Chaperon rouge, bien sûr,
sauf que sa version est
inédite, sombre, cruelle et
si décalée ! Le loup a une
queue de loup (la tristesse de Charlot Lemoine
Et il me mangea © X-D.R.
hurlant à la mort arracherait des larmes à un macchabée !) ; la maison de mère-grand est là, mais réduite
à une maquette ou dessinée sur du calque à partir d’un rétro projecteur (la
compagnie excelle dans le théâtre d’images). Et le Petit Chaperon rouge est
méconnaissable : il a pris un sacré coup de vieux avec ses cheveux gris et son pas
traînant, égrenant ses souvenirs (le filet de voix monocorde de Tania Castaing dit
toute la détresse de la violence vécue). Et puis, dans cette maison qui devient «le
théâtre de nos peurs», il y a un drôle de personnage : un factotum muet qui
manigance, épie, et qui, à ses heures perdues, se fait passer pour un lapin. Excellent
José Lopez dont c’est la première apparition sur scène. Dehors, le loup rôde ;
dedans, la petite fille se souvient. Et tout se mélange : la metteure en scène
Francesca Bettini et ses complices déstructurent l’histoire, inventent des
personnages, transforment le loup en victime et le Petit Chaperon rouge en
bourreau. Un comble ! Mais qui a mangé qui ?… Admirablement éclairée,
ingénieuse dans sa forme (théâtre d’ombres, papiers déchirés, accessoires
miniatures), la nouvelle création du Vélo-Théâtre raconte modestement une
histoire bestiale. Et livre un dernier message subliminal : soyez courageux, sortez
la nuit !
M.G.-G.
Et il me mangea a été créé au Théâtre Durance
les 22 et 23 avril, et au Vélo-Théâtre à Apt les 25 et 26 avril
52
SPECTACLES TOURSKY | GYMNASE | SALINS | PÔLEJEUNEPUBLIC | MASSALIA
Extra-ordinaires voyageurs
Voyageurs immobiles © Pascal Francois
artifices poétiques, sacs plastiques, prothèses,
chapeaux, bandelettes), le spectateur n’offre aucune
résistance. Le théâtre visuel et esthétique de Philippe
Genty l’embarque aussitôt vers des terres inconnues,
des contrées désolées, vers un Eden enchanteur, à
bord d’une barque chancelante ou d’une
montgolfière légère, légère… Le spectacle prend
appui sur des situations réelles, un imaginaire collectif,
des contes familiers et des chansons populaires avant
de s’offrir de beaux dérapages contrôlés pour dire
que la vie est joyeuse et la haine le clignotant rouge
avant la fin du monde…
Philippe Genty est-il jamais retombé sur terre ? Ou
préfère-t-il vivre entre deux océans, deux déserts,
sans se détacher de ses voyages rêvés ou réels ni des
paysages traversés aux quatre coins du globe… Il en
fait même la matière de son spectacle, Voyageurs
immobiles, prolongement de Voyageur immobile créé
en 1995. Là où il était question d’un seul personnage
prisonnier de ses propres voyages intérieurs, voici
qu’une horde d’ombres errantes le rejoint.
Semblables et pourtant distinctes. Et leur chevauchée
improbable, leur quête d’absolu ne font que
commencer à travers des mers déchaînées, des
déserts blancs comme neige, lunaires, ou noirs
comme la surface des lacs. Face au déploiement de
décors majestueux, aux dialogues surréalistes, à la
combinaison magique entre acteurs et marionnettes,
à la débauche d’accessoires insolites (masques,
M.G.-G.
Voyageurs immobiles a été donné les 22, 23 et 24 avril
au Toursky
6 milliards et moi et moi
Mitraillés par une avalanche de chiffres
et de noms propres, seuls des élèves
aguerris à l’économie, la culture, la
religion, le social, la diplomatie, la démographie pourront tirer le meilleur parti
de cette leçon de géopolitique intelligente et instructive. Et dépasser les
trouvailles ludiques et visuelles du
spectacle pour en saisir tout l’enjeu :
depuis le premier homme sur la terre,
la guerre fait rage, et l’avenir est
incertain. Bombes atomiques, réchauffement climatique, exploitation des
richesses, contrôle des voies d’accès…
la compagnie Notoire est en alerte et
avise la jeune génération de l’état du
monde : adultes de demain, réveillezvous !
MARIE GODFRIN-GUIDICELLI
Le Globe a été joué les 11 et 12 mai
au PôleJeunePublic au Revest
et au Théâtre Massalia
les 18 et 19 mai
Le Globe © T. Burlot
Le vrai du faux
Les adaptations des contes
des Grimm par Olivier
Py ont un côté clinquant,
factice et grosses ficelles
absolument réjouissant.
Tapageurs, parlant trop
fort, exagérant les effets,
les comédiens adoptent
la distance du clown, avec
clins d’œil au public, à
l’actualité, en glissant pardessous, avec délectation,
un discours subtil sur
l’amour, la vérité cachée,
la révélation. La langue
est toujours aussi belle,
regorgeant d’aphorismes,
illuminée de trouvailles
poétiques posées comme négligemment dans
les tirades. Quant aux
décors ils empilent des
portes, dévoilent leurs
envers, exhibent leurs
machineries. C’est rouge,
violet et noir, lumineux,
énergique, dévoyé, provoc
et trans juste ce qu’il faut pour que les
enfants ne se choquent pas, et que les
parents rigolent, mystique et sublime
juste assez pour titiller un peu l’âme,
sans trop agacer les matérialistes. Une
esthé-tique du factice qui montre que
la vérité ap-parente n’est qu’un reflet
trompeur, que l’illusion est partout
prête à vaincre, que rien n’est plus
profond et véritable que ce que l’on
croit faux. Excepté le faux des musiLes contes de Grimm © Agnes Mellon
Annoncé pour un public à partir de 6
ans, Le Globe de Thierry Bedard met la
dragée haute : il faut être âgé d’au
moins 10 ans pour comprendre «un
certain état du monde, et un certain
désastre dans nos relations avec le
monde». Si la scénographie et l’interprétation sont admirables, il est
inimaginable de croire que de jeunes
enfants peuvent retenir une once d’information sur la théorie de l’incertitude
de Kant et la pensée co-constructiviste
d’Edgar Morin ! Excepté les intervalles
comiques de la conférence, l’interactivité ponctuelle avec la salle, les
globes en plastique qui font pschitt
quand ils crèvent et le vrombissement
d’images stroboscopiques, ils décrochent immédiatement et le calme est
bien difficile à retrouver… Dommage
car le duo de choc maître de conférence
et assistant fonctionne à merveille
jusque dans la caricature : rigidité professorale pour l’un, esprit lunaire pour
l’autre et facéties pour les deux.
ciens, qui franchement, dans La Vraie
Fiancée, arrache les oreilles…
AGNÈS FRESCHEL
La Vraie Fiancée et L’eau de vie ont été
joués au Gymnase du 27 au 29 avril
et aux Salins (Martigues) les 6 et 7
mai
THÉÂTRE DE FOS | LA CRIÉE | OMC SIMIANE SPECTACLES
53
Commedia del mondo
Réunir sur une même scène autour d’un même
propos deux théâtres aussi éloignés par la géographie
et l’esthétique que celui de la commedia dell’ arte et
l’opéra chinois, relève d’une double gageure, concilier
deux univers et deux langues. Cette improbable
entente s’est produite sur la scène de Simiane. Le
Théâtre des Asphodèles, dans une mise en scène
inventive et drôle de Luca Franceschi, réussit
brillamment cet impossible pari. Les huit comédiens,
chinois et européens, font un jeu du décalage des
Arlequin navigue en Chine © X-D.R
langues. Inénarrables instants de doublage, de
traduction simultanée, de dialogues dans lesquels les
phrases créent un tissu musical qui ajoute à la force
comique des personnages.
L’argument repose sur l’intrigue classique des amours
contrariées, tous les personnages de la comédie sont
là, de l’ingénieux Arlequin au vieux barbon bougon et
au Matamore, marin en l’occurrence… Bien sûr, il y
a les amoureux, la douce princesse chinoise enlevée,
et l’amoureux rêveur qui poétise. Tout concourt à
une magistrale réussite : le jeu traditionnel des
masques et les prestations acrobatiques
époustouflantes de l’Empire du Milieu, un langage des
signes comme universel, une connivence entre les
acteurs et le public, avec un jeu dans et hors du
théâtre : les comédiens se griment, se bousculent
pour aller endosser un rôle, hurlent qu’ils ne sont pas
encore prêts… L’art est vraiment le ciment des
peuples.
M.C.
Arlequin navigue en Chine a été joué
à l’OMC Simiane le 24 avril
Au fil de l’eau
C’est à un beau voyage dans l’espace et le temps, à
bord de l’Hirondelle et la Mésange, que nous ont
conviés Fotokino et la Criée en proposant le film
d’André Antoine, restauré par la Cinémathèque
française. On nous avait prévenus : datant de 1920, le
film est projeté en 18 images/seconde, ce qui crée
un scintillement… ce fut un éblouissement !
Accompagnés brillamment à l’accordéon diatonique
de Marc Perrone, les spectateurs se sont promenés
au fil de l’eau, le long des berges de l’Escaut. Quittant
les péniches pour les rues d’Anvers, ils ont suivi le
cortège de l’Ommegank qui fêtait ses 25 ans en
compagnie du marin, Pierre van Groot et de sa
femme, Griet, de la jeune Marthe «en âge d’être
mariée» et de son prétendant, Michel, le «poisson
d’eau douce» qui navigue en eau trouble. Ils y ont vu
des chars tirés par des chevaux, dont celui de
Rubens ; ils ont franchi ponts et écluses, quitté la
Criée pour le marché aux poissons de Tamise, assisté
au dur travail de halage et à la savoureuse séance de
photos-truquages.
Ce film, poétique et documentaire à la fois, qui
raconte une histoire de contrebande, d’amour et de
trahison, a permis aux spectateurs de s’évader
pendant 80 minutes de Marseille pour les Flandres et
le Nord, et de découvrir qu’André Antoine, figure
historique du théâtre, fut un réalisateur hélas
mésestimé !
Marc Perrone © X-D.R.
L’Hirondelle et la mésange a été projeté
le 30 avril à La Criée
ANNIE GAVA
Au fond du trou
La Metamorphose © Stephane Vallet
Une forme allongée dans la pénombre remue, sorte
de mue gémissante qui n’a pourtant rien d’un
insecte… Dans cet univers souterrain où se meuvent
des ombres menaçantes, un homme émerge,
titubant, les gestes imprécis. Les minutes puis les
heures passent sans qu’il parvienne à se dresser. Dans
la nuit Gregor Samsa, insecte modèle qui travaille
d’arrache-pied pour rembourser les dettes de son
père et faire vivre sa famille s’est transformé en être
humain.
C’est ainsi que le théâtre Mu s’empare de l’œuvre de
Kafka, inversant les rôles en rendant humain celui par
qui le scandale arrive. La scénographie renforce
encore la situation, la famille de Gregor étant
représentée par des marionnettes de plus de 2
mètres, manipulées à vue, fragiles et magnifiques. Mais
alors que le texte de Kafka s’attache à rendre réaliste
et tangible le sentiment de l’absurde, la mise en scène
d’Yvan Pommet se focalise sur la métamorphose et
ses conséquences sur le microcosme familial, et dans
une moindre mesure social, de façon essentiellement
visuelle, reléguant le texte à une portion congrue.
C’est dommage, la pièce perd de son intensité,
laissant le spectateur au seuil du terrier…
DO.M.
La Métamorphose a été jouée le 23 avril
au Théâtre de Fos
54
SPECTACLES AU PROGRAMME
En piste !
Insolite
Rate-Rattrape-Rate © Martin Wagenhan
M.G.-G.
La compagnie Ecla Théâtre, qui propose depuis
longtemps des spectacles conçus pour le public
jeune, revisite-là un classique du répertoire, Les
Fourberies de Scapin. Si le texte est bien celui de
Molière, la mise en scène d’Antoine Herbez privilégie
la farce, lorgnant vers la fête, la liberté, l’humour et la
sensualité avec force cascades et gags visuels qui font
de la pièce une comédie moderne.
Les Fourberies de Scapin
Compagnie Ecla Théâtre
dès 9 ans
jeudi 27 et vendredi 28 mai 9h30 et 14h30
Auditorium de Vaucluse, Le Thor
04 90 33 97 32
www.auditoriumlethor.com
Jolis courts de mai
vendredi 28 mai
Et Toc !, 18h,Théâtre des Doms
Et Doc ! 21h, Utopia
Et Hop ! à partir de minuit, Utopia
Cinéma Utopia,Avignon
04 90 82 65 36
www.cinemas-utopia.org
Théâtre des Doms,Avignon
04 90 14 07 99
www.lesdoms.eu
Rêveries
Auteur, compositeur, interprète, Robinson poursuit
son exploration de la vie quotidienne des enfants
avec une nouvelle formule magique, titre de son
quatrième album : Ailleurs sera demain ! Un
programme que le chanteur propose avec ses
musiciens Marc Hévéa (chœurs, claviers, accordéon,
guitare et percus) et Bruno Perren (chœurs, guitare
et banjo).
Robinson
dès 4 ans
vendredi 21 mai 18h30
Espace Robert Hossein, Grans
04 90 55 71 53
www.scenesetcines.fr
Hommage
Tout l’art du théâtre de marionnettes à gaine au
service de l’un des maîtres du théâtre, Antoine Vitez.
À partir de quelques-uns de ses écrits théoriques, de
ses lettres et poèmes, le Théâtre aux Mains nues
compose Vitez en effigie comme une esquisse, «une
expérience de théâtre/récit» et signe un magnifique
hommage à l’art de l’acteur tel que Vitez le concevait.
Vitez en effigie
Théâtre aux Mains nues
spectacle présenté dans le cadre du Printemps sous le
signe de la marionnette
dès 11 ans
jeudi 3 et vendredi 4 juin 20h
Théâtre Massalia, Marseille
04 95 04 95 70
www.theatremassalia.com
Cauchemar blanc d’après Moebius, réal. Mathieu Kassovitz
De l’Art et du cochon
Vitez en effigie © Emmanuelle Corson
Roublard
Goma Gom
samedi 29 mai 21h
Office municipal de la culture, Simiane
04 42 22 62 34
www.omcsimiane.com
>
Cité cirque
Festival de cirque et de théâtre de rue
jusqu’au 1er juin
Gap et Hautes-Alpes
04 92 52 52 52
www.theatre-la-passerelle.eu
www.theatre-le-cadran.eu
Le collectif Et Doc !, le cinéma Utopia et le Théâtre
des Doms font la fête aux courts toute une nuit !
L’occasion de découvrir trois séries de films et
rencontrer Louis Héliot (Centre Wallonie Bruxelles
à Paris) et le réalisateur Christophe Lemasne (Annie
de francia). Au programme, une sélection de courtsmétrages belges, une séance long-court proposée
par l’association Cinambule et pour les noctambules,
une séance «C’est provoc !». À l’heure des entractes,
tout le monde est convié à apporter son piquenique… le plus «long» possible.
>
Cité cirque n’a pas fini de faire son festival dans les
Hautes-Alpes ! L’aventure se poursuit en compagnie
de Dominique Rousset et Claude Broyasse qui font
la tournée des Excentrés avec leur théâtre forain
Domi et Claude (jusqu’au 25 mai, dès 7 ans). Ou l’art
de transformer l’espace d’une caravane en haut lieu
de parodie. À Gap, Mathurin Bolze continue sur sa
lancée et présente à La Passerelle, après Ali avec Hedi
Thabet, son tout dernier succès : Du goudron et des
plumes (20 et 21 mai, dès 12 ans). Tandis que
déboulent en fanfare, sur le parking du Quattro, la
troupe du Théâtre Dromesko et sa ménagerie pour
Arrêtez-le monde, je voudrais descendre (du 25 mai au
1er juin). Un univers insolite où se côtoient hommes
et animaux et se succèdent situations cocasses, ballet
d’amoureux, mariages improbables, anges musiciens
encagés et malades perfusés à la vodka… Bouquet
final avec la compagnie Pré-O-Ccupé/Nikolaus et son
Raté-Rattrapé-Raté qui jongle avec les mouvements
du corps, les numéros de clown et la parole (28 et
29 mai, dès 7 ans). Attention, ratages et chute de
balles annoncés !
Trop court !
Que peut-on faire avec quelques chambres à air ?
Vous et moi sans doute pas grand chose, mais les
Chapertons, eux, inventent un dompteur de cirque
et ses phoques, un couple de pingouins délurés, un
circuit de Formule 1, des poulpes et… Véritable ode
au pneumatique, Goma Gom est un monde à part
dans lequel les trois clowns espagnols se passent de
paroles au profit d’un humour visuel dévastateur !
Laurence Janner décape les Trois petits cochons de
leur vernis hollywoodien pour revenir à la source du
conte populaire anglo-saxon qui fait des petits
porcins de vrais animaux. Mais chut, surprise, d’autant
qu’elle en profite pour faire couler beaucoup…
d’argile ! Changement de registre avec Comment
Wang-Fô fut sauvé, la plus célèbre des nouvelles
orientales de Marguerite Yourcenar. Là, la poésie et
le rêve l’emportent qui nous promènent de l’univers
du vieux peintre Wang-Fô à celui du jeune empereur,
qui ne connaît du monde que son dessin, et veut tout
en comprendre…
Trois petits cochons
dès 3 ans
les 26 et 29 mai, les 2, 5, 9 et 12 juin 14h30
reprise en septembre
Comment Wang-Fô fut sauvé
dès 6 ans
les 16, 19 23 et 26 juin 14h30
Badaboum théâtre, Marseille
04 91 54 40 71
www.badaboum-theatre.com
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Percuasif !
Western
Toute la réussite de Parce qu’on va pas lâcher repose
sur la combinaison équilibrée du step (percussion
corporelle dont Onstap a fait sa marque de fabrique),
du slam et du théâtre. Sur l’histoire simple d’enfants
de cités racontée en dialogues imagés. Et sur la
complicité entre Hassan Razak et Mourad Bouhlali
qui jouent de leur corps comme d’une batterie et
parviennent, avec une économie de moyens, à ferrer
l’émotion du public par leur énergie et leur présence
généreuse.
Confrontée à une pièce du répertoire classique, la compagnie Vol plané se plaît à mettre le Malade Imaginaire
en abyme, jouant à le jouer, et passant sans transition
de la farce à sa férocité, de la scène à la violence d’un
ring contemporain : quatre acteurs, pas de décor ni
de costumes, pas de lumières ni d’artifices, tel est le
parti pris du metteur en scène Alex Moati pour
dénoncer à son tour l’imposture de la médecine face
à un malade obsessionnel… et en bonne santé !
Ali Baba et les 40 voleurs © X-D.R.
Parce qu’on va pas lâcher
Cie Onstap
jeudi 2 mai20h30, Paluds de Noves
vendredi 21 mai 20h30, Morières-les-Avignon
samedi 22 mai 20h30, Châteauneuf-de-Gadagne
Théâtre de Cavaillon
04 90 78 64 64
www.theatredecavaillon.com
Jouer au malade
Descendance
Il était une fois… les fables de La Fontaine revues et
corrigées par William Mesguich, à mi-chemin entre
l’univers des Monty Python et celui de Tim Burton !
Ironie de la mise en scène, La Fontaine est sur le
plateau en chair et en os, maître de cérémonie de ce
ballet du genre animal qui ressemble tant à celui des
humains avec ces drôles de bêtes déguisées en hommes
et ces drôles d’hommes déguisés en bêtes… En plus
sa langue n’a pas pris une ride et continue de faire rire
à travers une galerie de personnages au lisse plumage
ou au tendre langage.
>
Il était une fois… les fables
William Mesguich
dès 5 ans
mercredi 19 et samedi 22 mai 15h
La Criée, Marseille
04 91 54 70 54
www.theatre-lacriee.com
Tellement vrai
Avec un talent qui n’a que faire de l’âge, le Groupe
Grenade (les danseurs ont entre 8 et 13 ans !) s’est
emparé avec succès du roman réaliste de Dickens
sur l’enfance maltraitée. Sous la houlette de Josette
Baïz, ils revisitent chaque étape de la vie d’Oliver Twist,
son parcours jalonné de petits bonheurs et de
grandes souffrances, en autant de tableaux expressifs.
Dans un langage chorégraphique caractéristique du
travail de Josette Baïz depuis 20 ans, ils offrent un
spectacle saisissant de vérité.
Oliver Twist
Groupe Grenade
dès 8 ans
vendredi 28 mai 19h30
Théâtre des Salins, Martigues
04 42 49 02 00
www.theatre-des-salins.fr
>
Qui n’a jamais entendu «Sésame, ouvre-toi…» ? Si Ali
Baba est dans tous les esprits avec son flot d’images,
La Cordonnerie en donne une version toute
personnelle dans L’Histoire d’Ali Baba et de quarante
voleurs exterminés par une esclave. Prenez un endroit
désertique, abandonné de tous, et deux frères qui
travaillent dans une vieille station-service : l’un se
nomme Cassim, l’autre Ali Baba… Le tout donne un
ciné-concert fantasque où la bande son et les
bruitages joués en direct par les musiciens
commentent et accompagnent l’action d’un film
muet réalisé par Samuel Hercule.
Le Malade imaginaire
Compagnie Vol plané
dès 11 ans
les 27, 28, 31 mai et 1er juin en tournée dans les
collèges (représentations ouvertes aux familles)
Théâtre Massalia, Marseille
04 95 04 95 70
www.theatremassalia.com
La Cigale, La Fontaine © X-D.R.
L’Histoire d’Ali Baba et de quarante voleurs exterminés
par une esclave
Cie La Cordonnerie
dès 6 ans
mardi 8 juin 19h30
PôleJeunepublic, Le Revest
04 94 98 12 10
www.polejeunepublic.com
Initiatique
Tel Ulysse qui dut parcourir le monde, Odyssée et
Bernie, deux enfants, vont voyager dans le temps et
dans le monde, rencontrer des artistes et des savants
pour devenir adultes… Grégoire Callies déroule le fil
de la grande et de la petite histoire pour bâtir un
parcours initiatique en trois parties, avec la complicité
du marionnettiste Yeung Faï qui mêle tradition des
marionnettes à gaine chinoise et imagerie
européenne. Pour dire que tout s’accomplit aussi
dans l’amour, l’amitié, l’art, la pensée, bref, dans tout ce
que l’homme sent et ressent.
La Petite odyssée (trilogie)
Grégoire Callies et Yeung Faï
spectacle présenté dans le cadre du Printemps sous le
signe de la marionnette
dès 8 ans
du 10 au 12 juin
Théâtre Massalia, Marseille
04 95 04 95 70
www.theatremassalia.com
Oliver Twist, Groupe Grenade © Leo Ballani
Planant
Peter Pan n’a qu’à bien se tenir, Alexis Moati et ses
acteurs ne lui laisseront pas une minute de répit ! Sur
le plateau encombré de canapés de récupération, la
famille Darling s’apprête à vivre de drôles d’aventures
en compagnie de l’éternellement jeune Peter Pan, de
la fée Clochette et du capitaine Crochet… C’est que
la compagnie Vol plané aime le théâtre -qui le lui rend
bien-, sait raconter des histoires et tirer les meilleures
ficelles de l’illusion théâtrale.
Peter Pan où le petit garçon qui haïssait les mères
Cie Vol plané
dès 8 ans
Après le Théâtre de l’Olivier à Istres et la captation par
Arte, le spectacle sera présenté le 11 juin 14h30 et
19h à L’Astronef, Marseille
04 91 96 98 72
www.ch-edouard-toulouse.fr/-Le-Theatre-del-astronef-.html
56
LIVRES
Un projet qui déchire
La vocation principale de Libraires à Marseille
est de proposer des manifestations autour du livre,
des rencontres avec les auteurs. À destination d’un
public adulte mais également des plus jeunes. Elle
organise ainsi chaque année le Prix du livre
jeunesse Marseille. En partenariat avec l’ACELEM
(Association culturelle d’espaces lecture et écriture
en Méditerranée), elle est aujourd’hui à l’origine d’un
tout nouveau projet, Au tour de l’album, qu’elle
entend bien pérenniser.
Libraires à Marseille a choisi Sara, auteure et
illustratrice réputée (pas moins de 18 publications
en une quinzaine d’années), organisé sa résidence à
Marseille et coordonné les actions. L’ACELEM a mis
à disposition les locaux et le personnel de son
espace lecture. C’est pendant les vacances de
printemps que s’est déroulé le premier temps de ce
projet, qui vise à favoriser l’accès au livre d’enfants de
quartiers défavorisés et à stimuler leur imaginaire.
Une vingtaine de lecteurs de 8 à 12 ans ont
participé aux ateliers de création animés par Sara et
se sont initiés à sa technique de prédilection, le
papier déchiré. Durant cette première étape, les
jeunes stagiaires ont créé des histoires selon cette
technique, avec des contraintes de couleurs (3
maximum) et de personnage (un poisson rouge).
Leurs travaux, scannés, seront réunis en un recueil
et présentés lors de la 2e session, pendant les
vacances scolaires d’octobre. Au programme : une
sortie sur le Vieux-Port (que la plupart des enfants
du quartier de la Solidarité ne connaissent pas bien)
suivie d’une création graphique et une grande fête
pour l’inauguration du nouvel espace lecture de
l’ACELEM (Edouard Vaillant, dans le 3e ardt), avec
exposition des œuvres réalisées par les enfants.
Un projet, qui, outre qu’il favorise la rencontre du
jeune public avec un auteur et son œuvre, l’amène
à pousser les portes de lieux dédiés à la
lecture… et à y revenir !
Rencontre avec l’auteure et illustratrice Sara © X-D.R
Multiplication des histoires
Le travail de Sara est passionnant. Dans ses nombreux albums elle
déploie les histoires, presque sans mots, avec juste quelques papiers
déchirés et un choix volontairement limité de couleurs. La beauté
primitive des compositions parle à tous, petits et grands. De désir de
liberté, d’amitié, de solidarité, de deuil et de solitude aussi. Sara met
en scène les émotions qui la traversent avec une grande économie
de moyens et une force de suggestion peu commune, renforcée
par des cadrages très cinématographiques. Chaque lecteur, quel
que soit son âge, peut plonger dans les pages pour y inventer
SON histoire, se rencontrer soi-même. Parfois aussi l’album, sans
texte, s’accompagne d’un DVD et d’une lettre en post-scriptum. C’est le
cas pour À quai réalisé dans une gamme colorée très série noire. Ainsi, le
livre propose trois entrées dans cette histoire d’amitié entre un chien jaune
et un capitaine de navire. Trois points de vue. Car y a-t-il jamais une seule
version de l’histoire ?
F.R.
À lire de Sara : Eléphants, Éd.Thierry Magnier, 17 euros ; Nu et À quai, Seuil
jeunesse, 15 et 24 euros, ainsi qu’une superbe sélection de quelques
Métamorphoses d’Ovide aux Éd. Circonflexe.
FRED ROBERT
Mémoire des origines
Les trous de mémoire ne sont pas pleins de
vide ! Ils peuvent être emplis de souvenirs cachés, en
attente, prêts à surgir à la première occasion. C’est
le cas de celui dont parle Annie Agopian dans un
album très sensible qui lui a été commandé pour
marquer le 95e anniversaire du génocide arménien
du 24 avril 1915.
À l’occasion de la banale demande de
renouvellement des papiers d’identité de sa mère à
une fonctionnaire municipale, le jeune narrateur
découvre le nom de son grand-père paternel et son
lieu de naissance : Kharpout, Asie Mineure. Sa mère
lui explique alors des mots étranges comme
«naturalisé» ou «apatride», puis lui raconte le
mariage de son grand-père arménien avec sa grandmère, née dans un petit village bien français. La mère
retrouve des livres, écrits dans une langue inconnue
avec de vieilles photos, des articles de journaux
jaunis…
L’auteure suggère, fait ressentir, ne rentre pas dans
des explications trop précises, mais la date du
génocide et le nombre de morts sont marqués
sur deux pages noires. Son livre raconte entre les
lignes, s’appuie sur les dessins d’Alfred, précis, cernés
de noir, parcourus de grands à-plats souvent
orangés, puis d’une pluie d’étoiles à la fin pour
montrer que la vie est là, avec ses plaisirs simples,
son goût de miel et son parfum d’épices.
CHRIS BOURGUE
Le trou
Annie Agopian et Alfred
Éd. du Rouergue, 16 euros
LIVRES
Noms de non !
Actes Sud junior propose aux adolescents une
collection revigorante, qui a tout pour séduire à
commencer par son titre : Ceux qui ont dit non. Sous
cette bannière sont réunies des biographies romanesques de personnages historiques exemplaires
par leur engagement combatif. Ces figures charismatiques, célèbres ou oubliées, permettent d’aborder
dans leur actualité des sujets polémiques laissés de
côté par les manuels d’histoire, de la violence
carcérale à la torture en Algérie.
Ainsi de Louise Michel, petite institutrice de province devenue activiste anarchiste, égérie de la
Commune de 1871 et mythe énigmatique d’une
sorte de vierge laïque ayant épousé la cause ouvrière. Ainsi de Simone Veil, rescapée d’Auschwitz,
devenue ministre de la santé, identifiée à la loi de
1975 qui porte son nom, et légalise en France
l’avortement contre l’hostilité des conservateurs
et des religieux. Tout oppose ces deux femmes : la
première est une femme du peuple qui a passé le
plus clair de sa vie devant des juges et en prison
pour avoir fomenté le désordre
public ; la seconde est de l’autre côté,
issue de la bourgeoisie et de la haute
magistrature, aujourd’hui académicienne.
Mais l’une et l’autre partagent l’expérience de la déportation, et une
détermination infaillible qui les fait agir, et
qui donne aux questions de société qu’elles
incarnent un visage à la fois touchant et
impressionnant.
La volonté pédagogique louable de l’entreprise conduit parfois à une simplification
narrative qui échoue à donner une vraie
consistance aux personnages, et à des dossiers
historiques d’accompagnement sché-matiques.
Des histoires pour bien grandir
La collection Benjamin des éditions Actes Sud
ravit par la diversité et la qualité des ouvrages
proposés. Format agréable, papier épais, capable de
subir les assauts gourmands des lecteurs en herbe,
caractères larges, mais pas trop quand même, on
n’est plus des bébés !, mise en page aérée,
illustrations délicieuses, cultivant la simplicité et la
clarté… Les thèmes abordés ne se contentent pas
de reprendre les grands topiques de la littérature
enfantine. Certes, il y des contes, reprises
traditionnelles, comme Le bateau qui marchait sur la
terre et sur l’eau de Alain Le Goff, qui s’apparente au
Baron de Munchausen (le héros pauvre, obtiendrat-il la main de la belle princesse ? une série de
personnages hauts en couleur vient à la
rescousse…) ; mais la vie quotidienne des enfants
est aussi mise en scène : véritable guide pour les
parents, Mathilde et les petits papiers apprend, sous
la plume toute de nuances de Béatrice Fontanel, à
accepter la réalité particulière de son enfant, à
trouver une entente, à concilier une passion avec la
vie commune, à transformer l’objet de litige en
complicité. Et que dire du morceau de choix de ce
conte à rebrousse conventions La princesse qui
n’aimait pas les princes de Alice Brière-Haquet ?
Rares sont les livres pour enfants qui abordent
l’homosexualité… Sa prose brillante et légère mêle
les échos des histoires de nos enfances à des
reprises enflammées de Racine «Elle la vit, elle rougit,
pâlit à sa vue»… il y a du Phèdre dans l’air, et une
mise à mal des tabous avec une subtilité et une
vivacité confondantes… Un régal et pas seulement
pour les petits !
MARYVONNE COLOMBANI
La photo sans cliché
Dernier né de la collection À petits pas, La Photo
propose aux enfants de mieux découvrir cette
image qu’ils croient connaître. De la camera obscura
au laboratoire numérique, Laura Berg explique les
étapes qui ont conduit à la photo d’aujourd’hui. Les
enfants y verront le daguerréotype, la chronophotographie, l’autochrome ; ils réfléchiront à la photo
en tant qu’art, à son utilisation dans les domaines
scientifiques ; ils comprendront la différence entre
l’argentique et le numérique, les processus en
œuvre dans la prise de photos ou le développement, les métiers qui s’y rattachent, les droits et
devoirs des photographes professionnels.
Quelques jeux et activités permettent de tester les
connaissances ou de les mettre en pratique et
d’aborder les notions de cadrage, de composition
de l’image.
Dommage que les seules images soient les dessins
de Vincent Bergier ! Quelques photographies
auraient permis de former le regard…
ANNIE GAVA
La photo à petits pas
Laura Berg et Vincent Bergier
Actes Sud junior, 12,00 euros
57
Mais cela n’enlève rien à l’originalité et à la générosité de cette
entreprise salutaire, qui rappelle
aux adolescents l’éternelle
jeunesse, et la nécessité renouvelée, de l’esprit de révolte.
AUDE FANLO
Louise Michel
«Non à l’exploitation»
Gérard Dhôtel
Simone Veil
«Non aux avortements
clandestins»
Maria Poblete
Actes Sud junior,
7,80 euros
La princesse qui n’aimait pas les princes
Alice Brière-Haquet, Lionel Larchevêque
Mathilde et les petits papiers
Béatrice Fontanel, Marc Boutavant
Le bateau qui marchait sur la terre et sur l’eau
Alain Le Goff, Rémi Saillard
Actes Sud junior collection Benjamin,
7,50 euros
58
LIVRES/DISQUES
For childrens ?
On dira qu’Universal ne se casse pas la tête
pour cette nouvelle collection Musique pour les
enfants. Format des plus sommaires, sans notice, ni
livre illustré, pas de narration : juste de la musique
compilée par thème ! On est loin des efforts
accomplis par les labels spécialisés qui pensent et
articulent leur production destinée à la jeunesse
avec soin, et détails attrayants. Le principal atout de
la major est de pouvoir puiser dans un fonds d’une
qualité exceptionnelle et d’une diversité
insondable…
Le slogan défendu est «Faites découvrir à vos enfants
la musique que vous aimez !». Sur les trois galettes
disponibles, on comprend aisément le choix des
œuvres réunies dans Classics for kids (480 2249)
avec les variations symphoniques de The Young
Person’s Guide to the Orchestra de Britten, les Jeux
d’enfants de Bizet, Les Chidren’s Corner de Debussy
(par Alexis Weissenberg) et L’Apprenti sorcier de
Dukas. Le fonds de Deutsche Grammophon est
constitué d’orchestres et chef prestigieux : Maazel,
Levine…
Énigme de Jade
Dans l’insupportable chaleur de l’été à Pékin,
une petite fille se promène avec son grand-père…
Un coin d’ombre, un banc, le grand-père raconte
une histoire… du temps où les dragons vivaient
encore en Chine, un temps de légendes… Le
village du petit Bao est riche, très riche, grâce à
l’exploitation du jade. Mais un dragon vient ruiner
les villageois par ses exigences. Bao trouvera-t-il le
héros capable de chasser le dragon ? Même si dès
la rencontre avec le moine, l’on se doute de la
conclusion, le récit ne manque pas d’intérêt. Les
épreuves que le petit Bao affronte le feront grandir,
n’est-ce pas le but de tous les contes initiatiques ?
Un charmant petit ouvrage, fragment précieux de
jade, qui s’efforce de déchiffrer le monde
La qualité artistique du florilège de standards
de jazz assemblés autour du thème
berceur Lullaby (531 4522) n’est pas à remettre en
cause, hors quelque choix au goût contestable, mais
il semble parfois un peu tiré par les cheveux
d’anges ! La majeure partie de ce répertoire n’est
pas à proprement parler destiné aux séraphins…
Cependant «papa & maman jazzy» se plaisent à
partager avec bébé des «classics» de Sarah
Vaughan, Armstrong, Bill Evans, Miles Davis …
Il en va de même pour le disque consacré
exclusivement à Ella Fitzgerald Miss Ella’
Playhouse (531 4949) : on est sous le charme des
vieux enregistrements s’étalant de 1937 à 1966,
mais pas sûr que l’indication «De 1 à 4 ans»
convienne réellement à tous les titres ! Rien
n’empêche d’essayer ? Swing avant toute !
JACQUES FRESCHEL
Musique pour les enfants
Collection Universal
énigmatique des apparences et de nous
affranchir de nos dragons.
Bao et le dragon de jade
Pascal Vatinel, Peggy Adam
Actes Sud junior, Cadet,
7 euros
L‘eau toute douce
Les enfants ignorent la plupart du temps ce qui
se cache et vit dans les rivières. Une boîte à trésor
propose une démarche originale pour découvrir le
monde aquatique et les petites bêtes qui la
peuplent. La boîte de carton renferme 3 livrets.
D’abord un dépliant explique comment faire des
prélèvements avec une épuisette dans les cours
d’eau pour juger de leur propreté et de leurs
habitants, larves, vers, escargots. Puis un récit de
vacances de Luis Espinassous entraîne les jeunes
lecteurs à la suite de quatre enfants qui construisent
cabane et radeau, et bravent le danger d’une crue.
Enfin une brochure, rédigée par Frédéric Lisak,
explique le cycle de l’eau, de la source à l’estuaire,
présente la faune et la flore des ripisylves. Le tout
complété par le 1er trésor d’une collection future,
un bout de bois rongé par un vrai castor, auprès
duquel on propose aux enfants de ranger
coquillages, sables et cailloux ! Ils pourront aussi
Binômes
M.C.
fabriquer un bateau en bois à hélices avec l’aide
d’un adulte.
L’ensemble, ludique et pédagogique, est joliment
illustré de dessins et personnages confectionnés
dans du carton par Christian Voltz.
CHRIS BOURGUE
La boîte à trésors : la
rivière
Éd. Plume de
carotte, 16,50 euros
Dans la même
collection : La forêt
La comédienne Mathilda May (née
Haïm) est une danseuse émérite (1er prix au
CNSMD de Paris), également chanteuse et
passionnée de musique classique depuis
l’enfance : elle est «tombée» dans le spectacle
avec un père dramaturge et une mère danseuse
et chorégraphe. Avec une nouvelle collection, Le
coffret des musiciens, la belle artiste veut faire
partager aux enfants sa passion pour la musique.
L’idée est, à partir de faits réels, d’associer deux
personnalités, l’une historique ou littéraire, l’autre
musicale. Le récit, lu par l’actrice, est accompagné
de bruitages et extraits d’opus (CD) alors que le
«pitchoun» tourne les pages d’un livre illustré. Les
deux premiers ouvrages associent, en plein
romantisme, Chopin & Sand et Lully & d’Artagnan
au siècle du Roi-Soleil.
J.F.
Livres + CD aux Éd.
Bleu nuit (dès 6 ans)
60
LIVRES
ARTS | LITTÉRATURE
L’ai-je d’esprit
Depuis Phare de la Mariée, première étude du Grand
Verre par Breton en 1935, combien d’exégèses suscitées
par l’œuvre de Marcel Duchamp ?
Avec cette biographie filmée, Fabrice Maze réussit une
grande œuvre, vraiment. Il nous permet de suivre
l’anartiste dans la transformation radicale de son art
vers une esthétique novatrice et intransigeante, de
Jeune homme et jeune fille dans le printemps (1911) à
Étant donnés… conçu à partir de 1946 et seulement
dévoilé après sa mort survenue en 1968, selon le
souhait de l’artiste. Riche de nombreux documents
d’époque, films et témoignages exceptionnels ce documentaire, en deux DVD et un livret sous coffret, suit
une chronologie en trois chapitres entre France et
États-Unis principalement, complétée par une série
d’entretiens avec des proches (hommages en contre-
partie desquels manquent les contradicteurs). Jeux de
découverte scientifique enfantins et jeu d’échecs,
recherche de la quatrième dimension, principe de
hasard, l’Almanach Vermot côtoyant Nietzsche et
Stirner, calembours et contrepèteries, détournement
d’objets banals, théorie de l’infra-mince ont constitué
un fonds de pensée complexe chez Rrose Sélavy qui
estimait qu’en art «le choix est la chose principale.» Et
l’on sait l’influence de cette pensée sur l’art jusqu’aujourd’hui.
Iconoxydable et passionnant !
CLAUDE LORIN
Marcel Duchamp, Iconoclaste et Inoxydable
Editions Seven Doc, coll. DVD Phares, versions fr.,
angl., esp., 270 min., 23 euros
Marseille, ville de cinéma
En 1995, paraissait le n°173 de la revue Marseille,
dirigée par Pierre Echinard, consacré au cinéma. En
avril 2010, quiconque s’intéresse au 7e Art lira avec
enthousiasme le n°228 de cette même revue à l’iconographie soignée, et à la superbe couverture rouge.
De l’architecture des salles aux projets en cours, en
passant par les tournages, l’exploitation et la diffusion,
sans oublier les cinéastes qui ont marqué Marseille,
c’est à un tour de ville que nous convient les auteurs,
cinéphiles compétents et passionnés. Daniel Armogathe, directeur de la Cinémathèque, y évoque les
premières années du cinéma à Marseille, et les courtes
bandes comiques de Feuillade et son héros, Bébé, puis
Bout-de-Zan dans les années 1910, l’histoire des
Studios Paul Ricard, des Films du Soleil ou de l’INAMéditerranée.
Le «château» de Pagnol va devenir la Maison des cinématographies de la Méditerranée. Mais qui connaît le
passé de cette bastide érigée au XVe siècle, appelée la
Buzine par féminisation de Buzens, son propriétaire?
Georges Reynaud nous en conte l’histoire jusqu’à son
rachat en 1941 par Marcel Pagnol qui voulait en faire
une cité du cinéma !
Architectes, historiens, universitaires se succèdent pour
rappeler que Marseille, où se déroulent annuellement
quelque 200 tournages, est une vraie ville de cinéma,
même si, comme le souligne Jeanne Baumberger, la
situation du cinéma «Art et Essai» y est très fragile, et
paradoxale. Certains films ne passent pas à Marseille :
bon nombre de cinéphiles ont dû aller à Aix voir le
dernier film de Jane Campion ! Heureusement, le
dynamisme d’une dizaine d’associations de cinéphiles
amène à Marseille «une quantité impressionnante de
films et de réalisateurs», organisant tout au long de
l’année ces rencontres et festivals qui font la richesse de
l’offre cinématographique.
Au moment où sortait le n°173 disparaissait René Allio.
Pierre Murat lui rend hommage dans ce numéro, et
son film, le très émouvant L’Heure exquise a été projeté
le 8 avril au CRDP. Le n°228 salue la mémoire d’un
autre cinéaste, Paul Carpita, disparu récemment. Les
pages tournent, marquées d’étranges analogies…
ANNIE GAVA
Revue Marseille, 8 euros
Et Alger ferme les yeux sur le reste
Dans l’Algérie des années 2000, Djo, commissaire à la
retraite, reprend du service pour régler une dette, se
mettant du même coup sur le dos une affaire opaque
et sanglante. Autant le dire tout de suite, l’énigme de
ce court roman très noir, La prière du Maure, est moins
importante que l’atmosphère générale et que le côté
politique, très descriptif. Et c’est heureux, car l’auteur,
Adlène Meddi, qui n’est autre que le rédacteur en chef
d’El Watan Week-end à Alger, connaît son affaire.
C’est là la force de ce roman, qui lorgne aussi vers le
documentaire et la chronique politique, et se nourrit
également de réalité et fiction. Sous couvert d’une
enquête sur la disparition d’un jeune homme, Djo,
réactivant ses réseaux policiers, journalistiques et
amicaux, va se retrouver mêlé à une lutte sans merci au
sein des forces censées représenter la loi. Et l’on se
retrouve plongé au cœur de conflits bien réels, de
secrets politico-militaires qui éclabousseront jusqu’aux
pays étrangers… Personne n’est à l’abri de ces
turbulences, et l’on suit, au fil de chapitres de plus en
plus courts et angoissants, le sombre destin des
protagonistes dans une Alger qui n’est plus «la
blanche» mais bien celle où certains doutent «de
l’existence de l’aurore», et dans laquelle Djo est «un mort
qui s’est peut-être oublié chez les vivants.»
DO.M.
La prière du Maure
Adlène Meddi
Ed Jigal, polar, 15 euros
LIVRES
61
Indian saga
En 2006, Le chemin des âmes a révélé le talent de
Joseph Boyden. De l’épopée de deux jeunes Indiens
Cree pendant la 1re guerre mondiale, un objet est
l’écho dans le deuxième grand roman du Canadien,
Les saisons de la solitude. Il s’agit du vieux fusil rapporté
d’Europe par l’un des héros, père et grand-père des
deux protagonistes principaux de ce nouvel ouvrage.
Si la carabine joue évidemment son rôle d’arme dans
le récit, elle tient sans doute une autre place, plus
symbolique ; comme un lien entre les deux romans et
une figure concrète de la transmission, thématique
centrale de ces saisons de la solitude.
Quel héritage laisser à ses enfants quand on habite une
réserve au bord de la baie James, que la plupart d’entre
eux ne rêvent que de fuir pour un sud moins rude,
plus opulent, Montréal, New York ? Quelles traditions
de chasse leur enseigner quand ils préfèrent les
fastfoods et les supermarchés et qu’on n’est plus «rien
que des hommes et des femmes devenus vieux et fatigués
qui n’ont plus la force de lutter pour ce qu’ils aiment» ?
Boyden ne fait pas de grands discours mais la fiction
qu’il imagine est éloquente : deux monologues
alternent de chapitre en chapitre, celui de Will plongé
dans le coma et celui d’Annie, sa nièce, qui vient lui
parler chaque jour sur les conseils de l’infirmière. Deux
voix, deux itinéraires mouvementés, deux personnages
forts de leurs fragilités mêmes. Au chevet de son oncle,
la jeune femme comprend que sa place est parmi les
siens, tout près de la Moose River, et que la beauté cree
n’a que faire des sunlights. Une belle histoire de
famille, de peuple et de grands espaces.
FRED ROBERT
À noter : Joseph Boyden fera escale dans deux
librairies du département, le 26 mai à Gardanne
(librairie Aux vents des mots) et le 27 à Marseille
(librairie l’Attrape mots).
Les saisons de la solitude
Joseph Boyden
Albin Michel, 22,90 euros
Fragments
Titre énigmatique que celui-ci, Le Londres-Louxor…
ça sonne comme un voyage, une promesse d’exotisme
et d’aventures… Le prologue (n’est-ce pas théâtral ?)
nous détrompe bien vite, avec son sous-titre, Note sur
l’architecture du bâtiment, et l’entrée en matière sans
équivoque, «Le Londres-Louxor est un ancien cinéma
parisien.» Un autre cinéma Paradiso ? Non, ce n’est
pas encore cela. Après un prologue tout à fait fantastique -disparitions inexpliquées, lieux chargés de
mystère- se développe un roman étrange, aux voix
multiples, aux points de vue fragmentaires. La plume
oscille entre intériorité et détachement. Véritable
métaphore de l’écriture, le texte détruit ses personnages,
les reconstruit, fait intervenir des êtres inquiétants qui
semblent se nourrir de l’essence même de ceux qui leur
tombent entre les mains : les Vieilles, Parques contemporaines, viennent prélever des échantillons d’ADN ;
le patron du cinéma brouille les pistes ; les échos de la
guerre, la diaspora bosniaque, tissent une fine enveloppe à l’intrigue. Que sont devenus les tableaux volés de
la fondation Bührle dans laquelle Ariane, la sœur de
Esme, le personnage principal, a travaillé ? Qui est
vraiment Esme ? Prête-nom d’un écrivain, évanescente
dans une blondeur fabriquée, fragile et pâle, retrouvera-t-elle sa sœur, et prendra-t-elle enfin consistance ?
Ce roman attachant
pratique une esthétique magistrale de
l’effacement. Ainsi le
critique littéraire devient analphabète en
tombant amoureux !
Une musique sourd
curieusement de
cette écriture profondément
originale…
MARYVONNE
COLOMBANI
Vulgarisation ou encyclopédie ?
Les ouvrages sur la danse contemporaine ne sont pas
légion, hors quelques monographies. Philippe Noisette,
critique de danse aux Echos, aux Inrockuptibles et à
Danser, publie un ouvrage généraliste intitulé sobrement La Danse contemporaine, dans la collection Mode
d’emploi de Flammarion. L’ouvrage est attrayant par
ses couleurs, sa maquette, son prix aussi, raisonnable,
et ses photos pleine page très nombreuses illustrant
avec soin le propos. En tenant lieu parfois, tant elles
sont parlantes. Mais il n’échappe pas aux aléas du
genre : comment choisir, lorsque l’on veut balayer tout
un art, seulement 6 précurseurs, 30 chorégraphes
marquants, et une dizaine de dates-clefs ? Son livre
hésite donc entre l’ambition d’être un ouvrage
consultatif de référence -ce qu’il réussit par endroits- et
celle de constituer une porte d’entrée pour néophyte.
Les premières parties, intitulées C’est quoi ? puis Quel
intérêt ? et Ne dites plus… combattent quelques
préjugés mais, parce qu’elles gadgetisent les tendances,
ne semblent pas s’adresser au même lectorat que la
suite, plus pointue, de l’ouvrage. Un deux en un
préjudiciable !
AGNÈS FRESCHEL
La Danse
contemporaine mode
d’emploi
Philippe Noisette,
photos Laurent
Philippe
Flammarion,
24,90 euros
Londres-Louxor
Jakuta Alikavazovic
Editions de l’Olivier, 16,50 euros
62
LIVRES
LITTÉRATURE
Si belles, si seules...
Trois univers se côtoient sans se rencontrer dans un
petit immeuble de Madrid en 1960. Trois voix, trois
styles différents, trois femmes. L’une, Evita Perón, est
morte depuis 8 ans ! On ne le sait pas tout de suite, on
le comprend au détour d’une phrase, d‘une allusion ;
fantôme ou bonne fée, elle assiste à la vie de son exmari en exil avec sa nouvelle femme. Elle s’adresse à lui
comme s’il pouvait l’entendre, lui parle de ses étranges
rapports avec son embaumeur (morte d’un cancer à
33 ans, son corps a réellement été embaumé, puis
enlevé et caché). L’autre femme célèbre et bien vivante
dans la sensuelle beauté de ses 38 ans est l’Américaine
Ava Garner, déjà pas mal alcoolique, installée à
Madrid; elle se confie et raconte ses débuts au cinéma,
ses amours, à la jeune sœur de sa voisine. Sous forme
d’un long monologue, écrit en courts paragraphes
commençant par des minuscules et s’enchaînant sans
point, comme des vagues. La jeune fille, Carmina, ne
lui répond jamais, refuse de boire mais écoute avec elle
tous les disques de Frank (Sinatra !). La dite Carmina,
quant à elle, écrit son journal ; elle y raconte un
rendez-vous amoureux raté et ses souvenirs d’enfance.
Le tout se passe sous les yeux d’un jardinier qui remplit
le petit jardin de fleurs exclusivement blanches à la
demande d’Ava. Tant de blancheur isole de la vie et
des amours véritables. Laura Alcoba l’écrit sans
nostalgie, avec une cocasserie certaine.
CHRIS BOURGUE
Jardin blanc
Laura Alcoba
éd. Gallimard,13,90 euros
Des mouches et des hommes
Volantes, entêtantes, obsédantes, les mouches ressemblent à des notes de musique. Comme elles, elles
accompagnent l’existence des hommes, l’inspirent;
parfois même elles donnent un léger coup d’aile au
destin. De ce parti pris original est né Fly Blues. Tel est
le titre du thème inspiré à un trompettiste de jazz par
l’absorption inopinée d’un de ces diptères indiscrets.
C’est aussi celui de l’album scénarisé par Carlos
Sampayo, dessiné et colorisé par son complice Oscar
Zarate. Un hommage du tandem argentin au musicien Kenny Dorham (1924-1972), et plus largement
au jazz, à la musique et à tous les autres arts. Le récit,
mené par le chœur des mouches, se fonde sur le motif
central de Fly Blues, chaque épisode adjacent y tenant
sa partition jusqu’au flamboyant chorus final, comme
dans une session de jazz. C’est d’ailleurs de cela qu’il
est question au cœur de l’histoire, de l’enregistrement
du morceau, malgré toute une série d’obstacles et
d’imprévus, comme autant d’improvisations sur le
thème. En contrepoint, une sanglante affaire de meurtres filmés en direct et vendus sur Internet.
Sampayo a conçu une intrigue de série noire, chaotique, heurtée, dont les dessins expressionnistes de
Zarate accentuent la violence. Pourtant, l’impression
générale est celle d’une énergie communicative, qui
anime tous les personnages de créateurs mis en scène
dans cette BD inspirée. Musiciens, réalisatrice de films
d’animation, écrivain, leur enthousiasme explose en
un feu d’artifice de couleurs éclatantes. Comme une
métaphore de la puissance de l’art et des joies de la
création.
FRED ROBERT
Fly Blues
Sampayo et Zarate
éditions Dupuis, 18 euros
Les auteurs de l’album étaient présents à Marseille
pendant le festival CoLibriS
Du coq à l’âne
Tout commence par une histoire de panda. Ce
préambule alléchant introduit un livre étonnant qui
tient à la fois de l’encyclopédie naturaliste désuète et de
la chronique journalistique. Chaque vendredi sur
France Culture, Marc Kravetz esquisse le portrait
d’un animal qui illustre l’actualité. C’est cette revue
animalière qu’il publie, agrémentée de petites notices
techniques et de croquis réalisés par les élèves de l’Ecole
d’Estienne. Ce bestiaire fantaisiste aux illustrations
naïves a le charme des recueils de mirabilia de l’antiquité qui déclinaient avec émerveillement l’inépuisable
diversité de la nature. Avec ses stars, tels le springbok
qui symbolise l’histoire sud-africaine, le renard de feu,
héros de Kung Fu Panda et emblème de Mozilla, ou
encore Snowball, le cacatoès qui swingue sur You tube.
Avec ses divas capricieuses, comme Delores, pieuvre
trop prude, et avec ses parias, comme Xiguang l’élé-
phant héroïnomane. On se promène dans ce livre
comme dans un cabinet de curiosité aux dimensions
de la planète, réunissant de petits apologues d’un
nouveau genre, à la fois ludiques et désenchantés, qui
retraceraient en filigrane une histoire darwinienne à
rebours, où l’évolution des espèces buterait inlassablement sur la bêtise de l’homme qui les décime.
AUDE FANLO
Portraits d’animaux
Marc Kravetz
Editions du sonneur, 15 euros
À noter : Marc Kravetz sera présent pour des Escales
en librairie le 17 juin au Lièvre de Mars (Marseille)
et le 18 juin Au poivre d’Âne (La Ciotat).
RENCONTRES LITTÉRAIRES
LIVRES
63
Livres, débats et milongas…
Le festival CoLibriS
a commencé sous la pluie,
il s’est terminé dans une
chaleur estivale. Mais 5 jours
durant, l’ambiance est restée
muy caliente
Pour ces 3e journées du livre latinoaméricain à Marseille l’Argentine était
à l’honneur. Alors, forcément, le centreville et particulièrement le quartier
Réformés-Canebière ont vibré au son
langoureux et sensuel du tango.
La démonstration de danse initiée lors
de la soirée d’ouverture à la BMVR Alcazar s’est poursuivie à l’Academia del
Tango, durant deux soirées festives très
réussies. Dans ce lieu chaleureux, on a
pu admirer les évolutions des élèves de
l’école de tango, tandis qu’Oscar Zarate
croquait au fusain le bandonéoniste qui
aurait pu les accompagner et que, plus
tard dans la nuit, le romancier Ernesto
Mallo récitait des paroles de milongas à
la langue bien pendue. Les trottoirs de
Buenos-Aires ou presque…
… chapiteau là
L’accordéon gémissait également sous
la tente dressée près du kiosque des Mobiles, pour ponctuer les rencontres
© X-D.R
Tango-ci…
© X-D.R
littéraires qui s’y tenaient et inviter les
badauds à passer la tête, ce qu’ils n’ont
pas manqué de faire. Est-ce un effet de
la suavité du castillan d’outre Atlantique ? Est-ce parce que les auteurs invités
avaient tous de l’humour (même pour
évoquer l’exil ou la dictature), des anecdotes pétillantes à raconter et de la
chaleur humaine à revendre ? Quien
sàbe ? Chacun avait envie de rester là,
sur son pliant, à les écouter parler de
leurs parcours souvent compliqués,
qu’ils évoquaient avec légèreté. De leur
passion commune pour la littérature
aussi, qu’ils savaient partager.
Des invités captivants, des lectures, un
beau choix de livres à faire dédicacer
puis à déguster tranquillement chez soi
(merci aux librairies Prado-Paradis et
L’Ecailler pour leur sélection et leurs
conseils), CoLibriS 2010 a été une
vraie réussite. Et lorsque la dernière
chanson du jeune (et fort talentueux)
groupe toulousain LiuBila a été chantée, qu’il a fallu se séparer, tout plier,
tout ranger, on a senti flotter un vrai
regret que ce soit déjà terminé.
CoLibriS s’est déroulé
du 21 au 25 avril à Arles puis
à Marseille.
À lire :
James Canon ; Dans la ville des veuves
intrépides, paru au Livre de Poche.
Eugenia Almeida ; L’autobus
et La pièce du fond ;
édités chez Métailié.
FRED ROBERT
L’histoire comme un récit
Laurent Mauvignier © Hélène Bamberger
Quelle excellente formule que celle d’Ecrivains en
dialogue, qui permet d’authentiques rencontres avec
des auteurs remarquables ! Le public est invité à entrer
dans leurs mots au fil de leur conversation, avec ce que
cela suppose de spontanéité (apparente au moins), de
digressions, de formules comme des perles. On les approche aussi par les extraits que les lecteurs professionnels
font résonner. On les rencontre enfin durant le débat
qui clôt chacun des entretiens. Et lorsque les deux
invités se connaissent et s’apprécient (cela fait partie
des principes de base), qu’ils sont brillants (c’est fréquent), les soirées à la BDP ne sont rien moins que
magiques.
Ce fut le cas, une nouvelle fois, début mai, grâce à
Laurent Mauvignier et à Yannick Haenel. Acuité
théorique, vaste culture, profondeur des interrogations
et, en même temps sensibilité et modestie, les deux
amis -naguère corésidents à la Villa Médicis- ont
décidément beaucoup en commun. Et une parenté
dans l’appréhension et la transmission d’une mémoire
tue, refoulée. Qu’il s’agisse de la guerre d’Algérie dans
Des hommes ou de la Shoah au travers de Jan Karsky,
«l’histoire s’est emparée de nos voix narratives» dit Haenel,
qui voit là le signe d’une nécessité générationnelle,
qu’on retrouve d’ailleurs dans Zone de Mathias Enard
Jardin blanc de Laura Alcoba
et Flyblues, de Sampayo
et Zarate (voir p 60)
ou dans Démon de Thierry Hesse : celle de la confrontation au récit de l’histoire et aux choix narratifs à faire
pour «écrire ce qu’il est impossible de dire». Haenel vise
à «faire parler le silence de Karsky», Mauvignier à «incarner des inconnus», les appelés anonymes ; dans les deux
cas, des témoins qu’on n’a pas pu ou pas voulu entendre, auxquels les deux romans donnent superbement
voix. Les lectures de Michel Bellier et de Raphaël
France-Kuhlmann ont souligné la singularité et la
force de ces deux écritures d’aujourd’hui, qui sondent
l’opacité du monde pour tenter, par la fiction, de le
comprendre.
FRED ROBERT
À lire : Laurent Mauvignier, Des hommes, éditions
de Minuit ; 17,50 euros. Yannick Haenel, Jan Karsky,
éditions Gallimard ; 16,50 euros.
À venir : Écrivains en dialogue, le 8 juin à 18h30
à la Bibliothèque départementale Gaston Defferre
pour Des corps et des voix, un dialogue
entre Marie-Hélène Lafon et Xavier Bazot.
Des auteurs aux lecteurs
09 81 65 26 44
www.adaal.fr
64
LIVRES
RENCONTRES LITTÉRAIRES
Nobel âme
Vivre ensemble
Grosse affluence au Portail Coucou, à Salon, où avait
lieu la clôture de la 5e édition de Lire Ensemble le 30
avril. La manifestation prenait fin après quinze jours
de spectacles en tous genres (théâtre, lectures, ateliers,
balades littéraires…) sur le thème du voyage en
Méditerranée. Des résidences d’auteurs se sont
déroulées en amont de cette quinzaine, en février et
mars, avec les auteurs Régine Detambel et Patrice
Favaro, et les illustratrices Françoise Malaval et Ursi
Schmidt, et de nombreux ateliers y furent menés, avec
à la clé créations de carnets de voyage, illustrés ou pas,
en accordéon, avec peu ou beaucoup de mots… Le
rendu de ces ateliers étaient visible un peu partout ce
soir-là, exposés et consultables par tous, tandis que les
Musée Würth France Erstein © José Da Cruz
Pour la première édition de la manifestation nationale
À vous de lire initiée par le ministère de la culture, les
Écritures Croisées invitent le romancier, dramaturge,
metteur en scène et peintre Chinois Gao Xingjian,
qui reçut le Prix Nobel de littérature en 2000 «pour
une œuvre de portée universelle, marquée d’une amère
prise de conscience et d’une ingéniosité langagière, qui a
ouvert des voies nouvelles à l’art du roman et du théâtre
chinois.» L’artiste, déjà invité en 1995 lors de la
parution de son roman La Montagne de l’Âme
(éditions de l’Aube, 1999), revient présenter le travail
de création entrepris depuis l’attribution du Nobel et
évoquer ses projets futurs, que ce soit en littérature,
peinture ou cinéma. La Montagne de l’Âme sera le fil
rouge qui rythmera les quatre jours durant lesquels se
dérouleront les lectures publiques dans différents lieux
de la ville, librairies, galeries, bibliothèques... À noter
le temps fort programmé le mercredi 26 mai, à 18h à
auteurs et les apprentis auteurs étaient présents pour
en parler. Moments chaleureux où chacun put donner
son ressenti, raconter sa «grande aventure», ou, comme
pour Régine Detambel, dire l’aide «à mettre en voix
une parole qui a du mal à se dire…» et ce que cela
représente. Certains élus présents prirent aussi la
parole, et notamment Georges Virlogeux, Viceprésident d’Agglopole Provence, délégué à la culture et
Maire de Lançon, pour qui «la culture permet, entre
autres, d’intégrer un territoire et d’apprendre à se
connaître», ce qui rend Lire Ensemble si pertinent.
Aussi conclut-il, emballé par le succès de cette
quinzaine, «Il faut continuer !». Personne n’en doute,
d’autant que le tournant pris cette année laisse présager
Ces dames en noir
la Cité du Livre, avec la rencontre prévue entre Gao
Xingjiang, Noël Dutrait, professeur de langue et
littérature chinoises à l’Université de Provence et Guy
Astic, directeur des éditions Rouge Profond et
enseignant de lettres modernes et de cinéma au lycée
Paul Cézanne d’Aix, et la projection, le même soir, de
La Neige en août, épopée lyrique créée à Taipei en
2002 d’après un livret, une mise en scène et des décors
de Gao Xingjiang.
DO.M.
À vous de lire
Du 25 au 29 mai
Les Écritures Croisées, Aix
04 42 26 16 85
www.citedulivre-aix.com
d’un futur riche de rencontres et de productions
littéraires !
À noter que cette production sera rassemblée sous
forme d’Actes qui se trouveront dans les bibliothèques
du territoire, et que les nouvelles primées sont
consultables dès à présent sur le site d’Agglopole
Provence (www.agglopole-provence.fr).
DOMINIQUE MARÇON
Lire Ensemble s’est déroulée du 16 au 30 avril
sur le territoire d’Agglopole Provence
Pia Petersen © Jean-Jacques Le Berre
Quatre femmes de la région. Quatre
auteures de polar, mais pas seulement,
accueillies, à l’initiative de l’Écrit du
Sud et de Bruno Richard, pour une
table ronde animée par Patrick
Coulomb. Quand le roman s’habille de
noir, joli titre pour cette rencontre avec
Annie Barrière, Joëlle Gardes, Sylvie
Cohen et Pia Petersen, qui a été
l’occasion d’interroger le genre et les
frontières, souvent poreuses, qui
délimitent les littératures «noire» et
«blanche», comme on les nomme en
référence aux célèbres collections des
éditions Gallimard. De fait, les quatre
invitées ne voudraient sous aucun
prétexte être enfermées dans un cadre
strict. L’une, Pia Petersen, écrit des
romans très noirs édités dans une
collection blanche. L’autre, Sylvie
Cohen, publie des «mélos déjantés».
Annie Barrière, entrée dans le narratif
par le polar, est en train d’écrire un
roman tout court. Quant à Joëlle
Gardes, linguiste, grammairienne,
longtemps directrice de la fondation
Saint John Perse, elle s’essaie depuis peu
au policier ; avec un tel bonheur qu’elle
est en train de finir son 2e ouvrage du
genre.
Quatre façons de flirter avec le noir.
Mais pour toutes, la conviction que ce
genre mésestimé offre des territoires
féconds à l’imagination, et qu’il permet,
par la confrontation avec le mal, de
poser les questions cruciales.
FRED ROBERT
Cette rencontre a eu lieu le 30 avril
à l’Espace Ecureuil
À venir : Rencontre le 4 juin
à la BMVR Alcazar avec Didier
Daeninckx. www.lecritdusud.com
À lire : Joëlle Gardes, Le Charognard,
éd.du Rocher. Pia Petersen, Une livre
de chair, Actes Sud. Tueuse d’Annie
Barrière, BD par Damien May,
aux éditions Des ronds dans l’O.
LIVRES
65
Quelques ponts transatlantiques
Du 24 avril au 2 mai s’est déroulé à Cassis le 22e
Printemps du Livre, événement majeur de l’actualité
littéraire de notre région qui a su, au fil des ans, attirer
un public de plus en plus nombreux -l’entrée des
rencontres est gratuite- et le guider vers des débats de
qualité. Refusant d’être une foire aux livres de plus, et
revendiquant sa volonté d’être un lieu de questionnement affirmant «la passion d’écrire telle un pont tendu
entre deux rives», cette 22e édition avait pour thème les
rapports ambigus France-Amérique.
Les livres
La séance inaugurale, en présence de nombreuses personnalités dans la cadre féérique de l’hôtel des Roches
Blanches, permettait au Président d’honneur du jury,
Patrick Poivre d’Arvor, de récompenser l’essai sur
Madame de Staël de l’historien Michel Winock et, à
ce dernier, d’évoquer le rôle prépondérant de cette
femme romantique qui tenait salon et faisait l’opinion,
égérie adulée mais honnie d’un Napoléon misogyne
qui la redoutait et la réduisit à l’exil. Femme, la
notoriété l’a placée dans l’ombre de Chateaubriand et
de Benjamin Constant, même si elle a fait découvrir aux
lecteurs français les grands romantiques allemands, le
Sturm und Drang, Goethe et Schiller, à travers son
De l’Allemagne notamment.
Les Rencontres qui devaient se dérouler à Fondation
Camargo ont dû être déplacées en raison des intempéries à l’Oustaou Calendal, en présence de l’équipe
de la librairie Préambule.
Animées avec fougue, pertinence, irrévérence parfois,
par Serge Koster et Olivier Spire, elles ont été suivies
par un public fervent. Au fil des débats ? La Révolution américaine revisitée avec Johnny Bel-Œil de
Jérôme Charyn, histoire d’un soldat Noir et borgne
pendant la guerre d’indépendance, d’un traître attachant, sorte de pendant de Fabrice del Dongo, héros
d’un roman à la fois noir et burlesque où se côtoient
horreur et humour dans un savant mélange des genres
que n’auraient renié ni Laurence Sterne ni Shakespeare, soulignant le rôle majeur joué par les «éternels
oubliés» de l’hagiographie officielle et de la «vision
mythologique» des historiens de la guerre d’indépendance ; L’Amérique aux multiples facettes, celles des
Femmes et des Noirs, avec Quitter le monde de Douglas
Kennedy qui souligne avec bonhomie le challenge
difficile que constitue pour un auteur l’adoption d’un
point de vue féminin dans une œuvre; puis Science
sans frontières avec Tout le monde doit connaître cette
histoire, cosigné par le professeur Jean-Claude Chermann
et le journaliste Olivier Galzi. Le découvreur du virus
du SIDA, spolié du Prix Nobel au profit de deux de
ses «confrères», s’interrogeait avec humour sur le
hasard et la nécessité qui l’ont conduit à devenir
Nuit des sorcières
Étonnant de reprendre un tube de Johnny pour une
soirée poésie Retiens la nuit… Mais il s’agit de la nuit
des sorcières, la plus longue, et puis la poésie peut aussi
glisser de subtiles provocations… Le 30 avril, à
Barjols, devant l’étroite vitrine du célèbre ZIP 22, une
petite foule s’attroupait, attendait en bavardant la
tombée du jour. Au crépuscule, une voix d’enfant
s’écrie «ça commence !» et la magie peu à peu s’éveille…
De l’obscurité de la pièce apparaissent les ramures
d’une forêt imaginaire, branches torturées aux
couleurs d’arc-en-ciel, parmi lesquelles d’étranges
marionnettes passent, têtes aux yeux énormes,
chevelures dansantes… les sorcières hantent le paysage
crée par Günter Vossiek. Pour lui, il s’agit de la forêt
Installation de Günther Vossiek © Charles Gros
chercheur en vitro virologie -les vocations scientifiques
peuvent-elles s’amplifier en fonction d’une chute en
Vespa ?-, et sur les conditions octroyées en France aux
chercheurs, qui conduisent à utiliser un pot-au-lait
pour transporter le ganglion d’un malade qui permettra la découverte du virus. Un être peu rancunier
qui continue d’affirmer que «la recherche ne saurait être
qu’internationale» et persévère, sans guère d’aides
officielles, dans sa recherche obstinée d’un «badge»,
étape essentielle pour un hypothétique vaccin.
Les Arts
Au Centre culturel de Cassis, un hommage cinématographique était rendu à Clint Eastwood. La musique
était également de la partie avec un programme Mozart.
L’Orchestre de l’Opéra de Toulon Provence Méditerranée, sous la direction impeccable du jeune chef
Alexandre Piquion, commençait avec le concerto pour
violon en sol majeur, interprété avec sensibilité et
virtuosité par Laurence Monti, violoniste solo de
l’Opéra. Le concerto pour clarinette et orchestre en la
majeur, avec un Michel Portal souverain, tendait un
autre pont transatlantique entre les délicatesses
classiques et le jaillissement enfiévré du jazz. Et dans la
Symphonie en La Majeur l’orchestre déchaînait
l’assistance pour un ultime tabac !
JEAN-MATHIEU COLOMBANI
du Brocken dans le massif du Harz. C’est là que se
tenait le sabbat des sorcières de Faust. Lieu mythique,
et doublement : comme il est situé en Allemagne de
l’Est, Günter, vivant de l’autre côté du mur, ne pouvait
s’y rendre. Inaccessible, la montagne restait pour lui
«virtuelle et mystérieuse». Le montage musical de
Heiner Rath et Michel Baré accordait un caractère
surréaliste à cette performance. Les visages des
spectateurs se reflétaient dans les vitres, participaient
aussi de cette création, animée par ce jeu mouvant de
miroirs. Une version psychédélique de la forêt de nos
inconscients, Brocéliande et Merlin ne sont pas loin…
Une lecture de poème suivait, avec, bien sûr, entre
autres poèmes, l’évocation de la Nuit de Walpurgis de
Verlaine, du Roi des Aulnes de Goethe… Le troisième
mouvement de la soirée s’articulait autour du
concours de balais, présentation enjouée, pleine de
fantaisie, d’originalité, d’ingéniosité. Comment choisir
entre le «balai-niversaire», le balai qui fait tomber les
murs, le balai de celles qui furent brûlées parce qu’elles
ne balayaient pas avec, le balai danseur, le balais
timide? Esprit bon enfant, plaisir de partager les
mots… Autre facette de l’édition poétique affirme
Éric Blanco, le directeur de la Zip et des éditions
Plaine Page. La performance sur scène participe de la
publication. Qui a dit que la poésie moisissait dans les
antres perdus des bibliothèques ? En voici un magistral
et vivifiant contre exemple ! Succès : Retiens la nuit...
a été repris le 14 mai.
MARYVONNE COLOMBANI
66
PHILOSOPHIE
RÉALISME POLITIQUE | LIVRE
Idéalisme
du bouclier fiscal :
Platon est-il de droite ?
Il est de coutume de considérer les opinions de gauche comme un idéalisme : elles projetteraient sur le monde des notions
abstraites de justice auxquelles la réalité opposerait une
résistance farouche. À l’inverse, les idées de droite sont de coutume qualifiées de réalisme puisque opposant à cet idéalisme
la dure réalité des faits : il y a des riches et des pauvres on n’y
peut rien changer ; toute politique doit donc soutenir l’effort
des premiers à faire travailler les seconds.
Or la fiscalité de droite est un idéalisme. Qu’entendons-nous
par-là ? qu’elle considère ses idées indépendamment de la pratique : elle soutient que la baisse des charges des entreprises et
les économies d’impôts des riches seront réinvesties dans le
circuit de production, même si cela s’est toujours avéré faux.
Cet idéalisme est soutenu par un autre que la droite manie :
la liberté, qui se réduit en fait à la possibilité de s’enrichir quand
on est déjà riche. Toute analyse montrant que cette définition
réductrice de la liberté ne profite qu’à une minorité n’entame
en rien les principes. Ainsi pour la droite le droit se substitue
à la réalité. Puisque la liberté est principe de droit, peu importe qu’elle n’existe pas dans les faits.
Cet idéalisme est en fait plus absolu que l’idéalisme radical
de Platon. Celui-ci posait que les idées existaient indépendamment de la réalité matérielle : s’il n’y avait pas d’homme
ou d’arbre, l’idée d’homme ou d’arbre existerait bel et bien.
Idem de l’idée de justice dont l’absence d’exemple pratique
n’implique en rien l’inexistence de l’idée. À tout le moins y
a-t-il chez Platon une définition concrète de la justice, qui est
que chacun reste à sa place. Ce qui est, dans les faits, le fondement de l’ordre social de droite.
La justice est affaire de réalisme
À l’inverse le réalisme considère qu’une idée n’a aucune existence indépendante de la réalité ; c’est le vieux débat d’Aristote
contre l’idéalisme platonicien. On peut connaître ce monde
par nos expériences et notre réflexion. La connaissance est
donc toujours une connaissance de la réalité telle qu’elle est,
et la science consiste justement à généraliser à partir de nos
observations. De même la pensée de gauche s’enquiert de la
réalité de l’expérience pour définir et construire théoriquement autour de cette enquête. Les débats concernent alors
l’analyse contradictoire de l’expérience et des rapports de force
réels, et non idéals.
Un réalisme philosophique et politique se doit de revendiquer
une fiscalité élevée, garante d’un état protecteur faisant fonctionner un système par répartition, des services publics forts,
condition pour qu’une société fonctionne à peu près correctement. Les riches ne doivent pas payer parce que c’est idéalement
juste, mais parce que le fonctionnement social, d’après les
expériences réelles, se portent mieux à l’aune d’une fiscalité
élevée. La justice est affaire de réalisme.
La fiscalité n’est qu’un angle d’attaque parmi d’autres montrant qu’une politique de gauche est dans ses fondements
réaliste et une politique de droite idéaliste. Ainsi la gauche qui
accepte le libéralisme est idéaliste, et non réaliste comme elle
voudrait le faire croire.
RÉGIS VLACHOS
Recherche objective
Tout peut-il être objet de science ? La réponse négative, soucieuse d’humanisme, a l’avantage de balayer
les dangers fascistes d’une mise en équation de l’action
humaine. Il n’empêche que la science pourrait permettre à divers champs de la pensée, de l’histoire à la
philosophie, de produire des discours plus rigoureux.
Parmi les divers critères de la démarche scientifique, le
souci des faits est indiscutablement la première exigence : il serait inconcevable qu’un scientifique ignore
telle découverte majeure, alors que l’on admet qu’historiens et philosophes puissent ignorer des faits. Les
sciences humaines reproduisent souvent la pensée
dominante, et le monde intellectuel semble davantage
soumis aux assauts de la propagande que la population.
L’exigence d’objectivité, consubstantielle du combat
émancipateur, est la principale préoccupation de l’œuvre de Chomsky et de son dernier livre, choix d’articles
sur la nature humaine, la vérité et la liberté. S’appuyer
sur la science pour définir la nature humaine permettrait en effet d’en finir avec certaines balivernes, comme
la méchanceté ou le besoin d’un chef. Chomsky s’appuie donc, dans un premier long article, sur les acquis
de la linguistique, sa spécialité. Le langage est tout à la
fois une clé et un modèle pour une étude sur la nature
humaine : étudier le langage c’est étudier un système
de contraintes formelles. L’étude de ces contraintes
présente un triple avantage: mettre à jour les principes
objectifs de ce qui semble résister à l’enquête scientifique de l’homme ; comprendre qu’il n’y a pas d’actes
créatifs aux infinies possibilités sans un système de
contraintes formelles ; en finir avec l’idéologie de la
malléabilité infinie de l’homme, qui ouvre la voie à la
négation du principe constituant cette nature humaine, et qui est la liberté.
Sur cette dernière question et comme toujours avec
Chomsky, l’enquête philosophique va de pair avec
l’attention minutieuse aux faits. L’homme a-t-il besoin
d’être gouverné ? Les préjugés concernant le besoin du
chef et de soumission ignorent les faits pour conforter
la pensée dominante : l’auteur rappelle les nombreuses
expériences de coopératives ouvrières dont l’efficacité
était telle qu’elles durent être renversées. Par une analyse de la politique anarchiste en Espagne en 1936, il
montre l’efficacité pratique des politiques d’émancipation et leur supériorité d’adéquation avec l’idée de
nature humaine, à l’opposé du capitalisme de soumission qui est présenté comme allant de soi.
On peut conclure avec Bouveresse dans son indis-
pensable préface que toute recherche objective en
philosophie, histoire, dans le domaine des sciences
humaines, mène à des conclusions radicales. La vérité
est donc bien une question de courage !
R.V.
Raison et liberté
Sur la nature
humaine,
l’éducation
et le rôle des
intellectuels
Noam Chomsky
Préface de
Jacques
Bouveresse
Agone,
25 euros
LIVRE | AU PROGRAMME
SCIENCES ET TECHNIQUES 67
Technique ? T’es chnoque !
Souvenez-vous, chers Zibelecteurs, les temps
héroïques où unies Sciences et Techniques
naviguaient sur l’onde longue de cette rubrique.
Hélas, vers le 22e mois de son histoire, Techniques
tomba à l’eau, alors que les Sciences resplendiSSantes
survécurent. Le plus surprenant est d’avoir ignoré le
naufrage. Pourtant c’était en conscience que nous
avions embarqué les techniques à la proue de notre
rubrique ! Heureusement, fin 2009 parut le très érudit
ouvrage de Robert Halleux, Directeur de Recherches
au Fonds National Belge de la Recherche Scientifique
et Professeur à l’Université de Liège. Le Savoir de la
main, savants et artisans dans l’Europe pré-industrielle,
blasphème au culte de la déesse Science, est en effet le
premier ouvrage qui analyse de façon approfondie les
rapports épistémologiques et historiques entre sciences
et techniques. C’est la lecture de ce travail (que
pourraient vouer aux gémonies beaucoup de
mandarins) qui nous fit prendre conscience de la
disparition du mot «technique» dans le titre de notre
rubrique culturelle.
«De l’Antiquité à la Révolution Industrielle, ce n’étaient
pas les mêmes gens qui écrivaient des livres et qui
pratiquaient les métiers, les uns étudiaient la nature, les
autres la transformaient. Entre eux il semble exister une
cloison imperméable. En réalité, la faute en est aux
historiens des sciences et historiens des techniques qui
depuis longtemps se tournent le dos.» Pauvres historiens!
N’y a-t-il pas plus généralement une division -osons le
mot- de classe entre ceux qui définissent le travail et
ceux qui le font, le pratiquent ? Cette division entre
«intellectuels» et classe productive remonte en effet à
la plus haute antiquité. Le mépris de la tête pour les
bras et… ses mains. Et pourtant, comme le dit si bien
Aristote : «Anaxagore dit que l’homme est le plus
raisonnable des animaux parce qu’il a des mains.»
Notre civilisation spectaculaire revient sur les acquis
du matérialisme en refaisant marcher le monde sur sa
tête, en replaçant la définition imaginaire des choses
avant la forme de leurs pratiques. Alors tant pis si on
nous brûle, tout ce que j’ai appris c’est dans le rapport
dialectique entre ma pratique technique [manuelle] et
la théorie enseignée. Je tiens ce que je sais de ce que
j’étudie en écho à ce que je fais.
Mais lisez donc ce livre qui écrit bien mieux que moi
ce que je pense si haut, et Madame la Rédactrice en
Chef… je vous en conjure, rétablissez La Technique à
côté de sa sœur et amie La Science pour le plus grand
honneur et bonheur de la Culture zibelinienne.
Le savoir de la main
Robert Halleux
Armand Colin, 22,20 euros
YVES BERCHADSKY
Au Programme
Bio : divers cités
Institut de Recherche pour
le Développement, Marseille
04 91 99 92 00
www.ird.fr
Charisme éthique
hospitalière
Le 29 mai de 9h00 à 18h00 à la
Bibliothèque de l’Alcazar, les premières
Conversations de Salerne, rencontres
méditerranéennes autour du thème l’humain à part entière, Humanisation et
médicalisation en Méditerranée. Au cours
de cette journée organisée par de
nombreux centres hospitalo-universitaires du pourtour méditerranéen, on
débattra à coups de bâton interrompus
sur l’histoire et l’actualité de la tension
existant depuis toujours entre humanisation et médicalisation. Ces rencontres
tenteront de faire pencher le balancier
vers un équilibre dont l’homme serait la mesure. Elles
interrogeront la création et la culture comme contribution à restaurer le malade dans sa complétude, sa
singularité et sa sensibilité face son enfermement dans
la souffrance et les contraintes thérapeutiques. Une
manifestation qui donne l’occasion à l’Assistance
Publique-Hôpitaux de Marseille de débuter un
partenariat solide avec Marseille Provence 2013.
Entrée libre dans la limite des places disponibles.
Réservation recommandée.
Conversations de Salerne
AP-HM, Marseille
04 91 38 29 73
www.ap-hm.fr
Conversations de Salerne, illustration / Sabine Allard
Le cycle organisé par l’IRD dans le cadre de l’année de
la biodiversité se poursuit avec deux nouvelles conférences présentées dans la salle de conférence de la
Bibliothèque de l’Alcazar de 17h à 19h à Marseille.
Le 26 mai Des perturbations à haut risque !
par Jean-François Guégan, épidémiologiste. Et le 5 juin Voyage au cœur des
récifs coralliens par Pascale Chabanet,
biologiste marine.
Laser à quoi ?
Plusieurs laboratoires marseillais du
CNRS dégainent leur pisto-laser entre
la Bonne Mère et la Faculté SaintCharles à l’occasion des 50 ans de la
mise au point de cette technique. La
Société Française de Physique et la
Maison des Sciences organisent
plusieurs manifestations destinées à un
large public. L’événement «laser» sera
de mesurer la vitesse de la lumière par
des «tirs» de rayon laser vert entre le
centre scientifique de St-Charles et la
Bonne Mère les 4, 11, 18 et 25 juin de
la tombée de la nuit à minuit. Des
animations seront proposées sous le
trajet du laser au niveau du Vieux-Port,
du cours Estienne d’Orves et du
parvis de la gare Saint-Charles.
www.cnrs.fr/50anslaser
68
PATRIMOINE
PONT DU GARD | QUINSON | LES BAUX | LES SAINTES
Nature, Provence et
Curieuse conjonction direz-vous… Provence et nature, cela semble aller de soi, mais voilà
que notre région va chercher aux antipodes de quoi faire voyager votre été !
Les lieux patrimoniaux se parent de fêtes à venir, de rénovations, de derniers coups
de pinceau avant le début de la saison… pariant que chacun, d’humeur plus ensoleillée, prendra le temps de se promener, de s’aérer le corps et l’esprit… Nos pas nous
ramènent vers les lieux aimés pour leur beauté, leur intérêt, d’autant que la saison
nouvelle s’enrichit d’activités, d’expositions inédites. Ainsi, les retours n’impliquent
aucune monotonie…
Nature, art et pyrotechnie
Le Pont du Gard invite à une découverte de la nature sauvage et apprivoisée
© S. Barbier - A. Baie
Avec «les petites histoires de la garrigue», et des promenades guidées au cours desquelles vous êtes initiés aux
vertus des plantes. Le 6 juin est d’ailleurs une date à retenir, avec (à 14h30) un atelier qui présente les plantes
destinées à la teinture et à l’écriture à l’époque romaine. On peut même emporter le nuancier que l’on aura
fabriqué à cette occasion (activité familiale et instructive n’est-ce pas ?).
Le point fort du mois de juin sera cependant le spectacle donné par le Groupe F, Le pont dans tous ses
états (les 4, 5, 11, 12, 18 et 19 juin). Chorégraphies,
musiques, feux d’artifice, flammes, lumières, vidéo,
seront au rendez-vous pour évoquer le pont dans ses
différentes formes, tel qu’il a été, tel qu’il est, tel qu’il
sera ou tel qu’il aurait pu être… Bien sûr, les musées
archéologiques pour les grands et les enfants donnent
une idée plus rationnelle et tout autant passionnante
de l’histoire du monument, et il serait ridicule de se
priver de la visite ! À celle-ci, ajoutez la remarquable
exposition temporaire (du 28 juin au 3 octobre) ayant
Cathédrale australienne
La cathédrale d’images des Baux-de-Provence a choisi
cette année de nous emporter dans un long voyage
dans les mers du Sud. De la mer naissent des mondes
de couleurs et de formes extraordinaires, magnifiés par
les reliefs de la carrière des Baux. La mangrove établit
le lien entre l’eau et la terre, zone intermédiaire où tout
reste possible… puis la cité fantôme de Litchfield se
dresse, protégeant de ses formes impressionnantes les
grottes aux peintures rupestres. Un nouveau monde,
et pourtant si ancien, se dessine alors, celui des aborigènes, danses, rites, et ces œuvres aux lignes entrelacées
si évidentes et complexes, du «dreaming art»… chaque
signe devient symbole, et retrace les débuts du monde,
par la magie du Dreamtime, le temps du rêve… C’est
là que le Serpent Arc-en-ciel laisse ses œufs, énormes
rochers, abandonnés comme un jeu de billes géantes
en plein désert… Puis une autre civilisation s’installe,
le bateau du capitaine Cook accoste… la ville moderne de Sydney apparaît avec son opéra, le jazz, les
explosions de la nouvelle année… mais sur les murs
modernes survivent les dessins primitifs, marque
indélébile d’une histoire qui a tant de mal à s’écrire…
Les réalisateurs de ce remarquable montage (sons et
images), Jean Charbonneau et Dong Wei, ont recherché avant tout à composer «un voyage au temps des
rêves», un «retour aux sources», un hommage au peuple
aborigène. Un moment de magie et de liberté…
Lieu ouvert, la cathédrale d’images accueillera le 18
juin l’un des concerts du festival des Alpilles créé aux
Baux en 2002, celui de John Illsley, ex Dire Straits and
his Band.
Date à retenir, le 26 juin, avec l’embrasement de la
citadelle des Baux… Le site magnifié par une fête où
les Mireille et ses tambourinaires s’en donnent à cœur
joie ! M.C
Australia
Les Baux-de-Provence
04 90 54 38 65
www.cathedrale-images.com
Uluru © X-D.R.
pour thème Casanova forever. Reprenant le tempérament esthète du personnage, Rüdiger Schöttle,
galeriste et artiste allemand, a eu l’idée d’une œuvre
multiple composée de quinze réalisations juxtaposées
de 15 artistes dont lui-même. Chaque pièce est disposée à différentes hauteurs. L’ensemble constitue un
nuage dans lequel le spectateur peut se promener. Une
projection clôt cet itinéraire particulier… M.C
Le Pont du Gard
0820 903 330
www.pontdugard.fr
Miroir
de nature…
Bienvenue au château ! Le domaine du
Château d’Avignon a rouvert ses portes
Attention, ne le cherchez pas à Avignon, il se situe en
Camargue (seul inconvénient : les moustiques !) sur
la route des Saintes-Maries-de-la-Mer. Classé au titre
des monuments historiques en 2003, il a connu une
importante restauration de ses planchers, restitué dans
son intégralité au public, sa visite guidée dure 1h30. Le
domaine et le château forment un tout harmonieux
dans lequel se tissent de subtiles correspondances. La
nature se glisse dans les motifs de la décoration intérieure, les plantes osent leurs volutes dans la trame des
tapisseries, échos muets au paysage savamment orchestré du parc dans lequel la nature est mise en scène avec
art. Cette idée de la nature et de ses représentations se
retrouve dans l’exposition D’après nature qui durera
du 26 juin au 31 octobre : 27 artistes et designers livreront leur vision de la nature croisant leurs œuvres dans
un parcours qui établira des liens entre le dedans et le
dehors, une perception contemporaine de nos relations avec notre environnement. Le 5 juillet à 16 heures,
on aura le privilège de rencontrer le sculpteur américain Richard Nonas pour une séance de dédicaces.
Précédant cette exposition, une autre, du 15 mai au 13
juin, Espacés, lui servira de préambule (20 étudiants
des Beaux-Arts de Nîmes travaillent sur le thème de la
nature habitée, et sont confrontés aux conditions
réelles liées à la topographie, au climat…). J’oublie les
thés de l’après-midi, les journées patrimoine, les
concerts, les spectacles, les sorties consacrées à la biodiversité… Un domaine départemental d’une richesse
remarquable, un cadre superbe, une étape de choix !
Château d’Avignon
04 90 97 58 60
www.cg13.fr
Australie
Sciences, rêve et beauté
A deux pas des lacs et des gorges du Verdon, le musée de la
préhistoire de Quinson s’évade aussi en Australie, et présente
60 000 ans de culture Aborigène
Cette nouvelle exposition
temporaire, entièrement
bilingue anglais/français,
(du 15 mai au 15 décembre) est conçue en
partenariat avec l’ambassade d’Australie en France,
le Muséum d’Histoire
Naturelle de Toulon et du
Var et le Musée du quai
Branly.
La culture des Aborigènes, malgré les massacres
liés à l’arrivée des Européens au XVIIIe siècle est
«la plus ancienne culture
vivante durable du
monde» ! Animée par une
volonté d’exhaustivité, l’exposition s’articule autour
de trois pôles : scientifique ;
artistique (art contemporain des aborigènes) ;
ethnologique. Les datesclé permettent au visiteur
de se situer dans le mouvement de l’histoire. Une
étude des mythes fondateurs explique la pensée
aborigène, la composition
de cette société. Depuis le
«temps du rêve», où les
géants primitifs donnent
PP@Q16-1309_26guloiVpan-facsimile
naissance au monde, tout
s’orchestre : le rêve crée le
lien entre le passé, le présent et le futur. Certains personnages sont institués gardiens
des rêves et des lieux où ils sont nés… appréhension mystique du monde qui
instaure une relation particulière entre l’homme et la nature : plus encore que du
respect, c’est la reconnaissance d’un esprit de la matière elle-même. Les peintures
représentent les rêves et conduisent à des interprétations… dont chacun peut
ressentir la désarmante beauté. Objets, panneaux, photos, accordent, exposent
scientifiquement l’histoire géologique, biologique et anthropologique. Du boomerang à la ceinture d’écorce, de l’herminette au propulseur (Crocodile Dundee n’est
pas loin !), les instruments du quotidien racontent la vie des «habitants des origines».
Les animaux naturalisés, comme le dingo, l’ornithorynque, l’échidné, l’émeu, le
koala et le kangourou, ont pratiquement disparu de la surface du monde… Le
travail du cinéaste australien Jeff Doring apporte des témoignages sur la pensée
des Aborigènes, leur interprétation du temps des rêves, et sur l’origine des tribus du
nord de l’Australie.
Une exposition alliant peintures rupestres et créations contemporaines, qui accorde
une unité, un sentiment de la permanence et de l’évolution tout à la fois. Exceptionnel et passionnant ! M.C
Musée de la Préhistoire, Quinson
04 92 74 09 59
www.museeprehistoire.com
70
CINÉMA
LES RENDEZ-VOUS D’ANNIE | CANNES
Jusqu’au 1er juin l’Institut de l’Image à Aix rend
hommage à Éric Rohmer, rédacteur en chef des
Cahiers du cinéma, et fondateur avec Barbet
Schroeder des Films du Losange, l’un des piliers de
la Nouvelle vague même si son ton, plus littéraire,
d’un naturel un peu faux et si juste, sentimental
toujours, était sensiblement différent de ceux de
Chabrol, Truffaut et Godard.
Huit de la trentaine de longs métrages qu’il a
réalisés seront présentés : trois des six Contes
Moraux, La Collectionneuse, Le Genou de Claire, Ma
Nuit chez Maud ; quatre des six Comédies et
Proverbes, La Femme de l’aviateur, Pauline à la
plage, Les Nuits de la pleine lune, Le Rayon vert
ainsi que Perceval le Gallois, d’après l’œuvre de
Chrétien de Troyes.
Le 25 mai à 18h30, Charles Tesson, critique de
cinéma, fera une conférence sur l’œuvre du cinéaste
récemment disparu.
>
Institut de l’Image, Aix
04 42 26 81 82
www.institut-image.org
Du 26 au 30 mai se tiendra à La Ciotat le Festival du
Premier Film, destiné à faire connaître les tout
premiers films de jeunes cinéastes. Au programme
de cette 29e édition, 9 longs métrages en compétition
pour le Lumière d’Or, attribué par un jury présidé
par la comédienne Agnès Soral, 9 courts, un
hommage à Georges Lautner et une sélection du
film du patrimoine, restaurés. De nombreux invités,
réalisateurs, dont Georges Lautner, acteurs, producteurs, seront présents dans le berceau du
cinéma.
Association La Ciotat Berceau du Cinéma
04 42 71 61 70
www.berceau-cinema.com
Le 2 juin à 17h, au théâtre de la Minoterie, à
Marseille, le club Cinétilt propose Cour(t)s-y-vite!,
deux programmes de courts métrages sélectionnés
par une douzaine d’enfants de l’école La MajorCathédrale, Alexandra, Anaïs, Angelina, Assad,
Asmata, Faïnou, Haïtem, Hafoussoiti, Halima,
Melvin, Myrième, Tatiana et Younès, qui ont
visionné, tous les mardis soirs, pendant six mois,
une cinquantaine de films. Ils proposent ici leurs
préférés.
Association Tilt
04 91 91 07 99
http://cinetilt.blogspot.com
Le 27 mai à 20h, l’association Cinépage propose, au
cinéma Le Prado, Bug, réalisé en 2006 par William
Friedkin : Agnès vit seule dans un motel désert. Elle
est hantée par le souvenir de son enfant kidnappé et
redoute la visite de son ex-mari, un homme violent
récemment sorti de prison. Agnès s’attache peu à
peu à un vagabond excentrique, Peter. Leur relation
tourne au cauchemar lorsqu’ils découvrent de
mystérieux insectes capables de s’introduire sous la
peau.
>
Cinépage
04 91 85 07 17
www.cinepage.com
Bug de William Friedkin © Anthony Friedkin
Le genou de Claire d'Eric Rohmer
Les mardis de la Cinémathèque proposent le 25 mai
Top Hat de Mark Sandrich, une des comédies
musicales signées RKO, quatrième et délicieuse
collaboration du couple Fred Astaire et Ginger
Rogers. Le 1er juin, ce sera Le Salaire de la peur de
Clouzot, avec Yves Montand, Charles Vanel et des
camions pleins de nitroglycérine sur de cahoteuses
routes mexicaines…
Ces séances débutent à 19 heures.
Le 27 mai à 20h30, dans le cadre de la rencontre littéraire Gao Xingjian, dix ans de création après le prix
Nobel organisée par Les Écritures Croisées, l’Institut
de l’Image propose la projection de La Neige en
août, (sous-titres anglais), une épopée lyrique en
deux actes, dont les livret, mise en scène et décors
sont de Gao Xingjian. Celui-ci présentera le film.
Un écrivain, indifférent aux turbulences du monde,
voudrait entendre une chanson, La Neige en août,
chantée par une belle femme, le double plein de
sensualité de la nonne Trésor Infini chez qui
Huineng est venu livrer du bois et auprès de qui il
s’initie au bouddhisme…
Institut de l’Image, Aix
04 42 26 81 82
www.institut-image.org
Institut de l’Image, Aix
04 42 26 81 82
www.institut-image.org
>
La Cinémathèque de Marseille, CRDP
04 91 50 64 48
www.cinememoire.net
Partant du constat que le plus souvent, aujourd’hui,
on voit les grands classiques sur des écrans télé ou
des ordinateurs, Télérama associé à l’Association
française des Cinémas d’Art et d’Essai, l’Agence
pour le Développement Régional du Cinéma et
l’Association des Distributeurs de Films du
Patrimoine propose le festival Les Éternels de
Télérama.
Du 2 au 8 juin, l’Institut de l’Image présente 5 films
parmi les 25 : Les Vacances de Monsieur Hulot de
Jacques Tati ; L’Invasion des profanateurs de sépulture de Don Siegel ; Le Fanfaron de Dino Risi ; La
Vie privée de Sherlock Holmes de Billy Wilder et
Soldat bleu de Ralph Nelson.
Le 3 juin à 18h30 au cinéma Le Mélies, en collaboration avec le Réseau Santé Ouest Étang de Berre
et l’Équipe de Prévention en Santé Mentale du C.H.
de Martigues, aura lieu une projection-débat : Ils ne
mouraient pas tous mais tous étaient frappés de
Marc-Antoine Roudil et Sophie Bruneau, un documentaire qui dénonce magistralement les
souffrances endurées au travail.
Du 16 au 22 juin se tiendra la onzième édition de
Regards sur le cinéma israélien au cinéma Variétés
à Marseille. Films, rencontres avec des réalisateurs
invités et une soirée de musique à La Mesón.
04 91 53 40 46
www.judaicine.fr
Cinemelies, Port-de-Bouc
04 42 06 54 45
www.cinemeliesportdebouc.com
Le salaire de la peur de Henri-Georges Clouzot
Un autre Cannes
Du 21 au 25 avril, s’est tenue à Cannes la 7e édition du Festival International
du Film Panafricain : un programme alléchant avec une cinquantaine de
films, des expos, des concerts… Si les films sont bien là et certains
réalisateurs aussi, cette manifestation n’a pas vraiment trouvé son public. Le
samedi soir, après la projection du film de Frances-Anne Solomon, A Winter
Tale, qui aborde les problèmes de la drogue et de la violence dans la
communauté de Parkdale à Toronto, les deux chanteurs de Manbouss ont
mis beaucoup d’énergie pour animer la salle du Miramar, remplie au tiers.
Il est vrai que les projections des films se font en DVD, avec les risques que
cela comporte, et que les horaires ne sont pas toujours respectés.
Heureusement, la convivialité du Président, Eitel Basile Ngangue Ebelle, et
de ses collaborateurs de l’Association Nord-Sud Développement est
communicative, et fait oublier ces disfonctionnements.
Le Jury présidé par l’écrivaine Léonora Miano a récompensé Finding Lenny
de Neal Sundstrom, Harlem à Montmartre de Dante J. James pour les longs
métrages, Door to Door d’Ida Akesson pour les courts. Il a attribué le «Dikalo
de la paix» à Balles et Armes à Feu de Francesco Cafua.
A.G.
PORTRAIT D’A. CORNU | FESTIVAL REFLETS
CINÉMA 71
Des films d’aujourd’hui
pour penser demain
C’est avec conviction que Michèle
Philibert a ouvert le festival Reflets,
le 5 mai, au Cinéma Variétés, devant
une salle comble, remerciant tous
ses partenaires grâce auxquels le
festival, qui n’a pu se tenir en 2009, a
pu repartir d’un bon pied cette année. Et le public s’est embarqué
dans une belle Alfa Roméo, rouge,
pour un voyage d’Italie au Maroc
avec Shakira, un travesti, couturier
qui part aider Zina à se «recoudre»
une virginité. Corazones de Mujer de
Kiff Koosof aborde des sujets encore
tabous dans certains pays : mariage
arrangé, virginité obligatoire, travestisme, homosexualité ; l’image
gagnerait parfois à être plus sobre,
mais l’histoire est tantôt touchante
tantôt drôle et les comédiens jouent
juste, surtout Aziz Ahmeri.
Le lendemain, le voyage s’est poursuivi à Londres dans le sillage de
Greek Pete, un «escort boy» séducteur et ambitieux, qui rêve d’une
nomination aux «World Escort
Awards» de Los Angeles. Andrew
Haigh a su approcher avec sensibilité et lucidité ces garçons qui ont
trouvé ce «métier» pour se sortir de
leur milieu. Puis la salle, en très
grande partie masculine, a laissé
place à un public essentiellement
féminin pour la comédie de Jamie
Babbit. The Itty Bitty Titty Committee
raconte les péripéties d’un groupe
de féministes lesbiennes, le CIA
(Clits In Action), qui a décidé de
mener des actions spectaculaires
pour lutter contre le machisme et la
société patriarcale. On se laisse
porter par une musique tonique et
des scènes légères, ce qui n’est pas
désagréable après le film précédent.
La soirée s’est terminée par une
carte blanche à Bernard Latarjet, ex
délégué général de la Cinémathèque
française, aujourd’hui Directeur de
Marseille-Provence 2013, avec la
projection du Satyricon de Federico
The Itty Bitty Titty Committee de Jamie Babbit
Fellini, une adaptation de Pétrone.
Comme s’il l’écrivit «la variété
prévient l’ennui»; au Variétés, avec
Reflets, nul ne s’ennuie.
ANNIE GAVA
NOM : Alexandre Cornu
Profession : producteur
Signes particuliers : aime écouter et accompagner
Les images ? Alexandre Cornu y est tombé
dedans tout petit ! Dès cinq-six ans il fréquente
les plateaux, jouant dans des publicités. Plus
grand, toujours très attiré par ce milieu -il s’est
pourtant promis de ne pas suivre les traces de son
père Jacques-Gérard-, c’est un peu par hasard
qu’il se retrouve dans la production de films.
Après avoir fait son service militaire à l’ECPA et
avoir acquis les bases théoriques pour devenir
assistant réalisateur à l’ESEC, en 1987, il fonde
avec des amis, à Avignon, une société de
production, Les films du tambour de soie, dont
le nom vient d’une œuvre théâtrale de Mishima,
avec l’envie de produire des films «hors cases». Il
est le seul à savoir taper à la machine : c’est lui
qui montera les dossiers, qui aidera à la réécriture
et cherchera les financements, permettant ainsi
de passer de l’intention d’un film, quelques lignes
sur une feuille blanche, à un vrai projet
cinématographique. C’est lui.
Dès lors, Alexandre réalise que c’est une grande
responsabilité, un vrai travail. Il suit des stages de
formation professionnelle et rencontre des
producteurs, tels Jacques Bidou, un de ses
«maîtres». «Avant tout, il faut savoir écouter, ne
pas prendre la place du réalisateur ; il faut l’aider
à aller jusqu’au bout de son projet artistique. Il
faut aussi lui permettre de trouver l’argent, donc
être un fin stratège auprès des chaînes de télé,
par exemple, sans que le film y perde son âme !»
Si une chaîne prend le projet, on a 90% de
chances d’obtenir l’aide à l’écriture ou au
développement, ce qui permet à l’auteur de
continuer à travailler, de commencer les
repérages.
Alexandre Cornu © X-D.R
«Je suis le porte-voix : je peux dire en quatre
phrases ce qu’est le film. Le réalisateur qui,
souvent, n’a pas assez de distance, peut être long,
voire confus.»
Ce travail est un vrai travail d’équipe, et quand ça
marche, c’est sur du long terme : Alexandre
Cornu a travaillé plusieurs années avec JeanPaul Fargier ou Alain Bergala. Il vient de produire
le troisième film de Lise Gabelier.
Si d’abord il a produit des courts métrages de
fiction, très vite il leur a préféré le documentaire.
En 1993, à Marseille, associé à Dominique
Gibrail, il a développé une ligne dirigée vers le film
sur l’Art, en partenariat avec les Musées
nationaux.
Aujourd’hui, il travaille en collaboration avec
Muriel Sorbo. Pour la chaine Voyage, dans la
série des Villes Mythiques, il a produit Alger et
Palerme ; en projet, Istanbul, Katmandou et
Djibouti. Le long métrage d’une réalisatrice qui
vient du documentaire et va traiter en fiction un
sujet personnel qu’elle avait abordé dans son
premier court, il y a dix ans, est aussi en
préparation. Des projets dont il parle avec
passion.
«Le film dont je suis le plus fier ? Le prochain,
bien sûr !»
ANNIE GAVA
72
CINÉMA
LES VARIÉTÉS | L’ALHAMBRA | P. KANÉ
Le poids des fantômes
Marseille, 1941. Le seul port français
encore ouvert sur l’espoir d’échapper aux nazis. Des centaines de juifs
anonymes, d’artistes célèbres, d’apatrides, d’opposants politiques mis
sur la liste noire de la Gestapo, transitent dans les petites pensions des
vieux quartiers. Louis Polonski,
étudiant la médecine depuis plusieurs années en France, attend sa
mère et ses deux sœurs que son
oncle doit faire sortir de Pologne,
pour s’embarquer vers l’Argentine.
Les inserts de leur arrestation dans
le ghetto de Lodz ne laissent pas
d’espoir au spectateur. Mais Louis
fait disparaître dans sa poche la
lettre confirmant l’échec de la tentative, et apparaître devant lui le trio
de femmes toutes en robes et chapeaux, encombrées de valises sans
poids, tendres et insupportables, le
reproche prompt à leurs lèvres violemment rougies. Louis n’a pas été
«un bon fils», «un bon frère» : ingrat,
il les a oubliées.
Pascal Kané signe ici un film étrange,
flottant entre réalisme et fantastique
sans le budget de ses ambitions.
Avec son directeur de photographie
Wilfrid Sempé, il théâtralise une
ville kafkaïenne gagnée par l’ombre,
l’éclaire comme un tableau d’Edward
Hopper, joue sur les contrastes et la
pâleur lunaire du visage de Louis
incarné par l’excellent Rudi Rosenberg. Les yeux très bleus du jeune
homme semblent errer avant de se
poser sur la belle et pragmatique
Rosa (Fanny Valette), chanteuse de
revue dont il tombe amoureux. Dessillant à jamais ses paupières, elle
le sauve de sa folie. Très documenté,
convoquant les figures historiques
Je ne vous oublierai jamais de Pascal Kané
de Varian Fry, de Sylvain Itkine -homme de théâtre, de cinéma, incroyable
initiateur d’une coopérative de friandises autogérée-, je ne vous oublierai
jamais est avant tout une œuvre personnelle inspirée du roman familial
du réalisateur qui y «objective» ses
propres fantômes, la culpabilité des
survivants de la Shoah et leur deuil
impossible.
ÉLISE PADOVANI
Entre les murs d’Algérie
«Recherchez le savoir, et s’il le faut, jusqu’en
Chine». C’est de ce hadith du Prophète Mahomet
que le documentariste Malek Bensmaïl a puisé
son titre, La Chine est encore loin, mais aussi saisi
l’occasion d’un état des lieux de la transmission
du savoir en son pays, l’Algérie. Et si le constat
peut paraître amer, le ton lui ne souffre d’aucun
pessimisme. Prenant pour centre névralgique de
son film une classe de l’école d’un petit village
chaoui, berceau de la révolution algérienne,
Bensmaïl et son cinéma d’observation mettent en
lumière les blocages d’une société. Tiraillée entre
un passé colonial étouffant, la place grandissante
de l’enseignement coranique et une politique
d’arabisation aveugle qui piétine langues et
cultures régionales, ici le berbère, la jeunesse
algérienne et son système éducatif semblent être
dans une impasse. Mais là où certains clôtureraient leur propos devant tant d’obstacles, Bensmaïl
laisse sa caméra filmer, évitant soigneusement la
caricature ou la recherche de coupables. Et face
aux somptueux décors des montagnes des Aurès,
aux sourires et à la malice de ces enfants, à
l’abnégation de leurs deux professeurs, à la fierté
d’un peuple aussi, il ne peut que sauter d’un pied
sur l’autre, et nous avec, entre juste inquiétude et
fol espoir. «La société algérienne est bloquée…
mais il y a une énergie» semblait résumer Malek
Bensmaïl lors de la présentation du film au
cinéma Variétés, organisée en partenariat avec
AFLAM.
REMY GALVAIN
La Chine est encore loin de Malek Besmaïl
Jeux de miroirs
Projeter dans la même soirée Suite parlée de Joël
Brisse et Marie Vermillard et Nénette de Nicolas
Philibert, quelle drôle d’idée ! Et quel rapport
établir entre un documentaire animalier sur la
célèbre orang-outan du Jardin des Plantes, filmée
derrière la vitre épaisse de sa cage, et 23 souvenirs enfouis, racontés par 23 comédiens assis
seuls face à une caméra ? Selon Jean-Michel
Frodon, présent ce mercredi 26 avril à l’Alhambra,
une même réflexion sur le hors champ, l’invisible,
le trouble ; une même volonté d’inviter le spectateur à fabriquer ses propres émotions sans les lui
imposer ; un même travail sur la représentation.
Ainsi à partir d’un dispositif apparemment simple
-absence de contrechamp, frontalité des plans,
disjonction entre son et image-, Nénette envahitelle l’écran de son grand corps sculptural et roux
dont on ne sait ce qu’il sent et du mystère de ses
yeux dont on ne sait ce qu’ils voient. Indifférente,
absorbant ou renvoyant infiniment la projection de
nos fantasmes. De même sur fond uni, sans
décor, à distance de confession, les interprètes de
Suite parlée, front à la caméra, font-ils naître, hors
cadre, en chacun de nous, de petits films intimes.
Shirin d’Abbas kiarostami saisissant le visage de
spectateurs devant un écran complète la proposition articulée à une exposition photos sur le même
thème, prévue pour le vingtième anniversaire de
la réouverture du cinéma de St Henri. Mettre en
résonance des univers cinématographiques aux
démarches communes: le projet de l’Alhambra
rappelle ici que la richesse d’un film vient aussi
de ce qu’en font ses récepteurs.
ÉLISE PADOVANI
FONDATION VAN GOGH | CAC ISTRES
ARTS VISUELS
73
Entre ses murs
Renouvellements à la tête
de la Fondation Van Gogh,
et nouvel accrochage
Un certain sentiment de la maison guide la fondation, en écho au projet du peintre de fonder une
maison d’artistes en Arles : «Il y aura pour loger
quelqu’un la plus jolie pièce d’en haut que je chercherai à rendre aussi bien que possible, comme un
boudoir de femme, réellement artistique.» Chez moi
Pour cette première exposition depuis les changements survenus au sein de l’Association pour la
Fondation Van Gogh*, sa nouvelle directrice Mary
Gruber a confié le commissariat à une structure
externe, Le Factotum, spécialisée dans les projets
culturels. «Avec Nathalie Vo, nous avons conçu une
sélection subjective d’œuvres en correspondance
avec le désir d’une maison d’artistes, un véritable
lieu où s’établir qu’avait rêvé Van Gogh pour Arles»
précise Justine Flandin.
Exit les évènements dramatiques comme l’oreille
coupée pour une présentation apaisée. Nous retrouvons les éléments de la mythologie van-goghienne :
la chambre (la photo amusée de Fiodor Cyriel Buis,
une vision plus littérale de Larry Rivers), le fauteuil
(un César arachnéen), la chaise (un David Hockney
un peu ostentatoire), les sobres brodequins (Lucien
Clergue), la combinaison des deux (Fernando
Botero), la pipe, mais aussi la lumineuse couleur
(Jan Voss, Jean-Jacques Surian) ou l’écriture (le
palimpseste pictural en filigrane de la chaise par
Jean-Paul Pancrazi en correspondance avec l’importante littérature du Hollandais).
Plusieurs œuvres s’échappent de la représentation
ou de la picturalité pour nous y ramener autrement.
de gauche à droite Cesar, Botero, JP Pancrzai, D Hockney © J Flandin
L’étonnante condensation en une seule touche quasi
achrome de Lee Ufan contraste avec l’image récurrente du Vincent vibrant de couleurs. En photographie,
certaines propositions ouvrent d’autres champs
distanciés : le corps et la nature en sereine communion (Arno Mikkinen), le flux animiste du végétal
(Lu Lubroth), l’éblouissement (Bernard Faucon).
Obstinément énigmatique la lampe torche de Jasper
Johns. Devant être sous peu restitué à ses ayants
droit, le Bacon sera remplacé par un Rauschenberg.
Pour un renouveau
Marc Brunier-Mestas, Une valse à 3 temps, installation murale pour le Cac Istres, 2010 © Zibeline/C Lorin
La technique ne fait pas tout.
Au CAC d’Istres Marc Brunier-Mestas
réinvente la tradition et le métier
de graveur pour s’évader hors cadre
sur les murs
CLAUDE LORIN
Pour la saison estivale, un accrochage renouvelé est
prévu en attendant les projets annoncés. Plusieurs
axes sont envisagés comme l’ouverture à la jeune
création, des résidences d’artistes, le développement
de partenariats et médiations : ainsi le travail déjà
engagé par la jeune artiste Pauline Fargue avec les
élèves en classe d’arts plastiques du collège Saint
Charles. Le déplacement de la fondation dans les
De la page au mur
murs libérés par la Banque de France a été confirmé par le maire, Hervé Schiavetti, le jour du
vernis-sage. Choix nécessaire en regard des
contraintes du Palais de Luppé dont une partie du
financement sera apportée par Luc Hoffmann,
président de l’as-sociation, dont la famille est
désormais à Arles avec le projet des Ateliers Sncf via
Maja Hoffmann, sa fille, et la Fondation Luma.
Vincent devrait se sentir comme à la maison. Verrat-il un jour en Arles une de ses œuvres entre ses
murs ?
Le sentiment de la maison
jusqu’au 27 juin
Fondation Van Gogh, Palais de Luppé, Arles
04 90 49 94 04
*création d’une nouvelle association, l’AACFV
(association pour l’aide à la création de la fondation
Van Gogh)
Comment extirper la gravure de la
catégorie des arts graphiques et de sa
restrictive connotation technique ?
Formé à ce média traditionnel et
maîtrisant ses arcanes, Marc BrunierMestas renouvelle le genre en
pratiquant principalement la linogravure, appliquée sur papier mais aussi
carton ondulé ou planches de
cagettes. Rappelant Frans Masereel
ou Ernst Ludwig Kirchner et les
expressionnistes allemands, il cultive
un regard critique et distancié sur son
époque, sarcastique et cocasse.
Cette Valse à trois temps rythme les
trois étages du musée en commençant par le premier temps, celui de
l’enfance. Surprise : la gravure intègre
l’objet et devient tridimensionnelle,
naïve et amusée. Dans l’esprit Dada
ou surréaliste, voire comme dans certaines formes de poésie contemporaine,
l’image et le mot s’interpellent et
ouvrent le champ libre à l’interprétation. Un portrait mi-humain
mi-canard se redouble de l’inscription
«C. A. N.» deux fois : pense-t-on au
coin-coin de la cane, au frenchcancan ou au récent «Yes we can» ?
Autant d’ouvertures possibles mais la
plupart du temps l’image se passe de
l’écrit.
Le travail de Marc Brunier-Mestas se
joue de ces procédés à significations
multiples avec une grande économie
de moyens. Chaque image nécessite
alors une attention particulière
comme dans cette série d’environ
sept cent cinquante formats 8x8cm,
conçue sur «le principe d’une
idée/une image par jour, à quelques
uns près». Il reste deux étages à
parcourir d’un œil et des deux autres.
CLAUDE LORIN
Une valse à trois temps
Marc Brunier-Mestas
jusqu’au 30 juin
Centre d’art contemporain
intercommunal d’Ouest Provence,
Istres
04 42 55 17 10
www.ouestprovence.fr
74
ARTS VISUELS
PRINTEMPS DE L’ART CONTEMPORAIN | MUSÉE CANTINI
Deux
musées
dans la ville
It's like a jungle..., Matthieu Clainchard, Friche Belle de Mai/Triangle (vue partielle), 2010 © Zibeline/C.Lorin
Le Printemps de l’art contemporain
confirme avec cette deuxième
édition le bien fondé et la nécessité
d’une telle initiative
contemporaine, que plaquer la recette Bilbao ou Metz
à Marseille serait une ineptie pour une excellente
raison : la cité phocéenne possède deux musées, le
[mac] et un autre éclaté dans la ville, porté par des
initiatives singulières, professionnalisées mais non
normalisatrices, par lesquelles sont passés des
artistes confirmés. Une dynamique spécifique dont
on doit tenir compte pour l’avenir.
En rassemblant à La Friche une foule croissante de
visiteurs, la soirée d’inauguration a donné un signe
fort quant à la montée en puissance de l’évènement.
Sur le toit terrasse le groupe Dunes proposait une
installation visuelle et sonore un peu aride, dans la
galerie la questionnante expo de Matthieu Clainchard
et invités, à la Cartoucherie la stupéfiante performance Squelette de Fouad Bouchoucha, aux Grandes
Tables on pouvait voir ou revoir les vidéos Inferno de
Marie Bovo en buvant un verre et échanger ses impressions. Lesquelles ne manquaient d’évoquer la
place de l’art contemporain dans la seconde ville de
France, sa fragilité, mais aussi l’incroyable désir
renouvelé d’y survivre après la disparition des galeries Pailhas, VF galerie, Athanor, RLBQ en sursis,
l’arrivée de nouvelles Saffir, GAD, La 3e Rue, Rétine
le Lieu, et le [mac] en apnée. On pouvait entendre
qu’un musée ne peut fixer à lui seul la création
C.L.
Court circuit
Quartier Longchamp-Belle de Mai : Wilson Trouvé
présente trois œuvres à la galerie Porte-Avion dont
une réalisée in situ (Black canvas), fruit de d’une
« recherche de l’épure avec une économie de moyens».
Par choix, non par défaut. Avec Reflecting girl et Baroque broken lines, l’ensemble, d’une belle ampleur,
résulte de sa volonté de s’épancher «au-delà des
genres convenus de la peinture et de la sculpture».
Rue Consolat, au Buy-Sellf Art club, Yann Géraud
introduit sa pièce monumentale White Spirit / Peinture noire par ce texte prononcé par les esclaves au
moment de leur conversion au catholicisme : «Oui
White Spirit/Peinture noire, Yann Geraud, Buy-Sellf Art Club 2010 © X-D.R
de toutes mes forces je renonce». Puis invite à circuler entre 1 sculpture grillagée et 4 peintures sur
bois qui font écho à la circulation de la pensée, à l’affrontement entre White et Black, à la domination de
la matière sur la pensée.
En résonance avec sa performance-lecture poétique
et sonore, Anne Karwala installe à la Galerie Où sa
Vitrine poésie Part(s) & qui donne à lire au passant,
dans un entrelacs de graphes et de surimpressions,
l’accroche INDIFFÉRENCE CERTAINE en lettres
majuscules.
Seule la galerie Smp a fait le choix de l’accrochage
collectif avec 10 artistes dans Son Filetage mord dans
la matière et sa tête tient l’assemblage #2. Et voilà
le travail. Un titre chausse-trappe pour s’interroger
sur «le bricolage dans l’art, une résurgence de la
culture ouvrière ?» et développer discours théoriques et approches ludiques du bricolage.
M.G.-G.
Le Printemps de l’art contemporain, Marseille
www.marseilleexpos.com
Maintenance permanente
Les musées français assurent trois missions
principales : collectionner, conserver, diffuser. Le
musée Cantini s’acquitte de ce dernier point avec
une présentation abondante d’œuvres dignes
d’intérêt, mais sans grande âme. Afin de profiter de
la période couverte, du Fauvisme à César, on aurait
apprécié diverses médiations spécifiques - en plus
des visites commentées et ateliers habituels, et du
papier d’accompagnement format A4 - mettant en
évidence l’importance de certaines œuvres dans la
collection (Jardin d’ocre léger d’Olivier Debré), leur
compréhension dans le mouvement artistique
d’appartenance (les Dufy précubistes) et l’histoire de
l’art plus généralement. Ainsi les pièces du groupe
Gutaï ne peuvent à elles seules signifier toute leur
démarche ; il aurait fallu rappeler le moment où la
Arman, Tubes de gouaches-azurs, 1968 © Jean Bernard
Le musée Cantini propose un nouvel
accrochage de ses collections pour
patienter jusqu’à la rentrée
villa Air-Bel à Marseille est le refuge de nombre de
surréalistes lors de la seconde guerre mondiale ; et
montrer comment les créations majeures (Klein)
s’inscrivent dans les avant-gardes… Le choix est
ample, mais le propos patrimonial est sans surprise.
En situant notre attente entre un passé mémorable
et un lendemain qui devrait chanter en 2013, exiget-on trop des Musées de Marseille ? L’exposition de
rentrée célèbrera le centenaire de la naissance de
l’écrivain et poète surréaliste Jacques Hérold. Son
ouverture coïncidera avec la date de naissance de
l’artiste le 10 octobre 1910. Argument, espérons-le,
de bel augure !
CLAUDE LORIN
Picasso, Dubuffet, César…
Musée Cantini, Marseille
04 91 54 77 75
www.marseille.fr
MUSÉE D’ART TOULON | LES ARTS ÉPHÉMÈRES
ARTS VISUELS
75
Fascinations
d’Orient
Un an après sa réouverture, suite à
des travaux de ravalement des façades
et des sculptures de la galerie vitrée, le
Musée d’art de Toulon poursuit la
valorisation de sa collection d’art
moderne et contemporain
L’Algérie et l’Egypte, Vincent Courdouan et ses
contemporains provençaux est le deuxième
rendez-vous du Musée d’art de Toulon avec sa
collection, après Paysage vidéo qui inaugurait ses
habits neufs. Selon un principe simple : faire
dialoguer ses œuvres avec les prêts de fonds
privés et publics. Du coup Courdouan n’est plus
seul (le musée lui avait consacré une rétrospective de premier plan en 2000), mais accompagné
d’artistes fascinés par l’Orient. Notamment Félix
Ziem son contemporain qui, comme lui, a effectué
deux voyages, l’un en Algérie l’autre en Égypte, à
quelques années d’intervalle. «Des artistes si
proches et si différents qu’il était intéressant
justement de rapprocher» explique Brigitte
Gaillard, Conservatrice du Musée d’art.
À l’heure où l’on fête le bicentenaire de sa naissance à Toulon, le Musée a choisi de valoriser ses
talents de paysagiste tout en montrant sa différence avec l’École de Marseille. Car entre ses
dessins et pastels datés du jour de ses voyages, et
ses huiles réalisées postérieurement en atelier,
son approche de l’Orient diffère : l’une vécue, en
prise directe ; l’autre rêvée, imaginaire, voire
Vincent Courdouan, Le canal Mahamoudieh, collection Musée d'art de Toulon © X-D.R
fantasmée… L’exposition invite ainsi à des allers
et retours : d’un tableau à un dessin de Courdouan qui représente parfois la même scène (Le
canal Mahamoudieh à Alexandrie, entre autres) ;
et d’un artiste à l’autre autour d’un même sujet,
comme La Caravane vue par Huguet qui opte
pour une palette chromatique vive tandis que
Lauret privilégie un camaïeu gris-beige. Une
démarche qui démultiplie les angles de vue sur
les canons du 19e siècle, les thèmes en vogue
(petits métiers, fantasia, marchés, felouques,
mosquées), les variations subtiles des techniques
(huiles sur toile, sur bois, sur papier). Et, surtout,
révèle une vision sublimée de l’Orient par les
artistes occidentaux de cette époque.
L’Algérie et l’Egypte, Vincent Courdouan
et ses contemporains provençaux
jusqu’au 27 juin
Musée d’art, Toulon
04 94 36 81 07
Le Musée d’art lance un avis
de recherche aux collectionneurs en vue
d’une exposition consacrée à François Nardi
(1861-1936) en mars 2011…
MARIE GODFRIN-GUIDICELLI
En pleine lumière
enfants, déficients visuels et étudiants en cours
préparatoire au concours d’entrée en école d’art).
C’est dire si Les Arts éphémères sont une
formidable émulation auprès des participants qui
Oeuvre de Marianne Petit, Atelier public La Sauvagère © X-D.R
Au cœur du Parc de Maison Blanche (Marseille
9e), le festival Les Arts éphémères rassemble les
propositions plastiques issues des Ateliers publics de l’ESBAM et les œuvres des artistes
sélectionnés* par Thierry Ollat, directeur adjoint
du [Mac]. Un dialogue vivifiant qui offre une plus
grande visibilité à la pratique amateur - 600 personnes inscrites en 2010 - et une vitrine originale
à la création contemporaine marseillaise. D’autant
que toutes ces œuvres ont pour socle commun la
thématique «Les parts de l’ombre : matérialités
et fictions».
À l’heure des derniers préparatifs, les ateliers
sont une ruche bourdonnante où chacun s’affaire
à passer de la maquette à la réalisation grandeur
nature ! Sur 11 ateliers disséminés dans la ville, 7
participent au festival sous la houlette des artistes-enseignants : Pierre-Louis Albert, Pierre
Archita, Bernard Briançon, Françoise Buadas,
Pierre Chanoine, Christiane Parodi et Gilles
Traquini. Si leur approche pédagogique repose
sur la pratique artistique et la sensibilisation
esthétique, chacun développe son univers, apporte sa propre couleur, initie à des techniques
différentes selon une méthodologie personnelle.
De cette diversité naissent au bout du compte, et
l’exposition en est un révélateur, autant de propositions artistiques que de stagiaires (adultes,
redoublent d’énergie et de motivation pour
finaliser leurs projets. Mais au-delà, remarque
Christiane Parodi qui encadre les ateliers La
Sauvagère et cours Lieutaud, «le travail en atelier
allie plaisir et rigueur, crée du lien social, de la
convivialité et un vrai sens du partage entre des
hommes et des femmes de tous âges et de toutes
conditions». Sur le site de Maison Blanche, installations, livres-objets, peintures sur bâches,
performances et sculptures se révèleront au
public à la lumière d’une manifestation qui
interroge, plus largement, la part de l’ombre dans
l’art.
MARIE GODFRIN-GUIDICELLI
(*) Boris Chouvellon, Gilles Desplanques, Olivier
Grossetête, Caroline le Méhauté, Aymeric Louis,
Yazid Oulab, Laurent Perbos, Géraldine Py &
Roberto Verde, Solange Triger, Lionel Scoccimaro,
Sandro Della Noce.
Les Arts éphémères
du 20 mai au 9 juin
04 91 14 63 26
Ateliers publics de l’ESBAM
04 91 82 83 11
www.esbam.fr
76
ARTS VISUELS
AU PROGRAMME
Art et économie
La CCI Marseille Provence lance son 3e Concours artistique, sur le thème
de l’économie du territoire, renouant avec la tradition de commandes
aux artistes (peintre, sculpteur, plasticien, photographe, vidéaste) tout
en constituant sa collection d’art contemporain. Les postulants devront
faire preuve d’inventivité pour évoquer le monde du travail, les nouvelles
technologies ou le patrimoine économique et culturel…
À la clef, une exposition au Palais de la Bourse le 24 septembre
et, pourquoi pas, l’acquisition de l’œuvre par la CCI ?
M.G.-G.
CCI Marseille Provence, Marseille
Projet à déposer avant le 7 juin 2010
www.ccimp.com
Dragibus, Laurent Perbos, l’un des lauréats 2009 © X-D.R
10 bougies design !
L’exposition Siège social aux Archives municipales de Marseille en 2000 marquait le top départ du
Centredesignmarseille. 10 ans après, il fête son anniversaire autour de 3 événements :
l’exposition de peinture d’Enrico Freitag en binôme avec la ligne design Italesse (vernissage mardi
18 mai 18h) ; SpiringSpirit, une cueillette design à petits prix alliant arts de la table et
gourmandises (28 et 29 mai) ; et enfin, l’inauguration du 3e Débarquements d’idées sur la plage du
Prophète avec l’installation d’une «bibliothèque de plage» (6 juin).
M.G.-G.
Les 10 ans du CDM, Marseille
04 91 54 08 88
www.designmarseille.org
8
x1
3
b-1
ku
iks
b
Ru
Éphémères durable
B. Chouvellon, G. Desplanques, O. Grossetête, C. Le Méhauté, A. Louis, Y. Oulab, L. Perbos,
G. Py & R. Verde, S. Triger, L. Scoccimaro… et les ateliers amateurs de l’Esbam,
le festival s’étoffe et combine promotion de l’art contemporain,
transmission des savoirs pour pérenniser le projet au-delà de 2013. C.L
Festival des Arts Ephémères 2e édition
du 21 mai au 9 juin
Bastide et parc de Maison Blanche, Marseille
04 91 14 63 26
Robert Blanc /L’âge d’or. N°1 «Le Banquet»
Papier arches marouflé sur caisson médium balsa, encre de chine
- 90 x 90 x 3,3cm
Pont flottant, croquis, 2010, Olivier Grossetête © X-D.R
Traces
Suite au succès public de Traits…confidentiels en 2008, Arteum invite
quatorze artistes à fourbir leurs armes graphiques pour servir cet art du
geste et de la trace en pleine renaissance. Car selon Cy Twombly, «chaque
trait est habité par sa propre histoire». C.L.
Traits…particuliers
du 2 juin au 17 juillet
Musée d’art contemporain Arteum,
Châteauneuf le Rouge
04 42 58 61 53
www.mac-arteum.net
ARTS VISUELS
77
SM’ART
et ça repart
Qu’est-ce qui fait courir
les artistes et le public à SM’ART ?
L'atelier au Paradou,1992
© X-D.R
Il dirait le Sud
Pierre Alechinsky fera les beaux jours d’Aix. Le musée Granet brosse
un large panorama constitué des œuvres liées à ses nombreux séjours
dans le Midi de la France : les travaux à l’encre, huiles, estampages,
céramiques, ouvrages de bibliophilie, dessins, aquarelles…
Chez Alain Paire livres et lithographies réalisés avec les éditions
Fata Morgana. C.L.
Alechinsky, les ateliers du Midi
du 5 juin au 3 octobre
Musée Granet, Aix
04 42 52 88 32
www.museegranet-aixenprovence.fr
Pierre Alechinsky et les éditions Fata Morgana
du 5 juin au 31 juillet
Galerie Alain Paire, Aix
04 42 96 23 67
www.galerie-alain-paire.com
M.G.-G.
Little Buxy Rosso Pop dans l'entreprise À Juste titres © X-D.R
Sculptures silencieuses
Difficile de passer à côté de ce Parcours de ville en compagnie
du sculpteur vauclusien Jean-François Coadou qui déploie dans trois lieux
aixois la puissante matérialité de son œuvre. Et, pour mieux appréhender
la «face nord» et la «face sud» de ses objets, la galerie Alain Paire propose,
en collaboration avec les Écritures croisées, une lecture d’extraits
de La montagne de l’âme de Gao Xingjiang par Jean-François Coadou,
Odile Solomon et Alain Paire (vendredi 28 mai 19h).
M.G.-G.
Parcours de ville
Jean-François
Coadou
jusqu’au 29 mai
Galerie Alain Paire,
Aix
04 42 96 23 67
Jardin de Colette
Delmas, Aix
06 10 07 62 35
jusqu’au 28 août
Atelier Cézanne, Aix
04 42 21 06 53
150 artistes ont rendez-vous au
Domaine de la Baume à Aix-enProvence pour le 5e SM’ART créé par
Christiane Michel, agent artistique
et commissaire d’exposition. Depuis
leur inscription sur le site du salon,
leur candidature a été passée au
filtre du comité de sélection* qui leur
a octroyé un stand, moyennant
finance, car SM’ART est une
initiative exclusivement privée.
Tandis que 12 000 visiteurs sont
HENG, Street Art Risen © X-D.R
attendus sur 4 jours ! Un succès qui
s’explique par sa double fonction, à la fois tremplin et vitrine, et son double
positionnement, public et professionnel. Car la volonté des organisateurs est
claire : présenter un ensemble éclectique de mediums et de tendances pour
offrir à tous les publics - éclairé ou néophyte - un vaste panorama de la
création actuelle. Ce qui a l’heur de leur plaire puisque 638 ventes ont été
conclues en 2009 ! C’est aussi pour beaucoup d’artistes une rampe de
lancement auprès des galeristes qui viennent en repérage et faire leur
marché : reconnus par leurs pairs, certains voient leur carrière décoller
constate Christiane Michel… Un salon, somme toute classique, qui s’enrichit
de temps de réflexion ouverts à tous, notamment sur le mécénat et la
défiscalisation qui avait réuni 140 chefs d’entreprises lors de son premier
coup d’essai en 2001. Cette année, il réapparaît dans le programme,
accompagné d’un deuxième débat sur les droits d’auteurs et les droits de
reproductions qui intéressent autant les professionnels que les familles qui
ont dans leurs armoires des trésors enfouis… Enfin, pour répondre à une
démarche «citoyenne», SM’ART poursuit son action humanitaire et
accompagne en 2010 l’association Mécénat Chirurgie cardiaque «Enfants du
monde» et Sourire à la vie de Marseille.
Equation, Jean François Coadou, sculpture en métal © X-D.R
SM’ART
du 4 au 7 juin
Domaine
de la Baume,
Aix-en-Provence
www.salonsmartaix.com
(*) Comité de sélection
composé «d’un
homme
de lettres, d’un
philosophe, de deux
collectionneurs, d’un
critique d’art, d’un
néophyte
et de Christiane
Michel»
78
RENCONTRES
Libraires du sud /Libraires à Marseille 04 96 12 43 42
Itinérances littéraires : rencontre avec Kéthévane
Davrichewy pour son ouvrage La Mer noire
(Sabine Wespieser éditeur, 2010) le 26 mai à
18h30 à la librairie Actes Sud (Arles), le 27
mai à 19h à la librairie La Mémoire du Monde
(Avignon) et le 28 mai à 19h à la librairie Aux
Vents des mots (Gardanne) ; rencontre avec
David Vann pour son roman Sukkwan Island
(Ed. Gallmeister, 2009) le 8 juin à 18h à la
librairie Le Lézard amoureux (Cavaillon), le 9
juin à 19h à la librairie l’Odeur du temps
(Marseille), le 17 juin à 18h30 à la librairie Le
Petit pois (Manosque) et le 18 juin à 18h à la
librairie la Carline (Forcalquier).
Escales en librairies : rencontre avec Joseph
Boyden le 26 mai à 19h à la librairie Aux
Vents des mots (Gardanne) et le 27 mai à 19h
à la librairie L’Attrape mots (Marseille) ;
rencontre avec Lionel Naccache le 10 juin à
17h30 à la librairie Prado Paradis (Marseille)
et le 11 juin à 18h30 à la librairie Goulard
(Aix) ; rencontre avec Marc Kravetz le 17 juin
à 19h à la librairie Le Lièvre de Mars
(Marseille) et le 18 juin à 18h30 à la librairie
Au Poivre d’Âne (La Ciotat).
AIX-EN-PROVENCE
Cité du livre – 04 42 91 98 88
La nuit du conte, carte blanche à Catherine
Zarcate, Sam Cannarozzi et Victor Cova Correa.
Le 21 mai de 20h à 23h.
Conférence de Jacques Mény, Président des
Amis de Jean Giono, vice-président de la
Fédération nationale des maisons d’écrivains
et des patrimoines littéraires sur Les maisons
d’écrivains, lieux de culture vivante.
Le 28 mai à 18h30.
Les Écritures croisées – 04 42 26 16 85
Rencontres avec les écrivains coréens Shin
Kyung-Sook, Hwang Sok-Yong, Lee Seung-U
et Kim Young-Ha, animées par Jean-Claude
de Crescenzo. Le 4 juin à 18h.
Librairie Book in Bar – 04 42 26 60 07
Rencontre dédicace avec David Vann pour son
livre Sukkwan Island (éd Gallmeister, 2009),
le 10 juin à 17h30 ; rencontre avec Reginald
Marsh-Feiley pour son livre autobiographique
A Poor Lookout, le 27 mai à 17h30.
Festival Seconde Nature – 04 42 64 61 00
Festival pluridisciplinaire qui présente créations
Mensuel gratuit paraissant
le deuxième jeudi du mois
Edité à 28 000 exemplaires
imprimés sur papier recyclé
Edité par Zibeline SARL
76 avenue de la Panouse | n°11
13009 Marseille
Dépôt légal : janvier 2008
Directrice de publication
Agnès Freschel
Imprimé par Rotimpress
17181 Aiguaviva (Esp.)
photo couverture
ZARAFA
© Agnès Mellon
Conception maquette
Max Minniti
Rédactrice en chef
Agnès Freschel
[email protected]
06 09 08 30 34
AU PROGRAMME | ADHÉRENTS
sonores, visuelles, plastiques, multimédia…
Du 2 au 12 juin.
APT
Association Le goût de lire en pays d’Apt –
04 90 04 05 97
2e édition du salon du livre en pays d’Apt sur
le thème Voyage en salon : rencontres avec des
éditeurs et des auteurs, stands de livres, ateliers,
lectures… Du 26 au 29 mai.
ARLES
Muséon Arlaten – 04 90 93 58 11
Le musée est fermé pour rénovation jusqu’en
2014, mais les activités continuent hors les
murs : projection-rencontre avec Le Temps des
carnavals, film de Pierre Willemin, le 3 juin à
18h30 à la médiathèque d’Arles ; exposition
Jours de fêtes aux ABD Gaston Defferre, du 26
mai au 23 décembre.
Atelier Archipel – 06 21 29 11 92
Exposition de Jany Garbouge-Floutier et Laura
Jonneskindt, Livres autrement : plus de 200
livres pliés (sculptures) de J. Garbouge-Floutier
et des macrophotographies de L. Jonneskindt.
Du 6 au 27 juin.
Le Méjan – 04 90 49 56 78
Correspondances amoureuses du Moyen Âge à nos
jours, lecture par Marie-Christine Barrault et
Charles Gonzalès. Le 25 mai à 20h30.
Palais de Luppé – 04 90 49 94 04
Exposition Le sentiment de la maison, collection d’art contemporain dédiée à Vincent Van
Gogh. Jusqu’au 27 juin.
Galerie Voies Off – 04 90 96 93 82
Exposition Rhodanie : photographies de Bertrand Stofleth du 20 mai au 20 juin. Vernissage
le 20 mai à 19h. Conférence-projection autour
de l’expo au Musée départemental de l’Arles
Antique le 19 mai à 18h30.
BAUDUEN
Editions Parole – 04 94 80 76 58
Soupes aux livres organisées à Puget-ville le 5
juin à 17h30, La Palud-sur-Verdon le 12 juin
à 18h30, le 18 juin à 18h30 à Bergemon et le
26 juin à 18h30 à Cannes à 18h30.
Rendez-vous le 22 mai à partir de 18h à la
librairie Regain de Reillanes (04) pour une lecture à plusieurs voix de Rosentahl, une enfance
australienne de Juliet Schlunke ; le 23 mai à la
21e foire bio de Signes (83) avec Le pain, le
Secrétaire de rédaction
spectacles et magazine
Dominique Marçon
[email protected]
06 23 00 65 42
Secrétaire de rédaction
Jeunesse et arts visuels
Marie Godfrin-Guidicelli
[email protected]
06 64 97 51 56
Société
Chris Bourgue
[email protected]
06 03 58 65 96
levain et les gènes, livre de François Roddier qui
donnera une conférence sur Qu’est ce que
l’évolution ? de 14h à 15h30 ; le 27 mai à Salernes
(83) pour présenter Le cahier rouge du maquis
à l’occasion de la projection du film de Walter
Bassam Retour en résistance ; et le 20 juin au
salon du livre de Sainte-Cécile-les-Vignes (84)
pour la sortie du livre d’Agnès Pastourel
Presque encyclopédie de la vigne et du vin.
ENSUES-LA-REDONNE
Médiathèque municipale – 04 42 45 72 87
1er Salon du livre : rencontre avec des auteurs,
spectacle de contes avec Marie Ricard, conférence de Maurice Gouiran, en présence d’André
Fortin, Jean Contrucci, Pierre Grafféo et Philippe
Carrese (sous-réserve) sur le thème Marseille,
terre de polar ?. Le 29 mai.
2e édition de la Foire aux livres.
Le 30 mai à 14h30.
FORCALQUIER
Association Forcalquier des livres –
04 92 75 09 59
L’art de mai avec l’artiste Phet Cheng Suor :
exposition de peinture, installations et livres
d’artistes, atelier de fabrication de livre d’artiste
sur le thème de l’herbier et Pique-nique
partageur et bavard (le 23 mai à 12h, jardin du
Couvent des Cordeliers). Du 21 au 24 mai.
Librairie La Carline – 04 92 75 01 25
Rencontre avec l’éditeur Michel Foissier et
Pierre Lieutaghi, préfacier du livre L’Autre face
du monde (Éd. Propos 2) sur le peintre Pierre
Humbert. Le 27 mai à 19h.
Association Apérilivres – 04 92 74 53 52
Festival Impressions d’arts sur le thème L’or
des femmes : chemins de la création au féminin. Le festival vise à montrer la richesse et la
diversité de la création féminine. Du 11 au 13 juin.
ISTRES
CEC Les Heures Claires – 04 42 41 15 74
2e édition de Ivres de livres, salon du livre
jeunesse sur le thème Raconte-moi une histoire autrement : rencontres avec auteurs et
illustrateurs. Du 3 au 6 juin.
LA CIOTAT
Librairie Au Poivre d’Âne 04 42 71 96 93
Rencontre avec Patrick Gérard pour son livre
Musique et disques
Jacques Freschel
[email protected]
06 20 42 40 57
Histoire et patrimoine
René Diaz
[email protected]
Frédéric Isoletta
[email protected]
06 03 99 40 07
Polyvolantes
Maryvonne Colombani
[email protected]
06 62 10 15 75
Cinéma
Annie Gava
[email protected]
06 86 94 70 44
Delphine Michelangeli
[email protected]
06 65 79 81 10
Élise Padovani
[email protected]
Arts Visuels
Claude Lorin
[email protected]
06 25 54 42 22
Philosophie
Régis Vlachos
[email protected]
Livres
Fred Robert
[email protected]
06 82 84 88 94
Sciences et techniques
Yves Berchadsky
[email protected]
Je n’ai jamais été vieille ! (éd. L’Harmattan). Le
20 mai à 18h30.
L’ISLE-SUR-LA-SORGUES
Espace associatif municipal – 04 90 38 67 81
Trace de poète : Un dialogue entre poésie,
philosophie, musique et arts plastiques.
Du 1er au 14 juin.
MARSEILLE
Association Apatala c/o Mille Bâbords –
04 91 90 89 21
Dans le cadre des Ciné rencontres qui auront
lieu du 7 au 27 juin prochain, l’association
Apatapela, en partenariat avec Film Flamme,
recherche quatre jeunes de 18 et 25 ans,
souhaitant participer à un atelier de réalisation
en 16mm, ainsi qu’à tout un programme de
rencontres autour du cinéma avec des jeunes
gens venant du Chili, de Bolivie, du pays
basque espagnol. Ils pourront ainsi s’initier à
l’image et au son durant trois semaines. Le film
réalisé sera proposé à la diffusion auprès de
différentes structures afin de valoriser le projet
et le travail des jeunes et inciter d’autres
structures à développer de nouvelles formes de
coopération sud/sud entre les jeunes.
Théâtre La Criée – 04 91 54 70 54
Collecte de livres pour les enfants de la Timone
organisée à l’occasion du spectacle Il était une
fois… les fablesmis en scène par William Mesguich.
Thème retenu : contes et fables du monde. Les
livres neufs (pour des raisons d’hygiène) collectés seront mis à la disposition du Centre
scolaire de l’Hôpital de la Timone Enfants et
profiteront à tous les enfants hospitalisés.
Jusqu’au 29 mai dans le hall du théâtre.
La Baleine qui dit «Vagues» - 04 91 48 95 60
2e édition des Oralies, festival des contes voyageurs et 10e édition du Salon du livre de contes:
signatures, spectacles… Du 21 au 23 mai.
CRDP – 04 91 14 13 40
2e édition du salon des éditeurs avec les principaux éditeurs scolaires et jeunesse.
Le 26 mai de 9h à 18h.
Dernière rencontre culturelle du CRDP
organisée en partenariat avec l’OCCE et le
théâtre Massalia : carte blanche à Joël Jouanneau
qui lira 2 textes inédits, Mon Eden Cinéma et
Le Colibri des Andes, suivie de la projection du
film Les Amantes d’après l’œuvre d’Elfriede
Jelinek. Le 20 mai.
Marie-Jo Dhô
[email protected]
Maquettiste
Philippe Perotti
[email protected]
06 19 62 03 61
Ont également participé à ce numéro :
Dan Warzy, Yves Bergé, Susan Bel,
Pierre-Alain Hoyet, Aude Fanlo,
Christophe Floquet, christine rey,
Jean-Mathieu Colombani, Rémy
Galvain, Hudgard, Sonia Isoletta
Photographe :
Agnès Mellon
095 095 61 70
photographeagnesmellon.blogspot.com
Directrice commerciale
Véronique Linais
[email protected]
06 63 70 64 18
Attachée commerciale
Nathalie Simon
[email protected]
06 08 95 25 47
Librairie l’Odeur du temps – 04 91 54 81 56
Lecture d’extraits de Abonder de et par Antoine
Dufeu. Le 27 mai à 19h.
Librairie Histoire de l’œil – 04 91 48 29 92
Lecture d’extraits de ses textes par Alain Jugnon.
Le 29 mai à 19h.
Montévidéo – 04 91 37 14 04
Soirées Manifesten : lectures de Petit traité de
scissiparité de Henri-Pierre Jeudy et Maria
Claudia Galera (le 21 mai à 20h) et Comme
un fracas, une chronique de et par JacquesHenri Michot (le 21 mai à 21h) ; présentation
de Pour une pensée-action, vivre et agir contre du
collectif Contre-Attaques / perspective 1 :
Michel Surya (le 28 mai à 18h), lecture de Duo
de duo (le 28 mai à 20h) et de La poétesse et
Lettres de Sainte Catherine de Sienne par Liliane
Giraudon et Robert Cantarella (le 28 mai à
21h30).
ABD Gaston Deferre - 04 91 08 61 00
Ecrivains en dialogue : Rencontre avec MarieHélène Lafon et Xavier Bazot sur le thème Des
corps et des voix en partenariat avec l’assciation
Des auteurs aux lecteurs. Le 8 juin à 18h30.
Galerie Montgrand – ESBAM– 04 91 33 99 11
Documents sonores, exposition réalisée dans le
cadre d’une résidence de Pierre-Yves Macé avec
les étudiants. Du 26 au 29 mai.
Editions Parenthèses – 04 95 08 18 20
A l’occasion de la parution du livre de Patrick
Williams Les quatre vies posthumes de Django
Reinhardt, Parenthèses et Émouvances proposent Django Reinhardt, une fiction ?, sur des
textes de Patrick Williams et avec la guitare de
Raymond Boni. Le 28 mai à 18h.
Espace Ecureuil – 04 91 57 26 49
Conférence organisée par l’association Science
Technologie Société Histoire des neurosciences.
Le 25 mai à 18h30.
Horizontes del Sur – 04 91 08 53 78
8e édition du festival L’Espagne des trois cultures : danse, expositions, concerts, rencontres
littéraires, théâtre, cinéma avec des artistes
venus du Maroc, de Catalogne, de Murcie,
d’Algérie… Du 21 avril au 27 mai.
Association Bulle It – 04 91 94 29 13
Rencontres critiques autour de la BD : six
albums sélectionnés, quatre chroniqueurs, un
animateur. Le 27 mai à 20h.
CIPM – 04 91 91 26 45
Rencontre avec Pascal Quignard pour son
livre Lycophron et Zétès (Gallimard, 2010).
Entretien et lecture d’extraits avec Alain Veinstein.
Le 28 mai à 19h.
Exposition de Jean-Pierre Bertrand De ce qui se
fera – De ce qui sera fait, du 21 mai au 27 juin.
Vernissage le 21 mai à 18h30.
BMVR Alcazar – 04 91 55 56 34
Rencontre/débat par Didier Daeninckx et
Jean-Paul Delfino sur La part de l’homme dans
le polar avec les Cahiers de l’Ecailler. Le 4 juin.
Conférence de Dominique Cardon, sur les
nouvelles technologies de la relation : Nos
«amis» sont-ils vraiment des amis ?. Le 8 juin à
18h30.
Conférence de Jean-François Guégan, épidémiologiste, sur Des perturbations à haut risque :
pour mieux comprendre les multiples et complexes interactions entre environnement et
santé humaine. Le 26 mai à 17h en salle de
conférence.
Conférence proposée par l’Assistance Publique-Hôpitaux de Marseille sur L’humain à
part entière : humanisation et médicalisation en
Méditerranée. Le 29 mai à 9h30.
Association Lumin’Arts – 06 27 81 37 00
Festival Etang d’Arts : «La Planète comme toile de
fond, l’Art comme moyen d’expression», tel est le
propos de ce festival qui mêle danse, cirque,
arts de la rue, théâtre, cinéma, musique, et un
village d’artistes et artisans qui présentent leurs
produits et œuvres d’art plastique. Les 21 et
22 mai.
Altermundi – 04 91 08 53 99
Exposition d’Annaïg Dumarais, créatrice de
mobilier en carton. Du 21 mai au 30 juin.
Vernissage le 21 mai à 18h.
Institut Culturel Italien
– 04 91 48 51 94
Rencontre autour de la présentation du livre
La pêche du thon rouge en Tunisie de Luc Corso.
Le 26 mai à 18h.
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Le Greffier de Saint-Yves (Marseille 1er)
MARTIGUES
Musée Ziem - 04 42 41 39 50
Conférence de Sylvie Thorel-Cailleteau,
professeur de littérature à l’université Charlesde-Gaulle, Lille 3, sur Le paysage dans la pensée
symboliste. Le 20 mai à 17h30.
NÎMES
Compagnie La Poudrière – 06 61 96 62 79
La cie La Poudrière s’associe au Théâtre de
Nîmes et au Théâtre le Périscope pour recevoir
l’auteure Sabine Tamisier du 26 au 29 mai : le
26 mai chez l’habitant à Nîmes (résa 04 66 76
10 56), le 28 mai avec l’ATP de Nîmes à Saze
(résa 04 66 67 63 03) et le 29 mai à 18h30
avec le théâtre de Nîmes dans la Cour de
l’Hôtel Boudon (résa 04 66 36 65 10).
ORANGE
Théâtre Antique et Musée – 04 90 51 17 60
Conférence avec Jean-Claude Golvin, architecte DPLG et directeur de recherche au
CNRS, sur Le théâtre dans l’Empire romain
dans le cadre de l’exposition Voyage au cœur
des Théâtres Antiques de la Méditerranée. Le
22 mai à 15h.
SAINT-RÉMY
Musée Estrine – 04 90 92 34 72
Exposition La Réalité retrouvée, la jeune peinture, Paris, 1948-1958. Du 19 juin au 12
septembre.
VEYNES
Mairie – 04 92 57 24 23
15e Printemps du livre de jeunesse sur le thème
Dis Mamie, c’était comment avant ?. Du 20
au 22 mai.
VILLENEUVE-LEZ-AVIGNON
La Chartreuse – 04 90 15 24 24
Lecture de textes par Bruno Allain et Matéi
Visniec et présentation du travail en cours de
2 cies, En vie par la cie migratori K merado /
Sébastien Derrey et Avec Vannina maetri par la
cie comme ça / Muriel Piqué. Le 20 mai à
18h30.
Le Gymnase
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pour Les nouvelles brèves de comptoir
de Jean-Marie Gourio
mes de Jean-Michel Ribes
le 1er juin à 20h30
le 2 juin à 19h
le 3 juin à 20h30
Réservations : [email protected]
librairie générale et juridique
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Le Sémaphore (Port-de-Bouc)
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Le 21 mai
04 42 06 39 09
Le Vélo Théâtre (Apt)
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cie les Ateliers du spectacle
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le 9 juin
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